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La lutte contre la criminalité financière au Cameroun

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par Arsène Gérard ESSONO EDOU
Université de Yaoundé II - Diplôme dà¢â‚¬â„¢Etudes Approfondies 2012
  

Disponible en mode multipage

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    INTRODUCTION GENERALE

    « Vous savez mieux que moi, quels que soient nos efforts, que l'argent est la clef de tous les grands ressorts, et que ce doux métal qui frappe tant de têtes, en amour comme en guerre, avance les conquêtes»

    MOLIERE, L'école des femmes, Acte I, Scène 4

    « Ne t'appuies pas sur des richesses injustement acquises, elles ne te serviront de rien au jour de la détresse »

    SIRACIDE 5 :8

    Le développement du capitalisme et l'érection de l'argent au seuil de seul moyen pour s'en sortir et se faire respecter dans la vie ont amené les individus à rechercher de manière de plus en plus ardue les moyens pour obtenir plus d'argent, beaucoup plus, encore plus. De plus, les différentes crises économiques qu'a connues le monde au cours du 20e et du début du 21e siècle ont renforcé dans l'imaginaire populaire ce désir de rechercher de l'argent, par quelque moyen que ce soit. Ces crises économiques ont entrainé la nécessité de protéger certaines activités économiques et commerciales, surtout privées, l'organisation des marchés et la création des comités de surveillance des prix. Cependant, alors que les activités économiques connaissaient un réel essor sur la scène internationale et que leurs mesures de protection se renforçaient, un nouveau type de criminalité s'est organisé autour des activités génératrices de revenus, et connait chaque jour une évolution de plus en plus sophistiquée.

    Sur la scène internationale, l'actualité juridique et judiciaire est de plus en plus marquée par de grands scandales financiers, tels l'affaire Enron1(*) qui a défrayé la chronique aux Etats-Unis dans les années 80. Les scandales financiers se multiplient de plus en plus, au fil de l'évolution des économies nationales, mettant à jour un nouveau type de criminalité, appelé criminalité financière. Cela entraine l'organisation de colloques et conférences internationales, afin de sensibiliser les Nations et d'harmoniser la lutte contre ces nouvelles formes de criminalité.

    Au Cameroun, face à la situation économique du pays, rendue encore plus difficile par la crise économique des années 90, le gouvernement a dû prendre des mesures permettant de limiter au maximum la sortie frauduleuse du pays, de capitaux de toutes natures. C'est dans ce contexte que se situe la lutte contre la criminalité financière dans ce pays dont l'actualité judiciaire nationale a été marquée ces derniers temps par une médiatisation forte des procès engagés par l'Etat contre les criminels financiers. Afin de nous permettre de comprendre la lutte engagée par les autorités camerounaises, il s'avérait intéressant d'étudier le système camerounais de lutte contre la criminalité financière.

    Pour comprendre le sens de la criminalité financière, il faut au préalable procéder à une délimitation du sujet. Ainsi donc, l'étude de la répression de la criminalité financière s'inscrit dans le cadre plus vaste du Droit pénal des affaires, qui désigne« la branche du droit ayant pour objet la prévention et la répression des infractions »2(*) touchant à la réglementation de la vie économique. La criminalité financière est donc un type de criminalité, dont la particularité est de s'exercer essentiellement dans le cadre des diverses composantes de la vie économique.

    Pour mieux comprendre la criminalité financière, il est nécessaire de la distinguer de notions voisines telle la criminalité en col blanc. Cette dernière désigne, selon Geneviève GIUDICELLI-DELAGE, « l'acte d'une personne d'un statut socio-économique élevé, respectable et respectée, qui viole une règle, légale ou pas, relative à ses activités professionnelles, cet acte consistant en l'exploitation de la confiance et de la crédulité des autres et étant réalisé de manière ingénieuse excluant presque sa découverte. »3(*) Ainsi donc, alors que la criminalité financière désigne un type de criminalité s'exerçant dans un domaine déterminé et pouvant être commis par tout le monde, celle en col blanc fait plus référence à un type de criminalité commis par une catégorie de personnes.

    Selon ce même auteur, la criminalité financière présente certaines caractéristiques principales qui en font un type de criminalité à part entière, parmi lesquelles on pourrait citer :

    - Une représentation forte des dirigeants des sociétés commerciales les plus fragiles ;

    - Une répartition différente des cas de commission des infractions selon les classes sociales, par rapport à la criminalité en général ;

    - Une forte représentation de la petite bourgeoisie et des dirigeants d'entreprises ;

    - Une sous représentation des ouvriers, employés et des marginaux.4(*)

    Parler de la lutte contre un type de criminalité entraine l'étude de la prévention et de la répression de cette criminalité. Considérée comme étant« l'action de réprimer incluant l'incrimination des faits délictueux, la poursuite de leurs auteurs et l'infliction des peines. »5(*), la répression se distingue de la prévention, qui est « l'ensemble de mesures et institutions destinées à empêcher - ou au moins à limiter - l'accomplissement d'actes nuisibles, en s'efforçant d'en supprimer les causes et les moyens. 6(*)»La criminalité financière en revanche« s'entend de toutes les infractions qui violent les normes légales faites par l'Etat pour réglementer la vie des affaires. »7(*) Elle désigne aussi « les activités financières illégales, échappant aux lois des différents pays. »8(*) On peut enfin l'appréhender comme étant l' « ensemble des agissements antisociaux punis de peines criminelles » et ayant trait « aux capitaux, à leur gestion, aux activités et opérations qui s'y rapportent, spécialement aux mouvements et placements de fonds. »9(*)Notre devoir s'attellera donc à faire l'étude du système mis en place au Cameroun afin de poursuivre et sanctionner les auteurs d'actes antisociaux dirigés contre la fortune privée ou publique.

    Pour arriver à élaborer notre travail de recherche, nous nous sommes servis de plusieurs éléments bibliographiques, dont chacun a eu à jouer un rôle déterminant dans l'évolution de ce travail. Afin de réussir à délimiter notre sujet, plusieurs ouvrages généraux ont été mis à contribution, tels le Traité de Droit Criminel, Tome 1 : problèmes généraux de la science criminelle10(*), éd. CUJAS de Messieurs Roger MERLE et VITU, ou encore l'ouvrage de Droit pénal général11(*), éd. CUJAS de Jean PRADEL. Ces ouvrages ont permis de mieux aborder des notions générales de Droit pénal telles que la peine, la sanction, l'infraction, ou encore des principes comme celui de l'irresponsabilité pénale des personnes morales. Parmi ces ouvrages généraux, nous ne saurions manquer de signaler le rôle du traité Des délits et des peines12(*) du marquis Cesare BECCARIA, qui nous a permis d'avoir un autre regard sur le principe de la légalité criminelle Cet ouvrage, bien que n'étant pas très souvent cité et qui est présenté comme étant l'avènement du principe de légalité criminelle, nous a particulièrement enseigné sur l'utilité de certaines peines, la nécessité de faire connaître les comportements qualifiés de criminels avant d'en punir les auteurs.

    A côté de ces ouvrages généraux, d'autres, plus spécifiques au domaine étudié, telle la publication du Syndicat de la Magistrature ATTAC, En finir avec la criminalité économique et financière13(*), ou encore l'article du Professeur NCHIMI MEBU Jeanne, « la problématique répression de la corruption en Droit camerounais »14(*), nous ont aidé à proposer une étude complète et détaillée de la criminalité financière. Ils nous ont aussi permis de mieux comprendre les problèmes posés par cette criminalité et d'en proposer des solutions adéquates.

    Notre travail portant essentiellement sur l'analyse d'un corpus juris, il était nécessaire, voire obligatoire de nous appuyer sur l'ensemble de textes juridiques réglementant la lutte contre la criminalité financière. Cela a été fait, à travers une étude de textes nationaux tels le Code pénal camerounais et la Loi N°2003/008 du 10 juillet 2003 portant prévention et répression des infractions contenues dans les Actes uniformes OHADA.Ces différents textes ont été utiles dans la définition apportée aux infractions financières par les autorités nationales, ainsi que dans la présentation du système mis en place pour les sanctionner.

    La répression de la criminalité financière telle qu'elle est organisée au Cameroun subissant l'influence des mesures internationales, nous n'aurions pas pu travailler sans situer notre devoir dans un cadre international, avec les textes tels la Convention des Nations Unies du 31 Octobre 2003 contre la corruption, qui élabore un cadre international de coopération en matière de lutte contre la corruption.

    Au-delà de tous ces ouvrages et textes, nous avons aussi bénéficié de l'aide de la documentation de l'Université de Yaoundé II, avec diverses thèses et mémoires, telles la thèse du Docteur Simon Pierre MFOMO sur la lutte contre la corruption au Cameroun15(*). Celle-ci propose des améliorations possibles, permettant d'avoir une lutte efficiente contre l'infraction de corruption au Cameroun. Enfin, à travers l'outil internet, il nous a été facile de visiter des sites qui nous ont proposé plusieurs articles intéressant notre sujet, ainsi que d'autres informations. Le résultat de tout ce travail de recherche a conduit à la rédaction de ce mémoire de fin d'études.

    L'exploitation des documents et ouvrages suscités nous a conduits à nous poser la question de savoir : comment est organisée la lutte contre la criminalité financière au Cameroun ? Quels sont les moyens mis en oeuvre par les autorités camerounaises pour y parvenir ?

    Pour apporter des réponses à ces questions, notre hypothèse de recherche était la suivante : le système de lutte contre la criminalité financière mis en place par les autorités camerounaises porte des fruits mais gagnerait à être amélioré, afin de répondre de manière optimale aux attentes qui sont placées en lui. Afin de confirmer cette hypothèse générale, nous sommes partis des deux hypothèses secondaires suivantes : Le système de répression de la criminalité financière tel qu'il se présente au Cameroun a des résultats positifs, et le système de répression de la criminalité financière applicable au Cameroun connait des difficultés auxquelles il est possible de pallier. Notre première hypothèse secondaire a été vérifiée partiellement et la deuxième a été confirmée, ce qui nous a permis de démontrer que le système de lutte contre la criminalité financière mis en place par le Cameroun apporte certes de bons résultats, mais rencontre des difficultés auxquelles il est possible de pallier.

    Dans notre tentative de confirmer nos hypothèses de recherche, l'objectif escompté était de produire un ouvrage permettant d'appréhender entièrement les institutions camerounaises en matière de lutte contre la criminalité financière, et d'apporter une réponse aux questions pouvant être posées sur l'efficacitédu système camerounaisface aux attentes placées en lui.

    Par ailleurs, l'on ne saurait nier l'intérêt certain d'une étude de la répression de la criminalité financière au Cameroun. En effet, d'abord, sur le plan juridique, cette étude permet de comprendre et maîtriser une organisation juridictionnelle et judiciaire, mise en place afin de faire face à un nouveau type de criminalité. Aussi, sur le plan économique, notre étude permet de s'interroger sur les moyens possibles de mettre fin à une situation qui porte gravement atteinte à la vie économique de l'Etat camerounais.

    Il est cependant utile de préciser que, pour ce qui est de notre sujet, nous nous sommes contentés d'examiner le cadre camerounais de répression de ce type de criminalité, sans chercher à aller au-delà de ces limites spatiales, sauf lorsque le législateur camerounais fera recours à l'ordre juridique international. De plus, dans l'étude du cadre camerounais de lutte contre la criminalité financière, nous nous sommes limités aux initiatives étatiques, sans envisager les différentes actions privées concourant à la lutte contre la criminalité financière au Cameroun.

    Pour ce faire, nous avons adopté une démarche analytique, à travers laquelle nous avons procédé à l'analyse du système juridique camerounais, pour le comprendre et nous permettre de nous interroger de manière adéquate sur son efficacité.

    Cette démarche analytique nous a amené à voir qu'avant d'entamer un questionnement sur la réussite ou l'amélioration possible du système de lutte de la criminalité financière au Cameroun (IIe Partie), il était nécessaire d'en faire une présentation détaillée (Ière Partie).

    Ière PARTIE :

    PRESENTATION ET ANALYSE DE LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    Autrefois négligée ou reléguée au rang de criminalité « secondaire » au profit des infractions de droit humanitaire, la criminalité financière a pris de l'ampleur à la fin du vingtième siècle et au début du siècle présent.

    Auparavant mise de côté en ce qui concerne l'intérêt de ce type d'infractions au profit de certains pays classés parmi les « paradis fiscaux », l'Afrique connait aujourd'hui le phénomène de la criminalité financière à un niveau élevé. En effet, elle fait l'objet de convoitises multiples de la part des investisseurs, avec un marché grandissant et diversifié, et des législations souvent favorables.

     Au Cameroun particulièrement, l'intérêt de la répressiondes infractions financières est de plus en plus croissant, que ce soit au sein des populations que parmi les dirigeants16(*). Aussi, pour lutter contre ce type de criminalité, le Cameroun, à la suite de la société internationale, a décidé d'adopter un système propre à son ordre juridique interne, en plus des instruments internationaux existants.

    Afin d'étudier de manière approfondie le système camerounais de lutte contre la criminalité financière, il serait de bon ton de procéder à une présentation du traitement pénal de la criminalité financière au Cameroun (chapitre I), avant de procéder à une analyse de ce type de criminalité d'un genre particulier (chapitre II).

    CHAPITRE I :

    TRAITEMENT PENAL DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    La criminalité financière, on l'a vu, est constituée au Cameroun de plusieurs types d'infractions ayant en commun le fait qu'elles portent atteinte à la vie économique du pays. Pour y faire face, le Cameroun a dû adopter un système de lutte propre aux réalités nationales, qui tienne compte des multiples aléas de la société camerounaise. Ce système de lutte, assez complexe, s'appuie aussi bien sur une multitude de textes législatifs et réglementaires que sur des organes précis. De plus, la particularité du système camerounais de lutte contre la criminalité financière est que, pour certaines infractions, l'influence de l'ordre juridique international se fait beaucoup plus ressentir. Cela est dû, en grande partie, aux conséquences néfastes de ce type d'infractions, qui affectent non seulement l'ordre interne camerounais, mais aussi et surtout celui de la communauté régionale ou internationale toute entière. Dans le cadre de l'étude du système camerounais de lutte contre la criminalité financière, nous verrons dans un premier temps que la lutte contre la criminalité financière au Cameroun s'appuie sur une pluralité de textes nationaux et internationaux (Section I). Ensuite, cette lutte met en oeuvre l'action combinée d'organismes indépendants à côté des organes judiciaires traditionnels (Section II).

    Section I : LE CADRE LEGAL

    L'environnement juridique du Cameroun en matière de lutte contre la criminalité financière présente une certaine complexité, en raison des conséquences néfastes de ce type de criminalité. Ainsi, du fait que les infractions financières portent primordialement atteinte à l'ordre interne camerounais, le Cameroun a adopté plusieurs textes nationaux en matière de lutte contre la criminalité financière (Paragraphe I). Cependant, face à l'impact des infractions financières sur la société internationale, il a fallu répondre à la nécessité de protéger cette société, ce qui a été effectif à travers l'harmonisation de l'ordre juridique international. Aussi le système camerounais connait-il l'incorporation dans l'ordre juridique interne, de textes internationaux (Paragraphe II).

    Paragraphe 1 : LES TEXTES NATIONAUX EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE 

    Afin d'effectuer une étude des textes camerounais pris en matière de lutte contre la criminalité financière, nous verrons d'abord les différentes lois portant répression de la criminalité financière au Cameroun (A), avant d'appréhender les différents textes réglementaires dans ce domaine (B).

    A- Les textes législatifs

    Au Cameroun, la lutte contre la criminalité financière s'appuie essentiellement sur trois grands textes législatifs : Le Code Pénal (1), La Loi N°2003/008 du 10 Juillet 2003 portant prévention et répression des infractions contenues dans les Actes Uniformes OHADA (2), le Livre des Procédures Fiscales (3), la Loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 relative à la déclaration des biens et avoirs (4) et la loi N°2011/028 du 14 Décembre 2011 portant création d'un tribunal criminel spécial(5).

    1°) Le Code Pénal Camerounais

    Le Code pénal camerounais constitue le droit commun de la répression au Cameroun. C'est ainsi qu'il pose les règles de la répression des infractions de droit commun, tout comme celles des infractions financières.

    Ce Code pénal est divisé en deux parties : une consacrée aux dispositions générales, c'est-à-dire celles applicables à tous types d'infractions. Il en est ainsi par exemple de l'article 74 alinéa 2 qui pose le principe de la nécessité d'une intention délictuelle pour retenir la faute du délinquant. La deuxième partie du Code pénal camerounais est celle qui comporte des dispositions spéciales, applicables aux différentes infractions prises individuellement. C'est à ce niveau que l'on retrouve la plupart des infractions financières précédemment énumérées17(*).

    Expression de la volonté de l'Etat de mettre fin aux infractions financières, le Code pénal camerounais classe la plupart de ces infractions au rang des délits, et certaines au rang des crimes18(*). Ce qui permet de voir, à travers ce texte, que l'impact de la criminalité financière est pris en compte par les autorités camerounaises, et les mesures adéquates prises pour réprimer ce type d'agissements. Le Code pénal camerounais permet donc de sanctionner une criminalité financière de plus en plus nuisible à l'Etat.

    Une autre remarque à apporter sur le rôle joué par le Code pénal camerounais en matière de lutte contre la criminalité financière, est qu'il ne constitue pas uniquement un instrument de répression. En effet, au-delà de son rôle de sanction, le Code pénal camerounais a un rôle préventif non négligeable. En vertu de la maxime selon laquelle « nul n'est censé ignorer la Loi », le Code pénal camerounais avertit ceux qui sont soumis à son application des sanctions éventuelles qu'ils encourent en cas de commission de telle ou telle infraction. Cette mise en garde est censée avertir toute personne ayant l'intention de commettre une infraction, des sanctions qui lui seraient applicables. Ceci, dans le but de décourager les éventuels délinquants.

    Enfin, il faudrait signaler qu'en vertu de l'article 2 alinéa 3 du Code pénal, « lorsqu'une même matière fait l'objet à la fois d'une disposition générale non comprise dans le Code pénal et d'une disposition spéciale, cette dernière est seule applicable s'il n'en a pas été autrement disposé. »Le Code pénal camerounais reconnait ainsi l'existence et l'applicabilité d'autres textes comportant des dispositions pénales. Il en est ainsi de la plupart des infractions d'affaires, présentes dans la Loi N°2003/008 du 10 Juillet 2003.

    2°) La Loi N°2003/008 du 10 Juillet 2003 portant prévention et répression des infractions contenues dans les Actes Uniformes OHADA

    Au Cameroun, le Droit des affaires applicable est celui issu du Traité de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), ainsi que des Actes Uniformes de cette organisation, relatifs à des domaines particuliers de ce droit des affaires. Cependant, bien qu'énonçant les actes considérés comme indésirables et nuisibles à la vie des affaires, le Traité OHADA et les Actes Uniformes ne comportent aucune sanction particulière. Les éventuelles peines et autres mesures répressives à prendre ressortissent, selon les dispositions OHADA, de la compétence des Etats membres. Cela est dû, l'on s'en doute, à la particularité de la loi pénale, qui aime à rester propre à chaque Etat. Ainsi donc, afin de combler ce vide, le Cameroun a adopté en 2003 une loi permettant de punir les actes délictueux accomplis dans la vie des affaires. Cette loi fixe« les peines applicables aux infractions prévues dans les Actes Uniformes OHADA relatifs : au Droit Commercial Général, au Droit des Sociétés Commerciales et du Groupement d'Intérêt Economique, aux Procédures Collectives d'Apurement du Passif et à l'Organisation et l'Harmonisation des Comptabilités des Entreprises »19(*).

    La loi camerounaise du 10 Juillet 2003, comporte 40 articles, réprimant des infractions commises par tous les intervenants de la vie des affaires. Ces infractions peuvent êtrecommises aussi bien par les commerçants et dirigeants sociaux, les professionnels et tous les autres acteurs de la vie des affaires

    Une remarque évidente en ce qui concerne la loi du 10 Juillet 2003 est qu'elle place toutes les infractions d'affaires au rang des délits20(*). En effet, les mesures privatives de liberté prévues pour les infractions d'affaires vont de 15 jours à 10 ans d'emprisonnement. Cela pourrait s'expliquer par le fait que plusieurs de ces infractions sont commises au nom et pour le compte d'une personne morale. Parler d'une infraction commise au nom et pour le compte d'une personne morale, c'est dire que non seulement la personne qui la commet engage le nom de la personne morale concernée, mais aussi le résultat recherché doit être dans l'intérêt principal de cette personne morale. La réalisation de l'infraction devient donc dans le but non de satisfaire principalement les intérêts du délinquant, mais d'abord de profiter à la personne morale. Certes, l'infraction peut de manière incidente être au bénéfice de son auteur, mais l'élément important à observer ici est la personne principalement intéressée par la commission de l'infraction. La question pourrait donc être posée à ce niveau, de savoir pour quelle raison la personne morale à qui bénéficie la réalisation de l'infraction devrait être couverte par une immunité liée au principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales ?

    Ainsi donc, la punition très sévère d'une personne physique représentant la société apparait quelque peu disproportionnée au regard des intérêts en présence : l'activité illicite reprochée profite plus à un groupe de personnes qu'à celle qui subit l'application de la sanction. Aussi ces peines d'amende et d'emprisonnement sont-elles complétées, dans la Loi du 1à Juillet 2003, par des peines complémentaires, allant de la fermeture d'établissement à l'interdiction de l'exercice d'une activité commerciale, en passant par la rectification de mentions inexactes, le cas échéant.

    Contrairement au Code pénal, qui s'applique à tous les domaines de la criminalité financière, la loi de 2003 ne couvre que les infractions d'affaires, contenues dans les Actes Uniformes. C'est donc une loi spéciale, qui permet de réprimer une partie de la criminalité financière : les infractions d'affaires21(*). D'autres dispositions spéciales en matière de répression de la criminalité financière nous sont tirées du Livre de Procédures Fiscales.

    3°) Les articles L107 à L114 du Livre de Procédures Fiscales :

    Les articles L107 à L114 du Livre de Procédures Fiscales constituent ce que l'on pourrait qualifier de fondement juridique de la répression pénale en matière de fraude fiscale au Cameroun. Alors que le Code pénal, de manière générale, punit celui qui organise le refus collectif de l'impôt, le Livre de Procédures Fiscales va plus loin en déterminant les agissements qualifiés de Fraude fiscale, ainsi que la procédure à suivre pour leur répression.

    Ainsi donc, en ce qui concerne les sanctions, les articles L107 et L108 du Livre donnent un ensemble de comportements22(*) punis d'une peine d'emprisonnement allant de un à cinq ans et d'une amende de 500 000 à 5 millions de francs. Ce qui permet tout d'abord de classer ces infractions au rang des délits.

    Au-delà de l'énumération des infractions et de leur sanction, le Livre de Procédures Fiscales énonce aussi une procédure particulière à suivre en matière de poursuite des fraudes fiscales. Cette procédure prévoit d'abord l'établissement d'un Procès-verbal lors de la constatation des éléments constitutifs de l'infraction. Il faut préciser ici que, seuls les agents de l'administration assermentés ayant au moins le grade d'inspecteur et ayant pris une part personnelle et directe à la constatation des faits constitutifs de l'infraction, peuvent établir ce procès-verbal. A la suite de l'établissement de ce document, la commission des infractions fiscales siègera, pour savoir quelles mesures prendre devant l'infraction constatée. Ce n'est qu'une fois l'avis de cette commission obtenu, que le Ministre en charge des Finances sera saisi pour le dépôt d'une plainte auprès des autorités judiciaires.

    Au regard de cette longue procédure, l'on pourrait se demander ce qui motive la complexité de la poursuite des fraudes fiscales. Une réponse pourrait être la priorité accordée aux procédures permettant le recouvrement des fonds distraits sur la punition même du délinquant. En effet, en matière fiscale, et contrairement à la plupart des autres domaines dans lesquels s'applique la loi pénale, il existe une possibilité de transaction avec le Ministère public. Prévue à l'article 62 alinéa f du Code de Procédure pénale23(*), cette transaction est notamment rendue possible par le Livre de Procédure fiscale.Elle intervient avant le dépôt de la plainte par le Ministre en charge des Finances. Le souci étant plus de recouvrer les fonds étatiques, l'on pourrait se poser la question de savoir s'il n'ya pas lieu à ce niveau de privilégier ce mode de résolution des litiges pour la plupart des infractions financières. Ou alors, lorsque le délinquant est néanmoins traduit devant les juridictions, on devrait appliquer la procédure du « plaider coupable »24(*), réglementée par le Code de Procédure pénale. Car en effet, de même que celui qui demande à transiger reconnait d'une quelconque manière sa faute, celui qui plaide coupable une fois traduit devant les tribunaux bénéficie aussi d'une mesure d'atténuation de sa peine. C'est pour cette raison que divers auteurs, à l'instar de Geneviève GIUDICELLI DELAGE, pensent qu'en matière de répression de la criminalité financière, « l'administration préférerait la transaction »25(*).

    Le Livre de Procédures Fiscales, à la suite du Code pénal, posent donc les règles de la répression pénale en matière de lutte contre les infractions financières. Cependant, l'environnement juridique camerounais en matière de lutte contre ce type de criminalité est complété par la Loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 relative à la déclaration des biens et avoirs.

    4°) La Loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 relative à la déclaration des biens et avoirs

    Le principe d'une déclaration des biens et avoirs des gestionnaires de la chose publique tire sa source de l'article 66 de la loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996, selon lequel« le Président de la République, (...) tout gestionnaire de crédit et des biens publics, doivent faire une déclaration de leurs biens et avoirs au début et à la fin de leur mandat ou de leur fonction. » Cet article reconnait la nécessité d'une transparence dans la gestion des fonds publics, à travers la connaissance des revenus des gestionnaires. Sur le plan international, les articles 2a de la Convention des Nations Unies et 1er de la Convention de l'Union africaine contre la corruption prescrivent une obligation de déclarer les biens meubles ou immeubles, matériels ou incorporels se trouvant à l'intérieur ou à l'extérieur des frontières de l'Etat.

    C'est à travers la loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 que sera réglementée cette déclaration des biens et avoirs au Cameroun. Cependant, sa mise en application n'a pas encore été faite, ce qui empêche à l'heure actuelle d'exercer un contrôle total sur les gestionnaires des biens publics.

    La loi d'Avril 2006 prévoit une commission des biens et avoirs dont les 9 membres sont nommés pour une durée de cinq ans26(*). Ils prêtent serment devant la Cour suprême et dressent un rapport chaque année au Président de la République selon l'article 14 de la Loi du 25 Avril 2006. L'article 3 de la loi de 2006, dans ses dispositions, définit les biens soumis à la déclaration des biens. De cet article, il ressort que tous les biens y sont soumis, hormis « les articles ménagers et les effets personnels. » L'article 2 pour sa part détermine les personnes assujetties à cette déclaration des biens, et l'on peut déduire à l'étude de ses dispositions, qu'il s'agit de toute personne chargée de manière permanente ou temporaire de la gestion des fonds publics ou de ceux pour lesquels l'Etat a intérêt.

    Afin d'assurer une certaine fiabilité des informations données, celles-ci doivent être faites dans certains délais fixés par l'article 4 de la loi. Ils sont de quatre vingt dix (90) jours suivant l'élection ou la nomination des personnes assujetties, et soixante (60) jours au plus tard dès la fin de l'exercice de leur mandat ou nomination. Cependant, un délai de trente jours supplémentaires peut être accordé pour la déclaration, lorsque le besoin se fait ressentir.

    Lorsque la commission des biens et avoirs constate des biens de provenance injustifiée en la possession du déclarant, l'article 13 de la loi précitée prévoit la possibilité de recourir à une transaction, au profit de l'Etat, de tout ou partie des biens de l'intéressé. En cas de non acceptation de cette transaction, « la commission propose au Président de la République la transmission du dossier au Ministre de la justice, en vue de la mise en oeuvre de l'action publique ». De plus, sous réserve des décisions des autorités judiciaires, la commission des biens et avoirs est compétente pour entrainer la prise de sanctions administratives : il s'agit de l'inéligibilité et de la déchéance pour les délinquants personnes physiques, et de l'arrêt du financement de l'Etat pour les organismes dont le responsable n'aurait pas satisfait à l'obligation de déclaration. Cependant, les alinéas 2 et 3 de l'article 15 prévoient que seule l'autorité qui a procédé à la nomination a le pouvoir de prononcer la déchéance. Dans ce cas, quelle sera la situation des élus du peuple, couverts par leur immunité parlementaire et pouvant assumer la gestion des fonds publics ? Qui pourra prononcer leur déchéance ? Espérons que la mise en place du Conseil constitutionnel viendra éclairer cette obscurité, ou alors que l'on devra respecter le mécanisme de la levée des immunités.

    On le voit, la loi de 2006 sur la déclaration des biens et avoirs constitue un outil essentiel dans la lutte contre la criminalité financière. En effet, elle permet de prévenir la délinquance financière, avant la commission des infractions. Les personnes assujetties, qui auront préalablement fait la déclaration de leurs revenus, et qui seront obligées de justifier toute entrée enregistrée à la fin de l'exercice du service public, seraient moins enclines à commettre des crimes financiers. Il reste toutefois la possibilité d'échapper à un tel contrôle à travers la commission de fraudes fiscales, mais cela reviendrait à retourner dans l'illégalité. La loi sur la déclaration des biens et avoirs constitue donc une avancée considérable dans la lutte entreprise par les autorités camerounaises contre la criminalité financière. Il reste toutefois qu'elle ne peut pas encore être appliquée, du fait de l'absence de création de la commission des biens et avoirs.

    Le Code pénal camerounais et les diverses lois étudiées constituaient donc le cadre légal de répression de la criminalité financière au Cameroun. Cependant, une avancée notoire a été récemment marquée par les autorités camerounaises avec la promulgation, le 14 Décembre 2011, d'une loi portant création d'un tribunal criminel spécial.

    5°) La loi N°2011/028 du 14 Décembre 2011 portant création d'un tribunal criminel spécial

    Promulguée le 14 Décembre 2011 par le Président de la République, la loi N°2011/028 du 14 Décembre 2011 institue une nouvelle forme de juridiction au sein du paysage juridique camerounais. Il s'agit d'un tribunal criminel spécial, siégeant à Yaoundé et ayant une compétence nationale. Son domaine de compétence couvre, selon l'article 2 de ladite loi, les « infractions de détournements de deniers publics et des infractions connexes prévues par le Code Pénal et les Conventions Internationales ratifiées par le Cameroun », lorsque le préjudice subit est supérieur à 50 millions de francs CFA. Parmi les infractions connexes on pourrait ranger la corruption et les infractions apparentées ainsi que d'autres infractions telles que le blanchiment des capitaux réprimé au niveau international. Il faut signaler ici qu'il s'agit d'infractions portant essentiellement atteinte aux intérêts de l'Etat, et non à des intérêts particuliers. Par conséquent, cette loi ne saurait s'appliquer à la répression de tous types d'infractions financières, car certaines infractions, comme celles rentrant dans le cadre de la criminalité d'affaires, sont exclues ici.

    La loi du 14 Décembre 2011 établit aussi les conditions de saisine de cette juridiction et fixe les délais accordés aux juridictions saisies des affaires devant relever de la compétence de ce nouveau tribunal, pour vider leur saisine. Il est évident à ce niveau que la volonté est manifeste de pouvoir régler dans les meilleurs délais les affaires de criminalité financière qui pourraient survenir au Cameroun. Les délais pour l'instruction et le jugement des affaires sont ramenés à six (6) mois (180 jours), l'enquête préliminaire quant à elle doit se clore dans un délai de quatre vingt dix (90) jours. Cette volonté de précipiter le règlement des procédures de détournement de deniers publics et autres montre la prise en compte de la gravité de ce type d'infractions par les autorités camerounaises.

    Au niveau de la procédure pénale, la loi de Décembre 2011 prévoit que les jugements rendus par le tribunal criminel spécial ne sont susceptibles que de pourvoi devant la Cour suprême du Cameroun, par une section spéciale dont la composition est faite par le président de la Cour27(*). Cependant, la différence qui est faite ici sur les recours possibles peut amener à se poser quelques questions. En effet, alors que le Ministère public a la possibilité de revenir sur les points de fait et ceux de droit, le délinquant poursuivi ne peut le faire que sur les points de droit. On observe à ce niveau comme une augmentation des pouvoirs du Ministère public en matière de lutte contre la criminalité financière, qui devient le principal moyen étatique de poursuite des criminels financiers. Certes, la Cour suprême est une juridiction qui en principe statue essentiellement sur les points de droit, mais cette différence dans les moyens n'institue-t-elle pas un déséquilibre entre les parties en présence, tout en violant le principe du respect des droits de la défense ? Surtout lorsque l'on sait que, selon le Code de procédure pénale, la Cour suprême constitue déjà en matière pénale un troisième degré de juridiction, capable d'évoquer et de statuer à nouveau.

    Afin de justifier la position adoptée par le législateur camerounais, on pourrait penser que, l'Etat camerounais, étant la principale victime des infractions visées par la loi, a d'abord voulu protéger l'intérêt collectif, constitué par les avoirs de la Nation. Cependant, une telle position cadre-t-elle avec le principe de l'égalité des armes dans le procès pénal ? En effet, s'il y'a une partie, dans le procès pénal, qui a beaucoup plus intérêt à être protégée, c'est bien la personne poursuivie. Car, il faut bien l'admettre, c'est elle qui encourt la peine. Cela étant, n'est-il pas préférable de permettre à celui contre qui une peine sera prononcée, de pouvoir se défendre normalement ? De plus, certains jugements, conformes au droit, peuvent être fondés sur une mauvaise appréciation des faits. Le fait pour le délinquant de ne pas avoir la possibilité, le cas échéant, de revenir sur une appréciation des faits, alors que cette possibilité est laissée au Ministère public, principale partie adverse, ne constituera-t-il pas une faiblesse du système pénal en cours d'institution ? Aucune application n'ayant encore été faite de cette loi, nous ne pouvons pour le moment faire d'évaluation plus approfondie sur cette question.

    Enfin, et cela mérite d'être noté, la loi de Décembre 2011 institue une forme de transaction en matière pénale. Cette transaction est prévue à l'article 18 de la loi, qui prévoit qu'en cas de restitution du corps du délit, et sur autorisation écrite du Ministre de la justice, le procureur général puisse procéder à l'arrêt des poursuites engagées avant la saisine de la juridiction de jugement. Lorsque cette restitution intervient après la saisine des juges, les poursuites pourront être arrêtées avant toute décision au fond et les juges saisis procèderont au prononcé des déchéances prévues à l'article 30 du code pénal, avec mention au casier judiciaire.

    L'instauration de ce type de transaction, qui complète l'article 64 du Code de procédure pénale camerounais, traduit la volonté de privilégier la récupération du corps du délit, sur l'application des sanctions. Lesdites infractions nuisant fortement à l'économie nationale, il devient préférable d'éviter les conséquences économiques des infractions concernées. Toutefois, cette mesure a été vue par plusieurs comme une mesure discriminatoire28(*), qui conduirait à permettre aux plus riches d'échapper à la peine privative de liberté ou aux autres peines, car seules des déchéances peuvent être prononcées contre eux, et ce lorsque la juridiction de jugement n'a pas encore été saisie.

    Plusieurs lois jouent donc un rôle dans la réglementation de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun. Cependant, à leur côté, il existe plusieurs textes réglementaires qui sont pris dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun.

    B/- Les textes réglementaires

    Il s'agit principalement des circulaires présidentielles, fixant les grands axes à suivre par les autorités exécutives, en matière d'application des textes financiers. C'est le cas de la Circulaire N°001/CAB/PR du 16 Septembre 2005 portant exécution du budget de l'Etat pour l'exercice 2006.

    Dans la circulaire sus citée, les directives principales sont données aux membres du Gouvernement pour orienter leurs actions dans l'exécution du budget de l'Etat. Parmi ces directives, l'on note un intérêt réel pour la mise en oeuvre de la lutte contre la criminalité financière. Ainsi, l'article 25 recommande-t-il « la poursuite de la lutte contre la délinquance fiscale et la contrebande douanière par l'application rigoureuse des sanctions prévues par les textes en vigueur. » De plus, l'article 26 prévoit « la lutte contre la fraude et les contrebandes », tandis que l'article 19 de cette circulaire vise à prendre des dispositions permettant « le renforcement de la mise en oeuvre du Programme national de gouvernance en mettant un accent particulier sur la lutte contre la corruption et la promotion de l'éthique du service public. »

    Ces différentes dispositions démontrent la prise en compte au plus haut niveau de l'Etat, des conséquences néfastes de la criminalité financière sur l'économie nationale. En effet, la préoccupation majeure découlant des articles sus cités est la mise en place d'un dispositif préventif contre la criminalité financière. Par rapport à l'objet de la Circulaire29(*), on constate qu'il est impératif pour l'Etat camerounais, de mettre en place des mesures permettant la bonne administration, la transparence dans les comptes de l'Etat, la juste répartition des biens et surtout l'absence des délits financiers.

    Pour terminer, signalons que les préoccupations qui gouvernent la Circulaire N°001/CAB/PR du 10 Septembre 2005 se retrouvent dans presque toutes celles portant exécution du budget de l'Etat pour un exercice quelconque.

    Paragraphe 2 : LES TEXTES INTERNATIONAUX

    La lutte contre la criminalité financière, telle qu'elle est organisée au Cameroun, inclut l'application sur le plan interne de plusieurs textes internationaux. Ces textes peuvent être divisés en textes régionaux (A) et textes internationaux (B).

    A/ Les textes régionaux

    Au Cameroun, la lutte contre la criminalité financière est avant tout un impératif régional. C'est pour cela que, d'abord coordonnée au sein de la sous région Afrique centrale, l'organisation de la lutte contre la criminalité financière s'étend aussi au niveau du continent africain.

    1°) Les textes de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC)

    Afin de mener une lutte sur tous les fronts contre la criminalité financière, il a été nécessaire d'établir une organisation sous régionale, capable de mettre en place un cadre juridique uniforme, permettant la lutte organisée contre la criminalité financière. C'est ainsi que plusieurs textes ont été pris, mettant en place aussi bien des mesures préventives que répressives.

    C'est dans ce sens que les Etats d'Afrique centrale ont procédé, le 14 Décembre 2000, à la création du Groupe d'Action contre le Blanchiment des capitaux en Afrique centrale (GABAC). Cette création a été faite à travers l'Acte additionnel N°09/00/CEMAC-086/CCE 02 du 14 Décembre 2000 portant création du GABAC. Cette institution financière internationale est chargée de mener une lutte organisée contre l'infraction de blanchiment des capitaux. L'impératif qui fonde sa création n'est rien d'autre que la nécessité d'une réelle harmonisation des mesures prises au sein des Etats d'Afrique Centrale, afin de permettre une bonne coopération judiciaire, gage d'une lutte efficace contre le blanchiment des capitaux. L'organisation et le fonctionnement de cet organe seront précisés deux ans plus tard, à travers le Règlement N°02/02/CEMAC/UMAC/CM du 14 Avril 2002 portant organisation et fonctionnement du GABAC. A travers cette nouvelle institution, les Etats d'Afrique centrale ont pris en compte les recommandations du Groupe d'Action Financière Internationale contre le Blanchiment des capitaux, parmi lesquelles la recommandation d'appliquer l'infraction de blanchiment de capitaux à toutes les infractions graves.

    Par la création du GABAC, les Etats d'Afrique centrale se sont ainsi dotés d'un outil important de coordination et de mise en oeuvre de politiques concertées de lutte contre la criminalité financière, à travers l'adoption d'actions sous régionales de lutte contre ce type de criminalité. Cela permet entre autres d'avoir une meilleure harmonisation des institutions des Etats membres, ainsi qu'un outil de concertation efficace entre les différentes Agences nationales en charge de la lutte contre le Blanchiment des capitaux.

    En dehors de ces textes relatifs au GABAC, l'Afrique centrale, soucieuse de la nécessité de mettre fin au blanchiment des capitaux, infraction en corrélation avec le financement du terrorisme30(*), a procédé à l'adoption du Règlement N°01/03/CEMAC/ UMAC/CM du 04 Avril 2003 portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique Centrale. Afin de justifier sa création, le préambule dudit règlement reconnait « que la crédibilité et la pleine efficacité de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en Afrique centrale commandent d'introduire dans les Etats membres un cadre juridique inspiré des normes et standards internationaux en la matière ». Ce règlement prévoit la création, au sein des Etats, d'une Agence Nationale d'Investigation Financière, chargée de reconstituer l'ensemble des transactions faites par une personne morale ou physique et liées à une opération douteuse. Cet organe devrait jouer un rôle primordial dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux au sein des Etats membres, à l'appui des autorités judiciaires.

    Toujours dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière, et cette fois-ci en matière préventive, le souci des Etats d'Afrique centrale a été de prévenir les cas de commission des infractions financières en agissant sur les opérations bancaires. On le sait, la majorité des transactions financières douteuses passent par des banques, aussi a-t-il été nécessaire de prendre des mesures fermes permettant de détecter les criminels financiers avant qu'ils n'aient pu procéder au blanchiment de leurs fonds d'origine illicite. Cette mesure préventive a pu être mise en place, à travers l'adoption du Règlement COBAC R-2005/01 relatif aux diligences des établissements assujettis en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en Afrique centrale. Dans le cadre de l'élaboration de ce Règlement, les Etats d'Afrique centrale ont, dans le cadre des travaux préparatoires audit texte, fortement intégré les recommandations du Groupe d'Action Financière internationale contre le blanchiment des capitaux. Cette intégration montre le souci des Etats d'Afrique centrale de s'arrimer aux normes internationales concernant la lutte contre la criminalité financière.

    On le voit, la lutte contre la criminalité financière organisée au plan sous régional est pour le moment cantonnée à la lutte contre l'infraction de blanchiment des capitaux, laissant les Etats membres prendre des mesures pour procéder à la lutte contre les autres infractions financières. Cependant, tel n'est pas totalement le cas au niveau régional, avec la prise en compte de l'infraction de corruption.

    2°) Les textes de l'Union Africaine (UA)

    Il s'agit principalement de la Convention de l'Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. Cette Convention part du constat selon lequel les Etats seraient « préoccupés par les effets négatifs de la corruption et l'impunité sur la stabilité politique, économique, sociale et culturelle ». Après avoir défini l'infraction de corruption, la Convention établit un bilan des implications de ce phénomène sur les Etats et démontre la nécessité de le combattre au plan international. Ce texte a cependant un défaut, c'est qu'il se borne à établir des mesures à prendre par les Etats membres et à définir des infractions, sans pour autant contenir des mesures pouvant être imposées aux Etats. Il conserve ainsi un caractère assez aléatoire, en laissant la possibilité aux Etats de l'appliquer ou pas, en prescrivant simplement des mesures aux Etats de l'Union.

    A côté de la Convention de l'Union africaine, une place importante devrait être consacrée aux Actes Uniformes de l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA). Cependant, les actes constitutifs d'infractions prévus dans ces Actes uniformes sont réprimés au Cameroun par la Loi N°2003/008 étudiée précédemment.

    Ainsi donc, la lutte contre la criminalité financière s'avère être assez coordonnée au sein du continent, avec essentiellement la lutte contre le blanchiment des capitaux, la corruption et les infractions d'affaire. Au plan international cependant, l'accent est mis sur la lutte contre les deux premières infractions.

    B/ Les textes internationaux applicables au Cameroun

    Trois textes principaux participent à la lutte contre la criminalité financière sur la scène internationale, et permettent d'avoir une lutte harmonisée contre ce fléau. Il s'agit de la Convention des Nations Unies contre la corruption, des Recommandations du Groupe d'Action Financière Internationale contre le Blanchiment, et de la Convention de Palerme.

    1°) La Convention des Nations Unies contre la Corruption

    Elle prévoit des mesures à appliquer par les Etats membres afin de procéder à l'éradication de cette infraction, qui cause énormément de dégâts aux Etats. Ainsi donc, afin d'assurer une lutte franche et véritable contre ce phénomène, l'article 33 de ladite Convention prévoit « la protection des personnes qui communiquent des informations. » cette mesure permet d'assurer la protection éventuelle des victimes des cas de corruption. Cette protection est nécessaire si l'on voudrait avoir une lutte efficace contre la criminalité financière, car en effet, les victimes qui se sentent protégées contribuent plus facilement aux actions étatiques, et permettent de véritablement appréhender les auteurs ou complices de crimes financiers.

    Un autre aspect sur lequel la Convention des Nations unies contre la corruption insiste, est celui de la coopération internationale. Ainsi, l'article 39 de la Convention des Nations unies prévoit la coopération au plan international, et donc la possibilité pour les organes internes de se faire assister par les institutions financières internationales. Cette assistance permet au Cameroun notamment de bénéficier de l'expertise internationale, en matière de mise en oeuvre des outils permettant la lutte contre la corruption. Au delà de la coopération avec les institutions financières internationales, la Convention des Nations unies prévoit aussi une coopération interétatique. C'est ainsi que son article 62 met l'accent sur ce type de coopération, qui s'observe surtout au niveau des conditions de l'extradition, qui permet à un Etat de pouvoir juger un criminel financier qui se serait réfugié sur un autre territoire. Aussi l'article 44 alinéa 2 permet-il à un Etat d'accorder l'extradition bien que son droit interne ne punisse pas un acte de corruption, alors que l'alinéa 1 pose le principe de la nécessité de la double extradition comme condition de l'extradition du criminel financier. Cela veut dire que dès lors, un Etat ne pourrait plus se prévaloir de l'absence d'incrimination pour s'opposer à l'extradition d'un criminel financier, puisque la possibilité lui est donnée de l'accorder. Au Cameroun, l'extradition est réglementée par les articles 635 à 675 du Code de Procédure Pénale, qui permettent une véritable coopération judiciaire interétatique. La Convention des nations unies sur la lutte contre la corruption pose ainsi les bases d'une réelle coopération, nécessaire pour l'éradication de la criminalité financière.

    Cependant, la Convention des Nations Unies contre la corruption rencontre encore des difficultés quant à son application au Cameroun. En effet, cette Convention prévoit, outre l'infraction de corruption, celle d'enrichissement illicite. Pourtant, les dispositions concernant cette dernière infraction ne sont pour l'instant pas encore évocables devant les juridictions camerounaises, la loi camerounaise n'ayant pas encore prévu de peines contre l'enrichissement illicite. Ainsi donc, en l'absence de peines contre ladite infraction, et en application de la maxime latine « nullumcrimen, nullapoeana sine lege », aucune juridiction camerounaise

    2°) Les recommandations du Groupe d'Action Financière Internationale

    A côté de la Convention des Nations unies contre la corruption, la communauté internationale a procédé à la création du Groupe d'Action Financière internationale sur le Blanchiment des capitaux31(*) (GAFI). Ce groupe d'action, afin de mettre en place un système international de lutte contre la criminalité financière, a émis quarante recommandations le 20 Juin 2003, amendées en Octobre 2004. A l'introduction de ces recommandations, le GAFI reconnait que « les méthodes et techniques de blanchiment de capitaux évoluent au gré des contre-mesures qui sont déployées. Ces dernières années, le Groupe d'action financière (GAFI) a pris note du développement de combinaisons sophistiquées de techniques, telles que l'usage croissant de personnes morales afin de dissimuler la véritable propriété et le véritable contrôle des produits d'activités illicites, ainsi que le recours accru à des professionnels pour obtenir des conseils et de l'assistance afin de blanchir des fonds criminels. »

    A ces quarante recommandations, le GAFI a ajouté huit recommandations spéciales32(*) sur le financement du terrorisme, adoptées en Octobre 2001. Ces recommandations contiennent une série de mesures visant à combattre le financement des actes et des organisations terroristes.

    Ainsi donc, dans la recherche d'un cadre uniforme de lutte contre le blanchiment des capitaux, les recommandations du GAFI stipulent que l'incrimination de cette infraction devrait être faite sur la base de la Convention de Vienne de 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, et de la Convention de Palerme de 2000 contre la criminalité transnationale organisée. Afin de couvrir une plus large gamme d'infractions, le GAFI recommande d'appliquer l'infraction de blanchiment de capitaux à toutes les infractions graves. Cet élargissement du champ d'application de l'infraction permet une meilleure répression des actes financiers criminels au niveau de tous les Etats appliquant ces recommandations.

    3°) La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée

    La Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, adoptée en Italie, dans la ville de Palerme, en décembre 2000 et entrée en vigueur le 29 Septembre 2009, est un instrument juridique destiné à harmoniser l'action des Etats dans la lutte contre un type de criminalité particulier. Tout comme la Convention des Nations Unies contre la corruption, elle établit un cadre juridique et institutionnel permettant l'harmonisation de la lutte contre la criminalité organisée. Cette harmonisation semble justifiée par le fait que la criminalité transnationale organisée peut difficilement être combattue par un seul Etat, non seulement parce qu'elle fait très souvent intervenir plusieurs auteurs de nationalités différentes, mais aussi parce qu'elle comporte des infractions ayant des éléments constitutifs qui se produisent sur les territoires de différents pays.

    L'article 3 de la Convention contre la criminalité transnationale organisée, encore appelée Convention de Palerme, détermine le champ d'application de ce texte. Selon cet article, « la Convention s'applique, sauf disposition contraire, à la prévention, aux enquêtes et aux poursuites concernant :

    a) Les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention33(*) ;

    b) Les infractions graves34(*) telles que définies à l'article 2 de la présente Convention, lorsque ces infractions sont de nature transnationale et qu'un groupe criminel organisé y est impliqué. »

    Contrairement à certains textes internationaux qui visent la lutte contre certaines infractions particulières, la Convention de Palerme englobe plusieurs infractions sous le vocable de « criminalité transnationale organisée », en incluant un ensemble de plusieurs activités délictuelles. Cette réunion de plusieurs infractions est justifiée par leur caractère « organisé », qui rend compétentes, comme nous l'avons déjà relevé, plusieurs juridictions. Cela empêche aux autorités des différents pays d'exercer une bonne répression desdites infractions, aussi a-t-il été jugé nécessaire, sur la scène étatique, de procéder à une réelle harmonisation des poursuites. Celle-ci a débuté par la réunion des différentes infractions visées en un groupe spécifique. Ceci pourrait permettre au Cameroun par exemple, de coopérer avec un autre Etat signataire de la Convention, en ce qui concerne la poursuite d'une personne ayant commis des actes qui ne tombent pas sous le coup de la même incrimination dans les deux régimes juridiques, mais qui renferment les éléments d'un crime transnational organisé.

    Pour ce qui est de la détermination du caractère transnational des infractions, la Convention de Palerme vise aussi bien celles qui sont commises dans plus d'un Etat que celles commises dans un seul lorsqu'elles ont été préparées, planifiées, conduites ou contrôlées dans un autre Etat, mais aussi celles qui ont produit un effet substantiel dans un autre Etat ou impliquent un groupe criminel qui se livre à des activités illicites dans un autre Etat. On le voit, l'élément mis en exergue ici est le souci d'éviter la difficulté liée à la multiplication des compétences de plusieurs juridictions nationales, qui pourrait faire obstacle à un réel engagement des poursuites.

    La convention est complétée par trois protocoles additionnels relatifs à la traite des personnes, au trafic illicite de migrants, au blanchiment d'argent et à la fabrication et au trafic illicites d'armes à feu. Dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière, le protocole qui nous intéresse est celui portant sur le blanchiment d'argent, bien que le produit des autres crimes puisse être utilisé afin de réaliser cette infraction.

    A travers la Convention des Nations unies contre la corruption, celle de Palerme et les Recommandations du GAFI, la communauté internationale procède à une vaste campagne de lutte contre la criminalité financière, particulièrement contre ces deux infractions, considérées comme les plus nuisibles aux Etats. Ces deux textes viennent compléter le cadre normatif de lutte contre la criminalité financière applicable au Cameroun. Au-delà de ce cadre normatif, il est nécessaire de procéder à une étude des organes camerounais oeuvrant pour la lutte contre cette forme de criminalité.

    Section 2 : Les institutions de lutte contre la criminalité financière

    Dans le cadre de la répression de la criminalité financière et pour l'application des dispositions textuelles, plusieurs organes ont été mis en place, afin de couvrir divers domaines. Au premier plan, nous avons les organes judiciaires classiques, chargés de poursuivre et juger les auteurs de crimes financiers (Paragraphe 1). A côté de ces organes judiciaires, et en raison de la spécificité des infractions financières requérant une certaine expertise, il a été institué des organismes spécialisés dans divers domaines, permettant d'appuyer l'action des organes judiciaires (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : LES ORGANES JUDICIAIRES

    Ils sont réglementés par la loi N°2005/007 du 27 Juillet 2005 portant Code de Procédure pénale. Selon elle, l'organisation judiciaire en matière pénale peut être divisée en 2 grands groupes : d'un côté, le Ministère Public et la Police judicaire (A), de l'autre les Magistrats du siège (B). Il faut ajouter à ces deux grands groupes, la Chambre des Comptes de la Cour Suprême (C), qui joue un rôle important en matière de lutte contre la criminalité financière

    A- Le rôle du Ministère Public et de la Police judiciaire

    Afin de faire une meilleure étude de ce rôle, il serait préférable de dissocier l'action du Ministère Public (1) de celle de la Police judiciaire (2)

    1°) L'action du Ministère public

    Le Ministère public est un « corps hiérarchisé de magistrats (subordonnés au Garde des Sceaux) chargés de représenter l'Etat devant les divers types de juridictions. »35(*) C'est un corps de magistrats qui jouent le rôle d'avocats de l'Etat et veillent à l'application et au respect de la loi pénale sur toute l'étendue du territoire national. Défenseurs des intérêts de l'Etat et donc de l'ordre public, les magistrats du Ministère public jouent un rôle important en ce qui concerne la lute contre la criminalité financière.

    Les procureurs, membres du Ministère public, assurent le contrôle de la Police judiciaire, et donc de l'activité des agents de police judiciaire. Le Procureur de la République, selon l'article 135 du Code de Procédure pénale, est saisi par dénonciation, par plainte, par procès-verbal établi par une autorité compétente, ou d'office. Il peut décider du classement sans suite d'une affaire pour laquelle il a été saisi, ou alors de la continuation des poursuites devant un juge. Dans l'exercice de ses fonctions, le Procureur de la République délivre divers types de mandats, allant du mandat de perquisition au mandat d'amener.

    Dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun, le rôle joué par le Procureur de la République est encore plus important. En effet, de par le fait que c'est lui qui saisi le juge d'instruction pour l'ouverture d'une information judiciaire, il est le principal collaborateur des organes extrajudiciaires chargés de compléter l'action des magistrats dans la lutte contre la criminalité financière. De ce fait, il reçoit les éléments de preuve permettant d'engager des poursuites contre les potentiels auteurs d'infractions financiers.

    Aux termes de l'article 60 alinéa 1 du Code de Procédure pénale, « l'action publique est mise en mouvement et exercée par le Ministère public ». Bien qu'elle puisse aussi être mise en mouvement par la victime ou une administration, elle est exercée par le Ministère public. De plus, elle ne saurait être ni suspendue ni arrêtée, sauf dans des conditions36(*) rendant la continuation des poursuites sans cause. Le Ministère Public ne peut donc, de lui-même, décider de l'arrêt des poursuites, sauf bien sûr lorsqu'il manque d'éléments suffisants pour les continuer. L'aménagement des pouvoirs du Ministère public a encore connu une avancée avec les pouvoirs précédemment étudiés de ce corps auprès du Tribunal criminel spécial.

    La précision ainsi apportée mérite d'être faite, en raison du problème soulevé par la transaction en matière pénale. Prévue au Cameroun uniquement en ce qui concerne quelques cas express37(*), elle pourrait s'avérer utile en matière de répression des délits financiers. En effet, comme précédemment démontré, les infractions financières ont la particularité de porter gravement atteinte aux intérêts économiques du pays. Or, la punition du coupable à une peine d'amende et/ou d'emprisonnement ne permet pas effectivement de recouvrer les fonds perdus par l'Etat. Au contraire, le suivi du détenu pendant sa peine d'emprisonnement engendrera d'autres dépenses de la part de l'Etat.

    Une solution permettant de remédier à ce problème serait d'amener les criminels financiers à transiger avec les autorités. Cela permettrait d'obtenir, de la part du délinquant, le remboursement des sommes frauduleusement prises au profit de l'Etat, contre l'allègement de sa peine. L'Etat rentrerait ainsi en possession de ses fonds, lui permettant de répondre aux attentes de la population.

    Cependant, bien que l'instauration d'une transaction en matière de répression de la criminalité financière semble présenter plusieurs avantages, il n'en demeure pas moins que plusieurs questions pourraient être soulevées :

    - D'abord, si l'on admet le principe d'une transaction judiciaire en matière pénale, quelle sera la situation des auteurs d'autres types d'infractions, qui ne pourront pas bénéficier de mesures d'allègement de leurs peines, alors que, comme eux, les criminels financiers portent atteinte à l'ordre public ;

    - Ensuite, l'instauration d'une possibilité d'allègement de la peine en cas de remboursement ne contribuerait-elle pas à créer des inégalités entre les riches, qui peuvent payer pour s'en sortir, et les pauvres, dont le manque de moyens financiers ne permet pas de rembourser ce qu'ils ont pris ?

    - Enfin, si le principe de la transaction judiciaire en cas de crime financier se justifie par la protection des intérêts de l'Etat, quel sera la solution à adopter dans le cas où les crimes financiers ont été commis au préjudice d'intérêts privés38(*) ?

    Toutes ces interrogations, auxquelles il faudrait nécessairement apporter des réponses, font en sorte que l'instauration d'une transaction judiciaire au Cameroun, qui impliquerait la possibilité d'alléger sa peine en cas de remboursement des sommes détournées au détriment de l'Etat, soit difficile. En effet, dans le cas où un tel système serait envisageable, il devrait s'appliquer de manière générale en matière pénale, et dans des conditions qui limiteraient toute injustice. En l'absence de telles dispositions, le Ministère Public pourrait difficilement accepter toute transaction quelconque avec un présumé délinquant, sauf dans les conditions expressément prévues par la Loi.

    Dans la poursuite des infractions financières, le Ministère Public s'appuie en grande partie sur la Police judiciaire.

    2°) L'action de la Police judiciaire exercée sous le contrôle du Ministère public

    Elle est exercée par les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire et tous autres fonctionnaires ou personnes auxquels des lois spéciales confèrent des pouvoirs de police judiciaire39(*). Elle se fait sous la direction du Procureur de la République.

    La Police judiciaire est chargée de constater les infractions, rassembler les preuves, rechercher les auteurs et complices et les déférer au Parquet le cas échéant, exécuter les commissions rogatoires des autorités judiciaires, notifier les actes de justice et exécuter les mandats et décisions de justice.

    Auxiliaires du Ministère Public, les autorités chargées de la Police judiciaire jouent un grand rôle en matière de lutte contre la criminalité financière. En effet, elles reçoivent les plaintes et mènent des enquêtes afin de rassembler suffisamment d'éléments de preuve. Par conséquent, pour que les poursuites soient exercées pleinement contre les auteurs d'infractions financières, il est nécessaire qu'à la base, les enquêtes aient été bien menées par les autorités chargées de la Police judiciaire. De plus, le bon déroulement de toute procédure intentée contre tout criminel financier nécessite la participation active et pleine de la Police judiciaire.

    C'est donc dire que, principaux collaborateurs du Ministère Public, les autorités chargées de la Police judiciaire assurent la protection et le respect des intérêts de l'Etat. Ils permettent ainsi au Procureur de pouvoir déployer son action et exercer pleinement son rôle.

    A côté du Ministère Public et de la Police judiciaire, la lutte contre la criminalité financière est aussi exercée par d'autres organes judiciaires que sont les magistrats du siège.

    B- Le rôle des magistrats du siège

    Bien que le Ministère public soit composé de magistrats exerçant dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière, ils le font à côté d'autres magistrats dits « magistrats du siège ». Ceux-ci forment le corps des juges, n'obéissant pas aux mêmes règles que le Parquet. Afin d'étudier le rôle des magistrats du siège en matière de lutte contre la criminalité financière, nous verrons d'une part celui du Juge d'instruction (1), d'un autre côté celui du juge de jugement (2).

    1°) Le rôle du Juge d'instruction dans la lutte contre la criminalité financière

    L'introduction du juge d'instruction dans la procédure pénale camerounaise est une innovation du Code de Procédure pénale issu de la Loi N°2005/007 du 27 Juillet 2005. Magistrat du siège, le juge d'instruction a plus de liberté pour exercer son action, en ce qu'il n'est soumis à aucun contrôle hiérarchique.

    Au Cameroun, le juge d'instruction mène l'information judiciaire. Cependant, il faudrait préciser ici qu'il ne peut ouvrir cette information judiciaire que s'il est saisi par un réquisitoire introductif d'instance émanant du Procureur de la République. Il peut être aidé par un officier de Police judiciaire, sauf pour l'exécution de certains actes (inculpation, délivrance de mandats de justice et interrogatoires).

    Dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière, le rôle du juge d'instruction est important, en ce qu'il est l'autorité chargée de rendre des ordonnances permettant soit d'engager des poursuites, soit de mettre fin à celles-ci. C'est donc lui qui permet la mise en mouvement de la phase de jugement. Le juge d'instruction permet aussi de retenir pour une longue durée les éventuels criminels financiers, surtout ceux pour lesquels il existe des éléments permettant de croire qu'ils ont effectivement commis des crimes financiers. Il le fait à travers la délivrance d'un mandat de mise en détention provisoire.

    L'action du juge d'instruction est donc primordiale en matière de lutte contre la criminalité financière. En effet, à travers l'ordonnance de renvoi devant les juges de jugement qu'il délivre, il assure la continuité de la répression de la criminalité financière. La suite de cette tâche étant dévolue à un autre type de magistrat du siège souvent appelé juge de jugement.

    2°) Le rôle du juge de jugement

    Parler de juge de jugement, par opposition au juge d'instruction, est une manière de désigner un autre type de magistrat du siège. Il s'agit, de manière générale, de tout magistrat, quel que soit son degré dans la hiérarchie (juge d'instance, d'appel, de cassation), son pouvoir (juge du fond, du provisoire, du droit), l'origine de son investiture (juge de l'Etat ou nommé par les parties), doté d'un pouvoir juridictionnel en matière pénale. Il s'agit donc, aussi bien des juges des tribunaux, des cours d'appel ou de la Cour suprême, statuant en matière pénale.

    Ainsi donc, en matière de répression de la criminalité financière, les juges sont saisis soit par ordonnance de renvoi du juge d'instruction, arrêt de la Chambre de contrôle de l'instruction, citation directe ou par la procédure de flagrant délit (en instance), par requête d'appel (en appel) ou par pourvoi en cassation. Le juge est chargé de trancher le litige. Pour ce faire, il assure la police des audiences et la direction des débats. Il est assisté à cette fin par des agents des forces du maintien de l'ordre pendant toute la durée de l'audience. Il reçoit les preuves et rend sa décision en se fondant sur la Loi et son intime conviction. Il ne peut décider de ne pas rendre cette décision, sous peine de se rendre coupable d'un déni de justice.

    Le rôle du juge est fondamental dans le processus de lutte contre la criminalité financière. En effet, c'est lui qui est chargé de déclarer le délinquant coupable ou non, de prononcer la peine applicable et de le remettre entre les mains du système carcéral. Aucun organe de lutte contre la criminalité financière ne peut se passer du juge, car il est le seul habilité à juger de la culpabilité ou non d'une personne, et de l'application des sanctions pénales prévues par la législation en vigueur. C'est donc l'un des organes indispensables du système camerounais de répression de la criminalité financière.

    C- La Chambre des Comptes de la Cour Suprême

    La nécessité d'établir un organe étatique chargé de gérer les comptes de l'Etat s'est très vite fait ressentir au lendemain des indépendances. C'est ainsi qu'avec l'adoption de l'Ordonnance N°62/OF/4 du 07 Février 1962, l'Etat camerounais connait la création de la Cour Fédérale des Comptes. Cette Cour pose clairement le principe de la séparation des ordonnanciers et des comptables. Par la suite, cette juridiction est supprimée par la Loi N°69/LF/17 du 10 Novembre 1969, et ses attributions d'apurement des comptes et de sanction des comptables publics sont confiés à l'Inspection Générale de l'Etat.

    Après la suppression de cette juridiction, d'autres textes seront pris dans le but d'enrichir la législation juridique et financière camerounaise, parmi lesquels on peut citer :

    - Le Décret N°67/DF/211 du 16 Mai 1967 portant aménagement de la législation financière de la République du Cameroun et Instruction sur la Comptabilité de l'Etat ;

    - La Loi N°74/18 du 05 Décembre 1974 relative au Contrôle des ordonnateurs, gestionnaires et gérants de crédits publics et des entreprises d'Etat telle que modifiée par la Loi N°76/4 du 08 Juillet 1976 ;

    - La Loi N°77/26 du 26 Décembre 1977 fixant le Régime Général de la Comptabilité matières ;

    - Le Décret N°196 du 23 Juin 1976 portant statut particulier du corps des comptables matières ;

    - Le Décret N°78/470 du 03 Novembre 1978 portant organisation et fonctionnement du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière (CDBF).

    Ces différents organes jouent le rôle de régulateurs des comptes publics, jusqu'à la promulgation de la Loi N°96/06 du 18 Janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 Juin 1972, dont l'article 38 créée une Chambre des Comptes au sein de la Cour Suprême du Cameroun. Cet article a été par la suite complété par la Loi N°2003/005 du 21 Avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour suprême.

    Organe suprême camerounais en ce qui concerne le contrôle des comptes publics, la Chambre des Comptes de la Cour suprême a trois missions principales, déterminées par l'article 41 de la Loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996, qui sont :

    - Contrôler et statuer sur les comptes publics et ceux des entreprises publiques et parapubliques ;

    - Statuer souverainement sur les décisions rendues en dernier ressort par les Juridictions inférieures des Comptes ;

    - Connaître de toute autre matière qui lui est expressément attribuée par la Loi.

    L'article 7 de la Loi N°2003/005 pour sa part précise que « la Chambre des comptes contrôle et juge les comptes des comptables publics, déclare et apure les comptabilités de fait, prononce les condamnations à l'amende dans les conditions fixées par la loi et statue souverainement en cassation sur les recours formés contre les jugements définitifs des juridictions inférieures des comptes. »

    Ainsi donc, organe juridictionnel, la Chambre des Comptes de la Cour Suprême s'assure de la bonne tenue de la comptabilité de l'Etat. Elle est en principe assistée dans cette fonction par des juridictions inférieures des comptes, qui constituent le premier degré de juridiction. Cependant, en attendant la mise en place de ces différentes juridictions, la Chambre des comptes, en vertu de l'article 79 alinéa 3 de la Loi, exerce les attributions des juridictions inférieures des comptes en attendant leur mise en place. Elle juge actuellement en instance, et seules deux voies de recours sont ouvertes contre ses arrêts, selon les articles 72 à 76 de la Loi de 2003. Ces voies de recours sont :

    - L'Annulation, faite par l'Assemblée plénière de la Cour suprême. Celle-ci doit être saisie d'un pourvoi en annulation intenté par le Procureur Général près la Cour Suprême, pourvoi d'ordre du Ministre de la justice, saisi par le Ministre en charge des finances, le comptable ou ses héritiers. En cas d'annulation, l'Assemblée plénière de la Cour suprême évoque et statue à nouveau. De plus, il est nécessaire de souligner que le pourvoi en annulation a un caractère suspensif ;

    - La Révision, exercée par la Chambre des comptes toutes sections réunies. Elle est faite suite à erreur, omission, faux ou double emploi, découverts postérieurement au prononcé de l'arrêt. De plus, elle est mise en oeuvre à la demande soit du comptable, soit du Ministre chargé des finances ou des représentants légaux des personnes morales publiques concernées, soit du Procureur Général près la Cour Suprême, soit d'office. Exercé dans un délai de six mois à compter de la notification de l'arrêt au comptable, le recours en révision n'a pas d'effet suspensif.

    La procédure à suivre devant la Chambre des comptes de la Cour suprême est déterminée dans la Loi de 2003. De plus, il faut préciser que plusieurs sanctions sont prévues contre les comptables indélicats, qui sont pour la plupart constituées d'amendes, prévues dans les articles 54 à 58 de la Loi de 2003.

    La Chambre des Comptes de la Cour suprême joue donc un rôle important dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière, car elle constitue le gendarme financier de l'Etat, son comptable. Elle permet de déceler les irrégularités dans la gestion financière de la chose publique. C'est donc un organe important dans la détection et la répression des délinquants financiers. Cependant, son rôle se limite aux comptes publics, et ne saurait s'étendre aux comptes privés. Car en effet, les structures privées sont censées se doter d'instruments de contrôle internes. De plus, les bénéfices des sociétés privées ne sont pas reversés à l'Etat, mais à leurs propriétaires. On ne saurait donc demander à l'Etat de contrôler des comptes pour lesquels il n'a pas d'intérêt.

    Au-delà de l'organisation judiciaire en vigueur en matière de lutte contre la criminalité financière, plusieurs organes extrajudiciaires oeuvrent dans la poursuite du même objectif.

    Paragraphe II : LA PLURALITE D'ORGANES EXTRAJUDICIAIRES OEUVRANT EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE

    A côté des autorités judiciaires classiques, le Cameroun s'est doté d'une pluralité d'organes extrajudiciaires, chargés de compléter et de faciliter le rôle des Tribunaux. Alors que certains de ces organes dépendent entièrement de l'Etat et de ses institutions (A), d'autres au contraire agissent en toute indépendance (B), ce qui permet d'assurer une certaine crédibilité à leurs actes.

    A- Les organes étatiques ou gouvernementaux de lutte contre la criminalité financière

    Dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun, deux grandes structures étatiques sont chargées de la mise en oeuvre extrajudiciaire de ladite lutte. Il s'agit du Contrôle Supérieur de l'Etat(1) et du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière (2). A côté de ces organes, il ne faudrait point écarter le rôle des différents Programmes ministériels de lutte contre la corruption (3).

    1°) Le Contrôle Supérieur de l'Etat

    Dans le but d'assurer un suivi constant des actions du Gouvernement, il était nécessaire de mettre en place une institution de contrôle et de surveillance de la bonne utilisation du bien public. C'est ainsi que le Cameroun a connu au sein du Gouvernement, la création d'un Ministère délégué à la Présidence de la République, chargé du Contrôle Supérieur de l'Etat40(*). Cette Institution Supérieure de Contrôle des Finances publiques au Cameroun a pour missions principales la sauvegarde de la fortune publique et la sanction des atteintes portées par les gestionnaires et comptables publics.

    Placés sous l'autorité directe du Président de la République, les services du Contrôle Supérieur de l'Etat agissent en toute indépendance vis-à-vis des administrations et organismes contrôlés. Ce qui leur permet de jouer pleinement leur rôle de gendarme, sans subir de pression d'aucune sorte, émanant d'une quelconque autorité. Les services du Contrôle Supérieur de l'Etat assurent ainsi la restauration de la souveraineté et de l'autorité de l'Etat, ainsi que la performance des structures étatiques. En effet, ils permettent de reprendre ceux qui bafouent l'autorité de l'Etat en occasionnant des disfonctionnements dans la gestion de la chose publique. Par ailleurs, les Services du Contrôle Supérieur de l'Etat jouent auprès du gestionnaire de la chose publique un rôle de conseil et d'appui à la gestion.

    Ainsi donc, le Ministère délégué à la Présidence de la République chargé du Contrôle Supérieur de l'Etat joue un rôle important dans le dispositif mis en place pour lutter contre les infractions financières au Cameroun. En effet, au cours de leurs investigations, les membres des Missions mobiles de vérification ne peuvent subir aucune mesure privative ou restrictive de liberté sans l'accord préalable du Président de la République. Ce qui garantit l'objectivité et une grande liberté d'action afin de détecter les mauvais gestionnaires de la chose publique. Déployés dans tous les services publics, ils permettent d'appréhender et de poursuivre plus facilement les auteurs d'infractions financières contre la chose publique.

    La subordination directe du Contrôle supérieur de l'Etat au Président de la République semble ici constituer un atout considérable, car celui-ci étant le garant des institutions nationales, le contrôle et la vérification de la bonne marche de l'exécution budgétaire devraient donc être menés sous son autorité. Cependant, cette subordination ne peut-elle comporter de risques ? En effet, répondant seulement à l'autorité du chef de l'Etat, le contrôle supérieur de l'Etat ne peut-il commettre des excès de pouvoir, préjudiciables aux autres administrations ? Dans la mesure où ils ont toute liberté d'action dans le cadre de leurs opérations de vérification, bien qu'ils soient des professionnels sensés éviter tout écart de conduite, il est nécessaire de prévenir ces excès plutôt que de les sanctionner, étant entendu que, la sanction intervenant a posteriori, l'acte dommageable pourrait déjà avoir eu des conséquences sur la situation d'une quelconque personne. De plus, quelles mesures permettent de garantir l'indépendance du Contrôle supérieur de l'Etat dans le contrôle et la vérification des comptes du chef de l'Etat, dont il dépend directement ? La réponse à ces différentes questions pourrait permettre l'amélioration et une meilleure crédibilisation du rôle du Contrôle supérieur de l'Etat au Cameroun.

    Après avoir mené ses opérations de vérification, le Ministère délégué à la Présidence de la République peut envoyer le gestionnaire public contrevenant devant le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière.

    2°) Le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière

    Créé parleDécret N°2008/028 du 17 janvier 2008 portant organisation et fonctionnement du   Conseil de Discipline Budgétaire et Financière, le Conseil est « chargé de prendre des sanctions à l'encontre des agents publics, patents ou faits, coupables des irrégularités et fautes de gestion commises dans l'exercice de leurs fonctions, irrégularités et  fautes ayant eu pour effet de porter préjudice aux intérêts de la puissance publique »41(*). Pour ce faire, il sanctionne et exerce un contrôle sur les personnes occupant des fonctions qui leur permettent d'être comptables et gestionnaires des biens publics.

    Pour assurer la réussite de ses missions, le Conseil comprend « les représentants des administrations particulièrement impliquées dans la sauvegarde du patrimoine public »42(*). Il statue par décision, rendue au terme d'une procédure particulière. Cette procédure s'ouvre par la saisine du Conseil, faite par une autorité supérieure de l'Etat. A la suite de cette saisine, le Conseil mène des enquêtes pour asseoir sa conviction sur les faits, avant de rendre une décision adoptée à la majorité des membres présents43(*). Le décret n'ayant pas précisé s'il s'agit d'une majorité proportionnelle à un quelconque nombre de voix, il faut croire que la majorité simple des voix permet l'adoption d'une décision du Conseil. Ses décisions ne peuvent faire l'objet que d'un recours en annulation, devant la Chambre administrative de la Cour suprême, ou d'un recours en réformation, en cas de survenance d'un élément nouveau ignoré des parties et du conseil avant le prononcé de la décision.

    Le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière constitue donc l'instance disciplinaire suprême de l'Etat. Loin de constituer une juridiction, il ne peut infliger que des sanctions pécuniaires, et celles pénales ou administratives seront éventuellement infligées par les autorités judiciaires ou hiérarchiques du mis en cause. Il ne saurait donc être confondu avec ces deux types d'organes. Lorsque certaines mesures administratives doivent être prises à l'encontre d'un fonctionnaire, le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière peut transmettre le cas du mis en cause à une Commission ministérielle de lutte contre la criminalité financière, instituée par l'un des programmes élaborés à cet effet.

    3°) Les Programmes ministériels de lutte contre les infractions financières

    Au Cameroun, la lutte contre la criminalité financière semble de plus en plus s'ériger en impératif majeur. C'est ainsi qu'au sein des départements ministériels, plusieurs programmes sont mis en place afin de combattre ces infractions. Cependant, il faut signaler qu'il s'agit, dans la presque totalité des cas, de Programmes de lutte contre la corruption. Ceux-ci aident à lutter contre ce fléau, en collaboration avec la CONAC. Agissant de manière presque autonome, ils peuvent prendre certaines sanctions administratives à l'endroit des contrevenants. Les départements ministériels peuvent aussi déployer leur action dans leurs domaines respectifs, en énonçant des initiatives de lutte contre la corruption.

    Ainsi donc, au sein du Ministère des Enseignements Secondaires, il a été procédé au lancement, le 28 Octobre 2009 à Yaoundé, du projet FACTS (FightAgainst Corruption TroughSchool)44(*). Ce projet, lancé par Monsieur BAPES BAPES Louis, Ministre des Enseignements Secondaires, a pour but d'amener les populations cibles à intégrer le processus de lutte contre la corruption, à travers une éducation approfondie. De plus, allant dans ce sens, un forum a été organisé à Douala du 19 au 23 Juillet 2010, portant sur la Stratégie nationale de lutte contre la corruption, particulièrement en ce qui concerne le secteur de l'éducation secondaire.45(*)

    On le voit, l'impératif de la lutte contre la criminalité financière est devenu national, touchant directement les départements ministériels. Cependant, il faut noter que cette mobilisation générale tend à se limiter à certaines infractions, particulièrement la corruption. Pour cela, l'oeuvre des organes gouvernementaux de lutte contre la criminalité financière est complétée par celle de certains organes indépendants.

    B- Les organes indépendants de lutte contre la criminalité financière

    Le système camerounais de répression de la criminalité financière connait l'intervention de deux grands organes indépendants : la Commission Nationale Anti Corruption (1) et l'Agence Nationale des Investigations Financières (2)

    1°) La Commission Nationale Anti Corruption

    Face à la nécessité d'envisager une lutte active contre la corruption, le Cameroun a dû adopter une stratégie organisée contre ce fléau. La corruption, « envers des Droits de l'Homme »46(*), nécessitait une approche spécifique. Pour ce faire, le Cameroun a d'abord procédé en 1997 à la création d'un Comité ad hoc inter ministériel de lutte contre la corruption. Par la suite, il a été constaté que le phénomène de corruption ne pouvait être résolu par un simple comité inter ministériel, car il s'étendait bien au-delà de la sphère gouvernementale. Aussi, par l'Arrêté N°001/PM du 04 Janvier 2000, il a été procédé à la création de l'Observatoire National de Lutte contre la Corruption (ONLC).

    Par la suite, face aux défaillances de l'ONLC sur le plan de la mise en oeuvre de la lutte contre la corruption, le Président de la République a procédé à la création, en 2006, de la Commission Nationale Anti Corruption (CONAC). Cette commission était déjà prévue dans l'article 6 de la Convention des Nations Unies contre la corruption et 7 de la Convention de l'Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. C'est finalement le Décret N°2006/008 du 11 Mars 2006 qui va porter création, organisation et fonctionnement de la Commission Nationale Anti Corruption. Celle-ci, selon l'article 2 du décret, est chargée de :

    - Suivre et évaluer l'application effective du plan gouvernemental de lutte contre la corruption ;

    - Recueillir, centraliser et exploiter les dénonciations et informations relatives à la corruption et infractions assimilées ;

    - Mener toutes études ou investigations et proposer toutes mesures de nature à prévenir ou à juguler la corruption ;

    - Procéder, le cas échéant, au contrôle physique de l'exécution des projets et à l'évaluation des conditions de passation des marchés publics ;

    - Diffuser et vulgariser les textes sur la lutte contre la corruption ;

    - Identifier les causes de la corruption et proposer aux autorités compétentes les mesures susceptibles de permettre de l'éliminer dans tous les services publics ou parapublics ;

    - Accomplir toutes autres missions à elle confiées par le Président de la République.

    Afin de réaliser les objectifs à elle assignés, la CONAC a adopté une certaine organisation (a), permettant le fonctionnement de la Commission(b).

    a) Organisation de la CONAC

    L'organisation de la CONAC, sur le territoire camerounais, est divisée entre deux organes principaux, le Comite de coordination et le Secrétariat permanent. Son siège national se trouve à Yaoundé. C'est à ce niveau que sont coordonnées les différentes opérations de lutte contre la corruption menées sur l'ensemble du territoire national. Le comité de coordination, composé de onze membres dont un Président et un Vice Président, est en quelque sorte l'organe de direction de la Commission. Ses missions sont déterminées par l'article 5 du décret du 11 Mars 2006. Le Secrétariat permanent, quant à lui, organe exécutif de la commission, comprend trois services et trois divisions.

    Pour assurer le travail effectif des structures de la CONAC, celle-ci travaille avec des Commissions de Lutte contre la Corruption. Ces différentes commissions sont présentes au sein de chaque service, et sont chargées de coordonner l'action de lutte contre la corruption au sein dudit service. Elles travaillent en collaboration avec la CONAC, et lui dressent des rapports après chacune de leurs sessions.

    Afin d'assurer l'indépendance et la crédibilité de la CONAC, son organisation est telle qu'elle est responsable devant le Président de la République. Ceci permet donc d'éviter d'influencer son point de vue sur des agissements du Gouvernement ou de quelque autorité que ce soit. Toutes choses qui tendent à assurer la transparence de ses agissements et la crédibilité de ses actes.

    b) Fonctionnement de la CONAC

    Afin de remplir les missions qui lui ont été confiées, la CONAC s'est attelée à mettre en place différents programmes de lutte contre la corruption. D'abord, pour donner une vision de la lutte qu'elle compte mener contre ce fléau, il a fallu élaborer un document de politique générale permettant d'avoir une vision des grands axes de la lutte contre la corruption qui serait engagée. Aussi la CONAC a-t-elle élaboré le Document de Stratégie Nationale de Lutte contre la Corruption (DSNLC).

    Ce document, élaboré en Septembre 2010, présente les grands axes de la lutte contre la corruption, à mettre en oeuvre au cours des années 2010 à 2015. Pour cela, il procède d'abord à une revue complète des secteurs et piliers d'intégrité prioritaires retenus, effectue ensuite un état des lieux et un diagnostic complet de la lutte contre la corruption pour proposer un plan d'action stratégique, et enfin élabore des mécanismes de coordination et de suivi évaluation.

    Ainsi donc, le Chapitre I situe le processus d'élaboration de la Stratégie dans son contexte et ses fondements, en s'appuyant sur la Vision 203547(*) du Gouvernement camerounais. Le Chapitre II, quant à lui, présente les stratégies sectorielles de lutte contre la corruption, en passant en revue les secteurs prioritaires retenus. Le Chapitre III, pour sa part, présente les stratégies de développement des piliers d'intégrité et le suivi de la démarche des stratégies sectorielles. Enfin, le Chapitre IV présente le mécanisme de coordination et de suivi de la mise en oeuvre de la Stratégie Nationale de Lutte contre la Corruption.

    Pour mettre en pratique cette lutte contre la corruption, la CONAC a aussi procédé, le Vendredi 08 Avril 2011, au lancement de la première phase des Initiatives à Résultats Rapides (IRR). L'objet de ces initiatives était de déterminer des secteurs cibles dans lesquels des opérations seraient menées. Ainsi, pendant cent jours, lesdits secteurs seraient sous une surveillance participative destinée à changer les comportements. Pour coller à la stratégie nationale de lutte contre la corruption, cinq types d'initiatives devaient être menées de manière simultanée48(*) :

    - Prévention des cas de corruption ;

    - Education des usagers et des agents appelés à les servir ;

    - Elimination des conditions favorables aux actes de corruption ;

    - Incitation des acteurs à s'éloigner de la corruption, par exemple en récompensant les plus intègres ;

    - Sanction des personnes pratiquant la corruption.

    Cette première phase des IRR, lancée dans la Région du Centre, devrait servir de test pour le déploiement d'une plus vaste campagne de lutte contre la corruption sur l'étendue du territoire national. Les secteurs cibles pour cette première vague sont principalement les domaines de la santé publique et des marchés publics, dans lesquels la corruption est sensée avoir fait son chemin depuis longtemps, et être même ancrée dans les mentalités des populations.

    Pour ce qui est du fonctionnement des Cellules de lutte contre la corruption, qui collaborent avec la CONAC au sein de chaque service, elles ont aussi une certaine autonomie de fonctionnement. Ainsi, elles sont chargées de mettre en place une stratégie propre à leur service, permettant une meilleure éradication de la corruption. Elles statuent sur les cas qui leur sont référés, et sont habilitées à prendre des sanctions contre les contrevenants49(*). Dans le cas où il s'avère nécessaire de saisir les tribunaux compétents afin de poursuivre les auteurs ou complices d'actes de corruption, ces cellules peuvent directement saisir les juridictions pour que des poursuites soient engagées. Cependant, elles dressent des rapports à la CONAC après chacune de leurs sessions, afin de permettre à cette structure d'avoir un suivi des activités menées dans le cadre de la lutte contre la corruption sur toute l'étendue du territoire national.

    Enfin, il faudrait signaler que les membres de la commission disposent des pouvoirs de suivi, d'évaluation et d'investigation dans l'accomplissement de leur mission. De plus, « les résultats des investigations de la commission donnent lieu à des poursuites disciplinaires ou judiciaires. » Pour assurer le suivi des poursuites devant les tribunaux, le Président de la commission désigne un représentant de la commission.

    c) Evaluation de l'action de la CONAC

    Depuis sa création, la CONAC a, comme nous avons eu à le relever, entrepris plusieurs actions pour la lutte contre la corruption. Ces actions vont de l'établissement d'un planning d'activités à la publication, le 10 Novembre 2011, d'un rapport sur l'état de la corruption au Cameroun. Ce rapport rend compte des disfonctionnements observés dans la gestion étatique, en relevant, non seulement les cas de corruption, mais aussi ceux des infractions assimilées. A titre d'exemple, le rapport relève que près de 14 milliards de francs ont été détournés dans les dix régions du pays. Comme autre exemple, au Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural, plus de 600 millions de francs destinés au Projet Maïs auraient été détournés.

    Le rapport de la CONAC, tel qu'il a été présenté, semble relever un fort taux de corruption au sein de certains départements ministériels particuliers, comme le Ministère des Travaux publics. Au sein de ce ministère, la CONAC ne s'est pas contentée de relever les cas de commission, mais aussi est partie au-delà, en énumérant de manière concrète les commissions d'autres infractions annexes. Comme exemple, s'agissant du marché de construction de la route Ayos - Bonis, la CONAC relève une collusion qui «a entraîné une prolongation infinie des délais contractuels de construction de la route, passés de 25 mois à 66 mois pour le lot 1 et de 30 mois à 56 mois pour le lot 2 encore inachevé »50(*). La corruption, pour ce même projet, est constituée par des « libéralités faites par l'entreprise à certains fonctionnaires du ministère des Travaux publics »51(*). Les fraudes, qui ne sont pas en reste, sont, sur le projet de construction de cette même route, matérialisées par des « surfacturations, paiements en trop et paiements erronés au détriment e l'Etat »52(*).

    Le rapport donné par la CONAC sur l'évaluation de ses activités, bien qu'attendu depuis de nombreuses années53(*), semble apporter quelques réponses aux questions que l'on ne manquait pas de se poser sur son utilité. Cependant, on pourrait d'abord se demander si, pour certaines irrégularités relevées par la Commission, il n'aurait pas été plus utile de signaler aux autorités compétentes le fait délictueux au moment de sa découverte ? En effet, il est évident que, en signalant, trois ans après, des disfonctionnements observés dans la gestion du service public, il devient difficile d'engager des poursuites contre les auteurs d'infractions, dès lors qu'ils ont pu avoir du temps pour dissimuler leurs faits. De plus, en laissant le temps faire son oeuvre, l'on court le risque de faire subir les méfaits de la criminalité financière aux populations, du fait entre autres du sentiment d'impunité cultivé chez les criminels. La CONAC gagnerait donc à corriger les lenteurs enregistrées, afin d'améliorer la lutte contre la corruption et les infractions assimilées ou apparentées, par une célérité dans l'information des autorités judiciaires, dans la prise de diverses mesures préventives et répressives. Enfin, il faut signaler que, pour atteindre le dernier objectif donné aux Initiatives à Résultat rapide, qui est la sanction des personnes corrompues, il est nécessaire que la CONAC puisse collaborer à temps avec les autorités judiciaires, de manière à ce que cette sanction soit effective.

    A côté de la CONAC, une autre structure indépendante est chargée de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun, il s'agit de l'Agence Nationale des Investigations Financières.

    2°) L'Agence Nationale des Investigations Financières (ANIF)

    Dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en Afrique centrale, les Etats de la sous région ont adopté, le 04 Avril 2003 à Yaoundé, le Règlement N°01/03-CEMAC-UMAC-CM portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique Centrale. Ce règlement, tout en organisant la lutte contre les infractions sus citées, prévoit la création au sein de chaque Etat d'une Agence Nationale d'Investigation Financière. Pour mettre en pratique les dispositions du Règlement CEMAC N°01/03, le Président de la République a procédé au Cameroun à la mise en place de cette agence, à travers le Décret N°2005/187 du 31 Mai 2005 portant organisation et fonctionnement de l'Agence Nationale d'Investigation Financière.

    Cette agence a pour mission :

    - « De recevoir , de traiter et, le cas échéant, de transmettre aux autorités judiciaires compétentes tous renseignements propres à établir l'origine des sommes ou la nature des opérations faisant l'objet de la déclaration de soupçon au titre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ;

    - D'obtenir des informations utiles à sa mission des autorités judiciaires et de contrôle des assujettis ;

    - De constituer une banque des données contenant toutes informations utiles concernant les déclarations de soupçon prévues par le Règlement, les opérations effectuées ainsi que les personnes ayant effectué l'opération, directement ou par personnes interposées »54(*)

    Pour atteindre ces objectifs, l'ANIF a adopté une organisation et un fonctionnement particuliers.

    a) Organisation

    Contrairement à la CONAC, l'ANIF n'est pas totalement indépendante. En effet, elle est rattachée au Ministère en charge des finances. Cependant, elle est dotée d'une autonomie financière et d'un pouvoir de décision sur les matières relevant de sa compétence, ce qui permet de lui reconnaître une certaine autonomie de gestion.

    L'ANIF comprend, pour l'exécution de ses missions, quatre membres assermentés, dont un directeur nommé par le Ministre en charge des finances pour un mandat de trois ans renouvelable une fois, et trois chargés d'études55(*). De plus, l'ANIF dispose aussi de services d'appui, qui lui permettent de mieux exercer son action.

    b) Fonctionnement

    Pour son fonctionnement, l'ANIF désigne des correspondants au sein de certaines administrations, qui lui permettent d'assurer la coopération avec lesdites organisations. Ceux-ci cessent d'exercer leurs fonctions, ainsi que toute activité pouvant porter atteinte à l'indépendance de leurs fonctions au sein de l'agence, pour assurer le respect de l'autonomie de l'Agence. Trimestriellement, l'ANIF élabore des rapports d'activités, qui recensent les techniques de blanchiment relevées sur le territoire national et formulent des propositions visant à renforcer la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Un rapport récapitulatif est dressé à cet effet annuellement par l'agence. Ces rapports sont adressés à diverses autorités permettant de mettre en place un dispositif efficient de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

    Dans l'exercice de ses missions, l'ANIF reçoit les déclarations de soupçons émanant des personnes assujetties56(*). Elle analyse ces déclarations à la lumière de toutes informations complémentaires lui permettant d'établir la vérité sur les faits allégués. Elle peut par la suite soit saisir le Procureur de la République, soit former opposition à l'exécution des opérations susceptibles de relever de toutes infractions prévues par le Règlement CEMAC. La déclaration de soupçon faite à l'ANIF consiste à déclarer toute opération financière douteuse ou tous biens dont l'origine est frauduleuse ou incertaine. Cela permet à l'Agence de pouvoir mener des enquêtes afin de connaître la vérité sur l'origine illicite desdits fonds.

    Pour terminer, il faut préciser que la déclaration de soupçon est obligatoire pour les personnes assujetties et non facultative, ce qui fait en sorte que toute personne qui ne fera pas cette déclaration s'expose soit à des poursuites judiciaires, soit à des sanctions de la part de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire.

    Ainsi donc, afin de mener une lutte efficiente contre la criminalité financière, le Cameroun a adopté un système mixte, alliant l'usage d'une pluralité de textes nationaux et internationaux à l'action d'organes judiciaires et extrajudiciaires. Ces textes et institutions ont été mis en place afin de permettre une meilleure lutte contre la criminalité financière, qu'il serait bon d'analyser, afin de savoir de manière effective comment elle se présente au Cameroun.

    Chapitre II :

    ANALYSE DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    La criminalité peut être définie comme l'ensemble des infractions pénales qui ont été commises au cours d'une période déterminée (année, décennie), soit dans un Etat et ses diverses circonscriptions judiciaires, policières, administratives, soit dans un tout autre lieu bien précis. 57(*)Ayant défini la criminalité financière comme « toutes infractions qui violent les normes légales faites par l'Etat pour réglementer la vie des affaires »58(*), il est nécessaire de connaitre comment se présente ce type de criminalité au Cameroun.

    La présentation de la criminalité financière au Cameroun se fera donc en 2 étapes : d' abord nous procèderons à l'étude des infractions financières rencontrées au Cameroun (Section 1), ensuite nous montrerons l'impact de la criminalité financière sur la société camerounaise (Section 2).

    SECTION I : LA PARTICULARITE DES INFRACTIONS FINANCIERES AU CAMEROUN

    L'étude du droit camerounais présente une caractéristique importante en ce qui concerne la répression et l'incrimination des délits financiers. En effet, l'on semble remarquer que l'accent est plus mis sur certaines infractions que sur d'autres. Cela semble être dû à la prise en compte dans la répression de l'impact que joue chaque infraction dans la société du pays. Aussi met-on plus l'accent sur les infractions ayant un fort impact sur l'économie du pays. Dans le cadre de notre étude, nous verrons les infractions financières au Cameroun en les scindant en deux groupes. D'abord, parce qu'elles sont les infractions non seulement les plus combattues de par leur implantation dans la société camerounaise, mais aussi les plus difficiles à poursuivre, en raison d'un certain nombre de critères, l'étude de la corruption et des infractions qui lui sont apparentées (paragraphe 1), précèdera celle des autres infractions financières (paragraphe 2).

    PARAGRAPHE 1 : LA CORRUPTION ET LES INFRACTIONS APPARENTEES

    Selon Hyacinthe SAWADOGO59(*), la corruption est un phénomène comportant cinq principaux aspects à savoir : la corruption proprement dite, les infractions apparentées à la corruption :trafic d'influence, ingérence et concussion ; les infractions assimilées à la corruption : le détournement des deniers publics et la destruction des pièces par les fonctionnaires .Dans notre analyse du phénomène de la corruption, nous verrons d'abord la corruption et les infractions assimilés (A), avant d'aborder les infraction apparentées à la corruption (B)

    A- La corruption et les infractions assimilées

    La corruption telle que l'on la connait, fait l'objet d'un régime juridique particulier qu'il est nécessaire d'étudier (1) ; cependant certains actes qui peuvent constituer des infractions différentes, sont souvent assimilés à la corruption et connaissent l'application de dispositions prévues pour cette infraction(2).

    10) La corruption

    Selon l'article 312 du Code pénal, la corruption est abordée comme étant l'action de recevoir des dons ou agréer des promesses pour faire ou s'abstenir de faire un acte de service. Le Vocabulaire juridique quant à lui la définit comme étant le « détournement ou trafic de fonction, dite passive lorsqu'un individu se laisse acheter au moyen d'offres, de promesses,dons, présents ou un avantage quelconque en vue d'accomplir un acte de sa fonction ou de s'en abstenir ;active lorsqu'un individu rémunère par les mêmes moyens la complaisance d'un professionnel » .60(*) Une autre définition de la corruption nous est donnée par la Convention de l'OCDE sur la corruption d'agents publics étrangers (non encore ratifiée par le Cameroun)61(*), qui l'appréhende comme étant « le fait intentionnel, pour toute personne , d'offrir , de promettre ou d'octroyer un avantage indu pécuniaire ou autre directement ou par des intermédiaires, à un agent(...), à son profit ou au profit d'un tiers, pour que cet agent agisse ou s'abstienne d'agir dans l'exécution de fonctions officielles, en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un avantage indu(...) »

    C'est dire que, pour qu'il y'ait accomplissement d'un acte de corruption, il faudrait une situation dans laquelle un individu soit investi d'un pouvoir public ou privé62(*). Comme la plupart des infractions financières, la corruption est considérée comme une infraction formelle et non matérielle, c'est-à-dire qu'elle est réprimée indépendamment de son résultat éventuel. Pour la poursuivre, il faudrait nécessairement la réunion de quatre éléments qui sont :

    · Un corrupteur

    · Un corrompu

    · L'offre d'un avantage indu

    · La recherche de l'exécution d'une prestation.

    a-) Un corrupteur

    Pour ce qui est du corrupteur, à la suite de la convention de l'OCDE qui incrimine « toute personne », l'article 134 bis du code pénal parle de « quiconque, pour obtenir(...) » ; c'est dire que toute personne peut être corrupteur. Il suffit que cette personne ait agi avec l'intention d'amener une autre à accomplir ou à ne pas accomplir un acte de sa fonction en échange d'un avantage à lui offrir.

    b-) Un corrompu

    Dans le cadre de la répression de l'infraction de corruption, il est important de se poser la question de savoir qui peut être considéré comme corrompu ? En effet, alors que la convention de l'OCDE précitée parle de « corruption d'agents publics étrangers », le code pénal camerounais envisage la corruption sous l'angle de trois types de personnes corruptibles :

    - la corruption d'un électeur ou d'un collège électoral (article 123 code pénal)

    - la corruption de fonctionnaire ou d'agent public (article 134 code pénal)

    -la corruption d'un employé (article 312 code pénal).

    Est-ce à dire que seules ces trois qualités de personnes peuvent être considérées comme corrompues ? Une interprétation large de l'article 134 bis du code pénal apporte une réponse satisfaisante à cette question. En effet, il incrimine dans son alinéa 1 « quiconque(...) cède à des sollicitations tendant à la corruption ».Cet article pourrait ainsi constituer le droit commun de la répression de l'infraction de corruption, et les autres ne seraient que des incriminations spéciales. Ainsi donc, toute personne peut être considérée comme corrompue, dès lors qu'elle a accepté un avantage indu en vue de réaliser un acte de sa fonction.

    Cependant, si l'on considère les infractions financières comme étant essentiellement des atteintes à la situation économique des particuliers ou de l'Etat, il faudrait exclure du cadre de notre étude la corruption en matière électorale. En effet, elle constitue essentiellement une infraction à caractère moral, en ce qu'elle est constituée par des promesses faites dans le but d'aboutir à un détournement des volontés des électeurs. Aussi ne faut-il considérer, comme personne pouvant être considérée comme corrompue au regard du Code pénal camerounais dans le cadre des infractions financières, que l'employé ou le fonctionnaire.

    Une inquiétude doit pourtant être soulevée à ce niveau. En effet, l'incrimination de la corruption au regard du Code pénal camerounais semble ne viser que deux qualités de personne, qui par nature sont soumises au pouvoir hiérarchique d'une autorité supérieure. L'employé reçoit par définition des instructions de son employeur, et le fonctionnaire ou agent public est soumis à l'Etat. C'est ce qui a poussé NCHIMI MEBU Jeanne à estimer qu' « il est en outre surprenant de constater que l'article 312 ne vise pas l'employeur qui pourtant peut être le principal instigateur de la corruption. »63(*) Certes, l'employeur peut être puni en cas de complicité avec son employé, mais qu'en est-il s'il accomplit lui-même un acte constitutif de corruption ? Ou alors, quelle solution appliquer dans le cas où l'employé agit avec l'autorisation de son patron ?

    Une analyse de l'auteur précité estime que l'autorisation de l'employeur, qui pourrait exonérer l'employé64(*), « s'inscrit dans la logique des instructions inhérentes au pouvoir de gestion du chef d'entreprise et ne doit logiquement être donnée que pour des actes licites, sans doute davantage pour éviter des attitudes compromettantes pour l'entreprise ou la société que pour encourager la commission des infractions. »65(*) Est-ce à dire que l'employeur, propriétaire de l'entreprise, étant en principe le bénéficiaire de sa bonne marche, ne pourra pas être poursuivi s'il commet un acte caractéristique de corruption, alors que cet acte est nuisible à l'entreprise ? Une telle approche semble injuste et pourrait entrainer de graves conséquences, car, s'il est vrai que cet employeur est le premier bénéficiaire au sein de l'entreprise, la commission d'actes préjudiciables à celle-ci aura des répercussions sur l'activité de plusieurs personnes. Le simple fait de favoriser une personne méritante au détriment d'une autre peut entrainer à la longue la chute de l'entreprise, par un véritable mécanisme de cause à effet.

    Il est donc nécessaire, voir impératif, de revoir la détermination de la personne pouvant être considérée comme corrompue dans la poursuite de l'infraction de corruption. Au-delà de la personne corrompue et du corrupteur, le troisième élément qui permet de qualifier un acte de corruption est l'offre faite d'un avantage indu.

    c-) L'offre d'un avantage indu

    L'offre d'un avantage indu constitue à n'en point douté l'élément clé de l'infraction de corruption. En effet, l'on ne saurait parler de corruption s'il n'y a pas d'offre d'un avantage que le corrompu n'aurait pas eu s'il n'occupait pas sa fonction. Certaines précisions méritent donc d'être précisées ici :

    - D'abord l'avantage offert doit être tel que la personne qui doit le recevoir ne l'aurait jamais eu dans des circonstances normales. Donc, on ne pourrait pas considérer comme acte de corruption le paiement dû à une personne pour un acte de sa fonction, comme le cas des honoraires d'un avocat.

    - Ensuite, pour ce qui est de la nature de l'avantage, il faut rappeler qu'il s'agit de toutes sortes d'avantages. Bien que, dans la presque totalité des cas de corruption, il s'agisse d'un avantage pécuniaire (ce qui fait rentrer ce type d'infraction dans le groupe des infractions financières), le code pénal parle d' « offres, promesses, dons ou présents ».Il va plus loin en parlant de « rétribution en espèce ou en nature » (article 134-3). Ainsi donc, toute sorte d'avantage proposé, que le corrompu n'aurait pas pu avoir en temps normal, permet de qualifier l'infraction de corruption.

    d-) La recherche de l'exécution d'une prestation

    Dans la qualification de l'infraction de corruption, l'exécution d'une prestation doit plus constituer un mobile, un objectif recherché qu'un résultat atteint. La prestation à exécuter doit être en rapport avec les fonctions ou attributions de la personne corrompue. Toutefois, elle peut être retenue comme mobile lorsque l'acte à exécuter « n'entrait pas dans les attributions de la personne corrompue ; mais a été cependant facilité par sa fonction ».Cependant, il convient d'apporter deux remarques à ce niveau :

    - la prestation recherchée peut ne pas être exécutée, mais l'intention délictuelle sera retenue pour qualifier l'infraction de corruption; aussi l'article 134 bis alinéa 1 précise-t-il que les peines sont applicables, « que la corruption ait ou non produit ses effets » ;

    - la prestation recherchée peut avoir déjà été exécutée, mais l'avantage reçu intervient après. Ici, l'on retiendra l'infraction de corruption pour sanctionner l'agent qui retire des rémunérations pour des actes qu'il doit normalement accomplir dans le cadre de ses fonctions. En effet, même si les sollicitations tendent à « rémunérer un acte déjà accompli ou uneabstention passée », dès lors que cet avantage est remis à une personne, l'infraction de corruption sera caractérisée. Une question intéressante à ce niveau concernera alors le cas des récompenses compromettantes, assez régulières au Cameroun. Sont-elles constitutives de corruption ?

    Une réponse à cette question est apportée par le Professeur NCHIMI MEBU. Selon elle, cette attitude « est caractéristique de corruption dans notre système répressif. En effet, si les dons ou les avantages sont en général consentis en guise d'incitation avant l'accomplissement de l'acte sollicité, il peut parfois arriver que le corrupteur ne fasse qu'une promesse de dons ou de versement, exécutée seulement après l'accomplissement de cet acte. Dans ce cas, la jurisprudence66(*) subordonne la commission de l'infraction à la preuve de l'antériorité du pacte corrupteur, comportant promesse d'une remise ultérieure. Mais, il n'est pas nécessaire de préciser l'antériorité lorsque la corruption ne se traduit pas seulement par un fait isolé, mais comporte des relations suivies.67(*) »68(*) La qualification de corruption donnée à une récompense accomplie postérieurement à l'acte posé doit donc être soumise à deux conditions : soit la récompense en question a été préalablement promise, soit elle rentre dans le cadre d'une pratique habituelle. La pratique du précédent entrainant d'office la conclusion d'un pacte corrupteur. Aussi a-t-il été estimé que : « les dons récompensant les actes passées ont pour but de faciliter les services futurs.69(*) » En l'absence de l'habitude ou de la promesse préalable, le fait de recevoir un don pour une prestation exécutée sans avoir eu l'intention de le faire rémunérer semble donc ne pas constituer un acte de corruption.

    A coté de la corruption, certains actes pouvant être considérés comme des infractions à part entière, sont souvent assimilés à la corruption.

    2°) Les infractions assimilées à la corruption

    L'assimilation est un « procédé technique consistant, pour le législateur, une convention ou un interprète, à rattacher une situation, un cas ou une notion juridique à une catégorie voisine, en faisant abstraction de leurs différences, afin de soumettre, en toutou partie, l'élément assimilé au même régime juridique que la catégorie de rattachement »70(*).Les infractions assimilées à la corruption sont donc des actes voisins de la corruption, qui certes lui ressemblent mais ne constituent pas exactement des cas de corruption.Cependant, dans leur répression ou les assimile le plus souvent à des cas de corruption. L'assimilation qui est faite de ces actes à la corruption tient principalement au fait que, bien qu'ayant des éléments constitutifs qui diffèrent un peu de la corruption, ils sont réprimés, lorsqu'ils sont commis, sous la qualification de « corruption ».Il s'agit principalement des actes de fraude, de coercition et de collusion.

    a-) Les actes de fraude

    L'on entend par actes de fraude des « actes de mauvaise foi, de tromperie, actes accomplis dans le dessein de préjudicier à des droits que l'on doit respecter »71(*). Les actes de fraude sont aussi des « agissements illicites par emploi illégaux »72(*)ou encore des « agissements illicites par l'emploi de moyens réguliers »73(*).

    Afin de qualifier un acte de fraude, l'élément essentiel à retenir est qu'il s'agit d'un acte réalisé dans le but de contourner la loi ou une disposition quelconque, ceci afin d'atteindre un objectif. L'objectif visé est de faire passer pour conforme une situation contraire à la loi. Comme dans les cas de corruption, le fraudeur agi dans l'intention d'obtenir la réalisation de son objectif ou l'exécution d'une prestation. Aussi peut-il passer par la corruption d'une personne afin que son acte frauduleux soit pleinement consommé.

    Le code pénal prévoit un certain nombre d'actes de fraude allant des fraudes électorales aux fraudes en justice, les faux en écriture privée ou de commerce74(*), le cas de faux poids et mesures75(*) et celui de la fausse monnaie76(*). Pour ce qui est des fraudes à la législation fiscale, elles seront étudiées plus loin. En dehors de ces cas énumérés, la poursuite d'un acte constitutif de fraude sera assimilée à la corruption dans sa qualification.

    Ainsi donc, les cas de fraude, comme la corruption, sont des infractions financières tendant à l'obtention d'un avantage indu ou à une prestation de la part d'une autre personne. C'est pour cela que certains actes de fraude sont souvent pris pour des cas de corruption, à cause de leur ressemblance. C'est donc en cela qu'on les considère comme des infractions assimilées à la corruption.

    b-) Les actes de coercition

    Les actes de coercition sont des « moyens de pression destinés à obtenir par intimidation l'exécution d'une obligation »77(*). Souvent considérés comme des cas de corruption morale, les actes de coercition constituent en principe des infractions à part entière.

    Le code pénal camerounais n'envisage que le cas de contrainte de fonctionnaire78(*), c'est-à-dire « celui qui par voies de fait ou menaces, détermine un fonctionnaire à un acte ou à une abstention irréguliers ». Sachant que la contrainte exercée peut être de tout ordre et même financière, les autres cas de coercition exercés sur une personne en vue de l'amener à accomplir un acte ou une abstention irréguliers entreront dans le cadre plus large de l'incrimination de corruption. C'est donc pour cela que les actes de coercition sont considérés comme des infractions assimilés à la corruption.

    c-) Les actes de collusion

    La collusion est définie comme une « entente secrète entre deux ou plusieurs personnes en vue d'en tromper une ou plusieurs autres ». De manière générale, les actes de collusion débouchent sur des cas d'escroquerie ou de corruption en groupe. L'entente étant secrète, elle suppose que la personne trompée n'est pas au courant de l'association des deux premières en vue de la tromper.

    Le code pénal ne prévoit pas expressément de disposition sur la collusion. Aussi, lorsqu'un cas de collusion est commis, il tombera sous le coup de l'infraction de corruption si la tromperie envisagée entend utiliser l'un des modes de commission de l'infraction de corruption. Dans le cas contraire, on pourrait parler d'une association de malfaiteurs.

    Après avoir étudié la corruption et les infractions qui lui sont assimilées, nous procèderons à l'analyse des infractions financières apparentées à la corruption.

    B- Les infractions apparentées a la corruption

    Les infractions apparentées à la corruption sont des infractions dont les éléments constitutifs rappellent quelque peu ceux de la corruption, mais qui font l'objet d'un régime juridique qui leur est propre. Selon NCHIMI MEBU, « la corruption doit être distinguée de certaines infractions qui, tout en lui étant connexes, se singularisent par leurs éléments constitutifs, la parenté juridique avec le délit de corruption tenant essentiellement de ce que ces infractions peuvent elles aussi, soit conférer des avantages illégitimes, ou alors favoriser la réalisation de la corruption. »79(*) On en dénombre principalement trois : le trafic d'influence, l'ingérence et la concussion.

    1°) Le trafic d'influence

    Selon l'article 16 alinéa 1 du code pénal camerounais, l'infraction « trafic d'influence » s'applique à « celui qui par voies de fait, menaces, dons ou promesses, corrompt une personne ayant une influence réelle ou supposée pour obtenir de l'autorité publique un avantage quelconque ».

    L'alinéa 2 va plus loin en ce qui concerne l'avantage recherché, en précisant qu' « est puni des mêmes peines, le fonctionnaire qui, reçoit des offres, promesses ou dons pour faire obtenir un avantage quelconque accordé par l'autorité publique ou par un organisme placé sous contrôle de l'autorité publique, des marchés, entreprises ou autres bénéfices résultant des conventions conclues avec l'autorité publique, abusant ainsi de l'influence réelle ou supposée que lui donne sa qualité ou son mandat ».

    Le trafic d'influence, bien qu'utilisant presque les mêmes moyens que la corruption (proposer des avantages à une personne pour l'accomplissement d'un acte facilité par sa fonction), constitue une infraction totalement différente. Ici, il est important d'apporter deux précisions :

    - D'abord, le trafic d'influence s'exerce par rapport à une personne dépositaire de l'autorité publique ; c'est-à-dire que le fait de corrompre une personne détentrice d'une autorité privée ne constitue pas un trafic d'influence, tout au plus constituera-t-il un cas de corruption. L'autorité publique est mise en exergue ici car elle est conférée par l'Etat et exercée par représentation de tout citoyen camerounais. Elle doit donc être utilisée de la manière la plus objective possible, sans qu'un parti quelconque soit pris.

    - Ensuite, le trafic d'influence se distingue d'un simple cas de corruption quant à l'objectif recherché par les délinquants. Dans les cas de corruption, l'objectif recherché est l'exécution d'une prestation quelconque. Dans le cas du trafic d'influence, c'est l'influence supposée ou réelle du représentant de l'autorité publique qui est recherchée pour être utilisée. C'est cette influence dont on voudrait se servir, en la monnayant ou en utilisant d'autres moyens de répression. Tel fut le cas dans les célèbres affaires STAVISKY en France et ENRON80(*) aux Etats Unis d'Amériques.

    Ainsi donc, le trafic d'influence utilise certains éléments matériels de la corruption, mais il constitue bel et bien une infraction financière à par entière. A coté de cette infraction, on en trouve d'autres qui sont apparentées à la corruption.

    2°) L'ingérence

    L'ingérence est une « infraction consistant, pour un fonctionnaire public, à s'immiscer dans les affaires incompatibles avec sa qualité »81(*). Elle consiste aussi «  pour un ancien fonctionnaire, à prendre, moins de cinq ans après la cessation de ses fonctions, une participation dans les entreprises qu'il administrait ou contrôlait82(*) ». Tout comme la corruption, l'ingérence concerne au premier chef les fonctionnaires, pris comme auteurs de l'infraction. De plus, il est question pour celui-ci, dans la commission de l'infraction, d'user d'une quelconque position afin d'obtenir un résultat qu'il n'aurait pas dû avoir. Cependant, les pratiques d'ingérence consistent pour le fonctionnaire à agir hors de ses fonctions, contrairement à la corruption, pour laquelle les fonctions du fonctionnaire sont utilisées pour faciliter la commission de l'infraction.

    Le code pénal envisage l'ingérence sur un plan beaucoup plus économique, en la qualifiant de « participation dans une affaire » ; à l'article 136, ensuite d' « abus de fonction ». C'est donc une infraction qui consiste à s'immiscer sans titre dans les affaires étatiques. Elle concerne au premier chef les fonctionnaires car ceux-ci sont titulaires de l'autorité publique, et de ce fait représentent la force publique.

    L'ingérence, telle qu'elle a été définie, est une infraction financière qui sert à punir les excès de pouvoir de la part des fonctionnaires. Elle permet de limiter les pouvoirs du fonctionnaire aux seules attributions qui lui ont été données lors de la désignation à son poste de responsabilité. Ainsi, cette infraction assure la protection des intérêts privés, en instituant la limite des pouvoirs du public sur le privé. L'adoption d'un délai de cinq ans après la cessation de fonctions démontre à loisir que la qualité de fonctionnaire ou agent public ne doit en aucun cas favoriser la participation dans des intérêts particuliers.

    Une remarque à apporter ici est que, lorsque les pratiques d'ingérence sont accomplies dans le but de procurer à autrui un avantage quelconque (comme dans les cas de corruption), les peines applicables au délinquant seront aggravées.

    3°) Les pratiques de concussion

    La concussion est définie comme le « fait pour un fonctionnaire ou un agent public d'exiger, de recevoir ou d'ordonner de percevoir à titre de droits, taxes, contributions ou impôts, des sommes qu'il sait n'être pas dues ».83(*)C'est d'abord une infraction contre l'intérêt public, ensuite contre l'intérêt des particuliers. C'est aussi le fait d'accorder des exonérations de taxes ou autres contributions dues à l'Etat.

    Ainsi donc l'infraction de concussion porte essentiellement sur les différentes contributions qui doivent être reversées à l'Etat. C'est dans ce sens que va l'article 142 du Code pénal, qui réprime l'infraction de concussion. Dans un cas, le fonctionnaire en cause permet aux citoyens de ne pas reverser à l'Etat ce qui lui est dû; dans un autre, il s'agit plutôt de créer des contributions non reconnues par l'Etat. C'est ce qui distingue principalement l'infraction de concussion aux autres précédemment étudiées, cette atteinte directe aux revenus de l'Etat.

    Ensuite, comme la plupart des autres infractions, l'infraction de concussion est commise par une personne agissant pour le compte de l'autorité publique. A coté des fonctionnaires, l'article 142 du code pénal incrimine «  le notaire, le commissaire priseur, l'huissier ou l'agent d'exécution et leurs préposés ». Ce sont donc des personnes qui, dans l'exercice de leurs fonctions privées, sont souvent chargées de la perception de redevances dues à l'Etat. De plus, dans l'exercice de leurs fonctions, ils sont souvent amenés à agir en vertu d'une certaine autorité que leur a conférée.

    Après avoir étudié comme infractions financières la corruption et les infractions qui lui sont apparentées, nous verrons à présent les autres infractions financières au Cameroun.

    PARAGRAPHE 2 : LES AUTRES INFRACTIONS FINANCIERES

    L'étude des autres infractions financières nous permet de les diviser en deux grands groupes : d'abord nous verrons les infractions faisant l'objet de dispositions générales (A), ensuite celles qui font l'objet d'une législation spéciale (B).

    A- Les infractions faisant l'objet de dispositions générales

    Parmi les infractions financières faisant l'objet de dispositions générales, certaines sont spécifiques au droit des affaires (1) tandis que d'autres sont des infractions de droit commun (2).

    1°) Les infractions spécifiques au droit des affaires

    Depuis l'adoption du traité de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) et des Actes Uniformes qui régulent des secteurs de la vie des affaires, le droit des affaires camerounais a connu une harmonisation avec celui des autres pays membres du traité. Cependant, avec l'adoption d'un droit des affaires uniforme, l'on a constaté l'apparition de plusieurs types d'infractions dites « infractions d'affaires », que nous avons classées en trois grands groupes :

    - les infractions commises par les dirigeants sociaux

    - les infractions commises par les experts intervenant dans la vie des affaires

    - les infractions commises par tous les autres acteurs de la vie des affaires.

    a-) Les infractions commises exclusivement par les commerçants ou dirigeants sociaux

    Les infractions commises par les dirigeants sociaux sont de plusieurs ordres. Autrefois, avant l'adoption d'un droit des affaires uniformes, les principales infractions commises par les dirigeants de sociétés commerciales où les commerçants étaient l'abus de biens sociaux et la banqueroute (simple ou frauduleuse). L'abus de biens sociaux est le fait pour « les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, (...) un usage qu'ils savaient contraire à l'intérêt de la société à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement »84(*) ; tandis que la banqueroute est une infraction commise par un commerçant en état de cessation de paiement, qui continue cependant de conclure des transactions financières sans déclarer son état de cessation de paiement.

    A coté de ces infractions « traditionnelles », plusieurs autres sont nées avec les Actes Uniformes OHADA. Il s'agit généralement d'infractions tendant à la punition du manquement aux obligations formulées dans les Actes Uniformes (tel que le délit d'émission, cf. article 4 loi N°-2003/008). Il s'agit aussi de la punition de certains comportements jugés malhonnêtes et non conformes à la pratique commerciale (comme la publication d'une situation financière fausse, la surévaluation des apports en nature). D'autres infractions enfin visent la punition des commerçants et dirigeants des sociétés commerciales qui ont été négligents (en réprimant des comportements comme l'omission de faire au greffe de la juridiction compétente, la déclaration de l'état de cessation des paiements de la société commerciale).

    b-) Les infractions commises par les experts intervenants dans la vie des affaires

    Par « experts », l'on entend des techniciens intervenants dans la vie commerciale, soit commis par le juge, soit nommés ou choisis par les dirigeants de société, soit alors désignés par une toute autre personne. Ainsi, les infractions financières peuvent être commises par des commissaires aux comptes (comme la confirmation d'informations mensongères sur la situation de la société ou encore le défaut de signalisation des faits délictueux observés). D'autres infractions concernent les syndics de procédures collectives85(*)(telle que la dissipation des biens du débiteur). D'autres infractions comme la surévaluation des apports en nature concernent les commissaires aux apports. Enfin, les liquidateurs (personnes chargées des opérations de liquidation des sociétés) sont aussi concernés par certaines infractions telles que le détournement des biens sociaux.

    Toutes ces infractions sont instituées afin de réglementer la vie commerciale. En effet, les différents experts cités sont en principe des professionnels. Investis d'un mandat, ils doivent gérer les biens d'une autre personne. Pour ce faire, ils doivent jouir d'une probité morale. De plus, ils exercent souvent leur activité en fonction d'un serment prêté et d'un mandat. Toutes choses qui amènent les titulaires des biens sur lesquels ils exercent leur activité à leur faire pleinement confiance. Aussi les différentes infractions relevées jouent-elles le rôle de régulateur de ces professions importantes pour la vie des affaires en sanctionnant ceux qui voudraient porter entrave au bon déroulement de la vie économique.

    c-) Les infractions d'affaires commises par d'autres auteurs

    Dans la vie des affaires, outre les experts, les commerçants et les autres dirigeants des sociétés commerciales, certaines personnes interviennent et posent des actes nuisibles au bon fonctionnement de l'économie.Il s'agit principalement des créanciers et débiteurs du commerçant, de ses proches et des simples actionnaires.

    Ainsi donc, pour ce qui est des créanciers du commerçant ou du dirigeant social, la loi punit la stipulation d'avantages particuliers à raison du vote dans les délibérations de la masse des créanciers et la conclusion de conventions particulières desquelles résulterait un avantage à la charge de l'actif du débiteur en liquidation judiciaire86(*). De même sont punies les personnes convaincues d'avoir frauduleusement produit dans une procédure collective, des créances supposées87(*).

    Au-delà des créanciers du débiteur, afin de respecter les droits des créanciers, l'article 32 de la loi n02003/008 punit de manière explicite le détournement des biens du débiteur en état de cessation de paiement par ses proches, ceci afin de permettre que le patrimoine du débiteur, gage de ses créanciers, ne soit pas diminué. De même la protection du patrimoine du commerçant est mise en avant dans la punition, à l'article 31-3 de la même loi, des prête-noms qui ont détourné ou tenté de détourner les biens d'autrui. Car en effet, le fait d'utiliser le nom d'autrui ne permet pas d'opérer des transactions frauduleuses.

    Enfin, dans la société commerciale, à coté des dirigeants sociaux, il existe très souvent d'autres associés. Ceux-ci pourront commettre des infractions telles que le délit de surévaluation des apports en nature. Ils peuvent encore être poursuivis pour avoir commis des délits en matière de négociation d'actions (négociation d'actions nominatives qui ne sont pas demeurées sous la forme nominative jusqu'à leur libération, d'actions d'apport avant l'expiration du délai pendant lequel elles ne sont pas négociables et les actions de numéraire pour lesquelles le versement du quart du nominal n'a pas été effectué).

    En plus des infractions spécifiques au droit des affaires, certaines infractions sont des infractions de droit commun.

    2°) les infractions financières de droit commun 

    Le code pénal camerounais prévoit certaines infractions financières qui existent aussi bien dans la vie des affaires que dans la vie non économique. La principale de ces infractions est le détournement de fonds. Celui-ci peut être défini comme « le fait (...) de faire obstacle, en abusant de la confiance dont on a bénéficié, aux droits d'autrui(...) sur des fonds ou même de s'approprier ceux-ci »88(*). Le code pénal n'en prévoit cependant que deux cas : le détournement des deniers publics et le détournement de prêt89(*). Le détournement des deniers publics est défini comme le fait d'obtenir ou retenir frauduleusement un bien destiné, appartenant ou confié à l'Etat ou un établissement public ou un établissement dans lequel l'Etat détient des intérêts. Le détournement de prêt quant à lui réprime celui qui, ayant obtenu un prêt d'argent ou une subvention de l'Etat ou d'un établissement dans lequel l'Etat a des intérêts, en fait un usage autre que prévu. Il s'agit donc pour ces deux infractions, de protéger les intérêts de l'Etat contre des personnes malhonnêtes.

    Cependant, lorsqu'un détournement porte sur des fonds privés, le code pénal a prévu trois cas distinctifs en son article 318, qui varient selon le procédé utilisé :

    - d'abord, le cas du vol ou la soustraction de la chose d'autrui. Cela suppose qu'il n'y a pas de remise des fonds au voleur. Le vol est assimilé ici à un cas de détournement, en ce qu'il concerne le fait de s'approprier les droits qu'une autre personne a sur ses biens, en s'appropriant frauduleusement ceux-ci ;

    - ensuite l'abus de confiance ou détournement, destruction ou dissipation de tout bien susceptible d'être soustrait et que l'on a reçu à charge de le conserver, de le rendre, le représenter ou d'en faire un usage déterminé. Il s'agit réellement du cas de détournement tel que défini plus haut, car il y'a remise de la chose mais le délinquant en fait usage autre que celui auquel elle était destinée.

    - enfin il y a le cas d'escroquerie c'est-à-dire en déterminant fallacieusement la victime soit par des manoeuvres, soit en dissimulant un fait. Ici donc, le délinquant use de procédés malhonnêtes pour que les fonds lui soient livrés. L'objet pour lequel le bien a été remis au délinquant sera détourné par celui-ci, dès le moment où la chose lui est remise.

    Ces trois infractions, ajoutées aux cas de détournement, constituent donc le droit commun des infractions financières. En effet, toutes personnes peuvent être poursuivies pour leur commission, aucune qualité particulière n'est requise afin de qualifier l'infraction. Cependant, certaines infractions financières font l'objet de règlementations spéciales.

    B- LES INFRACTIONS SPECIFIQUES

    Parmi les infractions financières faisant l'objet de dispositions spéciales, on retrouve le blanchiment d'argent et les fraudes à la législation fiscale.

    1°) Le blanchiment d'argent

    Selon l'article 1er du règlement N°01/03-CEMAC-UMAC portant répression et prévention du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale, le blanchiment des capitaux « désigne un ou plusieurs des acte ci-après commis intentionnellement :

    - La conversion ou le transfert de biens provenant d'un crime ou d'un délit (...) dans le but de dissimuler ou de déguiser l'origine illicite desdits biens ou d'aider toutes personne qui est impliquée dans la commission de ce crime ou délit (...)

    - La dissimulation ou le déguisement de la nature, de l'origine, de l'emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété de biens provenant d'un crime ou d'un délit (...)

    - L'acquisition, la détention ou l'utilisation de biens provenant d'un crime ou d'un délit (...)

    - La participation à l'un des actes visés (...), l'association pour commettre ledit acte, les tentatives de le perpétuer, le fait d'aider, d'inciter ou de conseiller quelqu'un à le faire ou le fait d'en faciliter l'exécution ».

    Ainsi donc, l'infraction de blanchiment de capitaux suppose à la base la commission d'une infraction, telle que définie par l'Etat dans lequel elle est commise. Il peut s'agir du trafic de stupéfiant, du proxénétisme ou même de la corruption.

    Ensuite, cette infraction doit avoir généré des profits. Ce sont des biens que l'on cherchera à « blanchir ». Le procédé de blanchiment ici consiste en la conversion ou le transfert de ces biens en les faisant passer pour des produits d'une activité normale. Ainsi, toute personne qui aura affaire à de tels fonds serait persuadée de leur origine licite.

    Enfin il faut préciser que le délinquant poursuivi doit avoir été au courant de l'origine illicite de ces fonds. De plus, son action dans le processus de blanchiment d'argent doit avoir été commise intentionnellement, c'est-à-dire dans le but de dissimuler l'origine illicite des produits du crime.

    L'ampleur du rôle joué par le délinquant dans le processus de blanchiment aussi minime soit-il, pourrait l'amener à être poursuivi pour blanchiment de capitaux.

    Le blanchiment des capitaux, infraction spéciale, est donc absent du code pénal camerounais. Cependant, à côté de cette infraction, il existe un groupe d'autres, qui sont certes mentionnées dans le code pénal, mais qui font l'objet de toute une législation spéciale, il s'agit des fraudes à la législation fiscale.

    2°) Les fraudes à la législation fiscale

    L'article 183 du code pénal punit celui qui organise par quelque moyen que ce soit le refus collectif de l'impôt, ainsi que celui qui incite le public à refuser ou à retarder le paiement de l'impôt.

    Le livre de procédures fiscales, quant à lui va plus loin en délimitant dans ses articles L 107 et L 108 les comportements à éviter. Il s'agit de :

    - de la soustraction de personnes au paiement ou au reversement des impôts, droits et taxes visés dans le code général des impôts ;

    - du refus de faire sa déclaration dans les délais ;

    - de la dissimulation de sommes sujettes à l'impôt, l'organisation de son insolvabilité et l'obstacle au recouvrement de l'impôt ;

    - de l'établissement ou l'aide à l'établissement de faux bilans ;

    - de l'organisation du refus collectif ou du retard dans le paiement de l'impôt ;

    - de la production de faux pour obtenir des dégrèvements ou remboursements quelconques.

    Ainsi donc, il s'agit d'un ensemble d'agissements qui empêchent l'Etat de percevoir son dû. Certains actes sont commis afin d'empêcher l'Etat d'avoir part à la totalité de ses droits et redevances, tandis que d'autres visent la sanction de ceux qui voudraient dissimiler une partie de l'impôt. Car en effet, si l'Etat ne peut rentrer dans ses droits en recouvrant son dû, l'on pourrait ne plus voir l'application de la maxime latine « fiscus semper solvendoconsentur »90(*). Enfin, nul ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude et n'étant censé ignorer la loi, ceux qui accusent des retards dans le paiement de l'impôt pourraient se voir appliquer les mêmes sanctions.

    Après avoir étudié les différentes infractions financières présentes au Cameroun, il faudrait se demander quel est l'impact réel de ce type de criminalité sur la société camerounaise ?

    SECTION II : LES CONSEQUENCES DE LA CRIMINALITE FINANCIERE SUR LA SOCIETE CAMEROUNAISE

    La criminalité financière, telle qu'elle a été présentée, adopte plusieurs facettes. Selon ALIME MAHIANE Claire91(*), « au rang des actes criminels ou délictueux que les Etats n'arrivent plus à maîtriser, on peut citer (...) le blanchiment d'argent, ... la fausse monnaie. » C'est dire combien il est difficile pour les Etats de faire face à ce type de criminalité. Cette difficulté est due en grande partie à l'impact qu'a la criminalité financière dans les pays. C'est ainsi que Jean DE MAILLARD92(*) définit la grande criminalité actuelle comme étant « la capacité de valoriser les différentiels causés par les déficits de régulation politique, économique et sociale en n'importe quel endroit de la planète et à n'importe quel moment. » Aussi étudierons-nous les conséquences politico-juridiques de la criminalité financière au Cameroun (Paragraphe II), après avoir évalué cellessocio économiques (Paragraphe I).

    PARAGRAPHE 1 : LES CONSEQUENCES SOCIO ECONOMIQUES DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    Bien que la criminalité financière soit un type de criminalité qui semble au premier chef concerner uniquement la vie économique du pays (B), elle a aussi des conséquences néfastes sur la société camerounaise (A).

    A- Les méfaits sociaux de la criminalité financière

    Souvent négligées, les conséquences de la criminalité financière sur la société camerounaise sont considérables. Toutefois, leur importance varie selon le type d'infractions. En effet, alors que certaines infractions financières, plus anciennes, causent d'énormes dégâtsau sein de la société camerounaise, d'autres au contraire sont nouvelles et même spéciales.

    En ce qui concerne les infractions dites anciennes, la pratique courante d'infractions financières s'est tellement ancrée dans les mentalités des populations que celles-ci sont à présent considérées comme des habitudes de vie. Selon Patrick CHABAL et Jean Pascal DALOZ93(*), « la corruption en Afrique n'est pas seulement le fait de quelques brebis galeuses, mais il s'agit d'un comportement habituel, attendu à toutes les transactions. »

    C'est dire que, dans la société camerounaise, les pratiques de corruption, de trafic d'influence et autres sont tellement ancrées dans la mentalité des populations que le fait d'y déroger semble constituer plutôt une exception. En effet, dans l'attribution des marchés publics par exemple, plusieurs camerounais ont développé le reflexe de rechercher d'abord « quelqu'un », soit un membre de la famille, soit un ami, soit une personne monnayable. De même le sens de la méritocratie et des autres valeurs nobles, essentielles à l'avancée de l'Etat, est en train de disparaître. Même dans le domaine éducatif, où les valeurs essentielles du citoyen sont enseignées, la pratique de l'achat des notes ou des concours est si courante dans la mentalité camerounaise que dans certains cas, celui qui essaye de s'en sortir par son mérite se trouve recalé.

    Pour ce qui est des cas de détournements et fraudes à la législation fiscale, leur impact, bien que légèrement atténué par rapport à la corruption, se fait assez ressentir. En effet, le contrôle exercé par les agents du fisc est souvent assez serré, ne permettant pas souvent d'évasions fiscales. Cependant, dans certains cas, des experts sont utilisés pour établir de faux bilans, dans d'autres, l'on s'assure simplement de la coopération des agents du fisc. Les cas de détournements sont aussi répandus dans la mentalité camerounaise, avec l'adage selon lequel « la chèvre broute là où elle est attachée. » cependant, du fait que cette infraction nécessite un lien avec un organisme étatique ou dans lequel l'Etat est intéressé, tout le monde ne saurait la pratiquer.

    De manière générale, la criminalité financière entraine plusieurs autres conséquences sociales. D'abord, elle entraine une négation totale des droits humains. Toute personne ayant les mêmes droits et les ressources publiques devant être distribuées équitablement, le fait de s'approprier une part de ces ressources porte atteinte aux droits de plusieurs camerounais. Cela entraine des discriminations énormes, ceux qui s'enrichissent malhonnêtement aux dépens des populations ayant une richesse insolente devant ceux qui le font honnêtement. Face à cette frustration, certaines personnes peuvent se lancer dans la commission de crimes divers, afin d'accéder aussi au statut de personne possédant plusieurs ressources financières. Ce qi a pour conséquence de faire hausser le taux de criminalité dans le pays.

    Enfin, pour ce qui est des infractions nouvelles ou spéciales, telles que les infractions d'affaires, du fait de leur nouveauté pour la majorité des camerounais, il est encore difficile de dire qu'elles influencent gravement la société camerounaise. En effet, du fait que, pour leur réalisation et même très souvent pour en être victime, il soit nécessaire de prendre part à la vie des affaires, tout le monde ne saurait facilement les pratiquer ni les subir. Considérées pour le moment comme des infractions dévolues à un type de personnes particulier, elles n'ont pas encore pu jouer un grand rôle dans la société camerounaise. Cependant, leurs conséquences sur l'économie du pays sont énormes.

    B- Les conséquences économiques de la criminalité financière

    Selon Bruno GURTNER94(*), « les pays en développement perdent, annuellement, au minimum 50 milliards de dollars du fait de l'évasion fiscale et de pratiques fiscales nuisibles. C'est six fois la somme qui serait nécessaire pour envoyer tous les enfants du monde à l'école primaire. » De plus, selon un rapport publié par l'association OXFAM International95(*), « 50 milliards de dollars ont été soustraits aux pays en voie de développement au profit des paradis fiscaux, soit presque l'équivalent du budget annuel de l'aide internationale aux pays pauvres qui s'élève à 57 milliards de dollars. »

    Ainsi donc, la criminalité financière a une influence grandement néfaste sur la vie économique du Cameroun, et ce à plus d'un titre.

    D'abord, elle entraine la diminution des ressources financières de l'Etat. En effet, la plupart des fonds générés par la criminalité financière constituent en principe des recettes que l'Etat doit recouvrer soit à travers le fisc, soit à travers les huissiers, agents d'exécution, fonctionnaires et autres. Ces fonds, n'étant pas reversés, créent un déficit considérable dans les ressources de l'Etat. Cela a pour conséquence de fausser les prévisions budgétaires établies par l'Etat. Par conséquent, certains secteurs importants de la vie étatique sont négligés ou voient leurs disponibilités réduites, faute de ressources suffisantes.

    Ensuite, il faut préciser que les produits de la criminalité financière ne sont pas, dans la plupart des cas, soumis aux droits d'imposition et autres taxes qui s'appliquent sur les fonds propres des individus. Cela est dû en grande partie à l'impossibilité de justifier la provenance desdits fonds. Afin de ne pas avoir à le faire, l'on organise par des voies détournées la soustraction à l'impôt. D'où la pratique de fraudes à la législation fiscale et de blanchissements d'argent, qui dans la plupart des cas vont de pair avec les autres infractions financières.

    Enfin, la criminalité financière augmente sur le plan national, la pratique de l'enrichissement personnel illicite au détriment de celui du plus grand nombre. Cela entraine d'énormes inégalités sur le plan économique. En effet, alors que les criminels s'enrichissent de manière exponentielle, les personnes honnêtes, soit évoluent lentement, soient, dans certains cas, voient une baisse de leurs moyens de subsistance. Une illustration frappante en est le fait que certains connaissent des retards dans le paiement de leurs salaires, pendant que cet argent est détourné dans les caisses publiques. En appauvrissant les honnêtes gens au profit des criminels, la criminalité financière fait la promotion d'un modèle de vie contraire aux Droits de l'Homme et aux prescriptions légales.

    La criminalité financière a donc un impact socio économique énorme sur la société camerounaise. Cependant, au-delà de cet impact, il est nécessaire de s'attarder sur les conséquences politico juridiques de ce phénomène.

    PARAGRAPHE II : LES CONSEQUENCES POLITICO JURIDIQUES DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    Au Cameroun, la criminalité financière a pour conséquences importantes la fragilisation du climat politique (A) et la perte de confiance en l'ordre juridique camerounais (B).

    A- La fragilisation du climat politique

    Le développement de la criminalité financière au Cameroun cause des dommages conséquents au climat politique du pays. En effet, le fait pour les populations de voir se proliférer des cas de corruption, de détournements et autres entraine une certaine perte de confiance en leurs autorités étatiques.

    Selon certains auteurs, des « responsables politiques et économiques parlent à leur aise de lutter contre ces phénomènes, mais les mesures envisagées ne visent habituellement qu'à corriger les abus les plus gênants, voire à simplement amuser l'opinion. Cela revient à accepter de pérenniser le système, à le valider en prétendant corriger ses dérives, alors que c'est son principe même qu'il faut condamner »96(*) C'est dire, que les populations prennent de plus en plus les mesures gouvernementales pour des faire valoir. L'impression donnée est celle selon laquelle la solution ne pourrait pas venir des autorités publiques, qui n'en font pas assez. Ce qui amène certains camerounais à se désintéresser de la vie politique, persuadés de ne pas pouvoir y trouver de solutions à leurs problèmes, ni de solutions aux inégalités sociales.

    Toujours sur le plan politique, particulièrement sur le plan international, la persistance de certaines infractions porte préjudicie aux intérêts politiques extérieurs du pays. En effet, le Cameroun, pays en voie de développement, entend être classé au rang des pays émergents d'ici l'horizon 2035. Pour ce faire, plusieurs conditions sont requises au Cameroun, parmi lesquelles la lutte contre la corruption. Aussi la prolifération des cas de commission d'infractions financières retarde considérablement l'atteinte des objectifs politiques du pays.

    Au delà de la fragilisation du climat politique camerounais, la criminalité financière entraine de plus en plus une certaine perte de confiance des camerounais en leur ordre juridique interne.

    B- La crise de confiance en l'ordre juridique

    Selon un rapport d'enquête publié en 1999 par le groupe GERDDES - Cameroun, la majorité des personnes estiment que le développement de la corruption au Cameroun est lié à l'impunité, car le gouvernement n'aurait pas combattu vigoureusement le problème.97(*) De plus, Jean De MAILLARD, dans un article, estime que « le marché de la loi rend les criminels prospères ». C'est dire que, l'exploitation de toutes les failles que procure la loi entraine la prolifération des criminels. Cet auteur pense que le crime a été le premier marché mondial à s'être organisé. Devant cette situation, les Etats auraient ouvert leurs barrières économiques afin de profiter des retombées économiques de ce marché, et favorisant la prolifération de cette criminalité organisée qui exploitait les failles de la loi, dès lors qu'elle rapportait des capitaux. Cet état de choses a été encouragé par les « paradis financiers », Etats qui donnent l'impression de vouloir conserver leur souveraineté mais favorisent au contraire la violation des lois d'autres pays, et organisent ainsi une dérégulation totale. « Ils édictent, en effet, des législations dont la seule finalité est de permettre d'échapper, quel qu'en soit le mobile, aux normes légales des autres pays. »98(*)Cependant, à l'échelle nationale, les populations sont au contraire persuadées que, loin de subir ce type de criminalité, les dispositions législatives et judiciaires permettent plutôt à la criminalité financière de se développer, au détriment de ceux qui ne la pratiquent pas.

    Cette situation, loin de permettre la réduction de la criminalité financière, favorise plutôt son expansion. En effet, les citoyens, perdant de plus en plus confiance en leurs juridictions, sont tentés de se tourner vers des solutions de facilité. Ayant constaté que le « système » permettait en quelque sorte que la criminalité financière perdure, la pratique d'un tel type de criminalité constitue dans bien des cas la norme, et le fait de s'y opposer constitue l'exception.

    Enfin, la crise de confiance en l'ordre juridique étatique s'illustre aussi par la croyance en une inégalité créée par le système judiciaire, en faveur des criminels et au détriment de certaines personnes. Cet ainsi que, dans un communiqué paru dans le journal Le Grand Soirendate du 05 Octobre 2003, le groupe ATTAC dénonce l' « accélération d'une justice à deux vitesses de plus en plus répressive à l'égard de certaines catégories, toujours aussi tolérante et laxiste à l'égard d'une délinquance (...) dont les méfaits (...) s'étendent à l'ensemble de la planète, en accroissant le nombre de victimes indirectes. Au niveau national, rien n'est fait, au contraire, pour mieux circonscrire les risques de corruption, (...) fraude fiscale, pour détecter les opérations de blanchiment. » Ce sentiment de manque de confiance à la Loi se fait de plus en plus ressentir actuellement au Cameroun. Car en effet, la réponse des autorités judiciaires au phénomène grandissant de la criminalité financière semble ne pas satisfaire une bonne tranche de l'opinion publique.

    En conclusion, la criminalité financière se présente au Cameroun sous plusieurs faces. Elle est constituée d'infractions ayant trait à la manipulation des fonds, que ce soit ceux de l'Etat ou les fonds privés. De plus, elle peut faciliter ou compléter la commission d'autres infractions. La criminalité financière a aussi de graves conséquences au Cameroun, que ce soit sur le plan politique, économique, politique ou juridique. Aussi est-il important de savoir comment est organisée la répression de cette criminalité financière au Cameroun.

    CONCLUSION A LA PREMIERE PARTIE

    L'étude du système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun a été faite sous deux volets. D'abord, il a été question pour nous de présenter le traitement pénal accordé à ce type de criminalité au Cameroun, traitement pénal qui nous a permis de voir les mesures prises par les autorités gouvernementales pour lutter contre ce type de criminalité.Ces mesures vont de l'adoption de certains textes généraux et spécifiques, à la mise en place d'organes appropriés pour lutter contre la criminalité financière. Ensuite, nous avons procédé à une analyse de ce type de criminalité au Cameroun. Pour ce faire, nous avons procédé à l'étude des infractions financières et de leur impact sur la société camerounaise. Après avoir de cette manière abordé l'étude du système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun, il devient nécessaire de se demander si ce système a bien porté ses fruits, et, si non, comment pourrait-on procéder à son amélioration ?

    IIème PARTIE :

    DE L'AMELIORATION DE LA LUTTECONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    L'étude du système camerounais de lutte contre la criminalité financière présente un bilan quelque peu mitigé. En effet, malgré l'effectivité de cette lutte, l'on constate que la criminalité financière continue d'exister, et peut-être même d'évoluer au Cameroun. Mais, la question qu'il faudrait se poser est d'abord celle de savoir s'il est nécessaire de réformer ce système ? En effet, les défaillances rencontrées par un système ne sont pas toujours dues à ses lacunes, souvent elles sont le fait d'une mauvaise application. Dans ce cas, il faudrait peut-être, au lieu d'envisager la réforme totale du système, évaluer et éduquer les acteurs principaux de la mise en oeuvre dudit système.

    Avant donc de voir la possibilité d'une réforme totale ou partielle du système camerounais de lutte contre la criminalité financière, il est nécessaire d'en évaluer l'impact, de savoir si oui ou non les efforts déployés jusque là ont porté suffisamment de fruits (Chapitre I). Ce n'est qu'une fois que cette opération sera terminée, que nous pourrons savoir ce qui nécessite une amélioration ou une relecture. Cette partie sera donc faite à travers la proposition de certains axes pour une amélioration possible du système camerounais de lutte contre la criminalité financière (Chapitre II).

    CHAPITRE I :

    RESULTATS ET DIFFICULTES RENCONTREES PAR LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE

    FINANCIERE AU CAMEROUN

    L'observation de la société camerounaise présente un constat quelque peu mitigé, quant à l'impact de la lutte contre la criminalité financière menée par les autorités. Des résultats semblent être obtenus, mais l'on constate encore beaucoup de zones d'ombres, causées par diverses difficultés (Section 2). Afin de se rendre compte de celles-ci, il est nécessaire de procéder à une analyse préalable des résultats enregistrés par les efforts des autorités camerounaises (Section 1).

    Section 1 : Analyse des résultats obtenus par le système camerounais de lutte contre la criminalité financière

    La lutte contre la criminalité financière au Cameroun, on l'a vu, est instituée au rang des préoccupations majeures de l'Etat. Son analyse montre qu'elle semble enregistrer des résultats encourageants (Paragraphe I), bien que certaines actions n'arrivent pas à satisfaire les attentes placées en ce système (Paragraphe II)

    Paragraphe I : LES RESULTATS ENCOURAGEANTS DU SYSTEME CAMEROUNAIS DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE

    Afin de répondre aux attentes qui sont placées en lui, le système camerounais de lutte contre la criminalité financière devrait mettre en place un dispositif préventif et répressif efficace, capable de dissuader et punir les potentiels criminels.Cet objectif est poursuivi au Cameroun, où les résultats enregistrés par le système de répression de la criminalité financière présentent quelques résultats positifs tant sur le plan de la prévention (A) que sur celui de la répression (B).

    A- Les effets de la prévention des infractions financières

    Le système camerounais de répression de la criminalité financière joue un rôle préventif non négligeable dans la société. Celui-ci s'observe à travers la mise en place d'un dispositif qui semble efficace contre les infractions financières (1) permettant l'avancée vers une réduction du nombre de ces infractions (2).

    1°) La mise en place d'un dispositif préventif apparemment efficace

    L'objectif premier d'un système pénal est en principe, non de punir les contrevenants à la loi (étant entendu que l'on ne souhaite pas que des criminels naissent et agissent), mais plutôt d'avertir ceux qui auraient des velléités de commission des infractions. Aussi, au-delà de l'étude des résultats répressifs du système camerounais de lutte contre la criminalité financière, il faudrait d'abord connaître le rôle joué par ce système dans la prévention des infractions financières.

    Pour ce qui est de la prévention de la criminalité financière au Cameroun, il faut bien reconnaître que le système mis en place par les autorités camerounaises semble porter ses fruits. En effet, les différentes initiatives des autorités nationales permettent de croire à une possibilité de détection des éventuels criminels avant qu'ils n'aient eu le loisir de sévir véritablement. C'est le cas par exemple des mesures prises par l'ANIF à travers la « déclaration de soupçon ». Celle-ci permet d'abord de détecter ceux qui voudraient entreprendre de blanchir des capitaux illicites. Par la suite, elle donne assez d'informations à l'Agence pour s'opposer et mettre fin à l'activité qui aurait permis de donner à ces fonds irrégulièrement acquis une apparence légale.

    Par les mesures qu'elle prend pour détecter les infractions avant leur commission, la lutte contre la criminalité financière entreprise par les autorités camerounaises permet de mettre en place un dispositif préventif efficace. Les auteurs ou complices potentiels d'actes criminels devraient ainsi se retrouver confrontés à un système organisé, à des mesures coercitives sensées empêcher toute commission d'infraction financière.

    Cependant, il reste difficile de dire de manière concrète si cette prévention est totalement efficace, dans la mesure où l'on observe une certaine persistance de la commission des crimes financiers, ainsi qu'un nombre croissant d'inculpations pour atteintes à la fortune publique. En l'absence de données précises, il nous semble plus indiqué de constater la mise en place d'un dispositif dont l'objectif premier est de décourager tout criminel financier, afin de réduire le taux de criminalité.

    2°) La volonté de réduction du nombre d'infractions financières :

    Un autre effet positif de la lutte entreprise contre la criminalité financière, est l'avancée vers la réduction des cas de commission d'infractions financières. Cela s'explique en grande partie par la peur que certains ont de « se faire prendre ». En effet, au vu des condamnations et autres exactions opérées contre les auteurs de crimes financiers, ceux qui entrevoient les infractions financières comme solution de facilité sont amenés à se poser des questions, à se demander si c'est la bonne option.

    Cependant, il faut dire que cette considération ne tient pas toujours. En effet, alors que certains éviteront de commettre des infractions financières à cause de la peur engendrée par le système, d'autres au contraire onttendance à être motivés par cette sensation. En effet, certains ne tiennent nullement compte de la maxime latine : « Neminem cum alteriusdetrimentofierilocupletoriem »99(*). Au contraire, ils continuent de commettre des crimes financiers, c'est pourquoi un autre effet positif de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun s'observe à travers l'exercice d'une répression exemplaire.

    Il faut dire qu'au cours des années passées, le Cameroun a mené une lutte ardente contre la corruption, qui aurait permis, semble-t-il, de réduire le taux de commission cette infraction. En effet, il faut se rappeler qu'au début des années 2000, le Cameroun avait été classé par Amnesty International100(*) au rang de premier pays le plus corrompu au monde. Aujourd'hui, la place du pays s'est améliorée, et il n'occupe plus le même rang. Ceci grâce à la réduction des cas de corruption obtenue à travers une lutte ardente contre ce phénomène.

    B- La mise en oeuvre effective de la répression

    Dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun, l'on observe de plus en plus l'exercice d'une véritable répression. Celle-ci se justifie par le désir de punir avec la plus grande rigueur ceux qui portent atteinte aux intérêts de l'Etat ou à ceux d'autrui. La conséquence la plus palpable en est l'enrichissement de l'actualité jurisprudentielle en ce qui concerne la poursuite des auteurs de crimes financiers. A côté de cette actualité jurisprudentielle, l'on note aussi la multiplication de sanctions contre ces criminels d'un genre récent. A titre d'exemple, dans le cadre de l'assainissement de la justice, dès le 03 Janvier 2006, deux magistrats ont été révoqués de leurs fonctions pour pratique d'usure et de corruption. De plus, le 21 Février 2006, l'Etat a procédé à l'interpellation de trois anciens Directeurs généraux de sociétés d'Etat et certains de leurs collaborateurs pour détournement de deniers publics, corruption, faux et usage de faux au préjudice de l'Etat et de certains établissements publics. De plus, les procès pour détournement de deniers publics sont sans conteste, à l'heure actuelle, parmi ceux qui attirent le plus de public.

    Cependant, ces actions répressives, engagées avec beaucoup d'éclat, semblent accuser un certain ralentissement dans leur capacité à fournir des résultats. En effet, pour ce qui concerne les interpellations de présumés auteurs d'atteintes à la fortune publique, l'on note très peu de décisions judiciaires rendues, alors que le nombre d'inculpation a semblé croissant ces dernières années. A titre d'exemple, le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi a rendu quelques décisions contre des présumés auteurs de détournements de deniers publics, parmi lesquelles on peut citer :

    Ces décisions, bien que leur nombre soit assez réduit par rapport à l'ampleur du phénomène criminel, montrent la volonté des autorités judiciaires de voir la lutte contre la criminalité financière aller de l'avant. Cependant, elles démontrent aussi la faible réaction des autorités, du fait des lenteurs judiciaires qui font trainer plusieurs procédures, et du fait aussi des inculpations apparemment « timides ». Les autorités judiciaires camerounaises devraient ainsi mettre plus d'effort dans la mise en oeuvre et la prise de sanctions contre les auteurs de crimes financiers.

    Bien que la répression semble battre campagne contre la criminalité financière au Cameroun, il faut dire que seules certaines infractions sont beaucoup plus poursuivies, entres autres la corruption et le détournement de deniers publics. Et même parmi les auteurs de ces infractions, beaucoup reste à faire, afin que tous les criminels voient leurs actes sanctionnés. En attendant, le système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun semble aussi apporter un début de réponse aux attentes de la Communauté internationale.

    Paragraphe II : L'ADAPTATION AUX IMPERATIFS INTERNATIONAUX

    Comme nous l'avons démontré, la lutte contre la criminalité financière constitue de plus en plus, non pas seulement un impératif national, mais plus une exigence internationale, à cause de l'impact négatif que ce type de criminalité a sur la scène internationale toute entière. Aussi la lutte entreprise contre la criminalité financière au Cameroun intéresse-t-elle au plus haut point la communauté internationale, dont la satisfaction se fait ressentir principalement à deux niveaux : l'amélioration de la position du pays sur la scène internationale (A) et l'encouragement à l'investissement dans le pays (B).

    A- L'amélioration de la position camerounaise sur la scène internationale

    L'amélioration de la position du Cameroun sur la scène internationale s'observe à travers l'évaluation faite sur la question de la sécurité des institutions au Cameroun. En effet, le Cameroun, pays en développement, avait été classé premier pays le plus corrompu au monde par l'Organisation Non Gouvernementale Amnesty International. Face à cette situation, les autorités nationales ont dû redoubler d'efforts, afin de permettre au pays de regagner une place de confiance sur la scène internationale. C'est ainsi que, quelques années plus tard, le Cameroun a été classé, en 2010, 146e pays sur 178 classés. L'année suivante, notre pays était classé 134e sur 183 pays par la même organisation non gouvernementale. Cette évolution n'est certes pas grandiose, mais elle reste notable, en ce qu'elle a été rendue possible par la lutte contre la criminalité financière au sein de pays, notamment contre la corruption.

    En plus du classement du Cameroun au rang de certaines initiatives, la satisfaction de la communauté internationale par rapport à la lutte contre la criminalité financière s'observe aussi au niveau de l'encouragement à l'investissement au Cameroun.

    B- L'encouragement à l'investissement au Cameroun

    De manière générale, les investissements directs étrangers constituent une part importante du Produit Intérieur Brut de chaque pays. Ainsi, il s'avère important, voire nécessaire pour un Etat d'accueillir les investissements provenant de l'étranger, qui permettent d'engager certains travaux de reconstruction du pays. Aussi, afin de pouvoir le rendre plus attrayant pour les investisseurs, il est nécessaire d'avoir un climat des affaires sain et suffisamment fiable. Or, pour que le climat des affaires soit assez fiable, il faudrait un environnement juridique stable et sécuritaire.

    On le voit, l'avancée de la criminalité financière ne saurait permettre l'attrait des investissements de la part des étrangers. Pour donc attirer ceux-ci, l'Etat camerounais a dû mettre en place un système juridique censé apporter des garanties à tous les investisseurs ayant besoin de sécurité pour leurs avoirs. La lutte contre la criminalité financière revêt donc à ce moment une dimension économique, car les résultats enregistrés par les autorités camerounaises dans le cadre de cette lutte servent d'indicateurs pour les potentiels investisseurs.

    Un autre aspect non négligeable de l'attrait des fonds étrangers est l'encouragement du secteur touristique au Cameroun. En effet, le tourisme est l'un des secteurs qui favorisent le plus l'arrivée des étrangers, ainsi que des devises étrangères. Or, ce secteur ne saurait s'épanouir si les touristes, en venant au Cameroun, s'attendent déjà à rencontrer corruption, escroquerie et bien d'autres infractions. Pour favoriser le secteur touristique, il était nécessaire d'assainir le climat des affaires camerounais. C'est ainsi que le Cameroun a pu, au cours de l'année 2011, être classé au rang des destinations touristiques. Cette avancée démontre la confiance de plus en plus grandissante de la communauté internationale à l'égard du Cameroun. De plus, l'encouragement du tourisme emporte aussi la création de sociétés touristiques, avec l'arrivée d'un genre d'investisseurs encore nouveau pour le Cameroun.

    Un autre élément permettant de démontrer que la lutte contre les infractions financières participe à l'encouragement de l'investissement au Cameroun, est la place que ce pays occupe au sein de la communauté économique internationale. En effet, le Cameroun se situe aujourd'hui comme le moteur économique de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale, le leader de la sous région. De ce fait, le Cameroun est le siège de plusieurs institutions économiques, telles que la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC), ou encore le Fonds Monétaire Africain en cours de création. De plus, le Cameroun connait de plus en plus la convoitise d'investisseurs de toutes nationalités, asiatiques, européennes et autres. Ceci s'explique par la confiance que les investisseurs mettent dans le système juridique camerounais, qui mène une lutte contre les infractions qui font obstacle à l'investissement.

    La lutte contre la criminalité financière favorise donc l'investissement au Cameroun. Cependant, il faut souligner que cet investissement n'est pas que le fait des étrangers, il est aussi celui des nationaux. Longtemps montrés du doigt comme préférant faire des investissements à l'étranger, au détriment de leur pays, les camerounais investissent de plus en plus dans des projets et entreprises permettant le développement économique de leur pays. Ceci s'explique par une certaine confiance vis-à-vis des institutions camerounaises. Ce type d'investissement, encouragé par les autorités nationales, est favorisé par l'assainissement de la vie des affaires, objectif poursuivi par le système de lutte contre la criminalité financière.

    Bien que le système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun présente quelques éléments qui pourraient accorder du crédit à ses résultats, il n'en demeure pas moins que plusieurs difficultés demeurent, qui portent ombrage à ces résultats.

    Section 2 : La complexité de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun :

    Malgré les résultats assez intéressants enregistrés par la lutte contre la criminalité financière au Cameroun, l'objectif d'y mettre fin n'est pas encore véritablement atteint. En effet, plusieurs difficultés restent à résoudre, afin d'avoir un système totalement fiable, et peuvent être scindées en deux grands groupes. D'abord, l'on constate que, malgré les efforts menés, plusieurs infractions financières semblent tenir tête aux autorités, auxquelles s'ajoute l'impression de lenteur des autorités, ressentie au sein du pays (Paragraphe I). De plus, plusieurs difficultés sont encore rencontrées dans la mise en place même du système, auxquelles il faudrait trouver une solution (Paragraphe II)

    Paragraphe I : LES RESISTANCES SOCIALES

    A- La ténacité du comportement délictuel

    Malgré la lutte engagée par les autorités camerounaises afin d'éradiquer la criminalité financière, force est de constater que plusieurs infractions persistent et donnent même l'impression de ne pas subir les effets du système pénal camerounais. En effet, alors que des actions sont menées contre la corruption, le blanchiment des capitaux, etc., le constat est que, le plus souvent, ce sont les infractions les plus combattues qui persistent et se développent.

    Une première raison qui puisse être avancée pour justifier cet état de choses, est le fait que certaines infractions semblent s'être ancrées dans les mentalités des camerounais. Elles deviennent plus une habitude qu'un acte d'occasion, ce qui les rend presque « légales », en ce sens que, vu que tout le monde semble vouloir adopter cette pratique, elle tendrait à être considérée comme normale. Cet état de choses semble donner raison, en ce qui concerne un tel type d'infractions, à la maxime de SENEQUE : « Quaefuerantvitia, mores sunt »101(*). Ce constat s'opère de plus en plus en ce qui concerne l'infraction de corruption.

    La corruption, telle qu'elle a été définie102(*), est de plus en plus considérée par la majorité des camerounais comme un éventuel mal nécessaire. Alors que tous la décrient et subissent ses effets, il est étonnant de constater que, même dans la pratique courante, des actes de corruption sont commis. L'habitude semble être établie que, pour tel ou tel service à rendre, l'on soit amené à verser une cote part. Aussi, une fois que l'on se retrouve à la place d'un fonctionnaire, il semblenormal pour beaucoup ayant dû monnayer afin de jouir de cette position, de percevoir aussi leur pourcentage sur toute opération soumise à leur approbation. Le même constat s'opère pour des infractions telles que le trafic d'influence. A ce niveau, il est nécessaire d'allier à l'instauration d'un système répressif, une rééducation de la population dès la base.

    Une autre raison à la résistance des infractions financières serait la légèreté de la répression de certaines infractions. En effet, l'étude du système pénal camerounais en matière de lutte contre la criminalité financière révèle que celle-ci est plus orientée vers la lutte contre la corruption et le blanchiment des capitaux, auxquels on pourrait ajouter le détournement des deniers publics. Ces infractions bénéficient d'organes spécialisés (CONAC, ANIF, Chambre des Comptes de la Cour Suprême), ce qui conduit à minimiser les autres infractions, qui nécessitent aussi une attention particulière. Il est vrai que les infractions sus citées portent directement atteinte aux intérêts de l'Etat, mais il n'en demeure pas moins que certains actes délictueux tels que les infractions d'affaires ou la concussion, devraient aussi bénéficier d'une attention particulière. En effet, ils faussent tout autant le jeu du libre marché et encouragent la faillite des sociétés et donc de l'économie nationale, la frustration des populations, ...

    B- Les lenteurs dans les réactions des autorités

    Selon Jean DE MAILLARD103(*), l'exploitation de toutes les failles de la Loi a entrainé la prolifération des criminels. Aussi affirme-t-il que « le marché de la loi rend les criminels prospères ». Au Cameroun, nombreux sont ceux qui partagent cette opinion. En effet, devant la prolifération des crimes financiers, l'on est amené à se poser des questions quant à la fiabilité des autorités, du système mis en place. Mais, à l'étude de ce système et des garanties qu'il offre, l'on se demande plutôt si cette persistance de criminels n'est pas due à la lenteur ou à l'inaction des autorités chargées de mettre ce système en oeuvre. En effet, devant une organisation assez bien élaborée de la lutte contre la criminalité financière et semblant répondre à plusieurs attentes, l'on s'attendrait à voir ce type de criminalité en général baisser de façon exponentielle. Or, si tel n'est pas le cas, on est forcé de se tourner vers les autorités chargées de l'exécution des dispositions mises en place. D'où l'impression de lenteur, voire même d'inaction des autorités, ressentie par des populations du triangle national. Cette même lenteur s'observe, on l'a dit, dans la pauvreté de l'actualité jurisprudentielle des opérations de grande envergure telles l' « opération épervier » engagée par les autorités étatiques contre les auteurs d'atteintes à la fortune publique.

    Une autre idée partagée, est celle selon laquelle la criminalité financière aurait atteint un degré de gravité extrêmement difficile à contrôler pour les autorités camerounaises. Les actions entreprises ne seraient alors que des moyens pour faire croire à la maîtrise d'un phénomène qui dépasse même le système judiciaire. Selon le syndicat de la Magistrature ATTAC104(*), les « responsables politiques et économiques parlent à leur aise de lutter contre ces phénomènes, mais les mesures envisagées ne visent habituellement qu'à corriger les abus les plus gênants, voire à simplement amuser l'opinion. Cela revient à accepter de pérenniser le système, à le valider en prétendant corriger ses dérives, alors que c'est son principe même qu'il faut condamner. » C'est dire que, telle qu'elle est mise en oeuvre, la lutte contre la criminalité financière ne produit que des résultats écrans, qui masquent à peine la réalité, celle d'une criminalité de plus en plus florissante.

    Pour terminer, un autre élément permettant de ressentir l'impression de lenteur des autorités, est le retard dans la mise en place de certaines institutions et actions. En effet, plusieurs institutions censées faciliter la lutte contre la criminalité financière sont prévues depuis quelques années, mais ne sont pas encore mises en place. C'est le cas par exemple des Juridictions inférieures des comptes, qui devraient faciliter l'activité de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême. Prévues dans l'alinéa 2 de l'article 41 de la Loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996, leur mise en place n'est pas encore effective à ce jour, ce qui ne facilite pas le contrôle des comptes publics et ceux des services publics.

    Ainsi donc, le système camerounais de lutte contre la criminalité financière est confronté à plusieurs difficultés d'ordre social. Cependant, plusieurs autres difficultés de types différents font obstacle à la lutte contre la criminalité financière au Cameroun.

    Paragraphe 2 : LES AUTRES DIFFICULTES RENCONTREES PAR LE SYSTEME DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    La mise en oeuvre de la lutte contre la criminalité financière est rendue difficile à cause du nombre élevé d'obstacles qui jalonnent sa voie. Ces difficultés sont aussi bien d'ordre personnel (A) que d'ordre institutionnel (B).

    A- Les difficultés d'ordre personnel

    Les difficultés d'ordre personnel rencontrées par la lutte contre la criminalité financière au Cameroun sont liées, aussi bien à certains acteurs de la lutte contre la criminalité financière, qu'à la personne même de l'auteur de l'infraction.

    1°) Difficultés liées à la profession exercée par certains acteurs associés à la lutte contre la criminalité financière

    Le système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun, associe, on l'a vu, aux organes cités, plusieurs autres professions et personnes déterminées. Or, celles-ci, dans la collaboration qu'elles se doivent d'entretenir avec les autorités, sont souvent confrontées à des obligations liées à leurs professions.

    Une bonne illustration de ce cas d'espèce est tirée de la déclaration de soupçon qui doit être faite à l'Agence Nationale des Investigations Financières. Selon l'article 13 du Décret N°2005/187 du 31 Mai 2005 portant Organisation et Fonctionnement de l'Agence Nationale d'Investigation Financière, parmi les personnes assujetties à cette déclaration, l'on retrouve notamment « les notaires et autres membres des professions juridiques indépendantes ». Or à ce niveau, il se pose un problème quant au respect du secret professionnel auquel sont astreints les membres desdites professions. La déclaration faite, portant sur les biens d'un quelconque client105(*), semble être en totale violation du secret professionnel.

    Cette situation cause un énorme dilemme aux professionnels concernés. En effet, partagés entre le respect de la déontologie professionnelle et le désir d'aider l'Etat à traquer les criminels financiers, les avocats et autres membres des professions juridiques auront un lourd choix à faire. L'application à la lettre des dispositions mises en place pour détecter les criminels financiers s'en trouve affaiblie, en raison de la possible défection de certains acteurs. De plus, s'ils sont interpellés pour avoir failli à l'obligation de déclaration, ils tenteront d'invoquer le respect du secret professionnel. Certes il est vrai, la lutte contre la criminalité financière étant un impératif d'ordre public, les questions de déontologie cèdent devant l'obligation de collaborer pour le respect de l'ordre public. Cependant, il faut reconnaitre qu'il n'est pas toujours facile d'amener les professionnels concernés à se départir de leur obligation de respect du secret professionnel. Les questions de déontologie, qui n'ont en principe qu'un poids très relatif devant les nécessités d'ordre public, pourraient tout de même être invoquées par les professionnels associés, bien que ce type d'opposition soit voué à l'échec.

    Ainsi donc, le processus de lutte contre les infractions financières se trouve confronté à la difficulté pour certains acteurs clés, de jouer pleinement leur rôle dans ce dispositif. D'autres difficultés existent, liées à la personne même du délinquant.

    2°) Difficultés liées au statut de l'auteur de l'infraction

    Dans le cadre de la lutte contre les infractions financières, un autre type de problèmes se pose concernant la personne même de l'auteur de l'infraction. En effet, la qualité de certaines personnes se pose souvent comme obstacle à l'engagement des poursuites contre elles. Diverses raisons peuvent être invoquées à l'appui de cet argument.

    Premièrement, le délinquant financier peut bénéficier d'une certaine immunité attachée à sa personne même ou à la fonction qu'il exerce. Comme il a été précédemment démontré dans notre argumentation, la criminalité financière est principalement le fait de personnes présentées comme étant les responsables économiques, politiques, etc. Or, parmi ces personnes, certaines peuvent être couvertes par des immunités, qui font obstacle à l'engagement des poursuites. Le cas des fonctionnaires internationaux en est une parfaite illustration. En vertu de la protection des relations diplomatiques et consulaires106(*), ces fonctionnaires ne peuvent être poursuivis pour les infractions financières qu'ils auraient commises. Cependant, le cadre international prévoit la répression des infractions commises par des personnes bénéficiant d'immunités diplomatiques. Cela est possible avec la Convention de l'OCDE107(*) sur la corruption d'agents publics étrangers. Or, le Cameroun n'ayant pas encore ratifié cette convention, il est encore impossible d'engager des poursuites contre des personnes bénéficiant d'une quelconque immunité diplomatique. Ce qui cause entrave à la poursuite des criminels financiers, lorsque des fonctionnaires internationaux sont auteurs ou complices d'infractions financières.

    Un autre obstacle à l'engagement des poursuites, attaché cette fois-ci directement à la personne du délinquant, est tiré du principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales. En vertu de ce principe, aucune poursuite pénale ne peut être engagée contre une personne pénale, en raison des difficultés que pose l'application de certaines peines, et même de la difficulté de traduire une personne morale, réalité abstraite, devant une juridiction déterminée. Dans le cas où une infraction financière est commise au profit d'une personne morale, la personne qui, le plus souvent, se voit appliquer des sanctions pénales, est soit le responsable de la société, soit un mandataire. Or, l'infraction profite, non pas à celui qui subit ces sanctions, mais à la personne pour laquelle il agit. En laissant impunie la personne morale, l'on pourrait créer une situation d'impunité, dans laquelle un autre responsable, ou alors le conseil d'administration de la personne, peuvent continuer des exactions délictuelles. Le principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales, tel qu'il est présenté, se pose donc comme un obstacle à l'engagement des poursuites. Cette carence se remarque beaucoup dans le cadre des infractions d'affaires où l'on retrouve plus l'interaction de plusieurs personnes morales, et ce sont très souvent celles-ci qui sont en cause dans les relations d'affaires, dans la commission des infractions d'affaires.

    Ainsi donc, la lutte contre la criminalité financière se trouve confrontée à plusieurs difficultés ayant trait, aussi bien à la personne de l'auteur de l'infraction, qu'à celle de l'acteur engagé dans la lutte contre la criminalité financière. A côté de ces difficultés, d'autres, liées aux institutions camerounaises, posent souvent obstacle à la lutte contre la criminalité financière au Cameroun.

    B- Les difficultés d'ordre institutionnel

    Les difficultés d'ordre institutionnel rencontrées par la lutte contre la criminalité financière peuvent être classées en deux grands groupes : le manque de formation et d'infrastructures et les autres difficultés rencontrées par certains organes et institutions.

    1°) L'insuffisance de formation et d'infrastructures

    La mise en place d'une lutte efficace contre la criminalité financière au Cameroun suppose des agents formés et aptes à utiliser les instruments mis à leur disposition. Ainsi donc, afin de réussir à connaitre les modes utilisés par les criminels financiers et mettre fin à ce type de criminalité, diverses compétences sont requises : juridiques, économiques, sociales, etc. Alors, pour avoir une lutte efficace, il faut organiser fréquemment des formations pour mieux outiller les acteurs de la lutte contre la criminalité financière.

    Il est vrai, plusieurs organismes de lutte contre la criminalité financière ont pris le parti de former leurs membres, pour qu'ils puissent mener leurs actions de la manière la plus efficace possible. C'est le cas par exemple du Contrôle Supérieur de l'Etat, qui organise régulièrement des sessions de formation pour ses agents vérificateurs. Mais, c'est le problème de la stabilité des cadres formés qui se pose à ce niveau. En effet, l'on constate un constant changement d'administration des personnes physiques exerçant au Contrôle supérieur de l'Etat, dans les commissions de lutte contre la criminalité financière, etc. Ce qui ne facilite pas la lutte contre la criminalité financière, car les nouvelles autorités mises en place auront d'abord à être formées à l'utilisation des outils mis à leur disposition. Lorsqu'elles n'ont pas à subir une nouvelle formation, il faudra tout au moins qu'elles prennent un certain temps, nécessaire afin qu'elles s'imprègnent de leurs nouvelles fonctions. En effet, en tant que tels, ils sont souvent amenés à subir un changement d'administration, ce qui pose un certain problème quant à la mise en place des mesures de contrôle de la gestion publique. Pour que des mesures efficientes de contrôle puissent être prises, il est nécessaire que ceux qui sont chargés de le faire subissent continuellement des formations, afin de s'adapter aux nouvelles méthodes de contrôle de la gestion publique. Cependant, lorsqu'ils subissent continuellement des changements d'administration, le processus de formation sera toujours renouvelé, car les nouveaux contrôleurs devront nécessairement être formés, afin de les rendre mieux outillés. A titre d'exemple, il a été organisé, du 3 au 4 Septembre 2012, un séminaire de formation des nouveaux agents du Ministère délégué à la Présidence de la République en charge du Contrôle Supérieur de l'Etat. Cette difficulté n'a pas encore de solution définitive pour le moment, et les agents vérificateurs continuent de subir les exigences liées à leur qualité de fonctionnaires.

    On le voit, le problème de formation des agents chargés de mettre en oeuvre la lutte contre la criminalité financière est beaucoup lié à celui de leur instabilité. Cependant, lorsque l'on pose le problème de formation, il faut aussi penser à un acteur de la lutte contre la criminalité financière souvent négligé, mais dont l'importance est cruciale : il s'agit du citoyen lui-même. En effet, plusieurs organes prévoient la collaboration des citoyens dans la mise en oeuvre de la criminalité financière. Le décret instituant la CONAC, par exemple, prévoit la dénonciation des criminels financiers par toute personne ayant été au courant d'actes de corruption. Or, les citoyens ont pour principal problème la méconnaissance du rôle exact qu'ils doivent jouer dans cette lutte contre la criminalité financière. Ils ignorent le plus souvent qu'ils ont le droit de dénoncer les actes d'abus dont ils souffrent, ce qui entraine une certaine impunité des criminels financiers. Le manque de formation ou l'insuffisance d'information des citoyens associés à la lutte contre la criminalité financière entraine donc le retard de cette lutte, car tous les acteurs doivent nécessairement connaître leur rôle pour tendre vers une éradication effective de la criminalité financière.

    Au-delà de ces difficultés, il se pose celle relative au faible déploiement des organes de lutte contre la criminalité financière sur l'ensemble du territoire national. Pour un résultat efficace de la lutte contre les infractions financières, il serait plus aisé de faire en sorte que les organes de lutte contre cette criminalité soient présents sur l'ensemble du territoire national. Leur présence auprès du gestionnaire de la chose publique et privée permettra d'accentuer d'abord leur rôle préventif. Certes, la CONAC a récemment pris la décision d'avoir une représentation au moins dans chaque département, mais il faudrait que, non seulement cela soit effectif, mais aussi que les autres organismes puissent lui emboiter le pas. Il est vrai que cela est difficile pour certaines structures telles que l'ANIF qui a un nombre réduit de membres, mais, afin de permettre que les déclarations de soupçon soient reçues à temps pour que les informations soient vite traitées, il serait nécessaire de voir dans quelle mesure rapprocher les citoyens des organes de lutte contre la criminalité financière.

    Au-delà du manque de formation et d'infrastructures, les institutions chargées de la lutte contre la criminalité financière rencontrent plusieurs autres difficultés.

    2°) Les autres difficultés

    La mise en oeuvre d'une lutte efficace contre la criminalité financière se trouve en butte à plusieurs autres difficultés, qui freinent son évolution.

    D'abord, l'on pourrait citer le manque de création des organes pourtant prévus par la loi. Comme exemple, nous pouvons parler du cas de la Commission de la déclaration des biens, pourtant organisée par la loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 portant sur la déclaration des biens et avoirs. Bien que cette commission soit prévue depuis l'année 2006, elle n'est pas encore mise en place, ce qui empêche de considérer pleinement cette loi comme un outil de détection des criminels financiers. En effet, en l'absence de ladite commission, aucun organe n'a été prévu par la loi pour recevoir les déclarations de biens des personnes assujetties. Ce qui entraine la gestion de la chose publique, sans que l'on soit véritablement obligé de justifier l'origine de ses biens. On manquera alors de base véritable pour affirmer avec exactitude que les biens d'une personne ont évolué de manière exponentielle au cours de l'exercice de son mandat. Pourtant, rien n'explique le retard dans la mise en place de cette commission. En effet, même l'absence du Sénat, dont un membre fait partie de cette commission, peut être palliée par l'exercice par l'Assemblée Nationale de tous les devoirs dévolus au Parlement. Le retard dans la mise en place de cette commission entraine donc un frein à l'avancée de la lutte contre la criminalité financière.

    Une autre difficulté, non négligeable, que rencontrent les organes de lutte contre la criminalité financière, est l'absence de confiance totale de la part des camerounais. En effet, pour qu'elles puissent exercer leur action de manière complète, il faudrait nécessairement qu'elles puissent bénéficier d'une confiance de la part des personnes pour lesquelles elles exercent leurs missions. Une fois que cette confiance sera acquise, le citoyen camerounais sera mieux à même de collaborer avec les organes de lutte contre la criminalité. Or, il faut dire que les citoyens ne collaborent pas encore véritablement avec les institutions citées, ce qui retarde leur action, parce que, pour certaines infractions telles que la corruption, il est difficilement possible de procéder à son éradication sans l'aide des victimes. Le manque de confiance ainsi soulevé pourrait être dû à la faible répression observée des criminels financiers, ce qui devrait amener les institutions étatiques à porter à la connaissance du public, les actions fortes menées pour l'éradication de ce nouveau type de criminalité. Une fois que les populations auront constaté l'efficacité de la lutte entreprise, elles seront plus à même d'aider les organes de lutte contre la criminalité financière.

    Enfin, l'une des limites des outils juridiques camerounais reste et demeure dans le caractère assez international de la criminalité financière. En effet, s'exerçant beaucoup, pour certaines infractions, sur une échelle internationale, la criminalité financière devient difficile à maîtriser pour les juridictions camerounaises, car sévir dans un pays ne sert très souvent qu'à permettre à d'autres délinquants qui sont coauteurs de mieux se préparer et s'adapter aux évolutions du droit. Comme le soulignait Jean De MAILLARD, « la lutte contre la criminalité financière se heurte (...) souvent aux limites des justices nationales qui n'ont pas d'outils juridiques suffisamment adaptés face à des phénomènes internationaux de grande ampleur. »

    Le système camerounais de lutte contre la criminalité financière a donc un impact mitigé, tant sur la scène nationale qu'internationale. En effet, alors qu'il semble apporter des débuts de réponse aux attentes de l'Etat et de la communauté internationale, plusieurs difficultés persistent et demeurent, empêchant une éradication totale de la criminalité financière. Dans le sens d'avancer vers une lutte véritablement efficace, il serait souhaitable que certaines propositions soient prises en compte, pour une amélioration du système camerounais de lutte contre la criminalité financière.

    CHAPITRE II :

    VERS UN MEILLEUR TRAITEMENT DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN

    La lutte contre la criminalité financière au Cameroun, on l'a vu, rencontre encore beaucoup de difficultés auxquelles il faudrait remédier. Pour y arriver, il est nécessaire d'engager certaines améliorations du système, permettant de mieux orienter l'action gouvernementale. Mais, la criminalité financière étant, comme nous l'avons démontré, un type de criminalité qui se pratique facilement sur plusieurs territoires, les actions visant l'amélioration de cette lutte ne sauraient être le fait du gouvernement camerounais tout seul. Il faudrait une implication plus active de la communauté internationale, afin de permettre des résultats réels. L'intérêt d'une telle harmonisation est, comme nous l'avons démontré, l'éradication d'un phénomène qui porte cruellement atteinte aux Droits de l'Homme et de la communauté internationale. L'amélioration du système de lutte contre la criminalité financière devra donc obligatoirement se faire sur un double plan juridictionnel (Section 1) et non juridictionnel (Section 2).

    Section 1 : L'Action juridictionnelle

    L'action juridictionnelle de la lutte contre la criminalité financière concerne celle des organes institués pour exercer le pouvoir et le devoir de rendre la justice par application du Droit. Cette action doit nécessairement se faire sur un double plan national et international. Ainsi, à côté du renforcement des moyens d'action des organes juridictionnels camerounais (Paragraphe I), l'on devrait avoir une véritable harmonisation judiciaire internationale en matière de lutte contre la criminalité financière (Paragraphe II).

    Paragraphe I : LE RENFORCEMENT DES MOYENS D'ACTION DES ORGANES JURIDICTIONNELS CAMEROUNAIS

    Afin de renforcer les moyens d'actions des organes juridictionnels camerounais en matière de lutte contre la criminalité financière, deux grands axes sont envisageables : d'abord, le renforcement des pouvoirs du Ministère public en matière de poursuite des criminels financiers (A), ensuite, la reconnaissance d'une responsabilité pénale des personnes morales (B).

    A- Le renforcement des pouvoirs du Ministère public

    Le renforcement des pouvoirs du Ministère public est une mesure pouvant être mise en oeuvre pour une lutte efficace contre la criminalité financière au Cameroun. Ce renforcement de pouvoirs inclue d'abord la liberté de mener des poursuites sans être limité, ayant sous son autorité la police judiciaire. Cela serait d'autant plus utile que le Ministère public a la possibilité de se déplacer plus facilement que le juge d'instruction, donc de mieux rechercher les éléments de preuve contre les criminels. De plus, certains pouvoirs du Ministère public, non utilisés de manière totale, le devraient pour permettre une lutte efficace des autorités camerounaises contre la criminalité financière.

    Ainsi donc, étant un des acteurs centraux de la lutte contre la criminalité financière, le Ministère public devrait avoir la possibilité de poursuivre le délinquant en recherchant d'abord l'intérêt de l'Etat ou de la victime. Nous pensons qu'en permettant au Ministère public de transiger avec le prévenu, cette condition pourrait se réaliser. Nous l'avons déjà démontré, la principale conséquence de la criminalité financière est qu'elle pèse sur les intérêts de l'Etat. Cependant, l'instauration d'une quelconque transaction doit absolument éviter d'être partiale, de s'appliquer uniquement à certains cas. C'est pourquoi la Procédure pénale camerounaise pourrait adopter cette technique de manière générale, pour les infractions, mais elle devrait être bien réglementée.

    Un constat qui peut être fait par rapport à la procédure pénale camerounaise est que la transaction existe déjà entre le délinquant et la partie civile108(*), avec la possibilité de mettre fin aux poursuites pénales à tout stade de la procédure, lorsque celle-ci a été mise en marche par le dépôt d'une plainte. Le retrait de celle-ci entrainera l'arrêt des poursuites pénales engagées contre le délinquant. Cela suppose que, la loi pénale camerounaise laisse la possibilité au délinquant d'engager des pourparlers avec la partie civile, afin de parvenir à un arrangement amiable du litige. En cas d'impossibilité de parvenir à un accord, les poursuites pénales suivront leur cours, et aboutiront soit à la reconnaissance de la culpabilité du prévenu, soit à son acquittement.

    Ainsi donc, si la possibilité est déjà laissée aux deux premières parties au procès d'engager une transaction pouvant aboutir à tout stade de la procédure, le Ministère public devrait aussi pouvoir engager ce type de transaction. Défenseur des intérêts de l'Etat comme l'avocat de la partie civile défend ceux de la victime, le Procureur doit avoir la possibilité de négocier une issue du procès qui arrangerait l'Etat. Car, il n'est plus à démontrer que la condamnation à une peine d'emprisonnement et d'amende, quelle que soit sa sévérité, n'est pas toujours la meilleure solution pour la résolution d'un litige. De même que le juge se base sur son intime conviction, le Ministère public devrait pouvoir négocier une fin du litige en prenant en compte sa formation, son intime conviction et surtout, l'intérêt de l'Etat. Cette transaction devrait pouvoir s'appliquer à tous types d'infractions, se faire en collaboration avec la partie civile le cas échéant et les modalités de son déroulement fixées par la loi. De plus, l'accord conclu doit nécessairement avoir l'approbation du juge saisi de l'affaire, pour être adopté comme issue du litige. Enfin, cette transaction ne doit être possible que lorsque l'action publique a été engagée par le Ministère public lui-même, et non lorsque son engagement est le fait de la partie civile.

    Ce mode de règlement des litiges a déjà été initié par l'Etat camerounais, avec l'institution du Tribunal criminel spécial. En effet, la transaction y est, comme nous l'avons précédemment démontré, admise. Cependant, cette issue du procès, qui est réglementée concernant des infractions particulièrement graves, devrait aussi, par souci d'équité, être reconnue aux délinquants financiers auteurs d'infractions moins graves. Car, si le but recherché par cette mesure est d'aider l'Etat à rentrer en possession de ses fonds, il faudrait éviter, par souci d'équité, de créer une différenciation entre les criminels graves, qui auront la liberté à condition de rembourser, et ceux moins graves qui seraient condamnés à une peine d'emprisonnement. Pour réglementer cette situation, nous proposons l'adoption d'un texte laissant la possibilité d'adopter la transaction de manière générale en matière de criminalité financière. Sur ce point, et afin cependant de punir l'intention délictuelle, il serait de bon ton de prévoir des peines complémentaires à appliquer au délinquant, en échange de la privation de liberté et contre remboursement. Ces peines pourraient par exemple constituer en des Travaux d'intérêt commun, le prononcé des déchéances ou l'interdiction d'exercice de certaines activités.

    Un autre aspect du renforcement des pouvoirs du Ministère public concerne l'utilisation de manière adéquate de ces pouvoirs. En effet, la lutte menée au Cameroun contre la criminalité financière, en particulier contre le détournement des deniers publics, est souvent montrée du doigt par une partie de l'opinion comme étant instrumentalisée, comme étant utilisée comme un outil politique. Cela est dû au fait que, de manière générale, les actions engagées et très médiatisées dans la lutte contre ce type d'infractions, à travers des opérations de grande envergure109(*), visent très souvent des personnalités politiques célèbres. Afin d'enlever ce sentiment d'instrumentalisation de la lutte contre la criminalité financière, il faudrait laisser la possibilité au Ministère public d'avoir la possibilité d'accès à certaines informations concernant la situation financière des sociétés étatiques, ainsi que de celles dans lesquelles l'Etat est intéressé. En attendant la mise en place effective de la commission de la déclaration des biens, cela serait une mesure salutaire, permettant de poursuivre plus facilement les auteurs de crimes financiers.

    Ainsi donc, le renforcement des pouvoirs du Ministère public semble être une mesure pouvant permettre l'amélioration de la lutte contre la criminalité financière sur le plan judiciaire. A côté de cette mesure, l'Etat camerounais peut aussi décider d'adopter la voie de l'atténuation du principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales.

    B- L'admission d'une responsabilité pénale des personnes morales

    En matière répressive, la personne contre qui une peine est prononcée est en principe celle à qui profite la commission de l'infraction. Cette mesure équitable vise la préservation de l'intérêt général. En effet, l'infraction est un acte matériel toujours réalisé dans le but de tirer un quelconque intérêt, qu'il soit matériel, moral, émotionnel ou de toute autre nature. En matière de criminalité financière particulièrement, l'avantage retiré de la commission de l'infraction se compte le plus souvent en termes d'argent, de profit retiré par l'auteur de l'infraction.

    Plusieurs infractions financières telles que les infractions d'affaires, l'émission de chèque sans provision, loin de profiter à la personne physique qui est le plus souvent poursuivie pour leur commission, profitent au contraire à la personne morale pour le compte de laquelle l'infraction a été commise. Or, dans l'engagement des poursuites pénales, en vertu du principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales, il devient difficile de poursuivre une société pour une infraction commise dans son intérêt. La victime ou l'Etat se retourneront alors contre des personnes physiques représentant la société, celles-ci devront répondre des engagements de toute une personne morale, et éventuellement subir des conséquences sur leur patrimoine. Ce qui semble créer une certaine injustice, lorsqu'on pense qu'il est possible que la personne morale à qui la commission de l'infraction a profité continue d'exercer son activité sans subir de sanction d'aucune sorte.

    Afin d'instaurer un système beaucoup plus juste et équitable, il est nécessaire de procéder à une atténuation, voire même à une révision du principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales. En effet, selon ce principe, il est impossible d'attraire une personne morale en justice pour une affaire relevant du domaine pénal. Or, entité existant juridiquement, la personne morale commet aussi des infractions pénales à travers ses représentants. Ceux-ci le faisant dans l'intérêt de leurs mandants, la responsabilité de ces derniers devrait pouvoir être engagée à travers celle de l'entité juridique qui les englobe tous. Cela reviendrait en quelque sorte à reconnaître une certaine responsabilité pénale aux personnes morales.

    Dans le but d'insérer cette mesure dans l'ordre pénal interne, le Cameroun pourrait, à l'instar du Luxembourg, reconnaître de manière véritable une responsabilité pénale aux personnes morales, ceci dans le but de faciliter la réparation des préjudices subits par les victimes desdites sociétés. C'est ainsi que le Luxembourg a, par sa loi N°3611 du 03 Mars 2010, introduit la reconnaissance d'une responsabilité pénale des personnes morales. Cette loi stipule en effet, dans son article 1er alinéa 5110(*), que :« Lorsqu'un crime ou un délit est commis au nom et dans l'intérêt d'une personne morale par un de ses organes légaux ou par un ou plusieurs de ses dirigeants de droit ou de fait, la personne morale peut être déclarée pénalement responsable et encourir les peines prévues par les articles 35 à 38.

    La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes infractions.

    Les alinéas précédents ne sont pas applicables à l'Etat et aux communes. »

    Ainsi donc, la reconnaissance de la personnalité pénale d'une personne morale tiendrait à trois conditions obligatoirement cumulées, portant sur la nature de l'infraction, la personne même de l'auteur de l'infraction et la personne bénéficiaire de cette commission :

    S'agissant de la nature de l'infraction, la loi luxembourgeoise prévoit l'application de cette mesure pour les infractions qualifiées crimes ou délits par la loi. Cela pourrait s'expliquer par le fait que la loi, consciente du fait que la reconnaissance d'une responsabilité pénale aux personnes morales est une mesure exceptionnelle, ne voudrait pas l'étendre aux contraventions, souvent jugées comme étant des infractions mineures. La mesure exceptionnelle ne saurait donc être étendue aux circonstances d'une gravité moindre, ne nécessitant pas forcément l'institution d'une mesure particulière.

    Pour ce qui est de la personne qui a commis l'infraction, la loi luxembourgeoise dispose que la responsabilité de la personne morale est retenue lorsque l'infraction est commise par « un de ses organes légaux ou par un ou plusieurs de ses dirigeants de droit ou de fait ». Cette disposition appelle nécessairement certaines observations : d'abord, l'on constate que la personne qui commet l'infraction doit avoir un rattachement avec la personne morale. Il s'agit soit d'un lien de rattachement prévu par la loi (organe légal de la personne morale ou dirigeant légal), soit d'un lien de rattachement de fait (dirigeant de fait, reconnu comme ayant le pouvoir de parler et agir au nom de la personne morale). De plus, la personne ayant commis l'infraction doit avoir la possibilité d'accomplir des actes qui engagent l'entreprise par exemple. L'on voit ici l'exclusion de la responsabilité pénale de la personne morale lorsque l'infraction est commise par un simple employé de la société, n'ayant ni le droit, ni le pouvoir de poser des actes engageant la personne morale. Enfin, et c'est peut-être la remarque la plus importante, la loi luxembourgeoise admet que les actes engageant la responsabilité de la personne morale peuvent avoir été commis aussi bien par une personne physique que par une autre personne morale. Cela pourrait s'expliquer par la nécessité pour une personne morale de veiller au respect de la loi par les autres personnes dont elle répond. Par organe légal de la personne morale, on pourrait voir ses filiales, des dépôts, etc.

    Enfin, la troisième condition posée par la loi luxembourgeoise confirme l'application de la maxime latine « isfecitcuiprodest »111(*). Il s'agit ici de l'intérêt que doit nécessairement tirer la personne morale dans l'infraction commise. Vu que c'est elle qui tire profit du crime commis, il apparait normal de la punir pour avoir bénéficié de la commission d'une infraction. Il est donc nécessaire, pour engager des poursuites contre une personne morale, de prouver l'intérêt qu'elle retire dans l'infraction commise. En l'absence de cet intérêt, l'on risquerait de poursuivre une personne morale pour tous les actes de la vie courante posés par ses dirigeants, même ceux n'ayant aucun rapport avec l'entreprise. Toutefois, la responsabilité pénale des personnes morales, selon la loi luxembourgeoise, n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs des infractions.

    S'agissant des peines encourues, la loi Luxembourgeoise en prévoit quatre qui sont :

    « 1) l'amende, dans les conditions et suivant les modalités prévues par l'article 36;

    2) la confiscation spéciale;

    3) l'exclusion de la participation à des marchés publics;

    4) la dissolution, dans les conditions et suivant les modalités prévues par l'article 38. »

    On remarquera ici l'absence de la peine privative de liberté qui est la plus encourue pour les personnes physiques, en raison de la difficulté évidente de mettre en prison une personne morale. Néanmoins, l'on note le souci, qui a été celui des autorités luxembourgeoises, de permettre l'application de sanctions pénales à un style particulier d'auteurs d'infractions, qui jusque là échappaient impunément à la justice.

    A l'exemple du Luxembourg, le Cameroun pourrait aménager, au sein de son ordre juridique pénal, la reconnaissance d'une responsabilité pénale aux personnes morales. Les conditions de mise en oeuvre de telles dispositions, loin d'être difficiles, pourraient simplement être effectuées sur le modèle luxembourgeois, qui nous parait remplir des conditions d'une bonne mise en oeuvre des poursuites pénales. Lorsque les trois conditions énumérées plus haut seront réunies, le Ministère public pourra engager des poursuites contre les personnes morales responsables d'actes délictueux. Cela pourra beaucoup plus permettre une meilleure indemnisation des victimes, ainsi qu'une juste application du Droit.

    La reconnaissance d'une responsabilité pénale aux personnes morales, non seulement aurait pour avantage de permettre l'engagement des poursuites contre elles, mais aussi serait hautement bénéfique pour les organes judiciaires chargés de la mise en oeuvre des poursuites pénales. En effet, en permettant de poursuivre des personnes morales qui se seraient rendues coupables de crimes financiers, l'Etat camerounais contribuerait ainsi à accélérer et améliorer le processus de poursuite et de sanction des criminels financiers. En admettant qu'il est possible qu'une personne morale soit poursuivie pour le crime commis, on donne la latitude au Ministère public d'engager des poursuites contre des personnes à qui profitent des crimes mais qui jusque là sont protégées par la loi. Enlever cette protection, c'est permettre qu'un plus grand nombre de sanctions soient appliquées contre un nouveau type de criminels.

    Cependant, il faut noter ici que, à travaers l'introduction dans son ordre juridique interne du Règlement N°01/03/CEMAC/UMAC/CM du 04 Avril 2003 portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique Centrale, le Cameroun a procédé à la reconnaissance de cette responsabilité pénale en ce qui concerne les infractions concernées. En effet, ledit règlement prévoit la mise en cause de la responsabilité des personnes morales concernées dans l'oeuvre de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme. Il devient donc possible, sur la base dudit Règlement, d'attraire en justice une personne morale soupçonnée de coaction ou de complicité dans la commission de l'une de ces infractions.

    De plus, il convient de signaler la volonté remarquable des autorités camerounaises d'améliorer dans ce sens l'environnement juridique du pays, à travers le projet de révision du Code pénal camerounais. En effet, ledit texte prévoit, dans ses articles 100-1 à 100-5, diverses dispositions admettant explicitement une reconnaissance de la responsabilité pénale des personnes morales au Cameroun. De plus, afin de permettre une bonne mise en oeuvre de cette responsabilité, le Projet camerounais de Code pénal révisé prévoit, dans ses articles 18 à 20, des peines applicables aux personnes morales. Cela permet une meilleure mise en oeuvre de cette responsabilité et une bonne application de ces innovations, les personnes morales ne pouvant en principe subir exactement toutes les peines applicables aux personnes physiques.

    Au-delà des actions à mettre en oeuvre par les autorités camerounaises pour lutter contre la criminalité financière, il est nécessaire d'harmoniser les actions judiciaires internationales afin de permettre une lutte efficace contre la criminalité financière.

    Paragraphe II : L'HARMONISATION JUDICIAIRE INTERNATIONALE EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE

    Plusieurs actions, on l'a vu, doivent être menées sur le plan interne, afin de tendre vers l'éradication au Cameroun de la criminalité financière. Cependant, ce processus ne saurait être complet si ce type de criminalité demeurait dans d'autres pays, avec la possibilité continuelle de connaître une importation au Cameroun. C'est donc pour cela que, afin non seulement de protéger son ordre juridique interne mais aussi d'assurer une meilleure protection de ses intérêts et de ceux de ses ressortissants, le Cameroun se doit de coopérer activement avec d'autres Etats dans le processus de lutte contre la criminalité financière. C'est ainsi qu'il pourrait par exemple contribuer à la création d'une juridiction internationale spécialisée dans la lutte contre la criminalité financière.

    Face aux effets néfastes de la criminalité financière dans la vie de toutes les Nations, plusieurs voix se sont élevées pour dénoncer les limites des juridictions nationales et proposer la création d'une juridiction internationale spécialisée dans la répression de ce type de criminalité. Aussi, avant de procéder à l'étude des infractions financières pouvant ressortir à la compétence d'une juridiction internationale, il faudrait d'abord voir quelles raisons pourraient motiver la création d'un tel système judiciaire.

    1°) La justification de la nécessité d'une juridiction financière internationale

    Dans un communiqué paru le 1er Octobre 2003 dans le journal français Le Grand Soir, le groupe ATTAC France, Syndicat de la magistrature, propose la création d'un parquet européen pour lutter contre la criminalité financière112(*). Allant plus loin dans ce sens, la Fédération Internationale des Droits de l'Homme (FIDH) a proposé la création d'un tribunal économique international, qui pourrait exercer un contrôle sur les Etats et les sociétés multinationales113(*). Ceci afin de permettre la traduction, devant une juridiction internationale, d'auteurs d'infractions portant gravement préjudice à plusieurs Etats.

    A la suite de ces déclarations, l'Appel de Bruxelles pour une justice financière internationale part du constat selon lequel le dénouement de toutes les opérations financières peut connaître une certaine traçabilité, car étant géré par des organismes internationaux tels que CLEARSTREAM et EUROCLEAR. Aussi demande-t-il que ces institutions soient placées sous le contrôle démocratique d'une organisation de tutelle, et pouvoir ainsi récupérer les espaces perdus par la démocratie au profit de la sphère financière. Cette traçabilité des opérations permettrait plus facilement l'exercice d'un contrôle par une juridiction internationale. Certes il est vrai qu'au Cameroun, il n'est pas toujours évident d'assurer la traçabilité des opérations financières114(*). Cependant, l'adhésion à un tel système serait hautement bénéfique pour le Cameroun car il permettrait d'assurer une traçabilité des fonds destinés au Cameroun et exportés vers l'étranger, et de retrouver ainsi les auteurs de crimes financiers. En cas de confiscation des biens d'une personne, la décision ayant autorité de chose jugée émanant d'une juridiction internationale permettra au gouvernement camerounais de rentrer plus facilement en possession de la fortune publique envoyée dans un paradis fiscal.

    La création d'une juridiction internationale chargée de la répression de la criminalité financière s'avère donc nécessaire. Car en effet, plus qu'au plan national, c'est une criminalité qui se développe sur la scène internationale, échappant à la souveraineté de plusieurs Etats. Punir l'auteur d'un seul élément constitutif de l'infraction ne servirait à rien, tant que les auteurs d'autres éléments resteraient protégés par des lois nationales qi tendent à affirmer leur suprématie en tant que loi de police du for. Le rattachement de tous les éléments de l'infraction à la juridiction qui s'est saisie de l'un d'eux ne pouvant pas toujours être mis en place, une juridiction supranationale, dont la compétence s'étendrait à plusieurs pays et qui pourrait mieux lutter contre la criminalité financière, s'avère donc nécessaire, voire même impérative.

    De plus, pour que ce dispositif porte des fruits, il faudrait que cette juridiction puisse imposer ses décisions aux Etats pour qu'ils l'appliquent. Car, si ces décisions n'ont qu'un effet consultatif, les Etats, dans le souci de protéger leur souveraineté, pourraient mettre en place tout un système de contrôle interne des décisions internationales. Cela entrainerait des lenteurs judiciaires, et freinerait surtout l'efficacité des mesures de répression de la criminalité financière. Il est donc nécessaire, pour qu'une telle juridiction puisse être créée, que les Etats lui reconnaissent la légitimité nécessaire à l'exercice de ses fonctions.

    Ainsi donc, la nécessité de la création d'une juridiction internationale spécialisée dans la répression de la criminalité financière s'explique par la nécessité d'harmoniser les efforts des juridictions nationales et la recherche de l'efficacité de la répression. Il est vrai que la Cour Pénale Internationale, créée dans le but de lutter contre les crimes de Droit International humanitaire, fait à l'heure actuelle montre d'une certaine pauvreté jurisprudentielle par la rareté des décisions rendues. Cependant, il reste toujours à savoir si toutes les infractions financières doivent nécessairement être jugées sur la scène internationale.

    2°) Les infractions financières pouvant être jugées sur la scène internationale

    Toutes les infractions financières n'ont pas la même gravité, et toutes ne posent pas les mêmes difficultés aux Etats pour leur éradication. Pour qu'une infraction soit érigée au rang d'infraction internationale, il faut la réunion de certains éléments à définir préalablement. Ensuite, il sera plus aisé de déterminer, parmi les infractions financières recensées, lesquelles nécessitent l'attribution du caractère international à leur répression, et lesquelles peuvent être réglées par les autorités étatiques.

    En ce qui concerne les éléments rendant nécessaire l'attribution de compétence à une juridiction internationale pour sa répression, le premier devrait être sans conteste la gravité de l'infraction. Par gravité, l'on entend l'étendue des dommages causés par l'infraction à un ou plusieurs Etats, à une ou plusieurs personnes. Les infractions financières dont les conséquences ont une certaine gravité sur le plan économique, social, politique, etc. devraient donc ressortir de la compétence d'une juridiction internationale. Un autre élément pouvant être pris en compte dans le classement de l'infraction au rang de celles relevant de la compétence d'une juridiction internationale est le caractère international de l'infraction. Par caractère international, l'on entend le fait que l'infraction ressortisse de la compétence de plusieurs Etats différents, de plusieurs juridictions nationales. En effet, la difficulté de l'harmonisation de la répression des auteurs de l'infraction pourrait se poser, du fait du conflit de juridictions possible. Une solution équitable serait de donner la possibilité à une juridiction supranationale de régler le différend en tranchant le litige sur la base d'un Droit accepté par tous.

    Après avoir tenté de déterminer les critères qui pourraient être retenus pour attribuer la compétence de la répression de certaines infractions financières à une juridiction internationale, il serait intéressant de voir quelles sont les infractions financières qui pourraient être rangées dans cette catégorie. A ce niveau, l'on pourrait emboiter le pas à la communauté internationale, qui semble plus préoccupée par la lutte contre certaines infractions financières. En effet, s'il est admis que toutes ne causent pas les mêmes dégâts aux Nations, il faut aussi reconnaître que la plupart peuvent être combattues par des dispositions nationales.

    Ainsi donc, pour ce qui est des infractions proprement dites qui pourraient être retenues, nous pensons tout d'abord à la corruption et au blanchiment des capitaux. Pour ce qui est des autres infractions, elles pourraient être retenues lorsqu'elles constituent des éléments constitutifs des deux premières. Pour ce qui est de la corruption, ce qui fonde la nécessité de l'ériger en infractions relevant du Droit international, c'est sa gravité. Cela n'est plus à démontrer, la corruption cause énormément de dommages aux Etats, et elle est surtout difficile à combattre lorsqu'elle a été commise par des ressortissants d'un autre Etat. Aussi est-il nécessaire, au vu de sa gravité, de l'ériger en infraction relevant du Droit international. En ce qui concerne l'infraction de blanchiment, c'est son caractère particulièrement international qui pose la nécessité de confier sa répression à une juridiction internationale. Comme nous l'avons démontré, le blanchiment des capitaux est la plupart du temps tel que la répression du délinquant ressortisse de la compétence de plusieurs tribunaux. Afin d'éviter que ne naisse un conflit, il serait nécessaire de donner la latitude à une juridiction internationale de le réprimer.

    Au regard des éléments précités, il apparait nécessaire d'élever la lutte contre la corruption et le blanchiment des capitaux au rang d'impératif de Droit supranational, à côté des normes de jus cogens reconnues. Leur répression pourrait être confiée à une juridiction internationale. Cependant, afin de simplifier la tâche des Etats, une solution parallèle serait d'étendre la compétence matérielle de la Cour pénale internationale aux infractions financières.

    Section 2 : L'Action institutionnelle

    Pour une lutte efficiente contre la criminalité financière, plusieurs actions non juridictionnelles devraient être menées. Celles-ci impliquent des actions nationales (Paragraphe I) et une implication active de la communauté internationale (Paragraphe II)

    Paragraphe I : LES ACTIONS NATIONALES DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE

    Afin de mener une lutte efficiente contre la criminalité financière, plusieurs actions devraient être menées, qui passent aussi bien par le renforcement des institutions existantes (A) que par la définition d'autres actions de lutte contre la criminalité financière (B).

    A- Le renforcement des institutions de lutte contre la criminalité financière

    Par renforcement des institutions de lutte contre la criminalité financière, nous entendons certaines actions gouvernementales visant l'amélioration du système de lutte contre la criminalité financière à travers une possible restructuration des institutions existantes. Celle-ci pourrait se faire sur deux fronts principaux : la connaissance réelle des biens des particuliers à travers l'effectivité de la déclaration des biens (1) et l'amélioration des organes de lutte contre la criminalité financière (2).

    1°) L'application effective de la loi N°2006/003 du 26 Avril 2006 relative à la déclaration des biens et avoirs

    La loi N° 2006/003 du 26 Avril 2006 relative à la déclaration des biens et avoirs prévoit des mesures préventives de lutte contre la criminalité financière. Cependant, en l'absence d'une application effective de ladite loi et en l'absence d'une mise en place de la commission de déclaration des biens et avoirs, il est difficile, voire impossible de la mettre en oeuvre.. En effet, il est certes vrai qu'une telle institution, pour sa mise en place et son fonctionnement effectif, nécessite plusieurs mesures à prendre par les autorités gouvernementales. Aussi, il ne sert à rien de prévoir tout un système de lutte contre un type d'infractions, s'il n'est véritablement mis en application par les autorités qui en sont responsables. Il est donc nécessaire de mettre réellement en application la loi de 2006 portant sur la déclaration de biens et avoirs.

    Un exemple d'application de l'exigence de la connaissance préalable des biens des dirigeants publics avant et après leur entrée en fonction, est le système adopté au Nigeria à travers l'institution de la Commission des crimes économiques et financiers115(*). Dans l'institution de ladite commission, et afin de faciliter la tâche au fonctionnement des institutions du pays, l'acte de création a élaboré deux formulaires. Le premier est un exemplaire de déclaration de biens, et le deuxième un exemplaire d'ordre de déclaration émis à l'encontre du Directeur d'une unité quelconque. Cette prévision a pour effet notamment, de faciliter l'établissement de la commission, en lui donnant déjà des outils de travail, pour l'exercice effectif de son action.

    A l'exemple du Nigéria, le Cameroun pourrait engager des mesures effectives permettant la mise en place rapide et efficace de la commission de déclaration des biens, afin de mettre rapidement en place un système efficace de prévention de la criminalité financière. Il est donc impératif de le faire au plus tôt, pour améliorer l'efficacité du système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun.

    2°) L'amélioration des organes de lutte contre la criminalité financière

    L'étude des organes de lutte contre la criminalité financière nous a permis de voir l'organisation et les lacunes de chacun d'entre eux. Nous avons vu que l'ANIF par exemple, pourrait se trouver en butte aux exigences de certaines professions, par rapport à l'exigence de la déclaration de soupçon faite à cette agence. Le Contrôle Supérieur de l'Etat, pour sa part, face aux difficultés liées aux mutations de fonctionnaires formés, qui entrainent une nécessité de réorganiser de nouvelles formations pour une nouvelle équipe de contrôleurs de la gestion publique, devrait travailler avec un certain nombre d'agents vérificateurs stables. De manière générale, nous avons vu qu'il pourrait se poser le problème de la formation des membres chargés de mettre en place la politique nationale de lutte contre la criminalité financière, ainsi que celle de la population.

    Afin d'améliorer l'action des organes chargés de la lutte contre la criminalité financière, il est donc urgent de prendre certaines mesures leur permettant de mieux exercer leur action. D'abord, l'on pourrait mettre un accent particulier sur la formation des personnes chargées de mener l'action des organes de lutte contre la criminalité financière. Cela commence bien évidemment par le processus de choix de ces personnes, et leur désignation en tant que membres de tel ou tel organe. Il est nécessaire de fixer de manière claire et précise les compétences requises pour exercer au sein de tel ou tel organe. Cela assure déjà une certaine base de connaissances, et une habitude dans l'exercice de telle ou telle fonction. Cette même exigence de formation continue durant l'exercice des fonctions de ces membres, car il est établi que, même en possession d'une certaine base, une période d'apprentissage leur permettra de mieux s'adapter aux évolutions de la criminalité, et de mieux comprendre le fonctionnement des outils mis à leur disposition.

    Une autre action qui pourrait être menée dans le cadre de l'amélioration des conditions des personnes chargées de lutter contre la criminalité financière, est la fixation d'un statut particulier pour les personnes chargées de mettre en pratique cette lutte. En effet, pour ce qui concerne certaines administrations comme le Contrôle Supérieur de l'Etat, il faudrait éventuellement prévoir des mesures permettant d'assurer leur stabilité au sein de l'organe dans lequel ils exercent. Cela aurait pour principal effet de permettre leur stabilité au sein du ministère en évitant les fréquents déplacements au sein des autres administrations, et de faciliter la prise en compte des mesures de contrôle des gestionnaires publics. Fonctionnaires de la République, ils pourraient avoir la liberté nécessaire pour exercer leur action de poursuite des criminels financiers.

    Au delà de la formation et de l'aménagement des moyens d'exercice des fonctions, une action qui devrait être envisagée, est la mise à disposition des organes de lutte contre la criminalité financière des moyens matériels, financiers et humains nécessaires pour l'exercice de leur action. C'est dire, qu'il faudrait par exemple prévoir des représentations des organes au niveau de chaque région, afin de coordonner l'action nationale lancée par l'organe central. Cette décentralisation des services permettrait de mieux orienter l'action de lutte contre la criminalité financière sur l'ensemble du territoire national. Cela peut certes sembler coûteux pour le budget de l'Etat, mais il ne faut pas perdre de vue que la criminalité financière cause plus de dégâts aux fonds publics, aussi est-il nécessaire de la combattre avec la plus grande sévérité, et avec les moyens disponibles.

    Ainsi donc, afin d'améliorer la lutte contre la criminalité financière au Cameroun, il est nécessaire d'envisager le renforcement des institutions de lutte contre la criminalité financière. Cependant, cette amélioration de la lutte non juridictionnelle passe aussi par la définition d'autres actions de lutte contre la criminalité financière.

    B- La définition d'actions non institutionnelles de lutte contre la criminalité financière

    Plusieurs actions de lutte contre la criminalité financière peuvent être définies, permettant d'améliorer le système camerounais. Cependant, nous avons pensé à la prise en compte de la société civile dans le processus de lutte contre la criminalité financière, et à la définition d'un programme national par étapes suffisamment élaboré et tenant compte des réalités socio économiques camerounaises.

    1°) L'association de la société civile à la lutte contre la criminalité financière

    Souvent négligée, souvent consultée, et parfois délaissée, la société civile joue pourtant un grand rôle au sein de l'environnement camerounais. Il faut dire que la société civile ne devrait pas être comprise ici par opposition à la société commerciale. On pourrait plutôt tenter de la définir comme un groupe de personnes unies dans le dessein de défendre les droits et libertés des individus composant la population civile du pays. A ce niveau, l'on retrouve par exemple le clergé, les associations de défense des droits de l'Homme, des droits des consommateurs, etc. Cet ensemble de personnes, qui ne dépend pas de l'Etat, joue pourtant un rôle non négligeable au sein de la population. S'étant donné pour but de défendre celle-ci, la société civile connait les problèmes que rencontrent les camerounais, et est très souvent plus au fait des réalités socio économiques du pays. C'est pour cela qu'il est nécessaire d'associer ses membres au processus de lutte contre la criminalité financière.

    Il est certes vrai, le gouvernement camerounais a par exemple associé un membre du clergé à la lutte contre la corruption, en le plaçant à la présidence de la Commission nationale anti corruption. Cependant, il est nécessaire de continuer ce processus, afin de faire participer les citoyens camerounais à l'assainissement de l'économie publique.

    Ainsi donc, la prise en compte de la société civile dans le processus de lutte contre la criminalité financière pourrait s'effectuer principalement à deux niveaux. D'abord, au niveau de l'association des membres de ce groupe aux organes de lutte contre la criminalité financière. A ce niveau, il s'agit d'envisager une participation plus active des membres de la société civile dans l'action des organes de lutte contre la criminalité financière. Par exemple, leur insertion parmi les membres de la commission de déclaration des biens, qui pourrait être possible parmi les personnalités désignées par le Président de la République.

    Un autre moyen par lequel la société civile pourrait être prise en compte dans la lutte contre la criminalité financière, est l'utilisation des documents qu'elle produits, dans le but d'évaluer l'action étatique. En effet, plusieurs organisations internationales telles que AMNESTY International, ou encore le GERRDES Cameroun, produisent à une certaine fréquence des rapports sur la gestion de la chose publique, dont il faudrait tenir compte. L'exploitation adéquate de ces documents permet de mieux orienter l'action du gouvernement dans la lutte contre la criminalité financière. En effet, dans la plupart de ces rapports, après avoir fait des constats et relevé les irrégularités du système, certaines mesures de correction sont proposées aux autorités, afin de réorienter leur action pour une amélioration de la lutte contre la criminalité. L'exploitation bien organisée de ces documents pourrait aider les autorités camerounaises à mieux orienter leurs actions gouvernementales de lutte contre la criminalité financière.

    Au-delà de la prise en compte de la société civile dans la lutte contre la criminalité financière, il est nécessaire de procéder à la définition d'un programme de lutte contre la criminalité financière, tenant compte des réalités socioéconomiques du pays.

    2°) La définition d'un programme de lutte contre la criminalité financière tenant compte des réalités socioéconomiques camerounaises

    La nécessité de la définition d'un programme de lutte contre la criminalité financière n'est pas un impératif nouveau. En effet, le gouvernement camerounais envisage souvent cette méthode, afin de procéder à l'éradication d'un phénomène antisocial. C'est aussi le cas de la Commission nationale anti corruption, qui, dans son Document de Stratégie nationale pour la croissance et l'emploi, dresse le plan d'actions à réaliser dans le cadre de la lutte contre la corruption par secteur et par pilier d'intégrité. Cette exigence a aussi été formulée par le Syndicat de la magistrature ATTAC116(*), qui propose, particulièrement pour le cas de la lutte pour l'éradication des paradis fiscaux, d'envisager une lutte par étapes, à plusieurs niveaux, mais sans perdre de vue que le but final ne peut être que l'éradication des paradis fiscaux. Aussi propose-t-il de :

    - Définir la notion d'entité juridique fictive, qui permet aux paradis fiscaux d'exercer en toute impunité leur action ;

    - Ordonner la nullité d'ordre public des rapports juridiques avec les paradis fiscaux ;

    - Geler les avoir en provenance de ces entités.

    De même que le groupe ATTAC, nous avons envisagé une lutte contre la criminalité financière, qui suivrait cinq étapes, permettant chacune soit la prévention, soit la répression de la criminalité financière. Ce programme pourrait se dérouler selon le processus suivant :

    - Amélioration de la prévention des crimes financiers

    Il s'agit ici de mettre en place un système de prévention suffisamment efficace contre la criminalité financière. A ce niveau, l'on retrouve par exemple la nécessité de la déclaration préalable des biens au moment de l'occupation d'une fonction de gestion des fonds publics. Il sera question pour les autorités camerounaises de mettre l'accent sur des mesures extrêmement dissuasives, dont le but sera de persuader les criminels financiers d'éviter à l'avenir d'avoir l'intention de commettre ce type de crimes. Il faudrait pour cela accentuer le contrôle sur tout gestionnaire de fonds, afin de l'amener à comprendre la nécessité de les utiliser pour l'usage auquel ils étaient destinés.

    - Amélioration de la détection des crimes financiers

    Il sera question à ce niveau de mettre l'accent sur des mesures qui permettent de se rendre rapidement compte de la commission des infractions financières. Il faudrait pour cela un processus de détection poussé, comme la déclaration de soupçon de l'ANIF, qui permettrait d'appréhender rapidement les criminels financiers, avant qu'ils n'aient pu véritablement jouir du fruit de leur crime, ou alors avant qu'ils n'aient pu soustraire les fonds détournés à la compétence de la justice camerounaise. Pour cela, il est nécessaire d'avoir un système de détection des crimes financiers assez élaboré.

    - Meilleure organisation de la répression

    Une bonne répression des criminels est assez dissuasive pour freiner l'avancée de la criminalité. Pour cela, il est nécessaire que des mesures rudes soient prises à l'encontre des criminels financiers. Ces mesures devraient, pour une bonne répression, être plus économiques que restrictives de liberté. Elles doivent aussi être rendues publiques, et ainsi le rôle des médias apparait bien évidemment, dans la couverture des procès intentés contre les prétendus criminels financiers. Ainsi, l'Etat camerounais pourrait rentrer en possession de fonds distraits illicitement par des délinquants. Pour cela, une véritable coopération policière internationale est indispensable, en appliquant les dispositions des différentes conventions étudiées. La répression de la criminalité financière doit donc mieux s'organiser, afin de répondre surtout aux attentes des populations, qui ont besoin d'exemples de répression pour avoir une confiance plus accrue en l'ordre juridique interne.

    - Assistance aux victimes de la criminalité financière

    Souvent négligée dans la lutte contre la criminalité, l'assistance aux victimes est pourtant fondamentale lorsque l'on voudrait mettre fin à la criminalité. En effet, il ne faudrait pas oublier que les victimes d'actes malveillants sont les personnes les plus à même de dénoncer les abus qu'elles subissent. Si celles-ci ne se sentent pas protégées et suffisamment assistées, elles ne seront pas motivées à dénoncer les personnes qui leur ont causé du tort. Au contraire, cela pourrait entrainer la naissance de nouveaux criminels, motivés par le désir de se venger d'un système défaillant. Cette exigence a très tôt été comprise par la CONAC, qui a mis à la disposition des victimes d'actes de corruption tout un système d'assistance. Mais cette assistance, qui commence à être effective en ce qui concerne la lutte contre la corruption, pourrait être aussi copiée pour la lutte contre les autres infractions financières.

    - Education des mentalités

    On l'a vu, l'une des raisons qui font en sorte que la lutte contre la criminalité financière tarde à porter rapidement des fruits, est le fait qu'elle semble ancrée dans les mentalités des camerounais. Aussi est-il nécessaire, pour espérer une lutte efficace contre ce phénomène, de procéder à une sensibilisation accrue des populations sur les méfaits de la criminalité financière, comment l'éviter et comment la combattre. Cela est obligatoire, car on saurait difficilement espérer réussir si les mentalités de ceux qui sont sensés arrêter de commettre des crimes financiers n'ont subi aucun changement. Dans le cadre de l'éducation des mentalités, il est urgent de procéder à une réforme du système éducatif. En effet, l'on constate que certaines disciplines telles que la morale, qui doivent faire des jeunes élèves des citoyens modèles, ont tendance à disparaître des programmes scolaires. Au contraire, il est plus qu'urgent aujourd'hui d'insérer dans les programmes éducatifs des disciplines dont l'objet est de former le citoyen, de l'amener à éviter la délinquance et plutôt à la combattre. En procédant à une bonne formation des mentalités des élèves, l'on aura gagné le pari d'avoir des citoyens camerounais prêts à faire face à la criminalité financière.

    Ainsi donc, à travers l'élaboration et le suivi d'un programme suffisamment élaboré de lutte contre la criminalité financière, le Cameroun pourrait espérer voir régresser ce type de criminalité, et peut-être même pourra y mettre fin. Mais, la criminalité financière n'étant pas qu'un phénomène national, il est nécessaire qu'il y'ait une implication active de la communauté internationale dans la lutte contre ce type de criminalité, afin de voir les répercussions de cette lutte internationale sur la scène camerounaise.

    Paragraphe 2 : L'IMPLICATION ACTIVE DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE

    La lutte contre la criminalité financière est un impératif international. C'est pourquoi, afin de voir ce type de criminalité régresser au niveau national, il est nécessaire qu'il connaisse déjà une baisse sur la scène internationale. Aussi la communauté internationale doit-elle envisager certaines mesures non juridictionnelles de lutte contre ce type de criminalité. Nous en avons recensé principalement deux, la position du principe d'extraterritorialité de la loi pénale pour les atteintes les plus graves au Droit international en ce qui concerne les crimes financiers(A), et la mise en place d'actes plus pratiques que théoriques en matière de lutte contre la criminalité financière(B).

    A- La position du principe d'extraterritorialité de la loi pénale pour les atteintes les plus graves au Droit international en ce qui concerne les infractions financières

    Dans un ouvrage intitulé En finir avec la criminalité économique et financière, le syndicat de la magistrature ATTAC117(*) propose la position du principe d'extraterritorialité de la loi pénale pour les atteintes les plus graves au droit international, particulièrement pour ce qui est des infractions financières. C'est dire que, en ce qui concerne les atteintes les plus graves au Droit humanitaire, le droit pénal aurait vocation à s'appliquer sur tout territoire national, quel que soit le lieu de commission de l'infraction ou la nationalité du délinquant. Ainsi donc, il faudrait poser comme principe le fait que, lorsqu'une infraction financière est commise, n'importe quel Etat pourrait en connaitre. C'est en quelque sorte reconnaitre une compétence universelle des juridictions nationales en cas de commission d'une infraction portant gravement atteinte au Droit des gens. Le Cameroun pourrait ainsi se poser parmi les initiateurs d'une telle mesure, afin d'amener les autres Nations à suivre cet exemple et à participer à une réelle mise en oeuvre de la volonté commune manifestée à travers les multiples concertations internationales organisées.

    L'importance d'une telle mesure est, sans conteste, de permettre une réelle lutte contre les infractions portant gravement atteinte au droit des gens. En effet, poser le principe d'extraterritorialité de la loi pénale pour certaines infractions aura pour effet d'amener plusieurs juridictions à se saisir des délinquants qui voudraient s'échapper d'un territoire, afin de se soustraire à l'application des mesures judiciaires sur leur personne ou sur leurs biens. Donner compétence à l'Etat sur le territoire duquel le délinquant se réfugiera posera certes des problèmes quant à la différence des systèmes juridiques et au possible problème de conflit de compétence, mais cela pourrait être réglé par la mise en oeuvre de la règle de conflit de lois.

    Si ce principe semble admis en ce qui concerne les infractions graves de Droit humanitaire, il n'en est pas encore de même pour les autres types d'infractions. Cependant, certaines infractions telles que la corruption et le blanchiment des capitaux, dont l'éradication semble de plus en plus être la préoccupation de la communauté internationale, portent aussi gravement atteinte au droit international. Aussi serait-il judicieux de poser ce même principe pour ces diverses atteintes économiques au Droit international.

    La nécessité pour laquelle la corruption et l'infraction de blanchiment devraient être retenues pour la position de ce principe n'est plus à démontrer. En effet, comme nous l'avons déjà expliqué, ces infractions, de par leur caractère grave et international, mériteraient amplement d'être classées au rang d'infractions graves de droit international. Les infractions ayant ce statut ne devraient pas être que des infractions de droit humanitaire, mais simplement celles qui portent atteinte d'une manière particulièrement forte au droit international. Aussi le principe de l'extraterritorialité de la loi pénale devrait-il être posé pour la corruption et l'infraction de blanchiment de capitaux, considérées comme des atteintes graves au droit international. Cela permettrait d'amener les différentes juridictions nationales à être compétentes pour juger les criminels financiers, en quelque endroit où ils pourraient se trouver afin de se soustraire à la justice de l'Etat dans lequel ils ont commis l'infraction.

    Ainsi donc, afin de mener à bien la lutte contre la criminalité financière sur la scène internationale, il faudrait envisager la position du principe d'extraterritorialité de la loi pénale pour certaines infractions financières. Au-delà de cette mesure, l'on pourrait aussi envisager la mise en place d'actes plus pratiques que théoriques en matière de lutte contre la criminalité financière au niveau international.

    B- L'adoption d'actes plus pratiques

    Jusqu'à présent, la lutte contre la criminalité financière engagée au niveau de la communauté internationale se matérialise par des actions purement théoriques. En effet, seules des déclarations, conventions et recommandations sont prises à l'heure actuelle, afin d'amener les Etats à prendre des mesures pour organiser la lutte contre la criminalité financière sur la scène nationale. C'est le cas par exemple des recommandations faites par le Groupe d'Action Financière internationale contre le Blanchiment des capitaux (GAFI).

    Cependant, cette méthodologie adoptée par les Etats réunis au sein de la communauté internationale ne semble pas porter véritablement des fruits, car elle est trop aléatoire. En effet, la réussite des mesures de lutte contre la criminalité financière qui ont été prises jusque là dépend trop de la volonté et du bon vouloir des Etats, qui peuvent décider d'appliquer ou non les recommandations internationales. Ce qui fait en sorte que les Etats, même après avoir adopté une quelconque Convention internationale, ne se décident pas toujours à appliquer ses dispositions. Le processus d'insertion de la disposition internationale dans l'ordre juridique interne prend d'abord du temps, retardant la mise en oeuvre de tout le processus. Et, quand bien même elle est insérée, sa mise en oeuvre rencontre quelques difficultés. Celles-ci sont dues au caractère purement déclaratif de la plupart des mesures prises dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière sur le plan international. C'est pour cette raison que Monsieur Jean DE MAILLARD affirme que : « les déclarations des chefs d'Etat et de gouvernement, psalmodiées comme une litanie rituelle lors de chaque sommet international, ne débouchent sur rien, car personne ne veut toucher à l'essentiel. »118(*)

    Ainsi donc, les différentes Conventions, traités et autres déclarations ou recommandations internationales n'ont pas, pour la plupart, de mesures contraignantes. C'est pour cela que, après une conférence interétatique sur la résolution d'une question comme celle portant sur la lutte contre les paradis fiscaux, l'on ne peut être sûr des résultats engrangés par la conférence. L'absence du caractère contraignant de la convention internationale porte un frein à la mise en place de la lutte espérée, aussi faudrait-il envisager des mesures plus contraignantes, pouvant obliger les Etats à lutter contre la criminalité financière.

    Un exemple de texte comportant des mesures contraignantes est le Règlement CEMAC N°01/03-CEMAC-UMAC portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale, dont l'article 69 prévoit que ledit règlement « entre en vigueur le 1er jour du mois suivant celui de sa publication au Bulletin officiel de la communauté ». Par cette mesure, la possibilité n'est pas véritablement donnée aux Etats parties d'étudier encore les conditions d'application du Règlement, et de décider de son application ou pas. C'est donc ce type de mesures que les Etats réunis au sein de la communauté internationale devraient pouvoir adopter.

    L'adoption de mesures contraignantes en matière de lutte contre la criminalité financière, loin de constituer une option facultative, devrait en réalité être considérée comme une obligation, surtout en ce qui concerne l'éradication des paradis fiscaux. En effet, ces zones de non droit, dont la seule utilité est de permettre d'échapper aux lois nationales des autres Etats et de réintroduire le produit du crime dans un système financier normal, devraient être combattues avec la plus grande énergie. Au nom du droit au respect de leur souveraineté, ces centres financiers permettent la normalisation de pratiques financières illicites, nuisant aux intérêts des autres Etats. Certes des mesures de sanction commencent à être prises contre ces centres financiers, mais beaucoup reste encore à faire afin de mettre fin aux pratiques illégales de ces pays. Il est ainsi étonnant de constater que, « alors que le droit d'ingérence est invoqué pour régler certains conflits locaux, on continue pourtant de s'interdire, au nom du principe sacré de la souveraineté nationale, toute influence sur les pays qui monnayent cette souveraineté et vendent leur législation au plus offrant. »119(*)

    Pour terminer, il est important que les Etats réunis au sein de la communauté internationale mettent réellement en oeuvre la coopération judiciaire prévue par les différents textes en vigueur. En effet, la bonne application de certains textes tels que la Convention contre la corruption, qui prévoit une coopération effective entre les Etats pour ce qui concerne la lutte contre cette infraction, devrait pouvoir réduire les effets de cette infraction. De plus, pour lutter contre le blanchiment par exemple, une coopération est nécessaire, dans le sens où les opérations de blanchissements s'effectuent le plus souvent sur le territoire d'autres Etats, où les juridictions nationales n'ont plus véritablement de pouvoir concret. Aussi, il est nécessaire que le Cameroun rejoigne les autres Etats, pour que cette coopération judiciaire ne soit plus une théorie, mais plutôt une réalité sur la scène internationale. Un aspect non négligeable de cette coopération serait de promouvoir et encourager le dialogue entre les juges de nationalités différentes, surtout dans les matières concernant l'application de textes internationaux pouvant être invoqués par des juges de nationalités différentes.

    Ainsi donc, afin de procéder à une lutte franche et véritable contre la criminalité financière, les Etats réunis au sein de la communauté internationale doivent adopter des mesures plus contraignantes permettant de lutter efficacement contre ce type de criminalité. Ce n'est que de cette manière, et en abordant franchement les problèmes qui se posent au lieu de les contourner, que l'on pourra espérer la diminution considérable de la criminalité financière. Le Cameroun, pays qui connait ce type de criminalité d'un genre particulier et aux conséquences avérées, devrait pouvoir utiliser sa position au sein de la communauté des Nations pour impulser la prise de mesures concrètes de lutte contre ce type de criminalité. Cela aurait pour principal effet, en ce qui concerne ce pays, d'améliorer la collaboration entre les autres Etats pour lutter contre ce type de criminalité, ainsi que de faciliter les actions des autorités nationales en charge de la lutte contre ce type de criminalité.

    L'amélioration de la lutte contre la criminalité financière doit donc passer par l'action combinée du gouvernement camerounais et de la communauté internationale. Cette coopération est nécessaire pour une lutte efficace contre un phénomène criminel qui prend de plus en plus de l'ampleur.

    CONCLUSION A LA DEUXIEME PARTIE

    Afin d'envisager une amélioration de la lutte contre la criminalité financière, il a d'abord été question pour nous de procéder à l'étude des résultats obtenus par le système mis en place. Cette étude nous a permis d'établir un bilan assez mitigé de la répression de la criminalité financière, car, alors que ces résultats semblent donner un début de réponse aux attentes nationales et internationales, l'on constate que ce système rencontre plusieurs difficultés qui freinent son action. Aussi, pour y remédier, nous avons vu que certaines actions pourraient être menées par l'Etat camerounais et par la communauté internationale, afin d'assurer la réussite de la lutte enclenchée. C'est cette coopération qui pourrait permettre de mettre fin à la criminalité financière sur la scène internationale et au Cameroun en particulier.

    CONCLUSION GENERALE

    Notre devoir portait sur l'étude du système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun. Pour cela, la question qui a guidé notre démarche tout au long de ce travail a été celle de savoir comment est organisée la lutte contre la criminalité financière au Cameroun ? Cela nous a amené à axer notre travail autour de l'hypothèse de recherche selon laquelle le système de lutte contre la criminalité financière mis en place par les autorités camerounaises porterait des fruits mais gagnerait à être amélioré, afin de répondre de manière optimale aux attentes qui sont placées en lui.

    Pour vérifier notre hypothèse de recherche, il importait d'abord de savoir ce que l'on entend par criminalité financière au Cameroun. Cette présentation de la criminalité financière au Cameroun s'est faite en deux phases, l'identification des différentes infractions financières au Cameroun, et l'étude de l'impact de ces infractions sur la société camerounaise. L'identification des infractions financières a permis de distinguer deux grands groupes d'infractions : d'une part la corruption et les infractions qui lui sont assimilées et apparentées, d'autre part les autres infractions financières parmi lesquelles celles faisant l'objet de dispositions générales et celles faisant l'objet de dispositions spéciales. L'étude de l'impact de la criminalité financière sur le Cameroun a quant à elle été effectuée sur les plans socio économique et politico juridiques.

    Après avoir fait une présentation de l'état des lieux de la criminalité financière au Cameroun, il a été question de voir quel est le traitement pénal apporté à la criminalité financière au Cameroun. Aussi avons-nous vu qu'au sein de ce pays, la lutte contre la criminalité financière se ressent à deux niveaux, d'abord sur le plan textuel avec l'usage d'une pluralité de textes nationaux et internationaux, ensuite au plan institutionnel, où l'on observe l'action de plusieurs organes à côté des autorités judiciaires. Parmi ces organes, nous avons relevé que certains étaient étatiques ou gouvernementaux, tandis que d'autres sont indépendants.

    Après l'étude du système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun, nous nous sommes interrogés, dans la deuxième partie de notre devoir, sur une éventuelle réforme de ce système. Avant d'arriver éventuellement à cette réforme, il importait d'abord d'évaluer l'impact de la lutte engagée contre la criminalité financière au Cameroun. Cette étude d'impact nous a permis de voir que l'on observe apparemment un début de réponse aux attentes de l'Etat et de la Communauté internationale. Car en effet, non seulement il y'a un début de réponse aux préoccupations de l'Etat et de la communauté nationale camerounais au regard des rôles préventifs et répressifs assumés par le système, mais aussi l'on remarque le début de satisfaction des attentes de la communauté internationale, qui s'observe à travers le classement du Cameroun au rang de certaines initiatives de développement et l'encouragement à l'investissement dans le pays. Cependant, à côté de ces résultats probants, il nous a été amené de voir que des difficultés restent et demeurent dans la lutte contre la criminalité financière au Cameroun. Ces difficultés tiennent aussi bien à la persistance de plusieurs infractions et à l'impression de lenteur des autorités, qu'à certaines difficultés d'ordre personnel et institutionnel rencontrées dans la mise en place du système de lutte contre la criminalité financière au Cameroun.

    Face à ces difficultés relevées, le dernier chapitre de notre recherche a été consacré à l'étude d'une amélioration possible du système camerounais de lutte contre la criminalité financière, sur un double plan juridictionnel et non juridictionnel. Sur le plan juridictionnel, nous avons proposé dans un premier temps le renforcement des moyens d'action des organes juridictionnels camerounais, à travers le renforcement des pouvoirs du Ministère Public et l'atténuation du principe d'irresponsabilité pénale des personnes morales. Dans un second temps, nous avons pensé à la nécessité d'une harmonisation judiciaire internationale en matière de lutte contre la criminalité financière, à travers la création d'un Tribunal économique international spécialisé dans la lutte contre la criminalité financière, ou alors l'extension des compétences de la Cour Pénale Internationale aux formes de criminalité économique. Pour ce qui est de l'action non juridictionnelle, celle-ci pourrait s'opérer sur un double plan national et international. Sur le plan national, il s'agitdu renforcement des institutions de lutte contre la criminalité financière et de la définition d'actions de lutte contre cette criminalité. Sur le plan international, l'implication active de la communauté internationale dans la lutte contre la criminalité financière pourrait s'observer à travers la position du principe d'extraterritorialité de la loi pénale pour les atteintes les plus graves au Droit international en matière de lutte contre la criminalité financière, et par l'option d'actes beaucoup plus pratiques que théoriques.

    Le problème de la lutte contre la criminalité financière est donc un impératif national et international, qui doit fortement impliquer l'ensemble de la communauté internationale. Pour y parvenir, la lutte sera sûrement longue et parsemée d'embûches, mais une réelle volonté politique et la mise en place d'actions concrètes et concertées de lutte contre la criminalité financière pourront permettre d'aboutir au règlement définitif de cette question. Cependant, tant que certaines législations permettront aux criminels financiers de se soustraire aux lois de leurs pays, il sera difficile d'éradiquer véritablement ce phénomène. Il importe donc de voir dans quelle mesure organiser des actions concrètes pour la lutte contre ces zones de non droit qui permettent à la criminalité financière de prospérer, appelés « paradis fiscaux ».

    BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE

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    - Association Henri CAPITANT, sous la direction de Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, PUF, 8e édition, Juin 2009

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    - STEFANI (G), LEVASSEUR (G) et BOULOC (B) : Droit pénal général ; Dalloz, 14 Edition, 1992

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    C : Ouvrages spécifiques

    - BABISSAKANA et ABISSAMA ONANA : Les débats économiques du Cameroun et d'Afrique ; Editions Prescriptor, 2004

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    III- Thèses et mémoires

    - ALIME MAHIANE Claire : La Criminalité transfrontalière en Afrique centrale, Mémoire de DEA en Droit Privé, Université de Yaoundé II, 2003/2004

    - AZEUFACK WADJEH (G.A.) : La répression du blanchiment des capitaux en Droit camerounais ; Mémoire de DEA en Droit Privé, Université de Yaoundé II, 2004/2005

    - LOGMO MBELEK (A.) : Le contrôle supérieur de l' Etat au Cameroun : une étude socio-juridique ; Thèse de doctorat en droit, Université de Yaoundé II, Juin 2002

    - MFOMO (S.-P.) : Lutte contre la corruption au Cameroun (1990-2006) : contribution à l'étude de l'élaboration et de la mise en oeuvre d'une politique publique ; Thèse de doctorat en Sciences Politiques, Université de Yaoundé II, 2005-2006

    - MGBA NDJIE Marc Stéphane, La lutte contre l'enrichissement illicite en Droit camerounais, mémoire de DEA en Droit privé option Droit pénal et Sciences criminelles, Université de Yaoundé II, 2006/2007

    - NGUEN (N.) : La responsabilité pénale des dirigeants sociaux dans l'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et groupements d'intérêt économique ; Mémoire de D.E.A en Droit Privé, Université de Yaoundé II, Mai 2001

    - TCHABO SONTANG H. M, Secret bancaire et lutte contre le blanchiment d'argent en Zone CEMAC, mémoire de DEA en Droit communautaire et comparé CEMAC, Université de Dschang, 2004

    IV/ Textes juridiques

    A) Textes nationaux :

    - Code de procédure pénale camerounais

    - Code Général des Impôts incluant le Livre de Procédure Fiscale

    - Code pénal camerounais

    - Constitution camerounaise du 18 Janvier 1996

    - Décret N°2005/187 du 31 Mai 2005 portant organisation et fonctionnement de l'Agence Nationale d'Investigations Financière

    - Décret N°2006/088 du 11 Mars 2005 portant création, organisation et fonctionnement de la Commission Nationale Anti-corruption

    - Décret N°2008/028 du 17 janvier 2008 portant organisation et fonctionnement du   Conseil de Discipline Budgétaire et Financière ;

    - Décret N°98/273 du 22 Octobre 1998 réorganisant la Présidence de la République

    - Loi N°2003/005 du 21 Avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême

    - Loi N°2003/008 du 10 Juillet 2003 portant prévention et répression des infractions contenues dans certains actes uniformes OHADA

    - Loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 portant sur la déclaration préalable des biens et avoirs

    - Loi N°2011/028 du 14 Décembre 2011 portant création d'un tribunal criminel spécial

    - Projet de révision du Code Pénal camerounais proposé par le groupe Brain Trust

    B) Textes internationaux :

    - Acte additionnel N°09/00/CEMAC-086/CCE 02 du 14 Décembre 2000 portant création du GABAC

    - Convention de Palerme du 15 Novembre 200 contre la criminalité transnationale organisée

    - Convention de Vienne du 19 Décembre 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes

    - Convention des Nations unies du 31 Octobre 2003 contre la corruption

    - Déclaration publique du GAFI du 18 Février 2010

    - Economic and Financial Crimes Commission ((Establishment) Act 2002, Laws of the federation of Nigeria

    - Loi luxembourgeoise N°3611 du 3 Mars 2010

    - Projet de loi uniforme sénégalais N°07/2009 relatif à la lutte contre le financement du terrorisme

    - Recommandations du groupe d'Action Financière Internationale de 1990, reformulées le 20 Juin 2003 et amendées en octobre 2004

    - Règlement COBAC R-2005/01 relatif aux diligences des établissements assujettis en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en Afrique

    - Règlement N°01/03/CEMAC/UMAC/CM du 04 Avril 2003 portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique Centrale.

    - Règlement N°02/02/CEMAC/UMAC/CM du 14 Avril 2002 portant organisation et fonctionnement du GABAC

    V- Autres documents

    A : Revues :

    - Revue de Droit commercial et de droit économique ; Dalloz, 1999

    - Revue Trimestrielle de Droit commercial et de Droit économique (Janvier-Mars 2001) ; Dalloz

    - Revues de sciences criminelles et de droit pénal comparé (Janvier-Mars 1997) ; SIREY, 252 pages

    - Revues de sciences criminelles et de droit pénal comparé (Juillet-Septembre 1997) ; SIREY, 214 pages

    B : Rapports :

    - GERDDES-Cameroun, Friedrich Ebert Stiftung: De la corruption au Cameroun, sous la direction de Pierre Titi NWELL, Editions SAAGRAPH, Yaoundé, Juin 1999, 269 pages

    - OXFAM, «Tax Havens, Releasing the hidden billions for poverty eradication», OXFAM Policy paper N°6, OXFAD UK, 2000

    - Rapport du Groupe de Travail des Institutions Financières Internationales sur la lutte contre la corruption, Septembre 2006

    - Rapport du XIIIème Congrès de l'Association internationale de Droit pénal, 1984

    C: Autres Documents:

    - Document de Stratégie Nationale de Lutte contre la Corruption, élaboré en Septembre 2010

    - Vision 2035 élaborée par le gouvernement camerounais

    VII- Sites internet

    - Camerounmonpays.over.blog.com

    - www.afdb.org

    - www.asembléenationale. Org

    - www.gafi-fatf. com

    - www.monayah. com

    - www.oecd. org

    ANNEXES

    Annexe 1 : Rapport du groupe de travail des institutions financières internationales sur la lutte contre la corruption, www.afdb.org, 11 Juin 2011

    INSTITUTIONS FINANCIÈRES INTERNATIONALES

    GROUPE DE TRAVAIL SUR LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION

    Septembre 2006

    CADRE UNIFORME DE PRÉVENTION ET DE LUTTE CONTRE

    LA FRAUDE ET LA CORRUPTION

    Le 18 février 2006, les dirigeants du Groupe de la Banque africaine de développement, de la Banque asiatique de développement, de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, du Groupe de la Banque européenne d'investissement, du Fonds monétaire international, du Groupe de la Banque interaméricaine de développement et du Groupe de la Banque mondiale ont convenu de mettre en place un Groupe de travail des institutions financières internationales (IFI) sur la lutte contre la corruption, en vue d'oeuvrer à l'élaboration d'une stratégie cohérente et harmonisée de lutte contre la corruption, en ce qui concerne les activités et opérations des institutions participantes. Les dirigeants de ces institutions reconnaissent que l'adoption d'une démarche unifiée et coordonnée est indispensable pour la réussite de leur action concertée visant à combattre la corruption et éviter qu'elle ne compromette l'efficacité de leurs opérations.

    Le Groupe de travail des IFI s'est accordé sur les éléments suivants recommandés pour une stratégie harmonisée de lutte contre la corruption dans les activités et opérations des institutions participantes.*

    1. Définition des pratiques de fraude et de corruption

    Une compréhension commune des pratiques prohibées est essentielle pour la réussite de la stratégie harmonisée. À cet effet, le Groupe de travail des IFI est parvenu à un accord de principe sur les définitions normalisées ci-après des pratiques de fraude et de corruption pouvant faire l'objet d'enquête dans le cadre desactivités financées par les institutions participantes.

    ? Un acte de corruption consiste à offrir, donner, recevoir ou solliciter, directement ou indirectement, quelque chose de valeur dans le but d'influencer indûment les actes d'une autre partie.

    ? Un acte de fraude se définit comme tout acte ou omission, y compris toute déclaration inexacte, qui, sciemment ou par négligence, induit en erreur ou tente d'induire en erreur une partie dans le but d'obtenir un avantage financier ou autre ou d'échapper à une obligation.

    ? Un acte de coercition est le fait de porter atteinte ou causer du tort, ou de menacer de porter atteinte ou de causer du tort, directement ou indirectement, à une partie ou à ses biens dans le but d'influencer indûment ses actions.

    ? Le terme collusion s'entend d'un arrangement conclu entre deux ou plusieurs parties, en vue de réaliser un objectif indu, y compris influencer indûment les actes d'une autre partie.

    * La Direction du FMI soutient et encourage ces efforts de lutte contre la corruption dans les prêts-projets et les

    opérations avec le secteur privé. Contrairement aux autres institutions participantes, le FMI n'intervient ni dans

    les prêts-projets ni dans les prêts au secteur privé. Il applique des procédures adaptées à sa situation spécifique

    qui lui permettent de faire face aux problèmes éventuels de mauvaise conduite du personnel et de s'assurer de

    l'utilisation appropriée de ses ressources.

    2

    Chacune des institutions participantes veillera à la mise en oeuvre de cette stratégiedans le cadre de ses politiques et procédures pertinentes, dans le respect desconventions internationales.

    2. Principes et directives pour les enquêtes

    Il est reconnu que la détection, l'enquête et les sanctions sont essentielles pour décourager effectivement les pratiques de corruption. Toutes les enquêtes doivent être exhaustives, professionnelles et respectueuses des parties concernées. Pour promouvoir la cohérence dans les activités menées par les différentes unités d'enquête des institutions participantes, le Groupe de travail des IFI a approuvé les principes et directives communs ci-joints à suivre pour les enquêtes.

    3. Échange d'informations

    Le Groupe de travail des IFI a reconnu que l'échange d'informations pertinentes entre les institutions participantes favorisera une stratégie commune et renforcer la coopération en matière de résolution des questions d'intégrité dans leurs activités. Ilest également essentiel de préserver la confidentialité des informations, de manière à rassurer les dénonciateurs et autres quant à leur capacité à communiquer avec lesinstitutions participantes. Le Groupe de travail des IFI a convenu que les institutionséchangent, le cas échéant, des informations relatives à des enquêtes sur des pratiques de fraude et de corruption sur la base des principes susmentionnés.

    4. Diligence raisonnable en matière d'intégrité

    Les institutions participantes du Groupe de travail des IFI reconnaissent la nécessitéde promouvoir, conformément aux normes internationales, des pratiques opérationnelles empreintes d'éthique ainsi que la bonne gouvernance dans les prisesde décisions relatives aux opérations de prêt et d'investissement. En conséquence, le Groupe de travail recommande que les institutions participantes soient guidées parles principes généraux suivants dans l'analyse des questions d'intégrité liées à la prise de décisions concernant des prêts au secteur privé et des investissements :

    ? procédures adéquates concernant la «notoriété du client» pour s'assurer de l'identité exacte du véritable bénéficiaire ;

    ? examen minutieux des parties inculpées ou faisant l'objet d'enquête pour infractions graves, examinées ou sanctionnées par un organe réglementaire ou figurant sur une «liste rouge» reconnue par l'institution participante ;

    ? examen minutieux des parties impliquées dans un différend civil comportant des allégations de malversation financière ;

    ? examen minutieux des personnes politiquement exposées, conformément aux recommandations du Groupe de travail sur les mesures financières ;

    ? identification des facteurs de réduction des risques et mise en application de dispositions prenant en compte les risques liés à l'intégrité ; et

    ? suivi permanent des risques liés à l'intégrité dans le cadre de la gestion deportefeuille.

    5. Reconnaissance mutuelle des dispositifs d'application

    Chacune des institutions participantes du Groupe de travail des IFI a un mécanismedistinct de traitement et de sanction des violations de leurs politiques respectives delutte contre la corruption. Le Groupe de travail des IFI reconnaît que la reconnaissance mutuelle de ces mécanismes d'application devrait considérablementaider à décourager et prévenir les pratiques de corruption. Les institutions participantes exploreront de manière plus approfondie comment des dispositifs d'application adoptés par une institution pourront être soutenus par les autres. Dansl'immédiat, le Groupe de travail des IFI recommande que chacune des institutions participantes exige que tous les soumissionnaires, promoteurs ou autres sociétés ouparticuliers prenant part aux activités financées par une institution participante publient toute sanction imposée à une société ou un particulier de la part d'une institution participante.

    6. Appui aux actions de lutte contre la corruption menée par les pays membres

    Le Groupe de travail des IFI reconnaît l'importance capitale de la préservation de l'intégrité dans les institutions participantes et les activités qu'elles financent. Il soutient également les initiatives que mènent les pays membres et autres parties prenantes, y compris la presse et l'appareil judiciaire, en vue de renforcer la transparence et la responsabilité, d'améliorer la gouvernance et de combattre la corruption.

    À cet effet, le Groupe de travail recommande que les institutions continuent d'élaborer des outils d'analyse destinés à évaluer les risques de corruption dans les différents pays, secteurs et régions, ainsi que les capacités des institutions à y faire face. De plus, les institutions participantes devraient, dans le cadre de leurs mandatsrespectifs, s'employer à élaborer une stratégie proactive et coordonnée visant à aiderles pays membres et le secteur privé à développer des institutions, systèmes et politiques administratifs qui soient à même d'éliminer les risques de fraude et de corruption.

    Le Groupe de travail des IFI recommande également que les institutions participantes s'efforcent de renforcer la coordination des activités en matière de gouvernance, d'intégrité et de lutte contre la corruption avec l'assistance technique fournie par d'autres donateurs, y compris pour les opérations menées dans les différents pays, en vue d'éviter les chevauchements et de maximiser les synergies. S'il y a lieu, les institutions participantes devraient également aider les organes d'exécution à évaluer les risques liés à l'intégrité chez les maîtres d'oeuvre potentielset à renforcer les mécanismes de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.

    Annexe 4

    PRINCIPES ET LIGNES DIRECTRICES À L'INTENTION DES ENQU?TEURS

    DES INSTITUTIONS FINANCIÈRES INTERNATIONALES

    PREAMBULE

    Les Institutions suivantes ont toutes entériné d'un commun accord les principes et lignes directrices ci-après pour servir de base commune aux enquêtes diligentées par leurs services d'enquête respectifs:1


    · Le Groupe de la Banque africaine de développement


    · La Banque asiatique de développement


    · La Banque européenne pour la reconstruction et le développement


    · Le Groupe de la Banque européenne d'investissement


    · Le Groupe de la Banque interaméricaine de développement


    · Le Groupe de la Banque mondiale

    L'objet de ces principes et lignes directrices est de baliser les enquêtes conduites en conformité avec les politiques, les règles, les règlements, et les privilèges et immunités applicables dans l'Organisation.2

    Au sens de ce document, le terme «organisation» désigne toutes les institutions qui font partie ou qui sont rattachées aux Institutions susmentionnées. Les services d'enquête de chaque organisation sont ci-après dénommés le «Bureau d'enquête.»

    PRINCIPES GÉNÉRAUX

    1. Chaque organisation est dotée d'un Bureau d'enquête responsable de la conduite desenquêtes.

    2. L'objet de l'enquête diligentée par le Bureau d'enquête est d'examiner et de déterminer la véracité des allégations de corruption ou de pratiques frauduleuses telles que définies par chaque institution, notamment en ce qui concerne, mais sans en exclure d'autres, les projets financés par l'organisation, et les allégations d'inconduite de la part des membres du personnel de l'organisation.

    1 Les services d'enquête désignés sont le Bureau de l'Auditeur général du Groupe de la Banque africaine de développement, la Division de

    l'Intégrité de la Banque asiatique de développement, le chef du Bureau de la conformité de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, l'Inspection générale du Groupe de la Banque européenne d'investissement, le Bureau de l'Intégrité institutionnelle du

    Groupe de la Banque interaméricaine de développement, le Département de l'Intégrité institutionnelle du Groupe de la Banque mondiale.

    La Direction du FMI soutient et encourage ces efforts de lutte contre la corruption dans le financement des projets et les relations avec les entreprises privées. À la différence des autres organisations, le FMI ne s'occupe pas de prêts-projets ni de prêts au secteur privé. Il a des procédures adaptées aux circonstances pour traiter des questions potentielles d'inconduite du personnel et des mesures de protection de l'utilisation des ressources du Fonds.

    2 L'objet de ces lignes directrices n'est pas de conférer, imposer, ou créer des devoirs, obligations, ou droits donnant lieu à des poursuites devant une juridiction ou à des poursuites administratives sur l'organisation menant l'enquête. Rien dans les lignes directrices ne doit être interprété comme affectant les droits et obligations de chaque organisation en vertu de ses règles, politiques et procédures, ni les privilèges et immunités conférées à chaque organisation par les traités internationaux et la législation des membres respectifs.

    3. Le Bureau d'enquête fera preuve d'objectivité, d'impartialité, et d'équité pendant tout le processus d'enquête et conduit ses activités de manière compétente et avec les plus hauts niveaux d'intégrité. En particulier, le Bureau d'enquête exerce ses attributions dans l'indépendance vis-à-vis des responsables ou des gestionnaires des activités opérationnelles et à l'égard des membres du personnel susceptibles d'être sujets à enquête et travaille à l'abri des pressions inopportunes et de la crainte de représailles.

    4. Le personnel du Bureau d'enquête porte à la connaissance d'un superviseur, de façon opportune, tout conflit d'intérêt réel ou potentiel dont il/elle a connaissance au cours d'une enquête à laquelle il/elle participe, et le superviseur prend les mesures appropriées pour remédier au conflit.

    5. Des procédures appropriées sont mises en place pour enquêter sur les allégations d'inconduite de la part d'un membre quelconque du personnel d'un Bureau d'enquête.

    6. Chaque organisation publie le mandat et/ou les termes de référence de son Bureau d'enquête ainsi que le rapport annuel faisant ressortir les activités centrées sur la préservation de l'intégrité et la lutte contre la fraude et la corruption de son Bureau d'enquête conformément à sa politique de diffusion de l'information.

    7. Le Bureau d'enquête prend des mesures raisonnables pour protéger la confidentialité de toute information non publique liée à une enquête, notamment l'identité des parties qui sont les sujets de l'enquête et les parties qui fournissent des témoignages ou des preuves. La manière dont l'information est gardée et mise à la disposition des parties dans chaque organisation ou partie extérieure à l'organisation, y compris les autorités nationales, est régie par les règles, les politiques et les procédures de l'organisation.

    8. Les résultats de l'enquête sont basés sur des faits et sur les analyses connexes, qui peuvent inclure des inférences raisonnables.

    9. Le Bureau d'enquête fait des recommandations, au besoin, à la direction de l'organisation, en se fondant sur les résultats de l'enquête.

    10. Toutes les enquêtes diligentées par le Bureau d'enquête ont un caractère administratif.

    DEFINITIONS

    11. L'inconduite est l'inobservation par un membre du personnel, des règles de conduit ou des normes de comportement prescrites par l'organisation.

    12. La norme de preuve utilisée pour déterminer le bien-fondé d'une plainte est définie, pour les besoins de l'enquête, comme l'information qui, au total, montre que quelque chose est plus probable que non.

    DROITS ET OBLIGATIONS

    Témoins et sujets

    13. Un membre du personnel qualifié de «dénonciateur» au sens des règles, des politiques et des procédures de l'organisation est à l'abri des représailles de l'organisation. L'organisation traitera les représailles comme un acte distinct d'inconduite.

    14. L'organisation peut demander au personnel de dénoncer les actes de fraude, de corruption, et d'autres formes d'inconduite.

    15. L'organisation demande au personnel de coopérer à l'enquête, de répondre aux questions et de faire droit aux demandes d'information.

    16. Chaque organisation adopte ses règles, ses politiques et ses procédures et, dans la mesure où c'est légalement et commercialement possible, incorpore à ses contrats avec tiers, des dispositions à l'effet que les parties à un processus d'enquête coopèrent à l'enquête.

    17. Dans le cadre d'un processus d'enquête, le sujet de l'enquête aura l'occasion d'expliquer sa conduite et de présenter l'information en sa faveur. La détermination du moment où cette occasion est donnée au sujet est régie par les règles, les politiques et les procédures de l'organisation.

    Le Bureau d'enquête

    18. Le Bureau d'enquête conduit l'enquête diligemment compte tenu des contraintes des ressources disponibles.

    19. Le Bureau d'enquête examine l'information disculpatoire et sans retard.

    20. Le Bureau d'enquête tient et conserve en lieu sûr les dossiers complets de l'enquête et l'information recueillie.

    21. Le personnel du Bureau d'enquête prend les mesures appropriées pour prévenir la divulgation non autorisée de l'information recueillie durant l'enquête.

    22. Le Bureau d'enquête consigne les résultats et les conclusions de l'enquête.

    23. Pour les besoins de l'enquête, le Bureau d'enquête a un accès complet et sans restriction à toute l'information et à tous les dossiers, personnels, et biens appropriés de l'organisation, conformément aux règles, aux politiques et aux procédures en vigueur de l'institution.

    24. Dans la mesure où les règles, les politiques et les procédures et les contrats pertinents de l'organisation le permettent, le Bureau d'enquête est autorisé à examiner et copier les livres et les registres appropriés des projets, des organes d'exécution, des particuliers, ou des sociétés participantes ou cherchant à participer aux activités financées de l'organisation ou de toutes autres entités participant au décaissement des fonds de l'organisation.

    25. Le Bureau d'enquête peut consulter et collaborer avec d'autres organisations, institutions internationales, et autres parties intéressées pour échanger des idées, des expériences pratiques, et des visions sur la manière de mieux traiter des questions d'intérêt mutuel.

    26. Le Bureau d'enquête peut fournir une assistance et partager l'information avec d'autres bureaux d'enquête.

    LIGNES DIRECTRICES DE PROCÉDURE

    Sources des plaintes

    27. Le Bureau d'enquête accepte toutes les plaintes d'où qu'elles viennent, y compris les plaintes provenant de sources anonymes ou confidentielles.

    28. Autant que possible, le Bureau d'enquête accuse réception de toutes les plaintes.

    Réception d'une plainte

    29. Toutes les plaintes sont enregistrées et examinées pour déterminer si elles sont du ressort de la juridiction ou de la compétence du Bureau d'enquête.

    Évaluation préliminaire

    30. Dès qu'une plainte est enregistrée, elle est évaluée par le Bureau d'enquête pour déterminer sa crédibilité, son caractère substantiel, et sa vérifiabilité. À cette fin, la plainte est examinée pour déterminer l'existence ou non d'une base légitime de diligenter une enquête.

    Établissement des priorités des cas

    31. Les décisions relatives à l'ouverture des enquêtes sont prises conformément aux règles, aux politiques et aux procédures de l'organisation ; la décision d'ouverture d'une enquête dans un cas particulier est du ressort du Bureau d'enquête.

    32. La planification et la conduite d'une enquête et les ressources allouées à cette fin tiennent compte de la gravité de l'allégation et du résultat possible.

    Déroulement de l'enquête

    33. Le Bureau d'enquête cherche, dans toute la mesure du possible, la corroboration de l'information en sa possession.

    34. Au sens de ces lignes directrices, l'activité d'enquête comprend la collecte et l'analyse de documents, de vidéos, d'enregistrements, de photographies, et d'information électronique ou de tout autre matériel, les auditions des témoins, les observations des enquêteurs, et tels autres techniques d'enquête que nécessite la conduite de l'enquête.

    35. L'activité d'enquête et les décisions essentielles sont mises par écrit et examinées de concert avec les dirigeants du Bureau d'enquête.

    36. Sous réserve des règles, des politiques et des procédures de l'organisation, si, à tout moment durant l'enquête, le Bureau d'enquête juge par mesure de prudence, à titre de précaution ou pour protéger les renseignements, d'empêcher temporairement un membre du personnel qui est le sujet d'une enquête d'avoir accès à ses dossiers ou à son bureau, ou de recommander sa suspension, avec ou sans rémunération et avantages, ou de recommander de placer telles autres limites à ses activités officielles, le Bureau d'enquête porte la question devant les autorités compétentes au sein de l'organisation pour la suite à donner.

    37. Dans toute la mesure possible, les interviews menées par le Bureau d'enquête sontconduites par deux personnes.

    38. Sous réserve de l'appréciation du Bureau d'enquête, les interviews sont conduites dansla langue de la personne qui est l'objet de l'enquête, au besoin avec l'aide d'interprètes.

    39. Le Bureau d'enquête ne rémunère pas un témoin ou un sujet pour les renseignements.Sous réserve des règles, des politiques et des procédures de l'organisation, le Bureau d'enquête peut assumer la responsabilité des dépenses raisonnables encourues par les témoins ou autres sources d'information pour rencontrer le Bureau d'enquête.

    40. Le Bureau d'enquête peut engager des parties extérieures pour l'assister dans ses enquêtes.

    RÉSULTATS D'ENQUÊTE

    41. Si durant l'investigation le Bureau d'enquête ne trouve pas d'information suffisante pour juger une plainte fondée, elle met par écrit ces conclusions, clôt l'enquête, et le notifie aux parties concernées, au besoin.

    42. Si le Bureau d'enquête trouve des renseignements suffisants pour juger une plainte fondée, il établit le dossier de l'affaire et le porte devant les autorités compétentes au sein de l'organisation, conformément aux règles, aux politiques et aux procédures en vigueur de l'institution.

    43. Lorsque les résultats de l'investigation du Bureau d'enquête indiquent qu'une plainte est sciemment mensongère, le Bureau d'enquête, le cas échéant, porte la question devant les autorités compétentes au sein de l'organisation pour la suite à donner conformément aux règles, aux politiques et aux procédures en vigueur de l'institution.

    44. Lorsque les résultats de l'investigation du Bureau d'enquête indiquent qu'un témoin ou un sujet ne s'est pas conformé à une obligation existante au sens du processus d'enquête, le Bureau d'enquête peut porter la question devant les autorités compétentes au sein de l'organisation.

    RENVOIS DEVANT LES AUTORITÉS NATIONALES

    45. Le Bureau d'enquête peut délibérer à l'effet de savoir s'il est opportun de transmettre l'information relative à la plainte aux autorités nationales compétentes, et veille à9 obtenir l'autorisation interne nécessaire lorsqu'il juge le renvoi devant les autorités nationales justifié.

    REVISION ET MODIFICATIONS

    46- Toute modification aux Lignes directrices sera adoptée par les organisations par consensus.

    PUBLICATION

    47. La publication de ces Principes et Lignes directrices est laissée à l'appréciation de chaque organisation conformément à sa politique de diffusion de l'information.

    Annexe 2 : Loi luxembourgeoise N°3611 du 3 Mars 2010

    Journal Officiel du Grand-Duché de Luxembourg

    MEMORIAL

    RECUEIL DE LEGISLATION

    A -- N° 36 11 mars 2010

    Loi du 3 mars 2010

    1. introduisant la responsabilité pénale des personnes morales dans le Code pénal et dans le Code d'instruction criminelle

    2. modifiant le Code pénal, le Code d'instruction criminelle et certaines autres dispositions législatives.

    Nous Henri, Grand-Duc de Luxembourg, Duc de Nassau,

    Notre Conseil d'Etat entendu;

    De l'assentiment de la Chambre des Députés;

    Vu la décision de la Chambre des Députés du 4 février 2010 et celle du Conseil d'Etat du 23 février 2010 portantqu'il n'y a pas lieu à second vote;

    Avons ordonné et ordonnons:

    Art. 1er. Le Code pénal est respectivement modifié et complété comme suit:

    1. L'intitulé du Chapitre II du Livre Ier du Code pénal est modifié comme suit:

    «Chapitre II.- Des peines applicables aux personnes physiques.»

    2. La 1re phrase de l'article 7 du Code pénal est modifiée comme suit:

    «Les peines criminelles encourues par les personnes physiques sont: (...)»

    3. La 1re phrase de l'article 14 du Code pénal est modifiée comme suit:

    «Sans préjudice d'autres peines prévues par des lois spéciales, les peines correctionnelles encourues par les personnes physiques sont: (...)»

    4. La 1re phrase de l'article 25 du Code pénal est modifiée comme suit:

    «Sans préjudice des peines autres que privatives de liberté prévues par des lois spéciales, les peines de police encouruespar les personnes physiques sont: (...)»

    5. Il est inséré au Livre Ier du Code pénal un nouveau Chapitre II-1 qui réintroduit les articles 34 à 40 comme suit:

    «Chapitre II-1.- Des peines applicables aux personnes morales

    Art. 34. Lorsqu'un crime ou un délit est commis au nom et dans l'intérêt d'une personne morale par un de ses organes légaux ou par un ou plusieurs de ses dirigeants de droit ou de fait, la personne morale peut être déclarée pénalement responsable et encourir les peines prévues par les articles 35 à 38.

    La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes infractions.

    Les alinéas précédents ne sont pas applicables à l'Etat et aux communes.

    Art. 35. Les peines criminelles ou correctionnelles encourues par les personnes morales sont:

    1) l'amende, dans les conditions et suivant les modalités prévues par l'article 36;

    2) la confiscation spéciale;

    3) l'exclusion de la participation à des marchés publics;

    4) la dissolution, dans les conditions et suivant les modalités prévues par l'article 38.

    Art. 36. L'amende en matière criminelle et correctionnelle applicable aux personnes morales est de 500 euros au moins.

    En matière criminelle, le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est de 750.000 euros.

    En matière correctionnelle, le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est égal au double de celui prévu à l'égard des personnes physiques par la loi qui réprime l'infraction. Lorsqu'aucune amende n'est prévue à l'égard des personnes physiques par la loi qui réprime l'infraction, le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales ne peut excéder le double de la somme obtenue par multiplication du maximum de la peine d'emprisonnement prévue, exprimée en jours, par le montant pris en considération en matière de contrainte par corps.

    Art. 37. Le taux maximum de l'amende encourue selon les dispositions de l'article 36 est quintuplé lorsque la responsabilité pénale de la personne morale est engagée pour une des infractions suivantes:

    - crimes et délits contre la sûreté de l'Etat

    - actes de terrorisme et de financement de terrorisme

    - infractions aux lois relatives aux armes prohibées en relation avec une association de malfaiteurs ou une organisation criminelle

    - traite des êtres humains et proxénétisme

    - trafic de stupéfiants en relation avec une association de malfaiteurs ou une organisation criminelle

    - blanchiment et recel

    - concussion, prise illégale d'intérêts, corruption active et passive, corruption privée

    - aide à l'entrée et au séjour irréguliers en relation avec une association de malfaiteurs ou une organisation criminelle.

    Art. 38. La dissolution peut être prononcée lorsque, intentionnellement, la personne morale a été créée ou, lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni en ce qui concerne les personnes physiques d'une peine privative de liberté supérieure ou égale à trois ans, détournée de son objet pour commettre les faits incriminés.

    La dissolution n'est pas applicable aux personnes morales de droit public dont la responsabilité est susceptible d'être engagée.

    La décision prononçant la dissolution de la personne morale comporte le renvoi de celle-ci devant le tribunal compétent pour procéder à la liquidation.

    Art. 39. Lorsque la personne morale encourt une peine correctionnelle autre que l'amende, cette peine correctionnelle peut être prononcée seule à titre de peine principale.

    Art. 40. Lorsqu'un délit est puni de l'emprisonnement à l'égard des personnes physiques par la loi qui réprime l'infraction, la confiscation spéciale telle qu'elle est définie par l'article 31 peut être prononcée à titre de peine principale à l'égard de la personne morale, alors même qu'elle ne serait pas prévue par la loi particulière dont il est fait application.

    La disposition de l'alinéa précédent ne s'applique pas en matière de délits de presse.»

    6. Le Chapitre V du Livre Ier du Code pénal est complété par les articles 57-2 et 57-3, ainsi rédigés:

    «Art. 57-2. Lorsqu'une personne morale, ayant été condamnée à une peine criminelle au titre de l'article 36, engage sa responsabilité pénale par un nouveau crime, le taux maximum de l'amende applicable est égal au quadruple de celui fixé à l'article 36.

    Lorsqu'une personne morale, ayant été condamnée à une peine criminelle au titre de l'article 37, engage sa responsabilité pénale par un nouveau crime, le taux maximum de l'amende applicable est égal au quadruple de celui fixé à l'article 37.»

    «Art. 57-3. Lorsqu'une personne morale, ayant été condamnée à une peine criminelle, engage sa responsabilité pénale par un délit, le taux maximum de l'amende applicable est égal au quadruple de celui fixé à l'article 36.

    Les peines prévues à l'alinéa précédent pourront être prononcées lorsqu'une personne morale, antérieurement condamnée à une amende correctionnelle d'au moins 36.000 euros, engage sa responsabilité par un nouveau délit avant l'expiration de cinq ans depuis qu'elle a subi ou prescrit sa peine.»

    7. Le Chapitre IX du Livre Ier du Code pénal est complété par un article 75-1, ainsi rédigé:

    «L'appréciation des circonstances atténuantes dans le chef d'une personne morale s'effectue au regard des peines criminelles encourues par la personne physique pour les faits susceptibles d'engager la responsabilité pénale de la personne morale.»

    8. L'article 86 du Code pénal est complété par un 4e alinéa, rédigé comme suit:

    «Pour les personnes morales condamnées, la perte de la personnalité juridique n'éteint pas la peine.»

    Art. 2. Les articles suivants du Code d'instruction criminelle sont respectivement modifiés ou complétés commesuit:

    1. A l'article 2 du Code d'instruction criminelle, l'alinéa suivant est inséré entre les 1er et 2e alinéas:

    «Pour les personnes morales, l'action publique s'éteint par la perte de la personnalité juridique. Elle pourra encore être exercée ultérieurement, si la perte de la personnalité juridique a eu pour but d'échapper aux poursuites ou si la personne morale a été inculpée avant la perte de la personnalité juridique.»

    2. A l'article 26 du Code d'instruction criminelle, le paragraphe (1) est modifié comme suit:

    «(1) Sont compétents le procureur d'Etat du lieu de l'infraction, celui de la résidence, au moment de la poursuite, de l'une des personnes physiques soupçonnées d'avoir participé à l'infraction, celui du lieu d'arrestation d'une de ces personnes, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause, celui du siège de la personne morale.»

    3. A l'article 29 du Code d'instruction criminelle, le paragraphe (1) est modifié comme suit:

    «(1) Sont compétents le juge d'instruction du lieu de l'infraction, celui de la résidence, au moment de la poursuite, de l'une des personnes physiques soupçonnées d'avoir participé à l'infraction, celui du lieu d'arrestation d'une de ces personnes, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause, celui du siège de la personne morale.»

    4. Il est inséré au Livre Ier, Titre III du Code d'instruction criminelle une nouvelle Section VIII-I qui réintroduit lesarticles 89 et 90 comme suit:

    «Section VIII-I.- Des mesures provisoires à l'égard des personnes morales.

    Art. 89. (1) Lorsqu'au cours d'une instruction, le juge d'instruction constate de sérieux indices de culpabilité chez une personne morale, il peut, si des circonstances particulières le requièrent, ordonner les mesures suivantes:

    1° la suspension de la procédure de dissolution ou de liquidation de la personne morale;

    2° l'interdiction de transactions patrimoniales spécifiques susceptibles d'entraîner l'insolvabilité de la personne morale;

    3° le dépôt d'un cautionnement dont il fixe le montant, en vue de garantir le respect des mesures qu'il ordonne.

    (2) Les articles 126 à 126-2 sont applicables aux mesures ordonnées en vertu du paragraphe (1).

    Art. 90. (1) La mainlevée de la mesure ordonnée en vertu du paragraphe (1) de l'article 89 peut être demandée en tout état de cause par l'inculpé, le prévenu ou le ministère public, à savoir:

    1. à la chambre du conseil du tribunal d'arrondissement, pendant la période de l'instruction;

    2. à la chambre du conseil de la Cour d'appel, si elle est saisie d'un recours contre l'ordonnance de renvoi de la chambre du conseil du tribunal d'arrondissement;

    3. à la chambre correctionnelle du tribunal d'arrondissement, si l'affaire y est renvoyée;

    4. à la chambre correctionnelle de la Cour d'appel, si appel a été interjeté sur le fond;

    5. à la chambre criminelle du tribunal d'arrondissement, si l'affaire y est renvoyée;

    6. à la chambre criminelle de la Cour d'appel, si appel a été interjeté sur le fond;

    7. à la chambre correctionnelle de la Cour d'appel, si un pourvoi en cassation a été formé soit contre une décision d'une juridiction d'instruction, soit contre une décision d'une juridiction de jugement.

    (2) La requête est déposée au greffe de la juridiction appelée à statuer.

    (3) Il y est statué d'urgence et au plus tard dans les trois jours du dépôt, le ministère public et l'inculpé, le prévenu ou leur défenseur entendus en leurs explications orales.

    (4) L'inculpé, le prévenu ou leur défenseur sont avertis, par les soins du greffier, des lieu, jour et heure de la comparution.

    (5) La mainlevée ne peut être refusée que si les conditions prévues à l'article 89 se trouvent remplies.»

    5. Il est inséré au Livre II du Code d'instruction criminelle un nouveau Titre II-2 qui réintroduit les articles 223 et224 comme suit:

    «TITRE II-2.- Des procédures menées à l'encontre des personnes morales

    Art. 223. (1) L'action publique est exercée à l'encontre de la personne morale prise en la personne de son représentant légal à l'époque de l'introduction de l'action publique.

    (2) La personne morale peut également désigner toute autre personne bénéficiant, conformément à la loi ou à ses statuts, d'une délégation de pouvoir afin de la représenter.

    (3) Lorsque l'action publique est introduite pour les mêmes faits ou pour des faits connexes à l'encontre du représentant légal, la personne morale peut désigner un autre représentant conformément au paragraphe (2).

    (4) Lorsque la personne morale désigne un représentant en application du paragraphe (2) ou (3), elle doit en faire connaître l'identité à la juridiction saisie, par lettre recommandée avec avis de réception. Il en est de même en cas de changement du représentant légal en cours de procédure.

    (5) Le représentant représente la personne morale à tous les actes de procédure.

    (6) Toutefois, en l'absence d'un représentant légal et lorsque la personne morale a omis de désigner un autre représentant conformément au paragraphe (2) ou (3), un mandataire de justice sera désigné par le président du tribunal d'arrondissement sur requête du procureur d'Etat.

    Cette désignation n'est pas susceptible de recours.

    Art. 224. Ni le représentant de la personne morale poursuivie, ni le mandataire de justice ne peuvent, en cette qualité, faire l'objet d'aucune mesure de contrainte autre que celle applicable au témoin en matière pénale.»

    6. Les Titres II-2 et II-3 sont renumérotés et deviennent respectivement les Titres II-3 et II-4.

    7. A l'article 381 du Code d'instruction criminelle, le paragraphe (2) est modifié comme suit:

    «(2) L'exploit de citation ou de signification contient la désignation du requérant, la date, les nom, prénoms et adresse de l'huissier, ainsi que les nom, prénoms et adresse du destinataire, ou, si le destinataire est une personne morale, sa dénomination, sa forme et son siège.»

    8. A l'article 383 du Code d'instruction criminelle, le 3e tiret du paragraphe (1) et la 1re phrase du paragraphe (2)sont respectivement modifiés comme suit:

    «(1) (...) - les nom, prénoms et adresse du destinataire de l'acte, ou, si le destinataire est une personne morale, sa dénomination, sa forme et son siège, (...)».

    «(2) Le procès-verbal est signé par le magistrat et par le destinataire de l'acte, ou, si le destinataire est une personne morale, par son représentant légal, un fondé de pouvoir de ce dernier ou toute autre personne habilitée à cet effet. (...)».

    9. A l'article 384 du Code d'instruction criminelle, le 4e tiret du paragraphe (1) est modifié comme suit:

    «(1) (...) - les nom, prénoms, profession, domicile ou résidence du destinataire de l'acte, pour autant que le domicile ou la résidence sont connus, ou, si le destinataire est une personne morale, sa dénomination, sa forme et son siège pour autant que le siège est connu. (...)».

    10. A l'article 386 du Code d'instruction criminelle, la 2e phrase du paragraphe (1) et les 1re et 2e phrases duparagraphe (4) sont respectivement modifiées comme suit:

    «(1) (...) La remise doit se faire en mains propres du destinataire ou, si le destinataire est une personne morale, à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet. (...)

    (4) Si l'agent des postes ne trouve pas le destinataire à son domicile ou à sa résidence ou, si le destinataire est une personne morale, à son siège, et qu'il résulte des vérifications qu'il a faites que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, il en fait mention sur l'avis de réception qu'il remet avec la lettre recommandée au bureau des postes distributeur compétent. Il laisse au domicile ou à la résidence, au siège, ou à la case postale du destinataire un avis l'avertissant que la lettre recommandée n'a pu lui être remise et indiquant l'autorité expéditrice et le bureau des postes où la lettre recommandée doit être retirée dans un délai de sept jours. (...)».

    11. A l'article 387 du Code d'instruction criminelle, les paragraphes (1), (4) et (7) ainsi que la 1re phrase duparagraphe (5) et la 1re phrase du paragraphe (6) sont respectivement modifiés et complétés comme suit:

    «(1) Les citations et significations qui sont à délivrer par un huissier de justice ainsi que les significations et notifications qui sont à délivrer par un agent de la force publique sont faites à personne en tous lieux où l'huissier ou l'agent peut trouver le destinataire, en déployant une diligence normale. Si le destinataire est une personne morale, les citations, significations et notifications sont faites à personne lorsqu'elles sont délivrées à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet.

    (4) Si les citations, significations et notifications ne peuvent se faire à personne, elles sont faites au domicile ou, à défaut de domicile connu, à la résidence du destinataire. Si le destinataire est une personne morale, elles sont faites au siège de la personne morale.

    La copie de l'acte est dans ce cas remise à toute personne présente et, à défaut, à un voisin, à condition que cette personne ou le voisin l'acceptent, déclarent leurs nom, prénoms, qualité et adresse et donnent récépissé. La copie de l'acte est remise sous enveloppe fermée ne portant que l'indication des nom, prénoms et adresse du destinataire, ou, si le destinataire est une personne morale, sa dénomination, sa forme et son siège, ainsi que le cachet de l'huissier de justice ou de l'autorité expéditrice apposé sur la fermeture du pli. Si la copie de l'acte est

    acceptée, la citation, la signification ou la notification sont réputées faites le lendemain de la présentation de la copie à la personne présente ou au voisin.

    (5) Dans tous ces cas, l'huissier de justice ou l'agent de la force publique doivent laisser au domicile ou à la résidence du destinataire, ou, si le destinataire est une personne morale, au siège, un avis daté l'avertissant de la remise de la copie de l'acte et mentionnant la nature de l'acte, l'autorité expéditrice ou les nom, prénoms, qualité et adresse du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie de l'acte a été remise. (...)

    (6) Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et qu'il résulte des vérifications que l'huissier de justice ou l'agent de la force publique ont faites et qui sont mentionnées dans l'exploit ou le procès-verbal que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification ou la notification se font par lettre recommandée au domicile ou à la résidence du destinataire, ou, si le destinataire est une personne morale, au siège. (...)

    (7) Par dérogation à la dernière phrase des paragraphes (4) et (6), celui qui doit avoir signifié ou notifié un acte de procédure dans un délai déterminé, est réputé l'avoir fait dans le délai, si l'huissier de justice ou l'agent de la force publique s'est présenté au domicile du destinataire de l'acte ou, si le destinataire est une personne morale, au siège de la personne morale avant l'expiration du délai.»

    12. L'article 388 du Code d'instruction criminelle est complété par un paragraphe (5) de la teneur suivante:

    «(5) Les dispositions qui précèdent sont applicables aux personnes morales qui ont leur siège à l'étranger.»

    13. L'article 389 du Code d'instruction criminelle est complété par un paragraphe (7) de la teneur suivante:

    «(7) Les dispositions qui précèdent sont applicables à la signification ou à la notification d'un acte concernant une personne morale qui n'a plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège par le registre de commerce et des sociétés.»

    14. A l'article 621 du Code d'instruction criminelle, le 2e alinéa est respectivement modifié et complété comme suit:

    «La suspension est exclue à l'égard des personnes physiques si, avant le fait motivant sa poursuite, le prévenu a encouru une condamnation irrévocable sans sursis à une peine d'emprisonnement correctionnel ou à une peine plus grave du chef d'infraction de droit commun. La suspension est exclue à l'égard des personnes morales si, avant le fait motivant sa poursuite, elle a encouru une condamnation irrévocable sans sursis à une amende correctionnelle ou à une peine plus grave du chef d'infraction de droit commun.»

    15. A l'article 624 du Code d'instruction criminelle, les 2e et 3e alinéas sont respectivement modifiés et complétéscomme suit:

    «La révocation de la suspension a lieu de plein droit à l'égard des personnes physiques en cas de nouvelle infraction commise pendant le temps d'épreuve et ayant entraîné une condamnation irrévocable à une peine criminelle ou à un emprisonnement correctionnel principal de plus de six mois sans sursis. La révocation de la suspension a lieu de plein droit à l'égard des personnes morales en cas de nouvelle infraction commise pendant le temps d'épreuve et ayant entraîné une condamnation irrévocable à une amende criminelle ou à une amende correctionnelle principale sans sursis d'un montant supérieur à 18.000 euros.

    La révocation de la suspension est facultative à l'égard des personnes physiques si la nouvelle infraction commise pendant le temps d'épreuve a entraîné une condamnation irrévocable à un emprisonnement correctionnel principal sans sursis d'un mois au moins et ne dépassant pas six mois. La révocation de la suspension est facultative à l'égard des personnes morales si la nouvelle infraction commise pendant le temps d'épreuve a entraîné une condamnation irrévocable à une amende correctionnelle principale sans sursis de 3.000 euros au moins et ne dépassant pas 18.000 euros.»

    16. A l'article 624-1 du Code d'instruction criminelle, le 1er alinéa est modifié comme suit:

    «Le président de la juridiction doit, après avoir ordonné la suspension du prononcé de la condamnation, avertir l'intéressé qu'en cas de nouvelle infraction commise dans les conditions de l'article 624 alinéa 2, les peines de la première infraction seront prononcées et exécutées sans confusion possible avec celles prononcées du chef de la nouvelle infraction et que les peines de la récidive seront encourues dans les termes de l'article 56 alinéa 2 et de l'article 57-2 alinéa 2 du Code pénal.»

    17. A l'article 625 du Code d'instruction criminelle, le 2e alinéa est respectivement complété et modifié comme suit:

    «Si la suspension est révoquée ou sa révocation constatée à l'égard des personnes physiques, la peine d'emprisonnement principal prononcée pour les faits qui ont donné lieu à la suspension du prononcé ne peut dépasser deux ans. Si la suspension est révoquée ou sa révocation constatée à l'égard des personnes morales, la peine d'amende principale prononcée pour les faits qui ont donné lieu à la suspension du prononcé ne peut dépasser 72.000 euros.»

    18. A l'article 626 du Code d'instruction criminelle, le 2e alinéa est respectivement complété et modifié comme suit:

    «Le sursis est exclu à l'égard des personnes physiques si, avant le fait motivant sa poursuite, le délinquant a été l'objet d'une condamnation devenue irrévocable, à une peine d'emprisonnement correctionnel ou à une peine plus grave du chef d'infraction de droit commun. Le sursis est exclu à l'égard des personnes morales si, avant le fait motivant sa poursuite, le délinquant a été l'objet d'une condamnation devenue irrévocable, à une amende correctionnelle ou à une peine plus grave du chef d'infraction de droit commun.»

    19. L'article 627 du Code d'instruction criminelle est respectivement modifié et complété comme suit:

    «Si pendant le délai de sept ans, s'il s'agit d'une peine criminelle, de cinq ans s'il s'agit d'une peine correctionnelle ou de deux ans s'il s'agit d'une peine de police, à dater du jugement ou de l'arrêt, la personne physique condamnée n'a pas commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à l'emprisonnement ou à une peine plus grave pour crime ou délit de droit commun, la condamnation sera comme non avenue.

    Si pendant le délai de sept ans, s'il s'agit d'une peine criminelle ou de cinq ans s'il s'agit d'une peine correctionnelle, à dater du jugement ou de l'arrêt, la personne morale condamnée n'a pas commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à l'amende correctionnelle ou à une peine plus grave pour crime ou délit de droit commun, la condamnation sera comme non avenue.

    Dans le cas contraire, la première peine sera d'abord exécutée sans qu'elle puisse se confondre avec la seconde, sous réserve de l'article 629.»

    20. L'article 628-1 du Code d'instruction criminelle est complété comme suit:

    «Le président de la juridiction doit, après avoir prononcé le sursis, avertir le condamné qu'en cas de nouvelle condamnation dans les conditions de l'article 627, la première peine sera exécutée sans confusion possible avec la seconde et que les peines de la récidive seront encourues dans les termes de l'article 56 alinéa 2, de l'article 57-3 alinéa 2 et de l'article 564 du Code pénal.»

    21. A l'article 646, 1er alinéa du Code d'instruction criminelle, les termes «au condamné» sont remplacés par lestermes suivants: «à la personne physique condamnée».

    22. A l'article 646 du Code d'instruction criminelle, l'alinéa suivant est inséré entre les 1er et 2e alinéas:

    «Elle est acquise de plein droit à la personne morale condamnée qui n'a, dans les délais ci-après déterminés, dans le pays ou à l'étranger subi aucune condamnation nouvelle à une amende correctionnelle ou à une peine plus grave pour crime ou délit, pour des faits prévus par les lois pénales luxembourgeoises:

    a) pour la condamnation unique à une amende correctionnelle ne dépassant pas 18.000 euros, ou la condamnation à une sanction pénale autre que l'amende prononcée à titre principal, après un délai de dix ans;

    b) pour la condamnation unique à une amende correctionnelle ne dépassant pas 72.000 euros ou les condamnations multiples dont l'ensemble ne dépasse pas 36.000 euros, après un délai de quinze ans;

    c) pour la condamnation unique à une amende criminelle supérieure à 72.000 euros ou pour les condamnations multiples dont l'ensemble ne dépasse pas 72.000 euros, après un délai de vingt ans.»

    23. A l'article 647 du Code d'instruction criminelle, le 1er alinéa est respectivement modifié et complété comme suit:

    «En cas de contestation sur la réhabilitation de droit, ou sur les inscriptions au casier judiciaire, la personne physique intéressée, ou s'il s'agit d'un incapable majeur, son représentant légal, présentera requête à la chambre du conseil de la cour d'appel. En cas de contestation par une personne morale, son représentant légal présentera requête à la chambre du conseil de la cour d'appel.»

    24. A l'article 648 du Code d'instruction criminelle, le 1er alinéa est respectivement modifié et complété comme suit:

    «La réhabilitation judiciaire ne peut être demandée en justice que par la personne physique condamnée elle même.

    S'il s'agit d'un incapable majeur, la demande est introduite par son représentant légal. Si la personne condamnée est une personne morale, la demande est introduite par son représentant légal.»

    25. L'article 652 du Code d'instruction criminelle est respectivement modifié et complété comme suit:

    «(1) La personne physique condamnée adresse la demande en réhabilitation au procureur d'Etat de l'arrondissement dans lequel elle réside.

    Lorsque la personne physique condamnée réside à l'étranger, la demande est adressée au procureur d'Etat de l'arrondissement de Luxembourg.

    La demande précise:

    1° la date de la condamnation;

    2° les lieux où la personne physique condamnée a résidé depuis la condamnation.

    (2) La personne morale condamnée adresse la demande en réhabilitation au procureur d'Etat de l'arrondissement dans lequel elle a son siège.

    Lorsque la personne morale a son siège à l'étranger, la demande est adressée au procureur d'Etat de l'arrondissement de Luxembourg.

    La demande précise:

    1° la date de la condamnation;

    2° tout transfert du siège de la personne morale intervenu depuis la condamnation.»

    Art. 3. La loi du 2 avril 2008 transposant la Directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du7 septembre 2005 relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions en cas d'infractions et laDécision-cadre 2005/667/JAI du Conseil du 12 juillet 2005 visant à renforcer le cadre pénal pour la répression de lapollution causée par les navires est complétée par un article 6-1 rédigé comme suit:

    «Art. 6-1. - Sanctions contre les personnes morales

    1. Lorsqu'une personne morale est déclarée pénalement responsable pour une des infractions visées à l'article 3, les peines suivantes lui sont applicables:

    - une amende de 10.000 euros à 1.500.000 euros dans les cas visés à l'article 4 paragraphe 1;

    - une amende de 10.000 euros à 1.250.000 euros dans les cas visés à l'article 4 paragraphe 2;

    - une amende de 10.000 euros à 1.000.000 euros dans les cas visés à l'article 4 paragraphe 3;

    - une amende de 10.000 euros à 750.000 euros dans les cas visés à l'article 4 paragraphe 4;

    - une amende de 7.500 euros à 300.000 euros dans les cas visés à l'article 4 paragraphe 5;

    - une amende de 5.000 euros à 150.000 euros dans les cas visés à l'article 4 paragraphe 6.a;

    - une amende de 2.500 euros à 100.000 euros dans les cas visés à l'article 4 paragraphe 6.b.

    2. En cas de condamnation sur base du paragraphe 1 du présent article, la fermeture définitive ou pour une durée d'au moins deux ans de l'un ou de plusieurs établissements de la ou des personnes morales ayant servi à commettre l'infraction pourra en outre être prononcés à l'encontre de la ou des personnes morales.»

    Mandons et ordonnons que la présente loi soit insérée au Mémorial pour être exécutée et observée par tous ceuxque la chose concerne.

    Le Ministre de la Justice, Palais de Luxembourg, le 3 mars 2010.

    François Biltgen Henri

    Annexe 3 : Loi n°2003-008 du 10 juillet 2003

    Loi n°2003-008 du 10 juillet 2003 relative à la répression des infractions contenuesdans certains actes uniformes OHADA

    Titre 1 - Disposition générale

    Art.1.- La présente loi fixe les peines applicablesaux infractions prévues dans lesactes uniformes OHADA relatifs :


    · au droit commercial général ;


    · au droit des sociétés commerciales etdu groupement d'intérêt économique ;


    · aux procédures collectives d'apurementdu passif et à l'organisation etl'harmonisation des comptabilités desentreprises.

    Titre 2 - Des pénalités

    Chapitre 1 - Infractions contenues dansl'acte uniforme du 17 avril 1997 relatifau droit commercial général

    Art.2.- 1) En application de l'article 68 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit commercial général, est punie d'unemprisonnement de trois mois à trois ans,et d'une amende de 100.000 à 1.000.000FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement,toute personne qui a inscrit unesûreté mobilière soit par fraude soit en portantdes indications inexactes données demauvaise foi.

    2) La juridiction compétente, en prononçantla condamnation, pourra ordonner larectification de la mention inexacte dansles termes qu'elle déterminera.

    Art.3.- En application de l'article 108 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit commercial général, est puni d'unemprisonnement de quinze jours à troismois et d'une amende de 200.000 à1.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, le locataire-gérant d'unfonds de commerce qui a omis d'indiqueren tête de ses bons de commande, factureset d'autres documents à caractères financierou commercial, son numérod'immatriculation au registre de commerceet du Crédit mobilier, ou sa qualité de locataire-gérant.

    Chapitre 2 - Infractions contenues dansl'acte uniforme du 17 avril 1997 relatifau droit des sociétés commerciales etgroupement d'intérêt économique

    Section 1 - Infractions relatives à laconstitution des sociétés

    Art.4.- En application de l'article 886 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de trois mois àtrois ans et d'une amende de 500.000 à5.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, les fondateurs, le président-directeur général, le directeur général,l'administrateur général oul'administrateur général adjoint d'une sociétéanonyme, qui ont émis des actionsavant l'immatriculation ou à n'importequelle époque, lorsque l'immatriculation aété obtenue par fraude ou que la société aété irrégulièrement constituée.

    Art.5.- En application de l'article 887 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de trois mois àtrois ans et d'une amende de 500.000 à5.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, ceux qui :


    · a) ont affirmé, sciemment, sincères etvéritables, des souscriptions qu'ils savaientfictives ou auront déclaré que lesfonds qui n'ont pas été mis entièrementà la disposition de la société ont été effectivementversés ;


    · b) ont remis au notaire ou au dépositaire,une liste des actionnaires ou desbulletins de souscription et de versementmentionnant des souscriptionsfictives ou des versements de fonds quin'ont pas été mis définitivement à ladisposition de la société ;


    · c) sciemment, par simulation de souscriptionou de versement ou par publicationde versement qui n'existe pas oude tous autres faits faux, ont obtenu outenté d'obtenir des souscriptions ou desversements ;


    · d) sciemment, pour provoquer dessouscriptions ou des versements, ontpublié les noms de personnes désignéescontrairement à la vérité comme étantou devant être rattachées à la société àun- titre quelconque ;


    · e) frauduleusement, ont fait attribuer àun apport en nature, une évaluation supérieureà sa valeur réelle.

    Art.6.- En application de l'article 888 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, ont punisd'un emprisonnement de trois mois àtrois ans et d'une amende de 500.000 à5.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, ceux qui ont sciemmentnégocié :


    · a) des actions nominatives qui ne sontpas demeurées sous la forme nominativejusqu'à leur libération ;


    · b) des actions d'apport avantl'expiration du délai pendant lequel ellesne sont pas négociables ;


    · c) des actions de numéraire pour lesquellesle versement du quart du nominaln'a pas été effectué.

    Section 2 - Infractions relatives à la géranceet à l'administration et à la directiondes sociétés

    Art.7.- En application de l'article 889 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de un à cinqans et d'une amende de 1.000.000 à10.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, les dirigeants sociauxqui, en l'absence d'inventaire ou au moyend'inventaires frauduleux, ont sciemmentopéré entre les actionnaires ou les associés,la répartition des dividendes fictifs.

    Art.8.- En application de l'article 890 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de un à cinqans et d'une amende de 1.000.000 à10.000.000 FCFA, les dirigeants sociaux qui ont sciemment, ni même en l'absencede toute distribution de dividendes, publiéou présenté aux actionnaires ou associés,en vue de dissimuler la véritable situationde la société, des états financiers de synthèsene donnant pas, pour chaque exercice,une image fidèle des opérations del'exercice, de la situation financière et decelle du patrimoine de la société, àl'expiration de cette période.

    Art.9.- En application de l'article 891 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de un à cinqans et d'une amende de 2.000.000 à20.000.000 FCFA, le gérant de la société àresponsabilité limitée, les administrateurs,le président directeur général,l'administrateur général oul'administrateur général adjoint qui, demauvaise foi ont fait, des biens ou des créditsde la société, un usage qu'ils savaientcontraire à l'intérêt de celle-ci, à des finspersonnelles, matérielles ou morales, oupour favoriser une autre personne moraledans laquelle ils étaient intéressés, directementou indirectement.

    Section 3 - Infractions relatives aux assembléesgénérales

    Art.10.- En application de l'article 892 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de trois mois àdeux ans et d'une amende de 50.000 à1.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, ceux qui sciemment, ontempêché un actionnaire ou un associé departiciper à une assemblée générale.

    Section 4 - Infractions relatives aux modificationsdu capital des sociétés anonymes

    Paragraphe 1 - Augmentation de capital

    Art.11.- 1) En application de l'article 893de l'acte uniforme du 17 avril 1997 relatifau droit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de trois mois àtrois ans et d'une amende de 100.000 à1.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines, les administrateurs, le président duconseil d'administration, le président directeurgénéral, le directeur général,l'administrateur général oul'administrateur général adjoint d'une'société anonyme qui lors d'une augmentationde capital, ont émis des actions ou descoupures d'actions :


    · avant que le certificat du dépositaire aitété établi ;


    · sans que les formalités préalables àl'augmentation de capital aient été régulièrementaccomplies ;


    · sans que le capital antérieurementsouscrit de la société ait été intégralementlibéré ;


    · sans que les nouvelles actions d'apportaient été intégralement libérées avantl'inscription modificative au registre ducommerce et du crédit mobilier ;


    · sans que les actions nouvelles aient été libérées d'un quart au moins de leurvaleur nominale au moment de la souscription;


    · le cas échéant, sans que l'intégralité dela prime d'émission ait été libérée aumoment de la souscription.

    2) Sont punis des mêmes peines, les personnesvisées au présent article qui n'ontpas maintenu les actions de numéraire sousforme nominative jusqu'à leur entière libération.

    Art.12.- En application de l'article 894 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et du regroupementd'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de trois mois àtrois ans et d'une amende de 100.000 à1.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, les dirigeants sociauxqui lors d'une augmentation de capital,n'ont pas :


    · fait bénéficier les actionnaires, proportionnellementau montant de leurs actionsd'un droit préférentiel de souscriptiondes actions de numéraire lorsquece droit n'a pas été supprimé parl'assemblée générale et que les actionnairesn'y ont pas renoncé ;


    · fait réserver aux actionnaires, un délaide vingt jours au moins, à dater del'ouverture de la souscription, sauflorsque ce délai a été clos par anticipation;


    · attribué les actions rendues disponibles,faute d'un nombre suffisant de souscriptionsà titre irréductible, aux actionnairesqui ont souscrit à titre réductibleun nombre d'actions supérieur àcelui qu'ils pouvaient souscrire à titreirréductible, proportionnellement auxdroits dont ils disposent ;


    · réservé les droits des titulaires de bonsde souscription.

    Art.13.- En application de l'article 895 del'acte uniforme du 17 avril relatif au droitdes sociétés commerciales et du groupementd'intérêt économique, sont punisd'un emprisonnement de trois mois à troisans et d'une amende de 100.000 à

    1.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, les dirigeants sociauxqui, sciemment, ont donné ou confirmé desindications inexactes dans les rapports présentésà l'assemblée générale appelée àdécider de la suppression du droit préférentielde souscription.

    Paragraphe 2 - Réduction de capital

    Art.14.- En application de l'article 896 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de trois mois àtrois ans et d'une amende de 100.000 à1.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, les administrateurs, leprésident directeur général, le directeurgénéral, l'administrateur général adjointqui, sciemment, ont procédé à une réductionde capital ;


    · sans respecter l'égalité des actionnaires;


    · sans avoir communiqué le projet deréduction du capital aux commissairesaux comptes quarante cinq jours avantla tenue de l'assemblée générale appeléeà statuer sur la réduction du capital.

    Section 5 - Infractions relatives aucontrôle des sociétés

    Art.15.- En application de l'article 897 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de deux à cinqans et d'une amende de 500.000 à5.000.000 FCFA, ou l'une de ces deuxpeines, seulement, les dirigeants sociauxqui n'ont pas provoqué la désignation descommissaires aux comptes de la société oune les ont pas convoqués aux assembléesgénérales.

    Art.16.- En application de l'article 898 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales, est punied'un emprisonnement de deux à cinq ans etd'une amende de 200.000 à 5.000.000FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement,toute personne qui, soit en son nompersonnel, soit à titre d'associé d'une sociétéde commissaires aux comptes, asciemment accepté, exercé ou conservé desfonctions de commissaires aux comptes,nonobstant les incompatibilités légales.

    Art.17.- En application de l'article 899 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, est punid'un emprisonnement de deux à cinq ans etd'une amende de 500.000 à 5.000.000FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement,tout commissaire aux comptes qui,soit en son nom personnel. soit à titre associéd'une société de commissaires auxcomptes, a sciemment donné ou confirmédesinformations mensongères sur la situationde la société ou qui n'a pas révélé auministère public les faits délictueux dont ila eu connaissance.

    Art.18.- En application de l'article 900 del'acte uniforme 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de deux à cinqans et d'une amende de 500.000 à5.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, les dirigeants sociaux outoute personnes au service de la sociétéqui, sciemment, ont fait obstacle aux vérificationsou au contrôle des commissairesaux comptes ou qui ont refusé la communication,sur place, de toutes pièces utiles àl'exercice de leur mission et notamment detous contrats, livres, documents comptableset registres de procès-verbaux.

    Section 6 - Infractions relatives à la dissolutiondes sociétés

    Art.19.- En application de l'article 901 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de deux à cinqans et d'une amende de 500.000 à5.000.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, les dirigeants sociauxqui, sciemment, lorsque les capitaux propresde la société deviennent .inférieurs àla moitié du capital social du fait des pertesconstatées dans les états financiers de synthèse,n'ont pas :


    · fait convoquer, dans les quatre moisqui suivent l'approbation des états financiersayant fait paraître ces pertes,l'assemblée générale extraordinaire àl'effet de décider, s'il y a lieu, de ladissolution anticipée de la société ;


    · déposé au greffe du tribunal chargé desaffaires commerciales, fait inscrire auregistre du commerce et du crédit mobilieret fait publier, dans un journalhabilité à recevoir les annonces légales,la dissolution anticipée de la société.

    Section 7 - Infractions relatives à la liquidationdes sociétés

    Art.20.- En application de l'article 902 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, est punid'un emprisonnement de deux à cinq ans etd'une amende de 500.000 à 5.000.000FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement,le liquidateur d'une sociétéquisciemment, n'a pas :


    · dans le délai d'un mois à compter de sanomination publié dans un journal habilitérecevoir les annonces légales dulieu du siège social, l'acte le nommantliquidateur ;


    · convoqué les associés, en fin de liquidation,pour statuer sur le compte définitifde la liquidation, sur le quitus desa gestion et la décharge de son mandatet pour constater la clôture de la liquidation;


    · dans le cas prévu de l'article 219 del'acte uniforme, déposé ses comptesdéfinitifs au greffe du tribunal chargédes affaires commerciales du lieu dusiège social, ni demandé en justicel'approbation de ceux-ci.

    Art.21.- En application de l'article 903 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, est punid'un emprisonnement de deux à cinq ans etd'une amende de 200.000 à 5.000.000FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement,lorsque la liquidation sera intervenuesur décision judiciaire, le liquidateurqui, sciemment, n'a pas :


    · dans les six mois de sa nomination,présenté un rapport sur la situation activeet passive de la société, en liquidation,et sur la poursuite des opérationsde liquidation, ni sollicité les autorisationsnécessaires pour les terminer ;


    · dans les trois mois de la clôture dechaque exercice, établi les états financiersde synthèse au vu de l'inventaireet un rapport écrit dans lequel il rendcompte des opérations de la liquidationau cours de l'exercice écoulé ;


    · permis aux associés d'exercer, en périodede liquidation, leur droit decommunication des documents sociauxdans les mêmes conditionsqu'antérieurement ;


    · convoqué les associés, au moins unefois par an, pour leur rendre comptedes états financiers de synthèse en casde continuation de l'exploitation sociale;


    · déposé à un compte de consignationouvert dans les écritures du Trésor,dans le délai d'un an à compter de ladécision de répartition, les sommes affectéesaux répartitions entre les associéset les créanciers ;


    · déposé, sur un compte de consignationouvert dans les écritures du Trésor,dans le délai d'un an à compter de laclôture de la liquidation, les sommesattribuées à des créanciers ou à des associéset non réclamées par eux.

    Art.22.- En application de l'article 904 del'acte uniforme du 17 avril 1997 relatif audroit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, est punid'un emprisonnement d'un à cinq ans etd'une amende de 2.000.000 à 20.000.000FCFA, le liquidateur qui, de mauvaise foi,a :


    · fait des biens ou du crédit de la sociétéen liquidation, un usage qu'il savaitcontraire à l'intérêt de celle-ci, à desfins personnelles ou pour favoriser uneautre personne morale dans laquelle ilétait intéressé, directement ou indirectement;


    · cédé tout ou partie de l'actif de la sociétéen liquidation à une personneayant eu dans la société la qualitéd'associé en nom, de commandité, degérant, de membre du conseild'administration, d'administrateur généralou de commissaire aux comptes,sans avoir obtenu le consentement unanimedes associés ou, à défaut,l'autorisation de la juridiction compétente.

    Section 7 - Infractions en cas d'appelpublic à l'épargne

    Art.23.- 1) En application de l'article 905de l'acte uniforme du 17 avril 1997 relatifau droit des sociétés commerciales et dugroupement d'intérêt économique, sontpunis d'un emprisonnement de trois mois àtrois ans et d'une amende de 100.000FCFA, ou de l'une de ces deux peines seulement,les présidents, les administrateursou les directeurs généraux de sociétés quiont émis des valeurs mobilières offertes aupublic :


    · sans qu'une notice soit insérée dans unjournal habilité à recevoir les annonceslégales, préalablement à toute mesurede publicité ;


    · sans que les prospectus et circulairesreproduisent les énonciations de la noticesusmentionnée et contiennent lamention de l'insertion de cette noticeau journal habilité à recevoir les annonces légales avec référence au numérodans lequel elle a été publiée ;


    · sans que les affiches et les annoncesdans les journaux reproduisent les mêmesénonciations ou tout au moins, unextrait de ces énonciations avec référenceà ladite notice, indications dunuméro du journal habilité à recevoirles annonces légales dans lequel elle aété publiée ;


    · sans que les affiches, les prospectus etles circulaires mentionnent la signaturede la personne ou du représentant de lasociété dont l'offre émane et précisentsi les valeurs offertes sont cotées ounon et, dans l'affirmative, à quellebourse.

    2) Sont punies des mêmes peines que cellesprévues à l'alinéa 1 ci-dessus, les personnesqui auront servi d'intermédiaires àl'occasion de la cession de valeurs mobilières.

    [NB - Art.5 L.F.2009 : Les sanctions prévuesà l'article 23 de la loi n°2003/008 du10 juillet 2003 portant répression des infractionscontenues dans certains ActesUniformes OHADA ne sont pas applicablesaux sociétés éligibles au régime fiscaldu secteur boursier prévu aux articles 108et suivants du Code Général des Impôts.]

    Chapitre 3 - Infractions contenues dansl'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectivesd'apurement du passif

    Section 1 - Banqueroutes et infractionsassimilées

    Art.24.- En application de l'article 227 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, les dispositions de la présente sections'appliqueront aux commerçants, personnesphysiques et aux associés des sociétéscommerciales qui ont la qualité decommerçant.

    Paragraphe 1 - Banqueroutes

    Art.25.- 1) En application de l'article 228de l'Acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectivesd'apurement du passif, est déclaré coupablede banqueroute simple et puni d'unemprisonnement de un mois à deux ans,tout commerçant, personnes physique, enétat de cessation de paiements, qui :


    · a contracté sans recevoir des valeurs enéchange, des engagements jugés tropimportants eu égard à sa situation lorsqu'elleles a contractés dans l'intentionde retarder la constatation de la cessationde ses paiements, fait des achats envue d'une revente au-dessous du coursou si, dans la même intention, emploiedes moyens ruineux pour se procurerdes fonds ;


    · sans excuse légitime, ne fait pas augreffe de la juridiction compétente, ladéclaration de son état de cessation despaiements dans le délai de trente jours ;


    · a tenu une comptabilité incomplète ouirrégulière ou ne l'a pas tenue conformémentaux règles comptables et auxusages reconnus dans la profession euégard à l'importance de l'entreprise.

    2) Le commerçant personne physique estégalement déclaré coupable de banquerouteet puni des mêmes peines prévues àl'alinéa 1 ci-dessus lorsque, après avoir étédéclaré deux fois en état de cessation despaiements dans un délai de cinq ans, cesprocédures ont été clôturées pour insuffisanced'actif.

    Art.26.- 1) En application de l'article 229de l'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectivesd'apurement du passif est déclaré coupablede banqueroute frauduleuse et puni d'unemprisonnement de cinq à dix 10 ans, toutepersonne physique qui, en cas de cessationdes paiements :


    · a soustrait sa comptabilité ;


    · a détourné ou dissipé tout ou partie deson actif ;


    · s'est frauduleusement reconnue débitricede sommes qu'elle ne devait passoit dans ses écritures, soit par des actespubliés ou des engagements sousseing privé, soit dans son bilan ;


    · a exercé la profession commercialecontrairement à une interdiction prévuepar les actes uniformes ou par la loi ;


    · a, après la cessation des paiements,payé un créancier au préjudice de lamasse ;


    · a stipulé avec un créancier des avantagesparticuliers à raisons de son votedans les délibérations de la masse, ouaura fait avec un créancier un traitéparticulier duquel il résulterait pour cedernier, un avantage à la charge del'actif du débiteur à partir du jour de ladécision d'ouverture.

    2) Est également déclaré coupable de banqueroutefrauduleuse et puni de la mêmepeine, tout commerçant personne physiquequi, à l'occasion d'une procédure de règlementjudiciaire, a ;


    · de mauvaise foi, présenté ou fait présenterun compte de résultats, un bilan,un état de créances ou de dettes ou unétat actif et passif des privilèges et sûretés,inexact ou incomplet ;


    · sans autorisation du président de lajuridiction compétente, accompli undes actes interdits par l'article 11 del'acte uniforme susvisé réorganisant lesprocédures collectives d'apurement dupassif.

    Paragraphe 2 - Infractions assimilées auxbanqueroutes

    Art.27.- 1) En application de l'article 230de l'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectivesd'apurement du passif, les dispositions desarticles 28, 29 et 30 suivants sont applicablesaux personnes physiques dirigeantesdes personnes morales assujetties aux procédurescollectives et à leurs représentantspermanents.

    2) Les dirigeants visés au présent articles'entendent de tous les dirigeants de droitou de fait et d'une manière générale, detoute personnes ayant directement ou parpersonne interposée, administré, géré ouliquidé la personne morale sous le couvertou en lieu et place de ses représentantslégaux.

    Art.28.- En application de l'article 231 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, sont punis d'un emprisonnementd'un mois à deux ans les dirigeants visés àl'article 27 ci-dessus qui, en cette qualité et de mauvaise foi ont :


    · consommé des sommes appartenant àla personne morale en faisant des opérationsde pur hasard ou des opérationsfictives ;


    · fait des achats en vue d'une revente audessous du cours ou employé desmoyens ruineux pour se procurer desfonds dans l'intention de retarder laconstatations de cessation des paiementsde la personne morale ;


    · payé ou fait payé un créancier au préjudicede la masse après la cessationdes paiements de la personne morale ;


    · fait contracter par la personne moralepour le compte d'autrui, sans recevoirdes valeurs en échange, des engagementsjugés trop importants eu égard àsa situation lorsque ceux-ci ont étécontractés ;


    · tenu, fait tenir ou laisser tenir unecomptabilité irrégulière ou incomplètede la personne morale dans les conditionsprévues à l'article 25 ci-dessus ;


    · omis de faire au greffe de la juridictioncompétente, dans le délai de trentejours, la déclaration de l'état de cessation des paiements de la personne morale;


    · détourné ou dissimulé, tenté de détournerou de dissimuler une partie de leursbiens ou se sont frauduleusement reconnusdébiteurs de sommes qu'ils nedevaient pas en vue de soustraire toutou partie de leur patrimoine aux poursuitesdela personnes morale en état decessation des paiements ou à celles desassociés ou des créanciers de la personnemorale en état de cessation despaiements.

    Art.29.- En application de l'article 232 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, sont déclarés coupables de banqueroutesimple et punis d'un emprisonnementd'un mois à deux ans, les représentantslégaux ou de fait des personnes moralescomportant des associés indéfiniment etsolidairement responsables des dettes decelles-ci qui, sans excuse légitime, n'ontpas fait au greffe de la juridiction compétente,la déclaration de l'état de cessationde paiements dans le délai de trente joursou si cette déclaration ne comporte pas laliste des associés solidaires avecl'indication de leurs noms et domiciles.

    Art.30.- 1) En application de l'article 233de l'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectivesd'apurement du passif, sont punis d'unemprisonnement de cinq à dix ans, les dirigeantsvisés à l'article 27 ci-dessus qui ontfrauduleusement :


    · soustrait les livres de la personne morale;


    · détourné ou dissimulé une partie de sonactif ;


    · reconnu la personne morale débitricede sommes qu'elle ne devait pas, soitdans les écritures, soit par des actespublics ou des engagements sous signatureprivée, soit dans le bilan ;


    · exercé la profession de dirigeantcontrairement à une interdiction prévuepar les actes uniformes ou par la loi ;


    · stipulé avec un créancier, au nom de lapersonne morale, des avantages particuliersà raison de son vote dans les délibérationsde la masse ou qui ontconclu avec un créancier, une conventionparticulière de laquelle il résulteraitpour ce dernier, un avantage à lacharge de l'actif de la personne du jourde la décision déclarant la cessation despaiements.

    2) Sont également punis des mêmes peines,les dirigeants visés à l'article 27 ci-dessus,à l'occasion d'une procédure de règlementpréventif, ont :


    · de mauvaise foi, présenté ou fait présenterun compte de résultat, un bilan,un état de créances ou de dettes ou unétat actif et passif des privilèges et sûretés,inexact ou incomplet ;


    · sans autorisation du président de lajuridiction compétente, accompli undes actes interdits par l'article 11 del'acte uniforme organisant les procédurescollectives d'apurement du passif.

    Section 2 - Autres infractions

    Art.31.- En application de l'article 240 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, sont punies d'un emprisonnementde cinq à dix ans :


    · les personnes convaincues d'avoir,dans l'intérêt du débiteur, soustrait, recéléou dissimulé tout ou partie desbiens meubles ou immeubles, sans préjudicede l'application des dispositionspénales relatives à la complicité ;


    · les personnes convaincues d'avoirfrauduleusement produit dans la procédurecollective, soit en leur nom, soitpar personne interposée ou supposition de personnes des créances supposées ;


    · les personnes qui, faisant le commercesous le nom d'autrui ou sous un nomsupposé, ont de mauvaise foi, détourné,dissimulé, tenté de détourner ou de dissimulerune partie de leurs biens.

    Art.32.- En application de l'article 241 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, sont punis d'un emprisonnementd'un à trois ans et d'une amende de 50.000à 250.000 FCFA ou de l'une de ces deuxpeines seulement, le conjoint, les descendants,les ascendants ou les collatéraux dudébiteur ou ses alliés qui, à l'insu du débiteuront détourné, diverti ou décelé deseffets dépendant de l'actif du débiteur enétat de cessation des paiements.

    Art.33.- En application de l'article 242 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, alors même qu'il y aurait relaxedans les cas prévus aux articles 31 et 32 cidessus,la juridiction saisie statue sur lesdommages-intérêts et sur la réintégration,dans la patrimoine du débiteur, des biens,droits ou actions soustraits.

    Art.34.- En application de l'article 243 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, est puni d'un emprisonnement decinq à dix ans et d'une amende de 200.000à 5.000.000 FCFA, tout syndic d'une procédurecollective qui a :


    · exercé une activité personnelle sous lecouvert d'une entreprise du débiteurmasquant ses agissements ;


    · disposé du crédit ou des biens du débiteurcomme ses biens propres ;


    · dissipé les biens du débiteur ;


    · poursuivi abusivement et de mauvaisefoi, dans son intérêt personnel, soit directement,soit indirectement, une exploitationdéficitaire de l'entreprise dudébiteur ;


    · acquis pour son compte, directementou indirectement, des biens du débiteuren violation de l'article 51 de l'acteuniforme organisant les procédures collectivesd'apurement du passif.

    Art.35.- En application de l'article 244 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, est puni d'un emprisonnement d'unà trois ans et d'une amende de 50.000 à 1 500.000 FCFA, le créancier qui a :


    · stipulé avec le débiteur ou avec toutepersonne, des avantages particuliers àraison de son vote dans les délibérationsde la masse ;


    · conclu une convention particulière delaquelle il résulterait en sa faveur, unavantage à la charge de l'actif du débiteurà partir du jour de la décisiond'ouverture de la procédure collective.

    Art.36.- 1) Les conventions prévues àl'article 35 ci-dessus sont, en outre déclaréesnulles par la juridiction répressive, àl'égard de toutes personnes, même du débiteur.

    2) Le jugement ordonnera en outre aucréancier de rapporter, à qui de droit, lessommes ou les valeurs qu'il a reçues envertu des conventions annulées.

    Art.37.- En application de l'article 246 del'acte uniforme du 10 avril 1998 organisantles procédures collectives d'apurement dupassif, sans préjudice des dispositions relativesau casier judiciaire, toutes les décisions ou condamnations rendues en vertudes dispositions du présent chapitre sont,aux frais des condamnés, affichées et publiéesdans un journal d'annonces légalesainsi que par extrait sommaire, au JournalOfficiel mentionnant le numéro du journald'annonces légales où la première insertiona été publiée.

    Chapitre 4 - Infractions contenues dansl'acte uniforme du 24 mars 2000 portantorganisation et harmonisation des comptabilitésdes entreprises

    Art.38.- En application de l'article 111 del'acte uniforme du 24 mars 2000 portantorganisation et harmonisation des comptabilitésdes entreprises, sont punis d'un emprisonnementde trois mois à trois ans etd'une amende de 500.000 à 5.000.000

    FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement,les entrepreneurs individuels et lesdirigeants sociaux qui :


    · n'ont pas, pour chaque exercice social,dressé l'inventaire et établi les états financiersannuels ainsi que, le caséchéant, le rapport de gestion et le bilansocial ;


    · ont sciemment établi et communiquédes états financiers ne présentant pasune image fidèle du patrimoine, de lasituation financière et le résultat del'exercice.

    Titre 3 - Dispositions finales

    Art.39.- Sont abrogées, en ce qui concerneles peines, toutes dispositions antérieurescontraires

    Art.40.- La présente loi sera enregistréeetpubliée suivant la procédure d'urgence,puis insérée au Journal Officiel en françaiset en anglais.

    Annexe 4 :Loi N°2011/028 DU 14 DECEMBRE 2011 portant création d'un Tribunal criminel spécial.

    L'Assemblée nationale a délibéré et adopté, le président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

    CHAPITRE 1 : DISPOSITIONS GENERALES

    Article 1er - La présente loi porte création du Tribunal Criminel Spécial ci-après dénommé « le Tribunal »

    Article 2.- Le Tribunal est compétent pour connaître, lorsque le préjudice est d'un montant minimum de 50 000 000 Fcfa, des infractions de détournements de deniers publics et des infractions connexes prévues par le Code Pénal et les Conventions Internationales ratifiées par le Cameroun

    Article 3.- Le tribunal a son siège à Yaoundé et son ressort couvre l'ensemble du territoire national.

    Article 4.- Le Tribunal est composé :


    · Au siège : d'un président d'un ou de plusieurs vice-présidents ; d'un ou de plusieurs Conseillers Techniques ; d'un ou de plusieurs Juges d'instruction.


    · Au parquet : d'un procureur Général ; d'un ou de plusieurs Avocats Généraux ; d'un ou de plusieurs Substituts Généraux.


    · Au greffe : D'un Greffier en chef ; D'un ou de plusieurs Chefs de section ; D'un ou de plusieurs Greffiers et Greffiers d'instruction.

    Article 5.- Les Magistrats et Greffiers affectés dans cette juridiction ainsi que les Officiers de police judiciaire visés à l'article 7 de la présente loi demeurent soumis aux lois et règlements qui régissent leurs professions.

    CHAPITRE 2 : DE LA PROCEDURE

    Article 6.- Sous réserve de dispositions ci-dessous, lesrègles de procédure sont celles prévues par le Code de Procédure Pénale.

    Article 7.- (1) Toute plainte, toute dénonciation ou toute requête relative à une des infractions visées à l'article 2, doit faire l'objet d'une enquête judiciaire ordonnée par le Procureur Général près le Tribunal.

    (2) Il exerce les attributions du procureur de la République lors de l'enquête préliminaire ou de l'information judiciaire.

    (3) Un corps spécialisé d'Officiers de Police judiciaire placé sous son contrôle est chargé de diligenter les enquêtes en cette matière et d'exécuter les commissions rogatoires.
    (4) L'enquête préliminaire doit être clôturée dans un délai de trente (30) jours renouvelable deux fois. La durée de la garde à vue est celle prévue par le Code de Procédure Pénale.
    (5) Dès la clôture de l'enquête préliminaire, le dossier est transmis au Procureur Général.
    (6) Celui-ci peut : soit classer la procédure sans suite en l'état ; soit requérir l'ouverture d'une information judiciaire.

    Toutefois, lorsque le préjudice est inférieur à 50 000 000 de francs CFA, le Procureur Général près le Tribunal transmet la procédure au Procureur Général compétent.

    Article 8.- (1) Toute juridiction saisie des faits relevant de la compétence du Tribunal doit d'office, se déclarer incompétente. (2) Le procureur Général peut également revendiquer une telle procédure en saisissant son homologue près de la Cour d'Appel de la juridiction évoquée à l'alinéa précédent.

    Article 9.- (1) Dés réception du réquisitoire introductif d'instance, le Président du Tribunal désigne le juge chargé de l'instruction de l'affaire.

    (2) les demandes de mise en liberté provisoire déposées devant le Juge d'instruction sont communiquées sans délai au Ministère Public et traitées dans les 48 heures.
    (3) L'information judiciaire est clôturée cent quatre vingt (180) jours après le réquisitoire introductif d'instance, soit par une ordonnance de non lieu, soit par une ordonnance de renvoi. (4) L'exception d'incompétence soulevée devant le juge d'instruction est déférée au Tribunal en cas de clôture de l'information par une ordonnance de renvoi.

    Article 10.- (1) Le Président du Tribunal fixe, après concertation avec le Procureur Général, l date de l'audience qui doit être prévue trente (30) jours au plus tard après l'ordonnance de renvoi.
    (2) Le Tribunal statue en formation collégiale surles affaires qui lui sont soumises.
    (3) Il fixe le nombre de témoins à citer pour chaque partie au procès. (4) Les exceptions de procédure, y compris celle relative à la compétence, sont jointes au fond.
    (5) Cette juridiction dispose d'un délai de six (06) mois pour rendre sa décision. Ce délai peut être prorogé de trois (03) mois par ordonnance du Président du Tribunal saisi.

    Article 11.- (1) Le Tribunal statue en premier et dernier ressort. Ses décisions peuvent exclusivement faire l'objet d'un pourvoi. (2) Le pourvoi du Ministère Public porte surles faits et les points de droit. (3) Le pourvoi des autres parties ne porte que surles points de droit. (4) En cas de cassation, la Cour Suprême évoque et statue.

    Article 12- (1) Le pourvoi est formé dans les 48 heures du prononcé de la décision et de délai de son instruction est de soixante (60) jours. (2) En cas de décision de défaut, le délai d'instruction est de soixante (60) jours à compter de sa notification à la partie défaillante.

    Article 13.- (1) L'examen du pourvoi par la Cour Suprême est dévolu à une section spécialisée, désignée par le Premier Président et comportant des Magistrats des trois chambres judiciaires, administrative et des comptes à raison de deux (02) magistrats par chambre.
    (2) Cette section est présidée par le Premier Président ou par un Magistrat de siège de la Cour Suprême, désigné par lui à cet effet. (3) Cette section dispose d'un délai maximum de six (06) mois pour vider sa saisine.

    CHAPITRE 3 : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

    Article 14.- Les procès-verbaux d'enquête préliminaire se rapportant aux faits visés à l'article 2 ci-dessus doivent être transmis pour compétence au Procureur Général près le Tribunal dès l'entrée en fonctionnement de celui-ci.

    Article 15.- (1) Les juridictions saisies des procédures se rapportent aux faits visés à l'article 2 de la présente loi, soit à l'information judiciaire, soit en cours de jugement vident leur saisine. (2) Les procédures en cours devant lesdites juridictions doivent être réglées dans un délai de six (06) mois à compter de l'entrée en fonctionnement du Tribunal.

    Article 16.- Les décisions rendues par lesTribunaux de Grande Instance dans ce cas, ne peuvent faire que l'objet d'un pourvoi tel que prévu aux articles 11, 12 et 13 de la présente loi.

    Article 17.- Le non respect des délais de traitement prévus peut entraîner à l'égard du contrevenant l'ouverture de poursuites disciplinaires.

    Article 18.- (1) En cas de restitution du corps du délit, le Procureur Général près le Tribunal peut, sur autorisation écrite du Ministre chargé de la Justice, arrêter les poursuites engagées avant la saisine de la juridiction de jugement.
    Toutefois, si la restitution intervient après la saisine de la juridiction de jugement, les poursuites peuvent être arrêtées avant toute décision au fond et la juridiction saisie prononce les déchéances de l'article 30 du Code pénal avec mention au casier judiciaire.

    Article 19.- La présente loi sera enregistrée, publiée suivant la procédure d'urgence, puis insérée au Journal Officiel en français et en anglais. YAOUNDE, LE 14 DECEMBRE 2011

    LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE (é) Paul BIYA

    TABLE DES MATIERES

    SOMMAIRE ................................................................................................................................... ii

    DEDICACE ........................................................................................................................................................... iii

    REMERCIEMENTS ............................................................................................................................................. iv

    SIGLES ET ABREVIATIONS ................................................................................................................................ v

    RESUME ............................................................................................................................................................. vii

    ABSTRACT ......................................................................................................................................................... viii

    INTRODUCTION GENERALE 1

    Ière PARTIE : 8

    PRESENTATION ET ANALYSE DE LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 8

    CHAPITRE I : 10

    TRAITEMENT PENAL DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 10

    Section I : LE CADRE LEGAL 11

    Paragraphe 1 : LES TEXTES NATIONAUX EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE 11

    A- Les textes législatifs 12

    1°) Le Code Pénal Camerounais 12

    2°) La Loi N°2003/008 du 10 Juillet 2003 portant prévention et répression des infractions contenues dans les Actes Uniformes OHADA 13

    3°) Les articles L107 à L114 du Livre de Procédures Fiscales : 15

    4°) La Loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 relative à la déclaration des biens et avoirs 16

    5°) La loi N°2011/028 du 14 Décembre 2011 portant création d'un tribunal criminel spécial 18

    B/- Les textes réglementaires 20

    Paragraphe 2 : LES TEXTES INTERNATIONAUX 21

    A/ Les textes régionaux 21

    1°) Les textes de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC) 22

    2°) Les textes de l'Union Africaine (UA) 23

    B/ Les textes internationaux applicables au Cameroun 24

    1°) La Convention des Nations Unies contre la Corruption 24

    2°) Les recommandations du Groupe d'Action Financière Internationale 25

    3°) La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée 26

    Section 2 : Les institutions de lutte contre la criminalité financière 28

    Paragraphe 1 : LES ORGANES JUDICIAIRES 29

    A- Le rôle du Ministère Public et de la Police judiciaire 29

    1°) L'action du Ministère public 29

    2°) L'action de la Police judiciaire exercée sous le contrôle du Ministère public 31

    B- Le rôle des magistrats du siège 32

    1°) Le rôle du Juge d'instruction dans la lutte contre la criminalité financière 32

    2°) Le rôle du juge de jugement 33

    C- La Chambre des Comptes de la Cour Suprême 34

    Paragraphe II : LA PLURALITE D'ORGANES EXTRAJUDICIAIRES OEUVRANT EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE 36

    A- Les organes étatiques ou gouvernementaux de lutte contre la criminalité financière 37

    1°) Le Contrôle Supérieur de l'Etat 37

    2°) Le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière 38

    3°) Les Programmes ministériels de lutte contre les infractions financières 39

    B- Les organes indépendants de lutte contre la criminalité financière 40

    1°) La Commission Nationale Anti Corruption 40

    a) Organisation de la CONAC 41

    b) Fonctionnement de la CONAC 42

    c) Evaluation de l'action de la CONAC 44

    2°) L'Agence Nationale des Investigations Financières (ANIF) 45

    a) Organisation 46

    b) Fonctionnement 46

    Chapitre II : 48

    ANALYSE DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 48

    SECTION I : LA PARTICULARITE DES INFRACTIONS FINANCIERES AU CAMEROUN 49

    PARAGRAPHE 1 : LA CORRUPTION ET LES INFRACTIONS APPARENTEES 50

    A- La corruption et les infractions assimilées 50

    10) La corruption 50

    a-) Un corrupteur 51

    b-) Un corrompu 51

    c-) L'offre d'un avantage indu 53

    d-) La recherche de l'exécution d'une prestation 53

    2°) Les infractions assimilées à la corruption 55

    a-) Les actes de fraude 55

    b-) Les actes de coercition 56

    c-) Les actes de collusion 56

    B- Les infractions apparentées a la corruption 57

    1°) Le trafic d'influence 57

    2°) L'ingérence 58

    3°) Les pratiques de concussion 59

    PARAGRAPHE 2 : LES AUTRES INFRACTIONS FINANCIERES 60

    A- Les infractions faisant l'objet de dispositions générales 60

    1°) Les infractions spécifiques au droit des affaires 60

    a-) Les infractions commises exclusivement par les commerçants ou dirigeants sociaux 61

    b-) Les infractions commises par les experts intervenants dans la vie des affaires 61

    c-) Les infractions d'affaires commises par d'autres auteurs 62

    2°) les infractions financières de droit commun 63

    B- LES INFRACTIONS SPECIFIQUES 64

    1°) Le blanchiment d'argent 64

    2°) Les fraudes à la législation fiscale 65

    SECTION II : LES CONSEQUENCES DE LA CRIMINALITE FINANCIERE SUR LA SOCIETE CAMEROUNAISE 66

    PARAGRAPHE 1 : LES CONSEQUENCES SOCIO ECONOMIQUES DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 67

    A- Les méfaits sociaux de la criminalité financière 67

    B- Les conséquences économiques de la criminalité financière 68

    PARAGRAPHE II : LES CONSEQUENCES POLITICO JURIDIQUES DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 70

    A- La fragilisation du climat politique 70

    B- La crise de confiance en l'ordre juridique 71

    CONCLUSION A LA PREMIERE PARTIE 73

    IIème PARTIE : 75

    DE L'AMELIORATION DE LA LUTTECONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 75

    CHAPITRE I : 77

    RESULTATS ET DIFFICULTES RENCONTREES PAR LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE 77

    FINANCIERE AU CAMEROUN 77

    Section 1 : Analyse des résultats obtenus par le système camerounais de lutte contre la criminalité financière 78

    Paragraphe I : LES RESULTATS ENCOURAGEANTS DU SYSTEME CAMEROUNAIS DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE 78

    A- Les effets de la prévention des infractions financières 78

    1°) La mise en place d'un dispositif préventif apparemment efficace 79

    2°) La volonté de réduction du nombre d'infractions financières : 79

    B- La mise en oeuvre effective de la répression 80

    Paragraphe II : L'ADAPTATION AUX IMPERATIFS INTERNATIONAUX 81

    A- L'amélioration de la position camerounaise sur la scène internationale 82

    B- L'encouragement à l'investissement au Cameroun 82

    Section 2 : La complexité de la lutte contre la criminalité financière au Cameroun : 84

    Paragraphe I : LES RESISTANCES SOCIALES 84

    A- La ténacité du comportement délictuel 84

    B- Les lenteurs dans les réactions des autorités 85

    Paragraphe 2 : LES AUTRES DIFFICULTES RENCONTREES PAR LE SYSTEME DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 87

    A- Les difficultés d'ordre personnel 87

    1°) Difficultés liées à la profession exercée par certains acteurs associés à la lutte contre la criminalité financière 87

    2°) Difficultés liées au statut de l'auteur de l'infraction 88

    B- Les difficultés d'ordre institutionnel 89

    1°) L'insuffisance de formation et d'infrastructures 89

    2°) Les autres difficultés 91

    CHAPITRE II : 94

    VERS UN MEILLEUR TRAITEMENT DE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUN 94

    Section 1 : L'Action juridictionnelle 95

    Paragraphe I : LE RENFORCEMENT DES MOYENS D'ACTION DES ORGANES JURIDICTIONNELS CAMEROUNAIS 95

    A- Le renforcement des pouvoirs du Ministère public 96

    B- L'admission d'une responsabilité pénale des personnes morales 98

    Paragraphe II : L'HARMONISATION JUDICIAIRE INTERNATIONALE EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE 102

    1°) La justification de la nécessité d'une juridiction financière internationale 103

    2°) Les infractions financières pouvant être jugées sur la scène internationale 104

    Section 2 : L'Action institutionnelle 106

    Paragraphe I : LES ACTIONS NATIONALES DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE 106

    A- Le renforcement des institutions de lutte contre la criminalité financière 106

    1°) L'application effective de la loi N°2006/003 du 26 Avril 2006 relative à la déclaration des biens et avoirs 106

    2°) L'amélioration des organes de lutte contre la criminalité financière 107

    B- La définition d'actions non institutionnelles de lutte contre la criminalité financière 109

    1°) L'association de la société civile à la lutte contre la criminalité financière 109

    2°) La définition d'un programme de lutte contre la criminalité financière tenant compte des réalités socioéconomiques camerounaises 110

    Paragraphe 2 : L'IMPLICATION ACTIVE DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE 113

    A- La position du principe d'extraterritorialité de la loi pénale pour les atteintes les plus graves au Droit international en ce qui concerne les infractions financières 113

    B- L'adoption d'actes plus pratiques 115

    CONCLUSION A LA DEUXIEME PARTIE 119

    CONCLUSION GENERALE 120

    BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE 123

    ANNEXES 128

    TABLE DES MATIERES 154

    * 1 Fondée en 1985 par Kenneth Lay, la société Enron, devenue en terme de capitalisation boursière la 7e entreprise américaine, était encensée par la presse et les analystes financiers comme étant un nouveau modèle d'entreprise. Cependant, en fait de modèle économique, l'entreprise gonflait artificiellement ses profits tout en masquant ses déficits en utilisant une multitude de sociétés écrans et en falsifiant ses comptes, afin d'augmenter la valeur boursière de l'entreprise. Enron a aussi pleinement profité de la dérèglementation de l'énergie en Californie, exploitant à fond chacune des failles, versant des pots de vin aux membres du gouvernement pour limiter leur droit de regard et supprimer les règlements, et n'hésitant pas à recourir aux arrêts intempestifs pour faire grimper le prix du kilowatt/heure. L'éclatement de la bulle a précipité non seulement l'entreprise Enron mais aussi le cabinet d'audit Arthur Andersen, complice, qui a détruit plus d'une tonne de documents compromettants. 200 000 personnes perdirent leur emploi et plusieurs centaines de millions de dollars constituant l'essentiel de fonds de pension, dont la retraite de milliers d'américains, partirent en fumée.

    * 2 Vocabulaire Juridique, Association Henri Capitant, 8e édition, Juin 2009, p.673

    * 3 GIUDICELLI-DELAGE (G), Droit pénal des affaires, Dalloz 1989, p. 1-2

    * 4 G. GIGUDICELLI DELAGE, op. cit. p. 5

    * 5 Vocabulaire juridique, p. 811

    * 6 Ibid., p. 717

    * 7 XIIIe Congrès de l'Association Internationale de Droit Pénal, 1984

    * 8 DE MAILLARD (J), Criminalité financière, www.wikipedia.com

    * 9 Op. cit. 2

    * 10MERLE (R) et VITU : Traité de droit criminel Tome 1 : problèmes généraux de la science criminelle, Droit Pénal Général ; CUJAS, 6ème Edition, 1988

    * 11PRADEL (J) : Droit pénal Général ; CUJAS, 2001/2002

    * 12BECCARIA (C) : Des délits et des peines ; GF Flammarion, 1991

    * 13Syndicat de la Magistrature ATTAC, En finir avec la criminalité économique et financière, Ed. Mille et Une Nuits, Novembre 2002

    * 14NCHIMI MEBU (J. C.), La problématique répression de la corruption en droit camerounais, RASJ, Vol. 4, N°1, 2007, pp. 79-93

    * 15MFOMO (S.-P.) : Lutte contre la corruption au Cameroun (1990-2006) : contribution à l'étude de l'élaboration et de la mise en oeuvre d'une politique publique ; Thèse de doctorat en Sciences Politiques, Université de Yaoundé II, 2005-2006

    * 16Pour exemple, l'actualité sur les arrestations de personnes suspectées d'avoir commis des crimes financiers a pour effet de booster les ventes de journaux, à cause de l'intérêt marqué par les camerounais pour lesdits faits

    * 17 Cf. chapitre 1, section 1 pour les infractions financières présentes dans le Code pénal.

    * 18 Voir classification des infractions de l'article 21 du Code pénal

    * 19 Article 1er Loi N°2003/008 du 10 Juillet 2003

    * 20 Cf. Article 21 Code pénal camerounais pour la classification des infractions en crimes, délits et contraventions

    * 21 Voir Section I, paragraphe 2 - A

    * 22 Cf. p. 24

    * 23 L'article 62f du code de Procédure pénale prévoit notamment que l'action publique s'éteint par « la transaction, lorsque la loi le prévoit expressément »

    * 24 Mesure prévue par l'article 359 du Code de Procédure pénale, permettant au prévenu de bénéficier, en cas de condamnation, des circonstances atténuantes prévues par les dispositions des articles 90 et 91 du Code pénal.

    * 25 GIUDICELLI DELAGE (G), Droit pénal des affaires, Dalloz 1989

    * 26 Le président et deux membres sont nommés par le Président de la République, deux viennent du parlement dont un de l'Assemblée nationale et un du Sénat, un inspecteur d'Etat du Contrôle supérieur de l'Etat, deux membres de la Cour suprême dont un membre de la Chambre des comptes, et un représentant de la Chambre des notaires.

    * 27 Cette section doit cependant comporter des Magistrats des trois chambres judiciaires, administrative et des comptes à raison de deux (02) magistrats par chambre, conformément à l'article 13 alinéa 1 de la loi.

    * 28 Cf. quotidien Le Messager, numéro du 5 Décembre 2011

    * 29 La circulaire a pour objet la prise de dispositions permettant une bonne gestion du budget de l'Etat, afin d'éviter les pertes et d'orienter les moyens de l'Etat vers la satisfaction des besoins des populations.

    * 30 L'on sait que la lutte contre le terrorisme est un impératif mondial depuis les attentats perpétrés sur le sol américain e 11 Septembre 2001 par des membres du groupe terroriste AL QUAIDA. Aussi est-il impératif pour les Etats de pouvoir lutter contre les moyens qui peuvent servir au financement de cette activité.

    * 31Le GAFI est un organisme intergouvernemental qui établit des normes, développe et assure la promotion de

    Politiques de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Il se compose actuellement de 33 membres : 31 pays et gouvernements et de deux organisations internationales ; de plus de 20 observateurs : 5 organismes régionaux de type GAFI et plus de 15 autres organisations ou organismes internationaux.

    * 32Reconnues par le Fonds Monétaire international et la Banque mondiale, les Quarante Recommandations et les Huit Recommandations Spéciales du GAFI sont considérées comme étant les normes internationales en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

    * 33 Il s'agit entre autres des infractions de participation au groupe criminel organisé, blanchiment des produits du crime, corruption d'agents publics nationaux et internationaux, entrave au bon fonctionnement de la justice, ...

    * 34 Définies par l'article 2 de la Convention comme étant des actes constituant des infractions « passibles d'une peine privative de liberté dont le maximum ne doit pas être inférieur à quatre ans ou d'une peine plus lourde »

    * 35 Vocabulaire juridique, p.590

    * 36 Prévues à l'article 62 alinéa 1 -h du Code de Procédure pénale : la mort du suspect, inculpé, prévenu ou accusé, la prescription, l'amnistie, l'abrogation de la loi, la chose jugée, la transaction lorsque le loi le prévoit expressément, le retrait de la plainte, lorsqu'elle est la condition de la mise en oeuvre de l'action publique, le désistement de la partie civile en matière de contravention et de délit, lorsqu'elle a mis l'action publique en mouvement.

    * 37 Article 62 alinéa f du Code de Procédure pénale et article 18 e de la loi N°2011/028 du 14 Décembre 2011

    * 38 Par exemple dans le cas de l'émission de chèque sans provision

    * 39 Cf. article 78 alinéa 1 du Code de Procédure pénale

    * 40 Cf. Décret N°98/273 du 22 Octobre 1998 réorganisant la Présidence de la République

    * 41 Cf. article 2 alinéa 1er du décret

    * 42 Article 3 alinéa 1 du décret, tandis que les articles 4 et suivants donnent la composition totale du Conseil

    * 43 Il faut toutefois noter que le Conseil ne peut statuer que si deux tiers des membres sont présents.

    * 44 Lutte contre la corruption à travers l'école

    * 45 Cf. Etame KOUOH, in Le Messager, N° du 29 Juillet 2010

    * 46 DELMAS MARTY (M), Criminalité financière et atteintes aux droits de l'Homme, Paris, 1997

    * 47 Vision que le Cameroun s'est défini pour devenir, à l'horizon de l'année 2035, un pays émergent, plus démocratique et uni.

    * 48 ATANGA (Y), « Lutte contre la corruption - la nouvelle tactique de la CONAC », in Cameroon Tribune N°9826/6027 - 37e année du Mercredi 13 Avril 2011, p.5

    * 49 N'étant pas des instances juridictionnelles, elles ne peuvent prendre que des sanctions administratives contre ceux qui se sont rendus coupables d'actes de corruption.

    * 50 Cf. Rapport de la CONAC sur l'état de la lutte contre la corruption au Cameroun, pour les années 2008, 2009 et 2010

    * 51 Idem

    * 52 Idem

    * 53 La CONAC devant en principe délivrer un rapport chaque année sur l'état de la corruption au Cameroun.

    * 54 Article 3 du décret N°2005/187 du 31 Mai 2005 portant organisation et fonctionnement de l'Agence Nationale d'Investigation Financière.

    * 55 Les chargés d'études représentent tous diverses autorités intervenant dans la lutte contre la criminalité financière : un fonctionnaire du Ministère en charge des finances expert en questions douanières ou en écriture bancaire un officier de police judiciaire spécialisé dans les questions financières et un magistrat doté d'une expérience dans les questions financières.

    * 56 Est considérée comme personne assujettie, selon l'article 13 du Décret, « toute personne physique ou morale qui, dans le cadre de sa profession, réalise, contrôle ou conseille des opérations entrainant des dépôts, des échanges, des placements, des conversions ou tous autres mouvements de capitaux ».

    * 57 GASSIN R, in Criminologie, 4e édition ,1998

    * 58 XIIIe Congrès de l'association internationale de Droit Pénal 1984

    * 59 Cité par André TCHOUPIE, in l'institutionnalisation de la lutte contre la corruption et la criminalité financière au Cameroun, WWW.polis-sciencespobordeaux.fr/vol 13, N01 ; polis /RCSP/CPRS, vol13, N01-2, 2006, pp57-58

    * 60 Vocabulaire juridique p.246

    * 61 La Convention de l'OCDE sur la corruption d'agents publics étrangers n'a pour le moment été ratifiée que par 38 pays dont un seul pays africain, qui est l'Afrique du Sud

    * 62 La corruption d'employé étant expressément prévue à l'article 312 du Code pénal.

    * 63 J. C. NCHIMI MEBU, «La problématique répression de la corruption en droit camerounais », in Revue africaine des sciences juridiques, Vol 4, N°1, 2007, p. 81

    * 64 Celui-ci étant puni parce qu'il a agit en l'absence d'autorisation de son employeur

    * 65 Op. cit. p. 83

    * 66Crim., 14 Mai 1986, Bull. N°163, RSC 1987, 687, obs. DELMAS - SAINT HILAIRE, 26 Nov. 1991, Dr. pénal 1992 ; Comm. 19 Mars 1991, Dr. Pénal 1991 ; Comm. 308 ; Dr. Pénal 1994, Comm. 4,cité par NCHIMI (J. C.), op. cit., p. 85

    * 67Crim. 6 Fév. 1969, II.16004, note CHAMBON, cité par NCHIMI (J. C.), op. cit., p. 85

    * 68 NCHIMI MEBU, Op. Cit., p.85

    * 69Crim. 22 Sept. 1993, Dr. Pénal 1994, Comm. 3 ; Bull. N°27, cité par VERON (M), Droit pénal spécial, 7e édition, Armand Colin, 1999, P.290

    * 70 Vocabulaire juridique p.80

    * 71 Vocabulaire juridique p.430

    * 72 Ibid.

    * 73 Ibid.

    * 74 Article 314 du Code pénal

    * 75 Article 252 du Code pénal

    * 76 Article 211 du Code pénal

    * 77 Vocabulaire juridique p.167

    * 78 Article 160

    * 79 NCHIMI MEBU (J. C.), « la problématique répression de la corruption en droit camerounais », RASJ, Vol. 4, N°1, 2007, p.81

    * 80 Cf. Supra, N°1

    * 81 Vocabulaire juridique p.491

    * 82 Ibid.

    * 83 Vocabulaire juridique p.201

    * 84 Vocabulaire juridique p.7

    * 85Mandataires de justice chargé de mettre en oeuvre la procédure, de représenter la masse des créanciers et de remplacer ou d'assister le débiteur selon que ce dernier est ou non dessaisi

    * 86 Article 35 loi N°2003/008 du 10 Juillet 2003

    * 87 Article 31-2 même loi

    * 88 Vocabulaire juridique p.305

    * 89 Articles 184 et 225 du Code pénal camerounais

    * 90 Le fisc est réputé toujours solvable

    * 91 ALIME MAHIANE Claire, La criminalité transfrontalière en Afrique centrale, mémoire en vue de l'obtention d'un DEA en Droit privé option Sciences criminelles

    * 92 J. DE MAILLARD, Dans l'archipel planétaire de la criminalité financière, le marché de la loi rend les criminels prospères, in Le Monde diplomatique, Avril 2000

    * 93 CHABAL et DALOZ, « l'Afrique est partie : du désordre comme instrument politique » ; Economica, Paris, 1999

    * 94 B. GURTNER, « paradis fiscaux : les pays en développement perdent des milliards, Vision du Sud », in Guide CHAMBOST des paradis fiscaux, p. 29

    * 95 OXFAM, « Tax Havens, Releasing the Hidden Billions for Poverty Eradication», Oxfam Policy Paper N°6, Oxfard UK, 2000

    * 96 Cf. Guide CHAMBOST des paradis fiscaux, 8e édition, FAVRE, p.119

    * 97 GERDDES - Cameroun, Friedrich Ebert Stiftung : De la corruption au Cameroun, sous la direction de Pierre TITI NWELL, Ed. SAAGRAPH, Yaoundé, 1999, 269 pages

    * 98 J. De MAILLARD, « criminalité financière », www.wikipedia.fr

    * 99 Nul ne peut s'enrichir au détriment d'autrui

    * 100 Organisation Non Gouvernementale, qui s'occupe de la lutte contre certaines infractions financières, principalement la corruption

    * 101 Trad. : Les vices d'autrefois sont les moeurs d'aujourd'hui, célèbre maxime de Sénèque, (v. 55 av. J.C.- v

    39 apr. J.C.), écrivain latin, auteur de Controverses

    * 102 Cf. p.12

    * 103 In Le Monde diplomatique, Avril 2000, « Dans l'archipel planétaire de la criminalité financière : le marché de la Loi rend les criminels prospères »

    * 104 Syndicat de la Magistrature ATTAC, En finir avec la criminalité économique et financière, Ed. Mille et Une nuits, Nov. 2002, p.119

    * 105 En vertu des obligations liées au secret professionnel, les membres des professions juridiques indépendantes ont le devoir de ne rien dévoiler sur les relations avec leur client.

    * 106 Cf. Convention de Vienne de 1966 sur les relations diplomatiques et consulaires

    * 107 Organisation de Coopération et de Développement Economique

    * 108 Dans le cadre de la criminalité financière, la partie civile est constituée ici lorsqu'il s'agit des infractions financières touchant aux biens privés, telles que les infractions d'affaires, le vol ou l'escroquerie.

    * 109 Comme l'opération Epervier, qui abouti à l'arrestation de plusieurs anciens membres du Gouvernement et Directeurs Généraux des sociétés publiques et parapubliques particulièrement célèbre. Cette opération est suivie avec une grande attention par les populations camerounaises, qui y voient le début de l'arrêt de l'impunité des gestionnaires de la chose publique.

    * 110modifiant le Chapitre II-1 du Livre Ier du Code pénal luxembourgeois, particulièrement les articles 34 à 40 dudit Code

    * 111 A commis (le crime) celui à qui il profite

    * 112 Cf. www.legrandsoir.info, « la délinquance économique et financière organisée sort indemne du projet de loi gouvernemental »

    * 113 Cf. Syndicat de la magistrature ATTAC, « En finir avec la criminalité économique et financière », Ed. Mille et Une nuits, Nov. 2002, 142 pp.

    * 114 A cause de la pratique prépondérante de l'informel, aussi bien dans les transactions financières que dans d'autres domaines. Un exemple patent en est la pratique des « tontines », sortes de caisses d'investissement et de sauvegarde des fonds dont aucun organisme ne peut à proprement parler suivre les mouvements financiers.

    * 115 Cf. Economic and Financial Crimes Commission (Establishment) Act 2002, tiré de Laws of the Federation of Nigeria

    * 116 Syndicat de la Magistrature ATTAC, op. cit., p.121

    * 117 Syndicat de la Magistrature ATTAC, op. cit., p.121- 122

    * 118DE MAILLARD (J) : « Dans l'archipel planétaire de la criminalité financière : le marché de la Loi rend les délinquants prospères » ; in Le Monde diplomatique, Avril 2000

    * 119DE MAILLARD (J) : « Dans l'archipel planétaire de la criminalité financière : le marché de la Loi rend les délinquants prospères » ; in Le Monde diplomatique, Avril 2000






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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand