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Analyse qualitative de l'abandon de taekwondo de compétition chez les jeunes de haut niveau en tunisie

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par Jihed Abdouli
institut supérieure de et de l'éducation physique de gafsa - Master 2 2016
  

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Chapitre 1 : L'abandon sportif :

Tout d'abord, il apparaît nécessaire de définir brièvement ce que sont les concepts clés qui concernent notre étude selon lesquels nous allons orienter notre choix de perspectives à développer dans le présent mémoire.

« Abandon sportif » : Le Petit Robert définit l'abandon du sport comme étant l'action de renoncer à poursuivre une épreuve sportive, une compétition. Il nous semble clair donc, de considérer l'abandon sportif comme l'arrêt d'une activité sportive. L'abandon peut se manifester de deux façons. Il peut impliquer soit une cessation complète de toute pratique sportive, soit le remplacement de l'activité sportive par une autre activité, qu'elle soit de nature sportive ou non.

« La motivation » occupant une place primordiale dans l'explication de l'abandon sportif. Nous abordons dans le présent mémoire une définition qui lui est associée à savoir : « Le concept de motivation représente le construit hypothétique utilisé afin de décrire les forces internes et/ou externes produisant le déclenchement, la direction, l'intensité et la persistance du comportement. » (Vallerand & Thill, 1993, p.18). Sur la base de ces caractéristiques motivationnelles comptons-nous fonder les orientations à emprunter dans notre travail.

I. Trois niveaux d'analyse de l'abandon sportif :

Certains sportifs, se trouvent en face de difficultés dans leurs tentatives d'accomplir une tâche, restent pleinement investis dans celle-ci en développant leurs efforts tandis que d'autres en revanche, l'évitent ou fournissent peu d'efforts. Alors les premiers continuent à pratiquer le sport tandis que les autres au contraire l'abandonnent très tôt. Afin de comprendre ce dernier comportement (l'abandon sportif), plusieurs chercheurs ont cherché à déterminer certains facteurs et processus clés de son déclenchement chez les sportifs (e.g., Sarrazin, Famose & Cury, 1995).

Il n'existe pas une raison unique à l'abandon, mais une variété de processus et de causes personnels, situationnels et culturels. Ces trois perspectives suivantes ont fait appel à trois modélisations théoriques différentes, que nous allons développer dans le présent mémoire, pour ensuite mettre en relation ces perspectives avec les résultats obtenus au cours de cette étude.

1. L'abandon sportif dans une « micro-perspective » : le Modèle Hiérarchique de la Motivation Intrinsèque et Extrinsèque (MHMIE) comme modèle intégrateur : 

Dans le domaine scolaire ainsi que dans d'autres domaines, Vallerand et ses collaborateurs ont proposé d'affiner la compréhension des motivations et du processus motivationnel clés de l'abandon en se basant sur le Modèle Hiérarchique de la Motivation Intrinsèque et Extrinsèque MHMIE : Vallerand, 1997 ; 2001 ; 2007b.

Vallerand (1997) s'est principalement basé sur trois théories principales ; la théorie da la motivation à l'accomplissement, la théorie de l'autodétermination et troisièmement la théorie du comportement planifié. Différents types de motivation présentés précédemment. En effet, Le MHMIE suppose différents postulats concernant la motivation. Premièrement, l'analyse de la motivation renvoie à trois formes (l'amotivation, la motivation extrinsèque et la motivation intrinsèque). Deuxièmement, ces trois types (formes) de motivations existent chez l'individu à trois niveaux de généralité (situationnel, contextuel et globale). Troisièmement, il y a deux types de déterminant de la motivation : l'un lié à l'interrelation des niveaux motivationnels et l'autre lié à l'impact des facteurs sociaux. Quatrièmement, la motivation produit des conséquences importantes. Un dernier postulat important du modèle est que l'impact de l'environnement se produit par le biais d'une chaîne causale de processus psychologiques.

1.1 Les trois types de construits motivationnels inclus dans le MHMIE :

Le MHMIE indique dans son premier postulat qu'il existe trois types différents de motivation qui peuvent être rangés sur un continuum selon leur degré d'autodétermination. Le premier type de motivation est l'Amotivation qui représente l'absence relative d'autodétermination, ce concept motivationnel a été retenu par Vallerand (e.g., 1997, 2001, 2007b) dans son modèle théorique afin de mieux expliquer la nature des comportements humains. Ensuite, le deuxième type de motivation est la motivation extrinsèque représentant le niveau intermédiaire d'autodétermination entre l'amotivation et la motivation intrinsèque, quatre formes de motivation extrinsèque ont été pris en compte dans le modèle de Vallerand (1997, 2001, 2007b). Finalement, un troisième type de motivation a été retenu par Vallerand dans son modèle (e.g.,Vallerand, 1997, 2001, 2007b), à savoir la motivation intrinsèque qui représente le niveau le plus élevé d'autodétermination. A l'instar de White (1959) et de Deci (1975), Vallerand et ses collaborateurs (Brunel, Vallerand & Chantal, 2004) ont enrichi la conception de la motivation intrinsèque par la prise en compte de trois formes : la motivation intrinsèque à la connaissance (qui peut être définie comme l'engagement dans une activité pour les effets positifs qu'une personne en retire pendant qu'elle apprend, explore et essaye de nouvelles choses), la motivation intrinsèque à l'accomplissement (qui est définie par le fait de pratiquer un sport pour le plaisir d'accomplir, de créer quelque chose ou de se surpasser soi-même) et la motivation intrinsèque à la stimulation (qui correspond au fait de participer à une activité pour expérimenter des sensations comme le plaisir et l'excitation). Cette position tripartie de la motivation intrinsèque permet une meilleure prédiction de l'engagement dans une activité particulière liée aux trois types de motivation intrinsèque. Certaines recherches ont apporté un soutien empirique pour cette taxonomie dans différents domaines tels que ceux de l'éducation (e.g.,Fairchild, Horst, Finney & Baron, 2005).

1.2 Les niveaux hiérarchiques de généralité : situationnel, contextuel et global :

Selon Vallerand (1997, 2001, 2007b), la motivation intrinsèque, la motivation extrinsèque et l'amotivation existent à trois niveaux bien distincts de généralité. Ces derniers sont le niveau situationnel, le niveau contextuel et le niveau global. Cette perspective tridimensionnelle a pour but d'appréhender le comportement humain de façon très large. Le plus bas niveau postulé de la hiérarchie est le niveau situationnel. La motivation situationnelle concerne la motivation de l'individu lorsqu'il effectue une activité spécifique à un moment précis. Cette motivation situationnelle est considérée non pas comme une caractéristique individuelle stable, mais comme un état motivationnel, c'est « l'ici et maintenant de la motivation » (Vallerand & Grouzet, 2001). Dans une étude réalisée par Deci (1971), les résultats montrent l'impact négatif des récompenses sur la motivation intrinsèque situationnelle. Quant à Vallerand et Grouzet (2001), ils considèrent que la motivation situationnelle est primordiale dans la hiérarchie motivationnelle puisqu'elle affecte la motivation des personnes au moment même où elles en font l'expérience. Le niveau situationnel est alors essentiel au moment de la pratique d'une activité sportive. Prenons l'exemple d'une étude menée par Blanchard et Vallerand (1996a) qui ont montré que les émotions positives ressenties par les athlètes ainsi que la concentration étaient positivement corrélées avec la motivation intrinsèque et la motivation à la régulation identifiée. Mais au contraire, ces conséquences étaient négativement liées à l'amotivation. Le second niveau hiérarchique est le niveau contextuel. La motivation contextuelle est considérée comme étant plus stable que la motivation situationnelle et réfère à la tendance plus ou moins stable de l'individu à être motivé de manière intrinsèque, extrinsèque ou amotivé dans un contexte spécifique. Le niveau contextuel est alors essentiel pour comprendre l'engagement des personnes dans une activité sportive. Enfin, le niveau global représente le niveau hiérarchique le plus élevé où le niveau le plus stable de la motivation globale. La motivation globale réfère à une orientation motivationnelle globale ou (générale) poussant l'individu à interagir avec l'environnement selon un mode intrinsèque, extrinsèque ou amotivé selon une approche propre à la psychologie de la personnalité (McClelland, 1985), la motivation globale est perçue comme une différence interindividuelle, elle est d'ailleurs tout simplement comparable au construit de la motivation tel qu'il est défini dans cette perspective. Ainsi, cette motivation peut être apparentée à un trait de la personnalité (Vallerand, 1997). Dans une étude réalisée par Guay, Blais, Vallerand et Pelletier, (1999), les chercheurs ont démontré que les trois types de motivations intrinsèques et la régulation identifiée étaient positivement reliés à la satisfaction de vie, alors que la régulation externe et l'amotivation y étaient négativement associées. En résumé, les différents types de motivation intrinsèque et extrinsèque et l'amotivation sont nécessaires pour comprendre le comportement des sportifs. De plus, ces différents concepts ayant un aspect successif et hiérarchique.

1.3 Rôle de la séquence causale dans la détermination du comportement :

Le Modèle Hiérarchique de la Motivation Intrinsèque et Extrinsèque (Vallerand, 1997) postule que l'impact de l'environnement se produit par le biais d'une chaîne causale de processus psychologiques qui s'articulent de la façon suivante : Facteurs sociaux médiateurs psychologiques motivation autodéterminée conséquences motivationnelles. Ainsi que, cette chaîne causale est censée se produire aux trois niveaux de généralité. Plusieurs études ont rapporté un soutien pour une telle chaîne au niveau situationnel. Ainsi, dans une étude réalisée avec 358 étudiants universitaires effectuant une tâche ludique (i.e., NINA), Grouzet et al., (2004) ont appuyé la séquence causale en montrant que la perception par l'individu de sa réussite ou de son échec dans la tâche porte deux sens d'influence soit positive soit négative sur la motivation autodéterminée par l'intermédiaire des médiateurs psychologiques (i.e., besoins d'autonomie et de compétence). Finalement, lorsque la motivation dans la tâche est autodéterminée, les conséquences associées seront positives (e.g. concentration et intentions de poursuite dans l'activité). Dans une autre étude réalisée sur la séquence causale de Kowal et Fortier (2000), portée sur 104 nageurs canadiens lors d'une séance d'entraînement de natation. Les chercheurs ont démontré que l'influence des facteurs sociaux pendant l'entraînement (perceptions des climats motivationnels portés vers la maîtrise et vers la performance, ainsi que les perceptions d'auto-efficacité) sur la motivation situationnelle autodéterminée est médiatisée par les perceptions de compétence, d'autonomie et d'affiliation des nageurs. Ensuite, leur motivation situationnelle prédit fortement les indicateurs de l'état de flow ressenti pendant la séance d'entraînement. Dans le domaine sportif, peu de recherches ont testé cette séquence causale afin d'expliquer l'abandon sportif (e.g., Pelletier & al., 1988). Les résultats supportent globalement cette chaine causale et confirment le postulat théorique de Vallerand et Losier (1999). En effet, Pelletier et ses collaborateurs (1988) dans une étude réalisée sur 350 nageurs canadiens ayant indiqué que lorsque les entraîneurs avaient un style contrôlant et peu informationnel, les nageurs se percevaient de ce fait comme étant moins autonomes et moins compétents. Plus leurs perceptions d'autonomie et de compétence étaient négatives, plus leurs motivations se révélaient peu autodéterminé. En revanche, moins leurs motivations étaient autodéterminées, plus leurs intentions d'abandonner la natation augmentaient. Finalement, leurs intentions d'abandonner les amèneraient à un abandon réel l'année suivante. En guise de conclusion nous pouvons dire que lorsque la motivation est autodéterminée, il y a eu une hausse d'ajustement psychologique à la fin d'année, ce qui suggère fortement que le facteur global a déclenché une séquence causale ayant mené à des conséquences globales (ajustement psychologique) par le biais des sentiments d'autonomie et de motivation globaux.

2. L'abandon sportif dans une « meso-perspective » : l'influence des contraintes sociales et l'attrait pour des activités alternatives, dans le cadre de la théorie de l'échange social :

La pratique sportive se déroule dans un environnement social globaliste qui dépasse la simple relation entraîneur - entraîné. La famille, les coéquipiers de classe (entrainement) ou les amis intimes, les sollicitations extérieures comme celles de l'école et des loisirs sont autant de variables qui influencent le processus d'engagement ou désengagement. Les études descriptives sur les motifs d'abandon font souvent ressortir « l'attrait pour d'autres activités » comme une raison importante d'abandon, en particulier au moment de l'adolescence. Aussi, il semble nécessaire de s'intéresser à d'autres catégories de facteurs susceptibles d'expliquer le maintien ou l'abandon d'une activité sportive. La théorie de l'échange social (e.g., Homans, 1961), et en particulier la théorie de l'interdépendance (e.g., Kelley, 1983) et le modèle de l'investissement de Rusbult (e.g., 1980), semblent constituer un paradigme théorique particulièrement heuristique.

2. 1 Le concept d'engagement :

Les théoriciens du paradigme de l'échange social utilisent le concept « d'engagement » (commitment) pour décrire un ensemble de facteurs qui explicitent la persistance dans une action ou dans une relation. Il est notamment défini comme une intention formulée par les individus de rester au contact d'une activité ou d'une personne, et de se sentir psychologiquement « attaché » à elle (Rusbult, 1983). Dans le domaine sportif, Scanlan, Carpenter, Schmidt, et al. (1993) définissent l'engagement comme « le construit psychologique qui représente le désir et la volonté de continuer une activité sportive » (1993, p. 6). En résumé, l'engagement représente l'état psychologique d'attachement des individus à leur activité, ou la force motivationnelle qui les pousse à continuer. Ce construit doit être clairement distingué de ses antécédents et de ses conséquences. Les conséquences de l'engagement sont les comportements réellement manifestés, comme la persistance dans une relation, dans le travail ou l'abandon sportif. Trois catégories d'antécédents, que Kelley (1983) nomme les « conditions causales », peuvent être identifiées. La première représente le degré d'attrait pour l'activité ou la relation, en termes de satisfaction, de plaisir, d'amour, ou d'amitié. La seconde catégorie correspond au degré d'attractivité des activités alternatives, et la dernière correspond aux forces ou barrières qui retiennent l'individu dans l'activité ou à sa relation (i.e., les investissements personnels et les contraintes sociales).

2. 2 Les antécédents de l'engagement :

L'un des postulats fondamentaux développés par Thibaut & Kelley (1959) est de considérer l'individu comme un calculateur rationnel des plaisirs et des souffrances, qui cherche à gagner le maximum de profit avec un minimum de rendement autrement dit de maximiser les expériences positives et à minimiser les négatives. Dans cette perspective, les individus maintiennent une relation ou continuent une activité aussi longtemps que les résultats de la participation sont favorables. Le caractère favorable ou non de l'activité est déterminé par la balance entre les récompenses et les coûts. Récompenses et coûts sont des termes génériques utilisés pour faire référence à la variété des conséquences potentielles. Dans le domaine sportif, les récompenses peuvent représenter des conséquences tangibles comme l'argent, ou les trophées, mais le plus souvent, elles sont d'ordre psychologique, comme l'atteinte de buts désirés, les sentiments de compétence et de maîtrise, l'admiration et l'estime des autres (Smith, 1986). Les coûts englobent également un ensemble d'expériences, comme le temps et les efforts passés dans l'activité, les sentiments d'échec ou de désaccord avec les autres, ou le sentiment d'un manque d'autonomie. Dans la plupart des modèles, l'analyse coûts/bénéfices est exprimée par une variable « d'attractivité » comme la satisfaction (e.g.,Rusbult, 1980) ou le plaisir (e.g., Scanlan, Carpenter, Schmidt, et al., 1993), résumant l'expérience affective de l'individu pour une activité ou une relation. Les individus seraient satisfaits ou aimeraient leur relation ou activité, quand les bénéfices surpassent les coûts, et l'insatisfaction surviendrait quand les coûts sont supérieurs aux bénéfices. En retour, une satisfaction élevée, est présumée être reliée à un engagement important. Cependant, en accord avec Thibaut & Kelley (1959), la décision de rester dans une relation ou une activité n'est pas seulement basée sur le rapport entre les récompenses et les coûts. Elle dépendrait aussi de la disponibilité et de l'attrait pour des alternatives. Par conséquent, une personne peut choisir de rester dans une activité sportive même si les coûts sont supérieurs aux bénéfices, quand elle ne perçoit pas d'alternatives disponibles. A l'inverse, un sportif peut abandonner une activité même si les bénéfices sont plus élevés que les coûts, dans le cas où il perçoit des activités alternatives attirantes. Les activités alternatives sont vastes. Il peut s'agir d'autres activités sportives, d'autres loisirs, ou d'autres occupations (e.g., être plus souvent avec ses amis, etc.). Une troisième catégorie d'antécédents de l'engagement réside dans les « forces ou les barrières » qui sont supposées retenir l'individu dans l'activité (Rusbult, 1980). Deux construits sont inclus dans cette catégorie : les investissements personnels et les contraintes sociales. Dans le domaine sportif, les investissements personnels font référence aux ressources personnelles comme le temps, l'effort, l'argent, que les individus mettent dans leur activité, et qu'ils ne pourront plus récupérer s'ils arrêtent celle-ci (Scanlan, Carpenter, Schmidt, et al., 1993). En guise a conclure, que plus les investissements personnels sont importants, plus l'engagement sera élevé. Autrement dit, plus un sportif a « investi » dans son activité (en terme d'heure, d'année, ou d'argent) plus il aura du mal à la quitter ; et inversement. Néanmoins, l'importance relative de ces ressources peut varier d'un sport à un autre. Par exemple, des sports comme le patinage artistique ou l'équitation demandent un investissement financier beaucoup plus conséquent que des sports comme le football ou la gymnastique. Les contraintes sociales sont les dernières forces ou barrières que l'on trouve dans certains modèles (e.g., Kelley, 1983). Ce concept fait allusion à la pression sociale qui peut pousser un individu à participer à une activité ou à maintenir une relation. Dans le domaine sportif, certains enfants ou adolescents pratiquent uniquement pour faire plaisir à des autrui significatifs comme les parents, l'entraîneur, ou les amis (Scanlan, Carpenter, Schmidt, et al., 1993). Certains auteurs présument l'existence d'une relation positive entre la perception d'une pression des autrui significatifs et l'engagement, dans la mesure où l'individu ne veut pas essuyer les reproches de son entourage, concomitants à son arrêt (e.g., Kelley, 1983). Néanmoins, dans le domaine du sport, des travaux ont montré qu'une pression excessive des autrui significatifs induisait un stress excessif qui provoquait, au contraire, un désengagement (e.g.,Scanlan & Lewthwaite, 1984). De plus, le sentiment d' « obligation », vis-à-vis d'une activité volontaire comme la pratique du sport, peut diminuer les perceptions de contrôle et d'autodétermination (Vallerand, 1997), et conduire, en retour, à un engagement plus faible. Par conséquent, la relation entre les contraintes sociales et l'engagement est complexe, il apparaît pertinent d'explorer davantage cette hypothèse lors de recherches futures, d'où la présence d'un point d'interrogation entre ces deux variables, en espérant à déterminer plus spécifiquement l'importance de ce facteur.

En résumé, la théorie de l'échange social a été utilisée dans certains modèles théoriques afin d'expliquer l'engagement sportif et/ou l'abandon sportif (Scanlan & Simons, 1992). Ces modèles ont pu mettre en évidence certains processus et variables responsables de l'abandon sportif. Ce dernier apparaît lorsque les coûts de la pratique sont supérieurs aux bénéfices retirés de celle-ci chez le sportif. L'abandon se déclenche également quand l'athlète n'a pas réalisé l'équation équivalente entre les coûts et les bénéfices, aussi bien quand il a de fortes contraintes sociales et lorsqu'il a un niveau faible d'engagement.

3. L'abandon sportif dans une « macro-perspective » : l'influence des rôles sociaux liés au genre et du « typage » sexué des activités sportives dans le cadre de la théorie de Bem :

Certains cadres théoriques se sont appuyés sur le concept du genre afin d'expliquer le phénomène de l'abandon sportif. La théorie de Bem figure parmi les approches les plus célèbres. Ces caractéristiques conceptuelles nous amènent à améliorer nos connaissances sur le processus et les variables qui aboutissent à l'abandon sportif. Héritier (1996) avance que toutes les cultures humaines sont basées sur une classification dichotomique des sexes. Même si les peuples diffèrent entre-eux quant au contenu des perspectives et attributions de rôles propres à chacun des sexes (Cross & Madson, 1997), tous sont gérés sur ce principe organisateur majeur.

3.1 La construction sociale des identités sexuées :

La distribution des hommes et des femmes dans les sports et les différences de participation, d'investissement et d'engagement entre les hommes et les femmes semblent davantage la conséquence d'une socialisation des rôles sexués que d'une différence d'aptitudes naturelles (e.g.,Bem, 1981). Nous sommes encore aujourd'hui dans une « construction sociale, qui réglemente les représentations et les pratiques « acceptables » du corps, et perpétue la division des rôles. Aux hommes le« faire », aux femmes le « plaire » ». (Catherine Louveau-1981). Cette sexuation est un processus historique toujours opérant. Certains auteurs (e.g.,Davisse & Louveau, 1991) avancent que la socialisation se construit, dans le cadre de différentes activités, à partir d'encouragements, de découragements, de suggestions, de comportements... Dans ce sens, certains chercheurs (Fontayne, Sarrazin & Famose, 2002) postulent que le choix des activités présuppose un degré de cohérence entre le sexe et l'activité. Bourdieu (1998) indique que le processus de socialisation selon le sexe (le « typage selon le sexe ») aboutit à l'élaboration de schémas cognitifs qui sont perceptibles dans les représentations sociales, les discours des acteurs privés, publics et associatifs, mais aussi au sein des familles, des écoles et des médias. Ces schémas guident le choix des individus, au point que leur participation à une activité dépend de leur perception de cette activité comme étant appropriée ou non à leur sexe. Généralement, chaque culture dirige et encourage certains comportements et activités considérés comme des caractéristiques appropriées ou non pour chaque sexe (Cross & Madson, 1997). De plus, elle donne à voir les contours de la féminité et de la masculinité (changeant selon les époques et les cultures) et leur acceptation sociale. Maccoby et Jacklin (1974) avancent, que les individus continuent d'apprendre les comportements masculins et féminins conformes aux standards sociaux tout au long de l'enfance et de l'adolescence. Par exemple, certains chercheurs indiquent que les filles, pendant leur enfance, consacrent plus de temps à des activités interpersonnelles, aux tâches domestiques, aux soins du corps, et ont moins d'activités sportives (e.g.,Davisse, 2006). Conformément aux standards sociaux, il est attendu ainsi de la part des femmes qu'elles se montrent sensibles et tendres, alors qu'il est attendu des hommes qu'ils soient athlétiques, autoritaires et qu'ils aient confiance en eux (e.g.,Bem, 1983).« L'histoire des femmes a d'abord été une histoire de leur corps » rappelait Michelle Perrot (1984), corps sexuel, de la maternité» c'est pourquoi, les filles ne doivent apprendre un sport qui exige de la force et de la puissance, puisque la référence à la mère s'est peu estompée.

3.2 Les sports de combat comme porteurs de l'identité masculine :

Le sport implique nécessairement le corps ; dès lors nous adoptons totalement la position de (Fraisse Geneviève, 1996) rappelant qu'on ne saurait « penser le corps sans son sexe, sans la sexuation ».

S'agissant d'activités physiques, c'est peu de dire que « la différence des sexes ne peut y être neutralisée » (Fraisse, 1996). Les pratiques sportives sont sexuées, on y observe une distribution différentielle des deux sexes dans les activités, les fonctions d'encadrement et de responsabilités ; cette sexuation est un processus historique toujours opérant. Il apparaît que certains sports ont été de longue date investis par les femmes : les danses, les gymnastiques, la majorité des modalités de l'équitation ; d'autres, tels les sports de glace, la natation ou l'athlétisme (à quelques disciplines près) se sont féminisés assez rapidement au cours du XXe siècle. D'autres, en revanche, ne se sont guère féminisés : la lutte, le cyclisme, le football, l'haltérophilie, les sports de combats ...

La distribution des hommes et des femmes dans les sports, les pratiques choisies, les niveaux d'engagement, les goûts sportifs sont en parfaite homologie avec la division sexuée de toutes les formes de travail -- des espaces et plus généralement des pratiques sociales. Les sports sont sexués comme le sont les métiers, les fonctions, les niveaux de responsabilités. Par exemple, quand il s'agit de sport de combat, un sport qui est dur physiquement, mais aussi un sport qui exige des compétences techniques, des compétences scientifiques, des savoir-faire techniques, il s'agit aussi d'une activité se déroulant dans un espace risqué, sa pratique devient très peu investie par les femmes. La durabilité de cette sexuation des sports et des pratiques sociales, est en partie liée aux représentations dominantes de la féminité. Ce qui est en cause, ce sont les normes de la féminité dont on sait qu'elles s'énoncent principalement à partir des apparences. L'« être au féminin », c'est-à-dire ce qui est considéré comme faisant la femme, est souvent réduit à l'« être perçu » (Bourdieu 1998). La caractérisation de la féminité est inéluctablement rapportée au corps des femmes pour lequel des canons fonctionnent. Aujourd'hui, si peu de femmes choisissent ces sports « de tradition masculine » (du rugby au cyclisme en passant par le vol libre, le sport de combat, pour ne citer que quelques exemples), c'est certainement qu'ils ne s'accordent pas avec les catégorisations spontanées à partir desquelles hommes et femmes jugent ce qui convient ou non à une femme, c'est qu'ils s'accommodent mal avec le modèle dominant de la féminité dans notre culture. L'assignation au masculin de certains sports, tenace à l'échelle de l'histoire, devient intelligible en prêtant attention aux aptitudes physiques que ces sports requièrent, aux rapports au corps et aux engins qui s'y mettent en jeu, aux caractéristiques techniques et spatiales qui sont les leurs... Ainsi, montrer ou exercer sa force, se livrer à un combat, porter ou recevoir des coups, la prise de risques corporels... autant d'attributs pratiques ou symboliques donnés comme inconvenants avec la féminité, que les femmes semblent ne pas pouvoir faire leurs et qui appartiendraient donc, en propre, à la masculinité. Deux modèles de femmes sont donnés comme positifs : la femme-mère et la femme bel objet. La fonction maternelle et l'esthétique sont des références fondamentales, sinon fondatrices de l'implication des femmes dans certaines pratiques physiques (des formes d'activités et d'exercices préconisés... Ce sont ces mêmes images qui sont convoquées quand il s'agit de proscrire des activités jugées « dangereuses » pour les organes féminins ou trop « violentes » (par exemple les courses à pied ou les sports collectifs au début du XXe siècle). La troisième représentation est celle de la femme virile. Celle-ci, au contraire des deux autres figures, est donnée comme modèle repoussoir. Si la référence à la mère s'est peu à peu estompée au fil du temps (ou se manifeste autrement, la préconisation du « travail du giron » est devenue rare, penser l'organisation des pratiques avec des garderies pour les enfants est très fréquent), la femme bel objet et la femme virile sont en revanche des références fortement récurrentes qui ont traversé le siècle. Les sportives, a fortiori de haut niveau et dans les sports historiquement masculins, subissent ce que nous tenons à appeler un procès de virilisation. Encore une question récurrente dans l'histoire de l'accès des femmes aux sports, mais qui dépasse complètement l'univers des pratiques sportives. Cette qualification accompagne l'histoire de l'accès des femmes à des fonctions socialement dévolues aux hommes. Dans le sport, la référence à la virilisation persiste largement aujourd'hui. Ainsi, dès que les sportives dérogent au « féminin » quant au sport choisi, elles font « un sport d'homme ». C'est le cas par exemple pour le sport de combat, le rugby. La référence à la femme virile apparaît encore pour celles qui ont un signe sexuel secondaire habituellement, culturellement assigné aux hommes, « trop de muscles », les épaules « trop carrées », « pas assez de poitrine » ou bien des hanches gommées. Celles-là ont des apparences considérées au mieux comme « androgynes », elles sont immédiatement suspectées sur leur identité de femme : « Ce ne sont pas de vraies femmes », « Le sport menace leur beauté »,« Elles sont hommasses », ou encore, désignation banalisée et qui se veut parfois élogieuse, « des garçons manqués ». De nombreuses sportives posent, malgré elles, et de façon cruciale, la question des contours de la masculinité et de la féminité. Elles provoquent, involontairement le plus souvent, du désordre dans l'ordre des catégories et des rapports de sexe. Être pareil -- qui est bien autre chose que faire pareil -- est une perspective insoutenable et impossible.

3. 3 La théorie de schémas de genre et l'abandon sportif :

Généralement, les hommes ont tendance à avoir une orientation de rôle masculin, tandis que les femmes ont tendance à avoir une orientation de rôle féminin. Dans ce cas, on parle d'individus typés sexuellement (sextyped). Plus précisément, lorsque les individus adhèrent aux caractéristiques masculines tout en rejetant les caractéristiques féminines, on parle d'individus typés Masculins. Dans le cas inverse, on parle d'individus typés Féminins. Cependant, il peut arriver que des femmes aient une orientation de rôle à connotation masculine et des hommes aient une orientation de rôle à connotation féminine. Dans ce deuxième cas, on parle d'individus « de type sexuel croisé » (cross-sex-typed). Plus précisément, lorsque les individus n'adhèrent ni aux caractéristiques masculines ni aux caractéristiques féminines, on parle d'individus ?Indifférenciés?. Par contre, lorsque les individus se caractérisent à la fois par des traits masculins et féminins, on parle d'individus typés Androgynes. Ces derniers individus sont les plus adaptés psychologiquement du fait de leur capacité à adopter des comportements différents pour mieux s'adapter à leur environnement (Bem, 1985). Bem et Lenney (1976) ont réalisé, par exemple, une étude afin d'étudier le lien entre l'identité du genre et le choix des activités à exercer. Les résultats ont montré que les sujets typés sexuellement (i.e., hommes Masculins, femmes Féminines) essayent généralement d'éviter les activités inappropriées à leur sexe. Ces sujets ressentent un malaise psychologique et des sentiments négatifs vis-à-vis d'eux-mêmes quand ils s'engagent réellement dans ces activités. La mise au jour de ces identités de genre a permis de démontrer que les individus ont des attentes plus élevées dans les activités en cohérence avec leur genre et des attentes plus faibles lorsque le typage sexué de l'activité et le genre de l'individu sont opposés (Bem, 1981). C'est pourquoi les individus ayant une forte identité de genre ont tendance à valoriser les tâches qui sont congruentes avec cette identité.

3. 4 Pratique et abandon sportifs en termes de genre :

Plusieurs recherches (Bem, 1983, 1985) ont, souligné que les identités de genre (i.e., Masculine, Féminine) vont servir de guide à l'action en conduisant les individus à des comportements en cohérence avec leur identité de genre. C'est la raison pour laquelle les femmes qui souhaitent adhérer aux stéréotypes de rôles féminins décident probablement d'arrêter la pratique des activités physiques et sportives (e.g., Eccles & Harold, 1991). De la même manière, les sujets n'ayant pas le schème de catégorisation, ou bien qui n'emploieraient pas ce schéma basé sur la dichotomie du masculin et du féminin pourraient se considérer, soit comme pratiquant plus aisément des activités non conformes aux stéréotypes culturels de leur sexe, soit comme pratiquant de façon indifférente des activités conformes ou non conformes aux stéréotypes de leur sexe. Plus particulièrement, certaines études ont montré que les sujets chez qui le schème de catégorisation selon le sexe serait absent hésitent moins à pratiquer des sports considérés comme traditionnellement inappropriés pour leur sexe (e.g., Colley, Roberts & Chipps, 1985).

Les recherches qui se sont focalisées sur le phénomène de l'abandon sportif ont généralement montré que l'abandon sportif chez les filles était plus important et survenait plus tôt que chez les garçons (Martino, 1975). Plus particulièrement, quelques recherches (Thorne, 1993) soulignent que le fait que les filles veulent qu'elles soient jolies et séduisantes représente des priorités plus importantes pour elles que de participer ou de continuer la pratique d'un sport régulier. Pour Eccles et al., (1983), les filles qui veulent être féminines participent ou continuent moins dans les sports stéréotypés masculins. Ainsi, certaines filles sont prêtes à abandonner leur sport afin d'éviter de compromettre leur féminité (Kane & Synder, 1989). L'abandon sportif chez les filles semble résulter également d'un conflit entre le rôle de sexe et le rôle sportif des filles. Plus précisément, certaines recherches avancent que les joueuses qui adhérent aux rôles sexués féminins et qui pratiquent un sport « inapproprié » à leur sexe vivent davantage un conflit entre leur rôle de femme et celui de sportive que celles qui font des sports plus « appropriés » à leur sexe (Anthrop & Allison, 1983). Pour Brown (1985), il semble que ce conflit serait plus fort pendant l'adolescence où les images stéréotypées de la féminité ont une influence particulièrement forte.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard