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La motivation et l'apprentissage dans les musées

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par Astrid Langlois
Université Nanterre Paris Ouest La Défense - Master 1 Psychologie Cognitive Appliquée 2010
  

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2. L'apprentissage

Le fonctionnement psychologique du visiteur de musée est souvent étudié afin de comprendre sa progression dans le musée, et par la suite d'adapter le musée au visiteur pour enrichir et donner du sens à sa visite. L'apport de la psychologie cognitive permet de caractériser la fonction essentielle du musée : l'apprentissage. En effet, c'est bien en comprenant le visiteur de musée, ses attentes, et ses moyens de connaître que l'on pourra arriver à rendre le musée plus efficace.

Le concept important dans ce domaine est celui du musée éducatif (Dufresne-Tassé, 1991) : l'accent est mis sur la fonction éducative du musée. Le concept éducatif des musées est effectivement de plus en plus présent depuis une vingtaine d'années (visites guidées, conférences...). Le musée cherche à encourager l'apprentissage et le visiteur a connaissance de la fonction éducative du musée.

Définition de l'apprentissage : En psychologie, l'apprentissage désigne « toute modification stable des comportements ou des activités psychologiques attribuable à l'expérience du sujet. » (Le Ny, 2010).

Dans cette perspective, on se demandera : comment le musée peut-il constituer un apport pour le visiteur ?

2.1. L'apprentissage dans le musée

2.1.1 Le musée éducatif : pourquoi apprendre au musée ?

La question que l'on peut se poser en premier lieu est : « Pourquoi un apprentissage dans le musée ? ».

L'ICOM (organisation internationale des musées et des professionnels de musée) donne une définition du musée : « Un musée est une institution permanente, sans but lucratif, au service de la société et de son développement, ouverte au public et qui fait des recherches concernant les témoins matériels de l'homme et de son environnement, acquiert ceux-là, les conserve, les communique et notamment les expose à des fins d'études, d'éducation et de délectation. » On voit donc ici que la fonction du musée, également évoquée antérieurement par André Malraux, est de communiquer un savoir. Si apprendre n'est pas toujours l'objectif principal du visiteur, comme on a pu le voir précédemment, la vocation première du musée, est elle, bien de communiquer et de permettre au visiteur d'apprendre.

L'enjeu est donc de savoir comment apprendre et comment faire apprendre au visiteur. On s'intéressera aux constats sur l'apprentissage dans les musées, puis aux méthodes proposées pour encourager cet apprentissage.

2.1.2 Comment apprend-on au musée : les obstacles et les bénéfices.

Si le musée est bien un lieu éducatif, il n'en ressort pas moins certaines interrogations concernant les apprentissages réalisés dans un musée. Falk et Dierking (1992) décrivent bien le manque de preuve quant à un apprentissage réel dans le musée. D'une manière générale, il apparaît que la première difficulté, selon ces auteurs, réside dans la définition du concept d'apprentissage ; en effet, l'apprentissage est souvent associé au milieu scolaire, ce qui biaise la vision du visiteur. Une première distinction a été faite dans les années 70, entre l'apprentissage formel (scolaire) et l'apprentissage informel (définissant l'apprentissage dans les musées). Cependant, Falk et Dierking précisent que cette différence n'est pas vraiment représentative de l'apprentissage dans les musées.

L'apprentissage dans les musées, d'après la revue de Falk et Dierking, a comme caractéristique principale d'être personnel, orienté par les connaissances et les ressentis. Ils qualifient cet apprentissage de free-choice learning (apprentissage libre). L'analyse par entretien de souvenirs de visite de sujets a permis de mettre en avant que les informations retenues les plus durablement sont d'ordre personnel : valence de l'expérience, compagnie... Les visiteurs se souviennent de ce qu'ils ont fait ou ressenti, mieux que de l'endroit où ils étaient. Les études relevées par Falk et Dierking (1992) démontrent également que les détails rappelés sont généralement en lien avec les connaissances et intérêts préalables des visiteurs. Ils rappellent à cet effet qu'un sujet apprend mieux les informations qui l'intéressent. L'apprentissage est construit de façon personnelle en fonction des connaissances déjà acquises. (Gelman, Massely & Mc Manus, 1991 cité dans Falk et Dierking, 1992)

L'apprentissage muséal selon Falk et Dierking est donc modulé par les trois contextes de l'expérience interactive (vu dans la partie sur la Motivation, 1.1.2) : le contexte personnel, le contexte physique et le contexte social. Les auteurs appuient ces constats sur les apports de la psychologie cognitive. Selon Bruner, la motivation intrinsèque joue un rôle dans l'apprentissage par la découverte : un sujet sera plus enclin à apprendre quelque chose qui l'intéresse (contexte personnel). Vygotski démontre l'importance des interactions et échanges dans l'apprentissage, on peut donc comprendre l'influence du groupe lors des visites de musée (contexte social). Et enfin, Piaget, Watson et Neisser expliquent le rôle des conditions physiques et du milieu dans l'apprentissage (contexte physique). (Falk & Dierking, 1992 ; Weil-Barais, 1993)

Ainsi pour les auteurs, la définition de l'apprentissage muséal est la suivante : « Les visiteurs ne retiennent pas du musée une accumulation d'informations conceptuelles et académiques, mais assimilent des événements et observations à des catégories qui leurs sont personnelles et liées à leurs vies avant et après le musée. » (Neisser & Hyman cité dans Falk & Dierking, 1992)

En accord avec ce principe, Packer et Ballantyne (2002) résument les caractéristiques de l'apprentissage dans le musée :

- L'apprentissage a lieu au contact d'objets réels, (Falk, Dierking and Holland

1995b; Hooper-Greenhill 1995 cités dans Packer et Ballantyne 2002)

- L'apprentissage y est volontaire (Falk et al. 1995 cités dans Packer et Ballantyne

2002)

- L'apprentissage est stimulé par l'intérêt personnel. (Hooper-Greenhill 1995, cité dans Packer et Ballantyne 2002)

- L'apprentissage dépend du contexte social (Falk et al. 1995 cités dans Packer et Ballantyne 2002)

- Les visiteurs peuvent être seuls ou accompagnés, et ont différents styles d'apprentissages et connaissances préalables. (Anderson 1995 cité dans Packer et Ballantyne 2002)

Les constats précédents permettent de mettre en évidence la disposition du visiteur à moduler lui-même ses apprentissages. Une étude (Borun & Miller, 1980 cité dans Samson, 1992) démontre, que les visiteurs ne lisent que 18% des textes d'une exposition mais qu'ils

lisent en revanche 68% des textes devant lesquels ils choisissent de s'arrêter. Ce qui permet de dire que le visiteur sélectionne les informations qu'il souhaite approfondir.

« L'économie des déplacements [dans le musée] résulte [...] d'une combinaison entre les goûts et les intérêts des visiteurs, les modalités de la circulation dans tout lieu public et les effets d'appels de tel ou tel dispositif muséographique. » (Eidelman & Van Praët, 2000). Ce qui permet également de comprendre que l'on ne peut pas prédire ce qu'un visiteur va apprendre, puisque l'apprentissage est fortement influencé par des composantes personnelles. (Falk & Dierking, 1992)

Pour Dufresne-Tassé et Savard (1996), l'apprentissage de l'adulte au musée est le résultat d'un questionnement. Les questions que se pose le visiteur l'amèneront à apprendre. Et devant le constat que les visiteurs ne se posent pas assez de questions, ces auteurs ont décidé de définir quels pouvaient être les obstacles au questionnement de l'adulte. Ces obstacles peuvent être liés à un manque d'implication : le visiteur passe trop vite dans la salle d'exposition et manque des informations, ou un manque de connaissance : difficulté à faire le lien entre ce qu'il sait déjà et ce qu'il voit, ou encore des caractéristiques extérieures : fatigue, distraction... L'enjeu des méthodes pour améliorer l'apprentissage dans le musée va donc être de faciliter l'activité de questionnement du visiteur dans le musée.

Pour Burigana & Caucat (2005), l'acquisition du visiteur est également liée à un questionnement, et une découverte dans le musée. Ainsi pour eux, un frein aux acquisitions dans le musée est le manque de stimulation.

Pour Kool (1985), les concepteurs d'exposition savent faire des expositions attrayantes, mais ne savent pas faire des expositions qui motivent le visiteur à apprendre ; en effet, pour lui, les raisons qui empêchent l'apprentissage au musée sont : une mauvaise conception de l'exposition, et le nombre important de personnes dans le musée. (Langer & Saegert 1977 cités dans Kool, 1985).

André et Bernard Lefebvre (1993), ont analysé 1 338 comptes-rendus de visite de six musées, qui ont permis de rendre compte des bénéfices et de l'image qu'ont les visiteurs de leurs apprentissages. Les résultats, selon les auteurs concernent deux versants de l'apprentissage : l'apprentissage du musée, et l'apprentissage au musée.

L'apprentissage du musée : On note que l'appréciation d'une visite dépend des apprentissages réalisés puis de la motivation suscitée par la visite pour beaucoup de visiteurs.

Les bénéfices de l'apprentissage sont : le plaisir/déplaisir éprouvé lors de la visite (46% des énoncés), la découverte d'eux-mêmes comme visiteurs (39.4%) et leurs découvertes dans le musée (14.6%). Ces résultats sont effectivement observés dans d'autres études : Burigana et Caucat (2005), ainsi que Pearce et Moscado (1985) cité dans Kool (1985) : les visiteurs se déclarent globalement satisfaits de leur visite, mais repartent avec peu d'acquis. Le bénéfice de la visite semble donc ici lié à une composante de satisfaction qui ne semble pas avoir de lien avec la volonté d'apprentissage au musée.

L'apprentissage au musée : Les sujets consacrent plus d'énoncés aux connaissances acquises qu'aux moyens de les acquérir, mais les auteurs notent néanmoins une forte proportion d'énoncés sur les moyens d'acquérir ces connaissances. Le moyen d'apprendre le plus cité dans les énoncés est la présence d'un groupe (visité guidée en groupe). Viennent ensuite l'observation (12%) et l'apprentissage comme tel (15.9%).

Les auteurs concluent en disant que ce type d'étude n'est pas encore très répandu, mais qu'on peut dès lors, observer la grande maturité du visiteur, qui semble bien avoir une vision globale de ses apprentissages : apprentissage du musée et moyens d'apprendre. Sur la question des bénéfices, les sujets expriment que « les visites au musée permettent de grandir et d'évoluer dans leur vie personnelle [...] Elles sont des occasions de ressourcement, d'ouverture à soi, aux autres et à l'environnement. Elles leur permettent d'acquérir ou de remettre à jour des savoirs; elles provoquent chez eux des prises de conscience, soulèvent des questions, suscitent des remises en question, ravivent leur créativité. » (Lefebvre & Lefebvre, 1993).

Stéphane Debenedetti (2003) s'intéresse au rôle des compagnons dans la visite de musée, et caractérise un apprentissage différent selon la présence de compagnons : la visite en famille avec des enfants est plus riche en apprentissages que la visite en couple ou entre amis. (Debenedetti, 2003). En effet, dans le cas d'une visite avec un enfant, l'adulte fait office de médiateur et est souvent sollicité pour donner des explications. L'auteur explique que le visiteur accompagné d'amis est plus en recherche de divertissement que d'apprentissage.

Un constat de Dufresne-Tassé, Lapointe, Morelli, & Chamberland (1991), mérite d'être mis en lumière : « le visiteur se dit intéressé à apprendre, mais montre de l'agacement ou beaucoup de difficulté à répondre à des questions sur ses apprentissages. ». De même, ces auteurs ont constaté qu'il se faisait peu d'apprentissages dans le musée. On voit donc bien ici

la complexité et les contradictions qui peuvent exister dans les processus d'apprentissage au musée.

La dimension primordiale ici est celle de la perception qu'a le visiteur de lui-même dans le musée. Il semble en effet qu'il y ait deux composantes des visites de musée : l'apprentissage et l'expérience psychologique. Deux approches s'opposent alors : une approche behavioriste, centrée sur les apprentissages, et une approche phénoménologique, centrée sur l'expérience de visiteur. Pour Dufresne-Tassé (1990), « un fonctionnement psychologique harmonieux et productif s'avère le bénéfice le plus important d'une visite au musée » (cité dans Dufresne-Tassé, 1991). Ce constat permet effectivement d'ouvrir la voie à l'expérience vécue du visiteur, et donc à l'influence de facteurs personnels sur l'apprentissage. On pourra donc voir à cet effet, comment ces facteurs peuvent être sollicités pour améliorer l'apprentissage dans le musée.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery