
UNIVERSITÉ DES SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES DE BAMAKO
(USJPB)
INSTITUT SUPÉRIEUR DE FORMATION ET DE RECHERCHE
APPLIQUÉE
(ISFRA)
DÉPARTEMENT DES SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES
SECTION DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION
Mémoire
En vue de l'obtention du Diplôme d'études
approfondies en Curricula
TITRE :
ANALYSE DES OBSTACLES À LA MISE EN OEUVRE DU
MICRO-ENSEIGNEMENT
À L'ÉCOLE NORMALE D'INSTITUTEURS
TANIMOUNE DE TILLABÉRY AU NIGER
Présenté et soutenu par : Oumarou
AMADOU
Sous la direction de : Dr Koulougna Edmond
DEMBÉLÉ, Directeur de Recherche
Membres du jury :
Dr Cheick Oumar FOMBA Président
Dr Nouhoum SIDIBÉ Membre
Dr Koulougna Edmond DEMBÉLÉ
Membre
M. Bakary SAMAKÉ Membre
Date de soutenance : Samedi, le 10 mai 2014

DÉDICACE
À mon père et à ma mère, vous qui
ne pourrez voir ce document. Recevez, à titre posthume, la
légitime reconnaissance de vos sacrifices. Que Dieu, le
Tout-puissant, puisse vous accorder son Paradis éternel !
II
REMERCIEMENTS
Ce mémoire est la partie visible d'un travail rendu
possible grâce à l'aide de plusieurs personnes auxquelles nous
tenons à adresser notre profonde gratitude. Nos remerciements vont
particulièrement :
· Au Docteur Koulougna Edmond DEMBÉLÉ pour
son encadrement éclairé et judicieux sans lequel ce document
n'aurait pu voir le jour. Son regard avisé, sa disponibilité
constante, l'importance qu'il a accordée à ce mémoire et
surtout ses conseils ont été des atouts incontournables à
la réalisation de ce travail ;
· À tous les enseignants et à tous les
administrateurs de l'Institut supérieur de formation et de recherche
appliquée (ISFRA) de Bamako. Les uns pour avoir dispensé les
cours avec beaucoup de courage et d'estime, les autres pour avoir
créé les conditions nécessaires à l'installation de
compétences chez les stagiaires que nous sommes ;
· Aux collègues stagiaires de l'ISFRA pour leur
sens de solidarité, de respect mutuel mais aussi et surtout pour leurs
conseils, leurs avis critiques et leurs encouragements ;
· Au Docteur Modibo COULIBALY de l'École normale
supérieure (ENS) de Niamey pour sa contribution à l'aboutissement
de ce travail. Il mérite cet honneur non seulement pour la documentation
fournie mais aussi pour la correction de certaines parties de ce
mémoire. Ses compétences et ses conseils nous ont
été également très utiles dans le traitement des
données qualitatives ;
· Au Docteur Oumarou HAMA de l'Université Abdou
Moumouni (UAM) de Niamey pour son soutien, sa disponibilité constante
à corriger toutes les parties de cette recherche et pour la mise en
forme du document final. Qu'il nous soit permis ici de l'en remercier vivement
;
· À la direction de l'École normale
d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry (ENI/TT), aux formateurs et aux
futurs maîtres de cet établissement pour leur bonne collaboration,
leur patience et leur temps qu'ils ont consacré à la
réalisation de la présente étude malgré leurs
multiples tâches quotidiennes ;
· Enfin, à ma femme Mariama et à mes
enfants qui, par leur courage et leur patience, ont appris à supporter
les absences prolongées et répétitives d'un être qui
leur est cher.
III
SOMMAIRE
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
SOMMAIRE iii
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS v
LISTE DES TABLEAUX viii
LISTE DES FIGURES ix
RÉSUMÉ x
INTRODUCTION 1
CHAPITRE 1 : LA FORMATION INITIALE DES ENSEIGNANTS DE
BASE 1 4
1.1. Le bilan de la formation initiale 5
1.2. Le bilan à mi-parcours du PDDE 7
1.3. Le nouveau programme des ENI 8
1.4. L'École normale d'instituteurs Tanimoune de
Tillabéry 14
CHAPITRE 2 : PROBLÉMATIQUE 17
2.1. Problème de recherche 18
2.2. Questions de recherche 23
2.3. Objectifs de la recherche 24
2.4. Hypothèses de recherche 24
CHAPITRE 3 : REVUE DES THÉORIES ET DE LA
LITTÉRATURE 25
3.1. Définition des concepts 26
3.2. Revue et analyse des théories et de la
littérature 31
iv
CHAPITRE 4 : MÉTHODOLOGIE 49
4.1. Approche méthodologique 50
4.2. Échantillonnage 50
4.3. Techniques et outils de collecte de données 53
4.4. Étapes de collecte des données 54
4.5. Techniques et plans d'analyse des données 56
4.6. Limites de l'étude 58
CHAPITRE 5 : PRÉSENTATION DES RÉSULTATS
59
5.1. Présentation des résultats 60
5.2. Analyse et interprétation des résultats
84
CONCLUSION ET SUGGESTIONS 95
LISTE DES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
99
ANNEXES xiii
Annexe 1 : Outils de collecte des données xiv
Annexe 2 : Textes des entretiens xxi
Annexe 3 : Listes des aptitudes selon les auteurs xxxiv
V
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS
AB : Apprentissage de base
APC : Approche par les compétences
BEPC : Brevet d'études du premier
cycle
BM : Banque mondiale
CD-R : Compact disc-read only memory
CE : Chargé d'enseignement
CE : Cours élémentaire
CE1 : Cours élémentaire
1e année
CE2 : Cours élémentaire
2e année
CFEPD : Certificat de fin d'études du
premier degré
CFTV : Circuit fermé de
télévision
CI : Cours d'initiation
CM : Cours moyen
CM1 : Cours moyen 1e
année
CM2 : Cours moyen 2e
année
CME : Campagne mondiale pour
l'éducation
CP : Cours préparatoire
DFIC: Direction de la formation initiale et
continue
EF : Évaluation finale
EN : École normale
ENI : École normale d'instituteurs
vi
ENI/TT : École normale d'instituteurs
Tanimoune de Tillabéry
ENS : École normale
supérieure
ENTT : École normale Tanimoune de
Tillabéry
EPS : Éducation physique et
sportive
EPT : Éducation pour tous
FMI : Fonds monétaire international
FP : Formation pédagogique
I : Instituteur
IA : Instituteur adjoint
IA1 : Instituteur adjoint 1e
année
IA2 : Instituteur adjoint 2e
année
IAC : Infrastructure, Autorité,
Consensus
IACR : Infrastructure, Autorité,
Consensus, Ressources
IE : Internationale de l'éducation
IEB : Inspecteur de l'enseignement de base
ISFRA : Institut supérieur de
formation et de recherche appliquée
LOSEN : Loi d'orientation du système
éducatif nigérien
M-E : Micro-enseignement
MEB1/A : Ministère de
l'éducation de base 1 et de l'alphabétisation
ME/F : Ministère de l'économie
et des finances
MEN : Ministère de l'éducation
nationale
PAS : Programme d'ajustement structurel
VII
MEN/A/PLN : Ministère de
l'éducation nationale de l'alphabétisation et de la
promotion des langues nationales
MF : Ministère des finances
P/CEG : Professeur de collège
d'enseignement général
PDDE : Programme décennal de
développement de l'éducation
PES : Professeur de l'enseignement
secondaire
PhD : Philosophy doctor
RC : Renforcement/consolidation
SP : Stage pratique
SO : Stage d'observation
SR : Stage en responsabilité
SS : Section spéciale
SS : Stage de sensibilisation
TBS : Taux brut de scolarisation
TIC : Technologies de l'information et de la
communication
TISSA : Initiative pour la formation des
enseignants en Afrique
Subsaharienne
UAM : Université Abdou Moumouni
UF : Unité de formation
UP : Unité pédagogique
VHS : Video home system
VIII
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Horaires par discipline et par
cycle 11
Tableau 2 : Diagramme de composition et
d'enchaînement 13
Tableau 3 : Effectifs des futurs
maîtres 15
Tableau 4 : Dispositif temporel de
présentation et d'analyse d'un exercice de M-E 20
Tableau 5 : Structure de l'échantillon
52
Tableau 6 : Répartition des formateurs
et des responsables administratifs par sexe 60
Tableau 7 : Répartition des futurs
maîtres par sexe et par cycle 61
Tableau 8 : Répartition des
enquêtés selon leur âge 62
Tableau 9 : Niveau d'études des
formateurs et des responsables administratifs 63
Tableau 10 : Ancienneté des formateurs
et des responsables administratifs à l'ENI/TT 64
Tableau 11 : Répartition des
formateurs par discipline 65
Tableau 12 : État d'information des
futurs maîtres sur le M-E 66
Tableau 13 : État de la formation des
formateurs et des responsables administratifs 67
Tableau 14 : Fréquence de formation
des formateurs et des responsables administratifs 67
Tableau 15 : Durée des formations des
formateurs et des responsables administratifs 68
Tableau 16 : Répartition des
formateurs selon leur niveau de maîtrise du filmage 69
Tableau 17 : Appréciations des futurs
maîtres sur la qualité de la mise en oeuvre du M-E 76
Tableau 18 : Fréquence d'application
du M-E par discipline 76
Tableau 19 : Fréquence de
présentation des formateurs * Fréquence de visionnement 78
Tableau 20 : Fréquence de
présentation des leçons de M-E par les futurs maîtres 81
Tableau 21 : Fréquence de visionnement
des leçons de M-E par les futurs maîtres 81
ix
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Appréciation de la
formation en M-E 69
Figure 2 : Appréciation de
l'état d'équipement de la salle de M-E par les formateurs 71
Figure 3 : Inventaire des ressources
matérielles du M-E 72
Figure 4 : Appréciations des futurs
maîtres sur l'utilisation des salles de M-E 73
Figure 5 : Répartition des formateurs
selon qu'ils pratiquent le M-E ou pas 75
Figure 6 : Avis des formateurs sur
l'état des salles de M-E 82
Figure 7 : Suggestions des formateurs et des
responsables administratifs 84
X
RÉSUMÉ
De l'accession du pays à l'indépendance à
nos jours, le système éducatif nigérien a connu plusieurs
réformes et innovations pédagogiques dont les plus
récentes trouvent leur fondement dans la Loi d'orientation du
système éducatif nigérien (LOSEN)1.
Sur la base de cette loi et tenant compte de ses engagements
pris lors des différents fora, le Niger a mis en chantier, en 2003, le
Programme décennal de développement de l'éducation (PDDE).
L'évaluation de la première phase de ce vaste programme montre
que beaucoup reste à faire pour l'atteinte des objectifs visés.
Cet échec est, en partie, imputé à la formation initiale
des enseignants.
Dans le souci d'améliorer cette formation, les
autorités en charge de l'éducation de base ont
élaboré et mis en oeuvre un nouveau curriculum des Écoles
normales d'instituteurs (ENI). Celui-ci prévoit le micro-enseignement
(M-E) comme une des solutions aux difficultés liées à la
pratique enseignante.
Cependant, à la pratique, on se rend compte que le M-E
est confronté à de nombreuses difficultés. C'est pour
contribuer à la compréhension de ces difficultés que la
présente étude est entreprise en vue d'améliorer la
qualité de l'enseignement au Niger.
Dans cette optique, nous avons émis une question
principale et deux questions spécifiques de recherche. La question
principale a consisté à savoir les difficultés que
rencontrent les formateurs de l'ENI/TT dans la mise en oeuvre du M-E. La
première question spécifique a consisté à savoir si
les formateurs de l'ENI/TT sont suffisamment formés pour la mise en
oeuvre du M-E et la seconde, si l'ENI/TT dispose de ressources
matérielles nécessaires en matière de M-E.
L'étude se fixe trois objectifs : (i) identifier les
différentes difficultés que rencontrent les formateurs de
l'ENI/TT dans la mise en oeuvre du M-E, (ii) analyser ces difficultés en
vue de renforcer cette nouvelle façon de former les futurs maîtres
et (iii) proposer des solutions d'amélioration.
1 Loi 98-12 du 1er juin 1998, portant orientation du
système éducation nigérien.
xi
Pour ce faire, nous avons formulé deux
hypothèses de recherche, à savoir (i) les pratiques
pédagogiques insuffisantes du M-E à l'ENI/TT sont liées au
faible niveau de formation des formateurs dans ce domaine et (ii) la
non-disponibilité des ressources matérielles à l'ENI/TT
contribue à un faible niveau de mise en oeuvre du M-E.
Pour vérifier ces hypothèses, trois types
d'informateurs ont été ciblés au niveau de cet
établissement. Il s'agit des futurs maîtres, des formateurs et des
responsables administratifs.
À ces informateurs, il a été soumis deux
types d'outils de collecte de données. Ainsi, un premier questionnaire a
été administré aux 37 formateurs et un second à 114
futurs maîtres.
En plus de ces questionnaires, deux guides d'entretien ont
été utilisés. L'un a servi pour rencontrer trois groupes
composés chacun de 5 formateurs et l'autre pour rencontrer un groupe de
5 responsables administratifs.
Une méthodologie d'analyse des données
basée sur l'analyse de contenu et l'analyse statistique a
été utilisée pour étudier les données.
La présente étude révèle que 62 %
des formateurs et près de la moitié des responsables
administratifs ont certes été formés en M-E mais la
formation n'a duré qu'une seule journée chez 52 % d'entre eux. 48
% de ces agents ont reçu une seule session de formation. Ce qui fait que
76 % des formateurs ne savent pas manipuler une caméra. La formation a
donc été insuffisante pour 48 % des répondants. En outre,
pour 70 % des participants, les salles de M-E sont bien équipées.
Cependant, ces salles ne sont pas du tout adaptées au M-E (65 %). Aussi
sur les 20 participants aux entretiens semi-directifs, 12 affirment-ils qu'il
n'y a jamais eu de suivi de mise en oeuvre du M-E. En raison de toutes ces
difficultés, 84 % des formateurs de même que 81 % des futurs
maîtres n'ont jamais pratiqué le M-E.
De ces résultats, il ressort que les obstacles à
la mise en oeuvre du M-E à l'ENI/TT sont de divers ordres. Ce sont entre
autres l'insuffisance de la formation en M-E, la mauvaise qualité de la
formation reçue, l'inadaptation des salles à la
réalisation des séances de M-E et le manque de suivi. Ainsi, il
apparaît clairement l'existence d'un lien entre l'insuffisance des
pratiques pédagogiques du M-E et le niveau de formation des formateurs
dans ce domaine,
XII
d'une part et, le faible niveau de mise en oeuvre du M-E et la
non-disponibilité des ressources matérielles, notamment les
salles qui ne sont pas adaptées aux leçons de M-E, de l'autre.
Au regard de ces résultats, nous avons fait un certain
nombre de propositions en vue d'une meilleure mise en oeuvre du M-E à
l'ENI/TT. C'est ainsi que nous avons suggéré aux plus hautes
autorités en charge de l'éducation entre autres
l'élargissement de la formation en M-E à tous les formateurs et
responsables administratifs de l'ENI/TT en quantité et en
qualité, la réhabilitation des salles de M-E et la mise en place
d'une équipe de suivi de la mise en oeuvre du M-E. Aux formateurs, il a
été suggéré de s'impliquer et d'impliquer
pleinement les futurs maîtres dans la mise en oeuvre du M-E. Aux futurs
maîtres, nous leur avons suggéré de participer activement
à toutes les activités concernant le M-E, notamment la
préparation des leçons, leur présentation et leur
visionnement.
1
INTRODUCTION
Le système éducatif nigérien se
caractérise par une structure pyramidale comportant trois ordres
d'enseignement : l'éducation de base qui comprend le préscolaire,
le cycle de base
1 et le cycle de base 2 ; l'enseignement moyen composé
de trois filières, à savoir l'enseignement général,
l'enseignement technique et professionnel et l'enseignement normal ; et
l'enseignement supérieur qui comprend l'ensemble des formations
post-moyen (chapitre 1 de la LOSEN).
La durée des cycles se présente comme suit : un
à trois ans pour le préscolaire, six ans pour le cycle de base 1,
quatre ans pour le cycle de base 2, un à trois ans pour le cycle moyen
et quatre ans pour le supérieur. Le cycle de base 1 est
sanctionné par le Certificat de fin d'études du premier
degré (CFEPD) ou le Certificat d'études primaires
élémentaires franco-arabe (CEPEFA) et, celui de base 2 par le
Brevet d'études du premier cycle (BEPC). L'enseignement moyen est
sanctionné par différents diplômes, à savoir le
Baccalauréat d'enseignement général, le
Baccalauréat d'enseignement technique, le Certificat d'aptitude
professionnelle (CAP), le Brevet d'aptitude professionnelle (BAP) et le
Certificat de fin d'études d'écoles normales (CFEEN).
Au Niger, l'éducation est garantie aux enfants de
quatre à dix-huit ans (article 2 de la loi précitée). Le
taux brut de scolarisation (TBS) était estimé à 76,1 % en
2010-2011 tandis que celui d'alphabétisation était estimé
à 75 % en 2009-2010 (Ministère de l'éducation nationale,
de l'alphabétisation et la promotion des langues nationales [MEN/A/PLN],
2011). Dans les écoles primaires, les activités
pédagogiques sont censées être assurées par des
enseignants formés dans les ENI.
À l'heure actuelle, au Niger, l'enseignement normal est
dispensé dans sept ENI2, à savoir l'ENI
d'Agadès, l'ENI de Diffa, l'ENI Bawa Jongorzo de Maradi, l'ENI Kaocen de
Tahoua, l'ENI Mali Béro de Dosso et l'ENI Tanimoune de Tillabéry
(Ministère de l'économie et des finances [ME/F], 2010).
2 Le conseil des ministres du 26 avril 2013 a prévu
l'ouverture de quatre autres établissements dès la rentrée
scolaire 20132014 pour décongestionner ceux déjà
existants. Il s'agit des ENI de Dogondoutchi, de Magaria, de Niamey et de
Tessaoua.
2
Une analyse plus approfondie des principes du nouveau
programme des ENI fait ressortir une nette intention de reconstitution du
profil de sortie des futurs maîtres. Cependant, les formateurs des ENI
butent à des difficultés de mise en oeuvre de ce nouveau
programme. Au nombre de ces difficultés, figure la mise en oeuvre du
M-E.
Quatre ans après sa mise en application, ce programme a
fait l'objet de plusieurs études au Niger (Djaharou, 2009 ;
Maïdanda, 2012) mais aucune ne s'est intéressée,
jusque-là, au M-E. C'est là donc l'objet de cette recherche.
Il est peut-être risqué de travailler sur un
terrain vierge. Mais pour le chercheur, il n'existe pas de terrain interdit et
en toute chose, il faut un début.
Par ailleurs, compte tenu du coût du M-E, nous pensons
qu'il est nécessaire d'entreprendre une réflexion à son
sujet d'autant plus qu'on est plus ou moins informé qu'il rencontre des
difficultés dans sa mise en oeuvre. Le coût d'une salle de M-E
équipée est de vingt-cinq millions de francs CFA au Niger (D.
Issa, communication personnelle, 26 juillet 2013 ; A. Bori, communication
personnelle, 27 juillet 2013).
Le choix de ce thème tient tout d'abord du fait qu'il
n'existe actuellement au Niger aucune recherche sur la question. Cependant, au
cours de cette recherche, nous ne saurions prétendre aborder tous les
aspects relatifs au sujet du M-E. Nous allons focaliser notre attention sur les
contraintes liées au fonctionnement du M-E à l'ENI/TT.
Le choix de ce thème est lié également
à notre parcours professionnel. En effet, affecté à
l'ENI/TT pour enseigner le français, nous avons, par la suite,
reçu une formation pour gérer la salle de M-E de cet
établissement. Cette position nous a permis d'apprécier le niveau
de mise en oeuvre de cette méthode et aussi d'observer les attitudes des
formateurs et leurs comportements face à l'introduction de celle-ci dans
les programmes de formation initiale des enseignants.
Dans tous les cas, ce choix n'est nullement pas fortuit. En
effet, en matière de recherche, Van Campenhoudt et Quivy (2011) estiment
que :
Si nous choisissons de traiter un sujet donné, c'est
forcément parce qu'il nous intéresse. Nous en avons presque
toujours une connaissance préalable et souvent une expérience
concrète. Peut-être que nous sommes désireux de
3
réaliser notre recherche pour mettre au jour un
problème social ou pour défendre une cause qui nous tient
à coeur (p. 17).
Ce travail est structuré en cinq chapitres. Le premier
chapitre fait le point de la situation de la formation initiale des enseignants
du cycle de base 1 du Niger. Le second aborde la problématique. Le
troisième présente la revue des théories et de la
littérature. Quant au quatrième chapitre, il décrit la
démarche méthodologique suivie. La présentation des
résultats constitue le cinquième et dernier chapitre. Enfin, une
conclusion et des suggestions d'amélioration de la pratique du M-E
marquent la fin du travail. Une bibliographie topique suivie de trois annexes
(outils de collecte des données, textes des entretiens et listes des
aptitudes selon les auteurs) est présentée immédiatement
après la conclusion.
4
CHAPITRE 1 : LA FORMATION INITIALE DES ENSEIGNANTS DU
CYCLE DE BASE 1
1.1. Le bilan de la formation initiale
1.2. Le bilan à mi-parcours du PDDE
1.3. Le nouveau programme des ENI
1.4. L'École normale d'instituteurs Tanimoune de
Tillabéry
5
CHAPITRE 1 : LA FORMATION INITIALE DES
ENSEIGNANTS DU CYCLE DE BASE 1
Ce chapitre aborde, d'entrée de jeu, le bilan de la
formation initiale des enseignants du cycle de base 1 du Niger (1.1). Ensuite,
il présente un bilan à mi-parcours du PDDE (1.2). En
troisième position, il présente le nouveau programme des ENI
(1.3). Enfin, il fait une présentation de l'École normale
d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry (1.4).
1.1. Le bilan de la formation initiale
La formation initiale des enseignants, notamment ceux de
l'enseignement du cycle de base 1, est au coeur des questions éducatives
qui se posent au Niger. En effet, dès 1958, les autorités en
charge de l'éducation optèrent pour une politique de formation
rapide d'enseignants locaux en vue de remplacer les instituteurs et officiers
blancs qui dispensaient les cours dans les quelques rares écoles du
pays. Ainsi, on procéda à une formation
accélérée de jeunes certifiés et on fit même
recours à un personnel venu des pays voisins tels que le Dahomey (actuel
Bénin), la Guinée Conakry, la Haute-Volta (actuel Burkina Faso),
le Mali, etc.3 Puis s'en est suivie l'ouverture des Cours normaux de
Dosso, Maradi, Tahoua, Tillabéry et Zinder.
En 1998, le Niger a instauré dans l'enseignement
primaire le système de volontariat (Ministère de
l'éducation de base 1 et de l'alphabétisation [MEB1/A], 2004)
sous l'impulsion de la Banque mondiale (BM) et du Fonds monétaire
international (FMI) à travers le Programme d'ajustement structurel
(PAS). Le volontariat n'exigeait pas une formation qualifiée pour
enseigner. Ainsi, l'on n'avait plus besoin de séjourner dans une
école de formation de maîtres pour être enseignant. Le
principal critère de sélection était l'obtention du BEPC
ou du Baccalauréat ou tout autre diplôme équivalent.
À partir de cette période, le métier d'enseignant sera
dévalorisé et ouvert à un personnel non
qualifié.
L'État nigérien prendra également un
certain nombre de mesures qui contribueront à nouveau à la
dégradation du système éducatif. Ainsi, pour faire face au
besoin pressant d'enseignants, la durée de la formation dans les
Écoles normales (EN) sera réduite de deux à un an
dès la rentrée 2001-2002. Dans le souci d'une
professionnalisation des programmes de
3 Source : Entretien en date du 3 août 2012
accordé par Mamoudou Djibo, PhD, à la télévision
privée Dounia à l'occasion du 52e anniversaire de
l'indépendance du Niger.
6
formation initiale des enseignants, on procéda à
la suppression de certaines disciplines d'enseignement, notamment le
français et les mathématiques (Ministère de
l'éducation nationale [MEN], 2008). Cela causera quelques
préjudices au système éducatif nigérien.
Le séminaire sur la réforme des EN du Niger,
tenu à Niamey du 10 au 14 décembre 2001, avait
décelé les limites de la formation initiale des enseignants
(Maïdanda, 2012). Selon Maïdanda, ce séminaire avait
dégagé cinq raisons pouvant expliquer les failles de la formation
initiale des enseignants : « (1) contenus plus axés sur la
théorie ; (2) impertinence des contenus ; (3) inadéquation du
profil d'entrée des futurs maîtres ; (4) non-qualification du
personnel formateur et enfin (5) non-respect de l'alternance entre la
théorie et la pratique » (p. 3).
Les première et cinquième raisons tournent
autour d'une mauvaise gestion de la formation donnée aux futurs
maîtres, particulièrement concernant l'alternance entre la
théorie et la pratique. Or, cette alternance constitue le moteur de
toute formation professionnelle. C'est dans ce sens que Altet (2005 a) souligne
que :
Les situations de formation en alternance développent
les capacités à réfléchir, analyser,
problématiser, comprendre et faire évoluer les situations et
pratiques professionnelles vécues, par l'articulation des constructions
théoriques et des questions suscitées par le terrain,
ancrées dans la réalité des terrains d'exercice (p.
27).
Paradoxalement, de nouvelles mesures n'allant pas dans le sens
de l'amélioration de la qualité de l'enseignement ont
été mises en place : mise à la retraite d'office des
formateurs et enseignants après trente années de services
effectifs et contractualisation du métier d'enseignant à partir
d'octobre 2003 (MEB1/A, 2004). Le décret
2003-234/PRN/MESS/RT/MEB1/A/MFP/T du 26 septembre 2003 détermine le
statut des enseignants contractuels. Le contrat, tout comme le volontariat
qu'il remplace, ouvre la voie non seulement à des diplômés
des ENI mais aussi à d'autres personnes sans formation professionnelle
en pédagogie et souvent sans vocation. Selon l'Initiative pour la
formation des enseignants en Afrique subsaharienne [TTISSA] (2010), des «
études tendent à indiquer que l'achèvement du cycle
suivant est le minimum requis pour enseigner à un niveau d'enseignement
donné » (p. 55). La nouvelle catégorie d'enseignants est
insuffisamment formée et sous-motivée (Campagne mondiale pour
l'éducation et Internationale de l'éducation
7
[CME et IE], 2012) mais le choix du Niger est sans
équivoque. En effet, selon la CME et l'IE :
L'emploi d'enseignants non qualifiés a souvent
été utilisé comme stratégie à la place d'un
investissement accru (les enseignants non qualifiés coûtent moins
cher) ou d'une réforme du système éducatif (les
enseignants non qualifiés sont employés en contrat à court
terme, ce qui les tient à l'écart du système traditionnel
de gestion des enseignants) (p. 21).
Dans cette situation, un bilan du PDDE permettrait
d'éclairer davantage la situation de la formation initiale des
enseignants.
1.2. Le bilan à mi-parcours du PDDE
Au cours de l'année 2003, le Niger, conformément
aux engagements pris sur le plan international4, a
développé et mis en oeuvre le PDDE. Ce programme,
structuré autour de trois composantes (accès, qualité et
développement institutionnel), vise entre autres objectifs
l'universalisation d'un enseignement primaire de qualité et la
réduction de moitié du taux d'analphabétisme à
l'horizon 2015.
En 2007, le bilan établi au terme de la première
phase de ce programme a révélé, au niveau de
l'enseignement du cycle de base 1, des progrès peu significatifs en
termes d'accès (MEN, 2007 a) et a dégagé des
résultats plus décevants du point de vue de la qualité
(MEN, 2007 b).
Ainsi, le taux d'achèvement5 au primaire
(qui permet d'apprécier la capacité du système
éducatif à maintenir, jusqu'au terme du cycle, tous les enfants
inscrits), bien qu'ayant connu une progression significative en passant de 32,2
% en 2004 à 39,8 % en 2006, était loin d'atteindre l'objectif
visé, à savoir 59 % en 2007. Le taux de survie6
était également de manière générale faible :
56 % au CM1 alors qu'il était à 69 % pour le même niveau en
2003. Ce taux était encore plus faible au CM2 où il était
de 50 %, ce qui était loin de l'objectif visé pour 2007,
c'est-à-dire 74 %. Le coefficient d'efficacité du
système7, mesuré au CM2, a été
estimé également très faible, soit 49 % (MEN, 2007 b).
4 Conférence de Jomtien (1990) et Forum mondial de Dakar
(2000) en faveur de l'Éducation pour tous (EPT).
5 Il s'agit du « rapport entre les non
redoublants en dernière année d'études du cycle et la
population des enfants qui ont officiellement l'âge d'être à
ce niveau d'études » (ME/F, n.d., p. 47).
6 Il s'agit de « la proportion
d'élèves, parmi les recrutés à la base du cycle,
susceptible d'atteindre la fin du cycle suivi » (ME/F, n.d., p. 49). Il
indique le taux de rétention dans un cycle d'études.
7 Il s'agit du rapport du nombre
d'élèves admis au CFEPD en une année T sur le nombre
d'élèves inscrits à l'année T-6.
8
L'évaluation du niveau des apprentissages des
élèves (MEN, 2005) mettait déjà en évidence
une faible performance des élèves en mathématiques et en
français et ce, quel que soit le niveau. Ainsi, en français,
l'enquête révélait que seulement 54 % des
élèves de CP avaient obtenu une note supérieure ou
égale à la moyenne. La proportion des élèves en
situation d'échec s'accroissait dans les autres sous-cycles (61 % au CE
et 68 % au CM). En mathématiques, quel que soit le niveau, plus de la
moitié des élèves était en situation d'échec
avec plus de 70 % au CM.
Les résultats de ces trois enquêtes nationales
pointaient du doigt l'inefficacité des prestations des enseignants et
remettaient en cause leur formation initiale. Pour remédier à cet
état de fait, plusieurs solutions ont été
proposées. Parmi celles-ci, figure l'élaboration d'un nouveau
programme des ENI.
1.3. Le nouveau programme des ENI
À l'issue du Conseil national de l'éducation
(CNE) de septembre 2007, le MEN a mis en chantier entre autres mesures de
redressement de l'efficacité interne du cycle de base 1 : le retour
à deux ans de la durée de la formation des Instituteurs adjoints
(IA) et la révision du curriculum des ENI (MEN, 2008). Dans cette
optique, un nouveau programme basé sur l'Approche par les
compétences (APC) a vu le jour en 2008 en vue :
[...] (1) d'améliorer la qualité des programmes
en offrant aux enseignants une formation professionnelle de qualité ;
(2) d'adapter la formation des enseignants du cycle de base 1 aux
avancées scientifiques et techniques enregistrées dans toutes les
disciplines et domaines d'études intervenant dans leur formation ; (3)
d'adapter la formation professionnelle des enseignants aux orientations
définies par la Loi d'orientation du système éducatif
nigérien (LOSEN) et aux options fondamentales du PDDE ; (4) de
développer chez les nouveaux enseignants, la motivation et l'engagement
volontaire dans le processus de développement économique et
social de leur pays (MEN, 2008, p. 5).
Pour atteindre les objectifs ci-dessus
énumérés, le nouveau programme des ENI a été
conçu autour des cinq principes suivants :
? La formation des enseignants doit être une formation
professionnelle. En d'autres termes, il faut doter les futurs maîtres de
compétences nécessaires pour faire classe avec efficacité
et ce, en identifiant les rôles et fonctions qu'ils exerceront et les
tâches
9
qu'ils exécuteront dans la pratique de leur
métier d'où l'organisation de la formation en Unités de
formation (UF)8 ;
? La formation des enseignants doit préparer à
une pratique réfléchie. Cela signifie qu'il faut apprendre aux
futurs maîtres à analyser et à évaluer leurs
activités d'enseignement et le processus d'apprentissage de leurs
élèves, les préparer à une réflexion
approfondie sur leurs pratiques de classes dans la perspective de les
améliorer.
? La formation des enseignants doit favoriser la
maîtrise des contenus enseignés dans les écoles primaires.
Ce qui revient à dire qu'il faut renforcer les compétences des
futurs maîtres en matière de contenus enseignés au primaire
d'où l'introduction dans le programme des disciplines comme les
mathématiques contenu et le français contenu9 ;
? La formation professionnelle des enseignants doit
préparer à l'auto-formation et à la formation permanente.
Il s'agit de doter les futurs maîtres d'outils nécessaires
à leur formation ultérieure en mettant un accent particulier sur
les compétences liées à la résolution de
problèmes, à la recherche, au traitement et à
l'utilisation de l'information d'où l'introduction du mémoire de
fin d'études chez les IA;
? La formation initiale des enseignants doit développer
chez ces derniers la culture de l'évaluation. Il s'agit de doter les
futurs maîtres d'outils nécessaires leur permettant de mettre en
oeuvre les trois fonctions principales de l'évaluation
pédagogique, à savoir l'orientation des apprentissages, la
régulation des apprentissages et la certification des apprentissages.
La concrétisation de ces principes rime avec le
développement de neuf (9) compétences réparties comme suit
entre trois domaines :
8 C'est le socle du système de formation
initiale des enseignants (MEN, 2008). Selon la même source, l'UF est
basée sur les différents paliers de la scolarité primaire,
à savoir le sous-cycle des apprentissages fondamentaux (CI-CP), le
sous-cycle de l'enseignement élémentaire (CE1-CE2) et le
sous-cycle de l'enseignement moyen (CM1-CM2).
9 Dans ces deux disciplines, sont enseignés les
mathématiques et le français du primaire. Elles sont
différentes de la didactique des mathématiques et de la
didactique du français.
10
? Domaine de l'enseignement :
- Planifier les activités d'enseignement,
d'apprentissage et d'évaluation dans les différentes disciplines
et pour les différents niveaux du cycle de base 1 ;
- Construire des séquences d'apprentissage dans les
différentes disciplines et pour les différents niveaux du cycle
de base 1 en tenant compte des caractéristiques des élèves
et des objectifs visés ;
- Mettre en oeuvre et gérer les apprentissages en classe
;
- Évaluer les acquis des élèves et
proposer des stratégies de rémédiation en fonction des
difficultés identifiées.
? Domaine de l'administration et de la gestion :
- Gérer rationnellement les ressources humaines,
matérielles et financières de l'école ;
- Coopérer avec les acteurs de l'école
(collègues, responsables administratifs et pédagogiques) et les
différents partenaires en vue de réaliser des projets
d'école conformes aux objectifs éducatifs.
? Domaine des contenus d'enseignement :
- S'exprimer avec clarté et correctement dans des
situations de communication à l'oral et à l'écrit ;
- Mobiliser les concepts mathématiques de base dans la
résolution des problèmes ;
- Consolider ses acquis pour le développement des
compétences de vie courante dans les activités d'éveil.
En réaction à l'ancien programme des ENI,
morcelé, le nouveau fait la promotion du décloisonnement des
disciplines en privilégiant l'approche globale dans les apprentissages.
Les disciplines sont désormais réparties ainsi qu'il suit dans
les trois domaines évoqués ci-haut : (i) domaine de
l'enseignement : psychopédagogie, pédagogie spéciale et
pratique et, sociologie de l'éducation ; (ii) domaine de
l'administration et de la gestion : morale professionnelle et
législation et, sociologie de l'éducation ; (iii) domaine des
contenus
d'enseignement : français, mathématiques,
langues nationales, arabe et éducation physique et sportive (EPS). Le
tableau 1 présente les horaires consacrés aux différentes
disciplines par cycle.
Tableau 1
Horaires par discipline et par
cycle10
Disciplines
|
Instituteurs
Hebdo Annuel madaire
|
Instituteurs adjoints
Hebdo Annuel
madaire 1e année 2e année
|
Psychopédagogie
|
4
|
76
|
4
|
108
|
60
|
Pédagogie spéciale et pratique
|
6
|
114
|
6
|
162
|
90
|
Morale professionnelle et législation
|
2
|
38
|
2
|
54
|
30
|
Sociologie de l'éducation
|
2
|
38
|
2
|
54
|
30
|
Éducation physique et sportive
|
2
|
38
|
2
|
54
|
30
|
Français
|
3
|
57
|
3
|
81
|
45
|
Mathématiques
|
3
|
57
|
3
|
81
|
45
|
Langues nationales
|
2
|
38
|
2
|
54
|
30
|
Mémoire (préparation)
|
1
|
19
|
1
|
27
|
15
|
Travail en bibliothèque
|
3
|
57
|
3
|
81
|
45
|
Total
|
28
|
532
|
28
|
756
|
420
|
Dans la pratique, le mémoire ne constitue pas une
discipline. L'initiation au mémoire est assurée par les
formateurs enseignant la sociologie de l'éducation. Et, le
mémoire ne concerne que les IA. Le travail en bibliothèque n'est
pas également une discipline. Seulement, le tableau précise que
trois heures de temps, par semaine, sont consacrées à la
bibliothèque. Aujourd'hui, dans les ENI, la pédagogie
spéciale et pratique a pris le nom de didactique. Concernant les langues
nationales, deux sont enseignées à l'ENI/TT. Il s'agit du Hausa
et du Zarma, deux langues principales du pays.
La nouvelle démarche de la formation initiale des
enseignants procède du principe selon lequel « La pratique et la
réalité doivent être au début et à la fin de
tout processus de formation » (MEN, 2008, p. 50). En d'autres termes, la
formation commence par un stage et se termine par un stage d'où le
modèle de formation Pratique--Théorie--Pratique. C'est ainsi
qu'on distingue quatre types de stages dans le nouveau programme des ENI : le
stage de sensibilisation ou d'imprégnation, les stages d'observation,
les stages pratiques guidés et le stage en responsabilité (MEN,
2008).
11
10 Source : Ce tableau a été adapté par nous
à partir des tableaux 12 et 13 de MEN (2008).
12
Le stage de sensibilisation (SS) dure une semaine et
intervient dès le premier jour de la rentrée scolaire des
écoles primaires et ce, avant même le début des cours
à l'ENI. Le but de ce stage est de mettre les futurs maîtres en
contact direct avec les réalités du terrain à la
rentrée scolaire afin qu'ils s'imprègnent des différentes
activités y afférentes.
Les stages d'observation (SO) durent chacun une semaine. Un
stage d'observation précède toujours le début d'une UF. Le
but de ce type de stage est de permettre aux futurs maîtres d'observer
des séances de leçons au niveau de chaque UF.
Quant aux stages pratiques guidés (SP), ils durent
chacun, en UF1, une semaine pour les I et deux pour les IA et, en UF2 et UF3,
deux semaines pour tous les cycles. Un stage pratique guidé intervient
toujours à la fin d'une UF. L'objectif visé, ici, est de donner
au futur maître l'occasion d'exercer dans un et un seul niveau
donné en situation réelle de classe et en présence du
titulaire de la classe et d'un formateur de l'ENI qui lui attribueront chacun
une note.
Enfin, le stage en responsabilité (SR) qui dure six
semaines pour les I et dix pour les IA. Il intervient à la fin des trois
UF. Le futur maître est donc habilité à s'initier à
la pratique de classe dans tous les niveaux que compte l'école
d'accueil, du CI au CM2 et ce, sous le contrôle de l'enseignant
responsable de la classe et du directeur de l'école. Une note lui sera
attribuée par cette école et par un formateur de l'ENI.
Au terme de chaque SP ou SR, intervient le
renforcement/consolidation (RC). Pour les I, il dure partout une semaine
(après chaque SP et le SR). Pour les IA, il dure deux semaines
après l'UF1, une semaine après l'UF2 et l'UF3 et, trois semaines
après le SR. C'est la période pendant laquelle les formateurs
exploitent les stages en vue d'apporter des remédiations aux
difficultés observées sur le terrain.
Ces différents stages sont entrecoupés par les
cours théoriques appelés apprentissages de base (AB). Ce sont des
ressources à maîtriser par les futurs maîtres en vue
d'acquérir les différentes compétences visées par
le programme. Ces AB interviennent en début d'année scolaire et
durent neuf semaines chez les I et vingt-quatre chez les IA. Pendant ces
semaines, les futurs maîtres auront des occasions d'observer des
leçons dans les écoles annexes ou d'assister à des
séquences de M-E. Les AB sont sanctionnés par deux types
d'évaluations : des contrôles continus dans chaque discipline et
une évaluation sommative ou finale (EF) qui
13
intervient à la fin de l'étude de chaque
compétence d'où la raison de travailler en
interdisciplinarité (MEN, 2008). Le tableau 2 présente, en
semaines, un récapitulatif des différentes activités de la
formation dans les ENI, notamment les stages, les cours théoriques et
les évaluations.
Tableau 2
Diagramme de composition et
d'enchaînement11
Cycles
|
S
|
AB
|
S
|
UF
|
S
|
R
|
S
|
UF
|
S
|
R
|
S
|
UF
|
S
|
R
|
S
|
R
|
E
|
|
S
|
|
O
|
1
|
P
|
C
|
O
|
2
|
P
|
C
|
O
|
3
|
P
|
C
|
R
|
C
|
F
|
I
|
1
|
9
|
1
|
2
|
1
|
1
|
1
|
2
|
2
|
1
|
1
|
2
|
2
|
1
|
6
|
1
|
1
|
IA
|
1
|
24
|
1
|
3
|
2
|
2
|
1
|
4
|
2
|
1
|
1
|
4
|
2
|
1
|
10
|
3
|
1
|
Légende :
SS = Stage de sensibilisation. SO = Stage d'observation. SP =
Stage pratique. SR = Stage en responsabilité. AB = Apprentissages de
base. RC = Renforcement/consolidation. EF = Évaluation finale. UF1 =
Unité de formation. 1 = Nombre de semaines.
La première année des IA débute avec le
SS et prend fin avec le premier SP. La deuxième année
débute avec le premier RC et se poursuit avec les autres
activités jusqu'à l'évaluation de fin de formation. La
formation des I débute également avec le SS et se poursuit
jusqu'à l'EF. Les écarts entre les différents niveaux
concernant les activités de la formation sont liés aux horaires
annuels alloués à chacun des niveaux.
Sur la base du nouveau programme, le MEN entend assurer aux
futurs maîtres une formation professionnalisante par la construction
« d'un répertoire de savoirs professionnels spécifiques au
métier, intégrant savoirs issus de l'expérience pratique
et savoirs scientifiques, pédagogiques et didactiques pour permettre le
développement des compétences en contexte d'action » (MEN,
2010, p. 3). Le développement de ces compétences passe, selon ce
ministère, par trois différentes approches mais
complémentaires qui sont : les dispositifs en alternance, l'analyse des
pratiques et le M-E.
Si les deux premières approches ne posent pas de grands
problèmes dans la pratique, la troisième par contre suscite
hésitations et interrogations. Il s'agit de travailler à la fois
sur deux axes. D'une part, il faut faire avancer progressivement le futur
maître dans son
11 Source : Ce tableau a été adapté par
nous à partir du diagramme de MEN (2008), structuré en trois
tableaux.
14
apprentissage en recherchant à la fois la
maîtrise d'aptitudes, d'une définition claire des objectifs
d'apprentissage et des critères d'évaluation de sa performance.
De l'autre, il faut chercher à présenter de manière claire
l'aptitude à travailler (modélisation) et d'évaluer
objectivement la performance pédagogique du futur maître en
renforçant ses succès et en proposant les différentes
remédiations nécessaires. Selon Altet (2010) :
Évaluer des compétences [...] exige que le
stagiaire soit mis dans des situations d'action. À partir des
activités professionnelles mises en oeuvre par le stagiaire en
situation, [...] le formateur-évaluateur doit observer l'activité
elle-même, en direct ou en vidéo, et solliciter le praticien pour
qu'il reconstitue son action, explicite son raisonnement face à telle
situation (p. 16).
Le développement des compétences implique donc
des temps d'observation et d'analyse en établissement, une mise en
situation d'enseignement et de pratiques rapportées et analysées,
des temps d'autoévaluation et de confrontation au regard de tiers.
1.4. L'École normale d'instituteurs Tanimoune
de Tillabéry (ENI/TT)
Créé en 1959 pour répondre à un
besoin croissant de formation de maîtres comme c'était le cas dans
beaucoup de pays africains à la veille des indépendances, le
Cours normal de Tillabéry (réservé, dans le temps,
exclusivement aux jeunes filles), deviendra EN cycle long à partir de la
rentrée 1973-1974 avec un régime d'internat12. L'EN de
Tillabéry recevait, à cette époque, des
élèves titulaires du BEPC et dispensait un enseignement
général sanctionné par un Baccalauréat,
après trois ans d'études. Les bacheliers de cet
établissement étaient orientés à la Faculté
de pédagogie (l'actuelle ENS de l'UAM de Niamey) pour sortir comme
Professeurs de collège d'enseignement général (P/CEG).
En cas d'échec au Baccalauréat, ceux qui
n'étaient pas autorisés à redoubler subissaient une
formation professionnelle d'un an pour servir au primaire.
Mais l'EN de Tillabéry fut fermée en 1992 et ses
élèves transférés à l'École normale
Askia Mohamed (ENAM) de Zinder.
La réouverture de cette école, désormais
mixte et appelée École normale Tanimoune de Tillabéry
(EN/TT), interviendra à la rentrée scolaire 2002-2003. Suivant
les termes de la
12 Articles 1er et 2 du décret
n°73-117/PRN/MEN/JS du 5 octobre 1973, transformant les Cours normaux de
Tahoua et de Tillabéry en Écoles normales.
15
loi n° 2002-029 du 31 décembre 200213,
l'EN/TT de même que quatre autres EN du pays seront érigées
en des Établissement publics à caractère administratifs
(EPA) d'enseignement et de formation professionnelle sous la tutelle du MEB1/A.
Ce dernier est chargé de veiller à ce que l'activité de
l'établissement s'insère dans le cadre de la politique nationale
du gouvernement en matière de formation des formateurs de l'enseignement
de base (article 4 de la loi précitée).
À partir de 2007, toutes les EN seront appelées
ENI. Celle de Tillabéry devient ainsi ENI/TT avec comme vocation la
formation non seulement d'Instituteurs (I) et d'Instituteurs adjoints (IA) mais
aussi le recyclage des IA ayant exercé pendant au moins trois ans
après leur titularisation.
À la rentrée scolaire 2012-2013, l'ENI/TT
compte, toutes sections et tous niveaux confondus, 1 344 futurs maîtres
(dont 917 filles) répartis dans 29 classes dont 6 de la Section
spéciale (SS). Mais dans le cadre de ce travail, nous nous
intéressons uniquement aux sections I et IA, la SS n'ayant pas le
même statut que les deux autres. Le tableau 3 présente les
effectifs des futurs maîtres, toutes sections et tous niveaux
confondus.
Tableau 3
Effectifs des futurs maîtres
Option
|
Niveau
|
Filles
|
Garçons
|
Ensemble
|
Nombre de classes
|
SS
|
/
|
110
|
99
|
209
|
6
|
I
|
/
|
28
|
18
|
46
|
1
|
IA
|
1e année
|
507
|
171
|
678
|
12
|
|
2e année
|
272
|
139
|
411
|
10
|
|
Total
|
917
|
427
|
1 344
|
29
|
Source : Direction des études de
l'ENI/TT
Le tableau 3 n'indique pas le niveau pour la SS et les I. Cela
s'explique par le fait qu'ils sont formés en un an contrairement aux IA
qui subissent une formation de deux ans.
13 Loi portant création
d'Établissements publics à caractères administratifs (EPA)
dénommés "Écoles Normales".
Le personnel d'encadrement est composé de 37 agents
(dont une seule femme), tous de la catégorie A de la fonction publique
conformément aux dispositions de l'arrêté n° 93
MEBA/DGEB/DFIC du 15 mai 200614 qui stipule que :
Le personnel d'encadrement des Écoles normales doit
être pourvu de l'un des titres ou grades universitaires suivants :
Professeur d'enseignement secondaire ; Inspecteur de l'enseignement de base ;
Conseiller pédagogique de l'enseignement de base ou professeur de CEG ;
Chargé d'enseignement (article 14).
Le personnel administratif comprend neuf agents dont un
Directeur général, un Directeur des études, un Responsable
de stages, un Intendant, un Bibliothécaire, une Secrétaire, un
Informaticien et deux Surveillants généraux. Les agents
auxiliaires sont au nombre de cinq : deux chauffeurs, deux manoeuvres et un
gardien.
L'ENI/TT dispose d'un cybercafé, d'une
bibliothèque, d'une cafétéria, d'un parc auto comprenant
deux bus, un véhicule 4x4 pick-up et une moto-cross et, un bloc de trois
salles de M-E dont deux classes et un laboratoire.
16
14 Arrêté portant statut des personnels
d'encadrement, d'administration et de gestion des Écoles normales.
17
CHAPITRE 2 : PROBLÉMATIQUE
2.1. Problème de recherche 2.2. Questions de recherche
2.3. Objectifs de la recherche 2.4. Hypothèses de
recherche
18
CHAPITRE 2 : PROBLÉMATIQUE
Le présent chapitre, composé de quatre parties,
situe en premier lieu le problème de recherche (2.1). Ensuite, il
présente les questions de recherche (2.2). Il décline les
objectifs de cette recherche en troisième position (2.3). Enfin, les
hypothèses de recherche (2.4) clôtureront ce chapitre.
2.1. Problème de recherche
Au Niger, comme dans beaucoup de pays de l'Afrique
subsaharienne, les programmes de formation des enseignants sont
exécutés en deux parties : les cours théoriques
dispensés dans les ENI et les stages pratiques effectués dans les
écoles primaires de la région sous le contrôle des
enseignants de terrain. Un programme de ce type vise à doter les futurs
maîtres de compétences nécessaires pour faire classe
efficacement.
Cependant, on constate dans les ENI que les cours
théoriques revêtent un caractère verbal et abstrait. C'est
pourquoi, dans bien des cas, les futurs maîtres ne perçoivent pas
clairement le rapport entre ces contenus et la pratique du terrain.
Quant aux stages, véritables opportunités de
familiarisation avec les techniques pédagogiques ou de conduite de
classe, leur rôle semble limité (Rissa, 2004). En effet, le
contrôle exercé sur les futurs maîtres pendant cette
période est très faible et superficiel. Il se trouve même
que les enseignants de terrain chargés d'assurer ce contrôle ne
sont pas suffisamment expérimentés et qualifiés
(Coulibaly, 2010).
Les formateurs des ENI, eux aussi, ne parviennent pas à
accorder toute l'attention nécessaire aux futurs maîtres du fait
de l'insuffisance du temps qui leur est alloué pour assurer la
supervision. De plus, les formateurs de terrain ne sont pas, parfois, en mesure
de fournir un feedback objectif concernant le comportement pédagogique
des futurs maîtres qu'ils supervisent du fait de leur manque
d'expérience. Or, un feedback objectif est indispensable pour motiver
les futurs maîtres et les aider à mieux maîtriser l'acte
pédagogique.
À ces problèmes d'encadrement, est venu
s'ajouter un autre non moins important. C'est celui des effectifs
pléthoriques. En effet, les futurs maîtres sont en surnombre par
rapport aux écoles d'accueil, ce qui réduit le temps de pratique
réelle de classe. Aussi l'arrivée
19
des stagiaires dans ces écoles n'est-elle pas sans
conséquences sur le déroulement normal des cours et sur
l'apprentissage même des enfants.
Le nouveau modèle de formation initiale des
maîtres, centré sur un va-et-vient entre le terrain et le centre
de formation qu'est l'ENI, a pour but selon Altet (2005 b) : « une
professionnalisation de la formation des enseignants avec la construction de
compétences professionnelles autour du «savoir enseigner»
[...] » (p. 51). Ainsi, la formation initiale des enseignants du Niger
s'inscrit désormais dans l'optique d'une formation professionnelle
à finalité pratique. C'est une formation de ce type que
défend Berrier (2003) :
[...] Plutôt que de partir des théories, des
concepts, des principes et de la connaissance de méthodologies, on
pourrait envisager « d'immerger » le stagiaire dans une classe
pendant une heure (en le filmant) dès la première semaine de
formation (avec la possibilité d'une planification, tout de même)
et de le faire réfléchir ensuite sur sa pratique (en injectant
certains concepts quand ce sera utile), de lui faire reformuler des points
intrigants de son expérience et de lui faire dégager au fur et
à mesure sa propre théorie de l'enseignement [...] (p. 112).
Pour le MEN (2009), dorénavant : « la formation
professionnelle doit marquer une rupture avec les acquisitions livresques.
C'est pourquoi elle doit s'appuyer sur un modèle de pratique par
alternance » (p. 10).
C'est dans ce cadre que le nouveau curriculum des ENI a
proposé une initiation des futurs maîtres à la pratique par
le M-E. Selon ses fondateurs, Allen et Ryan (1969/1972), le M-E offre aux
maîtres :
[...] un cadre et une procédure pour leurs
leçons d'essai : un cadre grâce auquel les facteurs complexes
intervenant dans la situation de classe normale se trouvent sensiblement
simplifiés ; une procédure qui renforce le feedback reçu
par l'enseignant à la suite de sa leçon d'essai. Pour simplifier
les éléments complexes de la situation de classe normale, on
limite plusieurs de ses dimensions. La leçon se voit réduite en
durée et en contenu et, au lieu de 25 ou 30 élèves, c'est
un groupe restreint que le professeur enseignera (p. 2).
Le M-E est donc un outil d'entraînement pratique
à la conduite de classe sur un mode progressif et simplifié. Le
tableau 4 présente les différentes étapes de
présentation et d'analyse d'une leçon de M-E.
20
Tableau 4
Dispositif temporel de présentation et d'analyse
d'un exercice de M-E
Étapes Durée
Préparation
L'étudiant-enseignant précise ses objectifs aux
observateurs et au formateur :
- en termes d'aptitudes
- en termes de contenu
Micro-cours
L'étudiant-enseignant effectue l'exercice prévu.
L'exercice est observé et enregistré par C.F.T.V. Recueil
des informations
- Auto-observation (l'enseignant seul en studio)
- Synthèses des observateurs
- Synthèses des élèves
Mise en commun
- L'étudiant-enseignant communique son auto-analyse
- Rapport médiatisé (par le formateur) des avis des
participants
- Rapport des observateurs
Visionnement collectif
- Repérage plus précis des comportements
adéquats ou non.
- Recherche et suggestion de rémédiation.
- Discussion sur la (les) aptitude (s)...
|
10'
15'
15'
+- 20'
+- 20'
|
Durée totale 1h 20' à 1h 30'
Source: Wagner (1992, p. 182)
Dans le tableau ci-dessus, on parle
d'étudiant-enseignant pour désigner le futur maître. Ici,
la durée totale de l'exercice est estimée entre 1 heure 20
à 1 heure 30 minutes mais dans les ouvrages, quand on parle du temps
consacré au M-E, on ne voit que celui imparti au micro-cours,
c'est-à-dire 15 minutes sinon moins.
L'acte d'enseigner étant très complexe (Berrier,
2003), il est plus que nécessaire de prendre conscience de ses
composantes, d'en dégager un certain nombre de savoir-faire, d'aptitudes
spécifiques pour aider à construire des compétences. Pour
Altet et Britten (1983), il s'agit de faire « acquérir à un
enseignant en formation des aptitudes pédagogiques distinctes, bien
définies et non l'acte pédagogique dans toutes ses dimensions
» (p. 15).
Considérant l'intérêt pédagogique
du M-E reconnu par plusieurs auteurs (Allen et Ryan, 1969/1972 ; Altet et
Britten, 1983 ; Wagner, 1992), la présente recherche s'intéresse
à la problématique du M-E comme méthode d'enseignement
à l'ENI/TT en mettant particulièrement l'accent sur les
contraintes liées à sa mise en oeuvre. En effet, si Delors (1999)
considère que « chaque pays doit de temps à autre
procéder à une réforme de son
21
système scolaire sur le plan des méthodes
pédagogiques, des contenus et de la gestion » (p. 203), il est
cependant admis que les réformes en matière d'éducation
nécessitent des changements de comportements des acteurs de terrain
(Draelants, 2009). À cet effet, Colet, dans sa préface au livre
de Roegiers (2012), souligne que :
[...] Il ne suffit pas d'avoir une vision affutée, de
recourir à des outils de développement ancrés dans la
recherche et inspirés des bonnes pratiques, de s'appuyer sur une
communauté internationale, d'avoir la reconnaissance et la
légitimité de la fonction pour mener à terme une
importante réforme. Il y a un risque réel à
négliger les résistances au changement et les problèmes de
leadership. Toutes les belles intentions peuvent s'écrouler face aux
peurs et inquiétudes suscitées par l'appel à innover (p.
11).
Pour combattre ces résistances, il faut impliquer
pleinement les acteurs de terrain, c'est-à-dire les formateurs. Par
conséquent, les formateurs de l'ENI/TT doivent être
impliqués dans la mise en oeuvre du M-E. Dans le même ordre
d'idées, Durkheim, cité par Draelants (2009), souligne que :
S'il est nécessaire de fixer avec discernement les
différentes matières de l'enseignement, de les doser avec
sagesse, de les proportionner avec soin, il est encore beaucoup plus essentiel
de communiquer aux maîtres qui seront appelés à donner cet
enseignement l'esprit qui doit les animer dans leur tâche. On a compris
qu'un programme ne vaut que par la manière dont il est appliqué ;
que, s'il est appliqué à contresens ou avec une
résignation passive, ou il tournera contre son but ou il restera lettre
morte. Il faut que les maîtres chargés d'en faire une
réalité le veuillent, s'y intéressent ; c'est à
condition de le vivre qu'ils le feront vivre (p. 7).
Cependant, Coulibaly (2010) affirme qu'au Niger « les
enseignants ne reçoivent ni une formation initiale ni une formation
continue susceptible de leur permettre de mener à bien leur mission
» (p. 43). Selon lui donc, il faut « impérativement recourir
à de nouvelles méthodes de formation des maîtres » (p.
43). Il (Coulibaly, 2013) note, par ailleurs, que si le Niger veut atteindre
les objectifs de l'EPT d'ici à 2015, il lui faut développer un
modèle de formation d'enseignants compétents et qualifiés
; dans le cas contraire, son pari de Dakar risque d'être une utopie.
Dans ces conditions, quatre ans après la mise en oeuvre
du M-E dans les ENI, on est en droit de s'interroger sur son fonctionnement
d'autant plus que c'est une nouvelle méthode de formation qui est
censée conduire à une formation initiale de qualité au
Niger.
22
Du point de vue didactique, les séances de M-E offrent
des possibilités de développement et d'évaluation des
compétences, crédo du nouveau programme des ENI. L'identification
et l'analyse des difficultés liées à la mise en oeuvre du
M-E seraient, de ce fait, d'un apport considérable pour la formation
initiale des enseignants du Niger.
Analysant différents travaux sur les technologies et
leurs usages en matière de formation des personnes, Albero (2004)
dégage quatre grandes orientations. La première orientation
s'intéresse aux principes de conception, au développement et
à l'évaluation des produits. La seconde s'intéresse aux
usages sociaux des technologies. La troisième, elle, s'intéresse
aux finalités de l'innovation. Quant à la quatrième
orientation, elle interroge les cadres de références et les
conditions dans lesquelles les savoirs sont produits et diffusés. Notre
travail s'inscrit dans l'optique de la seconde orientation et s'invite à
réfléchir sur les conditions d'utilisation du M-E dans le domaine
de la formation initiale des enseignants à l'ENI/TT.
Perlberg (1970) avait affirmé déjà dans
un article que « comme beaucoup d'autres conceptions et innovations
pédagogiques, le micro-enseignement risque naturellement d'être
mal compris et mal employé » (p. 40).
Près d'un demi-siècle après, l'on est
tenté aujourd'hui de donner raison à cet auteur. En effet,
plusieurs signes de dysfonctionnement du M-E font croire que cette innovation
pédagogique est mal comprise et mal mise en oeuvre.
Ainsi, dans bien de cas, la procédure de base du M-E
(essai ? visionnement, feedback et analyse ? reprise ? deuxième
feedback) est loin d'être comprise et respectée par bon nombre de
formateurs.
Dans la pratique, on observe le cheminement suivant : essai ?
visionnement, feedback et analyse.
De plus, l'ignorance des fondements théoriques du M-E
fait que la plupart des formateurs n'accordent pas assez d'importance aux
conditions pédagogiques d'exercice des aptitudes par les futurs
maîtres.
Pire, ces aptitudes ne sont même pas connues des
formateurs qui sont censés s'en servir pour apprendre aux futurs
maîtres à enseigner.
Le M-E est pratiqué comme si on devrait
présenter une partie d'une leçon donnée à un groupe
restreint d'apprenants pour respecter la triple réduction du temps, du
contenu et du nombre d'élèves préconisée par la
méthode. Les modèles ni perceptuels ni symboliques ne sont
présentés aux futurs maîtres. Les films de M-E, dans les
cas où ils ont été réalisés, n'ont plus leur
rôle correctif des erreurs et de souci d'amélioration de la
prestation prochaine du futur maître.
Les résultantes de tous ces dysfonctionnements et
pratiques non conformes aux principes théoriques du M-E sont inlassables
dans le système éducatif. Ainsi, les futurs maîtres sortent
de leur centre de formation sans souvent apprendre une quelconque aptitude.
Dans les rares cas où l'initiation à ces aptitudes a lieu, elle
est à moitié tronquée. Du coup, le produit de cette
formation incomplète est lancé sur le marché du travail,
toutes choses qui contribueraient à nouveau à la
dégradation du système plutôt que de l'améliorer.
La présente étude, intitulée «
Analyse des obstacles à la mise en oeuvre du micro-enseignement à
l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry au Niger
», a pour souci majeur d'identifier et d'analyser les difficultés
qui empêchent aux formateurs de l'ENI/TT de faire du M-E une
réalité.
2.2. Questions de recherche
Nous émettons une question principale de recherche
formulée ainsi qu'il suit :
? Quelles sont les difficultés que rencontrent les
formateurs de l'ENI/TT dans la mise en oeuvre du M-E ?
Cette question principale nous conduit à deux questions
spécifiques de recherche intitulées de la manière suivante
:
? Les formateurs de l'ENI/TT sont-ils suffisamment
formés pour la mise en oeuvre du M-E ?
23
? L'ENI/TT dispose-t-elle de ressources matérielles
nécessaires en matière de M-E ?
24
2.3. Objectifs de la recherche
Dans le but d'améliorer la qualité de
l'enseignement au Niger par l'opérationnalisation des salles de M-E, ce
travail vise trois objectifs spécifiques, à savoir :
? Identifier les différentes difficultés que
rencontrent les formateurs de l'ENI/TT dans la mise en oeuvre du M-E ;
? Analyser ces difficultés en vue de renforcer cette
nouvelle façon de former les futurs maîtres ;
? Enfin, proposer des solutions d'amélioration de la mise
en oeuvre du M-E.
La recherche d'explications possibles d'un
phénomène suppose l'existence de facteurs explicatifs
énoncés dans les hypothèses.
2.4. Hypothèses de recherche
Nous formulons deux hypothèses, à savoir :
? Les pratiques pédagogiques insuffisantes du M-E
à l'ENI/TT sont liées au faible niveau de formation des
formateurs dans ce domaine ;
? La non-disponibilité des ressources
matérielles à l'ENI/TT contribue à un faible niveau de
mise en oeuvre du M-E.
Avant de procéder à la vérification des
hypothèses annoncées, nous tâcherons de nous assurer
d'abord que nous ne sommes pas en train de "défoncer des portes
ouvertes". C'est pourquoi, nous procéderons tout d'abord à la
revue critique des théories et de la littérature existantes sur
le thème. Cette revue est l'objet du chapitre suivant.
25
CHAPITRE 3 : REVUE DES THÉORIES ET DE LA
LITTÉRATURE
3.1. Définition des concepts
3.2. Revue des théories et de la littérature
26
CHAPITRE 3 : REVUE DES THÉORIES ET DE
LA LITTÉRATURE
Deux grandes parties constituent la trame de ce chapitre. La
première partie (3.1) circonscrit les principaux concepts de cette
recherche en précisant leur sens. La deuxième (3.2)
procède à la revue et à l'analyse des théories et
de la littérature. Cette deuxième partie est subdivisée en
deux sections. La première section (3.2.1) présente les
différents modèles de M-E en les rattachant aux théories
de l'apprentissage. La deuxième section (3.2.2) clôt la partie par
l'analyse proprement dite de la littérature sur cette méthode
d'enseignement.
3.1. Définition des concepts
D'après Durkheim, cité par Boury (2009), «
la première démarche du sociologue doit [...] être de
définir les choses dont il traite afin que l'on sache de quoi il est
question » (p. 12). C'est pourquoi, nous avons tenu à
définir dans les pages qui suivent un certain nombre de concepts.
Analyse : Du grec analusis
(décomposition), ce mot désigne, selon le dictionnaire le
Larousse (2009), une « étude faite en vue de discerner les
différentes parties d'un tout, de déterminer ou d'expliquer les
rapports qu'elles entretiennent les unes avec les autres » (p. 39). Ce
dictionnaire définit aussi l'analyse comme un « ensemble de travaux
comprenant l'étude détaillée d'un problème, la
conception d'une méthode permettant de le résoudre et la
définition précise du traitement correspondant [...] » (p.
39). Il s'agit donc, pour le cas du présent travail, d'une étude
détaillée des difficultés liées à la mise en
oeuvre du M-E à l'ENI/TT.
Approche par les compétences :
Désignée sous le sigle APC, l'Approche par les
compétences est une approche de formation caractérisée par
le fait que ce sont les compétences qui imposent le choix des objectifs
à poursuivre et des contenus à couvrir afin de permettre la
construction du savoir. Ainsi, les apprentissages scolaires
développeront non seulement des savoirs et des habiletés utiles
à la réussite scolaire mais aussi des capacités utiles
dans le milieu du travail. C'est une approche née de la rencontre d'une
double attente du monde de l'entreprise (disposer d'une main-d'oeuvre
adéquatement qualifiée et rationaliser les coûts de
formation) et des conceptions pédagogiques axées sur le
résultat individuel plutôt
27
que sur les savoirs. Il a donc été établi
une liaison entre, d'une part, la recherche de compétences au profit de
la compétition économique dans le monde de l'entreprise et l'APC
dans le monde de l'enseignement confronté à un rythme croissant
d'innovations, de l'autre.
Aptitude pédagogique ou habileté
: Le mot « aptitude » a été employé en
psychologie et en pédagogie avec des sens différents. Une
première définition peut se situer au niveau formel et
descriptif. Ainsi, on peut concevoir l'aptitude comme une dimension par
laquelle se diversifient les individus dont on décrit la conduite. Par
exemple, des enfants peuvent être différenciés soit par
leurs notes scolaires en français, soit par les résultats qu'ils
obtiennent au cours d'un test d'intelligence.
Une autre conception du mot aptitude concerne plus directement
son contenu : l'aptitude comme capacité acquise. Selon Legendre (1993),
on dira par exemple qu'une personne est apte à une certaine tâche,
à un emploi dans la mesure où elle paraîtra capable
d'accomplir cette tâche, d'occuper avec succès cet emploi. Dans ce
cas, ce mot a un caractère pronostic.
Mais en M-E, selon Legendre toujours, les habiletés ou
aptitudes pédagogiques sont des « composantes de l'acte
d'enseignement qui se définissent en termes de comportements observables
de l'enseignant, verbaux ou non » (p. 847). Au cours de son enseignement,
l'enseignant a besoin d'exercer plusieurs fonctions pédagogiques
différentes et à chacune de ces fonctions correspond, selon Altet
et Britten (1983), une gamme de comportements (savoir-faire, habiletés,
skills) qui favorisent l'apprentissage chez les élèves.
Compétence : Dans le monde industriel
où il a vu le jour, ce concept fait allusion à un ensemble
relativement stable et structuré de pratiques maîtrisées,
de conduites professionnelles et de connaissances qu'une personne a acquises
par la formation et l'expérience et, qu'elle peut actualiser sans
apprentissages nouveaux dans l'exercice de son métier. La
compétence est donc liée à la performance requise pour
occuper efficacement tel ou tel emploi. Ce sont des comportements attendus
(standards de performance) de la part de l'employé par le chef
d'entreprise.
Dans le domaine de l'éducation, plusieurs auteurs
(Lint-Muguerza, 2009 ; Roegiers, 2007) ramènent les compétences
de l'élève à une capacité à mobiliser
diverses ressources cognitives pour faire face à des situations
complexes.
28
Ainsi, pour Roegiers (2007), « une compétence est
la possibilité, pour un élève, de mobiliser un ensemble de
savoirs, de savoir-faire et de savoir-être pour résoudre des
situations appartenant à une famille de situations » (p. 257).
Selon cet auteur, une situation peut être complexe ou compliquée.
Sa complexité est liée au contexte et à la quantité
des ressources à mobiliser et, son caractère compliqué
à la nouveauté des contenus qui interviennent dans la
situation.
Quant à Lint-Muguerza (2009), elle définit la
compétence selon trois contextes différents (la Belgique
francophone, le Québec et la France) mais qui se rejoignent. Ainsi, dans
le contexte belge, la compétence est définie comme : «
l'aptitude à mettre en oeuvre un ensemble organisé de savoirs, de
savoir-faire et d'attitudes permettant d'accomplir un certain nombre de
tâches » (p. 6). Dans le contexte québécois, il s'agit
d'un « savoir-agir complexe fondé sur la mobilisation et
l'utilisation efficaces d'un ensemble de ressources » (p. 6). Dans le
contexte français, être compétent, c'est « être
capable de mobiliser ses acquis dans des tâches et des situations
complexes » (p. 6).
Finalement, une compétence est une capacité
d'agir efficacement dans un type de situation.
Curriculum : Au sens de Legendre (1993), on
désigne sous le vocable curriculum : « un ensemble de savoirs qui a
pour objet pratique la construction méthodique d'un plan
éducatif, global ou spécifique, reflétant les valeurs et
les orientations d'un milieu et devant permettre l'atteinte de buts
prédéterminés de l'éducation » (p. 288). Plus
explicites, D'Hainaut et al. (1979) définissent le curriculum comme
étant :
[...] un projet éducatif qui définit : a) les
fins, les buts et les objectifs d'une action éducative ; b) les voies,
les moyens et les activités mis en oeuvre pour atteindre ces buts ; c)
les méthodes et les outils pour évaluer dans quelle mesure
l'action a porté ses fruits (p. 83).
En définitive, un curriculum est donc un ensemble de
dispositifs (finalités, programmes, emplois du temps, matériels
didactiques, méthodes pédagogiques, modes d'évaluation)
qui, dans le système scolaire et universitaire, permet d'assurer la
formation des apprenants.
29
Feedback : D'origine anglaise (to feed =
nourrir et back = en retour), ce mot désigne, d'après le
dictionnaire le Larousse (2009), « une rétroaction » (p. 412)
et est différent de ses diverses traductions en ce qu'il englobe
à la fois le procédé de la restitution proprement dite et
les diverses fonctions psychologiques de ce procédé : prise de
conscience critique, autocorrection ou confirmation de ses aptitudes et
comportements pédagogiques et, encouragements.
Selon Altet et Britten (1983), ce terme a une
variété de significations chez les anglophones (critique,
séance de critique, information sur les résultats obtenus,
rétroaction, information sur les sentiments des élèves).
Mais synthétisant tous ces termes, ils donnent au mot "feedback" «
le sens d'une séance de critique ou d'autocritique figurant comme phase
dans le cycle de travail du M-E » (p. 84).
Emprunté à la cybernétique - science qui
étudie les mécanismes de commande et de communication entre
l'homme et la machine - le terme feedback est couramment utilisé
aujourd'hui en psychologie de l'apprentissage. Ainsi, selon Allen et Ryan
(1969/1972), il désigne « la restitution à l'enseignant
d'une image objective de son comportement pédagogique, lui permettant de
se former une opinion sur son efficacité en tant qu'enseignant »
(p. 2).
Innovation : Au sens de Havelock et Huberman
(1980), ce concept se définit comme étant « un
renouvèlement marqué de l'effort tenté pour parachever ou
créer un système » (p. 50). Ainsi, l'innovation
apparaît comme un effort délibéré en vue d'une
amélioration sensible d'un système. Dans le domaine de
l'éducation, cette amélioration peut concerner les programmes
d'études, les méthodes d'enseignement et d'apprentissage (le M-E
par exemple), l'équipement, les constructions scolaires, les types
d'écoles, l'administration, la formation pédagogique, le
matériel, etc.
Micro-enseignement : Si l'on se
réfère à son origine grecque, micro (mikros,
petit) est un préfixe qui, placé devant une unité, la
divise par un million (le Larousse, 2009). Le ME tiendrait alors lieu d'une
petite unité d'enseignement. Ainsi, Legendre (1993) le définit
comme une « méthode utilisée dans la formation ou le
perfectionnement des enseignants, qui vise l'apprentissage progressif
d'habiletés pédagogiques par la mise en pratique et l'analyse
30
d'une ou de quelques habiletés pédagogiques
à la fois, dans le cadre d'une micro-leçon à une
micro-classe » (p. 847).
En définitive, le M-E est une méthode de
formation de maîtres (formation initiale ou continue) qui simplifie
l'acte d'enseigner en simulant une leçon de courte durée
centrée sur une ou quelques habiletés pédagogiques
(micro-leçon) avec un petit nombre d'élèves ou
d'étudiants (micro-classe) et utilisant un matériel audiovisuel
(caméra, télévision, vidéo rétroprojecteur,
magnétoscope, etc.) qui permet un visionnement différé
mais objectif de la séance.
Obstacle : En APC, les apprentissages sont
conçus pour amener les élèves à résoudre des
tâches qui sont inscrites dans la réalité et dans une
globalité à travers des situations-problèmes. Une des
caractéristiques d'une situation-problème est qu'il y ait en son
sein un obstacle mais franchissable.
Il s'agit, pour Astolfi (1994), des différentes
conceptions des élèves, les idées, les
représentations qu'ils ont avant toute leçon sur un sujet
donné ; représentations qui, à différents
âges, leur empêchent de s'approprier les notions disciplinaires. En
général, selon cet auteur, « ces obstacles sont vus de
manière négative : on tend à lister les difficultés
qui s'opposent à un apprentissage efficient, celles qui,
précisément, empêchent d'atteindre les objectifs » (p.
133). L'obstacle devient ainsi un enjeu conceptuel dont l'absence est bien
l'une des formes ordinaires de la monotonie. L'enseignement consistera alors
à trouver les possibilités de franchir les obstacles plutôt
que de voir leur côté négatif : l'obstacle devient ainsi
éducatif. De ce fait, il ne faut non seulement, selon Altet (2006),
« sous-estimer les obstacles si l'on veut espérer les franchir
» mais aussi « il faut se donner les moyens de les penser d'une
manière qui rende possible leur dépassement » (p. 103).
Mais de manière générale, l'obstacle
désigne, d'après le dictionnaire le Larousse (2009), « ce
qui empêche d'avancer, s'oppose à la marche » ou encore
« ce qui empêche ou retarde une action, une progression » (p.
702). Nous considérons, dans le cadre de la présente
étude, cette dernière définition car il s'agit de voir ce
qui empêche les formateurs de l'ENI/TT à mettre en oeuvre
régulièrement le M-E.
Vidéoscopie : Le M-E se réalise
en classe restreinte et en présentiel avec ou sans support
médiatisé (filmage et montage vidéo). Lorsque ce support
intervient, on parle
31
alors de vidéoscopie. Cette dernière permet,
dans une formation, d'acquérir des outils objectifs d'observation et de
régulation en vue de se professionnaliser. Son atout est d'amener
l'élève à s'évaluer lui-même (ce qu'on
appelle autoscopie) mais aussi à se faire évaluer à chaud,
immédiatement après sa prestation, par les pairs et les
formateurs-accompagnateurs (ce qu'on appelle hétéroscopie).
Après avoir clarifié et placé les
différents concepts dans leur contexte, nous pouvons aborder à
présent la revue et l'analyse des théories et de la
littérature se rapportant à la présente étude.
3.2. Revue des théories et de la
littérature
3.2.1. Les modèles théoriques de
M-E
Sous le terme M-E, on rencontre aujourd'hui des pratiques de
formation très variables et qui dépendent du cadre de formation
global dans lequel elles s'insèrent. Les accents mis sur l'un ou l'autre
élément de la situation d'enseignement diffèrent d'un
modèle à un autre. La méthode a donc évolué
même si l'environnement d'enseignement/d'apprentissage (la classe, la
leçon, le temps) est resté le même. Tout en recourant aux
différentes théories dont s'inspirent ces modèles, nous
nous référons principalement aux travaux de Wagner (1992) pour
aborder cette partie. En effet, cette auteure distingue trois perspectives
d'analyse des présupposés théoriques des pratiques
actuelles du M-E : la perspective comportementaliste, la perspective
fonctionnelle et la perspective exploratoire.
3.2.1.1. La perspective comportementaliste
La perspective comportementaliste met l'accent sur le
développement des compétences et des savoir-faire et, s'attache
à définir pour le futur maître des objectifs
comportementaux. Dans cette perspective, la formation est perçue comme
un apprentissage de comportements didactiques définis (les teaching
skills). Le futur maître est entraîné à la
maîtrise d'une série de comportements jugés utiles par le
formateur ou par lui-même. Selon Wagner (1992), la perspective
comportementaliste est caractérisée par :
[...] des objectifs précis et restreints,
formulés en termes opérationnels de comportements de l'enseignant
et indépendants du contenu du cours ; une modélisation symbolique
[...] et/ou perceptuelle [...]; une prestation du stagiaire en situation
pédagogique simplifiée (4 ou 5 élèves ; 5 minutes
de leçon) mais néanmoins réelle ; un maximum de feedbacks
(analyse des
32
résultats obtenus) avec un renforcement positif pour
les objectifs réalisés (p. 13).
Cette perspective est appelée comportementaliste du
fait qu'elle s'inspire du béhaviorisme ou comportementalisme. En effet,
on peut y voir un certain nombre d'opérations et de principes de base
d'une procédure centrée sur la modification du comportement.
D'une part, il s'agit de l'identification précise de l'aptitude à
acquérir (définie en termes comportementaux) et d'autre part, de
la référence à l'apprentissage par imitation encore accrue
grâce à l'utilisation de la vidéo et des renforcements
divers qu'elle permet. Pour Linard et Prax (1978), le M-E est
béhavioriste :
[...] en ce qu'il vise à modifier des comportements -
et uniquement des comportements - par le biais de contingences de renforcement
jouant dans le cadre d'un conditionnement généralisé,
opérant et non pas pavlovien. À partir de modèles de
performance établis par les seuls expérimentateurs et de grilles,
de critères observables et quantifiables, donc répétables
et comparables, chacun avance par imitation selon une progression
linéaire et avec un nombre restreint de variables qui se prêtent
bien au contrôle expérimental (p. 6).
Dans le comportementalisme, l'apprentissage est perçu
comme une modification durable du comportement résultant de la
conséquence d'un entraînement particulier.
Le concept « béhaviorisme » fut
utilisé pour la première fois, en 1913, par Watson qui voyait la
nécessité d'observer des comportements pour pouvoir les
étudier (Amigues et Zerbato-Poudou, 1996). Son expérience sur
l'étude des conditions externes et observables comme facteurs essentiels
dans l'apprentissage a montré que l'homme n'est que le reflet de son
milieu et le résultat des conditionnements qu'il subit. Ce
conditionnement est, selon Tavris et Wade (1999), le mécanisme
fondamental permettant aux individus d'adopter des comportements adaptés
aux situations rencontrées. On reconnaît trois grandes variables
dans ce processus : l'environnement qui stimule, l'organisme qui est
stimulé et le comportement ou la réponse de l'organisme par suite
de la stimulation.
On peut reprocher aux conceptions béhavioristes le fait
qu'elles rejettent les thèses mentalistes selon lesquelles le mental est
la cause de toute action et qu'elles se fondent sur le fait que « seule
l'étude du comportement permet d'établir des lois qui
régissent les actions animales et humaines » (Amigues et
Zerbato-Poudou, 1996, p. 11). Pour Watson, ne peut être
33
objet de science que ce qui est observable par un individu
extérieur (partie émergée de l'iceberg) sans
référence au contenu psychique d'un sujet pensant (la partie
immergée).15
Amigues et Zerbato-Poudou (1996) comparent l'étude du
comportement à celle d'un système isolé qui répond
aux sollicitations de l'environnement et pour lequel il convient de
déterminer les entrées (ou input, stimuli) et les sorties (ou out
put, réponse) sans s'intéresser au processus de fonctionnement.
Les entrées représentent les caractéristiques de la
tâche de l'élève et, les sorties, les actions que
l'élève doit fournir en réponse. Ce qui rejoint les propos
de Barnier (n.d.) pour qui : « les béhavioristes considèrent
les structures mentales comme une boîte noire à laquelle on n'a
pas accès et qu'il est donc plus réaliste et efficace de
s'intéresser aux « entrées » et aux « sorties
» qu'aux processus eux-mêmes » (p. 6).
Pour Tavris et Wade (1999), le béhaviorisme « met
l'accent sur l'étude du comportement observable et du rôle de
l'environnement en tant que déterminant du comportement » (p. 182).
Il s'agit de mettre au jour les relations existantes entre les stimulations de
l'environnement sur l'organisme et les réponses fournies par ce dernier
pour s'adapter au changement. C'est en ce sens que Skinner, cité par
Tavris et Wade, estime qu'un apprentissage est toujours possible à
condition d'user du dosage adéquat de renforcement : ce qu'il appelle le
conditionnement opérant. À cet effet, Altet (2006) identifie
trois principes clés de l'apprentissage : « Nous n'apprenons que ce
que nous faisons. Nous apprenons par l'expérience. Nous apprenons par
essais et erreurs » (p. 27). D'abord, nous apprenons dans l'action car une
action répétée forme des habiletés et des
habitudes. Ensuite, nous apprenons par l'expérience parce que le simple
contact avec l'environnement n'assure pas l'apprentissage ; il faut que chacun
réinvente, pour lui-même, l'ensemble des connaissances. Enfin,
nous apprenons par essais et erreurs puisque les conséquences de nos
actions sont autant de récompenses ou de punitions selon que l'action
est réussie ou pas.
La perspective comportementaliste s'enracine aussi dans la
théorie de l'apprentissage social. C'est une théorie qui peut
s'expliquer, au sens de Carré (2004/5), à travers trois piliers
théoriques fondamentaux autour desquels elle est construite :
15 Récupéré le 18 avril 2013 du site
http://fr.wikipedia.org/wiki/Behaviorisme
34
- Le processus vicariant qui explique le fait que
l'acquisition des compétences et des connaissances humaines peut se
faire par l'observation du comportement d'autres modèles ;
- Le processus symbolique qui indique que le sujet est capable
d'utiliser des symboles pour analyser ses propres expériences, pour
communiquer, imaginer ou évaluer ses propres actions ;
- Et le processus autorégulateur par lequel l'apprenant
organise et transforme de façon active les stimuli, les
opportunités et les contraintes de son environnement au lieu
d'être seulement un acteur réagissant à ces stimulations ou
s'adaptant aux contraintes de son contexte social.
À partir de cette explication, nous pouvons
dégager trois caractéristiques essentielles de la théorie
de l'apprentissage social qui peuvent avoir des implications en matière
d'éducation et de formation.
La première caractéristique concerne le
sentiment d'efficacité personnelle ou d'auto-efficacité qui,
selon plusieurs auteurs (Coulibaly, 2013 ; Lecomte, 2004/5 ; Pierre-Henri,
2004/5), désigne la perception qu'a un sujet sur le rendement de ses
interventions et la confiance en sa capacité à fournir une
réponse correcte par rapport à une tâche future.
La deuxième caractéristique a trait à
l'autorégulation du sujet, c'est-à-dire que l'individu est
capable d'agir en fonction de ses besoins et de modifier ses actions selon des
résultats obtenus en vue d'améliorer sa performance.
La troisième et dernière caractéristique
est en lien avec l'utilisation des modèles. La théorie de
l'apprentissage social met l'accent sur l'apprentissage vicariant ou indirect :
il s'agit de ce que l'enfant peut apprendre en marge du discours du
maître, en regardant faire et en écoutant ceux qui savent faire et
par extension, en analysant leur production. Pour les partisans de cette
théorie, tout sujet apprend par imitation des autres et la reproduction
de leurs comportements. Cela permet de faire bien des économies dans le
processus d'apprentissage.
35
En résumé, nous dirons que la perspective
comportementaliste fait du comportement l'objet même de l'apprentissage.
Elle tire ses racines, comme son nom l'indique, du comportementalisme. Elle
s'appuie aussi sur la théorie de l'apprentissage social où le
comportement est surtout influencé par la capacité d'un sujet
à tirer profit de l'expérience sociale pour prévoir et
diriger son action.
3.2.1.2. La perspective fonctionnelle
Développée par des chercheurs de
l'université de Liège dont Crahay et des professeurs de
psychopédagogie d'une école normale gardienne, la perspective
fonctionnelle est née de la tentative de combler certaines lacunes de
l'approche comportementaliste à laquelle on reprochait une validation
unilatérale des aptitudes et leur indépendance mutuelle. Dans ce
modèle, les formateurs mettent l'accent sur la
définition d'objectifs en termes d'apprentissage des
élèves et sur la prise en compte de l'interaction
maître/élèves. Au sens de Wagner (1992), trois
éléments font la spécificité de la perspective
fonctionnelle :
On ne postule pas au départ l'existence de bons
comportements d'enseignants définissables hors contexte ; on
s'intéresse aux comportements des élèves, non pas en tant
que reflets de l'activité de l'enseignant mais bien en tant que
critères d'évaluation de la stratégie
développée par l'enseignant ; on incite l'enseignant en formation
à expérimenter une stratégie d'enseignement dans le but de
provoquer certains comportements souhaités chez les élèves
[...] (p. 31).
Cependant, même si la perspective fonctionnelle est le
fruit de la critique de la perspective comportementaliste, elle ne
s'écarte pas du béhaviorisme. La conception très atomiste
des savoirs et le passage d'un niveau de connaissance à un autre qui
s'opère par le renforcement positif des réponses et comportements
attendus ne sont toujours pas écartés. En effet, la
définition des objectifs d'apprentissage n'est rien d'autre que la face
cachée de la Pédagogie par objectifs (PPO) qui recherche des
comportements observables de l'apprenant et organise l'apprentissage en paliers
successifs.
Mais à la différence de la première
perspective, la perspective fonctionnelle est liée au
socioconstructivisme. C'est une théorie qui met l'accent sur la
coopération sociale. En d'autres termes, elle suggère que
l'élève travaille en groupe, de façon coopérative,
en vue de favoriser la construction de nouvelles connaissances car selon Goupil
et Lusignan (1994) : « la vraie direction du développement de la
pensée ne va pas de l'individuel au social mais du
36
social à l'individuel » (p. 73). Par
conséquent, tous les outils intellectuels élaborés par
l'individu le sont tout d'abord au cours d'interactions, d'échanges.
Vygotsky, le promoteur du socioconstructivisme, cité
par Jonnaert et Masciotra (2004), considère que tout sujet est
caractérisé par un niveau actuel de développement cognitif
et un niveau potentiel de développement cognitif. La surface comprise
entre ces deux niveaux - la zone de développement proximal (ZDP) -
correspond à la différence qui existe entre la capacité du
sujet à résoudre, tout seul, un problème et sa
capacité à le résoudre sous la guidance d'un adulte ou
d'un pair plus avancé ou même d'un dispositif informatique. Donc,
ce que l'enfant sait faire aujourd'hui en collaboration, il saura le faire,
tout seul, demain.
Dans le socioconstructivisme, chaque apprentissage nouveau
exige une organisation mentale des connaissances de l'apprenant, un renoncement
à ses conceptions antérieures simples ou fausses (conflit
cognitif) et une confrontation intellectuelle entre plusieurs individus ayant
des représentations différentes en rapport avec le savoir
à apprendre (conflit sociocognitif). Il s'agit de faire un
regard rétrospectif, c'est-à-dire de voir la manière dont
l'individu s'y prend pour utiliser ce qu'il sait déjà et un
regard prospectif, c'est-à-dire la manière d'acquérir de
nouvelles connaissances (Allal et Saada-Robert, 1992).
3.2.1.3. La perspective exploratoire
La perspective exploratoire est un modèle qui renvoie
à une formation faisant place à la liberté et à
l'autonomie du stagiaire, formation balisée par des procédures de
fonctionnement et d'évaluation souples et, centrée sur la
découverte des savoirs et des savoir-faire. C'est un modèle qui
prône un assouplissement de la méthode et vise à
établir une relation formateur/formé de qualité, relation
d'aide plutôt que de pouvoir. Selon plusieurs auteurs (Peraya, n.d. ;
Wagner, 1992), ce modèle considère le M-E comme un cadre
d'exploration et d'expérimentation de stratégies didactiques.
Dans cette perspective, la relation entre le formateur et le
futur maître est très importante. Cette relation est
définie selon deux principes fondamentaux : le principe du respect de
l'autonomie de l'apprenant et le principe de non-aliénation (Wagner,
1992).
Le premier principe implique que le futur maître peut
disposer à sa guise du feedback soit en le demandant, soit en le
refusant. Il décide même des aspects de sa performance qu'il
souhaite voir évaluer.
37
Le second principe dispose que le formateur soit totalement
disponible à l'apprenant mais en ne se substituant pas à lui
à travers la proposition trop directive ou limitée de contenus
précis d'apprentissage. Il accompagne et guide chacun selon son
désir et son rythme, ses aptitudes et ses difficultés. Bref, le
formateur fait confiance à l'apprenant, croit en ses capacités de
développement et de réajustement et, se refuse de faire pression
sur lui pour créer les conditions favorables à ses prises de
décisions et provoquer le changement.
Dans la perspective exploratoire, en lieu et place de
techniques, d'attitudes ou de skills à développer, on parle de
style d'enseignement et de modèle décisionnel.
Le style d'un enseignant est déterminé par
rapport à sa façon de concevoir et de gérer la situation
pédagogique en établissant tel type de relation avec les
élèves et en organisant l'apprentissage de telle ou telle
manière. Il varie d'une situation pédagogique à une autre,
d'une personne à une autre et au niveau d'un même enseignant.
En général, le style est centré soit sur
la matière, soit sur les apprenants, soit sur les deux. Ainsi, Wagner
(1992) distingue quatre types de style : le style transmissif centré sur
la matière (l'enseignement frontal par exemple), le style incitatif
centré à la fois sur la matière et sur les apprenants (le
débat par exemple), le style associatif centré sur les apprenants
(le travail de groupe par exemple) et le style permissif très peu
centré tant sur les apprenants que sur la matière (les
procédures d'autodidactisme).
L'initiation à ces styles s'opère grâce
à l'expérimentation active et personnelle de chaque apprenant
à travers quatre étapes, à savoir la sensibilisation, le
diagnostic, la discussion générale de la grille proposée
et enfin la pratique personnelle du style par chaque apprenant.
Quant au modèle décisionnel, il est relatif
à l'opérationnalisation maximale des décisions qui
incombent à l'enseignant tout au long de son activité
pédagogique. En effet, selon Wagner, l'enseignement est « un
processus de prise de décisions du maître en vue de favoriser
l'apprentissage des élèves » (p. 55). L'enseignant est un
décideur à deux niveaux : (i) au niveau de la planification de
son enseignement et (ii) dans le déroulement de la leçon qu'il a
programmée et planifiée. L'analyse des situations
éducatives est basée surtout sur l'étude de la
façon dont les décisions doivent être prises pour
être optimales et sur l'étude de la façon dont
s'opèrent les choix des décisions.
38
La première étape de l'initiation aux styles
pédagogiques (la sensibilisation) lie la perspective exploratoire
à la théorie de l'apprentissage social. À chaque
séance, un modèle de style est présenté aux futurs
maîtres mais dans une version moins efficace afin de susciter des
débats. Le modèle est utilisé comme une source de
motivation plutôt qu'un objet d'imitation.
À travers le modèle décisionnel, la
perspective exploratoire établit un pont entre le ME et la
pédagogie par objectifs, en ce sens que la définition univoque de
l'objectif mais aussi et surtout la pertinence de son choix sont les
principales exigences de cette approche d'où son rapport avec le
béhaviorisme. L'enseignant est amené à relativiser ses
prises de positions et de décisions en fonction de la situation
rencontrée.
En conclusion à cette section sur les modèles de
M-E, nous pouvons retenir que dans la perspective comportementaliste, le point
de focalisation de toute l'intervention pédagogique et de son
réajustement est l'enseignant alors que dans la perspective
fonctionnelle c'est l'élève qui en est le pivot.
Dans le premier modèle, le M-E est utilisé pour
faire acquérir des aptitudes pédagogiques et dans le second, des
stratégies didactiques. Les aptitudes sont définies à
travers les comportements observables de l'enseignant et les stratégies
par des effets définis en termes de comportements observables des
élèves.
Dans la perspective exploratoire, l'objectif principal est
d'entraîner les futurs maîtres non pas à identifier les
stratégies d'enseignement efficaces au risque de les
généraliser par la suite mais à repérer et analyser
un maximum de variables pour mieux comprendre une situation
d'enseignement-apprentissage.
3.2.2. Revue de la littérature
Au Niger, jusqu'à cette date, il n'existe aucune
donnée sur le M-E. Seuls le programme d'études des ENI et les
documents destinés à la formation des formateurs de ces
écoles (voir MEN, 2008, 2009, 2010) en parlent. Ailleurs dans le monde,
les ouvrages foisonnent dans ce domaine et permettent un regard critique en la
matière. Mais pour des raisons d'organisation, nous nous
intéressons singulièrement aux ouvrages traitant des fondements
du M-E et de l'entraînement pédagogique pratique.
39
3.2.2.1. Les fondements du M-E
Dans la recherche d'une nouvelle solution aux problèmes
de formation pratique qui utiliserait d'autres modèles que la mise en
situation concrète sur le terrain, le M-E a été construit
principalement, selon plusieurs auteurs (Allen et Ryan, 1969/1972 ; Altet et
Britten, 1983 ; Linard et Prax, 1978 ; Wagner, 1992), autour des principes
théoriques de la psychologie de l'apprentissage et de l'enseignement
programmé, de la modélisation et, de la technologie
éducative.
3.2.2.1.1. Les principes théoriques de la
psychologie de l'apprentissage et de
l'enseignement programmé
Selon Allen et Ryan, le M-E s'est inspiré de quatre
éléments de la psychologie de l'apprentissage et de
l'enseignement programmé dont le premier consiste en une prise de
conscience des besoins de l'élève, des relations
enseignant-enseignés et des conditions nécessaires au processus
d'apprentissage.
Le second élément concerne l'acquisition
graduelle des aptitudes nouvelles : « on n'apprend qu'une seule aptitude
à la fois, on ne passe à l'étude de l'aptitude suivante
que lorsqu'on a maîtrisé la précédente, on ne
cherche à combiner plusieurs aptitudes déjà
maîtrisées que dans la phase ultime de cet apprentissage »
(Allen et Ryan, 1969/1972, p. VIII).
Le troisième principe a trait au feedback. Le
quatrième et dernier élément est la prise en compte des
différences individuelles. Le formateur se fonde sur l'autocritique de
l'apprenant pour une éventuelle rémédiation : « c'est
selon le niveau atteint par l'auto-observation critique qu'il y a lieu, pour le
formateur, d'aborder avec son stagiaire tout ou partie de ce qui est
critiquable et perfectible dans la performance pédagogique de celui-ci
» (Allen et Ryan, 1969/1972, p. IX).
Quant à Altet et Britten (1983), ils ont
identifié sept principes théoriques de la psychologie de
l'apprentissage et de l'enseignement programmé sur lesquels se base le
M-E :
- La répétition du travail d'une aptitude
à acquérir pendant au moins deux séances et sa reprise
jusqu'à ce qu'elle soit acquise ;
40
- La progression dans l'apprentissage, en ce sens que les
éléments d'apprentissage, décomposés et
simplifiés, sont programmés de façon progressive. Ainsi,
avec le temps, on s'efforce de travailler plus d'une aptitude à la fois
afin de recomposer la réalité complexe de l'acte
pédagogique. Certains auteurs comme Roegiers (2007) parleraient d'une
pédagogie de l'intégration ;
- Le transfert des acquis du fait que l'apprentissage est
découpé en des difficultés graduelles au lieu d'être
global ;
- La motivation des élèves à vouloir
donner le meilleur d'eux-mêmes surtout pour ceux qui ne sont pas
habitués à se voir à l'écran ;
- L'action individuelle dans la mise en pratique et
l'entraînement aux différentes aptitudes pédagogiques ;
- Le renforcement qui s'effectue au moment du feedback
grâce à l'autoscopie, à l'hétéroscopie et aux
conditions de réalisation des micro-leçons (climat de confiance)
;
- Et l'apprentissage individualisé car
l'activité peut se faire selon un mode de travail individuel et
être adaptée aux besoins de chaque élève. Perrenoud
(2000) parlerait de pédagogie différenciée.
En analysant les travaux de ces deux groupes d'auteurs (Allen
et Ryan, 1969/1972 ; Altet et Britten, 1983), l'on se rend aisément
compte qu'ils ne se contredisent pas. En réalité, Altet et
Britten ont éclaté les résultats auxquels étaient
parvenus leurs prédécesseurs. Leurs deux premiers principes ne
sont rien d'autres que le détail du deuxième principe d'Allen et
Ryan. Aussi leur troisième principe s'y rapproche-t-il puisqu'il
dépend de la décomposition de l'acte pédagogique.
Leurs deux derniers principes, eux aussi, sont l'émanation du
premier principe d'Allen et Ryan. L'un dépend des relations
enseignant-enseignés et l'autre tient compte des besoins de
l'apprenant.
Finalement, seules la motivation et l'action individuelle
constituent des éléments nouveaux dans l'ouvrage d'Altet et
Britten. Mais quoi qu'il en soit, le M-E s'est bien inspiré de
l'enseignement programmé. C'est, du moins, la conclusion à
laquelle est parvenue Linard (1985) pour qui : « fragmentation en
micro-aptitudes bien définies, action individualisée,
répétition, motivation par retour d'information (ou feedback)
immédiat sur sa propre
41
performance, renforcement positif maximum et progression
organisée, sont dûment reliés à l'enseignement
programmé des années cinquante, inspirateur de la méthode
» (p. 64).
Les lignes qui suivent abordent le deuxième point des
fondements, à savoir la modélisation, un des principes de
l'apprentissage social.
3.2.2.1.2. La modélisation
C'est la deuxième phase de la présentation d'une
nouvelle aptitude après son identification. En M-E, elle a
essentiellement pour but de proposer au futur maître un modèle
clair du comportement à imiter et de l'amener à distinguer, dans
des échantillons de comportement pédagogique, ce qui
relève de l'aptitude et ce qui n'en relève pas ainsi que des
exemples positifs et même négatifs du comportement en question.
On distingue la modélisation symbolique (description du
comportement, des instructions écrites ou verbales, des interactions
verbales et éventuellement des indications scéniques) et la
modélisation perceptuelle (présentation du comportement
désiré en situation réelle ou par l'intermédiaire
d'un moyen technique de reproduction visuelle et/ou sonore).
Dans ses recherches sur la modification du comportement en
référence à la modélisation, Bandura (1980) note
que tous les systèmes d'apprentissage à un métier ont
été fondés sur l'imitation par l'apprenti du maître
modèle : l'apprenti doit observer un modèle et modeler son
comportement sur celui-ci. Mais le modelage ou apprentissage vicariant est un
effet de l'observation qui se distingue radicalement d'un simple
mimétisme. C'est en ce sens que Carré (2004/5) définit le
modelage comme :
[...] un travail d'observation active par lequel, en extrayant
les règles sous-jacentes aux styles de comportement observé, les
gens construisent par eux-mêmes des modalités comportementales
proches de celles qu'a manifestées le modèle et les
dépassent en générant de nouvelles compétences et
de nouveaux comportements, bien au-delà de ceux qui ont
été observés (p. 25).
Cependant, certains auteurs (Perlberg, 1970 ; Wagner, 1992)
estiment que le principe de transmission de compétences d'un enseignant
chevronné à un débutant à partir de simples
observations globales et non structurées de ses actions est trop
limité.
Ainsi, Perlberg fait remarquer que : « même si un
stagiaire a la chance de travailler avec un excellent professeur, il ne lui
suffira pas de l'observer pendant ses cours pour
42
distinguer et évaluer les caractéristiques du
"modèle" proposé » (p. 35). Pour lui, les styles
pédagogiques supposés être efficaces étant
très nombreux, il faut donner aux futurs maîtres l'occasion de
dégager leurs propres styles en s'inspirant de la multitude des
modèles qui leur seront présentés. À ce sujet,
Berrier (2003) aussi affirme que les futurs maîtres :
[...] doivent construire et se construire une
expérience professionnelle sur de nombreux aspects (maîtrise des
manuels sur le marché, des programmes ministériels ;
répartition de la matière en fonction de ces programmes ;
planification de l'année, du cours ; gestion de classe ; gestion de
l'interaction avec les élèves ; etc.) [...]. Se transformer en
experts est une question de temps, et de temps passé en classe justement
; cela ne s'improvise pas du jour au lendemain (p. 114).
Selon ces auteurs (Perlberg, 1970 ; Wagner, 1992), tout mode
de formation basé uniquement sur une imitation subjective non
reliée à une dynamique personnelle d'apprentissage est
voué à l'échec. C'est pourquoi Wagner trouve la
modélisation plus efficace dans le cadre du M-E. Pour elle, « le
modèle se veut plus efficace grâce à l'identification
précise du comportement à imiter et à la
possibilité de s'essayer immédiatement après la
présentation du modèle » (p. 14).
Alors, si la modélisation a montré ses limites
dans la formation traditionnelle, c'est pour trois raisons : (i) les
comportements à observer ne sont pas identifiés à l'avance
et les observations sont globales et non structurées ; (ii) le
modèle utilisé est souvent unique et l'imitation
intégralement calquée ; (iii) après observation du
modèle, il n'y a pas, par la suite, possibilité de s'essayer dans
la même situation. Des auteurs (Altet et Britten, 1983 ; Wagner, 1992)
font même cas d'un manque de regard critique dans la définition de
ces modèles en termes d'éléments pertinents pour la
formation du futur maître et, ils concluent qu'une imitation abusive du
maître de stage fait perdre au futur maître l'occasion de
s'enrichir car il n'observe pas systématiquement d'autres
modèles.
La modélisation perceptuelle fait recours à la
technologie éducative, un autre fondement du M-E que nous allons aborder
à présent.
3.2.2.1.3. La technologie éducative
La technologie éducative trouve toute sa justification
dans la troisième et dernière raison de l'échec de la
modélisation au niveau de la formation traditionnelle
évoquée plus haut. En effet, c'est la technologie
éducative qui donnera au M-E les supports nécessaires à
sa
43
mise en oeuvre. C'est un concept qui a marqué
l'entrée du monde de la communication (l'audio-visuel) en situation
d'enseignement.
Utilisée pour la première fois en 1963 par Keith
Acheson de l'université de Stanford, la vidéo est devenue un
élément important du M-E même si ce dernier n'en
dépend pas tout à fait (Allen et Ryan, 1969/1972). Le recours au
magnétoscope facilite grandement le feedback et l'évaluation.
C'est pourquoi, Allen et Ryan le qualifient d'instrument de feedback par
excellence qui : « rend possible, entre autres, l'étude approfondie
d'échantillons ou de modèles des comportements et des aptitudes
à acquérir » (p. V).
Abondant dans le même sens qu'Allen et Ryan, d'autres
auteurs (Larin, n.d. ; Linard, 1973) soulignent que la force de la vidéo
réside dans l'opportunité qu'elle donne à son utilisateur
de constater, par lui-même, la différence entre la performance
désirée et celle réalisée. La vidéo permet
donc d'exercer un regard critique, une analyse réflexive sur la
performance enseignante et de créer chez son utilisateur un constat qui
entraîne sa volonté de modifier son comportement. C'est donc
là une des conditions essentielles à l'amélioration de
l'enseignement.
Par contre, Peraya (1993) et Perrenoud (2006) affichent un net
désenchantement concernant l'introduction de la vidéo dans
l'enseignement. L'engouement de départ des années 1970 de cet
outil s'est vite estompé, estiment-ils. Peraya parle de «
désillusion à la hauteur des illusions initiales » (p. 1).
Perrenoud, de son côté, fait remarquer que «
l'intégration de la vidéo à l'enseignement, sur laquelle
on fondait dans les années 1970 d'immenses espoirs, n'a pas tenu ses
promesses, sans doute parce qu'elle restait peu interactive [...]» (p.
132).
Pour conclure cette partie concernant les fondements du M-E,
nous reprenons les propos d'Altet et Britten (1983) pour dire que le M-E est
une méthode de formation basée : (i) sur les acquis de la
psychologie de l'apprentissage et de l'enseignement programmé, (ii) sur
certains éléments de la psychologie sociale et (iii) le plus
souvent, sur le magnétoscope, un outil qui permet une évaluation
objective et un feedback.
44
3.2.2.2. L'entraînement pédagogique
pratique
3.2.2.2.1. Choix et nombre des aptitudes
La diversité des modèles de M-E a
entraîné une divergence de points de vue des auteurs concernant
les objectifs de formation et surtout les principales aptitudes à
exercer en formation d'enseignants. Il se pose donc un problème de choix
des stratégies de formation. C'est dire que la détermination du
type et du nombre d'aptitudes pédagogiques à exercer pose
problème.
Alors que Allen et Ryan (1969/1972) avaient proposé 14
aptitudes pédagogiques ou skills16 à étudier et
ce, quel que soit le niveau ou la discipline, d'autres auteurs (Altet et
Britten, 1983 ; Wagner, 1992) en trouvent plus ou souvent même moins.
C'est ainsi que Altet et Britten ont proposé 24
aptitudes pédagogiques17 permettant d'apprendre à
enseigner. Mieux, ils proposent que le choix des aptitudes soit fonction des
préférences et du jugement des stagiaires et non une
sélection faite à l'avance par les formateurs comme le voulaient
leurs prédécesseurs de Stanford. Ils se démarquent de ces
derniers pour trois raisons. D'abord, le formateur quoique bien
renseigné n'est pas omniscient ; il y a donc bien des aspects sur
lesquels les futurs maîtres sont particulièrement bien
placés. Ensuite, ils ont remarqué que plus il y a de variation
dans le choix des aptitudes, plus les stagiaires ont des modèles
positifs et variés de comportements pédagogiques. Enfin, tant que
le stagiaire se sent responsable de la détermination des
modalités de sa formation, il participera pleinement à
celle-ci.
Wagner, de son côté, retient 10
aptitudes18 tout en dénonçant le caractère
simpliste de la conception du M-E classique dans lequel on exerçait
d'abord une seule aptitude et ce n'est après qu'on travaillait sur
plusieurs autres. En lieu et place d'aptitudes isolées, cette auteure
propose des aptitudes combinées. Il faut combiner les aptitudes car
dit-elle : « c'est à partir d'essais dans les démarches plus
longues, intégrant plusieurs aptitudes, que surgiront l'une ou l'autre
difficulté précise » (p. 125).
16 Voir annexe 3, liste des aptitudes selon Allen et Ryan.
17Voir annexe 3, liste des aptitudes selon Altet et Britten.
18Voir annexe 3, liste des aptitudes selon Wagner.
45
Dans sa perspective, Wagner (1992) pense qu'il faut non
seulement combiner les aptitudes mais aussi, pour qu'elles aient un sens, les
percevoir non en termes de comportements d'enseignants comme c'était le
cas à Stanford mais bien d'interactions
maître/élèves. Il faut également que les aptitudes
soient complétées par trois fonctions essentielles de la
démarche pédagogique de l'enseignant : la fonction d'information
qui correspond à son rôle de transmetteur de savoirs, celle
d'éveil qui renvoie à son rôle de stimulateur des
apprentissages et celle d'encadrement qui vise son rôle d'organisateur
des apprentissages au sein du groupe-classe.
Les aptitudes retenues dans le modèle d'Allen et Ryan
(1969/1972) ont fait également l'objet de beaucoup de critiques en
raison de leur portée limitée (Linard, 1973). C'est ainsi que
Crahay (1979) a condamné le fait que ce soit les formateurs,
eux-mêmes, qui déterminaient les comportements faisant l'objet de
la formation et qu'aucun critère ne fondait la valeur des skills. Leur
choix dépendait simplement d'un consensus réalisé entre
formateurs, estime Crahay. En plus, le contenu de formation était en
général laissé à l'appréciation des
formateurs, estime-t-il.
Mais pour Allen et Ryan, cela ne signifie pas imposer «
une quelconque orthodoxie pédagogique » (p. 15). Ils veulent
plutôt offrir aux stagiaires « un entraînement
systématique dans un large éventail d'aptitudes » (p. 16)
parmi lesquelles ceux-ci choisiront selon la situation pédagogique. La
diversité des aptitudes renforce donc les capacités personnelles
de communication des stagiaires et leur offre une liberté de choix.
Pour notre part, nous retenons que concernant la nature et le
nombre des aptitudes, tous les auteurs tournent autour des 14 aptitudes de la
sélection d'Allen et Ryan. Altet et Britten (1983) ont ajouté
à celle-ci 10 nouvelles aptitudes qui sont, pour la plupart, des
éclatements des premières. Et, les 10 aptitudes de Wagner sont
une contraction de ces mêmes aptitudes de Stanford. Même dans les
81 aptitudes19 de Turney et collaborateurs, cités par Altet
et Britten, on retrouve presque les mêmes éléments. La
seule particularité de cette dernière recension qui rejoint
d'ailleurs l'idée de Wagner, c'est d'avoir privilégié
l'option d'aptitudes combinées. En effet, dans leur liste, Turney et
collaborateurs ont classé les aptitudes en rapport avec sept
catégories qui sont : (i) la motivation, (ii) la présentation et
la communication, (iii) le questionnement, (iv) le travail par groupes ou
l'apprentissage
19 Voir annexe 3, liste des aptitudes selon Turney et
collaborateurs.
46
individuel, (v) les processus intellectuels des
élèves, (vi) l'évaluation et, enfin (vii) l'animation et
la discipline.
En outre, il faut reconnaître que le stagiaire a besoin
d'éléments de jugement pour opérer un choix parmi les
aptitudes. Il doit avoir un minimum d'informations sur les aptitudes à
exercer. Son autonomie de choix parmi les aptitudes disponibles doit se limiter
soit à l'ordre de traitement soit au nombre d'aptitudes (par exemple
deux sur cinq à traiter).
Par ailleurs, il serait profitable que le choix des aptitudes
fasse l'objet de discussions car selon Altet et Britten (1983), « en M-E,
le choix de l'individu n'est pas contraint par la préférence des
autres, sauf dans la mesure où la présentation des aptitudes
serait faite en groupe » (p. 56). Mais quelle que soit l'aptitude retenue,
il serait nécessaire que la séquence soit enregistrée et
la bande visionnée par les futurs maîtres et le formateur.
3.2.2.2.2. L'enregistrement vidéo
Dans une micro-leçon, tout n'est pas à
enregistrer ; autrement, on obtiendrait, de l'avis de Wagner (1992) : « un
reportage plus ou moins impressionniste qui ne peut servir à rien sinon
à donner une idée vague de ce qu'a pu être la situation
ainsi conservée » (p. 149). Les consignes d'enregistrement varient
donc selon ce que l'on veut étudier. C'est pourquoi Wagner
précise que :
La vidéo n'est en effet qu'un outil d'observation parmi
d'autres et pour pouvoir relever des éléments essentiels
significatifs, il faut avoir précisé des hypothèses et
déterminé des axes d'observation. Sinon, on se retrouve en face
d'une accumulation de détails dont il est bien difficile de
dégager un sens ou bien en face d'une collecte pauvre et sans
signification précise (pp. 153-154).
L'enregistrement vidéo est utilisé pendant
plusieurs étapes du M-E : le pré-test ou diagnostic, le post-test
ou bilan, la phase de modélisation perceptuelle du comportement, les
phases d'essai, du premier feedback ou du second et même de la reprise de
l'essai.
En formation par la technologie audiovisuelle ou simplement
Circuit fermé de télévision (CFTV), on s'accorde à
distinguer trois sortes de lecture de bandes vidéo : le visionnement
intégral par l'intéressé ou autoscopie, la lecture-recours
qui est une sélection des passages significatifs et la lecture
interactionniste qui permet d'analyser la structure du document (Wagner, 1992).
Mais les débats entre les auteurs ont tourné surtout autour de
l'autoscopie, notamment sur son efficacité pédagogique.
47
Les questions principales qui ont fait l'objet d'étude
concernant l'efficacité pédagogique de l'autoscopie ont
consisté à savoir si cette dernière permet une prise de
conscience d'erreurs ou de maladresses et si elle favorise un changement de
comportements et une correction de ces erreurs.
C'est ainsi que pour Fauquet et Strasfogel, cités par
Wagner (1992), l'autoscopie facilite la prise de conscience d'erreurs ou
d'imperfections résultant de manquements aux règles d'un
système pédagogique de référence. Pour le
deuxième volet de la question, Wagner estime que l'autoscopie à
elle seule ne permet pas une modification de comportement ou un changement
d'attitudes. Il faut la lier à la présence et à
l'influence du formateur et des pairs et, aux modèles de
référence proposés en amont.
De son côté, Linard (1985) affirme que
l'autoscopie conduit soit au désir de changement soit aux blocages
défensifs les plus subtils :
[...] en multipliant les occasions de constater par
soi-même, et sur soi-même, à quel point un comportement
n'est que le signe visible, de surface, d'une activité profonde,
complexe et contradictoire certes, mais qui seule lui donne structure et sens,
en précipitant les écarts, décalages et «
bougés » de tous ordres dans nos habitudes perceptives et mentales
(p. 64).
De ce débat, nous pouvons retenir que non seulement
l'autoscopie permet la prise de conscience de l'inadéquation ou de
l'inefficacité d'un comportement initial mais aussi, combinée
à d'autres éléments de la formation, elle peut être
un facteur de motivation au changement. Elle peut, en outre, être aussi
source d'inhibition du stagiaire.
Deux exigences semblent importantes pour obtenir une lecture
optimale d'une bande enregistrée : définir les tâches des
futurs maîtres pour combiner efficacement différents types
d'analyses de la séquence et choisir des techniques de lecture
adaptées aux objectifs de la formation. Selon Wagner (1992), si l'outil
vidéo n'est pas intégré dans une méthode de travail
rigoureuse, il « risque de ne soutenir que médiocrement les
objectifs poursuivis et même perturber les sujets en apprentissage
plutôt que de les aider à se perfectionner » (p. 64).
Cette question de perturbation psychologique ou non des futurs
maîtres lors de l'autoscopie a également suscité beaucoup
de débats.
48
En effet, vue sous l'angle psychologique, l'autoscopie
constitue chez plusieurs auteurs (Albero, 2004 ; Allen et Ryan, 1969/1972 ;
Wagner, 1992) une expérience relativement pénible pour la plupart
des futurs maîtres.
Ainsi, Albero souligne que plusieurs expériences ont
démontré « en quoi l'autoscopie touchant au sentiment
d'identité des personnes peut avoir des effets très divers,
positifs et négatifs, sur les attitudes et les conduites d'apprentissage
et doit être pratiquée avec précaution » (p. 22).
Allen et Ryan parlent de « effet cosmétique » (p. 58) chez les
stagiaires pour désigner leurs préoccupations relatives à
l'apparence physique (coiffure par exemple) et aux manières personnelles
(façon d'éviter le regard des élèves par exemple).
Wagner parle, elle, de « choc autoscopique » (p. 163) pour
évoquer le sentiment de bouleversement d'identité chez les futurs
maîtres et le décalage entre la perception subjective qu'ils ont
d'eux-mêmes et la perception objective à l'écran.
En définitive, la vidéo est un outil à la
fois redoutable et relatif. Il est redoutable car il met en doute
l'unité imaginaire et idéale de la personne filmée et il
est relatif car il ne vaut que ce que valent ses utilisateurs (Wagner, 1992).
Un entraînement des formateurs à l'utilisation de la
bande-vidéo est donc indispensable si l'on veut réussir le
M-E.
Après avoir fait le point sur la littérature
traitant du problème en question tout passant en revue les
différentes théories permettant d'établir le lien entre le
phénomène observé et le domaine de la recherche, le choix
d'une méthode de travail s'impose à présent. Il nous faut
non seulement choisir une méthode d'investigation mais aussi
déterminer la population d'étude et dresser les plans de collecte
et d'analyse des données : c'est l'objet du chapitre suivant qu'est la
méthodologie.
49
CHAPITRE 4 : MÉTHODOLOGIE
1.1. Approche méthodologique
1.2. Échantillonnage
1.3. Techniques et outils de collecte des données
1.4. Étapes de collecte des données
1.5. Techniques et plans d'analyse des données
1.6. Limites de l'étude
50
CHAPITRE 4 : MÉTHODOLOGIE
Le présent chapitre, composé de six parties,
présente tout d'abord la démarche méthodologique de cette
étude (4.1). Ensuite, il aborde l'échantillonnage (4.2), les
techniques et outils de collecte des données (4.3) et les étapes
de collecte des données (4.4). Enfin, il identifie les techniques et
plans d'analyse des données (4.5) et les limites de notre étude
(4.6).
4.1. Approche méthodologique
La présente étude fait recours à une
approche méthodologique mixte. Elle associe la démarche
quantitative et la démarche qualitative. L'utilisation de cette approche
tient de la volonté de vouloir recueillir le maximum d'informations
auprès des participants.
4.2. Échantillonnage
L'analyse des obstacles liés à la mise en oeuvre
du M-E concerne trois catégories d'acteurs, à savoir les
responsables administratifs, les formateurs et les futurs maîtres de
l'ENI/TT.
Pour le premier sous-groupe, des neufs agents que compte
l'administration, nous avons éliminé quatre car n'ayant pas de
lien direct avec la formation des futurs maîtres. Nous avons donc retenu
cinq responsables administratifs, choisis chacun, en fonction du poste
occupé. Il s'agit du directeur général, du directeur des
études, du responsable de stages et des deux surveillants
généraux.
Pour le second sous-groupe, c'est-à-dire les
formateurs, nous avons retenu l'ensemble des unités puisque c'est une
sous-population qui a une taille réduite, c'est-à-dire 37.
En ce qui concerne le troisième sous-groupe,
c'est-à-dire les futurs maîtres, l'étude a retenu
l'échantillonnage de type probabiliste qui repose sur le principe de la
randomisation (sélection au hasard ou aléatoire) ou de la chance.
En vue d'obtenir une taille d'échantillon suffisante chez ce
sous-groupe, l'échantillonnage stratifié a été
retenu. Cela a permis de diviser les futurs maîtres en trois groupes
mutuellement exclusifs ou strates (Bertrand, 1986) : la strate 1 pour les I, la
strate 2 pour les IA de la 1e année et la strate 3 pour les
IA de la 2e année avec comme variables le cycle de formation et le
sexe.
51
Étant donné que tous les cycles de l'ENI/TT sont
mixtes, la stratification donne la configuration suivante : strate 1: 28 filles
et 18 garçons, soit un sous-total de 46 futurs maîtres ; strate 2
: 507 filles et 171 garçons, soit un sous-total de 678 futurs
maîtres ; strate 3 : 272 filles et 139 garçons, soit un sous-total
de 411 futurs maîtres.
En récapitulant, il est aisé de constater que
l'ENI/TT compte, pour l'année scolaire 2012-2013, 807 filles et 328
garçons, soit un total de 1 135 futurs maîtres.
Selon Kakai (2008), à défaut de formules
statistiques, le chercheur peut, suivant la taille de la population
mère, retenir 1/3, 1/2 ou 1/10 de cette population. Ici, nous avons
retenu comme taille de l'échantillon du sous-groupe des futurs
maîtres 1/10 de cette population cible ; ce qui donne un
échantillon de 114 participants, soit 81 filles et 33 garçons.
Tous les 114 participants ont été
sélectionnés selon un échantillonnage aléatoire
simple stratifié et sans remplacement (chaque entrée
échantillonnée ne peut être sélectionnée
qu'une seule fois).
Ainsi, dans un premier temps, nous nous sommes servi des
cahiers d'absences des 23 classes concernées par cette étude pour
éliminer par classe tous les futurs maîtres qui s'étaient
absentés auparavant plus de dix fois au cours de l'année. Partant
de là, nous avons établi pour chacune des classes une liste de
futurs maîtres censés faire partie de l'échantillon.
Dans un second temps, nous avons réparti par strate les
114 futurs maîtres participant à l'enquête en appliquant la
formule de 1/10. Ce qui nous a donné la nouvelle configuration suivante
: pour la strate 1 : 3 filles et 2 garçons, soit un sous-total de 5
futurs maîtres ; pour la strate 2 : 51 filles et 17 garçons, soit
un sous-total de 68 futurs maîtres ; pour la strate 3 : 27 filles et 14
garçons, soit un sous-total de 41 futurs maîtres.
Chez les I (FP 11) ou strate 1, nous avons
procédé directement au tirage au sort pour répartir les
trois filles et les deux garçons. Pour les autres cycles, nous avons
procédé également à des tirages au sort mais
souvent avec plusieurs tours.
C'est ainsi que pour les IA1 ou strate 2, au premier tour du
partage, nous avons attribué à chacune des 12 classes,
c'est-à-dire de la FP 12 à la FP 23, quatre filles et un
garçon. Au second tour, nous avons tiré au sort pour attribuer
une fille de plus à trois classes
52
(FP 13 ; 16 et 17). Au troisième tour, nous avons
attribué également par tirage au sort un garçon de plus
à cinq classes (FP 12 ; 14 ; 19 ; 20 et 23) tout en prenant soin
d'éliminer de ce tirage les trois classes qui avaient
bénéficié d'une fille de plus.
Pour les IA2 ou strate 3, nous avons réparti aussi le
nombre de participants par classe. Ainsi, au premier tour du partage nous avons
attribué à chacune des 10 classes, c'est-à-dire de la FP 1
à la FP 10, deux filles et un garçon. Au second tour, nous avons
tiré au sort pour attribuer une fille de plus à sept classes (FP
1 ; 3 ; 4 ; 5 ; 7 ; 8 et 9). Au troisième tour, nous avons
attribué un garçon de plus aux trois classes restantes (FP 2 ; 6
et 10). Mais comme il restait encore un garçon, nous avons
procédé à un dernier tirage au sort d'une classe sans
exception. C'est ainsi que la FP 9 s'est retrouvée avec le dernier
garçon qui restait.
En résumant, la répartition des futurs
maîtres par classe au niveau des cycles IA1 (ou strate 2) et IA2 (ou
strate 3) se présente comme suit : quatre filles et deux garçons
pour chacune des cinq classes (FP 12 ; 14 ; 19 ; 20 et 23), quatre filles et un
garçon pour chacune des quatre classes (FP 15 ; 18 ; 21 et 22), cinq
filles et un garçon pour chacune des trois classes (FP 13 ; 16 et 17),
trois filles et deux garçons pour la FP 9, trois filles et un
garçon pour chacune des six classes (FP 1 ; 3 ; 4 ; 5 ; 7 et 8) et enfin
deux filles et deux garçons pour chacune des trois classes (FP 2; 6 ; et
10).
Enfin, nous avons procédé au tirage au sort des
noms par strate en fonction du genre et du nombre de sujets impartis à
chaque classe.
Sachant que la population totale de ce sous-groupe est de 1
135 futurs maîtres et la taille de l'échantillon 114 sujets, nous
pouvons calculer la probabilité d'un sujet d'être inclus dans
l'échantillon. Ce qui donne : (114 : 1 135) x 100 % = 10 %. Cela
signifie que chaque futur maître inscrit sur la liste aurait 1 chance sur
10 d'être sélectionné. Le tableau 5 présente la
structure de notre échantillon.
Tableau 5
Structure de l'échantillon
Effectifs
|
Formateurs
37
|
Futurs maîtres
114
|
Responsables administratifs
5
|
Effectif total
156
|
53
4.3. Techniques et outils de collecte de données
4.3.1. Techniques de collecte des
données
Deux types de données sont utilisés pour la
présente recherche : des données quantitatives et des
données qualitatives. Pour ce faire, nous nous sommes servis de deux
techniques pour procéder à la collecte. Il s'agit de
l'enquête par le questionnaire et de l'entretien semi-directif. Baribeau
et Germain (2010) soulignent qu'au sens de plusieurs auteurs, l'entretien qui
suit un questionnaire permet de dépasser l'imposition d'une
signification donnée par les réponses au questionnaire. De
même, lorsque le questionnaire suit un entretien, les discussions des
participants, lors de cet entretien, permettent d'adapter leur vocabulaire
à celui utilisé par les participants auxquels le questionnaire
est adressé.
4.3.1.1. L'enquête par le
questionnaire
Cette technique a été utilisée pour
rencontrer 114 futurs maîtres et 37 formateurs de l'ENI/TT. Cependant,
l'enquête par le questionnaire ne présente pas souvent
réellement les perceptions des répondants. C'est pourquoi, une
deuxième technique de collecte de données a été
utilisée.
4.3.1.2. L'entretien semi-directif
Dans le but d'apprendre davantage sur les déterminants
du phénomène observé et saisir en profondeur l'ensemble de
la situation étudiée, le chercheur peut utiliser la technique de
l'entretien semi-directif. C'est dans ce sens que nous avons utilisé
cette technique pour recueillir des données originales auprès des
formateurs et des responsables administratifs en vue de connaître leurs
motivations, leurs expériences et leurs perceptions sur la mise en
oeuvre du M-E à l'ENI/TT.
Dans cette technique, le répondant est amené par
le chercheur à aborder un certain nombre de questions incontournables
mais avec possibilité de s'attarder sur celles qu'il juge plus
importantes et plus significatives (Giroux et Tremblay, 2002). Cette technique
a été utilisée auprès de 15 formateurs et 5
responsables administratifs. Selon Van Campenhoudt (2011), l'un des
intérêts de cette technique est : « la souplesse et la faible
directivité du dispositif qui permet de récolter des
témoignages et les interprétations des locuteurs en respectant
leurs cadres de références, leur langage et leurs
catégories mentales » (p. 172).
54
4.3.2. Outils de collecte des données
Deux types d'outils ont servi à la collecte des
données. Il s'agit du questionnaire et du guide d'entretien.
4.3.2.1. Les questionnaires
Deux questionnaires d'enquête ont été
construits à l'aide de questions fermées, c'est-à-dire des
questions proposant à l'enquêté des modalités de
réponses parmi lesquelles il en choisit celle qui convient au lieu
d'utiliser son propre vocabulaire pour répondre. Il s'agit de :
- Un questionnaire adressé aux futurs
maîtres20 pour recueillir des données sur leur niveau
d'implication dans la mise en oeuvre du M-E ;
- Et un questionnaire adressé aux
formateurs21 pour recueillir des données sur la mise en
oeuvre du M-E, notamment le niveau de formation des formateurs et la
disponibilité des ressources matérielles.
Le mode de questionnaire retenu est le questionnaire
autoadministré, c'est-à-dire que le répondant lit
lui-même les questions, répond et remet le questionnaire rempli au
chercheur. Ce mode de questionnaire permet une collecte efficace des
données (Van Campenhoudt et Quivy, 2011).
4.3.2.2. Les guides d'entretien
Deux guides d'entretien ont été
élaborés. Il s'agit d'un guide d'entretien avec les
formateurs22 et d'un guide d'entretien avec les responsables
administratifs23. Les deux guides d'entretien comportent chacun six
items. Tous les deux guides d'entretien ont été conçus
relativement aux objectifs et hypothèses de recherche.
4.4. Étapes de collecte des données
La collecte des données s'est déroulée en
deux phases. Une première phase a concerné le pré-test et
une seconde l'enquête proprement dite.
20 Voir annexe 1, outil 1.
21 Voir annexe 1, outil 2.
22 Voir annexe 1, outil 3.
23 Voir annexe 1, outil 4.
55
4.4.1. Le pré-test
Avant de démarrer l'opération proprement dite de
collecte des données, deux soirées ont été
consacrées pour mesurer la facilité de compréhension,
l'interprétation et le degré d'acceptabilité des
questionnaires. Pour ce faire, chaque questionnaire a été soumis,
en notre présence, à un nombre restreint d'individus qui
présentent les caractéristiques exigées des membres de la
population cible. Ainsi, le pré-test a concerné 38 futurs
maîtres et 8 formateurs. Les deux questionnaires ont été
administrés dans la salle de réunions de l'ENI/TT.
Deux matinées ont été également
consacrées pour tester les guides d'entretien. C'est ainsi que nous
avons rencontré cinq formateurs et deux responsables administratifs.
Tous les deux entretiens ont été réalisés et
enregistrés intégralement dans la salle des formateurs.
Nous avons pris soin de noter, à chaque rencontre, les
différents réajustements à faire au niveau de chaque outil
de collecte des données et de mesurer le temps matériel que les
activités à venir pourront nous prendre. Cette phase de
pré-test nous a permis d'affiner davantage ces différents outils
(questionnaires et guides d'entretien) retenus.
4.4.2. L'enquête proprement dite
L'opération proprement dite de collecte des
données s'est déroulée à l'ENI/TT en quatre phases
et a duré sept jours, du lundi 17 juin au dimanche 23 juin 2013.
La première phase a consisté à
administrer le premier questionnaire aux futurs maîtres. C'est ainsi que
nous avons consacré dans la matinée du lundi une heure de temps
aux 5 participants du cycle Instituteurs. Dans la soirée, nous avons
rencontré les 68 participants de la 1e année du cycle
Instituteurs adjoints. Le lendemain matin, nous avons soumis le questionnaire
aux 41 participants de la 2e année du cycle Instituteurs
adjoints. Tous les participants des trois niveaux (I, IA1 et IA2) ont
répondu au même questionnaire. Les membres de chaque groupe ont
répondu dans les mêmes conditions, c'est-à-dire en
même temps et dans la salle de réunions de l'ENI/TT.
La deuxième phase a été l'occasion
d'administrer le deuxième questionnaire aux formateurs. Ainsi, nous
avons remis le mardi soir 37 exemplaires du questionnaire au
délégué des formateurs. Celui-ci, à son tour, a
distribué ces documents aux différents responsables
d'Unités pédagogiques (UP). C'est ainsi que chaque participant a
retiré un exemplaire du questionnaire auprès de son responsable
d'UP. Deux jours ont été accordés aux formateurs
56
pour répondre au questionnaire et le déposer
auprès des responsables d'UP. Ces derniers ont pris la journée du
vendredi pour remettre le travail au délégué des
formateurs qui nous a remis, le même jour, les différents paquets
au fur et à mesure qu'il les recevait.
La troisième phase a été celle de la
réalisation des entretiens avec les formateurs. À cette occasion,
nous avons constitué trois groupes pluridisciplinaires composés
chacun de cinq participants volontaires. Tous les trois entretiens ont
été enregistrés à l'aide d'un magnétophone
dans la salle des formateurs mais de façon séparée. C'est
ainsi que le premier entretien a eu lieu le samedi 22 juin 2013 à partir
de 10 h 22 minutes et a duré 25 minutes et 22 secondes. Le second et le
troisième ont été réalisés le même
jour que le premier, l'un à 11 h 05 minutes et l'autre à 11 h 38
minutes. Ils ont duré respectivement 23 minutes, 47 secondes et, 27
minutes, 25 secondes.
La dernière phase a concerné la
réalisation de l'entretien avec cinq responsables administratifs. Cet
entretien, à l'instar des trois premiers, a été
enregistré dans la salle des formateurs. Il a été
réalisé le dimanche 23 juin 2013 à partir de 17 h 30
minutes et a duré 29 minutes et 32 secondes. C'est le plus long de nos
entretiens.
4.5. Techniques et plans d'analyse des
données
4.5.1. Techniques d'analyse des
données
Le présent travail fait recours à deux
techniques d'analyse de données : l'analyse statistique des
données et l'analyse de contenu. La première sert à
traiter les données quantitatives et la seconde traite les
données qualitatives.
L'analyse statistique des données permet la description
simple de l'information (tris à plat, par exemple) et la
compréhension des réponses (tableaux croisés) par l'examen
des tableaux en prenant en compte non pas une seule variable mais deux ou trois
à la fois (Berthier, 1998 ; Van Campenhoudt et Quivy, 2011).
L'analyse de contenu, quant à elle, permet de
détecter les idées principales contenues dans un discours (verbal
ou écrit) en vue de les décrire et de les interpréter.
Pour Van Der Maren (1996), elle permet de « condenser, résumer ou
éclairer, systématiser le contenu de la pensée d'un ou de
plusieurs énonciateurs ou encore examiner l'évolution et
l'importance relative de différentes énonciations
réparties dans le temps et dans l'espace » (p. 414). Le
57
choix de l'analyse de contenu a été
motivé par le souci de décrire les représentations des
formateurs et des responsables administratifs, leur expérience sur la
mise en oeuvre du M-E à l'ENI/TT.
4.5.2. Plans d'analyse des données
Pour l'analyse statistique des données, nous avons
utilisé le logiciel SPSS (Statistical package for the social sciences),
version 19.0. C'est ainsi que deux dictionnaires de codes (Berthier, 1988) ont
été élaborés pour l'introduction des données
dans le logiciel. Il s'agit d'un dictionnaire pour les codes du questionnaire
adressé aux futurs maîtres et d'un dictionnaire pour les codes du
questionnaire adressé aux formateurs.
Concernant l'analyse de contenu, c'est la technique des
catégories qui a été utilisée. Nous avons
procédé au décompte manuel des fréquences des
citations. Ainsi, au terme de ce décompte, il ressort 32
catégories chez les formateurs et 25 chez les responsables
administratifs. L'analyse a pris fin avec le traitement statistique des
données (Bardin, 1991) à l'aide du tableur classique qu'est Excel
(office 2007).
Ensuite, nous avons procédé à la
combinaison des données qualitatives et quantitatives. Enfin, pour
construire une explication optimale du phénomène à
l'étude, nous nous sommes inspirés du modèle IAC
(Infrastructure, Autorité, Consensus) utilisé par Havelock et
Huberman (1980) pour étudier les problèmes de l'éducation
en matière d'innovation dans les pays en développement.
Dans ce modèle, l'Infrastructure (I)
désigne l'efficacité de l'ensemble du mécanisme de
solution au problème en question. Selon Havelock et Huberman, une bonne
infrastructure suppose : (i) une définition correcte des besoins, (ii)
une analyse correcte du problème, (iii) une solution appropriée
et matériellement réalisable et, (iv) une mise en oeuvre rapide
et fiable. L'Autorité (A) englobe à la fois le pouvoir,
le contrôle et l'encadrement. Pour ces deux auteurs, « une forte
autorité efficace signifie qu'il y a des personnes qui font en sorte
qu'un besoin soit reconnu, que le problème soit étudié,
qu'une solution soit trouvée et qu'elle soit appliquée de
façon suivie » (p. 110). Le Consensus (C), quant à
lui, exprime le fait que les personnes participant à l'innovation
(administrateurs ou public cible) approuvent les objectifs fixés et la
manière de les atteindre.
58
Outre ces trois concepts de base du modèle, Havelock et
Huberman (1980) ajoutent un quatrième, les Ressources (R). Par
celles-ci, il faut entendre non seulement un personnel hautement
qualifié, une bonne infrastructure technique et de communication mais
aussi et surtout le capital nécessaire pour fournir l'un et l'autre.
Mais ils ne tiennent pas compte de cette composante dans leur étude,
pour la simple raison que, selon eux : « [...] dans la pratique,
l'insuffisance des ressources est un handicap commun à tous les pays en
développement » (p. 111). Cependant, dans le cadre de la
présente étude, nous adaptons ce modèle en
intégrant les ressources d'où le nouveau modèle IACR.
4.6. Limites de l'étude
Comme première limite, nous citerons, ici, celle
liée à tout entretien de groupe, c'est-à-dire
l'insuffisance de temps pour approfondir le sujet abordé. Par ailleurs,
dans l'entretien de groupe, certains participants ne s'expriment pas en
présence de leurs pairs tandis que d'autres monopolisent la parole.
Quand les participants veulent s'exprimer en même temps, il est souvent
difficile, pour le chercheur, de canaliser les prises de parole. De plus, les
participants s'influencent mutuellement.
Une autre limite de cette étude, non moins importante,
c'est d'avoir choisi une seule ENI comme cadre d'étude. Cette limite est
liée au manque de moyens financiers pour la conduite de l'étude
dans divers établissements du pays.
Enfin, une dernière limite à relever, c'est le
fait que nous connaissons presque tous les formateurs et responsables
administratifs pour avoir servi dans cet établissement pendant deux ans.
Mais pour éviter de biaiser nos résultats, nous nous sommes
présenté à eux non en tant que collègue de service
mais en tant que chercheur. C'est pour cela qu'il a été
demandé aux formateurs de répondre au questionnaire à
notre absence. Notre présence pourrait certainement influencer les
réponses des participants.
Le chapitre que nous venons d'achever a présenté
dans les détails le cheminement méthodologique de ce travail. Le
chapitre suivant a pour objet la présentation, l'analyse et
l'interprétation des résultats.
59
CHAPITRE 5 : PRÉSENTATION DES
RÉSULTATS
5.1. Présentation des résultats
5.2. Analyse et interprétation des résultats
60
CHAPITRE 5 : PRÉSENTATION DES
RÉSULTATS
Le chapitre 5 s'articule autour de deux parties principales.
La première (5.1) présente les résultats des travaux. La
deuxième (5.2) concerne l'analyse et l'interprétation des
données. Cette analyse est axée sur la discussion des
résultats et la vérification des hypothèses.
5.1. Présentation des résultats
Nous avons distingué six thématiques concernant
la présentation des résultats : les caractéristiques
sociodémographiques des enquêtés, le niveau de formation en
M-E, les appréciations sur les ressources matérielles du M-E, la
pratique du M-E, les obstacles à sa mise en oeuvre et les
différentes suggestions. Les données qualitatives sont issues
d'entretiens avec 15 formateurs et 5 responsables administratifs. Les
données quantitatives sont issues de deux questionnaires dont l'un
adressé aux 37 formateurs et l'autre à 114 futurs maîtres
de l'ENI/TT.
5.1.1. Caractéristiques sociodémographiques
des enquêtés
Les caractéristiques sociodémographiques
concernent le genre des formateurs, des responsables administratifs et des
futurs maîtres, leur âge, le niveau d'études des formateurs
et des responsables administratifs, leur durée dans
l'établissement et la répartition des formateurs par
discipline.
5.1.1.1. Genre des formateurs et des responsables
administratifs
Presque la totalité des formateurs et des responsables
administratifs sont des hommes. Seule une femme (soit 3 %) figure dans
l'équipe des formateurs. Le même constat est observé chez
les responsables administratifs. Le tableau 6 présente le genre de ces
deux catégories d'enquêtés.
Tableau 6
Répartition des formateurs et des responsables
administratifs par sexe
Total
Formateurs Responsables
administratifs
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Féminin
|
1
|
3
|
1
|
20
|
2
|
5
|
Masculin
|
36
|
97
|
4
|
80
|
40
|
95
|
Total
|
37
|
100
|
5
|
100
|
42
|
100
|
Source : Enquête terrain
61
Le genre féminin est hautement
sous-représenté à l'ENI/TT tant dans l'encadrement que
dans l'administration. Plusieurs facteurs pourraient expliquer cette situation.
D'abord, les agents de l'État en général et les femmes en
particulier préfèrent le bureau plutôt que d'enseigner.
L'accès au bureau est aussi plus facile aux femmes, du fait de leur
féminité, qu'aux hommes ; l'enseignement demandant plus d'efforts
que le bureau. Ensuite, des contraintes conjugales font en sorte que beaucoup
de femmes ne peuvent exercer le métier d'enseignant. Enfin, une
dernière raison qui semblerait expliquer la
non-représentativité des femmes, c'est le fait que l'ENI/TT est
en région, loin de la capitale où chacun voudrait servir. Toutes
les autres ENI vivent presque la même situation sinon pire que
Tillabéry concernant le genre. Ainsi, en 2010-2011, parmi les 190
formateurs d'ENI que comptait le Niger, on dénombrait seulement cinq
femmes dont deux à Dosso, deux à Maradi et une à Zinder
(MEN/A/PLN, 2011).
5.1.1.2. Genre des futurs maîtres
Pour les futurs maîtres, l'enquête a
concerné 71 % de filles et 29 % de garçons ; les filles
étant plus nombreuses que les garçons dans tous les cycles. Le
tableau 7 donne les détails des résultats concernant le genre des
futurs maîtres.
Tableau 7
Répartition des futurs maîtres par sexe et
par cycle
I IA1 IA2 Total
Effectif % Effectif % Effectif % Effectif %
Féminin
|
3
|
60
|
51
|
75
|
27
|
66
|
81
|
71
|
Masculin
|
2
|
40
|
17
|
25
|
14
|
34
|
33
|
29
|
Total
|
5
|
100
|
68
|
100
|
41
|
100
|
114
|
100
|
Source : Enquête terrain
Les chiffres ci-dessus pourraient s'expliquer par une tendance
à aller de plus en plus vers la féminisation du métier
d'enseignant. Ainsi, de 5 183 en 2000-2001, le nombre d'enseignantes du
primaire est passé à 22 133 en 2010-2011 (MEN/A/PLN, 2011), soit
une augmentation moyenne de l'ordre de 1 695 enseignantes par an. Le secteur de
l'éducation attire, ces dernières années, beaucoup plus
les filles que les garçons. Si ces tendances se poursuivent, les
disparités entre les genres concernant le TBS pourront être
réduites. En 2011, le TBS était estimé à 84,9 %
chez les garçons contre 67,3 % chez les filles (MEN/A/PLN, 2011).
62
La répartition de la population nigérienne en
matière de genre est aussi un facteur favorisant cette
inégalité. En effet, sur les 17 129 076 d'habitants que comptait
le Niger en 2013, les femmes occupaient 50,6 % (Ministère des finances
[MF], 2013).
5.1.1.3. Âge des enquêtés
Plus de la moitié des futurs maîtres est jeune.
Ainsi, 53 % d'entre eux se situent dans la tranche d'âge de 18 à
23 ans. Les formateurs se situent, à 38 %, dans la tranche d'âge
de 48 à 53 ans. Quant aux responsables administratifs, dans leur grande
majorité, ils ont plus de 53 ans. Le tableau 8 présente cette
situation.
Tableau 8
Répartition des enquêtés selon leur
âge
|
|
Formateurs
|
Futurs maîtres
|
Responsables administratifs
|
Pourcentage
|
|
Moins de 18 ans
|
0
|
1
|
0
|
1
|
|
18-23 ans
|
0
|
61
|
0
|
39
|
|
24-29 ans
|
0
|
34
|
0
|
22
|
|
30-35 ans
|
0
|
18
|
0
|
12
|
|
36-41 ans
|
10
|
0
|
0
|
6
|
|
42-47 ans
|
10
|
0
|
0
|
6
|
|
48-53 ans
|
14
|
0
|
2
|
10
|
|
Plus de 53 ans
|
3
|
0
|
3
|
4
|
Total
|
|
37
|
114
|
5
|
100
|
Source : Enquête terrain
Le tableau 8 indique que l'âge des enquêtés
varie de moins de 18 ans à plus de 53 ans. Aucun futur maître ne
se trouve dans une même classe d'âge que son formateur, encore
moins qu'un responsable administratif. Les responsables administratifs sont
encore plus âgés, pour leur grande majorité. Dans ce cas,
le droit d'aînesse, encore entretenu dans nos sociétés
africaines, contribue à la consolidation des rapports entre d'une part
l'administration et les futurs maîtres et, l'administration et les
formateurs, de l'autre.
5.1.1.4. Niveau d'études des formateurs et des
responsables administratifs
Il ressort de cette étude que plus de la moitié
des formateurs, soit 51 %, sont des Chargés d'enseignement (CE),
c'est-à-dire des agents ayant franchi le premier cycle
63
universitaire. Ils sont suivis des Conseillers
pédagogiques (ou P/CEG) avec 35 % et des Inspecteurs de l'enseignement
de base (IEB) avec 11 %, formés tous à l'ENS de l'UAM de Niamey.
En dehors de ces trois niveaux d'études, on trouve parmi les
responsables administratifs des Instituteurs adjoints (IA), c'est-à-dire
des enseignants du primaire. Ils constituent, de même que les IEB, 40 %
de ce personnel. Le tableau 9 illustre cette situation.
Tableau 9
Niveau d'études des formateurs et des
responsables administratifs
|
Grade
|
Formateurs
Effectif %
|
Responsables administratifs
Effectif %
|
Total
Effectif %
|
|
IA
|
0
|
0
|
2
|
40
|
2
|
5
|
|
P/CEG
|
13
|
35
|
0
|
0
|
13
|
31
|
|
CE
|
19
|
51
|
0
|
0
|
19
|
45
|
|
IEB
|
4
|
11
|
2
|
40
|
6
|
14
|
|
PES
|
1
|
3
|
1
|
20
|
2
|
5
|
Total
|
|
37
|
100
|
5
|
100
|
42
|
100
|
Source : Enquête terrain
La lecture de ce tableau permet de dire que concernant les
formateurs, les dispositions de l'arrêté n° 93 MEBA/DGEB/DFIC
du 15 mai 2006 portant statut des personnels d'encadrement, d'administration et
de gestion des ENI24 sont respectées. Par contre, du
côté de l'administration, l'autorité politique peine
à respecter ses propres textes. En effet, pour être surveillant
général, par exemple, il faut être Instituteur avec une
expérience d'au moins vingt ans (Chapitre III de l'arrêté
ci-haut). Ce qui n'est pas le cas ici où ils sont tous Instituteurs
adjoints. Ces postes sont devenus plutôt politiques que techniques
malgré les nombreux appels à la dépolitisation de
l'administration nigérienne en général et du secteur de
l'éducation en particulier.
5.1.1.5. Durée des formateurs et des responsables
administratifs à l'ENI/TT
L'enquête révèle que 81 % des formateurs
ont une ancienneté comprise entre un et dix ans à l'ENI/TT. Seuls
3 % d'entre eux ont moins d'un an de service dans cet établissement.
24 Infra p. 16.
64
Du côté des responsables administratifs, plus de
leur moitié n'a pas encore dépassé cinq ans dans cette
école. Ces tendances sont consignées dans le tableau 10.
Tableau 10
Ancienneté des formateurs et des responsables
administratifs à l'ENI/TT
Total
Formateurs Responsables
administratifs
|
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
|
Moins de 1 an
|
1
|
3
|
1
|
20
|
2
|
5
|
|
1-5 ans
|
19
|
51
|
2
|
40
|
21
|
50
|
|
6-10 ans
|
11
|
30
|
0
|
0
|
11
|
26
|
|
Plus de 10 ans
|
6
|
16
|
2
|
40
|
8
|
19
|
Total
|
|
37
|
100
|
5
|
100
|
42
|
100
|
Source : Enquête terrain
Ce tableau indique qu'il n'y a pas un assez grand écart
entre le nombre des formateurs ayant séjourné longtemps à
l'ENI/TT et ceux nouvellement venus. Ceci pourrait aplanir le climat social,
souvent tendu, entre enseignants d'un grand établissement comme l'ENI/TT
et concourir ainsi au bon fonctionnement du service ; toutes choses qui
pourraient avoir des répercussions sur le déroulement normal des
cours, surtout lorsqu'il s'agit de travailler en UP. Mais du côté
des responsables administratifs, l'éternel partage de postes politiques,
surtout du directeur général et du directeur des études,
fait que le premier responsable de cet établissement n'a même pas
un an à son poste au moment de l'enquête. Cela affecte gravement
la stabilité de l'administration et par ricochet, la qualité de
la gestion de l'école.
5.1.1.6. Répartition des formateurs par
discipline
À l'ENI/TT, interviennent 37 formateurs répartis
dans huit disciplines. Les plus nombreux, soit 27 %, sont ceux enseignant la
didactique (pédagogie spéciale et pratique). Ils sont suivis par
les psychopédagogues avec 16 %. Le tableau 11 illustre la distribution
des formateurs par discipline.
65
Tableau 11
Répartition des formateurs par
discipline
|
|
Effectif
|
Pourcentage valide
|
Pourcentage cumulé
|
|
Didactique
|
10
|
27
|
27
|
|
Psychopédagogie
|
6
|
16
|
43
|
|
Français contenu
|
5
|
13
|
56
|
|
Langues nationales
|
4
|
11
|
67
|
Discipline
|
Maths contenu
|
4
|
11
|
78
|
|
Sociologie
|
4
|
11
|
89
|
|
Morale
|
3
|
8
|
97
|
|
EPS
|
1
|
3
|
100
|
|
Total
|
37
|
100
|
|
Source : Enquête terrain
Dans ce tableau, la répartition des formateurs tient
compte du volume horaire des différentes disciplines enseignées
à l'ENI/TT25 et de l'importance même de celles-ci dans
la formation des futurs maîtres.
C'est pourquoi, avec 114 heures par an chez les I, 162 heures par
an chez les IA1 et 90 heures par an chez les IA2 (soit 6 heures par semaine et
par niveau), la didactique se retrouve avec le plus grand nombre de
formateurs.
La psychopédagogie qui totalise 76 heures par an chez les
I, 108 heures par an chez les IA1 et 60 heures par an chez les IA2 (soit 4
heures par semaine et par niveau) vient en seconde position.
Ces deux disciplines sont fondamentales dans la formation d'un
enseignant. La maîtrise de la pédagogie et de la psychologie de
l'enfant constitue le socle de cette formation.
À ces deux disciplines de base, il faut adjoindre la
maîtrise du français. C'est pourquoi cette discipline totalise,
à elle seule, 13 % des formateurs.
25 Infra tableau 1.
66
5.1.2. Formation en M-E
La formation en M-E englobe à la fois le niveau
d'information des futurs maîtres, le niveau de formation des formateurs
et des responsables administratifs, le nombre de formations qu'ils ont
reçues ainsi que leur durée et leur qualité et, enfin le
niveau de maîtrise du filmage par les formateurs.
5.1.2.1. Niveau d'information des futurs maîtres
Le M-E est un concept qui est connu de tous les Instituteurs
(soit 100 %). Cependant, il n'est pas tout à fait familier dans les
autres niveaux. Le tableau 12 présente les détails de ces
résultats.
Tableau 12
État d'information des futurs maîtres sur
le M-E
I IA 1 IA 2 Total
Effectif % Effectif % Effectif % Effectif %
Informé
|
5
|
100
|
61
|
90
|
38
|
93
|
104
|
91
|
Non informé
|
0
|
0
|
7
|
10
|
3
|
7
|
10
|
9
|
Total
|
5
|
100
|
68
|
100
|
41
|
100
|
114
|
100
|
Source : Enquête terrain
Le tableau 12 montre que l'écrasante majorité
(91 %) des futurs maîtres a entendu parler du M-E. Chez les I, cela est
dû au fait que la plupart d'entre eux est passée par le cycle IA
avant d'obtenir le Baccalauréat pour se retrouver dans cette classe.
Une autre raison qui pourrait expliquer cette situation est
que les I sont réunis dans une seule et même classe. Il est donc
très plausible que le M-E soit évoqué dans cette classe
par les formateurs, sachant que la formation ne dure qu'une année dans
ce cycle.
5.1.2.2. Niveau de formation des formateurs et des
responsables administratifs
Une frange importante des formateurs, soit 38 %, affirme
n'avoir jamais été formée en M-E. Plus de la moitié
des responsables administratifs se trouve dans la même situation. Le
tableau 13 atteste ces résultats.
67
Tableau 13
État de la formation des formateurs et des
responsables administratifs
Formateurs Responsables
administratifs
|
Total
|
|
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
|
Formé
|
23
|
62
|
2
|
40
|
25
|
60
|
|
Non formé
|
14
|
38
|
3
|
60
|
17
|
40
|
Total
|
|
37
|
100
|
5
|
100
|
42
|
100
|
Source : Enquête terrain
Le tableau ci-dessus montre que la formation en M-E est loin
d'être complète à l'ENI/TT. Les responsables administratifs
et les formateurs, premiers concernés par la mise en oeuvre de cette
innovation pédagogique, attendent toujours d'être
formés.
Concernant les responsables administratifs, le manque de
formation s'est gravement répercuté sur le suivi de la mise en
oeuvre du M-E. Ainsi, aucun de ces agents n'a effectué une séance
de suivi de préparation, de présentation ou de visionnement d'une
séquence de M-E.
Chez les formateurs, l'insuffisance de la formation a fait
qu'une écrasante majorité d'entre eux ne pratique pas le M-E et
même ceux qui veulent le faire ignorent la vraie démarche à
suivre.
5.1.2.3. Nombre de formations reçues en M-E
Les deux responsables administratifs formés dans le
cadre du M-E ont reçu une seule session de formation. Les formateurs,
eux, n'ont pas le même nombre de sessions de formation. Ainsi, 43 %
d'entre eux ont été formés une seule fois. Deux formateurs
seulement ont été formés plus de 4 fois. C'est du moins ce
qui ressort du tableau 14.
Tableau 14
Fréquence de formation des formateurs et des
responsables administratifs
|
|
Formateurs
|
Responsables administratifs
|
Total
|
Pourcentage
|
|
1 fois
|
10
|
2
|
12
|
48
|
|
2-4 fois
|
11
|
0
|
11
|
44
|
|
Plus de 4 fois
|
2
|
0
|
2
|
8
|
Total
|
|
23
|
2
|
25
|
100
|
Source : Enquête terrain
68
Le tableau 14 fait ressortir plusieurs sessions de formation
en M-E mais, pour la plupart du temps, ce sont des sessions occasionnelles. En
d'autres termes, le M-E est abordé dans des formations d'ordre
général dans le cadre de la mise en oeuvre du nouveau curriculum
des ENI. Dans les faits, une seule session de formation a concerné
uniquement le M-E. Cela explique le manque d'appropriation de la mise en oeuvre
de cette innovation pédagogique par les différents acteurs.
Ainsi, la pratique du M-E à l'ENI/TT laisse à désirer,
toutes choses qui ont pu inhiber la bonne marche de la formation des futurs
maîtres de cet établissement.
5.1.2.4. Durée de la formation en M-E
La formation des deux responsables administratifs n'a
duré qu'une seule journée. Du côté des formateurs,
des disparités importantes se dégagent quant à la
durée totale de leur formation. Ainsi, les formations varient d'un
à plus de sept jours. Le tableau 15 présente ces
disparités.
Tableau 15
Durée des formations des formateurs et des
responsables administratifs
|
Formateurs
|
Responsables administratifs
|
Total
|
1 jour
|
11
|
2
|
13
|
2-4 jours
|
9
|
-
|
9
|
5-7 jours
|
2
|
-
|
2
|
Plus de 7 jours
|
1
|
-
|
1
|
Total
|
23
|
2
|
25
|
Source : Enquête terrain
Le tableau 15 met en évidence le faible degré
d'importance accordée à la formation en M-E. Pour une formation
de ce niveau, on se retrouve, malheureusement, avec plus de la moitié
des acteurs (52 %) formés en une journée seulement. La
totalité des responsables administratifs formés se trouve dans
cette situation. Un seul formateur a bénéficié de plus de
sept jours de formation.
5.1.2.5. Qualité de la formation reçue
Les résultats du questionnaire, combinés
à ceux des entretiens semi-directifs avec les formateurs et les
responsables administratifs, font ressortir des appréciations
divergentes sur la qualité de la formation reçue. Ces avis sont
consignés dans la figure 1.

69
Figure 1
Appréciation de la formation en M-E
Source : Enquête terrain
La figure 1 montre que, pour la majorité des
participants, la formation est insuffisante. Cela est à lier directement
à la durée des formations et au nombre même des sessions de
formation en M-E. C'est aussi dû au fait que les formations
étaient purement théoriques et s'assimilaient plutôt
à une sensibilisation sur la préparation ordinaire de
leçons qu'à un apprentissage de présentation
d'aptitudes.
5.1.2.6. Niveau de maîtrise du filmage par les
formateurs
Une frange importante de formateurs (76 %) ne maîtrise
pas le filmage des leçons de M-E. Seulement 5 % s'estiment bien dans le
filmage. Le tableau 16 présente le niveau de maîtrise du filmage
des leçons de M-E par les formateurs.
Tableau 16
Répartition des formateurs selon leur niveau de
maîtrise du filmage
|
Effectifs
|
Pourcentage Valide
|
Pourcentage Cumulé
|
Nul
|
28
|
76
|
76
|
Passable
|
4
|
11
|
87
|
Bien
|
2
|
5
|
92
|
Sans avis
|
3
|
8
|
100
|
Total
|
37
|
100
|
|
Source : Enquête terrain
70
Le tableau 16 vient confirmer la faible appropriation du M-E
par les formateurs. Ceux qui ont reçu la formation ne l'ont pas
maîtrisée. Ainsi, deux formateurs seulement ont
développé la compétence à filmer. Cette situation
pourrait se comprendre par la simple raison que la formation avait
été purement théorique dans les rares fois qu'elle avait
eu lieu.
Même les formateurs qui s'estiment moyens ou bons dans
le filmage le sont presque non pas par la formation en M-E mais par leur
expérience personnelle car il n'y a jamais eu de manipulation de
caméras encore moins de séances de montage de films. Or, dans ce
genre de situation, l'action volontariste ne saurait se substituer à
l'action de l'État.
Cela a fait en sorte que les futurs maîtres n'ont jamais
pu bénéficier de la part des formateurs d'une formation au
filmage. Aussi suffirait-il d'un voyage ou d'une mutation des deux formateurs
qui savent filmer correctement pour qu'on arrête la production des films
de M-E à l'ENI/TT.
5.1.3. Appréciation des ressources
matérielles du M-E
Ici, on s'intéresse à l'état
d'équipement de la salle de M-E, à la disponibilité des
ressources matérielles, au niveau d'utilisation des salles et aux
modalités de gestion du matériel.
5.1.3.1. État d'équipement de la salle de
M-E
L'état d'équipement de la salle de M-E est
diversement apprécié par les formateurs. Les différents
avis varient de la salle bien équipée à la salle qui n'est
pas du tout équipée. Les différentes appréciations
des formateurs sur l'état d'équipement de la salle de M-E sont
présentées dans la figure 2.

71
Figure 2
Appréciation de l'état
d'équipement de la salle de M-E par les formateurs
Source : Enquête terrain
La figure 2 montre que la salle de M-E est bien
équipée. C'est dire que l'équipement de la salle ne
devrait pas être à la base du blocage de la mise en oeuvre du M-E.
Cependant 6 % des formateurs affirment que cette salle n'est pas du tout
équipée. Cela prouve une fois de plus que certains formateurs ne
s'intéressent pas au M-E. Cette situation pourrait s'expliquer par le
manque de sensibilisation sur le bien-fondé du M-E dans la formation
initiale des futurs maîtres. Cette situation a fait que la mise en oeuvre
du M-E est très faible à l'ENI/TT.
5.1.3.2. Disponibilité des ressources
matérielles
Les formateurs et les responsables administratifs citent un
lot important concernant les ressources matérielles du M-E. La figure 3
fait l'inventaire du matériel de M-E.

72
Figure 3
Inventaire des ressources matérielles du
M-E
Source : Enquête terrain
La figure 3 indique que le matériel de base pour mettre
en oeuvre le M-E est disponible à l'ENI/TT. C'est ainsi que la
quasi-totalité des formateurs et des responsables administratifs cite
comme ressources matérielles de M-E des caméras numériques
et des salles de cours. Un quart des répondants déclare
l'existence de postes téléviseurs pour le visionnement des films.
La moitié des répondants parle de la présence de
rétroprojecteurs. La figure 3 vient ainsi confirmer les données
de la figure 2. Cependant, une infime minorité des répondants dit
ne rien savoir en ce qui concerne ce matériel. Cela prouve qu'il y a
encore des formateurs qui n'ont jamais mis pied dans la salle de M-E et, par
ricochet, qui n'ont jamais pratiqué le M-E par manque de formation. Par
ailleurs, on peut expliquer cela par le fait que certains d'entre eux n'ont pas
duré à l'ENI/TT.
5.1.3.3. Avis des futurs maîtres sur l'utilisation
des salles de M-E
L'enquête révèle d'énormes
disparités dans les avis des futurs maîtres concernant
l'utilisation des salles de M-E. Les différents avis des futurs
maîtres sont présentés dans la figure 4 par ordre de
fréquence de citation.

73
Figure 4
Appréciations des futurs maîtres sur
l'utilisation des salles de M-E
Source : Enquête terrain
La figure 4 met au grand jour la non-utilisation des salles de
M-E. Cela pourrait s'expliquer par le fait que ces salles ne sont pas
adaptées à la réalisation des séances de M-E et que
beaucoup de formateurs ne sont pas formés dans ce domaine. Ces
résultats semblent expliquer également que les futurs
maîtres n'ont pas eu suffisamment d'occasions pour assister aux
séances proprement dites de M-E. En outre, ces pourcentages viennent
confirmer le faible taux de mise en oeuvre du M-E dans cette école.
5.1.3.4. Modalités de gestion du matériel
Selon la majorité des 15 formateurs participant aux
entretiens semi-directifs, le matériel de M-E est géré par
un formateur qui a été formé spécialement à
cet effet. Mais pour un tiers de ces participants, le matériel est
géré par l'administration. Sur la gestion du matériel du
M-E, les différentes opinions des formateurs se présentent, par
ordre de fréquence de citation, de la façon suivante :
? Gestion par un formateur (9)
? Gestion par l'administration (5) ? Cogestion (3)
74
? Ne sait pas (3)
? Gestion personnelle et opaque (2)
Les résultats ci-dessus présentés par
rapport à la gestion du matériel de M-E révèlent
l'existence d'une double responsabilité. Le matériel de M-E est
conjointement géré par l'administration et le responsable des
salles de M-E. Or, selon les normes en la matière, ce matériel
doit être géré par un formateur qui pourrait l'utiliser ou
le donner à ses pairs chaque fois que de besoin. C'est pourquoi,
d'aucuns vont jusqu'à parler de gestion opaque et personnelle. Selon
eux, l'accès au matériel n'est pas du tout facile. D'ailleurs,
d'autres ont préféré s'abstenir de parler de la gestion de
ce matériel. La confusion qui règne autour de cette gestion fait
en sorte qu'on ne sait finalement pas qui gère quoi. Ce qui a conduit
parfois à la perte de certains appareils portatifs et a nui
inévitablement à la mise en oeuvre du M-E dans cet
établissement.
5.1.4. Pratique du M-E
Cette partie traite du niveau de la mise en oeuvre du M-E par
les formateurs, de l'appréciation de cette mise en oeuvre par les futurs
maîtres, des disciplines touchées par la mise en oeuvre, de
l'utilisation du matériel par les formateurs et de la pratique du M-E
par les futurs maîtres.
5.1.4.1. Niveau de mise en oeuvre du M-E
Il ressort de la présente étude une très
faible mise en oeuvre du M-E. Malgré qu'ils soient formés, 84 %
des formateurs ne pratiquent pas le M-E. La figure 5 illustre cela.

75
Figure 5
Répartition des formateurs selon qu'ils
pratiquent le M-E ou pas
Source : Enquête terrain
La figure 5 montre un grand écart entre les formateurs
qui pratiquent le M-E et ceux qui ne le pratiquent pas. Cet écart
pourrait s'expliquer par le fait que beaucoup d'entre eux ne savent pas
présenter une leçon de M-E par manque de formation.
Parmi les 15 formateurs participant aux entretiens
semi-directifs, certains (une minorité : 3) déclarent que la
pratique du M-E est soit timide soit consiste en un tâtonnement,
d'où un aveu de plus d'un faible taux de mise en oeuvre du M-E à
l'ENI/TT.
Cette situation, décriée par une minorité
de formateurs est confirmée lors de l'entretien semi-directif avec les
cinq responsables administratifs. Ceux-ci estiment que le M-E est soit rarement
pratiqué (3) soit pas du tout pratiqué (2).
Ces divers résultats indiquent que la mise en oeuvre du
M-E à l'ENI/TT n'est pas effective. L'ambivalence de
l'appréciation pourrait exprimer d'une part le souci de vouloir masquer
la situation réelle de la pratique du M-E et d'autre part de
présenter la situation telle qu'elle est.
76
5.1.4.2. Appréciations des futurs maîtres
sur la mise en oeuvre du M-E
Interrogés sur la mise en oeuvre du M-E dans leur
établissement, les futurs maîtres, principaux
bénéficiaires des avantages de cette méthode, ont
émis diverses appréciations qui sont présentées
dans le tableau 17 ci-dessous.
Tableau 17
Appréciations des futurs maîtres sur la
qualité de la mise en oeuvre du M-E
|
|
I
|
IA1
|
IA2
|
Total
|
|
Très insuffisante
|
2
|
36
|
16
|
54
|
|
Insuffisante
|
1
|
11
|
9
|
21
|
|
Sans avis
|
1
|
13
|
6
|
20
|
|
Suffisante
|
1
|
8
|
10
|
19
|
Total
|
|
5
|
68
|
41
|
114
|
Source : Enquête terrain
Le tableau 17 montre dans l'ensemble que les futurs
maîtres ne sont pas satisfaits de la mise en oeuvre du M-E. Si certains
d'entre eux ont préféré ne pas s'exprimer, cela est
certainement lié au fait qu'ils ne savent même de quoi il est
question. N'ayant jamais connu ce qu'est le M-E, il fallait simplement, pour
eux, se taire au lieu de tâtonner.
5.1.4.3. Disciplines dans lesquelles le M-E est
pratiqué
Sur les huit disciplines enseignées à l'ENI/TT,
seules deux sont concernées par la mise en oeuvre du M-E. Même
dans ces deux disciplines, ce ne sont pas tous les formateurs qui le
pratiquent. Le tableau 18 présente cette situation.
Tableau 18
Fréquence d'application du M-E par
discipline
|
|
|
Pratique du M-E
Oui Non
|
Total
|
|
|
Didactique
|
4
|
6
|
10
|
|
|
EPS
|
0
|
1
|
1
|
|
|
Français contenu
|
0
|
5
|
5
|
Disciplines
|
|
Langues nationales
|
0
|
4
|
4
|
enseignées
|
|
Maths contenu
|
0
|
4
|
4
|
|
|
Morale
|
0
|
3
|
3
|
|
|
Psychopédagogie
|
2
|
4
|
6
|
|
|
Sociologie
|
0
|
4
|
4
|
|
Total
|
|
6
|
31
|
37
|
Source : Enquête terrain
77
Le tableau 18 montre une fois de plus la
non-effectivité de la mise en oeuvre du M-E à l'ENI/TT. La
pratique du M-E est ramenée à deux disciplines seulement. Ainsi,
seulement 40 % des formateurs en didactique et 33 % des psychopédagogues
pratiquent le M-E. Dans l'imaginaire de beaucoup de formateurs, le M-E ne
concerne que la didactique et la psychopédagogie, disciplines dans
lesquelles on enseigne entre autres la méthodologie pour conduire une
leçon, les objectifs d'enseignement/apprentissage, les modes
d'évaluation et la connaissance de l'enfant. L'insuffisance de formation
pourrait justifier le fait que ce ne sont pas tous les formateurs de ces
disciplines qui sont concernés par la mise en oeuvre du M-E.
Les conclusions du tableau ci-dessus, par rapport aux
disciplines dans lesquelles le ME est pratiqué, ont été
confirmées par les futurs maîtres. Les disciplines
déclarées par ces derniers comme appliquant le M-E sont les
suivantes par ordre de fréquence de citation :
? Didactique (63 %)
? Psychopédagogie (29 %)
? Sans avis (8 %)
Ces résultats provenant des futurs maîtres
précisent davantage les pourcentages de pratique réelle du M-E
à l'ENI/TT. L'écart entre les deux disciplines serait lié
au fait que la didactique est la discipline principale à travers
laquelle on apprend à enseigner. Le taux d'abstention, lui,
reflèterait l'avis des futurs maîtres qui ne pouvaient se
positionner simplement parce qu'ils n'avaient jamais assisté, dans l'une
ou l'autre discipline, à une séance de M-E. Le fait que la mise
en oeuvre du M-E soit ramenée à deux disciplines diminue les
chances des futurs maîtres d'observer et même de présenter
des leçons de M-E. Cela a réduit de facto le temps
consacré par le nouveau programme à l'entraînement pratique
au métier d'enseignant et a permis à la théorie de gagner
du terrain au détriment de la pratique, chose contraire à la
logique du nouveau paradigme de formation qui prône l'alternance entre
les deux.
5.1.4.4. Utilisation du matériel par les
formateurs : présentation et visionnement
Des six formateurs qui ont pratiqué le M-E, trois (soit
50 %) ont présenté une seule fois mais ont visionné leurs
leçons entre deux et quatre fois. Deux d'entre eux (soit 33 %) ont
présenté entre deux et quatre fois dont l'un a visionné
ses prestations entre deux à quatre fois
78
et l'autre entre cinq et sept fois. Le sixième formateur a
présenté entre cinq et sept fois et a visionné ses
leçons plus de sept fois. Ces résultats s'observent dans le
tableau 19.
Tableau 19
Fréquence de présentation des formateurs
* Fréquence de visionnement
Fréquence de visionnement Total
|
|
1 fois
|
2-4 fois
|
5-7 fois
|
Plus de 7 fois
|
|
Fréquence de présentation
|
1 fois 2-4 fois
|
0
0
|
3
1
|
0
1
|
0
0
|
3
2
|
|
5-7 fois
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
Total
|
|
0
|
4
|
1
|
1
|
6
|
Source : Enquête terrain
Les résultats du tableau 19 indiquent que
l'écrasante majorité des formateurs ne respecte pas la logique de
présentation et de visionnement des leçons de M-E. Un seul
formateur a présenté et visionné ses leçons
conformément au principe du feedback qui voudrait qu'on visionne les
leçons autant qu'on en a présenté. Cela s'expliquerait par
le fait que beaucoup de formateurs ne maîtrisent pas les
différentes étapes d'une leçon de M-E. Ce qui confirme le
tâtonnement de certains d'entre eux qui veulent pratiquer le M-E. Dans
ces conditions, les futurs maîtres sont réduits à des
cobayes pour leurs formateurs. Ils n'ont pas pu bénéficier
largement des avantages de cette innovation pédagogique.
5.1.4.5. Pratique du M-E par les futurs maîtres
? Participation aux séances de
préparation des leçons de M-E
Interrogés sur le nombre de leur participation aux
séances préparatoires des leçons de M-E, les futurs
maîtres ont donné les réponses suivantes par ordre de
fréquence de citation :
? 0 participation (51 %)
? Entre 1 et 2 participations (22 %) ? Entre 3 et 5
participations (16 %) ? Plus de 5 participations (11 %)
79
Ces résultats montrent que les futurs maîtres qui
ne participent pas à la préparation des leçons de M-E sont
plus nombreux que ceux qui y participent. Cela paraît
révéler que les formateurs n'associent pas toujours les futurs
maîtres dans la préparation des leçons de M-E. Il
semblerait qu'on fait tout à la place des vrais concernés. Ce qui
n'est pourtant pas bénéfique pour les futurs maîtres. Leur
pratique de classe devient ainsi difficile. Les futurs maîtres ne sont
pas à mesure de préparer leurs leçons sans l'assistance
d'un formateur. Cela les perturbe dans la présentation même de
leurs leçons de M-E car lorsqu'une aptitude n'est pas comprise pendant
sa préparation, il est évident qu'elle ne le sera pas dans la
présentation.
? Participation aux séances proprement dites de
M-E
Par rapport aux séances proprement dites de M-E, 55 %
des futurs maîtres affirment n'y avoir jamais assisté. La
situation de la participation des futurs maîtres à ces
séances se présente ainsi qu'il suit par ordre de
fréquence de citation :
? 0 fois (55 %)
? 1-2 fois (20 %)
? 3-5 fois (16 %)
? Plus de 5 fois (9 %)
Les résultats ci-dessus montrent que plus de la
moitié des futurs maîtres n'ont jamais assisté à une
séance de M-E. Les occasions d'assister aux séances de M-E ne
sont pas nombreuses. Près du quart des futurs maîtres (20 %) ont
eu seulement entre une à deux occasions pour observer des séances
proprement dites. Cela vient confirmer, une fois de plus, le faible taux de
mise en oeuvre du M-E.
? Présentation des leçons de
M-E
En analysant la pratique spécifique du M-E par
catégories de futurs maîtres, il ressort les résultats
ci-après présentés dans le tableau 20.
80
Tableau 20
Fréquence de présentation des
leçons de M-E par les futurs maîtres
Présentation des leçons de M-E Total
|
|
0 fois
|
1-2 fois
|
3-5 fois
|
Plus de 5 fois
|
|
Cycle du futur
|
I
|
3
|
2
|
0
|
0
|
5
|
maître
|
IA1
|
57
|
10
|
0
|
1
|
68
|
|
IA2
|
32
|
7
|
2
|
0
|
41
|
Total
|
|
92
|
19
|
2
|
1
|
114
|
Source : Enquête terrain
Le tableau 20 révèle que parmi les futurs
maîtres, 60 % des I n'ont jamais présenté une leçon
en M-E, au cours de leur formation. Il en est de même que 84 % des IA1 et
78 % des IA2. Cela pourrait s'expliquer par le fait que les conditions ne sont
pas réunies pour qu'ils puissent pratiquer, le M-E n'étant pas
régulièrement mis en oeuvre. L'écart des pourcentages
pourrait se comprendre en se référant aux effectifs des
différents cycles. Le cycle qui a le plus grand effectif a moins de
chances de pratiquer le M-E. C'est le cas des IA1 et des IA2 qui sont les plus
nombreux de l'établissement. Un grand nombre de futurs maîtres
finissent ainsi leur formation sans s'exercer à la maîtrise d'une
quelconque aptitude. Leur initiation à l'enseignement au sein même
de l'école de formation est ainsi tronquée. La formation des
futurs maîtres de l'ENI/TT devient inachevée, toute chose qui
contribuera à une mauvaise prestation de ces futurs agents de
développement.
? Visionnement des leçons de M-E
Une analyse des visionnements des leçons de M-E par
catégories de futurs maîtres fait ressortir les résultats
ci-après présentés dans le tableau 21.
Tableau 21
Fréquence de visionnement des leçons de
M-E par les futurs maîtres
Visionnement des leçons de M-E Total
|
|
0 fois
|
1-2 fois
|
3-5 fois
|
Plus de 5 fois
|
|
Cycle du futur
|
I
|
3
|
2
|
0
|
0
|
5
|
maître
|
IA 1
|
59
|
8
|
0
|
1
|
68
|
|
IA 2
|
35
|
4
|
2
|
0
|
41
|
Total
|
|
97
|
14
|
2
|
1
|
114
|
Source : Enquête terrain
81
Le tableau 21 révèle que les pourcentages de
visionnement sont très faibles et ce, quel que soit le cycle
considéré. Cela pourrait s'expliquer d'une part par le fait que
la majorité d'entre eux n'a jamais présenté de
leçons de M-E et d'autre part par le fait que les futurs maîtres
n'accèdent au matériel que sur ordre d'un formateur.
Une comparaison des totaux des données des
quatrièmes colonnes des tableaux 20 (soit 19) et 21 (soit 14) permet de
se rendre compte de l'existence d'un écart de 5 points. Cela semble dire
que certaines leçons sont présentées sans pour autant
être visionnées d'où le non-respect des étapes du
M-E. Ce qui n'est pas de nature à garantir une formation efficace. On
aura alors formé tout sauf de bons maîtres qui seront
lancés dans le système comme des loups dans une bergerie.
5.1.5. Obstacles à la mise en oeuvre du M-E
La présente partie concerne l'insuffisance de la
formation, la non-conformité des salles et le manque de suivi.
5.1.5.1. Insuffisance de formation et
non-conformité des salles de M-E
D'après les résultats issus des entretiens
semi-directifs avec les 20 participants (15 formateurs et 5 responsables
administratifs), plusieurs raisons justifieraient la non-mise en oeuvre du M-E
dont deux principales. Ces résultats se présentent comme suit par
ordre de fréquence de citation :
? Insuffisance de la formation (17) ? Salles non adaptées
(13)
? Difficile accès au matériel (2)
Ces résultats indiquent que pour l'écrasante
majorité des formateurs et des responsables administratifs
l'insuffisance de la formation est l'obstacle premier à la mise en
oeuvre du M-E à l'ENI/TT. Tout laisse croire que sans formation dans ce
domaine, il ne serait possible de ne rien entreprendre.
Plus de la moitié de ces participants placent la
non-conformité des salles en deuxième position en parlant de
contraintes à la mise en oeuvre du M-E. Sans l'infrastructure technique,
il serait donc difficile de pratiquer le M-E.
82
L'accès difficile au matériel semble signifier
que le matériel ne sort du laboratoire ou de l'administration que par le
biais du responsable des salles de M-E ou de l'intendant. Ce qui est normal
pour une gestion efficace de ce matériel.
Les résultats ci-dessus ont été
confirmés par ceux issus du questionnaire des formateurs mais à
des taux différents. Ainsi, pour eux, les obstacles à la mise en
oeuvre du ME sont liés par ordre de fréquence de citation
à :
? Insuffisance de la formation des formateurs (65 %)
? Inadaptation des salles (29 %) ? Insuffisance du
matériel (6 %).
Concernant les salles de M-E, nous avons voulu en savoir plus
en demandant les avis des formateurs sur leur état. Ainsi, pour 65 % des
formateurs, les salles ne sont pas du tout adaptées pour le M-E. La
figure 6 présente les différents avis des formateurs.

Figure 6
Avis des formateurs sur l'état des salles de
M-E
Source : Enquête terrain
La figure 6 indique un imposant pourcentage de formateurs pour
lesquels les salles de M-E ne sont pas du tout adaptées à la
réalisation des séances de M-E. Cette situation pourrait
s'expliquer par le manque de baie vitrée. Cependant, il serait normal
que certains pensent que
83
ces salles sont peu adaptées car il est possible
d'enseigner et de filmer dans la même salle. Mais ceux qui pensent que
les salles sont adaptées ne maîtrisent pas les conditions
techniques et matérielles de présentation d'une leçon de
M-E. Même les 3 % qui ont préféré s'abstenir
seraient dans cette situation. Dans une telle situation, il est difficile aux
formateurs de pratiquer le M-E. Il en est de même des futurs
maîtres. Cela se perpétue négativement de manière
générale sur leur formation initiale.
5.1.5.2. Manque de suivi
Plus de la moitié (12) des 20 participants (15
formateurs et 5 responsables administratifs) aux entretiens semi-directifs
évoque le manque de suivi comme contrainte à la mise en oeuvre du
M-E à l'ENI/TT. Sur la question du suivi, les réponses suivantes
ont été recueillies par ordre de fréquence de citation
:
? Manque total de suivi (12) ? Suivi local (1)
Pour la plupart des participants, il est clair qu'il n'y a pas
de suivi de mise en oeuvre du M-E ni du niveau local encore moins du niveau
central. L'infime minorité des répondants (1) qui estime qu'il y
a un suivi au niveau local semblerait vouloir sauver l'honneur des responsables
administratifs.
Le manque de suivi n'est pas de nature à favoriser les
conditions d'une bonne mise en oeuvre du M-E et conduirait à
l'échec de cette innovation dans le cadre de la formation initiale des
enseignants.
5.1.6. Suggestions des formateurs et des responsables
administratifs
Pour une mise en oeuvre effective du M-E dans leur
établissement, les formateurs et les responsables administratifs ont
fait plusieurs propositions. Celles-ci sont consignées dans la figure 7
ci-après, par ordre de fréquence de citation.

84
Figure 7
Suggestions des formateurs et des responsables
administratifs
Source : Enquête terrain
La figure 7 indique trois solutions principales si l'on veut
réussir le M-E à l'ENI/TT. Parmi celles-ci, la formation des
formateurs passerait en premier lieu. Ensuite, suit la réhabilitation
des salles. Enfin, le suivi de la mise en oeuvre du M-E viendrait en
troisième position. Les différents écarts entre ces
suggestions s'expliqueraient par les écarts observés dans
l'identification des contraintes à la mise en oeuvre du M-E dans cet
établissement.
5.2. Analyse et interprétation des
résultats
Cette partie procède à une analyse des
résultats et à leur classement en identifiant les points forts et
les points faibles à travers cinq thématiques. Ce sont : la
formation dans le domaine du M-E, la pratique du M-E, la situation des
ressources matérielles, les obstacles à la mise en oeuvre du M-E
et les suggestions pour une mise en oeuvre régulière de cette
innovation. Cela permettra de vérifier les hypothèses de
recherche. Il est donc important de rappeler ici la question principale et les
deux questions spécifiques de recherche. Concernant la question
principale, il s'agissait pour nous de savoir les difficultés que
rencontrent les formateurs de l'ENI/TT dans la mise en oeuvre du M-E. La
première question spécifique cherchait à savoir si les
formateurs de l'ENI/TT sont suffisamment formés pour la mise en oeuvre
du M-E et la deuxième, si l'ENI/TT dispose de ressources
matérielles nécessaires en matière de M-E.
85
5.2.1. Formation dans le domaine du M-E
L'étude révèle que 62 % des formateurs et
près de la moitié des responsables administratifs ont
été formés en M-E (tableau 13). Cependant, derrière
ces taux se cachent d'autres réalités. En effet,
interrogés sur la qualité de leur formation, la majorité
des répondants affirme que leur formation est insuffisante voire
très insuffisante. La formation n'est satisfaisante que pour peu d'entre
eux (figure 1).
Il convient de relever ici que les rares fois que la formation
en M-E a été effectuée, elle s'est
révélée insuffisante car c'est une formation purement
théorique sans application pratique. Par exemple, il n'y a pas eu de
simulations de séances de M-E ni de manipulations d'appareils
destinés au filmage et au montage dans ce domaine.
L'insuffisance de cette formation est confirmée par
l'incapacité de la majorité des formateurs (76 %) à
manipuler une caméra (tableau 16).
Cependant, l'on peut se féliciter du fait que presque
tous des futurs maîtres aient entendu parler du M-E (tableau 12).
Certes, des formations ont été dispensées
aux formateurs et aux responsables administratifs mais il y a lieu de
s'interroger sur leur efficacité. Le nombre de sessions de formation et
leur durée permettent d'apprécier l'efficacité de la
formation donnée.
Le nombre de sessions des formations est très faible
(tableau 15). La durée de ces sessions reste également
très faible (tableau 14). La formation en M-E est donc insuffisante
à l'ENI/TT. Les résultats révèlent un faible niveau
de formation des formateurs et des responsables administratifs.
Rappelons que selon le modèle d'analyse IACR (Havelock
et Huberman, 1980), une bonne Infrastructure (I) consiste à
définir correctement les besoins, à analyser correctement le
problème, à trouver une solution appropriée et
matériellement réalisable et à mettre en oeuvre rapidement
et de manière fiable la solution. Une forte Autorité (A)
signifie qu'il y a des personnes qui travaillent pour qu'un besoin soit
reconnu, que le problème soit étudié, qu'une solution soit
trouvée à ce problème et qu'elle soit appliquée de
façon correcte et suivie. Le Consensus (C) exprime le fait que
les personnes participant à l'innovation approuvent les objectifs et la
manière de les atteindre. Les Ressources (R) désignent
un personnel hautement
86
qualifié, une bonne infrastructure technique et de
communication et, un capital nécessaire pour obtenir l'un ou l'autre.
En se référant à ce modèle, on se
rend compte aisément d'une défaillance dans le système. En
effet, le volet Ressources est handicapé non pas par le manque
d'infrastructure de communication ou de capital financier que nous n'aborderons
pas ici car cela dépasse le cadre de notre étude mais par le
manque de personnel qualifié pour la mise en oeuvre de l'innovation.
Peu d'efforts sont fournis par la Direction de la formation
initiale et continue (DFIC) pour former les formateurs et les responsables
administratifs de l'ENI/TT dans le domaine du M-E. Dans le cadre d'un projet
d'une telle envergure, la formation ne peut se ramener à quelques
séances occasionnelles. Cette formation, assurée habituellement
de façon intégrée dans une formation
générale en APC, ne peut permettre aux formateurs de mettre en
oeuvre de façon correcte et régulière le M-E. Sinon, le
niveau d'études (tableau 9) et l'âge des agents (tableau 8)
permettent de présumer qu'ils pouvaient apporter le changement
souhaité s'ils étaient suffisamment outillés.
La léthargie dans laquelle végète
aujourd'hui le M-E à l'ENI/TT est l'une des conséquences du peu
d'importance accordée à la formation des formateurs et des
responsables administratifs de cet établissement. Les futurs
maîtres y sortiront sans bénéficier des avantages
liés à cette innovation pédagogique qu'est le M-E.
5.2.2. Pratique du M-E
Les conséquences de la situation évoquée
ci-haut se font déjà sentir dans cet établissement. Ainsi,
une écrasante majorité de formateurs ne pratiquent pas le M-E
(figure 5). Du coup, beaucoup de futurs maîtres n'ont jamais eu
l'occasion de pratiquer le ME au cours de leur formation initiale (tableau 20).
Pire, plus de la moitié d'entre eux n'ont jamais assisté à
une séance proprement dite de M-E ou même à une
séance de préparation des leçons de M-E.
Il y a également peu de visionnements de séances
de M-E chez les futurs maîtres (tableau 21). Ces derniers perdent ainsi
de belles occasions, d'une part, pour s'auto-évaluer et se faire
évaluer par leurs pairs et le formateur et de l'autre, pour
améliorer leurs prestations.
87
Cela soulève l'épineux problème
d'accès au matériel de M-E évoqué par une
minorité de participants aux entretiens semi-directifs. Or, l'importance
du feedback dans le M-E n'est plus à démontrer. Selon Genoud
(2006), « le feed-back aide tout d'abord au développement de
capacités d'analyse et d'autocritique. Dans un second temps et avec un
peu plus d'habitudes, ces capacités joueront une fonction importante
d'autorégulation en situation » (p. 123).
Les conditions d'apprentissage ne sont donc pas
réunies. Or, la théorie béhavioriste dont s'inspire le M-E
part du principe selon lequel l'acquisition des connaissances s'effectue par
paliers successifs. Ainsi, on estime qu'en élaborant des paliers aussi
petits que possible, on accroîtrait la fréquence des renforcements
tout en réduisant au minimum l'éventuel caractère aversif
des erreurs.
Il n'existe pas non plus de mises en interactivité
(Jonnaert et Masciotra, 2004), entre futurs maîtres et entre futurs
maîtres et formateur, par lesquelles se construit le savoir. Pour la
théorie socioconstructiviste, ces interactions entre l'apprenant, ses
éducateurs et ses pairs jouent un rôle de premier ordre dans le
développement de son intelligence. En effet, dans une activité
collective, sous la direction d'adultes, l'enfant est en mesure de
réaliser beaucoup plus que ce qu'il réussit à faire de
façon autonome.
En raison de toutes ces contraintes, le M-E est peu
pratiqué à l'ENI/TT (figure 5). C'est pourquoi, une
minorité de formateurs reconnaît que le M-E est timidement
pratiqué dans leur établissement. Pour la majorité des
responsables administratifs, il est même rarement pratiqué.
La lenteur et l'insuffisance de la mise en oeuvre du M-E
dénotent le caractère d'une faible Infrastructure.
Dans les faits, l'utilisation des salles de M-E est
très faible (figure 4). En effet, seulement 7 % des futurs maîtres
affirment que ces salles sont utilisées. La mise en oeuvre du M-E est
prise en charge par deux disciplines seulement, à savoir la didactique
et la psychopédagogie (tableau 18).
Le fait que le M-E soit ramené à ces deux
disciplines uniquement est en porte-à-faux avec l'idée même
de cette méthode.
88
Dans sa note critique à l'ouvrage d'Altet et Britten
(1983), Linard (1985) attirait ainsi en note de bas de page l'attention de ses
lecteurs sur la distinction à faire entre le M-E et la didactique :
On rappelle que le micro-enseignement, contrairement à
la didactique qui s'attache à définir une pédagogie en
fonction de chaque discipline, vise une formation aux savoir-faire
généraux qui sous-tendent toutes les disciplines, tels que poser
différents types de question, varier les stimuli, introduire une
leçon, etc. (p. 63).
Le M-E ne peut être l'affaire de deux disciplines
seulement mais de l'ensemble des disciplines enseignées dans
l'institution scolaire. Cette confusion entre la didactique et le M-E
apparaît au grand jour, lors des entretiens semi-directifs avec les 15
formateurs, dans le discours des participants même s'ils sont
minoritaires (2). Ils proposent ainsi de limiter le ME aux didacticiens (figure
7).
5.2.3. Situation des ressources matérielles du
M-E
Il ressort de la présente étude que l'ENI/TT
dispose d'un important lot de ressources matérielles pour la
réalisation des séances de M-E. Les répondants font cas de
l'existence de plusieurs appareils mais aussi de salles de M-E (figure 3). Pour
70 % des formateurs, les salles de M-E sont bien équipées (figure
2).
Cependant, trois problèmes se posent concernant ce
matériel. Il s'agit des modalités de sa gestion, de la
qualité de son utilisation et de la qualité des salles.
En ce qui concerne le premier point, une forte majorité
des formateurs souligne que le matériel de M-E est géré
par un formateur. Cependant, certains d'entre eux précisent que le
matériel est géré par l'administration. En termes clairs,
une partie du matériel est gérée par le formateur et
l'autre par l'administration. Cela dénote d'un manque de confiance ou
d'un conflit de compétence entre les responsables administratifs et le
formateur chargé de la gestion du matériel. Le Consensus
à la base a donc manqué dans la mise en oeuvre de
l'innovation. Si nous admettons que les objectifs fixés par le sommet
ont été approuvés, la manière de les atteindre
divise cependant la base, notamment l'administration et les formateurs.
Le second point examine le niveau d'utilisation du
matériel de M-E. En effet, à la lecture du tableau 19, l'on se
rend compte que les formateurs visionnent leurs leçons plus
89
qu'ils ne les présentent, mettant ainsi de
côté le dispositif temporel de présentation et d'analyse
d'une séquence de M-E26. Ainsi, 50 % d'entre eux ont
visionné entre deux et quatre fois leurs leçons alors qu'ils n'en
ont présenté qu'une seule fois. Le film du M-E est devenu donc
pour la plupart des formateurs un simple objet ludique au lieu de faire l'objet
de réflexion. L'appropriation du M-E laisse donc à désirer
car ce dernier n'est pas pratiqué de façon systématique et
rigoureuse.
Quant au troisième point, il soulève la question
des normes de construction des salles de M-E. En effet, ce sont 65 % des
formateurs qui estiment que ces salles ne sont pas du tout adaptées
à la réalisation des séances de M-E (figure 6). Les normes
de construction ne conviennent pas et il manque de baie vitrée entre les
salles de cours et la salle d'observation.
La théorie de l'apprentissage social attribue pourtant
les changements dans le comportement d'un individu à deux causes
principales : l'observation et l'imitation. Le processus de l'apprentissage
vicariant est ainsi tronqué chez les futurs maîtres par le manque
de modèle à observer et à imiter.
Au regard de ces informations et si nous nous
référons à notre modèle d'analyse, l'on se rend
compte, une fois de plus, que la composante Ressources est affaiblie
par le manque d'infrastructure technique permettant à l'innovation
d'aboutir à de bons résultats. En admettant que les besoins ont
été correctement définis et que le problème a
été correctement analysé27, il est
évident que la réalisation de la solution rencontre
d'énormes difficultés d'ordre matériel.
5.2.4. Obstacles à la mise en oeuvre du M-E
L'insuffisance de la formation des formateurs est, de l'avis
de la quasi-totalité (17) des 20 participants (15 formateurs et 5
responsables administratifs) aux entretiens semi-directifs, la raison
fondamentale pour laquelle le M-E n'est pas pratiqué. Le niveau de la
formation reçue voire sa qualité ne permet pas de mettre en
oeuvre régulièrement le M-E. C'est pour cette raison que
l'insuffisance de la formation est considérée comme étant
la cause première pour laquelle le M-E n'est pas pratiqué
à l'ENI/TT.
26 Infra tableau 4.
27 Ces deux volets de l'Infrastructure ne
sont pas pris en charge par la présente étude. Ils peuvent
ultérieurement être étudiés dans une recherche de
grande envergure comme l'évaluation de la mise en oeuvre du M-E.
90
L'inadaptation des salles constitue d'après une forte
majorité (13) de ces répondants le second obstacle à la
mise oeuvre du M-E.
Le peu de formation aurait peut-être suffi à
faire bouger les choses s'il y avait un suivi régulier de la mise en
oeuvre de cette innovation. Malheureusement, comme le reconnaît plus de
la moitié (12) des participants à ces entretiens semi-directifs,
il n'y a ni suivi du niveau local ni suivi du niveau central.
Il n'existe donc, pour le M-E, aucun dispositif fiable de
suivi de mise en oeuvre ou d'accompagnement. Aussi, serait-il nécessaire
de rappeler la place de choix que Simondi (2007) donne à
l'accompagnement en matière d'innovation. Ainsi, selon elle : «
À tous les niveaux, un accompagnement au changement est
préconisé. Il est prescrit, prévu, programmé »
(p. 77).
Analysés sous l'angle du modèle IACR, ces
résultats attestent de l'existence d'une faille dans la deuxième
composante, à savoir l'Autorité. Un besoin a certes
été reconnu, étudié et une solution apportée
mais cette solution n'est pas appliquée de façon suivie. Or, le
mécanisme de contrôle et d'encadrement devrait faire en sorte que
les agents chargés de la mise en oeuvre du M-E agissent
conformément au plan sur lequel repose l'innovation.
Cependant, les acteurs locaux de suivi que sont les
responsables administratifs justifient cette situation, lors de leur entretien
semi-directif, par le fait qu'eux-mêmes ne sont pas formés. Plus
de la moitié (3) d'entre eux déclare n'avoir jamais
bénéficié d'une formation en M-E (tableau 13) et ceux qui
en ont bénéficié disent qu'elle ne leur permet pas de
suivre les formateurs dans la préparation, la présentation et le
visionnement des micro-leçons.
Ce manque patent de suivi ou de formation dans le domaine du
M-E a fait dire à certains formateurs, lors des entretiens
semi-directifs, qu'il n'y a vraiment pas de volonté politique en la
matière. À titre d'exemple, dans le groupe 1 (G 1), voilà
ce que pense un des participants :
G. 1 : Moi, j'accuse l'État. Il y a un manque de
volonté de la part du ministère de l'éducation car on ne
peut pas demander aux gens de faire une chose pour laquelle ils ne sont pas
formés. Tant que l'État n'assure pas le minimum,
c'est-à-dire la formation des encadreurs, le matériel de M-E et
les bâtiments répondant aux normes du M-E, il sera difficile de
pratiquer le M-E à l'ENI de Tillabéry. Hé ! Pas à
Tillabéry seulement, partout au Niger.
91
Muller et Surel, cités par Draelants (2009), nous font
remarquer que : « faire une politique publique, ce n'est donc pas
"résoudre" un problème, mais construire une nouvelle
représentation des problèmes qui met en place les conditions
sociopolitiques de leur traitement par la société, et structure
par là même l'action de l'État » (p. 46). Ce sont ces
conditions sociopolitiques justement qui ne sont pas réunies par
l'État.
Les formateurs ne sont pas dotés de compétences
nécessaires pour mener à bien la tâche qui leur est
confiée. Il en est de même des responsables administratifs.
L'insuffisance de la formation des formateurs et des
responsables administratifs a donné lieu à plusieurs signes d'un
mauvais fonctionnement du M-E. Mais ce mauvais fonctionnement ne peut
être lié seulement à la formation. Il y a aussi le
problème des ressources matérielles auquel on peut adjoindre
encore la question du suivi.
5.2.5. Suggestions des formateurs et des responsables
administratifs pour une mise en oeuvre effective du M-E à
l'ENI/TT
À la lumière des divers constats, la formation
des formateurs est citée comme la première solution pour une mise
en oeuvre effective du M-E à l'ENI/TT. La quasi-totalité (18) des
20 participants (15 formateurs et 5 responsables administratifs) aux entretiens
semi-directifs mettent en avant cette solution (figure 7).
En effet, la formation des acteurs de terrain compte beaucoup
dans la mise en oeuvre d'une innovation. À cet effet, Meirieu, dans sa
préface au livre de Dupriez et Cornet (2005), demande :
D'impliquer les acteurs sur le chantier, non comme des
exécutants mais comme de véritables cadres. Nous vivons encore
trop avec une conception taylorienne du métier d'enseignant qui, en
infantilisant les personnes, les contraint, en quelque sorte, à se
comporter comme leurs pires élèves : ne rien faire pour aider
à la réussite du projet et critiquer systématiquement
l'institution (p. 10).
En d'autres termes, il faut impliquer les acteurs du terrain
depuis la conception de l'innovation et non au moment de sa mise en oeuvre
seulement si l'on veut réussir le projet.
L'adaptation des salles de M-E aux normes en la matière
est également à prendre en compte si l'on veut réussir le
M-E à l'ENI/TT. En effet, plus de la moitié (11) des 20
répondants aux entretiens semi-directifs lie l'effectivité de la
mise en oeuvre de cette
92
innovation pédagogique à la
réhabilitation des salles (figure 7). Mais jusque-là, aucune
mesure ni du niveau local encore moins du niveau central n'est entreprise pour
la réfection de ces salles.
5.2.6. Vérification des hypothèses
5.2.6.1. Hypothèse 1 : Les pratiques
pédagogiques insuffisantes du M-E à
l'ENI/TT sont liées au faible niveau de
formation des formateurs dans ce domaine.
Au terme de cette analyse, il paraît opportun de
souligner que la mise en oeuvre du ME est très faible, soit 16 %,
à l'ENI/TT (figure 5) parce que les formateurs ne sont pas suffisamment
formés en la matière. Ainsi, pour 48 % des participants, la
formation est insuffisante voire très insuffisante chez 35 % d'entre eux
(figure 1). Dans 48 % des cas, les agents n'ont été formés
qu'une seule fois (tableau 14). La durée de la formation varie de un
jour, soit 52 %, à plus de sept jours, soit 4 % (tableau 15). Une
écrasante majorité des formateurs, soit 76 %, ne savent pas
filmer une leçon de M-E (tableau 16).
Les résultats obtenus confirment donc notre
première hypothèse de départ.
On s'accorde aujourd'hui à reconnaître que le M-E
facilite beaucoup la formation des futurs maîtres à travers un
certain nombre d'apports.
Parmi les apports du M-E, nous pouvons citer la
décomposition de l'acte d'enseigner en des aptitudes distinctes et
facilement maîtrisables et l'organisation du travail qui est rendue plus
facile du fait que le M-E se déroule à l'intérieur du
centre de formation et non dans les écoles disséminées un
peu partout.
Le M-E assure une meilleure articulation
théorie-pratique et le développement des capacités des
futurs maîtres à analyser des situations pédagogiques,
à s'auto-évaluer, à s'autocritiquer et à se
corriger. Il permet aussi une pratique sécurisante, sans risques sur les
plans pédagogique et psychologique. Il offre une évaluation
efficace et systématique et inaugure une nouvelle conception du
contrôle qui, loin de se dérouler sur un ton négatif, est
en général constructif puisque le superviseur, au lieu
d'évaluer les résultats du futur maître, essaie d'aider ce
dernier sur des questions identifiées à l'avance.
93
La structure du M-E offre également un cadre
idéal pour la recherche et l'expérimentation. C'est ainsi que de
nombreux paramètres peuvent y être étudiés (la
durée de la leçon, le contenu, les élèves et les
méthodes). De même, avant d'entreprendre des
expérimentations d'une certaine envergure dans les écoles, on
peut analyser les problèmes et les difficultés y afférents
dans le cadre du M-E.
Bref, l'utilité du M-E dans la formation des
enseignants n'est plus à démontrer en cette ère des
Technologies de l'information et de la communication en éducation
(TICE). Selon Tsafak (2003) : « [...] le Micro-enseignement constitue un
support audiovisuel cardinal dans la formation des formateurs qui coïncide
si heureusement avec toutes les techniques et technologies modernes relatives
» et « concoure à la formation professionnelle des
élèves professeurs » (p. 17).
Malgré tous ces avantages du M-E, la DFIC ne met pas
les moyens suffisants pour former les formateurs des ENI en quantité et
en qualité dans le domaine du M-E.
5.2.6.2. Hypothèse 2 : La non-disponibilité
des ressources matérielles à l'ENI/TT
contribue à un faible niveau de mise en oeuvre
du M-E.
L'analyse et l'interprétation des différents
résultats attestent que même formés dans le domaine du M-E,
les formateurs ne peuvent pratiquer régulièrement le M-E car ils
ne disposent pas d'infrastructures nécessaires à sa mise en
oeuvre. Ainsi, ce sont 65 % des répondants qui affirment que les salles
de M-E ne sont pas dut tout adaptées à la réalisation des
séances de M-E (figures 6) car il leur manque de baie vitrée.
Elles doivent être réhabilitées (figure 7).
Par ailleurs, quand les ressources existent, elles sont peu
accessibles aux formateurs. Ce qui du coup confirme aussi notre deuxième
hypothèse.
Mais le problème de fonctionnement de salles de M-E ne
date d'aujourd'hui et n'est pas spécifique au seul cas de l'ENI/TT. En
effet, entre février et mars 2003, le Professeur Tsafak de
l'Université de Yaoundé I (Cameroun) a mené une
étude sur l'évaluation de quatre institutions de formation des
formateurs au Congo (Brazzaville) pour le compte de l'Organisation des nations
unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO).
94
Cette étude a fait un certain nombre de constats
concernant les salles de M-E. C'est ainsi qu'à l'ENI de Brazzaville, il
manquait l'atelier pour l'entraînement des futurs maîtres à
la pratique de l'enseignement. À l'ENS de Brazzaville, c'est le
laboratoire même de M-E (constitué d'une salle de régie et
de moniteurs) qui avait disparu.
À l'allure des évènements, si l'on n'y
prend garde, ce qui est arrivé à l'ENS de Brazzaville peut aussi
arriver à l'ENI/TT s'il ne l'est pas déjà. En dehors du
fait les salles ne sont pas du tout adaptées à la
réalisation des séances de M-E, l'état dans lequel
végètent ces salles et le matériel de M-E laisse à
désirer. Plusieurs appareils ne fonctionnent pas et les salles
utilisées à d'autres fins.
95
CONCLUSION ET SUGGESTIONS
La présente étude constitue une réflexion
menée à partir de la situation scolaire au Niger,
particulièrement à l'ENI/TT, une école de formation de
maîtres située à 113 kilomètres à l'Ouest de
Niamey, la capitale. La profondeur de l'analyse du sujet fait ressortir des
éléments importants qu'on peut retrouver dans toutes les ENI.
À ce titre, les données analysées sont
généralisables et transférables à d'autres
situations similaires.
Bien que nous soyons également acteur à
l'ENI/TT, nous avons essayé d'analyser froidement et objectivement la
situation de la mise en oeuvre du M-E. Il s'agissait alors de chercher à
déceler de manière systématique les
caractéristiques ou les comportements et ce, dans le but de faire
émerger davantage des traits distinctifs de ces comportements et de
décrire une situation en vue de susciter une prise de conscience sur la
gravité du problème et provoquer ainsi une probable mise en
oeuvre de mesures correctives.
Le cadre qui a servi à l'analyse des données
repose sur deux piliers : la formation des formateurs dans le domaine du M-E et
les ressources matérielles nécessaires à la mise en oeuvre
de l'innovation. Pour ce faire, nous avons formulé les hypothèses
suivantes : « Les pratiques pédagogiques insuffisantes du M-E
à l'ENI/TT sont liées au faible niveau de formation des
formateurs dans ce domaine » et « La non-disponibilité des
ressources matérielles à l'ENI/TT contribue à un faible
niveau de mise en oeuvre du M-E ».
La première hypothèse cherchait à
vérifier l'existence de liens possibles entre l'insuffisance de la
pratique du M-E et le niveau de formation des formateurs dans le domaine de
cette innovation. Nous avons pu établir, de manière
significative, les liens présumés que nous cherchions à
observer, c'est-à-dire que les pratiques pédagogiques
insuffisantes du M-E à l'ENI/TT sont effectivement liées au
faible niveau de formation des formateurs dans le domaine du M-E.
Quant à la deuxième hypothèse, elle
cherchait à vérifier l'existence de corrélation possible
entre l'insuffisance de la pratique du M-E et la non-disponibilité des
ressources matérielles. Là également, nous avons pu
démontrer que la non-disponibilité d'une infrastructure technique
contribue à un faible niveau de mise en oeuvre du M-E.
96
Ce faisant, notre recherche a abouti à trois
conclusions.
Premièrement, la majorité des formateurs a
certes bénéficié d'une formation en M-E mais la
qualité de celle-ci laisse à désirer. Ainsi, dans bien des
cas, les sessions de formation n'ont guère dépassé une
journée et une frange importante des formateurs n'a reçu qu'une
session de formation. En plus, la formation a été purement
théorique. Il n'y a eu ni simulation de leçons de M-E ni
manipulation du matériel technique.
Deuxièmement, les salles prévues pour la
réalisation des séances de M-E ne répondent pas aux normes
en la matière. En effet, le manque de baie vitrée rend ces salles
inadaptées à la mise en oeuvre du M-E.
Troisièmement, il n'y a eu aucun suivi de mise en
oeuvre de cette innovation ni de la part du niveau local ni de la part du
niveau central.
Par ailleurs, nous considérons cette étude comme
étant le point de départ d'autres recherches qui pourront mieux
éclairer les lecteurs concernant la mise en oeuvre du M-E dans les ENI
du Niger. C'est ainsi qu'une étude sur l'évaluation de la mise en
oeuvre du M-E serait intéressante, surtout si elle arrive à
couvrir l'ensemble des cinq ENI où il est censé être
pratiqué. Une étude d'impact du M-E sur le rendement scolaire des
futurs maîtres serait également très importante.
Au terme l'analyse de l'expérience de l'ENI/TT, nous
formulons les suggestions suivantes :
? À l'endroit des autorités en charge de
l'éducation nationale
- Généraliser la formation des formateurs dans
le domaine du M-E en multipliant les sessions de formation pour atteindre tous
les formateurs afin qu'ils puissent intégrer cette innovation
pédagogique dans leurs pratiques de classe ;
- Élargir la formation aux responsables administratifs
de l'ENI/TT pour qu'ils puissent assurer correctement le suivi de la mise en
oeuvre du M-E ;
97
- Réhabiliter les salles de M-E pour les adapter aux
normes de pratique du M-E en élargissant le laboratoire et en
créant des baies vitrées entre ce dernier et les salles de cours
;
- Doter le laboratoire de M-E en matériel suffisant et de
qualité ;
- Appliquer les termes des arrêtés n° 92 et
94/MEB/A/DGEB/DFIC du 15 mai 2006 portant respectivement sur l'organisation et
le fonctionnement et, la création des écoles annexes en veillant
au fonctionnement régulier de ces écoles et en y facilitant
l'expérimentation des méthodes pédagogiques aux futurs
maîtres ;
- Déterminer, à titre indicatif, une liste
d'aptitudes à exercer au cours de la formation des futurs maîtres
;
- Affecter des formateurs pour uniquement gérer les salles
de M-E ;
- Mettre en place une équipe d'experts nationaux
chargée du suivi de la mise en oeuvre du M-E ;
- Sensibiliser les différents acteurs sur
l'utilité du M-E dans la formation des futurs maîtres ;
- Évaluer la mise en oeuvre du M-E.
? À l'endroit des responsables administratifs de
l'ENI/TT
- Entreprendre des initiatives locales de réhabilitation
des salles de M-E ;
- Prendre des dispositions utiles pour préserver les
ressources matérielles du M-E en responsabilisant de manière
effective le chargé des salles et en utilisant ces salles et le
matériel qu'elles contiennent uniquement pour le M-E ;
- Assurer régulièrement et correctement le suivi de
la mise en oeuvre du M-E ;
- Organiser des voyages d'études par exemple sur le
Sénégal, la France et les États-Unis à l'intention
des formateurs et des futurs maîtres pour qu'ils s'imprègnent
davantage de l'intérêt et de la pratique de cette innovation
pédagogique.
98
? À l'endroit des formateurs
- S'impliquer pleinement dans la mise en oeuvre du M-E en
présentant et en visionnant correctement les leçons ;
- Respecter le temps imparti à une séquence de
M-E et ses différentes étapes, à savoir la
préparation, le micro-cours, le recueil des informations, la mise en
commun et le visionnement collectif ;
- Sensibiliser les futurs maîtres sur l'utilité du
M-E ;
- Impliquer les futurs maîtres dans la
préparation, la présentation et le visionnement des leçons
de M-E.
? À l'endroit des futurs maîtres
- Participer activement dans la préparation et la
présentation des leçons de M-E ; - Coopérer avec leurs
formateurs pour une mise en oeuvre effective du M-E.
Nous osons espérer que les différentes
propositions ainsi formulées recevront un accueil favorable de la part
des acteurs concernés et contribueront à l'efficacité de
la pratique du M-E à l'ENI/TT et, au-delà, à toutes les
ENI du pays.
Pour que le M-E aille de l'avant à l'ENI/TT,
l'implication de chaque acteur, dans sa sphère de responsabilité,
est primordiale.
Nous demeurons convaincus que les séances de M-E,
associées à la formation théorique et aux
différents stages des futurs maîtres de l'ENI/TT, contribueront
significativement à l'amélioration de la qualité de
l'enseignement au Niger.
99
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Université.
TEXTES LÉGISLATIFS ET
RÈGLEMENTAIRES
Arrêté n° 92/MEB/A/DGEB/DFIC du 15 mai 2006,
portant organisation et fonctionnement des écoles annexes.
Arrêté n° 93 MEBA/DGEB/DFIC du 15 mai 2006,
portant statut des personnels d'encadrement, d'administration et de gestion des
Écoles Normales.
Arrêté n° 94/MEB/A/DGEB/DFIC du 15 mai 2006,
portant création des écoles annexes.
Décret n° 73-117/PRN/MEN/JS du 5 octobre 1973,
transformant les Cours normaux de Tahoua et de Tillabéry en
Écoles normales.
106
Décret n° 2003-234/PRN/MESS/RT/MEB1/A/MFPT du 26
septembre 2003, portant statut des enseignants contractuels du Niger.
er
Loi n° 98-12 du 1 juin 1998, portant orientation du
système éducatif nigérien.
Loi n° 2002-029 du 31 décembre 2002, portant
création d'Établissements publics à caractères
administratifs dénommés "Écoles Normales".
XIII
ANNEXES
Annexe 1 : Outils de collecte des données Annexe 2 :
Textes des entretiens
Annexe 3 : Listes des aptitudes selon les auteurs
xiv
ANNEXES
Annexe 1 : Outils de collecte des
données Outil 1 : questionnaire adressé aux futurs
maîtres
Le présent questionnaire s'inscrit dans le cadre de
l'élaboration d'un mémoire de fin d'études portant sur la
mise en oeuvre du micro-enseignement (M-E) à l'École normale
d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry (ENI/TT). Nous vous prions de bien
vouloir répondre aux questions en cochant au niveau de chaque question
la réponse qui vous convient. Nous vous garantissons l'anonymat de vos
réponses et vous remercions d'avance pour votre participation à
ce travail.
I. Identification du futur maître
Âge :

Moins de 18 ans 18-23 ans 24-29 ans 30-35 ans Plus de 35
ans
Sexe : Féminin Masculin
Cycle : I IA1 IA2
II. Mise en oeuvre du M-E
1. Avez-vous entendu une fois parler du M-E ?
Oui Non
2. Quelle est la fréquence de la participation des futurs
maîtres à la préparation des
séquences de M-E ?
Toujours Quelquefois Jamais Sans avis
3. Combien de fois avez-vous assisté aux séances de
préparation des séquences de M-E ?
0 fois 1-2 fois 3-5 fois Plus de 5 fois
4. xv
Combien de fois avez-vous assisté aux séances de
M-E ?
0 fois 1-2 fois 3-5 fois Plus de 5 fois
5. Combien de fois avez-vous présenté des
leçons en M-E ?
0 fois 1-2 fois 3-5 fois Plus de 5 fois
6. Combien de fois avez-vous visionné votre propre
prestation (film d'une leçon que
vous avez présentée) ?
0 fois 1-2 fois 3-5 fois Plus de 5 fois
7. Comment jugez-vous la pratique du M-E dans votre école
?
Suffisante Insuffisante Très insuffisante Sans avis
8. Votre salle de M-E, est-elle utilisée ?
Salle utilisée Salle peu utilisée Salle pas du
tout utilisée Sans avis
9. Dans la liste suivante, dites les disciplines dans lesquelles
on organise des séances de
M-E :
Didactique Maths contenu Psychopédagogie
Sociologie Sans avis
xvi
Outil 2 : questionnaire adressé aux
formateurs
Le présent questionnaire s'inscrit dans le cadre de
l'élaboration d'un mémoire de fin d'études portant sur la
mise en oeuvre du micro-enseignement (M-E) à l'École normale
d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry (ENI/TT). Nous vous prions de bien
vouloir répondre aux questions en cochant la réponse qui vous
convient. Nous vous garantissons l'anonymat de vos réponses et vous
remercions d'avance pour votre participation à ce travail.
I. Identification de l'agent
Âge : Moins de 36 ans 36-41 ans 42-47 ans 48-53
ans Plus de 53 ans
Sexe : Féminin Masculin
Grade : CE IEB P/CEG PES Ancienneté dans le poste :
Moins de 1 an 1-5 ans 6-10 ans Plus de 10 ans Discipline
enseignée :
Didactique EPS Français contenu Langue nationale
Maths contenu Morale Psychopédagogie Sociologie
II. Formation en M-E
1. Avez-vous reçu une formation en M-E ?
Oui Non
2. Si oui, combien de fois avez-vous été
formés ?
1 fois 2-4 fois Plus de 4 fois Non réponse
3. xvii
Si oui, quel est le nombre total de jours de votre formation ?
1 jour 2-4 jours 5-7 jours Plus de 7
jours Non-réponse
4. Si oui, comment appréciez-vous votre formation ?
Satisfaisante Insuffisante Très insuffisante Sans
avis Non-réponse
5. Quel est votre niveau de maîtrise du filmage de
leçon ?
Bien Passable Nul Sans avis III. Mise en oeuvre du
M-E
6. Quelle est la fréquence de la pratique du M-E dans
votre établissement ?
Toujours Quelquefois Jamais
7. Pratiquez-vous le M-E ? Oui Non
8. Si non, pourquoi ?
Insuffisance de formation Salle non adaptée Manque de
matériel Non-réponse
9. Si oui, combien de fois avez-vous pratiqué le M-E ?
1 fois 2-4 fois 5-7fois Plus de 7 fois Non-réponse
10. Au total, combien de fois avez-vous visionné votre
propre prestation ?
1 fois 2-4 fois 5-7 fois Plus de 7 fois
xviii
IV. Ressources matérielles
11. Quel est votre avis sur l'état d'équipement de
votre salle de M-E ?
Bien équipée Peu équipée Pas du tout
équipée Sans avis
12. Quel est votre avis sur l'état de vos salles de M-E
?
Adaptées pour le M-E Peu adaptées pour le M-E
Pas du tout adaptées pour le M-E Sans avis
xix
Outil 3 : guide d'entretien avec les
formateurs
1. Quelle appréciation faites-vous de votre formation en
M-E ?
2. De quelles ressources matérielles dispose
l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry pour
réaliser des séances de M-E ?
3. Comment se fait la gestion du matériel de M-E à
l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry ?
4. Comment pratiquez-vous le M-E à l'École normale
d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry ?
5. Quels sont les obstacles liés à la mise en
oeuvre du M-E dans votre école ?
6. Quelles suggestions faites-vous pour une mise en oeuvre
effective du M-E à l'École normale d'instituteurs Tanimoune de
Tillabéry ?
xx
Outil 4 : guide d'entretien avec les responsables
administratifs
1. Quelle appréciation faites-vous de votre formation en
M-E ?
2. De quelles ressources matérielles dispose votre
établissement pour réaliser des
séances de M-E ?
3. Quelle est la fréquence de la pratique du M-E à
l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry ?
4. Quels sont les obstacles liés à la mise en
oeuvre du M-E dans votre école ?
5. Y a-t-il un suivi de mise en oeuvre du M-E dans votre
établissement ?
6. Quelles suggestions faites-vous pour une mise en oeuvre
effective du M-E à l'École normale d'instituteurs Tanimoune de
Tillabéry ?
xxi
Annexe 2 : Textes des entretiens
Textes des entretiens avec les formateurs
Focus group 1
Intervieweur : Oumarou Amadou
Durée de l'entretien : 25 minutes et 22 secondes
Date de l'entretien : 22 juin 2013 à 10 h 22 mn Nombre de participants :
5 hommes
Oumarou Amadou : chers collègues, bonjour. Comme nous
vous l'avions annoncé, nous voulons vous entretenir sur un certain
nombre de préoccupations dans le cadre l'élaboration de notre
mémoire sur le M-E. Première préoccupation donc : Quelle
appréciation faites-vous de votre formation en M-E ?
Groupe 1 : C'est une formation purement théorique car
on a parlé seulement des objectifs du M-E, de ses avantages et de son
pourquoi. C'est-à-dire pourquoi on a introduit le M-E à
l'École normale. C'est tout, rien de plus hein.
G. 1 : En vérité, moi je dirai que j'ai pas
reçu de formation à proprement parler sur le M-E. Mais j'ai
assisté à une présentation de leçon dans ce cadre.
Cela ne m'a pas suffisamment profité. Je ne sais aujourd'hui ni
préparer une leçon ni présenter dans ce
cadre-là.
G. 1 : Honnêtement, la formation que nous avons
reçue n'est pas suffisante pour nous permettre de pratiquer le M-E.
G. 1 : Moi, je n'ai même pas été
formé en M-E. Si lui, il dit que c'est insuffisant, moi je n'ai
même pas eu ce qu'il a eu là.
G. 1 : Même moi aussi.
O. A. : De quelles ressources matérielles dispose
l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry pour
réaliser des séances de M-E ?
G. 1 : L'École normale de Tillabéry dispose
d'une caméra, d'un poste téléviseur, d'un appareil
vidéo et une salle réservée pour le M-E.
G. 1 : Bon, à ma connaissance, il y a un
rétroprojecteur, un micro-ordinateur de marque DELL et un ordinateur de
bureau mais je ne sais pas sa marque lui.
G. 1 : L'ENI de Tillabéry dispose de caméras,
d'un vidéoscope, d'un poste téléviseur, d'un
rétroprojecteur, d'un labo et d'une salle de M-E mais non conforme parce
qu'il manque la vitre entre la salle de classe et le laboratoire.
G. 1 : Moi, je ne connais pas les ressources
matérielles dont dispose l'ENI concernant le M-E. Je n'ai jamais mis
pied dans la salle. Pour ne pas te mentir, donc vraiment je ne sais pas.
xxii
G. 1 : En tout cas même moi j'ignore exactement ce qu'il
y a dans ces salles. Mais on dit qu'il y a des caméras, des
télés, des rétroprojecteurs. C'est tout ce que je sais.
O. A. : Comment se fait la gestion du matériel de M-E
à l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry
?
G. 1 : Bon, le matériel est géré par un
encadreur qui a reçu une formation pratique de filmage et de montage de
film de M-E.
G. 1 : Comme l'a dit mon collègue, le matériel
est géré par le responsable de la salle de M-E. C'est un
collègue encadreur. C'est lui le gros là. (Rires).
G. 1 : Oui, c'est vrai le matériel est géré
par un encadreur.
G. 1 : Je ne peux vraiment vous répondre sur ce point
parce que je me suis jamais intéressé à la chose.
G. 1 : Je n'en sais rien également.
O. A. : Comment pratiquez-vous le M-E à l'École
normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry ?
G. 1 : Moi, je n'ai jamais pratiqué le M-E. Donc je ne
sais pas comment on le pratique. G. 1 : Vraiment, le M-E ne se pratique pas
à l'ENI de Tillabéry.
G. 1 : Moi, je dirai qu'il est pratiqué timidement,
c'est-à-dire... très rarement.
G. 1 : À mon avis, pas de pratique de M-E ici. Je ne
saurai donc dire comment on le pratique. Une chose qu'on fait pas, comment
parler à propos ?
G. 1 : Moi, je n'ai jamais pratiqué le M-E mais y a des
gens qui se débrouillent avec leurs élèves. Les gens ne
sont pas formés !
O. A. : Quels sont les obstacles liés à la mise en
oeuvre du M-E dans votre école ?
G. 1 : Il y a d'abord la salle qui n'est pas adaptée.
Il manque la baie vitrée. Il y a ensuite la faible motivation des
encadreurs. Je ne sais pas pour quelle raison. Il faut aussi ajouter le manque
de suivi et le manque d'intérêt de l'administration qui n'est pas
de nature à pousser les encadreurs à pratiquer le M-E. Je crois
que c'est ça qui bloque aujourd'hui.
G. 1 : Moi, je dirai que c'est surtout le manque de formation
et le manque de vitre qui font que le M-E ne marche pas chez nous. Même
si on veut faire, si on ne connaît pas, beh, c'est un problème.
G. 1 : Pour moi, non seulement la salle n'est pas
adaptée mais aussi l'administration ne s'implique pas pour que ce type
d'enseignement devienne une réalité. Mais il ne faut pas oublier
aussi la réticence des encadreurs hein ! On a toujours horreur du neuf
comme on le dit. Il nous manque vraiment de sensibilisation. Vraiment.
xxiii
G. 1 : Je ne sais pas exactement ce qui empêche la mise
en oeuvre du M-E dans cette école. Mais je pense que ça peut
être dû à un manque de formation car si on est formé,
je ne vois pas pourquoi ne pas le faire. Certains parlent aussi de la salle qui
n'est pas adaptée à la pratique du M-E. C'est tout ce que je
sais, moi.
G. 1 : Moi, j'accuse l'État. Il y a un manque de
volonté de la part du ministère de l'éducation car on ne
peut pas demander aux gens de faire une chose pour laquelle ils ne sont pas
formés. Tant que l'État n'assure pas le minimum,
c'est-à-dire la formation des encadreurs, le matériel de M-E et
les bâtiments répondant aux normes du M-E, il sera difficile de
pratiquer le M-E à l'ENI de Tillabéry. Hé ! Pas à
Tillabéry seulement, partout au Niger.
O. A. : Quelles suggestions faites-vous pour une mise en
oeuvre effective du M-E à l'École normale d'instituteurs
Tanimoune de Tillabéry ?
G. 1 : Il faut d'abord compléter l'équipement de
la salle de M-E. Ensuite, il faut motiver les encadreurs dans la mise en oeuvre
du M-E. Je veux dire il faut qu'il y ait suivi par le directeur des
études. Sinon, le M-E a peu de chances d'être pratiqué
à l'ENI de Tillabéry. Tant qu'on n'aura pas une équipe
dirigeante qui va donner un nouveau souffle à l'école, le M-E
restera toujours sur papier.
G. 1 : À mon niveau, j'ai trois suggestions à
faire. Premièrement : formation des encadreurs en M-E,
deuxièmement : suivi de la mise en oeuvre par l'équipe
pédagogique de l'ENI et enfin suivi de la mise en oeuvre par le
Ministère de l'éducation nationale, de l'alphabétisation
et de la promotion des langues nationales. Sans cela, le M-E aura un avenir
sans lendemain. C'est moi qui vous le dis. Ok ?
G. 1 : Je pense qu'il faut d'abord rendre la salle conforme
à ce type d'enseignement, c'est-à-dire qu'il faut mettre la vitre
entre la salle des machines et les salles de classes de M-E. Ensuite,
l'administration doit prendre ses responsabilités en assurant le suivi.
Enfin, les encadreurs doivent se ressaisir et assumer eux aussi leurs
responsabilités. L'État aussi doit former les encadreurs sinon
ils ne peuvent rien faire malgré leur bonne volonté.
G. 1 : D'abord, euh... excusez-moi. Premièrement la
salle construite ne répond pas aux normes d'une salle de M-E. Comment
observer une leçon dans une classe à travers un mur. On a dit
normalement hein, entre là où se passe la leçon et
là où on s'assoit pour observer il doit avoir des vitres, et
c'est ça qui manque. Ensuite, le matériel approprié
n'existe pas. Même les caméras ont commencé à...
à se gâter. Et puis... l'autre problème, c'est que les
encadreurs ne sont pas formés. Je pense que c'est l'ensemble de ces maux
qu'il faut solutionner, si on veut que ça marche.
G. 1 : Hé, moi je n'ai aucune suggestion à faire
car ce serait peine perdue. Ils savent ce qu'il faut faire pour que le M-E soit
pratiqué dans les écoles normales. Sans formation, on demande aux
gens de faire du M-E ; nous ne sommes pas des prophètes quand
même. Qu'est-ce que vous voulez ? Kaay.
O. A. : Je vous remercie beaucoup d'avoir répondu à
mes questions. Bonne journée.
xxiv
Focus group 2
Intervieweur : Oumarou Amadou
Durée de l'entretien : 23 minutes et 47 secondes
Date de l'entretien : 22 juin 2013 à 11 h 05 mn Nombre de participants :
5 hommes
Oumarou Amadou : Chers collègues, bonjour. Comme nous
vous l'avions annoncé, nous voulons vous entretenir sur un certain
nombre de préoccupations dans le cadre l'élaboration de notre
mémoire sur le M-E. Première préoccupation donc : Quelle
appréciation faites-vous de votre formation en M-E ?
Groupe 2 : La formation est théorique et très
insuffisante. Et puis hein, elle ne permet pas de pratiquer le M-E.
G. 2 : (Claquement de doigt). Bien qu'incomplète, cette
formation m'a permis d'avoir une meilleure visibilité des TIC dans le
cadre de la formation dans les ENI. Autrement dit, j'ai eu en tout cas un
meilleur réajustement des démarches pédagogiques
grâce à cette pratique. J'en ai fini.
G. 2 : Ma formation en M-E est insuffisante car les 3 jours
m'ont permis juste d'avoir les premiers rudiments de la technique. Je ne sais
ni présenter une leçon dans ce sens, ni filmer, encore moins
faire des montages avec ordinateur. Voilà.
G. 2 : Je n'ai pas suivi de formation en M-E, par
conséquent, je n'ai aucune opinion là-dessus.
G. 2 : Je suis dans la même situation que mon
prédécesseur. Moi aussi, je n'ai jamais
bénéficié d'une formation en M-E.
O. A. : De quelles ressources matérielles dispose
l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry pour
réaliser des séances de M-E ?
G. 2 : Eh, je ne sais pas exactement les ressources
matérielles dont dispose l'ENI pour réaliser des séances
de M-E. Mais j'ai l'habitude de voir une caméra et on m'a dit que c'est
pour le M-E. Et il y a aussi des salles pour ça.
G. 2 : Il existe un matériel pédagogique minimum
tel que les caméras pour filmer, deux télés, un
magnétoscope, deux ordinateurs. Mais pas pour des séances de M-E
mais plutôt pour des analyses de pratique. Ce qui est fondamental dans la
formation de l'élève-maître et de pratique des encadreurs.
J'en ai fini.
G. 2 : L'ENI de Tillabéry dispose des appareils comme
des postes téléviseurs et des caméras. C'est tout ce que
je sais, moi.
G. 2 : Il faut dire que l'école dispose d'une salle de
M-E et de quelques appareils de filmage tels que des caméras. À
ma connaissance (rot), il y a aussi des rétroprojecteurs mais qui ne
marchent plus.
G. 2 : Notre école dispose de beaucoup de choses pour
le M-E : une salle non adaptée au M-E, des télévisions,
des magnétoscopes, des caméras. Je ne sais rien de plus.
xxv
O. A. : Comment se fait la gestion du matériel de M-E
à l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry
?
G. 2 : C'est une gestion personnelle, non démocratique.
C'est-à-dire que l'accès au matériel est difficile. C'est
une seule personne qui le gère parce que c'est lui seul qui est bien
formé en M-E.
G. 2 : C'est juste. Le matériel de M-E est
géré par un encadreur ayant reçu la formation en ME.
G. 2 : Je n'ai pas assez d'informations sur cette gestion du
matériel de M-E mais l'administration est quand même responsable
de cette gestion.
G. 2 : Par rapport à cette question, je n'ai aucune
opinion. Car rien n'est clair dans ça (bruit de deux mains qui se
frottent).
G. 2 : Mais tout le monde sait que la gestion du
matériel de M-E est à la charge d'un encadreur même si
certains matériels se trouvent avec l'intendant. Je veux parler des
rétroprojecteurs qui ne marchent d'ailleurs même pas.
O. A. : Comment pratiquez-vous le M-E à l'École
normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry ?
G. 2 : C'est une fois, une seule pratique où certains
collègues ont été filmés lors d'une formation. On a
regardé le film et puis c'est tout hein.
G. 2 : Le M-E n'est pas pratiqué en tant que tel
à Tillabéry compte tenu de certaines contraintes. Mais des
séances d'analyses de pratiques sont souvent organisées par les
encadreurs de psychopédagogie et de didactique. Aux dires des
élèves-maîtres, c'est pourtant très important pour
eux car ça permet de façon concrète d'échanger par
rapport à leurs prestations.
G. 2 : (Raclage de gorge). Moi, vraiment, je ne pratique pas le
M-E.
G. 2 : A ma connaissance, le M-E n'est même pas
pratiqué à Tillabéry. Point.
O. A. : Quels sont les obstacles liés à la mise en
oeuvre du M-E dans votre école ?
G. 2 : À mon avis, quatre choses empêchent la
mise en oeuvre du M-E à l'ENI de Tillabéry : le manque de
formation des encadreurs, la salle non adaptée, l'accès difficile
au matériel et le dernier point c'est que c'est une approche
négligée par le ministère. Il n'y a aucun suivi de mise en
oeuvre, comment voulez-vous que ça marche ? Vous savez que les gens sont
toujours hostiles au changement même s'il est positif.
G. 2 : Parmi les obstacles, il faut d'abord citer
l'inadaptation des salles. Les salles construites ne répondent pas aux
normes requises pour cet enseignement. Ensuite, vient la non-formation du
personnel en quantité et en qualité. Ce qui fait que la grande
majorité des encadreurs ne perçoivent pas réellement
l'intérêt de ce type d'enseignement.
xxvi
G. 2 : Pour moi, les obstacles comme l'ont dit les autres,
sont de trois ordres : le manque de formation des encadreurs,
l'inadéquation des salles et le non-suivi de la mise en oeuvre du ME.
G. 2 : À mon avis, les obstacles liés à
la mise en oeuvre du M-E sont deux : le manque de suivi et le manque de
volonté politique. Le ministère n'a jamais cherché
à savoir si le M-E est mis en oeuvre à Tillabéry ou
pas.
G. 2 : Essentiellement, deux choses bloquent la bonne marche
du M-E à l'ENI de Tillabéry. C'est le manque de motivation des
encadreurs et le fait que la salle même n'est pas adaptée.
O. A. : Quelles suggestions faites-vous pour une mise en
oeuvre effective du M-E à l'École normale d'instituteurs
Tanimoune de Tillabéry ?
G. 2 : Le M-E est une innovation pédagogique difficile
à entrer dans les habitudes. Pour cela, il faut vaincre les
résistances des encadreurs, avoir des salles adaptées et montrer
l'intérêt pédagogique du M-E aux encadreurs.
G. 2 : Il faut adapter les salles aux exigences du M-E, former
les encadreurs dans ce domaine, rendre la pratique du M-E obligatoire à
toutes les unités pédagogiques, ne serait-ce que pour une
année d'essai, et intensifier les formations des encadreurs afin de se
conformer aux mutations de la technologie. À l'allure des choses,
l'avenir du M-E restera sombre à l'ENI de Tillabéry car les
décideurs ne font pratiquement rien pour sortir le M-E de sa
léthargie. Toutes les sollicitations pour adapter les salles et former
les encadreurs sont restées vaines.
G. 2 : Pour une mise en oeuvre effective du M-E, il faut :
premièrement, former les encadreurs, deuxièmement, adapter les
salles et enfin suivre les encadreurs. Il faut aussi les mettre dans les
conditions matérielles, les motiver quoi. Si tous les obstacles que nous
avons cités ne sont pas levés, il n'y aura pas une pratique
réelle du M-E.
G. 2 : Je pense qu'il faut mettre en place le matériel
nécessaire, sensibiliser les différents acteurs sur le M-E,
former les formateurs sur le M-E, planifier et suivre les activités de
M-E.
G. 2 : D'abord, je souhaite que le M-E puisse bien fonctionner
afin de mieux corriger les faiblesses de nos
élèves-maîtres. Pour revenir, à la question, je
propose que le personnel d'encadrement soit épaulé par des
spécialistes en la matière. En d'autres termes, il faut former
suffisamment les encadreurs.
O. A. : Je vous remercie d'avoir répondu à mes
questions. Bonne journée.
xxvii
Focus group 3
Intervieweur : Oumarou Amadou
Durée de l'entretien : 27 minutes et 25 secondes
Date de l'entretien : 22 juin 2013 à 11 h 38 mn Nombre de participants :
5 dont 1 femme
Oumarou Amadou : Chers collègues, bonjour. Comme nous
vous l'avions annoncé, nous voulons vous entretenir sur un certain
nombre de préoccupations dans le cadre l'élaboration de notre
mémoire sur le M-E. Première préoccupation : Quelle
appréciation faites-vous de votre formation en M-E ?
Groupe 3 : Merci de me donner la parole. Moi, je n'ai jamais
eu de formation spécifique en M-E. Mais on nous a parlé du M-E
lors d'une formation sur l'Approche par les compétences. Je ne me
rappelle même pas aujourd'hui ce dont on avait parlé. Pour me
résumer, je dirai que j'ai pas reçu de formation en M-E.
G. 3 : Au risque de répéter mon
prédécesseur, vraiment, moi aussi je n'ai pas été
formée en M-E.
G. 3 : Même moi, ma formation en M-E est insuffisante
quantitativement et qualitativement. Quantitativement, parce que la formation a
duré une journée. Qualitativement car il n'y a pas eu pratique
par les élèves-maîtres. Des camarades encadreurs ont
présenté des leçons et ils ont été
filmés. Après, nous avons regardé les films ensemble.
C'est tout hein.
G. 3 : En réalité, ce que les gens appellent ici
formation sur le M-E c'est une sensibilisation à la pratique du M-E.
Nous n'avons vu aucun exemple de mise en oeuvre de cette technique
pédagogique. Il ne faut pas se voiler la face.
G. 3 : Notre formation en M-E n'est pas une formation,
vraiment. Cela ne suffit pas. Il faut que le ministère revoie ça.
C'est très insuffisant comme formation. Vous pensez qu'un jour suffit
pour mettre en oeuvre le M-E ? Non.
O. A. : De quelles ressources matérielles dispose
l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry pour
réaliser des séances de M-E ?
G. 3 : Pour la réalisation des séances de M-E,
l'ENI de Tillabéry dispose de deux salles suffisamment
équipées : télévisions, caméras, etc.
G. 3 : Je ne sais pas exactement le matériel du M-E.
Mais, je sais moi aussi qu'il y a un rétroprojecteur, un poste
téléviseur et une caméra, en dehors des salles qu'il a
citées.
G. 3 : Notre école dispose à ma connaissance
d'une caméra de tournage et d'une salle, même si elle n'est pas
adaptée à la pratique du M-E. Il lui manque une baie
vitrée à travers laquelle on peut voir celui qui présente
la leçon sans que lui ne vous voie quoi !
G. 3 : C'est vrai. L'ENI de Tillabéry dispose d'une
caméra mais d'aucune salle adaptée au ME. Il y a aussi une
télévision et un vidéoscope pour regarder les films
enregistrés.
xxviii
G. 3 : Le matériel que j'ai vu c'est les caméras
: 2, les télévisons : 2, les rétroprojecteurs : 2 aussi et
bien sûr les salles de classes et une petite salle où se trouve le
matériel.
O. A. : Comment se fait la gestion du matériel de M-E
à l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry
?
G. 3 : (Bruit de chaise tirée). C'est justement
à ce niveau que le problème se pose puisqu'il y a une cogestion.
Je m'explique : une partie du matériel, à savoir les
télévisons et les caméras, est gérée par un
encadreur et l'autre partie est gérée par le gestionnaire de
l'école. Cela pose vraiment problème et le matériel peut
facilement se perdre comme ça sans qu'on sache qui est responsable. Ou
il y a un responsable de la salle de M-E qui doit gérer tout ou il n'y a
pas et l'intendant va gérer en ce temps. Il faut vraiment une
séparation de rôles.
G. 3 : À mon avis, le matériel est
géré uniquement par un encadreur, responsable de cette gestion.
L'intendant ne gère pas ce matériel.
G. 3 : Certes, le matériel est confié à
un encadreur mais l'administration a une main mise sur sa gestion. Ils prennent
ce matériel quand ils veulent et le ramènent quand ils veulent et
c'est comme ça qu'ils ont gâté tous les
rétroprojecteurs en les prêtant à des gens pour leurs
formations.
G. 3 : C'est un encadreur qui gère le matériel.
C'est lui qui a reçu la formation à la manipulation de la
caméra et son entretien. Au début, ils étaient deux. Mais
l'autre a quitté l'ENI.
G. 3 : Je n'ai rien à dire ici. Je ne connais rien de la
gestion du matériel de M-E.
O. A. : Comment pratiquez-vous le M-E à l'École
normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry ?
G. 3 : Le M-E n'est même pas pratiqué à
l'ENI de Tillabéry. Donc on ne peut pas parler de la manière dont
il est pratiqué.
G. 3 : La pratique du M-E est timide. Hé, le M-E n'est pas
pratiqué day.
G. 3 : Ils vous ont déjà donné la vraie
réponse. Ne cherchons pas midi à quatorze heures.
G. 3 : En fait, c'est juste pour l'analyse de pratique portant
sur une partie ou toute la leçon exécutée par un
encadreur. Or, d'après l'information que nous avons reçue, c'est
un élève-maître qui doit exécuter une
séquence de leçon en présence de ses pairs et il est
filmé. Nous ne faisons pas du M-E à mon avis.
G. 3 : Moi, je dirai que le M-E n'est même pas
pratiqué. C'est ça la vérité. Ne masquons pas les
choses.
O. A. : Quels sont les obstacles liés à la mise en
oeuvre du M-E dans votre école ?
G. 3 : Il y a d'abord le manque de formation des encadreurs.
Ensuite, les locaux non adaptés et enfin le manque de motivation.
C'est-à-dire que les gens ne veulent pas faire. Tout ce qui
xxix
est nouveau, c'est comme ça ; on est toujours
réticent. Comme il n'y a pas de suivi, personne ne se dérange
à le faire.
G. 3 : D'abord, la formation est théorique et
très insuffisante. Les salles aussi ne sont pas adaptées et elles
sont mal équipées. À tout cela, on peut ajouter le manque
de suivi de la part de l'administration. Qu'il soit par les responsables de
l'école ou par les responsables du ministère.
G. 3 : À mon sens, les obstacles les plus plausibles
sont le manque de formation et la non-conformité des salles. Même
si on veut faire, si on n'est pas formé, on ne pourra rien faire. Et
quand on est formé aussi, il faut qu'il ait une salle adaptée
à cet effet. C'est un mur qui sépare les deux salles et non une
vitre. Et ça fait longtemps qu'on avait demandé de mettre la
vitre mais jusqu'à présent rien. Et on nous demande de faire le
M-E.
G. 3 : Nous pensons qu'il y a surtout trois sortes d'obstacles
qui empêchent de mettre en oeuvre le M-E dans cette école :
l'indisponibilité de salles adaptées au M-E, l'encadreur en
charge des outils qui est souvent occupé lui aussi à ses
tâches régaliennes et l'insuffisance de formation des encadreurs
sur la mise en oeuvre du M-E.
G. 3 : Ce que les gens disent hein, ils ne font pas le M-E
parce que la salle n'est pas adaptée. Mais il ne faut pas perdre de vue
le manque de volonté des encadreurs et de l'administration car
même si on n'est pas très bien formé, s'il y a
volonté, on peut faire même si on doit tâtonner.
O. A. : Quelles suggestions faites-vous pour une mise en
oeuvre effective du M-E à l'École normale d'instituteurs
Tanimoune de Tillabéry ?
G. 3 : Comme suggestions, je propose la formation
théorique et pratique des encadreurs, une sensibilisation des
élèves-maîtres, la mise en place du matériel
nécessaire et le suivi des activités sur le M-E par les
différents responsables : directeur d'études, directeur
général, ministère de l'éducation. Si tous les
partenaires s'engagent à donner une place de choix au ME, il peut avoir
des beaux jours devant lui. Par contre, si la situation actuelle persiste, il
sera oublié.
G. 3 : Primo, il faut former les encadreurs en M-E. Secundo,
réhabiliter les salles et les équiper. Troisièmement,
l'administration doit s'impliquer pleinement dans la mise en oeuvre du M-E. Si
aucun changement de ce genre n'intervient d'ici peu, le M-E sera voué
à l'échec, s'il ne l'est pas déjà. C'est la
vérité.
G. 3 : Pour une mise oeuvre effective du M-E à l'ENI de
Tillabéry, il faut surtout former suffisamment les encadreurs et
modifier les salles pour les rendre conformes aux normes.
G. 3 : Pour mettre en oeuvre le M-E de façon effective
à l'École normale de Tillabéry comme ailleurs, il faut
définir les rôles et les responsabilités de chaque
unité pédagogique. La transversalité d'une discipline ne
fait guère d'elle la clé de la formation. À l'école
des officiers des FAN, par exemple, un spécialiste de droit dispense des
cours de droit. Mais la carrière militaire ne privilégie point ce
fondement de droit. Ce sont le maniement des armes et le stratagème
militaire sur le front qui le complètent. Je veux dire qu'il faut qu'on
pratique le M-E et on doit le laisser aux didacticiens.
xxx
G. 3 : Il faut aussi motiver les
élèves-maîtres puisque tout se passe avec eux. Mais
auparavant, comme l'ont dit tous les autres, on doit former tous les encadreurs
et revoir l'architecture des salles de M-E.
O. A. : Je vous remercie beaucoup de votre aimable attention.
Bonne journée.
xxxi
Texte de l'entretien avec les responsables
administratifs
Focus group 4
Intervieweur : Oumarou Amadou
Durée de l'entretien : 29 minutes et 32 secondes
Date de l'entretien : 23 juin 2013 à 17 h 30 mn Nombre de participants :
5 dont 1 femme
Oumarou Amadou : Madame et messieurs, bonjour. Comme nous vous
l'avions annoncé, nous voulons vous entretenir sur un certain nombre de
préoccupations dans le cadre l'élaboration de notre
mémoire sur le M-E. La première préoccupation est la
suivante : quelle appréciation faites-vous de votre formation en M-E
?
Groupe 4 : Moi, je viens d'arriver. Je n'ai même pas un
an à mon poste. Je n'ai aucune formation en M-E. S'il y a
appréciation à faire, il faut les autres, surtout les
formateurs.
G. 4 : Merci de poser la question. Ce n'est pas une question
de durée à l'École normale. Moi, ça me fait dix ans
ici, cette année. Mais je n'ai jamais reçu de formation
concernant le M-E. C'est rare qu'on nous forme. Ce sont les encadreurs qu'on
forme même s'il y a formation à faire. Nous, on entend seulement
parler de M-E.
G. 4 : Bon, nous quand même, nous avons reçu une
formation en M-E. Et d'ailleurs deux même : la première fois,
c'était un jour et la deuxième fois deux jours. Mais c'est
insuffisant comme formation puisque c'est des formations
intégrées dans d'autres formations. Je veux dire que ce n'est pas
des formations spéciales pour le M-E.
G. 4 : En tout cas, nous, on n'a pas été
formé. Je ne connais rien dedans. Si je vous parle d'une formation sur
ce plan, je vous ai menti. Voilà.
G. 4 : En ce qui me concerne, je dirai que j'ai
été formé une fois. Mais c'est très insuffisant
comme formation. Figurez-vous hein, cette formation n'a duré qu'une
seule journée ; c'est quel type de formation ça ?
O. A. : De quelles ressources matérielles dispose votre
établissement pour réaliser des séances de M-E ?
G. 4 : A mon arrivée ici, on m'a présenté
les différents locaux et dedans j'ai vu la salle de ME. Le responsable
de la salle m'a présenté le matériel à sa
disposition : deux télévisions, trois caméras, deux
rétroprojecteurs, un magnétoscope, des cassettes VHS et des CD
pour l'enregistrement. Euh, j'allais oublier les écrans de projection
qui sont aussi au nombre de deux.
G. 4 : Pour les ressources matérielles, le DG a tout
dit. Je confirme l'existence de tout ce matériel. Mais je tiens à
préciser que la salle dont il a parlé est un bloc qui comprend
deux salles de classe et un magasin. Donc ça fait trois salles et non
une.
G. 4 : Je suis entièrement d'accord avec mes
prédécesseurs. Mais à ce matériel qu'ils viennent
d'énumérer, j'aimerais quand même ajouter les ordinateurs.
Le M-E a deux ordinateurs : un ordinateur portable et un ordinateur de
bureau.
xxxii
G. 4 : Je ne connais pas exactement le matériel de M-E.
Mais je sais qu'il y a les trois salles, des caméras et des
télés ; c'est tout ce que je sais.
G. 4 : Le problème, c'est que la salle où il y a
le matériel est toujours fermée. On ne peut dire exactement ce
qu'il y a dedans. Mais moi aussi je sais qu'il y a des caméras, des
rétroprojecteurs, des magnétoscopes et des ordinateurs.
O. A. : Quelle est la fréquence de la pratique du M-E
à l'École normale d'instituteurs Tanimoune de Tillabéry
?
G. 4 : Il y a des moments où on voit les
élèves-maîtres dans la salle de M-E. Mais ce n'est pas
toujours. Vraiment ça ne marche pas comme on le veut, hein.
G. 4 : Effectivement, quelquefois ils font le M-E mais je ne
dirai pas par semaine ou par mois. Combien de fois aussi, je ne peux le
dire.
G. 4 : Sincèrement, depuis que je suis là, je
n'ai jamais vu quelqu'un faire du M-E. La vérité, c'est la
vérité.
G. 4 : En tout cas, même s'il est pratiqué, c'est
très timide.
G. 4 : Moi ça fait longtemps que je n'ai pas vu
quelqu'un pratiquer du M-E. Donc, il n'est pas pratiqué.
O. A. : Quels sont les obstacles liés à la mise en
oeuvre du M-E dans votre école ?
G. 4 : Je crois que nous sommes tous d'accord que les
encadreurs ne sont pas bien formés dans ce domaine. Ensuite, il y a le
problème de la salle même de M-E. C'est une salle qui n'est pas
adaptée pour faire du M-E. Il manque des vitres entre les salles de
classe et le laboratoire, c'est-à-dire là où se trouvent
les appareils. C'est dans cette salle normalement que les
élèves-maîtres doivent rester pour suivre la leçon
de leur camarade qui est dans la salle de classe. Comment on peut voir
quelqu'un à travers un mur ?
G. 4 : Le plus grand obstacle, c'est la salle dont il vient de
parler car même à travers un séko on ne peut pas voir
quelqu'un qui présente une leçon avec ses élèves
à plus forte raison un mur. Deuxièmement, vient le
problème de formation. Honnêtement, les encadreurs ne sont pas
formés en M-E. Il faut apprendre à la personne à
pêcher avant de lui dire de pêcher, c'est la logique des choses.
G. 4 : Pour moi, le premier problème, c'est
l'insuffisance de la formation des encadreurs. C'est vrai que la salle n'est
pas adaptée, mais cela n'empêche pas de faire quelque chose quand
on est bien formé. Mais bon. Il y a aussi le problème de suivi
hein. Personne ne suit la mise en oeuvre du M-E. Dans ce cas, chacun fait ce
qu'il veut.
G. 4 : À mon sens, les obstacles sont de deux ordres :
le manque de formation des enseignants et le problème de la salle qui
manque de vitre. C'est tout.
G. 4 : Les collègues ont tout dit. La formation
reçue par les encadreurs ne suffit pas pour leur permettre de pratiquer
le M-E. Pour la plupart d'entre eux, c'est une formation d'une
journée.
xxxiii
Certains n'ont même pas reçu cette formation
d'une journée. Et la salle aussi n'est pas adaptée.
O. A. : Comment se fait le suivi de mise en oeuvre du M-E dans
votre établissement ?
G. 4 : À mon avis, il n'y a même pas de suivi. Ni
du niveau central ni du niveau local. Quelqu'un qui n'est pas formé pour
une activité, comment il peut suivre quelqu'un d'autre pour cette
même activité ? Et pour dire quoi ? Suivre signifie observer et
faire des observations ou donner des conseils. Or, nous ne pouvons conseiller
ni faire des observations à personne dans ce cadre-là.
G. 4 : À ma connaissance, il n'y a jamais eu de suivi
de mise en oeuvre du M-E ici à Tillabéry. Moi, je n'ai jamais
suivi et j'ai pas vu quelque d'autre le faire.
G. 4 : Quel suivi ? Personne ne suit cette mise en oeuvre.
Nous ne sommes pas suffisamment outillés pour le faire. Et d'ailleurs,
les encadreurs ne pratiquent même pas le M-E. Qu'est-ce qu'on va suivre
dans ce cas ?
G. 4 : Vous avez suivi tout de suite le collègue. Nous
ne sommes pas formés. On ne peut pas suivre quelqu'un comme ça
pour le plaisir de le suivre.
G. 4 : Je sais que j'ai une fois assisté à une
séance de M-E à la demande d'un encadreur. Et à la fin de
la séance, je lui ai fait quelques propositions en vue
d'améliorer sa prestation après avoir visionné le film.
O. A. : Quelles suggestions faites-vous pour une mise en
oeuvre effective du M-E à l'École normale d'instituteurs
Tanimoune de Tillabéry ?
G. 4 : Merci de poser cette question. Il faut, dans un premier
temps, former tous les responsables administratifs pour pouvoir suivre la mise
en oeuvre du M-E. Deuxièmement, il faut former tous les encadreurs.
Troisièmement, il faut placer les vitres au niveau de la salle de
M-E.
G. 4 : Pour moi aussi, il faut former tous les responsables
administratifs et les encadreurs et revoir la salle de M-E.
G. 4 : Pour que le M-E soit régulièrement
pratiqué à l'ENI de Tillabéry, il faut qu'on forme
suffisamment les encadreurs. Il faut aussi les envoyer en voyage
d'études pour qu'ils voient comment ça se passe et comment
ça marche ailleurs.
G. 4 : Il faut vraiment former suffisamment les encadreurs.
C'est la première des choses. Il faut sensibiliser aussi les
élèves-maîtres car ils sont concernés par cette mise
en oeuvre du ME. Et comme l'a dit mon prédécesseur, il faut
envoyer les encadreurs en voyage d'études.
G. 4 : À mon avis, il y a trois conditions à
remplir pour que le M-E fonctionne régulièrement. Il faut adapter
la salle de M-E aux normes en la matière. On nous a toujours dit qu'on
va réparer mais jusqu'ici rien. Secundo, il faut former correctement les
encadreurs. Un seul jour ne suffit pas pour former correctement. Il faut aussi
qu'il ait un suivi de notre part et de la part du ministère.
O. A. : Je vous remercie beaucoup d'avoir répondu à
mes questions. Bonne journée.
xxxiv
Annexe 3 : Listes des aptitudes selon les auteurs
Liste des aptitudes selon Allen et
Ryan28
1. Varier les stimuli
2. Sensibiliser au problème à traiter
3. Récapituler et intégrer les connaissances
4. Recourir au silence et aux indications non-verbales.
5. Renforcer la motivation et la participation de
l'élève
6. Savoir enchaîner les questions
7. Contrôler la compréhension
8. Savoir poser des questions complexes
9. Poser des questions discriminatoires
10. Être sensible aux réactions des
élèves
11. Recourir aux images et aux exemples
12. Techniques d'exposé
13. Répétition programmée
14. Susciter une communication complète dans la classe
Liste des aptitudes selon Altet et
Britten29
1. Sensibilisation
2. Communication verbale
3. Facilité à poser des questions
4. Renforcement
5. Communication non-verbale
6. Attention des élèves
7. Utilisation d'exemples
8. Cadre de référence
9. Répétition
10. Questions d'approfondissement
11. Questions de réflexion
12. Auxiliaires visuels
13. Variation des sources d'information
14. Contrôle des résultats obtenus
15. Questions entre élèves
16. Questions de discussion
17. Participation
18. Clôture
19. Questions posées par les élèves au
maître
20. Exposé
21. Sondage préalable
22. Enchaînement et transitions
23. Focalisation et relance de questions
24. Préparation des élèves à
répondre
28 Allen et Ryan (1969/1972, p. 16).
29 Altet et Britten (1983, pp .237-240).
xxxv
Liste des aptitudes selon
Wagner30
1. Le renforcement, soit l'encouragement et le soutien de la
participation des élèves, l'évaluation positive de leurs
réponses.
2. L'utilisation des exemples, soit illustrer par les
exemples, expliquer à partir d'exemples, les solliciter chez
l'élève pour vérifier la compréhension.
3. La sensibilisation, soit l'introduction d'un contenu de
cours, la sensibilisation au problème à traiter en début
de cours, le préambule d'une tâche...
4. La facilité à poser des questions, soit
questionner les élèves sous des formes différentes
(questions ouvertes, fermées, simples, complexes...), enchaîner
ses questions.
5. La généralisation de la participation, soit
faire participer tous les élèves aux échanges,
contrôler et réguler cette participation.
6. L'usage d'auxiliaires visuels - le tableau, soit se servir
de supports visuels, du tableau, de blocs-notes, d'ouvrages à
compulser.
7. La communication non-verbale, soit :
a) l'utilisation des indications non-verbales et les
silences,
b) le recours au langage non-verbal pour appuyer le verbal...
8. L'exploitation des réponses, soit s'appuyer sur les
réponses des élèves pour construire ou ajuster la
démarche du cours, les noter au tableau, les corriger, les
approfondir.
9. La communication verbale dans l'exposé, soit :
a) le soin apporté à l'aspect formel du
langage, mode d'expression, vocabulaire, rythme, articulation et pauses...
b) l'articulation logique des idées, la clarté
et la précision des idées énoncées, la
qualité de structuration de l'ensemble.
10. Les aptitudes non-directives, soit utiliser le renvoi des
questions posées par les élèves (renvoi en écho,
miroir, relais) ; élucider les réponses au niveau du vécu
; vérifier la fidélité de ses reformulations ;
contrôler la tendance de l'enseignant à répondre
lui-même...
Liste des aptitudes selon Turney et
collaborateurs31
A) Aptitudes en rapport avec la motivation
1. Renforcement
2. Variation des sources d'information
3. Sensibilisation
4. Participation
5. Savoir accepter et soutenir les sentiments et
contributions des élèves ; savoir identifier et utiliser les
intérêts des élèves
6. Savoir faire preuve de chaleur et d'enthousiasme
7. Savoir identifier et répondre aux besoins des
enfants
B) Aptitudes en rapport avec la présentation et la
communication
1. Explication
2. Dramatisation
3. Lecture à haute voix (par le maître, devant la
classe)
4. Utilisation d'aides audio-visuels
5. Clôture
30 Wagner (1988, pp. 68-69).
31 Turney et collaborateurs, cités par Altet et Britten
(1983, pp. 174-176).
6.
xxxvi
Flexibilité ou adaptabilité de l'enseignement
7. Savoir éclaircir les idées des
élèves
8. Savoir soutenir les idées des élèves
9. Silence du maître
10. Exemples
11. Questions avec préavis verbal ou non-verbal
12. Savoir faciliter la mémorisation
13. Transition entre activités, enchaînement
14. Savoir promouvoir l'interaction entre
élèves
15. Savoir se servir des idées des
élèves
16. Savoir exprimer l'articulation du cours
17. Contrôle des résultats obtenus
18. Savoir raconter
19. Utilisation de communication non-verbale y compris les
comportements non-verbaux affectifs
20. Comportement verbal indirect
21. Exposé
22. Clarté de présentation
23. Qualité expressive
24. Organisation de la présentation
25. Savoir varier le début de la présentation
26. Savoir prévoir des activités conjointement
avec les élèves
27. Savoir développer l'expression orale des enfants
28. Répétition
29. Communication verbale
C) Aptitudes en rapport avec le
questionnement
1. Facilité à poser des questions
2. Nouvelle mise au point et relance de questions
3. Questions d'approfondissement
4. Questions de réflexion
5. Savoir susciter des questions d'élèves et y
répondre
6. Questions convergentes et divergentes (tendant respectivement
vers l'unanimité et vers la discussion ouverte)
7. Savoir orienter la participation des élèves
à la discussion
8. Question pour inciter les élèves à
prendre des initiatives
9. Débit dans l'interrogation verbale
D) Aptitudes en rapport avec le travail par groupe ou
l'apprentissage individuel
1. Savoir organiser le travail par petits groupes ; savoir
orienter et surveiller le travail des groupes
2. Savoir mettre le travail de groupe au service des besoins
individuels
3. Développement de l'apprentissage indépendant
4. Individualisation de l'enseignement
5. Savoir organiser l'apprentissage indépendant
6. Entretien avec l'individu ou le petit groupe
7. Savoir promouvoir la coopération au sein des
groupes
8. Savoir promouvoir l'interaction entre élèves
dans le groupe
xxxvii
E) Aptitudes en rapport avec les processus
intellectuels des élèves
1. Savoir favoriser l'apprentissage par la recherche
personnelle
2. Savoir orienter la découverte des
élèves
3. Savoir stimuler la créativité
4. Savoir favoriser l'autonomie des élèves
5. Savoir orienter l'apprentissage des
élèves
6. Savoir développer des concepts chez les
élèves
7. Jeux et distribution des rôles pour stimuler la
réflexion
8. Développement de l'aptitude à
résoudre des problèmes
9. Savoir amener les élèves à
évaluer et à formuler des jugements
10. Développement de la pensée critique
F) Aptitudes en rapport avec
l'évaluation
1. Savoir reconnaître et évaluer les
progrès des élèves
2. Savoir diagnostiquer les difficultés
3. Travail correctif
4. Savoir amener les élèves à
s'auto-évaluer
5. Évaluation collective par la discussion
G) Aptitudes en rapport avec l'animation et la
discipline
1. Savoir reconnaître les comportements attentifs et
inattentifs
2. Savoir maximiser l'intérêt de
l'élève
3. Savoir faire preuve de sérieux à
l'égard de la tâche
4. Savoir montrer qu'on est conscient du comportement des
élèves
5. Savoir donner des consignes
6. Savoir faire face à des situations complexes
7. Savoir faire face au comportement indiscipliné,
obtenir la maîtrise
8. Savoir structurer l'espace pédagogique
9. Savoir instaurer des procédures de travail dans la
classe
10. Organisation du travail de la classe
11. Attention des élèves
12. Savoir faire cours à la classe entière
13. Rappel d'un élève à la tâche
visée
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