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Impacts d'une crise sectorielle sur la confiance des consommateurs et les stratégies publicitaires. Une application au secteur bancaire français depuis la crise financière de 2008.

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par Tom Delacroix
Montpellier Business School - Master Grande Ecole 2015
  

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2. ANALYSE DES STRATEGIES DE COMMUNICATION AVANT LA CRISE DE 2008

Dans le cadre de notre problématique, qui est de savoir si la crise a impacté les stratégies de communication et de quelle manière, nous devons tout d'abord analyser les stratégies de communication des banques avant la crise financière. Cela nous permettra de faire apparaître les évolutions entre les deux périodes. Nous pouvons commencer par donner un historique succinct de l'évolution des stratégies de communication des grandes banques françaises grâce à l'article de recherche de Paviot (1995).

La publicité mass média des banques débute dans les années 50 lorsque de nouveaux produits financiers sont développés, l'objectif est alors d'éduquer le consommateur avec des messages pédagogiques. Dans les années 70, la société se bancarise fortement et la concurrence augmente progressivement. Les banques tentent de sortir du lot comme le montre la célèbre affiche de BNP « Votre argent m'intéresse ». Nous appellerions cela aujourd'hui en marketing, un « buzz ». En effet comme nous l'avons expliqué, l'argent est un symbole tabou dans la société française et les consommateurs n'ont pas bien accueilli cette campagne. La communication des banques évolue en même temps que la société, et elles vont chercher les nouveaux clients : les femmes et les enfants. Depuis 1965, les femmes sont légalement autorisées à ouvrir un compte sans autorisation maritale. Treize ans plus tard, BNP lance sa campagne d'affichage « c'est moi qui compte » où l'on peut voir une femme ouvrir un compte bancaire. Nous pouvons remarquer grâce à cet article, que la plupart des banques ont un manque de stabilité dans les campagnes et les slogans employés. Par exemple, la Société Générale a lancé plus de quatre slogans et campagnes différents entre 1982 et 1992. En revanche une banque qui a toujours fait figure de bonne élève dans la construction de sa stratégie de communication, c'est le Crédit Agricole. Sa stratégie est restée stable depuis très longtemps comme le justifie le slogan, resté inchangé depuis quarante ans « Le bon sens ». En 1991 la première grave crise immobilière touche

44 Paviot G. (1995) - La communication publicitaire et la réputation des banques, Communication et langages, N°105, pp.92-104

la France et les stratégies de banque ne perdent pas de temps pour s'y adapter. On s'aperçoit en effet que les banques intègrent les clients dans les campagnes télévisées « Grandissons ensemble » « Conjuguons nos talents » « votre projet est le nôtre ». BNP lance même en 1994 un spot télévisé « 15 secondes pour changer d'idée sur la banque ».

Le logo est devenu au fil des années, un élément phare de la stratégie de communication. Présent dans les publicités mass-médias et hors médias, en interne et en externe, il est l'élément le plus visible et celui qui transcrit le plus simplement les valeurs de l'entreprise. Un tournant important est entrepris par le secteur à la fin des années 80 car l'intégralité des banques modernise leur logo. BNP ouvre la danse en 1986 après vingt ans sans changement. La Banque Populaire (1987), le Crédit Agricole (1988) la Société Générale (1990) et enfin la Caisse d'Epargne (1991) suivent le pas en intégrant des nouvelles couleurs, des contours plus épurés... Comme l'avait expliqué Phil Passani (2015) devant les élèves de Master de Montpellier Business School, « un bon logo doit pouvoir se tracer à main levée dans le sable en restant le plus simple possible». C'est en effet dans ce sens que les logos des banques sont transformés et épurés depuis cinquante ans.

Les banques traversent par la suite de nouvelles crises externes (bulle Internet) ou internes (Crise du Sentier au Crédit Lyonnais). Certaines banques retravaillent leur image comme le Crédit Lyonnais qui affiche « Nous vous devons une nouvelle banque ». Après les années 2000, les messages sont au diapason et cherchent à démontrer la capacité d'adaptation des banques au monde qui les entoure. CIC lance son fameux slogan, « Parce que le monde bouge» et BNP «La banque d'un monde qui change ». Les banques françaises ont donc pris plusieurs décennies pour acquérir une indépendance totale dans leurs stratégies de communication. Au milieu des années 2000, le « back office » est au centre des communications, souvent de manière décalée. La prise de parole est de plus en plus décontractée, ce qui permet de créer un nouveau lien loin de l'image sérieuse et ennuyante du banquier. Cela est aussi fait pour montrer que l'humain est important face aux nouvelles banques en ligne.

Au sein de l'étude qualitative sémiologique, nous avons donc analysé les campagnes de publicité des banques françaises en nous concentrant sur le Crédit Agricole, la Société Générale et BNP Paribas. Ces trois banques sont en effet les plus importantes en termes de PNB45. Une centaine de spots publicitaires ont été visualisés et analysés. Cette étude a été couplée à la lecture des communiqués de presse des banques concernant les campagnes de communication.

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45 Terme défini dans le glossaire p.69

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Dans un premier temps, l'analyse des publicités avant la crise financière nous permet de dégager une tendance générale dans la manière de communiquer : l'humour. Le ton employé dans les campagnes est en effet très décontracté et loin de l'image habituellement dégagée par le secteur bancaire. La volonté d'inspirer un capital sympathie a entraîné les banques à adopter une stratégie créative tournée sur le ton du comique. L'exemple le plus évocateur est celui du Crédit Agricole et sa saga des banquiers chanteurs. Durant cinq années (à partir de 2006) les publicités du CA montrent des conseillers répondant aux interrogations de leur client en chantant. Ainsi lorsque le sujet du prêt immobilier est abordé, la chanson de Claude François « viens à la maison » résonne dans l'agence en play-back. Le banquier se transforme alors en « bête de scène », à la limite de l'hystérie. Face à cette attitude, les clients dans les publicités ainsi que le spectateur ne peuvent être que surpris. Chez BNP Paribas, les humoristes Eric et Ramzy sont les protagonistes d'une large campagne publicitaire, à destination première des jeunes. L'univers des spots est très ouvert artistiquement. Des personnages burlesques sont présents comme un pirate qui chante, danse et tombe. Les deux acteurs emploient un ton léger et comique pour aborder différents sujets bancaires. Ils lancent par exemple des sacs d'AJO en volant en montgolfière. La publicité à destination des actifs n'est pas plus sérieuse puisqu'elle met en scène un adulte cherchant une banque pouvant le recevoir au Far-West. BNPP souhaite démontrer qu'elle peut s'adapter aux jeunes ainsi qu'à leur discours avec l'utilisation du langage SMS « TA + K ENTRER ». La Société Générale avait aussi lancé une grande campagne basée sur l'humour avec le « Coup de Pouce » lancé en 2006. La banque est en effet représentée par un pouce en 3D qui aide les clients de la banque dans la vie quotidienne. L'image même du pouce géant est humoristique, même si le message est sérieux. On peut par exemple voir un pouce qui aide un homme à voir par-dessus un mur (cela représente l'aide dans l'achat immobilier). Cette métaphore vient expliquer le slogan « on est là pour vous aider ». La musique de fond très joyeuse vient appuyer l'émotion déclenchée. D'autres banques ont aussi choisi de communiquer avec humour comme le CIC qui depuis 2006 se compare à ses concurrents en les ridiculisant. Le comique de situation est alors largement utilisé pour prouver que les services des concurrents du CIC sont inférieurs. Le LCL lui a décidé depuis la même année d'engager des personnes connues (comiques, sportifs...) afin de les mettre au premier plan dans les publicités. Ainsi Karim Benzema, Muriel Robin inspirent la confiance populaire au sein de la banque en venant participer de manière humoristique aux spots. La Caisse d'Epargne communique grâce à des animaux humanisés. C'est un prolongement du célèbre écureuil, symbole même de la banque. Ces animaux chantent et font des blagues. La Banque Postale ne déroge pas à la règle et communique avec humour sur le prêt immobilier pour emménager.

Nous comprenons donc qu'une grande liberté est donnée aux agences dans la stratégie créative. C'est en effet une période de développement économique importante où il n'y a pas de crise. Les

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banques ont une volonté de se démarquer en adoptant ce ton décalé et comique. L'objectif est ainsi de changer l'image d'un banquier sérieux et ennuyant.

Nous avons de plus compris grâce à notre étude, que les publicités bancaires avaient pour objectif principal avant la crise, de mettre en avant des produits. Ainsi les cartes bancaires font souvent l'objet de spots spécifiques (exemple de la publicité du banquier chanteur pour la carte débit différé/classique). Les publicités parlent aussi souvent des produits d'assurance proposés par les banques (assurance auto ou maison par exemple). Les taux des crédits sont des vecteurs de différenciation importants et les opérations spéciales se multiplient afin d'afficher les taux les plus bas. Cette stratégie produit est surtout pratiquée par le Crédit Agricole, le CIC et le LCL. L'analyse sémiologique verbale confirme que les mots les plus employés dans les spots se réfèrent à des produits et non des valeurs, ainsi les mots « carte » « acheter » « solution » « propriétaire » sont des termes très employés. Le CIC affiche clairement cette communication sur ces produits dans la publicité TV ou affichage. On peut y voir une affiche en Front-Office décrivant en une phrase les avantages des produits « Le taux du livret CIC est de 5,25% ». Karim Benzema lui, incarne un client attentif aux avantages que propose la banque en ligne E-LCL. Eric et Ramzy évoluent dans une publicité TV dans un appartement gigantesque où ils sont minuscules et démontrent ainsi la capacité de BNP Paribas à délivrer des crédits immobiliers pour les jeunes. Pour présenter ces produits, les stratégies sont diverses : en montrant des clients dans une agence (CA - CIC) ou grâce à une vision métaphorique (SG - CE). Les banques en ligne en plein développement ont centré leur stratégie sur la communication produit, et notamment sur la gratuité des cartes bancaires (Boursorama ou ING Direct par exemple). Les banques communiquent ainsi peu sur les valeurs des groupes. Certaines banques (SG - Banque Populaire) ont une communication un peu plus institutionnelle en démontrant l'accompagnement tout au long de la vie d'un client (de sa naissance jusqu'à sa mort).

Certains spots publicitaires paraissent complètement inappropriés lorsque nous connaissons l'histoire du secteur bancaire après 2008. La Société Générale diffuse par exemple un spot TV sur les produits de bourse. On peut y entendre un discours vantant les avantages à investir en bourse à la SG. Le slogan était « Prenez plaisir à réussir en bourse ». Dans ce spot de 2006, les images sont de synthèse et aucun humain n'apparaît dans la publicité. La caisse d'épargne nous informe aussi via son écureuil que l'on peut « placer en bourse et sécuriser nos gains ». On comprend donc qu'il n'y a à l'époque aucun tabou à parler de la bourse et de la spéculation ouvertement au grand public.

Il est important de noter que les campagnes lancées en 2006/2007 étaient des campagnes à haut budget qui n'ont pas été stoppées suite à la crise financière. Le maintien de ces campagnes dans le temps s'explique par plusieurs raisons. D'une part, leur coût oblige les banques à les utiliser le plus longtemps possible. D'autre part la durée, l'intensité et les conséquences de la crise financière étaient des variables encore inconnues et ne permettaient pas de changer le cap des décisions stratégiques. La

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plupart de ces campagnes multi-supports ont duré jusqu'en 2010/2011. Les grandes campagnes, notamment celles de BNPP, SG et CA ont donc été les mêmes malgré les évènements récents dans le monde. La SG a cependant en 2009 changé légèrement le ton de sa campagne « coup de pouce ». Le slogan reste le même, mais le pouce 3D est oublié et laisse place à des clients et conseillers en chair et en os. Cette stratégie permet de comprendre le sens que prennent les publicités du secteur bancaire.

Les campagnes publicitaires avant la crise financière avaient donc comme principal ton de communication l'humour. L'utilisation de l'humour était alors possible dans un climat de prospérité économique. Les publicités concentraient les messages autour des produits, en donnant assez peu la parole aux clients. Certaines banques sont même allées jusqu'à communiquer sur des produits boursiers, à l'aube d'une crise qui remettra en cause le paysage actuel.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille