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Contentieux Electoral et Etat de Droit au Tchad

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par Eugène Le-yotha Ngartebaye
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master Droits de L'homme et Action Humanitaire 2004
  

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§2 : Le rôle incantatoire des commissions électorales

La revendication des structures autochtones et indépendantes chargées de gérer les élections a été au coeur des revendications des acteurs politiques. Cette situation s'explique par le besoin d'exclure l'administration ou du moins d'amoindrir son influence sur le déroulement des élections. Mais cette attente est aujourd'hui loin de faire l'unanimité qui prévalait au moment de la naissance des commissions. Les commissions électorales sont devenues des ressources de la conservation du pouvoir politique en place (B) et, ceci se justifie aisément par une création biaisée (A).

A- Une création biaisée

Qu'il s'agisse de la CNRE ou de la CENI, l'institutionnalisation de ces structures est considérée comme une tentative de définition d'une règle de jeu principal (proclamée et affichée comme telle par les différents acteurs du jeu politique), est d'assurer la transparence et le neutralité électorales. Ce qui suppose qu'il faudrait bien choisir les membres de ces structures, c'est-à-dire le choix doit être défini par des critères objectifs tels que la compétence, l'ancienneté ou l'appartenance à une corporation bien définie (syndicat, ordre d'avocats, etc.). Comme ce fut le cas au Burkina où la loi du 17 mai 1998 « la commission électorale nationale indépendante (CENI) est composée ainsi qu'il suit : 6 représentants des partis politiques de la majorité, 6 représentants des partis politiques de l'opposition, 3 représentants des communautés religieuses, 3 représentants des communautés coutumières, 6 représentants des centrales syndicales, 3 représentants des association de défense des droits de l'homme et des libertés. Et l'article 5 de préciser que « les membres de la CENI sont désignés par leurs structures d'origines pour leur sens patriotique.  Ils doivent être de bonne moralité et jouir de leurs droits civiques.» Mais ce qui demeure curieux pour le Tchad, c'est que la loi organisant la CENI donne seulement le nombre de membres et leur répartition entre le gouvernement, les partis politiques représentés à l'Assemblée Nationale et ceux non représentés à l'Assemblée. La question de qualité ou de la représentation des membres de l'organisation de la société civile, le problème de la qualité de membres ne figure non plus. On note de part et d'autre une nette prépondérance de l'exécutif sur la désignation des membres.

Un autre élément d'incertitude est relatif au rapport que peuvent entretenir ces structures avec le gouvernement et le parlement. Les textes législatifs et réglementaires définissent les attributions des commissions en des termes juridiquement imprécis, dont la traduction concrète est incertaine.

La composition des commissions a suscité de multiples commentaires et critiques, et pour beaucoup les objectifs recherchés d'impartialité et d'établissement de la confiance avec la population, à l'origine de leur création, n'ont pas été pleinement atteints. Les commissions deviennent enfin de compte une ressource de conservation du pouvoir.

B- Les commissions comme ressource de conservation du pouvoir politique en place

Pour plusieurs acteurs politiques, le code électoral, les lois et règlements qui organisent les commissions contiennent les instruments et mécanismes de garantie suffisants pour que les commissions apparaissent dès lors comme vides de sens.102(*) Mais à l'observation de la pratique, ces institutions servent plus comme un moyen d'expression de leurs prétentions conservatrices, de symboles de légitimation ainsi que de stratégie de jeu politique par de fréquentes mises hors-jeu que de véritables régulatrices du processus démocratique. La preuve réside dans la tendance à la monopolisation de leur gestion, c'est-à-dire dans l'organisation et le fonctionnement. En ce qui concerne leur organisation, les autorités dirigeantes exercent un contrôle sur ces commissions en procédant à la nomination de leurs proches comme Responsables et en disposant d'une forte représentative en leur sens. Ceux-ci pourront alors jouer leur jeu. Pour le fonctionnement, le pouvoir peut donner avec retard les moyens financiers et logistiques permettant le bon déroulement. Cette tendance à la monopolisation va croissant avec l'appui que ces responsables politiques dits de l'opposition, font des alliances avec le parti au pouvoir afin de consolider leur position.103(*)

Les commissions se politisent à outrance, ce qui amène à croire que l'alternance ne sera pas pour demain au Tchad, car faut-il le souligner, la neutralité, l'impartialité des commissions sont les signes avant coureurs de l'alternance.104(*)

A cette lutte pour le contrôle des commissions, l'instrumentalisation des élections trouve sa source aussi dans l'élection.

* 102 Au Congo, par exemple, le Ministre de l'intérieur, Pierre Oba déclara que « cette commission indépendante a une grande part de responsabilité dans ce que notre pays a connu au cours des années quatre-vingt-dix », cité par Jeune Afrique l'Intelligent du 09 au 15 octobre 2001, p.38.

* 103 Au Cameroun par exemple, dans une intéressante communication Pokam montre ces alliances et comment certains universitaires viennent au secours pour soutenir la neutralité de l'ONEL. Hilaire de Prince Pokam, « les commissions électorales en Afrique subsaharienne : analyse de leurs enjeux et de leurs usages par les acteurs politiques au cours du processus d'invention de la neutralité électorale. » Communication faite à l'Université de Bordeaux. 26p

* 104 Voir Zekaria à propos de la désignation des présidents de l'ONEL au Sénégal. Zekaria Ould Ahmed Salem, « l'observatoire nationale des élections au Sénégal, une neutralité sous surveillance » in Quantin (P) Voter en Afrique. Comparaisons et différentiations, Paris, l'Harmattan, 2004.

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