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L'Equité dans les Associations

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par Valérie CALLADINE-GRAUX
CNAM de Paris - Master Recherche "Développement des Ressources Humaines" 2007
  

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- La rétribution

Comme vu précédemment, le secteur associatif est régi par le code du travail et la convention collective de l'animation ou des activités sportives pour les salariés. Les bénévoles sont régis par la charte des associations et par l'émergence de nouvelles dispositions législatives (statut du volontaire et autres dispositions en terme de formation, de congés spéciaux de VAE 69(*)).

70(*). Pourtant, au cours des différentes rencontres, il apparaît pour les bénévoles, qu'il existe une différence entre les salariés et eux-mêmes: « Pour le bénévole, c'est un acte gratuit, pour le salarié, c'est un acte rétribué » 71(*).

La reconnaissance

§ Le bénévole

«  Nos engagements tirent leur raison d'être de sources profondes. Nos motivations ne sont pas facilement formulables, c'est surtout l'envie de donner, de recevoir, de connaître et d'être reconnu »72(*). La reconnaissance est un élément de motivation très fort chez le bénévole. En effet, sans réelle rémunération en espèce ou en nature, le bénévole veut et demande de la reconnaissance pour son statut mais aussi pour ce qu'il fait. Il mesure « ce retour sur investissement » selon la manière que l'association utilise pour mettre en lumière les actions réalisées du bénévole.

L'une des méthodes retenues par les bénévoles et dont ils souhaiteraient qu'elle soit plus exploitée est celle du temps accordé à l'association. « Les bénévoles ont la mémoire de l'association. Ils sont donc fidèles aux grandes lignes directrices de l'association » 73(*).Lors des entretiens avec les bénévoles, il ressort le fait qu'ils se sentent partie intégrante de l'association, alors qu'ils étaient là à la création. « Sans les bénévoles, les associations n'existent pas. Et cela, vous pouvez l'écrire en gros » 74(*). Les bénévoles rencontrés estiment avoir donné et attendent donc en échange. Il s'agit du principe de la réciprocité : `parce que je te donne tant, alors tu me rends tant'. Le remboursement des titres de transport ou bien des repas leur semblent dérisoire par rapport à leur investissement. Etre bénévole « nécessite beaucoup de disponibilité,..... avoir une bonne vision de ce qu'est Léo Lagrange » 75(*). C'est en ces termes que le DRH de la Fédération Léo reconnaît l'impact positif du bénévole dans l'association.

§ Le salarié

Valérie, salariée de l'association « Aux Captifs, La Libération » précise même « qu'on rentre à Captifs non pas pour faire de l'argent, mais bien pour se battre pour une cause ». L'avantage pour les salariés d'être dans une association ne réside absolument pas dans l'aspect financier mais surtout dans les valeurs à défendre. Mais, nous notons aussi que la reconnaissance se fait à travers ce qu'ils sont : « Je pense avoir été embauchée, car j'étais déjà bénévole 76(*) ». Nous pouvons nous demander si le salarié se positionne dans la peau du bénévole qu'il était avant pour être reconnu. Cette réflexion est paradoxale, car elle positionne deux statuts mais met en valeur davantage celui de bénévole.

Le numéraire

§ Le bénévole

Chez les bénévoles, la démarche est la même, puisque il n'est pas rémunéré : « Cela est « lié au boulot de la Cimade ». Il ressort que le bénévole fait un acte généreux : il donne ses compétences au service de l'autre. Le bénévole cultive le don : « Le bénévole donne un coup de main, mais il attend quelque chose en retour, il n'est pas payé, il veut un rôle officiel » 77(*) .

Cette valorisation positionne le bénévole au coeur de l'organisation et le rend membre actif à la gestion de l'association. Le bénévole se voit donc remboursé de ses frais de transports, de ses repas. Il s'agit plus une valeur du geste plutôt qu'une marque de reconnaissance financière.

§ Le salarié

Ce rapport au don n'existe pas au niveau des salariés : en effet, ils perçoivent une rétribution financière correspondant aux fonctions occupées. Ils sont soumis au lien de subordination. L'un des salariés rencontrés, précise que la direction « valorise les différences parmi ses collaborateurs 78(*) ».

Les salaires sont déterminés en fonction du poste occupé mais aussi en fonction du marché de l'emploi  : les salariés veulent de l'estime et non celle de l'échange (salaire) 79(*).. Le rapport rétribution/contribution pour les salariés ne se situe donc pas au niveau du montant du salaire versé, mais plutôt dans le souhait d'être reconnu pour ce qu'ils sont.

Un état récapitulatif des thématiques abordées dans le champ de la rétribution

La notion de rétribution fut abordée sous deux formes précises que sont la reconnaissance et le numéraire. Nous constatons, dans un premier temps que les salariés n'ont pas la même approche de cette notion, car ils sont déjà concernés par une rétribution financière, ce qui n'est pas le cas des bénévoles. Les bénévoles reçoivent un « salaire » basé sur la reconnaissance décliné par exemple par une mise en avant d'une action bénévole individuelle ou collective. Il s'agit surtout d'affirmer leur besoin d'estime.

2.1.2 Conclusion sur la thématique de l'équité individuelle

Nous venons d'analyser le concept de l'équité individuelle reposant sur un ratio contribution/rétribution. L'individu met en schème un process de comparaison entre ce qu'il perçoit (reconnaissance basée sur le numéraire et/ou sur l'immatériel) et ce qu'il donne à l'association. Nous obtenons des résultats tout aussi différents que sont les deux acteurs des associations.

Nous pouvons en conclure que les bénévoles qui ont un besoin d'estime, d'accomplissement (théorie de Maslow) ont une contribution basée sur le don : il donne du temps, des compétences et attend en retour non pas une rétribution financière mais une reconnaissance sous forme de remerciements de la part de l'association. Cette reconnaissance peut être aussi sous la forme d'une introduction plus forte des bénévoles dans l'organisation de l'association.

Les salariés quant à eux sont dans la logique du contrat de travail : lien de subordination, démarche « donnant-donnant ». Nous notons aussi que le salarié peut ressentir comme un mal-être dans la structure, car il peut privilégier son statut de bénévole antérieur à celui de salarié. Nous pouvons conclure que le salarié connaît une crise d'identité. Mais dans le but de préserver les acteurs salariés, les DRH sont soucieux des niveaux de salaire et veillent sur les conditions de rémunération dans le secteur voisin dans le but de répondre aux besoins dits de sécurité (théorie de Maslow). Cette logique que nous venons d'aborder pour le salarié nous oblige à ne pas caractériser le ratio R/C.

2.2 L'équité collective : process de comparaison

Nous constatons que pour les acteurs, le schéma Contribution / Rétribution n'est pas réellement équilibré. L'acteur élabore un autre schéma de comparaison avec des acteurs ayant le même statut, le même profil inclus dans la collectivité. Le bénévole va donc comparer son ratio à celui d'un autre bénévole ou d'un salarié. L'équité collective se met en place en se basant sur certains axes de comparaison, dont nous allons analyser ceux afférents au milieu associatif.

- Comparaison entre des items fonctionnels

Beaucoup d'annotations au cours des échanges nous démontrent que salariés et bénévoles légitiment leurs présences différemment : leur origine, leur passé professionnel, leurs valeurs proches mais aussi opposées sont les items utilisés pour construire un modèle de comparaison.

Axe 1 de comparaison : les origines professionnelles

§ Le bénévole

Au niveau du passé professionnel, « le professionnel est issu du monde professionnel, le bénévole pas80(*) ». L'ensemble des bénévoles `subit' encore la « dame d'oeuvre ». Nous ne sommes plus aux temps où le bénévolat était reconnu comme une activité occupationnelle.

Les DRH abordent cette relation professionnelle sous l'angle de  la subordination. Pour les bénévoles, cette obligation réside dans le champ « moral » de l'acteur 81(*). Il se caractérise par la signature d'un contrat validant l'engagement « Chaque engagement est signé pour une période de 2 ans et est renouvelable 82(*). Il permet un lien de subordination mais entre le bénévole et un collectif.

§ Le salarié

Les salariés n'hésitent pas à identifier le bénévole comme un « incompétent » 83(*). Nous pouvons trouver une origine à cette réflexion dans le sens où « la dame d'oeuvre colle à la peau du bénévole ». Le parcours professionnel, la non reconnaissance réciproque, sont plus accentués chez le salarié et un certain amalgame des obligations de chacun incite à modéliser différemment. Le salarié est par nature soumis au lien de subordination : il y a une obligation de résultats.

Axe 2 de comparaison : les fonctions occupées

Au niveau des fonctions occupées, les associations privilégient le `brassage' des acteurs. Nous observons, selon les personnes rencontrées mais aussi par rapport à l'organisation des associations, que chaque statut se trouve `cantonné' à des fonctions bien précises.

§ Le bénévole

« Nos encadrants sont des bénévoles, les salariés interviennent sur des métiers supports84(*) ». Les bénévoles sont les acteurs présents depuis la création de l'association : nous retrouvons beaucoup d'entr'eux à la direction de l'association « Les bénévoles sont dans les directions85(*) ». Mais accéder à un niveau élevé de responsabilité implique des compétences précises, « avoir une bonne vision de ce qu'est86(*) l'association ». L'essence même du bénévolat s'en trouve changée : « Mais la responsabilité est de plus en plus lourde. Cela nécessite beaucoup de disponibilité. La notion d'engagement est supérieure à celles des valeurs. 87(*)

§ Le salarié

Comme le précise l'extrait référencé numéro 84, les salariés occupent des postes dans les métiers supports. Ils sont souvent dans l'administratif de la direction ou bien dans l'encadrement de grandes équipes. Voici quelques exemples issus du terrain de notre analyse et démontrant que les salariés occupent des postes de travail précis : « moi, je travaille en qualité d'assistante de direction. Je suis en constant lien avec les antennes 88(*) », « Christian Eon, Responsable du développement de la région Bretagne de l'Association Léo Lagrange 89(*) », « Monsieur Lavaud, responsable Antenne au sein de l'association Captifs de la Libération à Paris 19ème  90(*)».

Axe 3 de comparaison : les items générationnels et statutaires

§ Le bénévole

Au niveau des items générationnels et statutaires, un fait certain semble émerger : « Les bénévoles sont au départ de la création d'emploi 91(*) ». En effet, beaucoup précisent que ce sont les bénévoles qui font comprendre à la direction de l'association, qu'il est nécessaire de recruter quelqu'un de permanent. C'est une sorte de paternité qui est revendiquée par les bénévoles et très mal vécue par les salariés. « Les bénévoles font la preuve de la nécessité de la fonction et sont toujours à l'origine de la réponse aux besoins 92(*) ». Certains bénévoles ressentent une « usure, une fatigue et l'arrivée (des salariés) est responsable de notre démobilisation 93(*) ». L'intérêt du bénévole réside dans le changement significatif auquel il croit. « Le bénévole est porteur d'un excès, celui du don, alors que le salarié est lui porteur de la nécessaire limite du contrat qui encadre une relation d'échanges stricts 94(*) ».

§ Le salarié

Les salariés entrant dans cette nouvelle organisation sont régulièrement présents et remettent en cause les règles de fonctionnement.. Les salariés vivent mal cette méthode d'appropriation de la part des bénévoles : « On croirait que la terre ne peut pas tourner sans eux 95(*) ». Le point réel de friction entre salarié et bénévole est dans la relation avec l'association : le salarié se situe dans la démarche « donnant-donnant », de part la structure juridique du contrat de travail et le bénévole qui lui est en attente de rien.

Axe 4 de comparaison : les valeurs

§ Le bénévole

L'autre valeur, alors leitmotiv des bénévoles, est le personnage emblématique du fondateur « Notre image à nous les bénévoles, c'est notre fondateur 96(*) ». Au cours des entretiens effectués avec des bénévoles et parmi « l'ancienne génération », il ressort comme un attachement, un peu comme un culte de la personnalité. Le bénévole s'identifie à l'individu, qui a crée cette organisation : « Nous adhérons tous à ses idées et nous les perpétuerons 97(*) ».

§ Le salarié

Au niveau des valeurs, nous retrouvons la logique du donnant-donnant chez le salarié, puisque celui cherche « à être reconnu pour ce qu'il fait et ce qu'il est 98(*) ». Les salariés travaillent avant tout pour vivre et donc avoir un salaire. Il y a comme une démarche d'intérêt, même si ils disent assez fort qu'« ils veulent de l'estime et non celle de l'échange (salaire) 99(*) ».

Le salarié, quant à lui ne ressent pas le rapprochement avec le fondateur : « ....je regrette de voir venir les salariés comme dans une entreprise normale. Dans leur comportement, ils ne font pas preuve d'humanité. Et ils ne s'investissent pas dans la vie associative 100(*)... ».

Etat récapitulatif des axes de comparaison utilisés par les bénévoles et les salariés

Au cours des différentes interviews, nous avons observé que les salariés et les bénévoles ont des axes de comparaison qui correspondent à leurs besoins selon la théorie de Maslow. Il en ressort principalement que les salariés pensent les bénévoles « incompétents », et qu'une démobilisation des bénévoles face à ces salariés qui arrivent et veulent tout changer. Nous notons aussi que les bénévoles par leur présence importante en terme de temps sont positionnés sur des postes de direction alors que les salariés occupent des postes dits de support ou bien dans l'encadrement mais à grande échelle.

Axes de comparaison

Bénévole

Salarié

Les origines professionnelles

le bénévole non issu du monde professionnel

Le professionnel issu du monde professionnel

Lien de subordination basé sur la moralité

Lien de subordination contractuel

Les fonctions occupées

Direction générale ou petit encadrement

Métiers supports / encadrement à large périmètre

Les items statutaires

Fonction assumée par un bénévole: le besoin de technicité croissant, le recrutement d'un salarié est décidé

Mauvaise appréhension car ils réfutent l'idée que les bénévoles sont "indispensables"

Les valeurs

Adhésion totale à l'image du fondateur

Non adhésion aux valeurs véhiculées par le fondateur

Ce tableau représentatif des axes de comparaison met en lumière deux acteurs aux valeurs, aux idées de fonctionnement différentes. Il émerge un déséquilibre entre l'acteur bénévole qui considère sa contribution comme un don et l'acteur salarié qui est dans une logique purement financière où le « donnant-donnant » est le cadre de cette relation. Les ratios entre les deux acteurs ne sont pas pareils si nous nous basons sur les analyses effectuées et portant sur des thématiques professionnelles et culturelles. Ce sentiment d'inéquité entre le salarié et le bénévole, il génère une tension « Selon un bénévole : il a le sentiment que les salariés « ont peur pour eux, pour leur job 101(*) », qui est réellement palpable surtout si nous reprenons deux affirmations, d'un côté un salarié qui considère le bénévole comme un incompétent 102(*) et de l'autre un bénévole qui précise que les salariés ne font pas preuve d'humanité 103(*)

2.3 Action : réactions induites par le sentiment d'équité ou inéquité

Le salarié ou le bénévole alors en situation d'inéquité va agir de façon à réduire les écarts et la tension que nous venons de mettre en lumière. Nous allons aborder quelles actions engendrées par les acteurs sont mises en place.

Types d'actions 1 : au niveau professionnel

Les difficultés de cohabitation et de partenariat dans certains secteurs démontrent une « forte incompatibilité entre salariés et bénévoles dans certains secteurs 104(*) ».

Nous notons dans un premier temps, une réaction qui se veut partagée par l'ensemble des acteurs : celle de sous-estimer l'autre. « Pour les professionnels, les salariés occupent de réels postes, pour les bénévoles, les salariés ne font que 35 heures 105(*) ».

§ Le bénévole

Même si, comme nous l'avons abordé précédemment, les bénévoles sont « à l'origine des postes de travail occupés par les salariés », c'est sur cette base de non-considération que sont construites les relations de travail. Et comme le précisait Pierre Tripier « le  drame » entre ces deux protagonistes c'est qu'ils vivent dans deux mondes différents : l'approche humaine étant la règle des bénévoles. « Les relations de travail sont correctes, mais il existe des peaux de banane. C'est normal, les objectifs ne sont pas les mêmes 106(*) ».

Les bénévoles sont impliqués dans des objectifs, récompensés par des articles de journaux, des articles de presse, alors que comme le précisait le DRH des Petits Frères des Pauvres, des salariés comme en informatique, sont plus dans une recherche d'  « expériences professionnelles valorisantes » pour le CV.

§ Le salarié

Les salariés, méconnaissant le rôle et la fonction du bénévole, n'ont pas une attitude positive vis à vis des jeunes bénévoles : « Pour les jeunes, il n'y a aucune perspective d'évolution 107(*) ».

Les salariés à cause de leur passé de bénévole, sont redoutés par les bénévoles à tel point que les bénévoles les considèrent comme des individus « mettant de la bonne volonté .. 108(*) » et qui ne connaissent pas le terrain. Il s'agit comme le pense Dan Ferrand-Bechmann (2000), que c'est une manière de tenir les bénévoles à l'écart des salariés du travail principal de l'association.

Type d'actions 2 : mettre en lumière les défauts de l'un pour mieux se valoriser

En réalité, ce jeu de l'incompétence est une manière réciproque de se protéger contre l'autre. Pourtant qualifier quelqu'un en ces termes est le reflet d'un jeu d'agression, où l'attaque est la meilleure défense.

§ Le bénévole

Cette thématique ne fut pas abordée lors des entretiens.

§ Le salarié

L'autre aspect mis en lumière par les salariés est la notion de fidélité et plus précisément « l'infidélité ». Par le fait que les bénévoles ne sont pas « tenus » par un engagement juridique et matériel, alors les salariés donnent une image « d'atome » à ces derniers : « La notion de fidélité a bien changé. Ce principe a évolué comme la fidélité dans le couple. Dans le milieu professionnel, il est rare de faire carrière dans la même entreprise 109(*) » .

Sous-jacente à cette idée, celle de montrer que le bénévole, comme appréhendé précédemment, est peu confiant de ses compétences : il n'est pas diplômé du secteur dans lequel il évolue.

Type d'actions 3 : avantages financiers et comportements

§ Le bénévole

Les bénévoles ne perçoivent pas de salaire. Mais, la notion de rétribution doit être perçue comme un temps consacré à l'association. Les bénévoles voient d'un très mauvais oeil, le fait de ne pas accorder un maximum de temps à l'association. Cette forme de dénigrement se retrouve dans « pour les bénévoles, ces salariés ne font que 35 heures 110(*) ».

Les bénévoles considèrent les salariés comme des individus « intéressés », et utilisant l'association comme un lieu d'exercice professionnel au sein duquel, ils veulent se sentir libres et ne veulent avoir aucune contrainte.

L'émergence du concept d'entreprise associative 111(*) fait apparaître chez le bénévole un sentiment de crainte par le fait que le salarié issu de ce milieu va prendre plus encore de pouvoirs.

§ Le salarié

Le DRH de l'association Les Petits Frères des Pauvres reconnaît que les populations de salariés sont dans la logique du secteur marchand, soit du donnant-donnant « Ces populations professionnelles sont dans le système réel du marché du travail 112(*) ». « Les salariés de Captifs sont différents. Ils ont moins la foi. Il faut le reconnaître, ils sont là pour recevoir leurs salaires 113(*) ».

La montée en puissance du nombre de salariés au sein d'association et la mutation des individus la composant sous le couvert de la « professionnalisation » dévoile un statut de salarié alors s'émancipant de l'éthos du bénévolat et affirmant une éthique professionnelle spécifique et une légitimité fondée sur d'autres motifs que celui de la « bonne volonté désintéressée 114(*) ».

L'émergence de ce concept « entreprise associative 115(*) » est vue du côté des salariés dans le positionnement qui leur est accordé dans l'organisation comme une impression de non-prise en considération de la part des bénévoles et de la direction « Même si les salariés ne sont pas d'accord c'est la direction qui décide 116(*) ». Il s'agit là d'une forme de résistance passive face aux décisions prises par la direction de l'organisation. Elle peut aussi dévoiler un certain dédain pour les décideurs et donc les bénévoles dans le sens où ils prennent des décisions sans connaître réellement le terrain au nom d'une solidarité.

Etat récapitulatif des types d'actions engendrées dans le cadre d'une inéquité

Types d'actions observées

Bénévole

Salarié

au niveau professionnel

Sous-estimer l'autre

Mettre en lumière les défauts de l'un pour mieux se valoriser

 

Véhiculer l'information de non-progression pour les jeunes bénévoles

 

Etre Comme un acteur 'infidèle"

 

Véhiculer l'information que le bénévole est peu confiant en ses compétences

Avantages financiers et comportements

Considérer comme un manquement grave le fait que le salarié ne consacre pas tout son temps

Développer une autre valeur, une autre culture : développement d'une éthique professionnelle spécifique

Considérer les salariés comme des personnes intéressées

Fonder légitimement sur d'autres motifs que la bonne volonté

A travers ce tableau, nous observons que les actions pour réduire les écarts sont verbales, très peu gestuelles. Il faut noter que le conflit latent entre les acteurs engendre des réactions pas toujours positives. Nous pouvons résumer cet ensemble comme un état malsain et qui peut être destructeur pour les acteurs et l'association. Nous notons aussi que les salariés en réponse aux attitudes des bénévoles développent d'autres valeurs d'autres cultures. Nous sommes en position de nous interroger sur le véritable affrontement entre les acteurs et donc leurs deux cultures.

2.4 Conclusion  : équité entre salarié et bénévole ?

Aux termes de cette partie tentant de répondre à la question 1, dont nous vous rappelons la formulation à savoir, s'il existe une équité entre salarié et bénévole, nous pouvons recenser un certain nombre de faits qui nous conduiront à apporter une réponse à cette question.

- Des profils différents

Comme nous venons de l'aborder, le salarié et le bénévole sont les deux acteurs de l'association. Le premier entrant à grands pas au sein de l'association, le second étant présent depuis la création même de l'association. Ce constat met en lumière déjà un écart assez important.

En effet, les individus n'arrivent pas par hasard dans les associations. Ils ont des compétences à apporter mais pas toujours dans le domaine qui intéresse l'association.

Le salarié est un professionnel de son domaine d'activité. Il est d'ailleurs diplômé et reconnu. Son parcours professionnel se dessine et il a connu d'autres expériences dans d'autres secteurs. Le bénévole quant à lui est en grande majorité retraité, ayant subvenu à l'ensemble de ses besoins. Il a un passé professionnel, mais ne développe pas ses compétences dans son métier ou domaine.

Les valeurs qui unissent ces deux acteurs ne sont pas toujours partagées. Certes, ils constatent un manquement de la part de l'état dans la politique sociale et veulent intervenir dans l'espoir de modifier les choses.

-Des finalités différentes

Le statut de salarié est encadré comme dans chaque organisation, qu'elle soit du secteur marchand ou pas, par un contrat de travail. Le lien de subordination existe entre l'individu et la personne morale. Cela implique des obligations et des devoirs de part et d'autre.

Le bénévole, quant à lui, et malgré la professionnalisation, qu'il connaît, n'est pas soumis à un contrat de quel ordre que ce soit. Des contrats dits d'engagement sont réellement utilisés, mais ils n'ont aucune validité sociale juridique.

La notion d'engagement s'en trouve différente : le salarié est positionné dans une relation « donnant-donnant ». Chaque mois, il perçoit un salaire en numéraire en contrepartie de son travail.

Le bénévole a lui un engagement plus moral : la décision de s'engager dans un collectif pour une cause, est individuelle. Cet engagement peut être ponctuel. L'investissement peut être conséquent : une mise à disposition de soi, avec des savoirs utilisés pour l'association et dans la finalité de construire un monde nouveau.

- Une certaine crainte réciproque pour les deux acteurs

Des horizons différents, des finalités différentes avec certainement des attentes différentes : nous avons observé, par exemple, que le bénévole était demandeur d'une logique gestionnaire alors que le salarié refuse les objectifs de performance du secteur marchand.

Nous assistons à une confrontation de deux statuts dans un milieu où la vie professionnelle, les valeurs n'ont pas les mêmes fondements. Un état de tension est palpable puisque, comme nous l'avons observé précédemment, la meilleure défense est l'attaque. Ce ne sont pas des querelles ouvertes du moins devant les usagers. Mais les bénévoles craignent une « invasion » de la part des salariés. Les bénévoles considèrent qu'ils ont une perte de pouvoir par le fait que les salariés ne les considèrent pas comme des professionnels et voient en eux « les dames patronnesses ».

- Des faits externes à l'association

L'association évolue dans un monde en mutation : nombre croissant d'associations sur le territoire français, de plus en plus de gens disponibles quelques heures par semaine et cela dans le cadre des 35 heures, développement des mécénats dans les entreprises et montée de l'individualisme.

Avec une volonté de reconnaître le statut de bénévole, des dispositions législatives ont été prises, et dont l'objectif inavoué est être à l'égal du salarié. Le bénévole, alors considéré depuis longtemps comme un amateur, comme un outsider (Maud Simonet-Cusset, 2004) s'en trouve disqualifié, car il ne s'inscrit dans aucun registre professionnel. En effet, l'acquisition d'une compétence liée au plaisir de « faire » pour soi est dévalorisée. De même, avec ce mouvement de professionnalisation, certains bénévoles doivent adopter de nouvelles attitudes : de nombreux bénévoles sont aux postes de direction et n'ont pas les compétences nécessaires. En résumé, la notion de bénévolat comme activité occupationnelle est obsolète, l'association perd de sa socialisation : le bénévole n'ayant pas de compétence spécifique risque de n'avoir pas de proposition et le salarié par contre saura répondre à ces exigences.

Le salarié répondant davantage en terme de compétences spécifiques entre volontiers dans l'association. Il y apporte une autre vision des choses, une autre méthode pour appréhender, mais les bénévoles n'ont pas été préparés à cela.

- Tableau récapitulatif

« Tableau récapitulatif des thématiques dans la notion d'équité entre salariés et bénévoles »

 

 

Bénévole

Salarié

Equité individuelle

 

Concept de don

Logique donnant-donnant

Evaluation de l'échange

Mémoire vive-Expertise dans son domaine / Attente de valorisation-besoin d'être reconnu pour son statut

Expertise-non polyvalence aux situations / Lien de subordination-salaire en numéraire

Ratio C/R

C > R

A déterminer

Equité collective

 

 

 

Axe de Comparaison

Non issu du monde professionnel

Issu du monde professionnel

Postes de direction ou petit encadrement

métiers supports ou encadrement à grand périmètre

Présences depuis l'origine de l'association

Réfus l'idée d'un bénévole "indispensable"

Adhésion aux valeurs et image du fondateur

Non adhérension à l'icône "Fondateur"

Action

Sous-estimation réciproquement

Mise en avant les points négatifs pour se valoriser (manque d'investissement en temps et individus intéressés)

Mise en avant les points négatifs pour se valoriser (infidélité)

 

Développement une autre culture, d'autres valeurs par rapport aux bénévoles

En reprenant certaines thématiques caractérisant les relations salariés et bénévoles, nous constatons un certain nombre de divergences qui sont :

- deux statuts aux encadrements juridiques différents

- des origines professionnelles différentes

- des valeurs et une approche économique non partagées

- deux catégories qui ne s'apprécient pas au niveau professionnel

Toutes ces distinctions sont les résultats de leurs besoins. Nous allons tenter de schématiser l'ensemble des besoins selon les grandes thématiques de la notion d'équité entre les salariés et les bénévoles.

Grandes thématiques

Bénévole

Salarié

statuts juridiques

encadrement basé sur l'engagement moral

encadrement juridique du contrat de travail

 

engagement vis à vis d'un collectif

engagement vis à vis d'une personne morale

origines professionnelles

expertise dans un domaine mais n'exerçant pas toujours dans son domaine

en plein parcours professionnel, expertise dans son domaine

 

Recherche de flexibilité et mobilité vers d'autres fonctions ou d'autres associations

Recherche de flexibilité pour une évolution de fonctions, de postes

valeurs et approche économique

sur la logique du don

sur la relation donnant-donnant

 

attente de reconnaissance

Recherche d'équité aux niveaux des salaires du secteur d'activités

relation de reconnaissance collective

non reconnaissance mutuelle

 

besoins d'estime, de reconnaissance, d'appartenance

besoins de sécurité

Ce tableau, illustré par ce graphique démontre que le bénévole a des besoins d'estime, de reconnaissance d'appartenance au travers de ses sentiments d'adhésion aux valeurs et au fondateur, que ses activités sont basées sur le don de compétences, de temps et attend une reconnaissance de la part de l'association.

Le salarié, quant à lui, a plutôt des besoins physiologiques et de sécurité qui se dévoilent au travers de sa relation contractuelle avec l'association où le salarié apporte ses compétences en échange d'un salaire en numéraire, et où se situe dans une progression classique de carrière. Sa présence dans l'association est plutôt récente, et sa venue est synonyme d'expertise.

* 69 Validation d'Acquis de l'Expérience

* 70 Interview 5

* 71 Interview 7

* 72 Interview 9

* 73 interview 7

* 74 Interview 9

* 75 Interview 4

* 76 Interview 2

* 77 Interview 5

* 78 Interview 2

* 79 Interview 1

* 80 Interview 7

* 81 Interview 9

* 82 Interview 2

* 83 Interview 7

* 84 Interview 3

* 85 Interview 7

* 86 Interview 4

* 87 Interview 4

* 88 Interview 2

* 89 Interview 8

* 90 Interview 6et 9

* 91 IntervIew 7

* 92 Interview 7

* 93 Interview 2

* 94 Interview 6 et 9

* 95 Interview 9

* 96 Interview 9

* 97 Interview 9

* 98 Interview 1

* 99 Interview 1

* 100 Interview 9

* 101 Interview 9

* 102 note 78

* 103 note 93

* 104 Interview 3

* 105 Interview 3

* 106 Interview 9

* 107 Interview 5

* 108 Interview 7

* 109 Interview 3

* 110 Interview 3

* 111 Concept abordé au cours de l'interview 4

* 112 Interview 3

* 113 Interview 9

* 114 Matthieu Hély «Les différentes formes d'entreprises associatives» in «Les bénévoles et leurs associations: Autres réalités, autre sociologie ?» Dan Ferrand-Bechmann, Editions l'Harmattan, 2004

* 115 Interview 3 et 4

* 116 Interview 7

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