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Apport d'une thérapie cognitive dans la prise en charge d'un patient présentant un trouble de personnalité état-limite (borderline)

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par Michel Naudet
Paris V Descartes - Diplôme Universitaire de Méthodologie en Psychothérapie - Sociothérapie 2003
  

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7.7.2.3 Choix des interventions initiales

Le choix des interventions initiales devra être déterminé avec soin. Celles-ci devront posséder les caractéristique suivantes :

- Etre exemplaires et si possible indépendantes de l'humeur du moment (stables).

- Tenir compte de la charge émotive et affective sous-jacente. Il est certain que les premières situations analysées ne devront pas être des « sujets qui fâchent », lourdement chargés d'affect et déclenchant un processus de réponses stéréotypées, à la limite du biologique. Mme F. serait incapable de les analyser et retournerait son angoisse sous forme d'agressivité contre le thérapeute ou contre elle-même (malaise, migraine, arrêt de la thérapie).

Au cours des premiers entretiens, il sera important de reconnaître ces situations exemplaires, d'étudier leur récurrence et d'identifier les processus communs qui y participent.

En étudiant l'anamnèse de Mme F., les grandes catégories de situations à problème semblent être les suivantes :

- Le malentendu professionnel : le mensonge, l'illusion et la déception

- Le malentendu familial : lorsque les mots dépassent la pensée ou ne l'atteignent pas

- Le malentendu affectif : les relations anaclitiques, la peur de l'abandon, la dépendance et le rejet de cette dépendance, l'ambiance invivable au quotidien pour les proches

Dans le cadre du présent mémoire et pour illustrer l'approche cognitivo-comportementale préconisée pour ce trouble, voici le détail d'une situation de « malentendu professionnel » très récurrente.

Situation

Mme F. a une idée très arrêtée des compétences que doit posséder un Ingénieur Conseil (sa profession) :

Compétence n°1 : faire son métier d'ingénieur, c'est-à-dire concevoir, conseiller, organiser, contrôler.

Compétence n°2 : Elle pense aussi que de nos jours il doit être très fort dans le maniement des ordinateurs.

Madame F. a une bonne formation et beaucoup d'expérience, elle sait très bien concevoir, conseiller, organiser et contrôler ; elle possède donc parfaitement la compétence n° 1, de loin la plus importante dans son métier (nous pourrions dire 95% de l'ensemble).

Mais Mme F. ne possède pas la compétence n°2, car elle manipule l'ordinateur avec maladresse, angoisse et inefficacité ; de nos jours cela risque d'étonner ses employeurs potentiels, mais au fond ce n'est pas si grave car son vrai métier est ailleurs, il consiste à diriger des projets importants. Il lui suffirait de prendre ses notes sur papier et de demander à un collaborateur de les saisir sur ordinateur, avec pour seule conséquence une petite blessure narcissique.

Voici ce qu'il va se passer :

- Lors de l'entretien d'embauche, Mme F. va présenter normalement sa compétence n°1 (son métier d'ingénieur). Pour ne pas avoir à répondre à des questions concernant la compétence n°2 (le maniement de l'ordinateur), elle va émailler son discours de termes informatiques très élaborés et très précis, qui ne sont pour elle que des enveloppes vides, mais dont elle connaît l'importance pour l'interlocuteur. L'évocation tranquille de ces termes vont l'élever implicitement au rang d'expert auprès de son futur responsable qui ne jugera alors pas nécessaire de demander d'autres précisions sur ce point (d'autant plus que cette compétence représente un plus mais n'est pas fondamentale pour le poste proposé).

- Une fois embauchée, Mme F. pourrait progressivement et judicieusement rétablir la vérité quant à ses difficultés en informatique. Pour des raisons narcissiques, elle ne le fera pas. Lorsque, inévitablement, elle aura des tâches à effectuer sur ordinateur, elle déploiera des trésors d'imagination et de ruse pour se faire aider sans que l'on découvre son incompétence, ou alors adoptera des stratégies d'évitement ou de contournement.

- Totalement obnubilée et angoissée par ces problèmes basiques de manipulation d'ordinateur, elle va commencer à négliger la partie importante de sa mission (sa compétence d'ingénieur) et à réagir aux critiques par des aménagements caractériels à base d'agressivité et de recherche de conflit.

- Lorsqu'on lui demande des explications sur son travail qui se dégrade, elle se justifie en rationalisant à l'extrême ses comportements étranges, ne laissant aucune place à la discussion. Le malaise devient général et se solde par un jugement unanime contre Mme X. Mais n'ayant pas de reproches précis et surtout consensuels à lui adresser (car elle donne à chacun une image différente d'elle-même), elle se retrouve licenciée avec de bonnes indemnités.

- Elle ressent le licenciement comme un rejet caractérisé et une blessure narcissique grave, voire un traumatisme (en général, elle ressent ensuite une véritable phobie envers son ancien lieu de travail, et s'en approcher provoque beaucoup de réactions affectives, même plusieurs années après). Mais elle reste totalement ignorante des processus qui ont conduit à ce licenciement (qu'elle explique le plus souvent selon une idéation persécutoire).

Remarque : Il est arrivé une fois à Mme F., fortuitement mise au pied du mur malgré ses multiples stratégies, d'être prise en flagrant délit d'incompétence dans le maniement d'un ordinateur. Elle a ressenti cet événement comme un véritable traumatisme narcissique et, telle une enfant honteuse, ne voulait plus retourner à son travail. Ayant créé précédemment une illusion importante concernant ses compétences, elle a bien sûr provoqué à cette occasion une déception de la même ampleur.

Analyse du processus

A la base, Mme F. a une fausse croyance concernant les exigences du poste et un mauvais jugement de ses propres compétences. Cette croyance engendre une pensée dysfonctionnelle lors de l'entretien d'embauche (« je vais être rejetée si je ne connais pas bien le maniement des ordinateurs »). Elle réagit par une stratégie sûrement plus narcissique que vraiment manipulatrice (faire croire qu'elle est experte pour être admirée et acceptée). Par ce mensonge non élaboré, elle crée chez l'autre une illusion et chez elle les conditions de son futur échec.

S'il elle avait réellement été dans la manipulation (à l'instar du psychopathe), elle aurait subtilement fait marche arrière une fois le contrat d'embauche signé. L'hypothèse d'une "pensée magique" concernant ses capacités pourrait également être retenue et approfondie en abordant les processus et les schémas.

Face à la situation réelle, elle déploie beaucoup d'efforts pour ne pas être démasquée. Ici, nous ne sommes plus dans les pensées dysfonctionnelles, mais bien dans la réalité, car la révélation de son incompétence provoquera inévitablement la déception (par contraste avec l'illusion qu'elle a créée).

Lorsque les malentendus s'accumulent et que le licenciement survient, elle n'intègre pas le processus, mais formule des conclusions erronées qui renforcent sa fausse croyance (« je savais bien que mon incompétence dans le maniement de l'ordinateur me serait nuisible » et « si je ne crée pas l'illusion je serais rejetée, personne ne peut m'aimer telle que je suis »).

La figure de la page suivante schématise ce processus d'échec programmé.

Cognition/Comportement

Résultat

Conséquence

Fausse croyance ou interprétation erronée concernant les exigences du poste et des compétences

Pensée dysfonctionnelle (je vais être rejetée si je ne connais pas bien le maniement des ordinateurs)

Stratégie (mensonge, manipulation) - sans but réel de profit

Stratégie (mensonge)

Succès provisoire (embauche)

· Renforcement de la fausse croyance (si j'avais dit la vérité je n'aurais pas été prise)

· Renforcement du comportement stratégique

· Création de l'illusion chez les autres

Persistance dans le mensonge après l'embauche

Situation dangereuse, risque de créer la déception

Angoisse

Obsession d'être démasquée

Stratégies d'évitement et de contournement, conduites agressives

· Perte de vue des objectifs importants de la mission

· Dégradation des relations interpersonnelles

· Multiplication des malentendus

Conduites irrationnelles de justification

Réactions unanimes de rejet

· Traumatisme

· Licenciement

Persistance du déni de responsabilité

Reproduction des mêmes pensées et des mêmes comportements dans les situations similaires

Renforcement de la fausse croyance (« c'est à cause de mes lacunes en informatique que j'ai été licenciée ») .

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams