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Intérêts et enjeux économiques de l'intégration à  l'Union Européenne d'un point de vue turc

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par Benoit ILLINGER
Université Pierre Mendès France (Grenoble II Sciences Sociales) - DEA Economie et Politiques Internationales 2002
  

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3.2.2 Question des transferts budgétaires européens

Un autre moyen d'augmenter le stock de capital en Turquie peut se réaliser par le biais d'octrois d'aides communautaires.

Les fonds structurels sont, de surcroît, un moyen d'accélérer la convergence entre les différentes régions de l'Europe vers une moyenne communautaire et donc d'améliorer la cohésion. Les investissement réalisés par le biais des fonds structurels en dépenses d'infrastructures améliorent la croissance pour deux raisons : tout d'abord simplement car ils provoquent des externalités positives (amélioration du réseaux d'infrastructures physiques ou humaines) et ensuite, car ces investissements bénéficient de l'effet du multiplicateur keynésien.

Si la Turquie était membre à part entière de l'UE, d'une part elle contribuerait au budget communautaire mais d'autre part elle recevrait également une part de celui-ci sous forme de ces fonds structurels.

En général si l'on se pose la question de l'adhésion de la Turquie à l'UE, la question du niveau de la contribution et de la distribution des fonds structurels est importante. Les auteurs qui se sont penché sur ce point ont trouvé des résultats non identique mais proches.


· D'après une étude du Centre d'étude turques d'Essen, si la Turquie était membre de l'Union européenne, elle aurait versé au budget européen (pour l'année 1996 dans l'étude en question) une contribution de 1,3 milliards d'écus mais en aurait reçu 11,7 milliards128(*) (soit une contribution d'environ 1,5% et une récupération d'environ 10%). Néanmoins cette étude rappelle qu'en matière d'aide financière, il existe un grand décalage entre la réalité et les attentes.


· AKAGüL Deniz [1999] a estimé pour 1998 que la Turquie contribuerait à hauteur de 3% au budget communautaire (3,8 Milliard d'écus) et recevrait 10% de celui-ci (12,1 milliards)129(*) .


· TURUNÇ Garip [2001], pour sa part procède différemment130(*) : Tout d'abord il considère que globalement les fonds structurels aujourd'hui versés à l'Espagne, la Grèce, l'Irlande et le Portugal répondent à un ensemble de finalités et de critères sont définis par le niveau de PIB par tête (car ce dernier constitue un résumé pertinent des critères d'attributions pratiqués par l'UE).Ensuite il estime que dans le cadre de l'intégration de la Turquie, les politiques communes seront appliquées dans les mêmes termes et avec les mêmes critères que ceux actuellement en vigueur pour ces quatre pays.

A partir de là pour estimer les fonds structurels qui seraient alors destinés à la Turquie, TURUNÇ Garip se réfère d'une part au rapport entre les fonds structurels reçus chaque année par ces quatre pays et leur PIB et d'autre part au montant moyen par habitant qu'ils ont reçu au titre de fonds structurels. On en retire alors les deux scénarios possibles :

- si le montant alloué à la Turquie est pratiquement équivalent aux montants reçus par les pays actuellement bénéficiaires ( 212 euros par habitants et par an) alors la Turquie bénéficierait du fonds de cohésion d'un montant de 13,4 milliards d'euro par an ;

- si les fonds structurels sont plafonnés à 2,3% du PNB (comme pour les autres pays bénéficiant du Fonds de cohésion) alors la Turquie bénéficierait de 9,3 milliards d'euro par an.

TURUNÇ Garip prévoit ensuite découlant de ces deux scénarios, un certain nombre de possibilités selon divers taux de croissance estimés pour la Turquie.

En résumé, quelque soit le scénario retenu la Turquie bénéficierait d'une aide substantielle lui permettant de couvrir une partie du coût des mutations structurelles.

Cela implique plusieurs remarques supplémentaires :

- tout d'abord, le montant net de transfert dont bénéficierait la Turquie si elle était membre à part entière de l'UE peut justifier une partie de l'immobilisme européen pour faire avancer l'adhésion turque. Néanmoins nous omettrons volontairement la question de savoir si une telle adhésion augmentant jusqu'à 20% les dépenses budgétaires de l'Union dans le scénario le plus généreux serait souhaité par les membres de l'Union européenne131(*), car la n'est pas notre angle de questionnement ;

- ensuite, si ces transferts étaient réellement effectués, cela changerait substantiellement la situation de l'économie turque. En effet les transferts représenteraient, si l'on se réfère aux estimations de Deniz AKAGüL, environ 5% du PNB turc soit un peu plus que le déficit courant de la Turquie par rapport à l'UE. Ainsi, les transferts de l'UE vers la Turquie permettraient non seulement de combler le déficit global courant mais aussi ils permettraient de rembourser la dette à long terme. Ainsi la Turquie effectuerait un « bond en avant » sans précédent. Nous pouvons alors conclure que du point de vue de la redistribution des fonds structurels, la Turquie a tout intérêt à continuer de frapper aux portes de l'Union.

Mais, quoi qu'il en soit, et même si l'on ne se pose pas la question de la « volonté » européenne, il semble que ce transfert soit utopiste dans le sens où il représenterait 0,12%du PNB de l'UE et que le plafond des contributions est fixé à 1,27% du même PNB depuis le sommet européen d'Edimbourg de 1992 et que la marge inutilisée du budget est de 0,15% prévu pour l'élargissement à l'est.

Ainsi, il semble peu probable que la Turquie bénéficie de ces transferts pour différents types de raisons :

- tout d'abord, la faiblesse croissante des transfert à l'intérieur de l'Union actuelle semble présager un relâchement encore plus marqué de la solidarité entre pays ;

- ensuite, la solidarité budgétaire est souvent fonction de la proximité culturelle qui ne semble par être de mise dans le cas de la Turquie ;

- et enfin, bien que la Turquie réponde qualitativement mieux que d'autres prétendants, elle est quantitativement trop lourde à supporter tant sur le plan de sa population qu'au niveau de son PNB.

On peut donc conclure sur ce point des fonds structurels que la Turquie ne doit pas mettre en balance des hypothétiques fonds dans son choix de continuer son processus d'adhésion car ces derniers sont loin d'être acquis.

De surcroît, les fonds structurels ne comportent pas que les avantages présentés au début de ce point mais peuvent provoquer certains inconvénients :

Ces inconvénients s'apparentent au Dutch Disease : effets pervers favorisant la concentration régionale, perturbation des équilibres macro-économiques par le biais de la balance des paiements, surestimation du taux de change (diminue la compétitivité et retarde l'ajustement structurel) et évidemment risques de corruption liés à l'ampleur des sommes.

Un autre point qui peut être considéré comme négatif est le principe dit de l'additionnalité : Les Etats qui bénéficient des fonds structurels dégagent des ressources publiques additionnelles. Ainsi plus les fonds structurels seront importants, plus il faudra dégager des ressources publiques à des fins de politiques régionales et donc augmenter les dépenses. Les pressions sur le budget de la Turquie seront considérables.

Aussi la question de savoir si la Turquie doit se diriger vers l'intégration complète à l'Union Européenne ne doit en aucun cas être motivé par l'attrait des redistributions des fonds structurels communautaires car d'une part ceux-ci ne sont pas garantis car trop substantiels dans le cas de la Turquie et d'autre part car leur effets peuvent être négatifs.

En conclusion de cette dernière section, on peut affirmer que si la Turquie continue son intégration au sein de l'UE (ce qui lui est recommandé suite aux enseignements tirés des sections précédentes), il va falloir qu'elle augmente son stock de capital car sa main-d'oeuvre ne pourra vraisemblablement pas migrer massivement. Or, nous avons montré que l'augmentation de l'investissement par l'augmentation du capital ne pourra pas être financée par la solidarité de l'Union européenne. Il faut donc que la Turquie réussisse à attirer des capitaux étrangers productifs. Par ailleurs nous avons montré qu'une intégration à l'UE dépassant le stade de l'Union douanière engendre un afflux d'IDE. Aussi, il semble qu'une certaine synergie entre intégration et afflux de capitaux puisse s'opérer. Mais il faut que la Turquie réussisse à assainir son économie pour que cette synergie puisse se produire. En effet, à l'heure actuelle avec les crises financières redondantes et une inflation difficilement "bridable", les investisseurs étrangers sont réticents en ce qui concerne la Turquie.

La Turquie doit donc tenter de figurer sur la « Short-List » des pays les plus attractifs de MICHALET que nous avons déjà mentionnée.

D'ailleurs la Turquie possède déjà pour attirer les IDE de bonnes conditions (grand marché en croissance, main-d'oeuvre peu onéreuse et présence d'un tissu industriel local relativement performant). Elle n'a par conséquent encore besoin, pour être « attractive », que d'une stabilité de son régime politique, d'une stabilité économique, et d'un certain « climat » autours des investissements (règles, traditions...). Or, les critères d'adhésion de Copenhague lui imposent de réaliser ces points pour passer au stade d'intégration supérieur.

Cependant, MICHALET [1999] suggère qu'en plus de cela, les pays qui souhaitent attirer des IDE prouvent leur crédibilité et améliorent leur visibilité auprès de la communauté des investisseurs globaux. Aussi, pour chaque Etat-Nation, il est nécessaire de mettre en place des politiques de promotion des investissements étrangers par le biais d'une Agence Pour Investissement (API). Cette promotion comprend d'une part, la construction de l'image à véhiculer pour attirer les investisseurs qui est complexe à mettre en place et surtout coûteuse, et d'autre part des services aux investisseurs leur permettant de minimiser leurs coûts de transactions.

Il est donc possible et important pour la Turquie de créer sa propre attractivité.

* 128 D'après Cumhuriet Hafta, 20 février 1998 in VANER S. [2001].

* 129 Calcule à partir des chiffres de l'Office National de planification, impact de l'adhésion turque sur le budget de l'UE, Ankara, 1998, p.111. in AKAGüL Deniz [1999].

* 130 Il utilise une méthodologie analogue à celle que BESNAINOU [1995] avait utilisé pour évaluer les besoins des fonds structurels des PECO.

* 131 A titre de comparaison, on peut estimer le coût de l'entrée de la Turquie pour les pays « créditeurs » de l'Union comme équivalent à celui de la Grèce, l'Irlande, l'Espagne et le Portugal réunis !

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon