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La condition de l'épuisement des voies de recours internes devant la Commission africaine des Droits de l'Homme et des peuples

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par Josep Martial ZANGA
Université Yaoundé II Cameroun - Diplôme d'études approfondies en droit international et communautaire 2008
  

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Paragraphe II - Des recours internes efficaces : Les critères de
satisfaction et d'effectivité

A côté du critère de disponibilité, la Commission n'exige l'épuisement des recours internes que s'ils sont effectifs et satisfaisants. L'efficacité et la satisfaction comme caractère fondamental des recours à épuiser ont fait l'objet d'une définition substantielle devant la Commission. Celle-ci porte sur l'admission exclusive des modes juridictionnels comme gage d'efficacité des recours (A), et les modes de réparation qui en détermine la suffisance (B).

A- L'admission exclusive des modes juridictionnelles

La jurisprudence de la Commission donne la preuve que les recours à épuiser ne peuvent être efficace que s'ils sont d'abord judiciaires. Elle souligner que : « aux termes du présent Article [art 56(5)], tout ce que la Commission Africaine souhaite entendre du plaignant est qu'il s'est approché des organes judiciaires internes ou nationaux ».208 Ceci se confirme au regard de la définition que l'organe a donné au terme efficacité (1) et au vue de la pertinence des recours juridictionnels (2).

1 - La signification de l'effectivité et de la satisfaction des recours

internes

Dans la jurisprudence Jawara c. Gambie, la Commission s'était limitée à exiger que soit pris en compte le critère de l'efficacité des recours, entendu comme des recours qui « offrent une perspective d'aboutissement ». C'est dans l'affaire Anuak justice, que la Commission va définir le terme efficace comme étant ce qui est « adéquat pour accomplir un objectif ; produisant le résultat recherché ou attendu ». Elle ajoutera qu'il s'agit d'un recours « opérant, utile, utilisable, exécutable, en ordre, pratique, courant, effectif, réel, valide ».209Deux tests permettent

208 Com 221/98 Alfred B. Cudjoe c/ Ghana

209Com 299/2005, Anuak Justice Council c Éthiopie.

d'apprécier l'efficacité d'un recours. Le premier est que ce recours doit présenter toutes les garanties permettant d'obtenir la solution recherchée. Il ne s'agit pas de relever que le recours doit absolument aboutir à cette solution, mais de considérer qu'il doit offrir de manière certaine des perspectives probantes pour la solution. En d'autres mots et plus commodément, l'efficacité de recours se mesure, à sa plausibilité à résoudre le problème.

La seconde possibilité est que le recours doit être praticable c'es-à-dire à mesure d'être utilisé. Elle fait allusion à la mécanique interne qui assure le fonctionnement du recours et partant sa validité.

Pour réunir ces deux exigences fondamentales de l'efficacité, le recours ne peut être que juridictionnel. La Commission va d'ailleurs le rappeler dans plus d'une espèce, notamment l'affaire Amnesty International et Autres c. Soudan ; où il est clairement affirmé que l'épuisement des voies de recours internes n'est exigible que si « les recours existent et sont juridictionnels ».

En substance, elle affirme qu'elle « exige l'épuisement des voies des recours internes si elles existent, si elles sont juridictionnelles (...) et ne dépendent pas du pouvoir discrétionnaire de l'autorité publique ». En examinant la communication Cudjoe c. Ghana (com. 221/98), la Commission reconnaît que « les recours internes dont fait mention l'alinéa 5 de l'art. 56 cidessus, s'entendent des recours introduits devant les Tribunaux de l'ordre judiciaire». Il y a là une affirmation péremptoire de la nature juridictionnelle du recours qui confirme bien le fondement de la règle suivant laquelle : « l'État visé doit d'abord avoir l'opportunité de redresser par ces propres moyens dans le cadre de son système judiciaire les tords qui auraient été causés à l'individu »210. Le choix des modes juridictionnels des jugements s'explique en raison de leur indépendance à l'égard du pouvoir politique.

2 - La pertinence des recours juridictionnels

Dans Malawi African Association et autres c. Mauritanie, la Commission rappelle que l'une des justifications de la règle est que « l'État mis en cause, doit être informé des violations des droits de l'homme dont il est accusé afin d'avoir l'opportunité de pouvoir les redresser ». Elle ne précise pas par quels moyens l'État mis en cause devra redresser les violations, il en est de même dans l'affaire Commission des Droits de l'Homme et des Libertés c. Tchad (com. 74/92) où la Commission parle simplement de « la possibilité d'y remédier» sans préciser comment. La

210Com. 71/92, Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme c. Zambie.

position de l'organe reste tout aussi équivoque dans Jawara c. Gambie, puisqu'elle parle de « remédier à la situation par son propre système national. » Mais qu'est-ce que le système national ? Les jurisprudences RADDH c. Gambie et Diakate c. Gabon semblent répondre unanimement avec plusieurs autres espèces qu'il s'agit du « système judiciaire ». Dans ces espèces, la Commission précise clairement que l'État doit avoir « l'opportunité de redresser par ses propres moyens dans le cadre de son propre système judiciaire ». Ainsi, «les recours internes dont fait mention l'alinéa 5 de l'art. 56 ci-dessus, s'entendent des recours introduits devant les Tribunaux de l'ordre judiciaire ». la Commission a tenue à préciser qu' « il demeure cependant que dans l'acception généralement admise, les voies de recours, dont l'épuisement est requis avant d'engager une procédure de communication - plainte devant la Commission africaine, sont les voies de recours ordinaires de droit commun, disponibles devant les juridictions et normalement accessibles au justiciable ».211 En tout état de cause, le système judiciaire dans ce contexte est synonyme d'ordre judiciaire ou d'organisation judiciaire. A en croire le Professeur Guimdo : « Organiquement la justice est l'ensemble des institutions juridictionnelles chargées de régler des différends par voie de jugement au terme d'une procédure donnée. Fonctionnellement, elle est l'activité qui consiste à juger, mieux à «trancher les litiges sur la base du droit»»212.

Celle-ci varie selon les traditions juridiques des États. L'on s'accorde à dire que cette organisation est faite suivant plusieurs ordres. Selon le droit applicable l'on distinguera les juridictions de l'ordre administratif et celles de droit commun. Selon la nature du litige, l'on distinguera les juridictions pénales, les juridictions civiles et les juridictions administratives. Suivant l'objet du litige on distingue les juridictions de fond (premier degré et appel, et les juridictions de cassation). Selon la matière du procès, on distinguera les juridictions de droit

211 Com. 242/01 Interights, Institut de droits humains et développement en Afrique et Association mauritanienne des droits de l'homme/République islamique de Mauritanie, 17ème Rapport annuel d'activités.

Il faut relever également qu'au cours de l'examen de la recevabilité de la communication 254/02 Mouvement des Réfugiés Mauritaniens au Sénégal c. Sénégal la Commission a indiqué que le plaignant avait la possibilité d'intenter une action contre l'arrêté incriminé qui est un acte administratif susceptible de deux voies de recours dont : Le recours administratif qui consiste à saisir l'autorité hiérarchique pour excès de pouvoir, notamment le gouverneur, le Ministre de l'Intérieur, le Premier Ministre et enfin le Président de la République conformément à loi organique no. 92-24 du 30 mai 1992 sur le conseil d'État telle que modifiée et l'article 729 du Code de Procédure Civile ; Le recours juridictionnel, par la saisine du conseil d'État en annulation pour excès de pouvoir de l'acte administratif incriminé. La représentante de l'État Défendeur a démontré que ces voies de recours existent et que le plaignant n'a utilisé aucune des deux. Elle a indiqué par ailleurs que dans les cas d'urgence, le recours à la procédure de référé d'heure à heure est également ouvert aux justiciables. Elle a conclu que le plaignant n'a pas épuisé les voies de recours internes.

212Guimdo Dogmo (B-R), « Le droit d'accès à la justice administrative au Cameroun. Contribution à l'étude d'un droit fondamental. », op cit, p.173.

commun et les juridictions spécialisées. Ce qui importe malgré ces distinctions c'est qu'il existe dans chaque ordre, une hiérarchie des tribunaux coiffée par une juridiction suprême, très souvent une Cour Suprême. La hiérarchie des Tribunaux traduit la notion de recours en tant que voie de réformation. Ainsi, les Tribunaux hiérarchiquement supérieurs pourront connaître des recours portant sur les décisions des Tribunaux hiérarchiquement inférieurs. Ces recours peuvent être des recours en annulation, des recours en reformation etc.

La pertinence des recours juridictionnels doit tout à la notion de pouvoir judiciaire dont l'indépendance de la justice constitue l'essentiel. En effet, le pouvoir judiciaire est souvent entendu comme étant à la fois, « l'ensemble des actes par lesquels sont jugés les procès » et « un ensemble de Tribunaux présentant certaines propriétés structurelles »213. Un ensemble de maximes constitutionnelles détermine et organise l'exercice de ce pouvoir. Elles garantissent en même temps l'indépendance et l'impartialité des juridictions.

Par l'indépendance des tribunaux on voit une manifestation de l'État de droit. Au nom de l'intérêt général, les Cours veillent à ce que les législations ne portent pas atteinte d'une manière injustifiable à certains intérêts individuels et collectifs fondamentaux. Les tribunaux assurent la protection des droits garantis par la Charte autour de chaque individu. A travers cette prérogative, ils apportent des réparations aux violations par l'État des droits humains La Charte africaine par confère aux tribunaux un rôle important, à savoir la défense des libertés individuelles214 fondamentales et des droits de la personne contre les ingérences de tout organe gouvernemental.. Il est donc capital de donner à ce mandat tout son sens.. Ce rôle essentiel et profondément constitutionnel, passe nécessairement par une indépendance de la justice.

L'indépendance judiciaire stricto sensu, renvoie à la garantie qu'ont les tribunaux contre toute influence de l'exécutif. C'est la liberté pleine et totale des juges d'instruire et de juger les affaires qui leur sont soumises. Personne ne doit intervenir ou tenter d'intervenir dans la façon dont un juge mène l'affaire et rend sa décision. L'indépendance judiciaire a deux dimensions. Il s'agit d'une part d'une indépendance individuelle du juge, et d'autre part d'une indépendance institutionnelle ou collective de la Cour ou du Tribunal auquel le juge appartient215.

213Troper (M), « Le pouvoir judiciaire et la démocratie », EJLS vol.1, n°2, p. 1.

214 Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, art 7.

215Michel Robert (J-J), « l'indépendance judiciaire de Valente à aujourd'hui : les zones claires et les zones grises », 6e conférence Albert Mayrand, Université de Montréal, faculté de droit ,14 Novembre 2002, p. 8.

L'indépendance judiciaire est réalisée à travers trois critères que sont : l'inamovibilité, la sécurité financière et l'indépendance administrative216. Elle assure que les recours à épuiser ne dépendent pas « du pouvoir discrétionnaire de l'autorité publique »217.

L'admission exclusive des modes juridictionnels ne signifie par contre pas que si cette action est conjointe à l'usage d'autres modes non juridictionnels des règlements, elle tombe en désuétude. Ainsi dans l'affaite Annette Pagnoule le requérant qui recherchait sa réintégration dans ses fonctions de magistrat a adressé un recours gracieux au Président de la République et propose un arrangement à l'amiable au ministère de la justice. Il a par ailleurs introduit une requête auprès de la Chambre administrative et introduit d'autre recours auprès de la Cour Suprême camerounaise. La Commission avait retenue que : « compte tenu de toutes ses actions entreprises par la victime, sans qu'aucun résultat ne soit atteint, la Commission considère que les voies de recors internes ont été dûment épuisées». Au-delà de la « diversité des actions conjointes à l'absence des résultats concrets »218, c'est plus le recours au juge quoique conjoint aux recours politiques, qui a conduit à la recevabilité de la communication. Les recours juridictionnels offrent les garanties pour la réparation des violations de droits de la personne.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery