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Ethique et démocratie: les cas américain et français

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par Pathé DIOP
Faculté de Lille 2  - DEA de science politique 2003
  

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1.2 Qu'est-ce que l'homme ?

Si la question qu'est-ce que l'homme fut celle qui a le plus préoccupé les Anciens, il faut dire que la difficulté pour ces derniers à dire ce qu'il est tenaient probablement du fait qu'ils le concevaient en dehors de toutes déterminations. Leur quête de l'être de l'homme s'inscrivait dans le sillage d'une définition principielle ou essentielle qui dirait ce qu'est l'homme en tant que tel, c'est-à-dire l'homme en général. De Socrate à Nietzsche cette question a eu, tout au long de l'histoire de la philosophie, des réponses diverses. Pour certains l'homme est par essence une âme, pour d'autres il est un composé de corps et d'âme et pour d'autres encore il est passion, il est volonté de puissance.

Même si les réponses fournies par les différents philosophes pour résoudre la question de l'être de l'homme sont totalement opposées l'une de l'autre, disons cependant qu'elles ont ceci de commun : elles négligent toutes les déterminations politiques, économiques et sociales qui sont, pour parler comme Kant, les conditions a priori de l'homme. L'homme extirpé de toutes déterminations n'a pas de sens. Il s'insère en effet dans un enchevêtrement de structures ou plutôt d' « associations volontaires » et « involontaires101 » qui le façonnent selon des principes propres. Pour dire ce que

c'est que l'homme il faut le situer, le penser dans sa situation structurelle, surtout politique, car autrement nous risquons de ne saisir qu'une forme vide de l'homme.

Puisque toutes formes de gouvernement supposent un type d'homme particulier, alors nous ne pouvons comprendre ce dernier que rapporté à la forme politique ou du vivre-ensemble à laquelle il appartient. Ceci est d'autant plus vrai que nous savons que le type d'homme propre aux régimes communistes par exemple diffère à bien des égards à celui des régimes démocratiques en général, et que même au sein des démocraties se rencontrent des types d'homme différents les uns des autres vu le caractère multiforme des régimes démocratiques. Si nous pouvons nous permettre d'établir un sommaire classification de la démocratie, nous inclinerions à un découpage binaire de celle-ci en démocraties dites avancées et démocraties dites moins avancées. Ainsi, nous pouvons nous apercevoir de la différence qu'il y a entre le type d'homme propre à chacune des différentes sortes de démocratie.

Dans les démocraties dites avancées au rang desquelles se trouvent généralement les pays occidentaux, notamment la France et les Etats-Unis, il faut dire, outre les fondamentaux de liberté et d'égalité qui caractérisent l'homme, qu'il y a désormais ce fondamental qu'est la justice et qui, en rendant concrète ou applicable ces fondamentaux, manifeste le caractère dynamique de l'homme. Or dans les démocraties dites moins avancées, celles de l'Afrique par exemple en général, l'homme reste au stade principiel ou originel de la démocratie, c'est-à-dire qu'il ne jouit que des fondamentaux propres à l'homo démocraticus - la liberté et l'égalité- et

101 Les termes d'associations volontaires et d'associations involontaires son de Michaël Walzer dans Raison et passion, pour une critique du libéralisme, Ciré, 1999.

inscrits dans la Constitution, mais ne prenant pas encore la forme de faculté légitime et légale. La justice y fait défaut, elle serait en latence en attendant des circonstances favorables pour se s'actualiser : une liberté de la presse, une société civile autonome etc.

Dans les démocraties dites avancées l'homme est avant tout citoyen et est déterminé par la forme politique du vivre-ensemble, mais le seul fait qu'il soit citoyen ne suffit pas pour dire concrètement ce qu'il est, car il est également membre de communauté(s) de valeurs « involontaire(s) » et, parfois, « involontaire(s) » qui suscitent et inculquent occasionnellement des sentiments et des valeurs. Ce qui fait que l'homme est à la fois un concentrée de valeurs politiques (citoyennes) et sociales lesquelles, quelquefois, peuvent entrer en conflit.

Le tournant éthique de la démocratie correspond à un double fait d'autonomisation : de l'homme et de la société civile en général. Grâce à l'application du fondamental de justice par les hommes, ces derniers deviennent de plus en plus autonomes, c'est-à-dire qu'ils ne sont plus contraints à se plier incontestablement à des lois et des mesures politiques faites par une institution diamétralement séparée d'eux. Toutefois, ils peuvent néanmoins accepter de se soumettre à de telles lois, mais dans l'unique condition qu'ils y voient leur(s) intérêt(s) ou n'y voient pas une cause d'injustice. La société civile elle aussi jouit, dans sa diversité, d'une autonomie lui permettant ou bien de dénoncer des lois ou mesures politiques porteuses d'inégalités ou bien de réclamer certains droits afin de combler des injustices dont elle pense être victime.

L'homme devient, qui plus est, dans les démocraties dites avancées, un être critique appartenant à des cercles de valeurs différentes auxquelles il peut se libérer si toutefois ces valeurs risquent d'enter en conflit avec celles qu'il a faites siennes et qu'il a acquises à travers un processus de socialisation plus ou moins escarpées. Cette raison critique de l'homme doit être entendue comme une faculté propre orientée vers une interprétation aussi bien du social que du politique dont le but est, sinon de poser, du moins d'imposer des valeurs individuelles. En cela l'homme n'est nécessairement plus ce qu'un Dieu ou un autre transcendant lui demande d'être, mais il est ce qu'il veut devenir ; de ce fait, il est un créateur occasionnel de valeurs, non pas morales mais éthiques, qui seraient le résultat d'une accumulation d'expériences malheureuses ou heureuses tirées des diverses « organisations volontaires » ou « involontaires » auxquelles il a appartenu. Puisque la socialisation est toujours en route, l'homme doit être emporté par ce mouvement et ainsi être un éternel créateur de valeurs. Toutefois, cela ne traduit pas une versatilité de son comportement ou de son caractère, car il peut avoir des principes plus ou moins stables qui pourraient le définir.

La morale individuelle dont l'homme pourrait être le créateur est, comme dit Walzer, une « interprétation critique102 » et non une découverte, elle n'est d'ailleurs pas le propre de l'homme, mais elle caractérise également les communautés de valeurs. Pourtant cette morale individuelle ne s'exprime pas de la même façon dans les démocraties française et américaine, elle dépend largement de la tradition sociale et de la configuration politique du pays ou de l'Etat. Ce qui explique pourquoi cette morale individuelle (le terme

102 Michaël Walzer, Critique et sens commun, Paris, La Découverte, 1990, p. 9

d'éthique est plus approprié cependant) est plutôt portée, en France, par les hommes, contrairement aux Etats-Unis où les communautés de valeurs en sont les principales porteuses.

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"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite