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Communication via les médias à  base de réseaux

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par Marie-Josèphe Couturas
Université Paris 1 Sorbonne - DEA Sciences Politiques 2000
  

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1.2. La propriété, le droit d'auteur, le "capital symbolique" :

Droit d'auteur : Défini internationalement par la convention de Berne en 1886, le droit d'auteur repose sur le principe de la propriété inaliénable, par le biais de la protection du droit moral, les droits patrimoniaux étant cessibles. Une création, qu'elle soit musicale, picturale, littéraire, cinématographique, journalistique, n'appartient théoriquement qu'à son auteur. Les montants et les modalités de sa rémunération sont ensuite fixés par les différents partenaires, créateurs, diffuseurs, sociétés gestionnaires de droit, Etats, etc. Au copyright anglo-saxon, où un créateur peut céder par contrat la jouissance de son oeuvre à un tiers, les pays latins, dont la France, préfèrent la stricte application du droit moral.

L'imprimé a beaucoup facilité l'expression de l'individualisme moderne. L'auteur, par exemple, en dépend, comme en dépend aussi le sujet juridique. Le dépassement de la tradition orale en droit dépendait de l'écriture, mais l'établissement d'une véritable jurisprudence autre que locale n'était guère praticable avant l'imprimé. Or, la numérisation couplée à un réseau de portée planétaire bouleverse ce contexte.

Un oiseau numérisé ne connaît pas de cage pourrait-on dire, et ce simple aphorisme inquiète beaucoup. En effet, comment contrôler la circulation économique d'un document numérique ? Modifié sans difficulté, aisément copié et reproduit, il est accessible partout (ou plus exactement il semble accessible partout et est accessible de partout). Comment retraduire le droit d'auteur dans le monde numérisé, là où tout document semble destiné à participer à une immense dérive constituée de recyclages successifs.

Et que faire dès lors de l'auteur ?

En fait, les réseaux, tels Internet, jettent un défi d'envergure aux figures classiques de l'individualisme en multipliant les situations où l'opposition entre individu et collectif apparaît en porte-à-faux. Le nouvel individualisme qui semble se développer dans le cyberespace paraît plus fondé sur la capacité de construire et entretenir un système de distinctions à l'égard d'autres individus que sur la possession de propriétés (dans tous les sens du terme). Les phénomènes associés aux logiciels dits "libres" constituent un exemple frappant d'une production gérée de façon distribuée par ces nouvelles formes d'individualités recherchant la distinction symbolique plutôt que la propriété directe et, au plan économique, l'insertion dans des flux de services plutôt que la production d'objets définis. En contribuant librement à des éléments de programmes, le nouvel individu choisit de privilégier le "capital symbolique", principe distinctif emprunté à Pierre Bourdieu. Par là, ce nouvel individu peut espérer atteindre le capital tout court. Nobles et bourgeois fondaient leur distinction sur leur richesse ; dans le cyberespace, il semble que l'équation s'inverse : on ne peut prétendre devenir riche que si l'on se distingue et la distinction s'évalue par un processus d'évaluation par les pairs, comme c'est le cas en science.

Diderot appelait le talent "la noblesse de l'esprit" et Beaumarchais créateur en 1777 de la première société de protection des droits d'auteurs, cherchait à lui accorder des privilèges analogues à ceux de la noblesse proprement dite. Le droit d'auteur visait à créer un domaine mental aussi inaliénable au regard de la loi qu'un domaine constitué de bosquets et de prairies. Le copyright, dans la tradition littérale anglaise fondée en grande partie sur le common law (la "jurisprudence"), vise à accorder les mêmes possibilités à l'individu de talent. Droits d'auteur et copyright ont été longuement peaufinés, au terme de longues et savantes tractations, débats et combats, pour établir un équilibre judicieux entre les intérêts de l'individu créateur et ceux du public. Cet équilibre ne repose pas que sur des termes légaux, il dépend également d'un contexte technique qui pèse sur l'ensemble du dispositif légal, par exemple en avantageant la protection. Or l'inverse se produit avec la numérisation et les réseaux, fragilisant ainsi tout l'édifice du droit d'auteur.

Fruit d'une longue lutte contre l'ordre féodal, la notion moderne de propriété, d'abord attachée surtout à la terre, s'est progressivement étendue à divers domaines jusqu'à atteindre ce que l'on appelle la propriété intellectuelle.

L'Organisation mondiale de la "propriété intellectuelle" incarne la pointe extrême de ce mouvement. Issue à l'origine de la notion d'individu souverain opposée à celle de sujet, la propriété intellectuelle reflète souvent de nos jours les intérêts d'immenses ensembles financiers.

Un standard numérique comme MP3 facilite la circulation de pièces musicales dans les réseaux et, à ce titre, menace les formes classiques de la propriété intellectuelle dans le domaine musical.

Les droits d'auteur survivront-ils à Internet ? Les auteurs survivront-ils à Internet ? Même en Europe les états sont divisés sur la nécessaire défense de ces droits et la France qui en est partisane reste finalement très isolée. Pourtant Viviane Reding, commissaire européen chargée du dossier admet que si on ne fait rien, on peut aller à la catastrophe. C'est ce qui s'est passé avec la musique sur Internet par la multiplication des copies pirates. Il faut, d'après elle, absolument éviter de refaire la même chose avec le livre ou le film.

Le refus du droit d'auteur implique un jugement de valeur plus vaste sur la nature de l'oeuvre elle-même. La valeur d'une oeuvre devient liée à son potentiel de communication et d'ouverture. Moins que jamais, c'est le contenu qui compte au profit de la capacité de la forme à se déployer.

Les textes qui circulent sur Internet, censés être porteurs du "savoir mondial", sont de plus en plus fragmentés, pour répondre aux exigences de l'interactivité, et de moins en moins référencés, tendance qui semble se reporter également sur les auteurs issus du milieu des ntic qui n'hésitent plus à écrire un livre tout entier dans lequel l'influence directe de nombreux auteurs est bien visible, sans pratiquement aucune citation, référence ou note.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus