WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Communication via les médias à  base de réseaux

( Télécharger le fichier original )
par Marie-Josèphe Couturas
Université Paris 1 Sorbonne - DEA Sciences Politiques 2000
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy
5.6.5 La crise du marché de la firme verticale et l'essor des réseaux d'affaires :

La formation de réseaux de sous-traitance autour de grandes entreprises est un phénomène distinct de la constitution de réseaux horizontaux de PME. La structure en toile d'araignée des alliances stratégiques entre grandes firmes diffère du droit de passage à la société horizontale. La participation des travailleurs au processus de production ne se réduit pas nécessairement au modèle japonais. Le toyotisme est un modèle de transition entre la production standardisée de masse et une organisation du travail plus efficace, caractérisée par l'introduction de pratiques artisanales couplée à une participation des travailleurs et des fournisseurs au sein d'un modèle industriel fondé sur la chaîne de montage.

Quelle que soit leur diversité ou leur mode d'expression culturelle, toutes les dispositions organisationnelles sont fondées sur des réseaux. Les réseaux forment la trame essentielle dont les organisations nouvelles sont et seront constituées, manifestant la puissance d'information offerte par le nouveau paradigme technologique.

5.6.6 La technologie de l'information et l'entreprise en réseau :

Le changement organisationnel, indépendamment des transformations technologiques, a besoin de faire face à un environnement opérationnel en constante évolution.

Dans l'Amérique des années 1980, la nouvelle technologie a le plus souvent été perçue comme un moyen d'économiser et de contrôler le travail, non comme un instrument de changement organisationnel.

La capacité des grandes sociétés américaines à se réorganiser pour ressembler à des petites entreprises et pour agir comme elles peut du moins en partie, être attribuée au développement de nouvelles technologies qui rendent inutiles des couches entières de cadres ainsi que leurs collaborateurs.

La capacité des PME à se relier en réseaux étendus à l'échelle planétaire est devenue un facteur fondamental de leur développement voire de leur survie sur le marché. Elle passe par une extension de leur communication qui prend pour support stratégique ces réseaux en s'appuyant sur la création et la vie de nouveaux médias, à destination internes ou externes.

Dans les grandes entreprises la complexité de la toile formée par les alliances stratégiques, les accords de sous-traitance et les décisions décentralisées aurait été impossible à gérer sans le développement des réseaux d'ordinateurs, et, plus précisément, sans les puissants microprocesseurs installés dans les ordinateurs de bureau, eux-mêmes reliés par les réseaux de télécommunications à commande numérique. Dans ce cas, le changement organisationnel a, dans une certaine mesure, déterminé la vigueur technologique. C'est parce que les nouvelles organisations, petites ou grandes, ont eu besoin de se mettre en réseau que les micro-ordinateurs et les mises en réseau des ordinateurs ont connu une diffusion explosive. C'est aussi parce que ces technologies étaient disponibles, que la mise en réseau est devenue la clef de la flexibilité organisationnelle et de l'efficacité économique, et elle a produit de nouveaux médias.

La technologie de mise en réseau de l'information a fait un saut quantique au début des années 1990 du fait de la convergence de trois tendances :

1. la numérisation du réseau de télécommunications;

2. le développement de la transmission sur bande large;

3. l'amélioration spectaculaire du fonctionnement des ordinateurs reliés en réseau.

Le paradigme informatique est passé du simple lien entre ordinateurs à la "synergie informatique", où que se trouvent les interlocuteurs sur la planète. C'est ce modèle de la synergie qui a permis à des concepts tels que Internet ou La Grille de voir le jour.

Les progrès qualitatifs de la technologie de l'information, disponibles à partir des années 1990 ont permis l'émergence de procédés de gestion, de production et de distribution informatiques souples et interactifs, impliquant une coopération simultanée entre les firmes et leurs unités.

La convergence entre les exigences organisationnelles et le changement technologique érige la mise en réseau en forme de concurrence majeure dans la nouvelle économie globale. La coopération et la mise en réseau représentent donc la seule possibilité de partager les coûts et les risques, et de maintenir le contact avec une information constamment renouvelée.

En outre les réseaux font office de portiers...Autrement dit, au travers de l'interaction entre la crise et les changements organisationnels, d'une part, et les nouvelles technologies de l'information d'autre part, apparaît une nouvelle forme d'organisation caractéristique de l'économie informationnelle et globale : l'entreprise en réseau. C'est la forme spécifique d'une entreprise dont l'intersection de segments de systèmes autonomes d'objectifs constitue le système de moyens. Les éléments du réseau sont à la fois autonomes et dépendants du réseau, performance, connexité, cohérence, degré de communauté d'intérêts entre les objectifs du réseau et ceux de ses composants.

L'entreprise en réseau est la forme organisationnelle de l'économie informationnelle et globale.

Culture, organisations et institutions : un exemple, les réseaux d'affaires chinois et l'Etat développeur :

Les similarités et les différences entre réseaux d'affaires s'expliquent par rapport aux caractéristiques culturelles et institutionnelles en liaison avec la notion d'Etat développeur.

Les affinités culturelles entre les investisseurs d'outre-mer et leurs agents locaux, fonctionnaires et travailleurs y compris, permettent d'établir plus uniment et plus rapidement des réseaux transnationaux de production.

Entreprises multinationales, firmes transnationales et réseaux internationaux :

On peut observer ici différents types de réseaux :

1. Les réseaux de fournisseurs,

2. Les réseaux de producteurs,

3. Les réseaux de consommateurs,

4. Les coalitions normatives,

5. Les réseaux de coopération technologique.

Entrer dans les réseaux stratégiques exige soit de posséder des ressources considérables (financières, technologiques, commerciales) soit de s'allier à un participant majeur du réseau. Selon Manuel Castells, à mesure que le processus de globalisation s'étend, les formes organisationnelles évoluent des entreprises multinationales aux réseaux internationaux, laissant de côté les prétendus "transnationales".

Le réseau interorganisationnel est comme un réseau enchâssé dans un réseau externe, qui modèle la structure et la dynamique du réseau interne de la firme. La logique du réseau est plus puissante que les puissances au sein- même du réseau. La gestion de l'incertitude devient essentielle dans une situation d'interdépendance asymétrique, et recoupe par exemple la question de la validité des informations.

Les réseaux jouent un rôle majeur dans la nouvelle concurrence économique. Grâce à la globalisation des marchés et des intrants, et de l'extraordinaire changement technologique qui menace sans cesse d'obsolescence et oblige les entreprises à se tenir régulièrement informées des procédés et de ses produits nouveaux. Les effets organisationnels sont exactement inverses de ceux que la théorie économique classique prévoit. La globalisation de la concurrence la dissout en un tissu de réseaux multidirectionnels qui deviennent l'unité opérationnelle réelle. L'augmentation du coût des opérations est pris en charge par l'ensemble du réseau ce qui augmente assurément l'incertitude mais en permet le partage. La globalisation et l'informationalisation paraissent structurellement liées à la mise en réseau et à la flexibilité. L'architecture et la composition des réseaux d'affaires dans le monde sont influencés par les caractéristiques de sociétés où ces réseaux sont implantés.

L'esprit de l'informationalisme, (Weber), reprend :

1. les réseaux d'affaires

2. les outils technologiques

3. l'idée d'une concurrence globale

4. le rôle de l'Etat

5. la possibilité d'émergence et la consolidation de l'entreprise en réseau.

Quel est le fondement éthique de l'informationalisme ? Et a-t-il seulement besoin d'un quelconque fondement éthique ?

Pour la première fois dans l'histoire, l'unité est le réseau, le réseau est une unité.

Il ne s'agit pas d'une culture nouvelle au sens de valeurs, dans la mesure où la multiplicité des sujets dans le réseau et la diversité des réseaux récusent une "culture de réseau" de ce genre.

C'est une culture virtuelle à multiples facettes, à l'image des expériences visuelles que créent les ordinateurs dans le cybermonde en réarrangeant la réalité. L'entreprise en réseau apprend à vivre avec cette culture virtuelle. L'esprit de l'informationnalisme est la culture de la destruction créatrice, opérant à la vitesse des circuits optoélectroniques qui traitent des signaux. Shumpeter rencontre ainsi Weber dans le cybermonde de l'entreprise en réseau.

La transformation du travail et de l'emploi :

Quels rapports peut-il exister entre travail en réseau, chômage et travail flexible ou flexibilité du travail ?

Le travail est au coeur de la structure sociale. La transformation de sa technologie et de sa gestion, ainsi que celle de ses relations de production, au sein et autour de l'entreprise en réseau naissante, sont le principal vecteur par lequel le paradigme informationnel et le processus de globalisation agissent sur la société dans un ensemble. Une analyse de l'impact spécifiques des nouvelles technologies de l'information sur le travail lui-même et sur le niveau de chômage en essayant d'évaluer le bien-fondé de la crainte très répandue d'une société sans travail a été conduite. Elle montre que les effets potentiels de la transformation du travail et de l'emploi sur la structure sociale, en insistant sur les processus de polarisation sociale qu'on associe à l'émergence du paradigme informationnel débouchent sur l'individualisation du travail et la fragmentation des sociétés. L'évolution historique de l'emploi et de la structure professionnelle dans les pays capitalistes avancés est jalonnée par le G-7, sur la période 1920-2005 :

Dans tout processus de transition historique, l'une des expressions les plus directes du changement est la transformation de l'emploi et de la structure professionnelle.

Le nouveau paradigme informationnel interagit avec l'histoire, les institutions, les niveaux de développement différents et la position dans le système global d'interaction selon le fonctionnement des différents réseaux.

Le post- industrialisme, l'économie de services et la société informationnelle :

1. La productivité et la croissance naissent de la création de savoir étendue à tous les domaines de l'activité économique par le traitement de l'information.

2. L'activité économique se déplace de la production des biens à la prestation de services. Un glissement se produit vers les emplois de services, marque d'une économie avancée.

3. La nouvelle économie augmente l'importance des professions à fort contenu d'information et de savoir. Les professions gestionnaires, libérales et techniques se multiplient plus vite que les autres pour constituer le noyau de la nouvelle structure sociale.

La révolution des NTIC partage le XX ème siècle en deux. Elle s'est ajoutée le "mythe" de l'économie postindustrielle.

La notion de services est quant à elle ambiguë voire trompeuse. Le software informatique interdit souvent de distinguer "biens" et "services".

Les professions riches en information sont en expansion, constituant le coeur de la dite nouvelle économie du travail. La quantité d'emplois non-qualifiés augmente également. La structure sociale est de plus en plus polarisée, son sommet et sa base existent au détriment de son milieu.

Savoir, science et expertise occupent une place prééminente dans la plupart des professions gestionnaires et libérales.

Dans les sociétés qui détruisent massivement les emplois industriels en une courte période (ex : dans les pays du G-7) on assiste au fondement du nouveau système de classes de la société informationnelle.

La nouvelle structure professionnelle met au jour une grande diversité des profils professionnels selon les sociétés. Le Japon et les Etats-Unis occupent deux pôles de comparaison dont le contraste souligne l'urgence qu'il y a à refondre la théorie du postindustrialisme et de l'informationnalisme.

Le modèle américain progresse, accompagné d'une hausse du poids relatif des professions les plus nettement informationnelles; il n'y a pas polarisation professionnelle par rapport aux données, mais il se produit une polarisation des revenus aux Etats-Unis par exemple et dans d'autres pays depuis une vingtaine d'années.

La maturation de la société informationnelle est difficilement démontrée par les projections de l'emploi dans le XX ème siècle.

Dans ce domaine les données sont douteuses et les projections incertaines. C'est la "division des services", services de santé, services d'affaires, qui assurera l'essentiel de la croissance de l'emploi.

Au cours de la période 1975-1990 l'activité qui s'est développée le plus rapidement a été la fourniture de personnel, les firmes recourant de plus en plus au travail temporaire et à la sous-traitance.

Les services juridiques et para-juridiques, l'ingénierie, l'architecture et l'éducation (écoles privées) devraient croître fortement aussi.

La projection aux Etats-Unis suivant le modèle originel de la société informationnelle met en évidence que les emplois agricoles disparaissent; l'emploi industriel continue de diminuer; les services aux entreprises accroissent leur importance et le commerce de détail et les services deviennent très liés.

L'évolution de la structure professionnelle et ses implications pour une analyse comparative de la société informationnelle montre que la tendance séculaire est à l'accroissement de la productivité du travail humain. Il faut produire plus et mieux avec moins de ressources et d'efforts, et ceci s'accompagne d'un glissement de l'emploi et de la main-d'oeuvre (production directe - production indirecte).

Le passage se fait d'un système essentiellement centré sur l'agriculture à un système basé sur l'industrie puis sur les services dans lequel l'information et les médias prennent un nouvel essor.

Plusieurs traits communs fondamentaux caractérisent les sociétés informationnelles et deux modèles informationnels différents peuvent être identifiés : le modèle de l'économie de services avec expansion de la catégorie des managers et modèle de production industrielle.

La France semble pencher vers le modèle de l'économie de services tout en conservant une forte base industrielle et en développant à la fois les services aux entreprises et les services sociaux. Les réseaux d'entreprises de type PME se multiplient.

L'unité d'analyse permettant de comprendre la société nouvelle doit nécessairement changer.

La question que l'on peut se poser est celle de l'existence d'une main d'oeuvre globale.

S'il y a économie globale, cela implique qu'il y ait un marché du travail global et une main-d'oeuvre globale. Pour autant on ne peut pas dire que le marché des nouvelles technologies est devenu global. Il existe cependant un marché global pour une fraction infime de la population active : les spécialistes hyperqualifiés de la recherche et développement innovatrice, de l'ingénierie de pointe, de la gestion financière, des services avancés d'affaires et du spectacle, qui vont et viennent entre les noeuds de réseaux dominants de la planète. L'intégration des meilleurs talents dans les réseaux globaux se fait essentiellement aux sommets dirigeants de l'économie informationnelle.

Hormi le plus haut niveau des créateurs du savoir et des manipulateurs de symboles (les connecteurs, les capitaines et les innovateurs), il n'existe pas et il n'existera pas dans un avenir proche de marché global et unifié du travail.

Chaque fois c'est la technologie de l'information qui permet de lier entre eux les différents segments de main d'oeuvre au travers des frontières nationales :

1. l'emploi global dans les firmes multinationales et leurs réseaux transfrontières associés,

2. les effets du commerce international sur les conditions d'emploi et de travail,

3. les conséquences de la concurrence globale et du nouveau mode de gestion flexible sur la population de chaque pays.

Il faut désormais communiquer à des distances très importantes avec une très grande vitesse, et certaines informations sont stables sur une période plus longue tandis que d'autres, beaucoup plus instantanées, doivent être échangées "au moment" avec le bon interlocuteur. Des nouveaux médias naissent et s'imposent, et cette catégorisation de l'information implique leur structure et hiérarchise leur importance. La main humaine reste toujours là pour apporter du bon sens lorsque c'est nécessaire.

En fait, plus la globalisation économique s'approfondit plus l'interpénétration des réseaux de production et de gestion s'accentue par-delà les frontières, et plus étroits se font les liens entre les conditions de la main d'oeuvre dans les différents pays : celle-ci dispose de niveaux de salaires et de protection sociale différents, tout en gommant de plus en plus les écarts de qualification et de technologie.

Tout un ensemble de stratégies concernant la main d'oeuvre, qualifiée ou non, est donc offert aux entreprises des pays capitalistes avancés qui en ont la possibilité.

Le travail dans le paradigme informationnel change lui aussi quelque peu d'orientation.

L'épanouissement de la révolution des technologies de l'information pendant les années 1990 transforme le travail et introduit de nouvelles formes dans sa division sociale et technique; au milieu des années 1990, le nouveau paradigme informationnel couplé avec l'émergence de l'entreprise en réseau est bien installé et prêt à opérer.

La relation est plus étroite entre technologie et travail.

La technologie n'est pas en soi la cause de l'organisation du travail sur place, et n'est qu'une des opportunités de l'installation de nouveaux médias.

Dans cette ère où le service et la communication par son efficacité sont devenus primordiaux, la technique en elle-même n'est plus un problème qui prime. Tout peut être résolu, il suffit d'en avoir les moyens. Le processus de restructuration capitaliste a marqué de façon décisive les modalités de l'introduction des technologies informationnelles dans le processus du travail, mais cette restructuration elle-même a été modelée par les capacités technologiques, la culture politique et les traditions professionnelles des différents pays. Le nouveau paradigme informationnel du travail ne se présente donc pas comme un patchwork désordonné, tissé par l'interaction entre le changement technologique, la politique de relations industrielles et l'action sociale. Pour déceler des structures permanentes dans cet ensemble confus, il est nécessaire de déconstruire d'abord, puis de reconstruire, la structure naissante de l'organisation de la main d'oeuvre et du travail qui caractérise la nouvelle société informationnelle.

Toute technologie de l'information passe par une mécanisation puis une automation. Le débat est alors celui de l'aliénation par la productivité, de l'autonomie du travail au regard du contrôle de la direction.

Si les machines automatisées, puis les ordinateurs, servent effectivement à transformer les travailleurs en robots de deuxième ordre, ce n'est pas là le corollaire de la technologie mais celui d'une organisation sociale du travail qui a bloqué et bloque encore la pleine utilisation de la capacité de production générée par les technologies nouvelles.

Le travailleur en réseau est en quelque sorte l'agent nécessaire de l'entreprise en réseau, fondée grâce aux nouvelles technologies de l'information, et dont la communication s'appuie sur de nouveaux médias qui en découlent.

Dans les années 1990, plusieurs facteurs ont accéléré la transformation du travail : la technologie informatique et ses applications, progressant par bonds sont devenus plus performantes, meilleur marché, et exploitables à grande échelle ; la concurrence globale a provoqué une course technologique / gestionnaire entre les entreprises du monde entier ; les organisations ont évolué et adopté des formes nouvelles, généralement fondées sur la flexibilité et la mise en réseau ; les managers et leurs conseillers ont enfin compris le potentiel des technologies nouvelles et appris à en user, même s'ils leur assignent volontiers les limites du vieux système d'objectifs organisationnels. Les médias donnent la possibilité désormais d'une meilleure concertation décisionnelle depuis la base.

Pour la diffusion massive, ce qui a tendance à disparaître dans l'automation intégrale, ce sont les tâches routinières et répétitives qui, codables et programmables, peuvent être assurées par des machines.

Le travail informationnel est déterminé par les caractéristiques du processus informationnel de production. La valeur ajoutée est essentiellement le fruit de l'innovation, tant dans les procédés que dans les produits. Les nouvelles puces et les nouveaux logiciels conditionnent largement le destin de l'industrie électronique. L'invention de produits financiers nouveaux (par exemple : le "marché dérivé" à la Bourse à la fin des années 1980) sont à la base de l'essor, si hasardeux soit-il des services financiers et de la prospérité ou de l'effondrement des firmes financières et de leurs clients.

L'innovation dépend de deux conditions : le potentiel de recherche et la capacité de spécification. Autrement dit, le nouveau savoir doit être mis au jour, puis appliqué à des objectifs spécifiques dans un contexte organisationnel et institutionnel donné. La conception personnalisée est essentielle pour la micro- électronique des années 1990 et la réaction instantanée aux changements macro-économiques fondamentale pour gérer des produits financiers volatils créés sur le marché global.

Les tâches d'exécution sont plus efficaces lorsqu'elles sont capables d'adapter des instructions plus larges que leur application spécifique, et lorsqu'elles peuvent rétroagir sur le système. La combinaison optimale entre le travailleur et la machine dans les tâches d'exécution permet d'automatiser toutes les procédures standard pour réserver au potentiel humain l'adaptation et les effets rétroactifs.

La plus grande partie de l'activité de production se déroule au sein d'organisations. Les deux principaux traits de la forme organisationnelle prédominante, c'est-à-dire l'entreprise en réseau, étant l'adaptabilité interne et la flexibilité externe, les deux éléments clés du travail sont dès lors la capacité à générer des décisions stratégiques souples et la capacité à assouplir l'intégration organisationnelle entre tous les éléments du processus de production.

La technologie de l'information devient l'ingrédient principal du travail décrit dans la mesure où elle détermine largement la capacité d'innovation ;elle permet la correction d'erreurs et la création de rétroactions au niveau de l'exécution ; elle apporte à l'infrastructure flexibilité et adaptabilité dans la gestion du processus de production. Et rappelons-le, elle est le support des nouveaux médias de communication qui se mettent en place, investissant autant qu'il est possible tous les niveaux de la distribution.

Une nouvelle distribution du travail est produite, tout d'abord concernant les tâches effectivement accomplies dans un travail donné (création de valeur) , ensuite, la relation entre une organisation donnée et son environnement y compris d'autres organisations (création de relation) , et en troisième, la relation entre gestionnaires et employés dans une organisation ou un réseau donnés (prise de décision) .

Elle s'applique par différents champs :

a. Prise de décision et planification stratégiques par les capitaines ;

b. Innovation dans les produits et les procédés par les chercheurs ;

c. Adaptation, présentation et ciblage de l'innovation par les concepteurs ;

d. Gestion des relations entre la décision, l'innovation, la conception et l'exécution en tenant compte des moyens dont dispose l'organisation pour réaliser les objectifs par les intégrateurs ;

e. Exécution des tâches fondées sur l'initiative et la compréhension personnelles par les opérateurs ;

d. Exécution des tâches subsidiaires préprogrammées qui n'ont pas été ou ne peuvent être automatisées, par ceux que M Castells nomme "les manoeuvrés" ou "robots humains".

Cette typologie doit être combinée avec une autre qui prend en considération le besoin et la capacité de chaque tâche, et de celui qui l'accomplit, à être reliée avec d'autres fonctions en temps réel, que ce soit au sein de la même organisation ou dans un système général de l'entreprise en réseau ...

Trois cas de figure prévalent :

1. les connecteurs, ce sont eux qui connectent les autres et décident;

2. les connectés, qui travaillent en ligne mais ne décident pas quand, comment, pourquoi et avec qui ;

3. les déconnectés, rivés à leurs tâches spécifiques, définies par des institutions non-interactives à sens unique.

Seules les deux premières catégories "touchent" aux nouveaux médias.

Enfin du point de vue de la capacité à intervenir dans la prise de décision, on différencie : les décideurs, les participants, les exécutants.

Néanmoins le travail informationnel invite par nature à la coopération, au travail en équipe, à l'autonomie et à la responsabilité des travailleurs, sans quoi les nouvelles technologies ne peuvent fournir tout leur potentiel ni la communication atteindre une qualité suffisante. Le caractère "en réseau" de la production informationnelle imprègne la firme toute entière et exige en permanence une interaction et un traitement de l'information des employés, entre employés et direction, et entre les hommes et les machines.

L'émergence du paradigme informationnel dans l'organisation du travail n'explique pas complètement la situation de l'emploi et de la main-d'oeuvre dans nos sociétés. Le contexte social, et singulièrement la relation entre le capital et le travail en fonction des décisions spécifiques par la direction des firmes, modèle fortement la réalité du travail et les conséquences du changement pour les employés.

Là, même si l'information via les nouveaux médias est à même de remonter mieux, cela ne signifie pas qu'elle est utilisée systématiquement dans la prise de décision. Cependant les tableaux de bord d'entreprise automatisés existent ou se mettent en place tout le long de la hiérarchie de l'entreprise entreprise- réseau d'abord puis du ou des réseaux d'entreprises.

La bifurcation des structures professionnelles et la polarisation du travail qui en résulte ne sont pas le fruit du progrès technologique ou de tendances évolutives inexorables. Elles sont socialement déterminées et décidées par les managers au cours de la restructuration capitaliste qui affecte la production dans le cadre et avec l'aide du changement technologique. Dans de telles conditions, le travail, l'emploi et les professions se transforment, comme peut-être l'idée même de travail et de temps de travail.

Les effets de la technologie de l'information sur l'emploi pourraient même impliquer que nous allons vers une société sans travail. La diffusion de la technologie de l'information ranime la crainte séculaire des travailleurs de se voir remplacés par des machines et de perdre ainsi toute raison d'être d'autant que l'élément caractéristique du nouveau marché du travail des deux dernières décennies est l'introduction massive des femmes dans la population active salariée signifie une très grande hausse de nombre.

Dans l'ensemble, les statistiques internationales démentent les prédictions ; généralement, plus le niveau technologique est élevé et plus le taux de chômage est faible. La technologie de l'information ne produit pas en soi le chômage bien qu'elle réduise à l'évidence le temps de travail par unité produite et la ligne de partage informationnelle du travail désigne la notion de travail flexible.

La restructuration des entreprises et des organisations qu'autorise la technologie de l'information et que stimule la concurrence globale introduit une transformation fondamentale de l'emploi : celle de l'individualisation des tâches dans les processus de travail. Et nous assistons ainsi à un renversement de la tendance historique à la généralisation du salariat, personnalisation des produits, travail à temps partiel. Dans certains pays cela représente une part importante de la population active.

La mobilité du travail concerne aussi les emplois qualifiés. Si la plupart des firmes conservent encore un noyau de main-d'oeuvre fixe, elles font de plus en plus appel à la sous-traitance et au conseil des tâches spécialisées. L'entreprise n'est pas la seule à profiter de la flexibilité. Nombre de spécialistes ajoutent à leur emploi principal à temps plein ou partiel des missions de conseil qui augmentent à la fois leurs revenus et leur pouvoir de négociation. La logique de ce système professionnel très dynamique interagit avec les institutions du travail de chaque pays. Dans l'ensemble la forme traditionnelle du travail fondée sur l'emploi à temps plein, des tâches professionnelles précises et un plan de carrière à vie, se délite lentement mais sûrement.

Le modèle dominant du travail dans la nouvelle économie informationnelle conjugue en effet une main-d'oeuvre permanente, comparée de gestionnaires informés et de ceux que Reich appelle "analystes symboliques", et une main-d'oeuvre jetable qui peut être automatisée et/ou embauchée / licenciée / délocalisée selon la demande du marché et les coûts du travail. D'autant que l'entreprise en réseau peut s'adapter facilement aux conditions du marché en externalisant ses activités par l'approvisionnement à l'étranger et la sous-traitance, sa communication étant normalement réellement facilitée et bien plus puissante par la mise en réseau et les médias.

Les analystes distinguent diverses formes de flexibilité : par les salaires, la mobilité géographique, le statut professionnel, la sécurité contractuelle, le travail à la tâche qui redéfinissent les conditions de travail.

La technologie de l'information et la restructuration des relations capital- travail peut conduire vers la polarisation sociale ou la mise en place de sociétés fragmentées. La diffusion de la technologie de l'information dans l'économie ne produit pas automatiquement du chômage, elle est même capable de créer des emplois à long terme. La logique de ce modèle dynamique de marché du travail interagit avec les institutions du travail propres à chaque pays. La société se divise comme c'est le cas depuis toujours dans l'histoire, entre les gagnants et les perdants du processus sans fin de négociation individualisée et inégale.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault