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Leibniz et la physique quantique

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par Mathieu Néhémie
Université de Clermont-Ferrand - Master 1 de Philosophie 2006
  

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2.2. Les problèmes posés par la physique quantique

2.2.1. L'échec des conceptions classiques

Discontinuité et quanta

Tout d'abord il nous faut faire un rapide rappel des acquis de la physique à la fin du dix-neuvième siècle. La mécanique newtonienne est toute puissante et universellement reconnue. La nature fondamentalement corpusculaire de la matière fait plus que jamais l'unanimité, de même que le déterminisme qui gouverne son mouvement. La physique électromagnétique bénéficie également d'une stabilité et d'un consensus exceptionnels, ayant permis de réunir dans une même théorie l'optique comme l'ensemble des phénomènes magnétiques. Il faut également remarquer que presque toute la communauté scientifique est alors complètement immergée dans un paradigme atomiste. Il est admis que la matière est entièrement composée d'atomes, eux-mêmes composés d'un ou plusieurs électrons en orbite autour d'un noyau, mais surtout de vide. Cependant certains points concernant l'atome sont encore flous, notamment les modalités mécaniques qui permettent à un électron de se maintenir ainsi en orbite autour du noyau. La thermodynamique, stimulée par la révolution industrielle, est également très florissante, permettant d'expliquer de nombreux phénomènes concernant les transferts d'énergie et les rapports entre interaction moléculaire et évolution d'un système macroscopique.

Ce sont justement des travaux de thermodynamique qui permirent à Max Planck, au tout début du vingtième siècle, d'introduire la constante h qui porte son nom, résultat traditionnellement pris comme commencement à la physique quantique. Alors qu'il tente de mesurer le rayonnement du corps noir, c'est-à-dire la lumière émise par un métal porté à une très haute température en l'absence de tout autre rayonnement, il s'avère que l'énergie ne se mesure que par `'paquets''. L'introduction de la constante de Planck correspond clairement à l'apparition d'une certaine discontinuité dans les transferts d'énergie observables. Pourtant Planck n'y voit encore qu'un artifice de calcul car il partage l'idée universellement admise que l'énergie peut théoriquement être mesurée dans des quantités aussi petites que l'on veut.

C'est Albert Einstein qui prend toute la mesure de cette découverte en supposant qu'à tout rayonnement lumineux correspondent des `'grains de lumière'' (qui seront plus tard appelés photon). Il s'agit de la première apparition du concept de quanta par l'interprétation ontologique que fait Einstein de la constante de Planck : si l'énergie se transmet de manière discrète, que des nombres entiers apparaissent inévitablement à une certaine échelle dans tout processus de quantification de l'énergie, c'est qu'elle doit avoir une nature corpusculaire. Par cette supposition, le jeune physicien de vingt six ans parvient d'ailleurs à résoudre un autre problème majeur que peinait à solutionner la physique ondulatoire, l'effet photoélectrique. Il n'est pas nécessaire de préciser la nature de cet effet mais il faut seulement remarquer que là où la théorie purement ondulatoire de la lumière ne permettait pas d'expliquer une bizarrerie de l'interaction entre matière et lumière, une vision corpusculaire y parvient. En réalité, Einstein voit dans cette apparition de la discontinuité l'opportunité de réunifier dans un paradigme unique et cohérent l'atomisme, qui pose fondamentalement la discontinuité, et la continuité radicale qui caractérise la formulation traditionnelle de l'électromagnétisme.

C'est également ce but là qui guide Niel Bohr lorsqu'il parvient, en utilisant cette même constante de Planck et en n'admettant que des transferts discrets d'énergie, de rendre compte du fait qu'un électron en orbite autour d'un noyau atomique ne finit pas par perdre toute son énergie pour venir s'écraser sur ce dernier comme le prédit la mécanique de Newton. La théorie qu'il met en place permet également d'expliquer les transferts d'électrons qui s'effectuent entre atomes et dont la mécanique classique ne rend pas compte non plus. Ainsi, de la même manière que les nombres entiers apparaissent dans les mesures de Planck, seuls certaines orbites sont permises à un électron, ce qui lui permet de garder le même orbite sans perdre d'énergie, jusqu'à ce qu'il émette un quantum d'énergie en passant d'une orbite à l'autre (qui peut être d'un atome à l'autre). Bohr vient de créer le concept de saut quantique qui n'est absolument pas géré par la mécanique newtonienne et par conséquent met parfaitement en évidence la contradiction qui naît entre un tel modèle discontinuiste et les fondements de mécanique classique.

On peut voir comment, à première vue, l'apparition de la physique quantique correspond à une confirmation du modèle atomiste autant qu'à l'échec des postulats de la physique newtonienne. L'idée que la discontinuité puisse être ontologique a le vent en poupe, mais bientôt des problèmes théoriques directement liés à cette discontinuité feront leur apparition.

Ondes et particules

Un des problèmes majeurs soulevés par la nouvelle théorie quantique est que l'apparition d'une vision corpusculaire de l'énergie est symétrique celle d'une onde de matière. Cela ne fut pourtant pas immédiatement évident dans un contexte où tous les objets de la physique, jusqu'à ce moment là, appartenaient soit au domaine des corpuscules, soit à celui des ondes. La conception ondulatoire de la lumière, ainsi définie avec efficacité par la physique électromagnétique, entre donc en opposition avec les grains de lumière de nature corpusculaire de Einstein, qui montrent pourtant eux aussi leur validité opératoire. C'est Louis de Broglie qui eut le premier l'idée que des particules élémentaires comme le photon devaient être pilotées par une onde pour qu'elles puissent évoluer de cette manière une fois étudiées en grand nombre. Là encore la rupture avec les conceptions classiques est radicale car non seulement cette idée d'onde pilote associée à toute particule matérielle est inédite mais aucune théorie ne peut à ce moment là en rendre compte. L'aspect le plus dérangeant d'une telle théorie est apparue cependant lorsqu'elle fut confirmée expérimentalement par les expériences de Davisson et Germer et ensuite par d'autres types d'expériences.

La physique classique connaît un moyen très simple, par le dispositif des fentes de Young, de montrer si un phénomène est de nature corpusculaire ou ondulatoire. Il s'agit tout simplement de placer entre l'instrument émettant corpuscules ou onde et l'écran capteur un panneau percé de deux fentes. Si on a affaire à des corps comme des billes, il est aisé pour n'importe qui de prévoir quelle figure se présentera sur le capteur : n'apparaîtront sur l'écran capteur que des marques localisées pour les billes ayant étés lancées dans l'axe d'une des fentes si seulement l'une des deux est ouvertes, ou dans l'axe des deux si les deux sont maintenues ouvertes. On ne peut faire la différence entre les résultats d'une expérience faite avec les deux fentes ouvertes et l'addition pure et simple des mesures de deux expériences effectuées une fois avec une seule fente ouverte et ensuite avec l'autre. Dans le cas d'une onde projetée avec une seule fente ouverte, l'écran sera marqué d'une manière assez similaire à un phénomène corpusculaire, dans l'axe de la source et de la fente. La différence apparaît dans le cas d'une onde projetée lorsque les deux fentes sont ouvertes : entrant dans deux fentes différentes l'onde se divise en deux ondes séparées qui interfèrent alors entre elles dans l'intervalle qui sépare le panneau de l'écran capteur. Sur ce dernier apparaissent alors des franges d'interférence qui sont des zones où l'onde n'a pas été détectée bien que située dans l'axe entre la source et une fente. En d'autres termes, le résultat de l'expérience effectuée avec une onde et deux fentes ouvertes n'aboutit pas aux mêmes mesures que si on effectuait successivement une expérience avec seulement l'une des deux fentes ouvertes puis une autre avec la seconde fente et que l'on juxtaposait leurs résultats. Cette expérience est décisive pour distinguer les phénomènes corpusculaires des phénomènes ondulatoires dans la mesure où seulement dans le cas de ces derniers des franges d'interférences apparaissent.

L'expérience de Davisson et Germer est une simple transposition de cette expérience à l'échelle quantique grâce à un canon à électrons. Lorsque les électrons sont projetés un part un, des marques de même type que les marques des billes apparaissent sur l'écran capteur, c'est-à-dire des marques individuelles, bien localisées et sans franges d'interférence. Cela confirme leur nature corpusculaire car de telles marques ne peuvent pas être données par des ondes. Mais les choses se corsent lorsque les électrons sont émis en grands nombres car des franges d'interférence apparaissent bien qu'ils soient toujours possibles d'observer des impacts localisés d'entités corpusculaires. Il semble donc nécessaire de traiter un ensemble de nombreux corpuscules comme une onde et de lui donner une longueur d'onde ainsi qu'une fréquence bien que cela soit en totale opposition avec les bases de la physique classique.

Le plus intéressant et le plus original dans une telle découverte ce n'est pas tant que la physique a mis en évidence un nouvel objet aux propriétés inédites, car cela peut arriver souvent, mais le problème naît que ce nouvel objet est censé constituer les fondements de toute matière et de tous les phénomènes que nous observons. Nous ne voyons pas les objets macroscopiques qui nous entourent se déplacer comme dirigés pas une onde, pas plus que des corps effectue des déplacements arithmétiques dans un intervalle de temps nul comme lors d'un saut quantique. Si la mécanique newtonienne, comme la plupart des théories de physique classique, est fort intuitive et ne fait que préciser des notions de mouvement et de corps qui nous sont en réalité très familières, la physique quantique voit apparaître des entités et des principes qui semblent totalement hétérogènes avec notre expérience commune. Bien que pour l'instant cela puisse être considéré -avec cependant un manque de rigueur caractéristique- comme une vulgaire curiosité, une telle distance entre la physique quantique et le sens commun ne fera, comme nous le verrons plus tard, que s'accentuer.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon