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Leibniz et la physique quantique

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par Mathieu Néhémie
Université de Clermont-Ferrand - Master 1 de Philosophie 2006
  

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2.4. Conclusion

Au terme de cet exposé, ce que nous sommes le plus certain d'avoir réussi, c'est d'avoir mis en évidence le caractère philosophiquement très problématique de la théorie quantique, ce qui explique le choix du titre de cet exposé. Il ne faudra cependant pas prendre celui-ci pour un essai sur la physique quantique se suffisant à lui-même. Si nous avons tenté de donner quelques détails techniques lorsque cela était nécessaire, nous invitons vivement le lecteur à se renseigner sur les différentes théories évoquées s'il souhaite pleinement les comprendre. Les résumés que nous avons donnés doivent cependant permettre de dégager les problèmes épistémologiques et ontologiques essentiels posés par la mécanique quantique.

En effet nous avons d'un côté les questions strictement épistémologiques qui gravitent autour de la physique microscopique. La plupart n'ont rien d'original mais la théorie quantique leur apporte une matière nouvelle particulièrement fructueuse pour alimenter les débats. Notamment les dualités classiques entre positivisme et réalisme ou entre idéalisme et réalisme jouent un rôle majeur dans les querelles d'interprétation concernant la mécanique quantique. Celle-ci semble mettre à mal toutes les tentatives de discours réalistes qui ont été tentées sans pour autant donner le moindre argument qui les rendent caduques a priori. Au contraire l'échec à son sujet de toutes les grilles de lectures classiques dont nous avons l'habitude nous laisse à penser que doit exister quelque réalité indépendante se distinguant fortement de la réalité empirique que nous construisons naturellement. La physique quantique ne constitue donc pas la découverte qui va clore ce débat plusieurs fois millénaire mais elle évite, d'un côté un réalisme naïf qui croirait en un quasi-isomorphisme entre les phénomènes et les choses en soi, et de l'autre un idéalisme qui considérait la chose en soi comme une vulgaire copie du phénomène. Quant au positivisme, s'il est toujours d'une efficacité incontestée pour prédire le comportement des entités quantiques, plus que jamais il nous laisse dans un flou théorique difficilement acceptable en suspendant la question de savoir ce qui est réel parmi tous les objets épistémologiques utilisés (particules, vecteurs, champs, ensembles, etc.). De plus un tel discours positiviste ne peut manquer d'être exprimé dans un certain langage qui possède quand à lui toujours un certain parti pris ontologique.

Ce sont bien les questions ontologiques qui constituent l'autre classe de problèmes que pose la physique quantique. Même les physiciens les plus positivistes n'ont pu éviter de participer à ce type de débat car pour adopter un langage neutre encore faudrait-il définir cette neutralité. Les questions ontologiques posées par la théorie quantique, et surtout par les diverses interprétations tentées pour lui donner un sens réaliste, s'articulent avec les problèmes épistémologiques qu'elle pose dans la mesure où ce sont les particularités dont témoigne la mécanique quantique sur ce plan qui fixent les limites de tout discours réaliste portant sur elle. Nous avons pu voir que si ce sont bien des quantités discrètes qui ont été introduites avec la théorie quantique, cela ne peut être interprété comme une confirmation du modèle atomiste. En effet, les concepts de matière et de corps ne peuvent être difficilement conservés à l'échelle quantique. Ce n'est donc pas tant qu'aucune conclusion ontologique ne soit envisageable à partir des données de la mécanique quantique, bien plutôt est-ce le paradigme matérialiste usuel qui est incapable d'en tirer rien d'autre que des incohérences. Que l'on admette ou pas des particules élémentaires, il est difficile de rendre compte de la théorie quantique dans une optique ontologique sans faire intervenir des potentiels ou champs qui constituent également des réalités fondamentales. Celles-ci doivent par ailleurs présenter des caractéristiques qui dépassent toute conception ondulatoire ou corpusculaire ainsi que la discrétisation qui se constate lors des mesures. Plus généralement, expliquer les phénomènes tridimensionnels et déterministes observés à une échelle humaine nécessite à l'échelle quantique l'usage d'entités probabilistiques, dimensionnellement variables, et dans une certaine mesure atemporelles, de sorte que l'on soit tenté d'en conclure que, si de telles entités nous donnent des fragments d'information concernant la réalité fondamentale, celle-ci doit également présenter ce type de caractéristique. Tout du moins ce serait faire preuve d'un bien trop naïf réalisme que de penser que nos modalités perceptives familières nous donnent une bien plus sûre description de la réalité indépendante que les modèles mathématiques les plus vérifiés par l'expérience. Il semble plus sage de penser que nous construisons une réalité empirique à partir de notre expérience du monde et que, au fur et à mesure que cette expérience gagne en précision, en raffinement et en efficacité prédictive, ses structures doivent tendre à s'approcher de celles de la réalité indépendante, quoique nous ne soyons jamais en mesure de déterminer la distance qui sépare ces deux réalités. Cette incertitude tend d'ailleurs à identifier sémantiquement un tel réalisme et un idéalisme mitigé qui admettraient tout deux une réalité fondamentale inaccessible et qui plongeraient l'expérience humaine dans une autre réalité hétérogène et gouvernée par ses propres contraintes cognitives. Finalement, si l'on cloisonne complètement réalité indépendante et réalité empirique, on doit admettre que ni le paradigme du temps plat et de l'espace tridimensionnel ni le paradigme relativiste spatiotemporel quadridimensionnel ne peuvent convenir pour saisir l'ensemble des phénomènes de la réalité empirique.

Fort de ces conjectures sur les plans épistémologique et ontologique ainsi que des données que nous avons réunies sur la physique quantique, nous pouvons nous estimer relativement bien équipés pour mettre le système de Leibniz à l'épreuve de cette branche très problématique de la physique moderne. Il nous faudra cependant toujours garder à l'esprit cette particularité de la physique quantique que nous avons bien mise en évidence, à savoir que si son formalisme connaît unicité et unanimité, ses diverses interprétations à visée ontologique ne connaissent ni consensus ni preuve de leur validité. En conséquence c'est essentiellement à ce formalisme que nous confronterons le système de Leibniz bien que nous conserverons à ces modèles le rôle de `'laboratoire théorique'' que d'Espagnat leur attribue.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon