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Le discours religieux en Tunisie: L'exemple de la communauté juive

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par Sadek MTIMET
Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis ( Université Al-Manar) - Master en sciences poltiques 2007
  

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B - Soutien à travers l'action politique

L'adhésion de la judaïcité tunisienne aux partis politiques et la participation de son élite dans le débat des idées ont eu lieu depuis l'établissement du protectorat en Tunisie. L'antisémitisme de la droite française n'a pas laissé le choix à d'autres alternatives pour les juifs tunisiens que d'adhérer à la gauche républicaine française qui se composait essentiellement, en premier lieu, de socialistes, puis, et depuis 1920, de communistes

1 - La Fédération socialiste de Tunisie ( F.S.T. ) : Cette fédération était constitué depuis 1908 sous l'impulsion d'Albert Cattan, médecin juif tunisien qui sera pendant plusieurs années son secrétaire général. Cette fédération est admise à la S.F.I.O en 1912. Mais depuis 1921 et après la victoire de la révolution d'Octobre 1917 et la constitution de l'U.R.S.S., cette fédération se scinde et donne lieu à deux fédérations, l'une socialiste réformiste et l'autre franchement communiste .

L'adhésion à l'une ou à l'autre fédération ne repose sur aucun critère ethnique ou racial, ce qui a encouragé un nombre très important de juifs tunisiens à adhérer et à diriger ces deux groupements à l'instar de bien d'autres d'origine chrétienne ou musulmane . Cependant, malgré le caractère politique de ces deux fédérations, on ne peut les classer parmi les organisations anticolonialistes du fait de leur lien organique avec les fédérations de la Métropole ainsi que leurs programmes d'action qui se limitaient à la critique de la politique coloniale et sa revendication d'une politique plus juste dans le cadre de la "mission civilisatrice de la France" en lui rappelant qu'elle a autant de devoirs que de droits en Tunisie. Les deux fédérations ________________________________________________

(1) Kazdaghli H., op cit, p. 226. (2) Bessis J., Les Fondateurs , index bibliographique des cadres syndicalistes de la Tunisie coloniale (1920-1956). Paris: l'Harmattan,1985, p.19

constituaient un pôle de progrès, d'égalité et de rationalisme qui a eu un effet attractif sur les éléments de l'élite intellectuelle juive de la Tunisie coloniale qui voulait dépasser, par l'adhésion à ces organisations, les solutions conservatrices proposées au sein de la Communauté d'origine .

Les jeunes juifs tunisiens issus de l'école laïque française considéraient que "la question juive" en Tunisie trouverait sa véritable solution à travers la démarche prônée par la Révolution française accordant la citoyenneté aux juifs. Mais ils restaient peu explicite sur le type de concrétisation spécifique qui pouvait lui être envisagée dans un contexte colonial .

En Tunisie, la composante majoritaire de la population musulmane commençait à affirmer son identité à travers un nationalitarisme moderniste qui, justement, instrumentalisait la religion comme élément de mobilisation . Alors, dans la mesure où ce mouvement constituait une protestation contre l'oppression et la discrimination, il paraissait, pour l'élite juive, légitime et inspirait uniquement la sympathie mais pas au point d'y adhérer. En réalité, ce qui rendait peu nombreux les constitutionnalistes juifs, n'était pas, croyons-nous savoir, ni la référence à l'islam dans l'idéologie des partis nationalistes, ni "le manque de célérité" dans l'action politique mais c'était la crainte de leur isolement au sein de leur Communauté religieuse. Les juifs tunisiens, ayant développé un discours d'adaptation aux événements, se gardaient de toute hostilité envers le protectorat qui avait amélioré leurs conditions d'existence. Le rapport des forces était en faveur de la France et l'idée de l'indépendance du pays se perd dans le "vague d'un avenir aussi lointin que la venue du Messie pour les israélites "(1)

Même ceux, minoritaires, qui réclamaient la "Constitution", parmi l'élite juive tunisienne, à l'instar des partis nationalitaires, le faisaient uniquement pour obtenir un régime plus libéral et non pas jusqu'à la demande de l'indépendance du pays. C'était donc plus qu'une précaution oratoire, si l'élite juive sympathisante avec les destouriens, souligna que la Constitution se tiendrait dans le cadre du protectorat, et que " le but final serait la bonne intelligence aussi bien entre Tunisiens et Français qu'entre musulmans et israélites " ( 2 )

Ainsi, la véritable rencontre entre nationalistes musulmans et juifs tunisiens allait se faire sur le terrain de l'action syndicale et politique. Beaucoup parmi eux étaient souvent animés et dirigés par les militants du Parti communiste

2 - La fédération communiste tunisienne (F.C.T.) : Toutes les sources s'accordaient pour dire que ce sont les juifs qui avaient participé depuis le début des années 1920 à la mise en place de

la Section communiste de Tunisie ( 3 ) . Depuis la création de cette Fédération communiste

(1) Smaja G., "la question de la naturalisation : A mon ami Salah Ferhat du P.L.C." ,in Journal "Tunis Socialiste", Tunis le 16 décembre 1923, (2) Goldstein D., op cit , p.364 . (3) Kazdaghli H., "Trois participations tunisiennes dans les congrès mondiaux de l'internationale communiste " Revue An-Nahj (Damas) ,1989,n°25, p.122 ( En Arabe)

en 1921 jusqu'à la deuxième Guerre Mondiale, ce sont des juifs qui se sont succédés à la direction de ce parti de gauche Les tunisiens musulmans ( 'Ali Jerad et Mohamed Ennafa' ) n'ont atteint l'échelle de direction qu'après 1948. Le phénomène était notoire à un point qu'un membre de la direction du parti communiste français ( le P.C.F. ), qui séjourna en Tunisie pendant un mois, rédigea un rapport adressé au Comité exécutif de l'Internationale communiste en 1938 dans lequel il relève la question de la prédominance de l'élément juif au sein du parti communiste tunisien (le P.C.T. ) ( 1) .

Sur le plan strictement politique, l'intelligentsia juive sort de sa réserve accoutumée et entre dans le combat politique notamment au parti communiste, porteur de l'idéal d'une société sans classes, sans discrimination et sans antisémitisme. Peut-être, pourrait-on expliquer le succès de ce parti auprès d'un grand nombre de l'élite juive tunisienne par certaines similitudes entre le messianisme juif et le messianisme socialiste, de sorte que pour beaucoup de juifs croyants - révoltés par le "silence de Dieu" face au statut inférieur des juifs ainsi que les persécutions - le passage d'un univers à l'autre se faisait presque naturellement, suivant la logique d'une sensibilité et d'une disponibilité en quête d'un authentique objet d'investissement (2 ). D'ailleurs les jeunes militants juifs passaient allègrement du sionisme au communisme et inversement surtout après la Deuxième Guerre Mondiale ( 3 ).

Sur un autre plan , les juifs tunisiens , en militant au sein du P.C.T., ne sont persuadés de servir les intérêts de la Communauté dont ils font partie mais de la société toute entière. Aussi bien, adoptent-ils l'assimilation au peuple au milieu duquel ils vivent et prennent-ils part à son combat pour la transformation de la société. De ce fait, les juifs tunisiens se trouvèrent amenés à affirmer leur appartenance à "la nation tunisienne" et à vouloir lier leur destin à celui de leurs compatriotes musulmans (4) . Mais la "révolution prolétarienne" , qui réalisait la libération des peuples coloniaux en maintenant des liens avec le peuple de la Métropole , semblait préférable à "l'indépendance" pour laquelle luttaient les partis nationalitaires , dont rien n'assurait qu'elle serait favorable aux minorités ( 5 ) .

Cependant "la révolution prolétarienne" promise et tant attendue ne s'était pas réalisée ni dans la Métropole ni dans la Régence, alors que l'indépendance nationale, en 1956, était une vérité palpable . Cet événement a marqué un tournant dans le discours juif en Tunisie car il a entraîné un changement dans la condition des personnes. La Communauté juive en Tunisie se divise suivant leur allégeance à l'Etat nouveau : Juifs de nationalité tunisienne et Juifs étrangers

____________________________________________________________________

(1) Kazdaghli H., op cit, p.231. (2) Tapia C., op cit , p.211. (3) Tapia C., op cit, p.222. (4) Sebag P., op cit , P.207. (5) Sebag P., op cit, p.208 .

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