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L'effet dissuasif de la justice pénale internationale, cas du TPIR et de la CPI

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par Jean-Damascène NYANDWI
Université libre de Kigali - Licence en Droit 2007
  

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II.2.3 Le rôle controversé du Conseil de sécurité dans la justice internationale

Le Conseil de sécurité est un organe qui joue un rôle important dans l'adoption des normes internationales et qui intervient sous divers aspects dans l'action pénale internationale. Mais les prérogatives du Conseil de sécurité en matière de justice internationale suscitent beaucoup d'interrogations et les gens ne conçoivent pas de la même manière son intervention dans ce domaine.

Pour ce qui est du TPIR, sa légitimité a été niée par certaines personnes poursuivies. Elles disaient que ce Tribunal avait été créé par le Conseil de sécurité qui n'en avait pas la compétence.

Dans l'affaire Le Procureur c. Joseph Kanyabashi, l'accusé a allégué que la souveraineté des Etats, notamment celle du Rwanda, a été violée parce que le TPIR n'a pas été établi en vertu d'un Traité. L'accusé a également fait valoir que le Conseil de sécurité n'avait, en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, aucun pouvoir pour créer un organe judiciaire international.

La Chambre a rejeté ces arguments, expliquant notamment que la composition de l'ONU comporte nécessairement des limitations à la souveraineté d'un Etat membre, conformément à l'article 35 de la Charte des Nations Unies59(*). La Chambre de première instance a noté que, bien que le Conseil de sécurité soit lié par les dispositions du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, il disposait d'une grande marge d'appréciation lorsqu'il lui revenait de déterminer l'existence d'une menace pesant sur la paix et la sécurité internationale et que son autorité en la matière ne pouvait être contestée.

Nous sommes du même avis que celui émis par la Chambre à ce sujet qui a poursuivi en disant que la liste des actions figurant à l'article 41 de la Charte des Nations Unies n'est certes pas exhaustive mais elle indique quelques exemples des mesures que le Conseil de sécurité peut imposer aux Etats afin de mettre un terme à un conflit ou à une menace imminente à la paix et la sécurité internationale.

II.2.4 Le rôle des Etats dans la justice pénale internationale

Les Etats sont des intervenants incontournables qui apportent leurs concours en vue de faire avancer les activités judiciaires internationales. Le droit international reconnaît aux juridictions nationales des Etats le droit et le devoir de poursuivre et juger les personnes présumées avoir commis des crimes graves.

Dans cette optique, le Statut du TPIR dispose qu'une juridiction nationale peut connaître une affaire relevant de sa compétence, sauf que le TPIR se réserve le droit de demander le dessaisissement en sa faveur si les intérêts de la justice le justifient. Quant au Statut de la CPI, le principe de complémentarité veut que la CPI intervienne si un Etat se montre défaillant ou manifeste une mauvaise volonté à poursuivre des personnes présumées responsables de crimes graves. Dans tout les cas, c'est la compétence universelle qui est privilégiée.

II.2.4.1 La mise en oeuvre de la compétence universelle

Les mandats du TPIR et de la CPI ne peuvent être remplis que s'ils coopèrent avec les Etats. Il ne fait guère de doute que l'intérêt de ces deux instances est de laisser les Etats mettre en oeuvre leurs législations nationales en usant de la compétence universelle dans la poursuite des crimes graves.60(*)

Généralement, la compétence d'une juridiction d'un Etat à l'égard d'un crime est soumise aux principes de territorialité et de personnalité, ce qui signifie qu'elle ne peut s'exercer que dans les circonstances suivantes : si le crime a été commis sur le territoire de cet Etat ou bien si le criminel ou la victime sont ses ressortissants.

Toutefois, une exception a été faite pour les crimes les plus graves. Cette exception existe dans plusieurs instruments internationaux. Certains de ces textes recommandent aux Etats d'adopter des mesures législatives pour sanctionner les personnes responsables de ces violations. Les quatre Conventions de Genève stipulent que « chaque Partie contractante aura l'obligation de rechercher les personnes présumées avoir commis, ou d'avoir ordonné de commettre, l'une ou l'autre de ces infractions graves, et elle devra les déférer devant ses propres tribunaux, quelle que soit leur nationalité. Elle pourra aussi, si elle le préfère, et selon les conditions prévues par sa propre législation, les remettre pour jugement à une autre Partie contractante, pour autant que cette partie contractante ait retenu contre lesdites personnes des charges suffisantes »61(*).

Mario BETTATI qualifie cette possibilité accordée aux Etats par les textes internationaux de « procédure d'ingérence judiciaire universelle »62(*), procédure par laquelle un Etat a le droit de s'immiscer dans les affaires judiciaires d'un autre.

Marc HENZELIN estime que « le principe de l'universalité en droit pénal permet à un Etat de poursuivre et de juger l'auteur d'une infraction qui n'a aucun lien de rattachement avec l'Etat en question »63(*) et c'est la définition même de ce principe.

Le Protocole additionnel I du 8 juin 1977 est revenu sur cette disposition en stipulant que « les Hautes Parties contractantes s'accordent l'entraide judiciaire la plus large possible dans toute procédure relative aux infractions graves aux Conventions et au présent Protocole »64(*). Il en résulte que les Etats se sont vus imposer deux types d'obligations. D'une part, ils sont tenus de respecter et de faire respecter les dispositions du DIH en toutes circonstances. Cette obligation s'applique tant aux conflits internationaux qu'aux conflits internes. Le principe de la compétence universelle est ainsi posée sans ambiguïté.65(*) D'autre part, ils doivent poursuivre et punir les auteurs des crimes graves.

Or, très peu d'Etats sont dotés de législations à compétence universelle nécessaires pour connaître des crimes de droit international : l'exemple typique est celui de la Norvège qui n'a pas pu juger Michel BAGARAGAZA présumé avoir commis le crime de génocide au Rwanda en 1994, pour la simple raison que ce crime ne figure pas dans les lois de cet Etat66(*). La même lacune a fait que le Sénégal ne juge pas l'ancien président tchadien Hissen HABRE pour les crimes qu'il a commis au Tchad. En novembre 2005, la Chambre d'appel du Sénégal a déclaré que le Sénégal n'était pas compétent pour le poursuivre67(*).

Certains autres Etats dont les juridictions sont universellement compétentes, pourtant signataires de la Résolution adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies en 1973, intitulé « Principe de la coopération internationale en ce qui concerne le dépistage, l'arrestation, l'extradition et le châtiment des individus responsables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité »,68(*) ne s'intéressent pas à la poursuite et à la punition des auteurs des crimes graves.

La mise en oeuvre de la résolution susmentionnée est un moyen efficace de rendre la justice internationale beaucoup plus dissuasive car les criminels n'auront pas d'endroit où se cacher.

En outre, nous estimons que les Etats sur les territoires desquels se trouvent des personnes recherchées et dont les juridictions jouissent d'une compétence universelle en cas de violations graves du DIH devraient être obligés, sous peine de sanctions, de respecter leurs engagements conventionnels.

Il incombe donc aux Etats de prendre les mesures législatives nécessaires pour transposer dans leurs codes pénaux les instruments du DIH. Ces derniers doivent adopter des dispositions permettant de réprimer les infractions et établissant la procédure à suivre.

La mise en adéquation de la législation interne avec les dispositions du DIH est donc une condition sine qua non pour que justice soit rendue69(*). Ce serait une illustration parfaite de la mondialisation de la justice qui offre une arme efficace pour combattre l'impunité à l'avenir, et même actuellement à une époque où tant de violations du droit humanitaire sont commises mais échappent au filet de la justice internationale, parce que, d'une part, les évènements qui suscitent ces crimes échappent à la compétence des tribunaux ad hoc et que, d'autre part la CPI n'a pas de compétence rétroactive70(*).

* 59 TPIR, le Procureur c. Joseph KANYABASHI, Affaire n° TPIR-96-15-t, 18 juin 1997, décision sur l'exception d'incompétence ( Décision Kanyabashi ) Par. 13-14

* 60Article Premier du Statut de la CPI et article 11 bis du Statut du TPIR.

* 61 Chap. IX, article 49, alinéa 2 de la Convention I de Genève ; Chap. VIII, article 50 alinéa 2 de la Convention II de Genève ; article129 de la Convention III et article 146 de la Convention IV.

* 62 BETTATI M., Op. Cit., p.263

* 63 HENZELIN M., Op. Cit., p.1

* 64Article 88 du Protocole additionnel I.

* 65 Le discours du Greffier du TPIR à Abidjan, Op. cit.

* 66 Bagaragaza, première demande de transfert du TPIR, disponible sur : http://www.justicetribune.com/v2_print.php?page=v2_article&mode=print, consulté 10 mai 2007.

* 67 NAYGOTIMTI, B., Politique: Abdoulaye Wade, Le donneur de leçon coincé par l'affaire Habré, in Tchad et culture, n°243, janvier 2006.

* 68 CICR : Rapport de la Réunion d'experts : La répression nationale des violations du droit international humanitaire du 23 au 25 septembre 1997 ( Systèmes romano-germaniques), Genève,19997 ; p.40

* 69 Discours de M. Adama DIENG, Greffier du TPIR, à Abidjan, Op. cit.

* 70 L'Afrique et la mondialisation de la justice : le rôle du Tribunal pénal international pour le Rwanda et les enseignements qui se dégagent de son expérience : Discours prononcé par M. Adama DIENG, Sous-secrétaire général de L'ONU et Greffier du TPIR, lors de la conférence sur « La justice en Afrique », tenue du 30 juillet au 2 août 2001 à Wilton Park, Sussex en Grande Bretagne.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote