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Jean zay, ministre des beaux arts 1936-1939, étude de cas sur sa politique cinématographique

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par Lisa Saboulard
Université de Toulouse II Le Mirail - Master 1 Histoire Contemporaine 2010
  

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Historiographie

« L'Histoire culturelle, bruit de mille nouveautés, s'annonce comme l'histoire de demain, celle qui convient à un temps plus désenchanté et narcissique. C'est en elle que nos contemporains pensent trouver réponses satisfaisantes à leurs curiosités les plus fondamentales. Ils attendent d'elle une approche globale et lui demandent d'éclairer le sens même de notre temps, et de l'évolution qui y conduit ».

Antoine Prost11(*)

1) L'histoire culturelle et ses voisines

En réalité, l'histoire culturelle n'est pas vraiment une nouveauté même si elle ne peut revendiquer qu`un demi-siècle d`existence12(*). Fille de l'histoire des mentalités, elle a un parcours original accompagné d'une expansion au fil du temps. Jadis, des éléments de celle-ci étaient déjà présents dans l'anthropologie, dans la promotion des « mentalités » et de « l'outillage mental » à l'instar de Lucien Febvre, Robert Mandrou ou Philippe Ariès, dans l'histoire des idées et l'histoire de l'art.

C'est seulement dans les années 60 que l'histoire culturelle émerge comme le reflet d'un domaine de l'histoire qui sera par la suite un des plus innovateurs et un des plus fréquentés. Elle naît en reprenant, pour les transposer, les problématiques et les méthodologies qui ont assuré le succès de domaines voisins tel que l'histoire sociale ou l'histoire économique. Tout en se rapprochant de l'histoire sociale auquel elle se réfère tout au long de son avancée13(*), elle prend comme objet d'études l'ensemble des représentations collectives propres à une société, unité de référence de la recherche, tout du moins implicite.

Jean François Sirinelli a proposé naguère une définition de l'histoire culturelle14(*) dont le contemporanéiste et tout autre historien d'une autre période peuvent mettre à son profit :

« L'histoire culturelle est celle qui s'assigne l'étude des formes de représentations du monde au sein d'un groupe humain dont la nature peut varier -nationale ou régionale, sociale ou politique-, et qui en analyse la gestation, l'expression et la transmission.

Comment les groupes humains représentent-ils et se représentent-ils le monde qui les entoure ? Un monde figuré ou sublimé -par les arts plastiques ou la littérature-, mais aussi un monde codifié -les valeurs, la place du travail et du loisir, la relation à autrui-, contourné -le divertissement-, pensé -par les grandes constructions intellectuelles- expliqué -par la science- et partiellement maitrisé -par les techniques-, doté d'un sens -par les croyances et les systèmes religieux ou profanes, voire les mythes-, un monde légué, enfin, par les transmissions dues au milieu, à l'éducation et à l'instruction. »


En cela, l'histoire des représentations constitue le champ d'action de ce domaine riche en découvertes, dans lequel l'historien enrichit sa boite à outils. En effet, celui-ci emprunte à ses disciplines voisines différentes méthodes d`approches, ce champ de recherche étant déjà déblayé par la sociologie de l'art et l'ethnologie, accompagnées par des méthodes et observations beaucoup plus précises que celle des historiens. Par exemple, l'ethnologue aura appris à l'historien la nécessité d'interroger les objets de recherche, de les prendre au sérieux avec une importance donné à la parole, à la posture et au comportement communautaire.

Outre une histoire des mentalités -dont elle s'est séparée depuis quarante années environ- l'histoire culturelle se trouve aussi à la charnière de l'histoire intellectuelle. Cette dernière a su porter un regard attentif envers les intellectuels et a servi, de fait, de passerelle vers l'histoire culturelle à des historiens venus de l'histoire politique.

L'histoire culturelle a ainsi pour but de s'interroger, entre autres, sur l'articulation, dans la société, entre les pensées construites et des perceptions individuelles ou collectives qui relèvent de registres plus ou moins élaborés.

Ainsi définie, l'histoire culturelle s'installe en position névralgique, entre l'histoire politique, qu'elle peut irriguer, et l'histoire sociale qu'elle peut compléter.

Jean Zay, ses actions en tant que ministre des beaux arts et les mesures culturelles prises par le Front populaire, rentrent parfaitement dans ce cadre. Ce sujet est en effet à la croisée de l'histoire culturelle -plus particulièrement l'histoire des politiques et des institutions culturelles- et l'histoire politique.

Sur Jean Zay en lui-même, hormis la thèse de Marcel Ruby et trois mémoires sur des thématiques particulières -l'un sur son activité d'avocat et son ambition politique, les deux autres respectivement sur la réforme des droits d'auteur et son action envers les musées-15(*) peu de choses ont été écrites. Antoine Prost l'évoque comme modèle de la gauche du radicalisme,16(*) mais s'attache peu à ses initiatives culturelles.

Presque rien, hormis la thèse d'État imposante de Pascal Ory, la belle illusion, culture sous le Front populaire de 1935 à 1939. Même si cet ouvrage retrace les mesures prises par le secrétariat des Beaux Arts, il s'attarde peu sur la personne du ministre. Néanmoins, il représente la référence capitale sur mon sujet et domaine principal de ma recherche : l'histoire culturelle qui s'est intéressée de prés au mouvement du Front populaire.

2) Le Front populaire en tant qu'évènement ; de la mémoire militante à la mémoire savante

Cette période tient une place indéniable dans l'histoire française, mais sa définition reste incertaine17(*). Suivant les travaux et le thème d'étude en rapport avec celle-ci, plusieurs délimitations de l'évènement sont possibles et sa nature même peut être modifiée.

Ce n'est qu'à partir des années soixante seulement que les premiers travaux historiques voient le jour sur ce thème.

Dans tous les cas, le Front populaire est reconnu en tant qu'évènement fondamental, à savoir « ce qui rompt la répétition et la reproduction à l'identique des formes politiques et sociales et qui constitue un moment historique d'innovation et dans le cadre duquel le dispositif social est modifié ».

L'histoire du Front populaire, dans les années 1960, s'écrit dans un climat politique marqué par le rapprochement entre les familles politiques de gauche, leurs débats autour d'une alliance possible et la perspective d'une prochaine expérience gouvernementale.

L'implication militante des historiens alimente leurs réflexions et analyses de cet évènement, tel que Georges Lefranc18(*), ancien syndicaliste et enseignant. Différents colloques comme celui consacré au gouvernement Blum en 1966 contribuent également à revaloriser cette expérience gouvernementale décriée par tant de déçus de gauche, et par des politiques qui ont insisté sur l'échec économique de ce gouvernement. Durant les deux décennies suivantes, la question de la place des communistes dans le Front populaire fut essentielle en histoire politique, suivant la lecture officielle donnée par le PCF, en ces temps de guerre froide. Ce n'est qu'au cours de la décennie 1970 que les recherches d'histoire sociale, rangées au côté de l'histoire ouvrière, s'attachent à illustrer les pratiques culturelles au temps du Front populaire.

Un colloque tenu en 1986 permit de rassembler ces divers travaux sous une même problématique du mouvement social, faisant du Front populaire un moment essentiel de la modernisation de la société française.

Tout ceci est également accompagné par des recherches engagées sur les intellectuels, leurs implications et leurs attitudes faisant partie du champ de l'histoire sociale.

De fait, c'est un moment incontournable pour toutes les histoires -sociale, économique, politique et bien évidemment culturelle- mais étudié de manière fragmentée dans une logique de champs disciplinaires. Cette fragmentation s'est déployée suivant le sens de l'espace chronologique, plus ou moins long et suscitant un découpage historique au profit d'objets spécifiques.

Néanmoins, à l'occasion de l'année 2006, 70ème anniversaire de l'évènement, les publications font la part belle aux synthèses et aux mises en perspectives en s'appuyant sur des recherches déjà existantes19(*). Ainsi, l'intérêt d'un retour critique sur l'évènement historique à travers l'approche historique avec d'autres sciences humaines voit le jour petit à petit.

Entre histoires politique, sociale et culturelle, le thème de ma recherche, inclus dans ce moment particulier de l'histoire politique du XXe siècle, se trouve à la croisée des chemins de l'étude de l'histoire politique -institutions, prises de décisions, actions politiques-, de l'histoire sociale -contexte de la culture de masse qui se met en place, changement profond de la société française avec la mise en oeuvre d'une politique de loisirs- et de l'histoire culturelle -émergence d'une prise en compte dans la culture par l'État-.

* 11 Prost A., « sociale et culturelle indissociablement », in Rioux J-P, Sirinelli J-F, pour une histoire culturelle, Ed. du Seuil, Paris, 1997, p131 à 146.

* 12 Sous la direction Sirinelli J.F, et Sot M., « L'histoire culturelle », article tiré de L'histoire et le métier d'historien en France : 1945-1995, Ed. de la Maison des sciences de l'homme, Paris, 1997, p 339-349.

* 13 Prost A., sociale et culturelle indissociablement, in Rioux J-P, Sirinelli J-F, pour une histoire culturelle, Ed. du Seuil, Paris, 1997, p131 à 146.

* 14 Sirinelli J.F, histoire des droites en France, tome II culture, introduction, Gallimard, Paris, 1992.

* 15 Ruby M., la vie et l'oeuvre de Jean Zay, Librairie gedalge, Paris, 1969. p 303.Aguinalin P-O. maîtrise sous la direction d`Antoine Prost, « le barreau au service d'une ambition politique : maître Jean Zay à Orléans dans les années trente », Paris, 2000.Grisard E., sous la direction de Halperin J.-L., La société des gens de lettres sous le front populaire et le projet de loi du ministre Jean Zay sur le droit d'auteur et le contrat d'édition, Lyon, 1995. Peyrouzere F., sous la direction de Monnier G., Le musée en partage : État et musée sous le ministère Jean Zay (1936-1939), Paris, 1999.

* 16 Prost A. (dir.), Jean Zay et la gauche du radicalisme, Presses de Sciences Po, Paris, 2003.

* 17 Voir à ce sujet, Wolikow S., le front populaire : quel évènement ? Historiographie et actualité des recherches, in Vigna X., Le pain, la paix, la liberté : expériences et territoires du Front populaire, Editions sociales, Paris, 2006, p 11 à 24.

* 18 Lefranc G., Le Front populaire : 1934-1938, PUF, Paris, 1984.

* 19 Voir à ce sujet Margairaz M, et Tartakowsky D., L'avenir nous appartient ! une histoire du front populaire, éditions Larousse, Paris, 2006, Prost A., Autour du Front populaire aspects du mouvement social au XXe siècle, éditions du Seuil, Paris, 2006.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille