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Jean zay, ministre des beaux arts 1936-1939, étude de cas sur sa politique cinématographique

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par Lisa Saboulard
Université de Toulouse II Le Mirail - Master 1 Histoire Contemporaine 2010
  

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4) Le temps de l'institutionnalisation de l'histoire culturelle

Cette histoire des politiques culturelles connaît un tournant dans les années 90 avec la commande du ministère de la Culture à l'IHTP du CNRS d`un rapport sur « l'histoire culturelle de la France contemporaine », tout en créant une mission permanente des Archives nationales installée au sein même du ministère. Cet état des lieux est orchestré par Jean François Rioux qui souligne que « l'histoire des institutions et des politiques culturelles est bien lancée ».

Elle constitue une préoccupation publique autour de laquelle s'organisent des actions et s'alimente le débat politique, car touchant à de nombreux domaines tels que le social, l'éducation, la recherche, l'économie, les relations extérieures ou la diplomatie. Ses démarches et méthodes se situent à la croisée de l'histoire politique et de l'histoire culturelle. La réhabilitation de l'objet politique offre la possibilité d'interroger les politiques publiques sur un mode qui dépasse la seule histoire administrative afin de restituer l'image d'une action globale construite et cohérente représentée par une politique publique. Philippe Poirrier, afin d'établir des rivages sûrs sur ce terrain délicat évoque l'interdisciplinarité nécessaire à l'écriture de cette histoire via différentes approches : par politiques sectorielles, par référentiels ou pas missions25(*).

En 1989, Jean François Rioux et Jean François Sirinelli ouvrent un séminaire s'intitulant « politique et institutions culturelles de la France contemporaine » : l'institutionnalisation de cette histoire est née. Une appropriation historienne, savante et académique s'impose progressivement dont le moment clé reste la soutenance de la thèse d'État d'Ory, La belle illusion, culture et politique sous le signe du Front populaire, 1935-1938.

En 1990, dans un contexte de remise en cause de la politique culturelle mise en oeuvre par la gauche depuis une décennie, la notion culturelle autour de la période du Front populaire est mobilisée par un des principaux contempteurs de la politique culturelle, Marc Fumarolli.

Dans L'État culturel : une religion moderne, il dresse un portrait très positif du Front populaire : « dirigistes donc, mais avec tact et modération, Jean Zay et Léo Lagrange a eux deux formèrent pendant trois brèves années le plus complet des « ministères de la culture de la IIIe république »26(*). Jean Zay est présenté comme l'incarnation de la république athénienne. Cette apologie est pointée selon certains comme un « avantage polémique » permettant de diviser les adversaires politiques de l'auteur27(*). Mais il ignore l'historiographie disponible ou en fait un usage très sélectif et l'insuffisance de son argumentation est implicitement soulignée en 1994 dés l'introduction de la version publiée de la thèse d'État d'Ory. De fait, en ce qui concerne le thème de ma recherche, on peut se demander si le Front populaire n'inaugure pas la mise en place réelle d'une politique culturelle avant l'heure de la création du Ministère de la Culture.

Celui-ci montre d'avantage un mouvement, qui emporte en même temps l'impulsion du gouvernement et les nombreuses initiatives d'une partie de la société, qu'une politique culturelle tel que nous l'entendons depuis l'existence du ministère. Le Front populaire représente donc une prise en compte d'un secteur culturel, mais pas encore de « prise en charge » même si la création d'un ministère est réclamée de manière récurrente déjà à cette époque28(*). Une seule personnalité va assurer la liaison entre 1936 et 1959 et non des moindres : André Malraux.

Pour Philippe Urfalino, lorsqu'une autorité politique se saisit d'un problème ou d'un phénomène social et quand cet « intérêt politique » produit des mesures qui affectent des groupes sociaux. L'histoire et la sociologie de l'art étudiant les différents domaines d'interventions ont précédé l'histoire des politiques culturelles publiques. Ainsi, ces actions envers le monde culturel sont souvent antérieures aux structures administratives et politiques.

En ce sens, le Front populaire et ses actions envers le monde culturel relève de cette idée29(*).

Le politiste Vincent Dubois précise également que « plus que la mise en forme d'une « politique culturelle », cette conjoncture particulière permet une convergence sans précédent entre mouvements culturels [...], intellectuels mobilisés [...] et représentants des institutions d'État ; convergence qui, si elle produit objectivement des effets sociaux, est propice à la mythification rétrospective d'un gouvernement de gauche donnant la culture au peuple plus qu'elle ne conduit directement à la construction de la « politique culturelle comme catégorie de l'intervention publique.

Dans le cadre politique, on évoque également cette période, la personne de Jean Zay et l'action culturelle du Front populaire : Lang l'évoque comme l'homme qui «a inventé une véritable politique culturelle», Catherine Trautmann lors de sa prise de fonction en 1997 lui rend hommage au même titre que Malraux... L'écho de l'empreinte du Front populaire faiblit, mais ne disparaît pas : les mesures prises par Zay et Lagrange sont évoquées, mais il faut se rappeler qu'à l'époque le gouvernement se gardait bien de parler de « politique culturelle ».

En 2006, les ébauches respectives des programmes des partis socialistes et communistes pour les élections présidentielles consacrent quelques développements à la politique culturelle, sans jamais évoquer le précédent du Front populaire, et ceci malgré la conjoncture commémorative. Le Front populaire semble appartenir à l'Histoire.

La reconnaissance de l'histoire du temps présent rend désormais légitime un questionnement qui porte sur les dernières décennies du siècle dernier. Plusieurs facteurs externes confortent cet air du temps historiographique : la visibilité de la politique culturelle de la gauche au pouvoir et les sollicitations des pouvoirs publics et des institutions culturelles. Ainsi, l'expansion de l'histoire culturelle, de par son objet étudié, sa « jeunesse » se traduit par de multiples méthodes, empruntées à des domaines variés tels que l'ethnologie, la sociologie de l'art ou encore le droit.

De fait, l'essor de cette histoire reflète un décloisonnement essentiel entre les différentes sciences humaines et une pluridisciplinarité capitale pour l'étude de ce thème comme l`illustre la dernière partie de l`ouvrage de Philippe Poirrier : Pour une histoire culturelle30(*).

Ainsi, l'historien de demain pourra aisément distinguer dans cette configuration historiographique la montée en puissance des différentes formes d'histoire culturelle témoignant de la pluralité et de l'éclectisme qui caractérise en ce début du 21e siècle, l'école historienne française.

* 25 Voir à ce sujet l'article de Graziani S., « La politique culturelle comme objet de recherche », Quaderni, 2004, vol 54, pp 5-13.

* 26 Fumaroli M., L'État culturel : une religion moderne Librairie générale française, Paris, 1992, p 101.

* 27 Dubois V., Politiques culturelles et polémiques médiatiques, lectures croisées en guise d'introduction, article tiré de Politix, 1993, vol n°6, n° 24, p 5 à 19.

* 28 Voir l'introduction de La belle illusion, culture et politique sous le signe du Front Populaire, 1935-1938, éditions Plon, Paris, 1994.

* 29 Cf l'article de Philippe Urfalino, L'histoire de la politique culturelle, tiré de Une histoire culturelle de Rioux J-F et Sirinelli J-F.

* 30 Poirrier P., Les enjeux de l'histoire culturelle, Éd. du Seuil, Paris, 2004

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams