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Philosophie et religion chez Hegel

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par Cyrille Tenejou
Grand Seinaire Saint Augustin de Maroua - Fin de cycle de philosphie 2009
  

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CHAPITRE III

APPRECIATION DE LA PENSEE HEGELIENNE ET QUESTIONS RELIGIEUSES EN AFRIQUE NOIRE

« Peut-être la prétention de l'Afrique à être "incurablement religieuse" devra-t-elle être démystifiée : nos sociétés ne sont plus à l'abri de la sécularisation, de l'athéisme ou de l'indifférence religieuse ».

Jean-Marc ELA, Ma foi d'Africain, Paris, Karthala, 1985, p. 207.

Puisque la philosophie fait appel à l'esprit critique, nous avons voulu réserver la première partie de ce dernier chapitre à l'évaluation critique de la pensée religieuse de HEGEL. La deuxième et la troisième partie consisteront respectivement en l'examen de la question de l'existence de la religion chez le Négro-africain et en l'analyse du problème de l'athéisme en Afrique.

III.1. Evaluation critique de la pensée religieuse hégélienne

Commençons par reconnaître le mérite de HEGEL pour avoir contribué à l'établissement des rapports entre la philosophie et la religion. Cependant, l'ambiguïté de ses conceptions religieuses a suscité chez ses disciples des interprétations contradictoires. Aussi bien chez Bruno BAUER, représentant de la droite hégélienne, que chez les hégéliens de gauche, dont le plus célèbre est Karl MARX, on a observé une attitude hostile à la conscience religieuse qui les a conduits à l'athéisme. Tous ces auteurs -y compris HEGEL- pétris de l'idéalisme, semblent déprécier le donné de la révélation que ne le fait la philosophie réaliste.

III.1.1. La critique de la conscience religieuse

HEGEL a décrit la religion comme l'une des activités spirituelles supérieures de l'homme. Celui-ci exprime, à travers la religion, qu'il est raisonnable et libre. La philosophie doit s'efforcer de le ressaisir sous la forme de la pensée rationnelle. Chez notre auteur, cela n'implique aucun renoncement au religieux. Ses disciples n'étaient pas d'avis et sa philosophie les a plutôt conduits à se libérer de la religion.

Pour Bruno BAUER, HEGEL a développé une philosophie à l'intérieur de laquelle la théologie s'est sentie mieux à l'aise que dans son propre domaine. Il estime que HEGEL a ramené l'idée de la religion chrétienne au panthéisme et est, par là même, un athée, puisque l'idée de la religion n'est pour ce dernier qu'un produit de l'Esprit au même titre que l'art et la science. Fidèle à une certaine tradition idéaliste du protestantisme, BAUER soutient qu'il n'y a rien dans la religion qui ne soit produit par l'homme100(*). Nous pouvons faire un parallèle entre ce raisonnement et ce qu'Alexandre KOJEVE écrit à propos de HEGEL : « Il [HEGEL] construit dans cette histoire des diverses Théologies successives. Il montre donc que ces Théologies sont des oeuvres humaines et que, par conséquent, l'Etre révélé par elles ne peut être que l'être humain »101(*). BAUER s'efforcera aussi de montrer le caractère aliénant de la religion, car Dieu est la perte totale de l'homme.

Dans l'Introduction à la critique de la philosophie du Droit chez Hegel, Karl MARX s'attaque aussi à la conception hégélienne de la religion. Contrairement à BAUER, plus modéré dans sa critique de la religion, MARX - et avec lui les autres hégéliens de gauche - veut radicalement s'opposer à HEGEL. A la suite de FEUERBACH, il s'attaque tout d'abord à la question de la divinité. Il montre comment l'homme se dépouille de ses propres qualités pour les attribuer à un être appelé Dieu. Pour lui, les preuves de l'existence de Dieu ne révèlent rien d'autre que le sujet pensant. Par conséquent, on doit se dispenser de poser la question de l'existence de Dieu parce que ce dernier n'existe pas. C'est pourquoi il affirme que

« les preuves de l'existence de Dieu ne sont rien d'autre que des preuves, des explications logiques de l'existence de la conscience de soi réelle de l'homme. Par exemple, la preuve ontologique. Quel est l'être qui est immédiatement présent quand on le pense ? C'est la conscience de soi. En ce sens, toutes les preuves de l'existence de Dieu sont des preuves de son inexistence, des réfutations de toutes les représentations d'un Dieu »102(*).

Chez MARX, l'idée-mère de sa critique de la religion se formule comme suit : « l'homme est pour l'homme l'être suprême » et Dieu n'est l'être générique de l'homme.

Selon MARX et Friedrich ENGELS, bien que BAUER ait discrédité la pensée hégélienne, il identifie cependant la conscience religieuse avec la conscience du peuple. De ce fait, il ne s'élève pas contre cet ordre social, mais contre les idées dominantes103(*). Pour cela, ils proposent une explication matérialiste de la source de la foi et de la religion des masses. C'est ainsi que MARX déclare : « La misère religieuse est d'une part l'expression de la misère réelle, et d'autre part, la protestation contre la misère réelle. La religion est le soupir de la créature accablée, le coeur d'un monde sans coeur comme elle est l'esprit d'un temps sans esprit. Elle est l'opium du peuple »104(*).Comme l'opium, la religion plonge l'homme dans un monde onirique et dans l'illusion, elle le maintient dans des paradis artificiels. Elle donne au monde une explication qui n'en n'est pas une, non scientifique et qui tient du mythe. Elle maintient l'homme en référence à un Dieu qui n'est que la projection de ce que l'homme est fondamentalement.

Le marxisme voit dans la religion un simple désir de dépendance. Voilà pourquoi il se fixe pour objectif de libérer l'homme de la conscience religieuse mystifiée, pour le rendre à lui-même, le réconcilier avec les autres et avec la nature.

Il s'ensuit qu'au nom d'un certain humanisme, la critique marxiste de la religion professe une anthropologie athée qui repose sur une double vision de l'homme. Cette double vision est celle de l'ensemble des rapports qui existent entre l'homme et la nature et entre l'homme et la société105(*).

Par ailleurs, on peut remarquer que MARX ne traite de la religion que d'une manière occasionnelle. Sa critique de la religion ne s'est faite que dans le but d'exalter sa doctrine matérialiste. On peut alors comprendre pourquoi il pense que « la critique de la religion est la condition préliminaire de toute critique »106(*). A propos de la religion, MARX semble davantage viser les comportements que l'on attribue couramment à la conscience religieuse de l'époque plutôt que l'attitude spirituelle de foi dans laquelle les croyants se reconnaissent eux-mêmes. Son intention se dévoile comme une volonté d'extirper définitivement toute racine du phénomène religieux dans la conscience de ses contemporains107(*).

Pour Roger VERNEAUX, la critique marxiste contre HEGEL ne peut justifier sa prétention à l'objectivité. A cet effet, nous ne devons pas croire que « le matérialisme dialectique ait éliminé toute trace de panthéisme puisqu'il confère à la matière les mêmes caractères et les mêmes pouvoirs que Hegel attribuait à son Absolu. Mais comme on n'a pas coutume d'appeler Dieu la matière, Marx fait profession d'athéisme »108(*).

* 100 Cf. TRAN VAN TOAN, «  La critique de la religion par Marx », in Revue philosophique de Louvain, N° 97 (1970), p. 58.

* 101 A. KOJEVE, Introduction à la lecture de Hegel, cité par TRAN VAN TROAN, loc. cit., p. 65.

* 102 K. MARX, Manuscrits de 1844, cité par TRAN VAN TROAN, loc. cit., p. 62.

* 103 Cf. K. MARX & F. ENGELS, Sur la religion, Textes traduits et annotés par G. BADIA et alii, Paris, Editions Sociales, 1968, p. 59.

* 104 K. MARX, Introduction à la critique de la philosophie du droit chez Hegel, cité par R. COFFY, Dieu des athées : Marx, Sartre, Camus, Paris, Chronique sociale de France, Coll. « Le fond du problème », 1963, pp. 41-42.

* 105 Cf. V. TONYE BAKOT, « Le défi de la religion », in G. MENDO ZE (sous la dir.), 20 défis pour le millénaire. Bâtir un nouvel humanisme, Paris, François-Xavier de Guibert, 2002, p. 313.

* 106 K. MARX & F. ENGELS, op. cit., p. 41.

* 107 Cf. V. TONYE BAKOT, loc. cit., p. 313.

* 108 R. VERNEAUX, Histoire de la philosophie contemporaine, Paris, Beauchesne, 1960, p. 14.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote