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Le defi de l'appropriation des textes de la decentralisation par les elus locaux : cas de la commune rurale de Kampti

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par Abdoul Karim DIABY
ENAM - Administrateur civil 2015
  

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Section I. Entraves à l'appropriation de la décentralisation par les

élus locaux

Les entraves qui minent la compréhension de la décentralisation par les élus locaux et leur implication dans ce processus peuvent être scindées en deux. Il s'agit des problèmes rencontrés aux cours de la tenue des sessions et ceux rencontrés par les élus dans l'exécution de leur mission quotidienne.

Paragraphe I. Les difficultés liées à la tenue des sessions du
Conseil municipal

Ces difficultés sont nombreuses et diversifiées. Elles se ramènent globalement à la question de l'analphabétisme des élus ; l'inadéquation des textes avec les réalités socioculturelles de la commune ; la participation des conseillers aux débats au cours des sessions ; la brièveté de la durée des sessions et la pléthore de conseillers qui constitue le conseil municipal (l'un des plus gros effectifs de conseillers du pays).

Le problème de l'analphabétisme des élus locaux se pose avec acuité. En effet, le profil actuel du conseil municipal de Kampti est composé de 89 % d'analphabètes. Cette réalité constitue une entrave à l'accessibilité des élus locaux à tout document écrits afférent à la tenue des sessions du Conseil municipal (projets de délibérations, de budget, etc.) En effet, si les conseillers ne peuvent pas lire les projets de délibération pour en prendre connaissance avant leur adoption, il va de soi que leurs homologues lettrés auront une longueur d'avance sur eux. Ils se contentent de la

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traduction approximative qui est faite par un des leurs qui n'a reçu aucune formation dans ce sens. La tâche de traduction est pourtant ardue quand on sait que les expressions utilisées sont pour la plupart méconnues de la culture et des habitudes de ces élus. Ainsi, les conseillers analphabètes ont du mal à accorder un regard critique solide afin de mener une analyse profonde des questions abordées. Dès lors, ces « élites » (conseillers lettrés) pourraient manipuler à vau l'eau ces élus illettrés quand vient le moment de délibérer. En outre, les conseillers illettrés ne peuvent pas prendre de notes au cours de la session du conseil municipal. Cet état de fait entame la constitution de mémoire et la fidélité des comptes rendus aux populations. Tous ces problèmes sus-énumérés se posent également lors des différentes formations dispensées à leur intention.

Pour ce qui concerne la question de l'adéquation des textes, elle est en fait le corollaire du problème de l'analphabétisme des conseillers. Le CGCT semble avoir été destiné uniquement à des élus lettrés. Comme illustration, les termes de son article 157 sont interpellateurs : « Les convocations du conseil municipal doivent être adressées par écrit, par affichage et par communiqué aux membres du conseil. A toute convocation, doivent être joints tous les documents afférents à la tenue de la session ». Ces dispositions, bien qu'intellectuellement séduisante, ne sauraient être mises en oeuvre de façon pratique, quand on a affaire à des conseillers qui, dans leur majorité, ne savent ni lire ni écrire. Si les conseillers peuvent se faire aider par des proches pour prendre connaissance de la date des sessions mentionnée sur les convocations, cela n'est pas évident pour la trentaine de pages d'écrits plus ou moins technique (le budget notamment) que devraient constituer les documents joints aux différentes convocations. Voilà pourquoi les conseillers viennent participer, sans préparation préalable, aux sessions du conseil. Il est évident que dans ces conditions, on ne peut s'attendre à ce qu'ils puissent s'imprégner sur-le-champ de la substance des différents documents à la suite d'une seule lecture faite par l'exécutif municipal, le bureau du conseil et le personnel technique qui l'accompagne dans cette oeuvre. Par ailleurs, l'application de la sanction des « absences non motivées » conformément aux termes de l'article 239 du CGCT se trouve également paralysée dans la mesure où on ne saurait exiger des écrits (pour excuser des absences) à un illettré.

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Quant à la problématique de la participation des conseillers aux débats qui ont lieu avant toute délibération, il est à noter qu'ils sont très souvent l'apanage des « intellectuels » et des francophones. C'est ce qui expliquerait en partie le manque de motivation du reste des conseillers non alphabétisés, se traduisant par une forte mobilité (des va-et-vient dans la salle), voire des désertions de la salle par une grande partie des conseillers lors des sessions.

Relativement à la question de la durée des sessions, le code général des collectivités territoriales prévoit qu'elle peut aller jusqu'à cinq (05) jours pour les sessions ordinaires et trois (03) jours pour les sessions extraordinaires. Dans la commune de Kampti, quand bien même les conseillers ne reçoivent pas de document au moment des convocations pour les sessions comme le prévoit l'article 157 du CGCT, ces sessions se tiennent en une seule journée. En effet, si les conseillers n'ont pas reçu les documents avant les sessions comme cela est mentionné dans le CGCT, logiquement un temps d'explication plus important devrait leur être accordé afin qu'ils puissent prendre véritablement connaissance du contenu avant toute délibération. Malheureusement les sessions du conseil se tiennent presque à la sauvette en seulement vingt-quatre (24) heures et parfois moins à cause des problèmes des ressources financières pour la prise en charge des indemnités.

S'agissant du nombre de conseillers municipaux, le Code électoral prévoit que le nombre de conseillers est fonction du nombre de village, et/ou de secteur, soit deux (02) conseillers par village et par secteur. Ce qui fait que la commune de Kampti se retrouve avec deux cent trente-quatre (234) conseillers soit la deuxième commune qui compte le plus grand nombre de conseillers après celle de Ouagadougou qui en compte deux cent cinquante-cinq (255). Pour une commune qui compte moins de cinquante mille (50 000) habitants, cela pose nécessairement un problème financier en l'occurrence la prise en charge de ces élus quand on sait que les recettes propres de la commune sont dérisoires et n'ont jamais atteint trente (30) millions. Le budget de 2013 qui est l'un des plus satisfaisants avait une réalisation de recettes propres de vingt-six millions neuf cent cinquante mille huit cent dix-huit (26 950 818) francs

CFA sur une prévision de trente-deux millions deux cent trente-neuf mille (32 239 000) francs CFA soit un taux d'exécution de 83,60 %22. A raison de cinq mille (5 000) francs CFA par jour, un seul jour de session par trimestre coûte près de cinq millions (5 000 000) francs CFA à la commune. Au-delà de ce «gaspillage« financier, la pléthore de conseiller pose le problème de la qualité des hommes qui y sont. Si l'idée qui a sous-tendu cette répartition de conseillers a été guidée par le souci de la représentativité de tous les groupes sociaux donc de démocratie, il n'en demeure pas moins qu'elle entraîne des effets pervers assez importants. Enfin, ce nombre élevé de conseillers ne facilite pas une tenue sereine des sessions et ne permet pas des débats d'un niveau acceptable.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus