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Problématique de l'égalité des droits des enfants légitime et naturel dans le nouveau régime des successions du Bénin

( Télécharger le fichier original )
par Julien HOUNKPE
Université d'Abomey Calavi (Bénin) - Maitrise en Droit 2006
  

Disponible en mode multipage

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REPUBLIQUE DU BENIN

--------------

MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

---------------

UNIVERSITE D'ABOMEY CALAVI

(U.A.C.)

Faculté de Droit et de Sciences Politiques

(FA.D.E.S.P.)

MEMOIRE DE MAITRISE ES SCIENCES JURIDIQUES

OPTION : DROIT DES AFFAIRES ET CARRIERES JUDICIAIRES

Thème :

PROBLEMATIQUE DE

L'EGALITE DES DROITS DES ENFANTS LEGITIME ET NATUREL DANS LE NOUVEAU REGIME

DES SUCCESSIONS AU BENIN

Présenté et soutenu par: Sous la direction de :

Julien Comlan HOUNKPE M. Hospice AHOUANDJINOU DJOSSINOU

Professeur de droit privé

des universités nationales

Vice Doyen de la FADESP

Année académique 2005-2006

LA FACULTE

N'ENTEND DONNER

AUCUNE

APPROBATION NI

IMPROBATION

AUX OPINIONS

EMISES DANS LES

MEMOIRES.

CES OPINIONS

DOIVENT ETRE

CONSIDEREES COMME PROPRES A LEURS AUTEURS

Je dédie ce mémoire à mon épouse

Augustine

ainsi qu'à mes enfants Orphé et Peggy.

A Dieu tout puissant, et à tous ceux à travers

qui, il manifeste son ineffable amour.

A mon directeur, M. Hospice AHOUANDJINOU-DJOSSINOU,

à l'endroit de qui, même les mots sont insuffisants

pour exprimer ma profonde gratitude.

A Maître Jacques TCHIBOZO du Barreau de Bordeaux,

en qui j'ai trouvé une véritable personne ressource.

A Mme Geneviève BOKO NADJO de Wildaf Bénin

merci pour votre disponibilité permanente.

A tous mes professeurs de la faculté de droit

et à tous ceux qui m'ont soutenu à

un moment ou à un autre de mon travail,

gr atitude sans fin.

REPERTOIRE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

Al. : alinéa

Art. : article

C.CIV. : Code Civil

C.P.F. : Code des Personnes et de la Famille

D. : Dalloz

Ed. : Edition

Gaz. Pal. : Gazette du Palais

L.G.D.J. : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

N.E.A. : Nouvelles Editions Africaines

P.U.F. : Presses Universitaires de France

R.B.S.J.A. : Revue Béninoise des Sciences Juridiques et

Administratives

T. : Tome

Vol. : Volume

PLAN SOMMAIRE

Introduction Générale 7

Première partie: L'applicabilité de l'égalité des droits successoraux

des enfants légitime et naturel 13

Chapitre I : L'organisation de la succession des enfants légitime et naturel 15

Section I : L'établissement du lien de filiation 15

Section II : Les effets successoraux des filiations légitime et naturelle 32

Chapitre II : Les difficultés d'application de l'égalité des droits successoraux

des enfants légitime et naturel 44

Section I : Les problèmes juridiques 44

Section II : Les pesanteurs psycho sociologiques 48

Deuxième partie: Les perspectives pour la primauté du droit dans

l'application effective du nouveau régime juridique

béninois des successions 52

Chapitre I : Les enseignements tirés du droit comparé 54

Section I : Cas du droit français 54

Section II: Les apports de certains systèmes juridiques africains 59

Chapitre II : Nos suggestions

Section I : Pour la prévalence d'une justice sociale en matière

successorale 65

Section II : La nécessité de révision de certaines dispositions du CPF 71

Conclusion Générale 75

Annexes 78

Bibliographie 80

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE

La loi 2002-07 portant Code des Personnes et de la Famille du Bénin promulgué le 24 Août 2004, à travers ses dispositions, vient en correction à beaucoup de points de la réglementation civile jusque-là applicable dans notre pays1(*). Aussi bien des innovations que des réaménagements de textes ont été faits à divers niveaux.

Des divers points du droit des personnes et de la famille où le code a fait des apports intéressants, celui qui a surtout suscité notre intérêt est l'égalité des droits successoraux de l'enfant légitime et de l'enfant naturel.

Par définition2(*), un enfant est légitime, lorsque les parents de l'enfant sont unis par des liens de mariage ; ou naturel, lorsque ces derniers sont libres de tout engagement l'un envers l'autre, c'est-à-dire non mariés. Les enfants naturels sont de trois (3) types, à savoir : l'enfant naturel simple, l'enfant naturel adultérin et l'enfant naturel incestueux.

L'enfant naturel simple est celui dont aucun des parents ne se trouvait dans des liens de mariage lors de sa conception. L'enfant adultérin, quant à lui, est celui conçu alors que l'un de ses parents au moins se trouvait dans des liens de mariage. L'enfant incestueux, enfin, est celui dont les parents ne peuvent pas se marier pour cause de parenté ou d'alliance et qui a donc été conçu lors de rapports incestueux.

Pendant longtemps, et dans le but de garantir la protection et la sauvegarde de la famille légitime, la naissance des enfants naturels n'était pas souhaitée. Dans le même objectif, le législateur a donc imposé à ces enfants, une situation juridique assez défavorable qui se résume en une forte inégalité de traitement entre enfants naturel et légitime sur la base de l'origine de leur filiation3(*).

Ces mesures n'ont pourtant pas découragé les actes d'adultère et d'inceste qui sont à l'origine de l'existence de ces enfants. C'est donc une situation qu'il est de plus en plus difficile d'ignorer ou même de combattre en continuant à défavoriser des enfants qui, en réalité, ne sont pas responsables de l'origine de leur filiation.

La condition faite aux enfants naturels est contraire à la Constitution du 11 décembre 1990, en ce qu'elle prône l'égalité de tous devant la loi, et à tous les instruments juridiques internationaux ratifiés par le Bénin.

Par ailleurs, les discriminations sont moins accusées en droit traditionnel, car tous les enfants sont traités de la même manière4(*). Quelques précisions s'imposent cependant, quoiqu'en pratique, elles ne soient pas vraiment perceptibles2.

Il devenait donc impératif que cet état de choses soit corrigé et que d'autres mesures soient prises dans le but de combattre les discriminations. C'est dans cette perspective que les rédacteurs du CPF se sont préoccupés de la question des enfants naturels et, à l'exemple du législateur français de 1972, ont voulu réaliser l'égalité des filiations. Ce désir d'équité s'est exprimé par des innovations assez audacieuses tant dans l'organisation de leur statut que la dévolution de leur droit successoral.

Les normes qui ont donc fixé jusqu'ici le statut juridique des enfants naturels ont été réétudiées et complétées pour essayer de prendre en compte les divers objectifs visés.

En effet, la volonté des rédacteurs du code béninois de corriger l'inégalité de traitement qui existait entre les enfants naturel et légitime s'exprime clairement dans les termes d'un certain nombre d'articles. Il s'agit, par exemple, de l'article 620 du CPF qui énonce que : « les enfants, quelle que soit l'origine de leur filiation, jouissent des mêmes droits successoraux ... » Qu'ils soient donc légitimes ou naturels, tous les enfants sont appelés à la succession de leurs parents, père et mère, et ont droit à la même part : plus aucune distinction n'est faite par la loi.

En comparaison du traitement fait aux enfants naturels par le législateur de 1958, le code des personnes et de la famille a réalisé un véritable exploit, une véritable innovation en introduisant le principe de l'égalité des droits entre tous les enfants.

Les innovations apportées sont à louer ; on pourrait même en être satisfait, si dans la réalité, il ne se posait malheureusement pas des problèmes d'applicabilité de cette égalité des droits successoraux des enfants légitime et naturel. Comme l'a si bien souligné le professeur Noël GBAGUIDI `' ... ces dispositions seront du moins dans un avenir proche d'application difficile''5(*).

En substance, non seulement le CPF n'a pas supprimé toutes les discriminations dont sont victimes les enfants nés hors mariage notamment les incestueux6(*), mais aussi on a pu, à la réflexion, se rendre à l'évidence que le principe d'égalité consacré par le code n'est pas facile d'application.

Certes, le but visé par le législateur est l'égalité de tous les enfants, mais le moyen utilisé ne permet pas d'atteindre complètement les objectifs de la réforme.

En définitive, notre intérêt pour LA PROBLEMATIQUE DE L'EGALITE DES DROITS DES ENFANTS LEGITIME ET NATUREL DANS LE NOUVEAU REGIME DES SUCCESSIONS AU BENIN tient en réalité à voir les différents problèmes qui se posent par rapport à l'applicabilité des droits successoraux des enfants légitime et naturel.

A l'analyse, le sujet choisi soulève un certain nombre de questions dont notamment :

- Quels sont les droits successoraux prévus par le CPF en faveur de l'enfant légitime et de l'enfant naturel ?

- Quel impact réel aura le Code sur la condition des enfants légitime et naturel ?

- Le CPF affirme-t-il effectivement une égalité totale des enfants naturel et légitime ? Ne peut-on pas dire que cette égalité est une fiction ?

- L'enfant naturel, qu'il soit simple, adultérin ou incestueux, est-il réellement en mesure aujourd'hui, de se sentir dans les mêmes droits que l'enfant légitime ?

- Les caractéristiques de la filiation naturelle ne vont-ils pas restreindre les effets de l'égalité des filiations sur le plan successoral ?

- Quels sont les problèmes d'ordre juridique susceptibles de se poser à l'application de ce contenu du code ?

- Des pesanteurs psycho sociologiques ne pourraient-ils pas rendre difficile l'attribution de droits égaux aux enfants légitime et naturel ?

- Quelles solutions apporter aux éventuels problèmes susceptibles de se poser ?

L'objectif de ce travail de recherche est de faire le point de la situation actuelle à l'orée de la réforme et de se pencher sur celle à venir, afin de faire des prévisions pour son application effective. A cet effet, les difficultés de tous ordres (juridiques, sociologiques, psychologiques...) qui pourraient entraver l'attribution de droits successoraux aux enfants naturels seront mises en exergue et les solutions pour y remédier seront recherchées.

D'abord nous allons faire une analyse du régime de l'égalité des droits successoraux des enfants légitime et naturel, tel que prévu par le CPF, et montrer les difficultés d'application de ce régime.

Ensuite, nous allons comparer les dispositions du nouveau Code des Personnes concernant les droits successoraux des enfants d'une part avec le Code Civil en France, et d'autre part avec les Codes de certains pays Africains. Cette comparaison nous permettra de connaître la position du Bénin par rapport à ces pays dans la garantie de droits successoraux aux enfants. Sommes-nous en marge de l'évolution, sommes-nous en retard ou sur quels points sommes-nous innovateurs par rapport aux autres Etats ?

Enfin, en tenant compte des leçons tirées des études faites sur les législations étrangères, nous allons proposer des solutions aux éventuels problèmes rencontrés dans l'attribution des droits successoraux aux enfants. Un accent particulier sera mis sur le statut de l'enfant naturel qui, dans le droit moderne a toujours été marginalisé. Le nouveau Code favorise la promotion de ses droits et le souci scrupuleux de cette promotion doit guider dans la mise en oeuvre du Code. Ainsi, des suggestions seront faites pour que les droits successoraux qui lui sont conférés aillent au-delà de la simple reconnaissance de ceux-ci dans les instruments juridiques mais deviennent réalité concrète dans une société comme la nôtre où la discrimination de l'enfant naturel est encore de mise.

Les données recueillies de nos investigations serviront à orienter le développement de ce thème en suivant les deux axes ci-après :

Première Partie : L'applicabilité de l'égalité des droits successoraux des enfants légitime et naturel.

Deuxième Partie : Les perspectives pour la primauté du droit dans l'application effective du nouveau régime juridique béninois des successions.

PREMIERE PARTIE :

L'APPLICABILITE DE L'EGALITE DES DROITS SUCCESSORAUX DES ENFANTS LEGITIME

ET NATUREL

La volonté des rédacteurs du code des personnes et de la famille de normaliser la situation des enfants naturels est ma nifeste dans les dispositions fixant l'établissement de leur filiation.

Ainsi, leur condition juridique s'est vue rapprochée de celle de l'enfant légitime non seulement, du point de vue de l'établissement du lien de filiation, mais aussi au niveau des effets successoraux des filiations.

Ce principe d'égalité des droits successoraux entre enfants légitime et naturel affirmé par le législateur béninois ne manquera pas, ainsi que nous aurons à le constater, de soulever des difficultés d'application à divers niveaux.

L'établissement du lien de filiation et les effets successoraux des filiations légitime et naturelle seront étudiés dans le premier chapitre L'organisation de la succession des enfants naturel et légitime. Dans le second chapitre Les difficultés d'application de l'égalité des droits successoraux des enfants légitime et naturel, nous aurons l'étude des problèmes juridiques et des pesanteurs psycho sociologiques liés à la mise en oeuvre de ces droits.

CHAPITRE I :

L'ORGANISATION DE LA SUCCESSION

DES ENFANTS NATUREL ET LEGITIME

La précarité du statut des enfants naturels et la recherche d'une justice sociale entre tous les enfants ont amené les rédacteurs du code des personnes et de la famille à corriger les inégalités qui ont longtemps prévalu entre ces différentes catégories d'enfants en ce qui concerne les modes d'établissement de leur filiation.

Dans ce sens, il a été procédé à un rapprochement qui s'exprime en substance par la liberté pour les enfants naturels d'établir désormais leur filiation (section 1).

La conséquence directe de cette situation se ressent au niveau des effets positifs sur le plan successoral. Désormais donc, les enfants naturels peuvent, à l'instar des enfants légitimes, aller à la succession de leurs parents, et réciproquement (section 2).

SECTION I : L'ETABLISSEMENT DU LIEN DE FILIATION

La filiation est le lien juridique qui unit un enfant à ses parents. C'est donc la filiation qui crée un lien de famille. Les règles qui régissent la situation de l'enfant dans la famille ont généralement trait à la filiation.

Le nouveau code des personnes et de la famille, par ses innovations, consacre un élargissement du domaine de l'établissement légal de la filiation. Toute filiation peut être établie. Ainsi, la filiation naturelle sera assimilée à la filiation légitime (Paragraphe 1).

Cette loi s'est cependant montrée restrictive à l'égard des enfants issus des rapports incestueux auxquels elle fait toujours un traitement discriminatoire par rapport aux autres enfants. Ainsi, le principe de l'assimilation connaît dans ses conséquences des restrictions (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 - Rapprochement des filiations légitime et naturelle

Les auteurs du CPF ont aboli toutes les règles qui prohibaient l'établissement de la filiation naturelle et abandonné le principe de la hiérarchie des filiations. En effet, l'établissement de la filiation naturelle s'est longtemps heurté à la primauté reconnue à la filiation légitime, les conditions posées étant en général restrictives. Le nouveau code a réalisé la suppression des barrières ayant contribué à maintenir l'enfant naturel en situation défavorable surtout en matière de filiation.

Ainsi, leur condition juridique s'est vue rapprochée de celle de l'enfant légitime7(*), non seulement, du point de vue de l'établissement de leur filiation, mais aussi en matière de contestation et de désaveu de leur filiation.

A- Liberté d'établissement de la filiation naturelle

Le code des personnes et de la famille a opéré des réformes intéressantes quant à la situation des enfants naturels dont la filiation peut être établie, soit par la reconnaissance volontaire, soit par la possession d'état ou encore par l'effet d'un jugement.

Ces différents modes ont été prévus aux alinéas 1 et 2 de l'article 319 du code.

1) La reconnaissance volontaire : premier mode d'établissement de la filiation naturelle

Aux termes de l'article 319, alinéa 1 du code des personnes et de la famille, « la filiation naturelle est légalement établie par reconnaissance »

La reconnaissance est l'acte par lequel un père ou une mère manifeste sa volonté de voir s'établir le lien de filiation qu'il / qu'elle a avec un enfant, et s'engage ainsi à assumer la totalité des charges et devoirs résultant de ce lien8(*).

Cet acte présente des caractères précis et doit, pour être valide au regard de la loi, respecter certaines formes. Ce n'est qu'à cette condition qu'il peut produire les effets prévus par la loi.

a) Caractères de la reconnaissance

Dans la conception qui fait de la reconnaissance un simple mode de preuve, la filiation résulte du lien du sang, et la reconnaissance n'a pour effet que de la constater, non de la créer.

De cette conception de la reconnaissance-aveu découlent des caractères suivant : la reconnaissance est un acte individuel ; un acte déclaratif ; un acte irrévocable.

Le caractère individuel de la reconnaissance s'explique par le simple fait que l'aveu n'engage que son auteur : on n'avoue pas pour autrui. La reconnaissance, parce qu'elle est un aveu, est individuelle8(*). L'indication du nom de l'autre parent dans la reconnaissance n'aura d'effet à l'égard de la mère que si elle-même a avoué sa maternité. Ainsi, le seul effet que produit la reconnaissance faite par le père sur la preuve de la maternité est de donner à un aveu de la mère, dépourvu de toute forme, la valeur d'une reconnaissance effectuée dans les formes régulières, d'authentifier tout aveu de la mère.

Le second trait de la reconnaissance envisagée comme mode de preuve est son caractère déclaratif. En principe, l'acte juridique crée une situation nouvelle ; il est constitutif de droit. Au contraire, l'aveu constate une situation préexistante : il est déclaratif.

La reconnaissance, parce qu'elle est un aveu, un mode de preuve, constate un lien de filiation existant dès le jour de la conception9(*). Il en résulte deux conséquences :

- Dans un premier temps, la reconnaissance rétroagit : la filiation de l'enfant est établie rétroactivement depuis sa conception.

- Dans un second temps, la capacité exigée pour accomplir des actes juridiques n'est pas nécessaire pour reconnaître valablement un enfant. Chacun est capable de donner valablement un aveu. Il suffit simplement d'en comprendre la portée.

La reconnaissance comme mode de preuve du lien de filiation est aussi un acte irrévocable parce qu'il est un aveu. En effet, l'aveu est irrévocable : après avoir avoué, on ne peut pas revenir sur son aveu.

Il n'y a à ce niveau qu'une exception : lorsque la reconnaissance est contenue dans un testament notarié. Il est vrai que la reconnaissance notariée est valable, aussi bien lorsqu'elle est incluse dans un testament que quand elle est faite par un acte séparé.

Mais le testament étant un acte essentiellement révocable, la reconnaissance tombera avec lui en cas de révocation. Il en est ainsi parce que le testament n'est pas exactement révocable. Il est plutôt un projet qui ne prend force définitive qu'au décès du de cujus. Contenue dans un testament, la reconnaissance n'est, elle aussi, qu'un projet jusqu'au décès.

En somme, l'aveu est irrévocable en ce sens qu'on ne peut pas revenir sur un aveu sincère et exact ; mais il est toujours possible de démontrer que l'aveu est mensonger ou qu'il est le résultat d'une erreur, d'un dol ou d'une violence. En pa reil cas, on peut faire tomber par une action en justice la reconnaissance : l'action en contestation de reconnaissance.

Certains autres caractères de la reconnaissance découlent de la seconde conception, celle en vertu de laquelle la reconnaissance est un acte de volonté créateur de la filiation et à défaut duquel ce lien n'existe pas.

· Envisagée comme telle, la reconnaissance est d'abord un acte volontaire. Cela ne veut pas dire que le père ou la mère doit avoir la volonté de créer un lien de filiation. Il suffit qu'il ait la volonté d'avouer sa paternité ou sa maternité10(*). A ce point de vue, la reconnaissance demeure un aveu.

En réalité, la reconnaissance est un acte volontaire en ce sens qu'elle est un acte discrétionnaire. Le parent qui ne reconnaît pas son enfant naturel ne commet donc en principe aucune faute.

Cependant, on ne peut plus voir dans la reconnaissance un acte véritablement discrétionnaire, en ce sens que l'enfant a désormais la possibilité d'intenter une action en recherche de paternité et de maternité naturelles.

Etant donné que la reconnaissance exige un acte de volonté, elle ne saurait donc en principe être valablement faite par un dément ou un enfant.

Elle ne saurait non plus avoir été obtenue par violence ou dol, ni être le résultat d'une erreur.

· En tant qu'acte de volonté créateur du lien de filiation, la reconnaissance est aussi un acte unilatéral.

A l'exemple des actes juridiques résultant de la volonté d'une seule personne (le testament par exemple), la reconnaissance crée la filiation par la seule volonté de son auteur. La reconnaissance d'un enfant conçu est donc valable. Il suffit que l'enfant naisse viable11(*). Cette conséquence qui a été discutée, présente un intérêt pratique considérable.

En effet, le père peut décéder pendant la grossesse, c'est-à-dire avant la naissance ; la mère peut, elle aussi, mourir en couches. La reconnaissance de l'enfant conçu est donc une assurance contre de telles situations12(*).

· Enfin, la reconnaiss ance vue comme acte créateur de la filiation naturelle a un effet erga omnes, un effet absolu. Le législateur la déclare opposable à tous. Les rédacteurs du code des personnes et de la famille l'ont prévu à l'article 327.

Par ailleurs, la reconnaissance volontaire d'enfant naturel est un acte solennel. Elle doit, à peine de nullité, être faite par acte authentique. Tout aveu, même indirecte, de paternité ou de maternité contenu dans un acte authentique constitue donc une reconnaissance. L'acte authentique peut émaner d'un officier de l'état civil, d'un notaire (ce qui permet les reconnaissance secrètes) ou d'un tribunal.

b) Les effets de la reconnaissance

La reconnaissance volontaire faite dans les formes légales fait preuve du lien de filiation. En effet, lorsqu'il s'agit de déterminer ses effets, c'est le caractère d'aveu qui l'emporte : en matière d'effets, la reconnaissance ne crée pas le lien de filiation, elle le prouve. L'enfant est donc censé être rétroactivement l'enfant de son auteur depuis le jour de sa naissance (ou même de sa conception).

La reconnaissance prouve la paternité ou la maternité de son auteur. Elle ne prouve cependant pas l'identité de l'enfant qu'elle vise avec celui qui s'en prévaut, même si ce dernier était nanti, par exemple, de la grosse de l'acte notarié contenant la reconnaissance. Même dans ce dernier cas en effet, il se pourrait que le véritable intéressé muni de cette grosse, l'ait remise à une autre personne qui s'en servirait à présent pour s'attribuer un état usurpé. L'enfant devra donc, par mesure de prudence, établir son identité.

Il faut signaler cependant que cette preuve est loin d'être inattaquable. La preuve contraire est toujours permise.

En définitive, la reconnaissance n'établit la filiation naturelle que jusqu'à preuve contraire. Pour apporter cette preuve contraire, on intente une contestation de reconnaissance.

L'effet de la reconnaissance est absolu : elle est opposable non seulement à son auteur et à ses héritiers, mais aux tiers. Il en résulte l'impossibilité de reconnaître un enfant qui a été antérieurement l'objet d'une reconnaissance émanant d'un tiers, sans avoir préalablement contesté cette reconnaissance.

Etablie par une reconnaissance valable, la filiation produit tous les effets qui sont attachés par la loi à ce lien juridique, notamment pour l'enfant un droit alimentaire et un droit successoral à dater, évidemment, de la naissance et même de la conception de l'enfant. Elle rétroagit donc.

2) La possession d'état et l'établissement judiciaire de la filiation naturelle

En dehors de la reconnaissance volontaire de leurs parents, les enfants naturels, pour faire constater leur lien de filiation, peuvent recourir à la possession d'état ou à défaut, déclencher la procédure de reconnaissance forcée devant la justice.

a) La possession d'état comme moyen suffisant d'établissement de la filiation naturelle

La possession d'état comme mode de preuve de la filiation naturelle constitue une innovation du CPF. Ce fait est consacré par l'article 285 du code dont les termes de l'alinéa 2 énoncent qu' : « A défaut d'acte, la possession constante de l'état d'enfant peut suffire à établir la filiation ». D'une façon générale, le code vise donc tout enfant sans distinction.

La possession d'état est l'apparence d'un état13(*). Il s'agit du fait pour une personne de jouir des avantages de l'état qu'elle allègue et de supporter les charges qu'il comporte, ainsi que le fait de passer aux yeux des tiers pour être titulaire de cet état.

L'article 286 du code donne de la possession d'état la définition suivante : « La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation et de parenté entre un enfant et la famille à laquelle il dit appartenir ».

Selon les termes de l'article 288 du code, pour établir la filiation, la possession d'état est établie en prouvant constamment :

- que l'enfant a toujours porté le nom du père ou de la mère dont il prétend descendre ;

- que le père ou la mère l'a traité comme son enfant et a pourvu en cette qualité à son éducation, à son entretien et à son établissement ;

- que l'enfant le considère comme son père ou sa mère ;

- qu'il a été reconnu comme tel, par la société ;

- qu'il a été traité comme tel par la fa mille.

Puisant sa force principale dans l'aveu prolongé des parents, la possession d'état joue même un rôle sensiblement supérieur à celui de l'acte de naissance.

En effet, alors que l'acte de naissance ne prouve que l'accouchement, la possession d'état, elle, prouve à la fois l'accouchement et l'identité : le traitement reçu par l'enfant, le nom qu'il porte, l'opinion de la famille et de l'entourage constituent en effet de sérieuses garanties.

Il est salutaire que l'article 319 al 2 du CPF consacre l'autonomie de la possession d'état. Ainsi, la possession d'état pourra remplacer valablement l'acte de naissance et valoir titre pour la filiation naturelle.

b) La reconnaissance forcée de la filiation naturelle

En l'absence d'une reconnaissance volontaire, l'enfant naturel qui veut se prévaloir de sa filiation doit, en principe, nécessairement s'adresser à la justice pour faire constater sa filiation maternelle et/ou paternelle.

Pendant longtemps, la loi n'a admis que l'action en recherche de maternité seule. Mais, depuis la loi du 16 novembre 1912 en France, l'action en recherche de paternité longtemps interdite est autorisée, bien que soumise à des conditions plus strictes.

Le code est resté fidèle à ces dispositions déjà adoptées par le code civil de 1958.

b-1 La recherche de la maternité naturelle

Le CPF a étendu aux enfants adultérins et incestueux la possibilité de rechercher leur filiation maternelle, contrairement au code civil de 1958, qui en son article 342, le leur interdisait.

Le Code des personnes et de la f amille a non seulement veillé à la suppression des termes « naturels simple, adultérin, incestueux » pour parler uniformément d'enfant naturel, mais a aussi prévu, en son article 332, que « la recherche de maternité est admise. (...) », sans aucune précision par rapport à quelque catégorie d'enfant que ce soit. C'est là une initiative louable de la part des rédacteurs de ce code.

Contrairement à l'action en recherche de paternité naturelle, l'action en recherche de maternité naturelle ne porte ni cas d'ouverture, ni délai de prescription, ni fins de non-recevoir propres.

Les seules restrictions sérieuses concernent les modes de preuves. Quant au régime de l'action, il ne fait l'objet d'aucune disposition particulière de la loi.

L'article 332 du CPF dispose en ses alinéas 2 et 3 que : « l'enfant qui exerce l'action sera tenu de prouver qu'il est celui dont la mère prétendue a accouché.

A défaut, la preuve de la filiation pourra être faite par témoins, s'il en existe, soit par les données acquises de la science, soit par des présomptions ou indices graves, soit par un commencement de preuve par écrit ».

Ainsi énoncé, le texte détermine d'abord les faits à prouver, avant d'indiquer les moyens de preuve qui s'y appliquent.

S'agissant des faits à prouver, d'après l'alinéa 2 de l'article 333, « l'enfant qui exerce l'action sera tenu de prouver qu'il est celui dont la mère prétendue a accouché (...) ».

Il en résulte que les faits à prouver sont au nombre de deux : l'accouchement de la femme dont l'enfant prétend être issu et l'identité de cet enfant dont cette femme a effectivement accouchée. Il s'agit donc là des deux éléments constitutifs de la maternité au point de vue juridique.

Quant aux modes de preuve de ces deux faits, ils varient suivant le fait à prouver. Cependant, la loi, pour faciliter cette preuve, a fait de la possession d'état un moyen de preuve commun à l'accouchement et à l'identité14(*).

Les alinéas 2 et 3 de l'article 332 déjà évoqué font respectivement allusion à « (...) la possession d'état d'enfant naturel », à la preuve par témoins, aux données acquises de la science, aux présomptions ou indices graves et aux commencements de preuve par écrit.

De façon concrète, on distingue alors selon que l'enfant se prévaut d'une possession d'état ou non.

Lorsque l'action est fondée sur la possession d'état, et selon les termes de l'article 333, alinéa 2 du code béninois des personnes et de la famille, l'enfant qui recherche sa mère sera admis à faire la preuve de l'accouchement et de l'identité par la possession d'état d'enfant naturel à l'égard de la prétendue mère.

La possession d'état ne sera ici qu'un moyen de faire déclarer judiciairement la maternité : elle n'aura d'effets qu'à travers le jugement, et non de façon indépendante. La possession d'état ici n'est pas utilisée comme moyen autonome d'établissement de la filiation naturelle.

En l'absence d'une possession d'état d'enfant naturel, la filiation naturelle sera un peu plus difficile à établir. Ainsi, quand l'action est exercée à défaut de possession d'état, le CPF prévoit quatre autres moyens de faire la preuve judiciaire de la maternité naturelle.

A cet effet, l'alinéa 3 de l'article 332 du code est formel :

- de la preuve par témoins, s'il en existe.

- des données acquises de la science.

- des présomptions ou indices graves.

- des commencements de preuve par écrit.

La preuve de la maternité naturelle, ainsi établie, ne pourra produire ses pleins et entiers effets qu'à la suite d'une procédure judicaire ou action en recherche de maternité naturelle.

b-2 L'établissement judiciaire de la paternité naturelle

A l'exemple de la loi française et d'autres législations, comme celle ivoirienne, le code béninois des personnes et de la famille admet l'action en recherche de paternité naturelle en prenant soin de l'entourer de nombreuses précautions de fond et de procédure.

Pour donc que la paternité naturelle puisse être judiciairement déclarée, il faut selon la loi, que soit établi l'un des cinq cas d'ouverture de l'action tels qu'ils ont été énumérés par l'article 333 du CPF, et que la demande ne se heurte à aucune des fins de non-recevoir indiqués à l'article 334 du même code.

L'article 333 du CPF, à l'exemple de l'article 340 ancien du code civil français, retient cinq hypothèses dans lesquelles la paternité est considérée comme assez vraisemblable pour être utilement recherchée.

- dans le cas d'enlèvement ou de viol, lorsque l'époque des faits se rapportera à celle de la conception.

- dans le cas de séduction, abus d'autorité, promesse de mariage ou fiançailles.

- dans le cas où il existe des lettres ou quelque autre écrit émanant du père prétendu, propre à établir la paternité d'une manière ou d'une autre.

- d ans le cas où le père prétendu et la mère ont vécu en état de concubinage notoire pendant la période légale de conception.

- dans le cas où le père prétendu a pourvu ou p a rticipé à l'entretien, à l'éducation et à l'établissement de l'enfant en qualité de père.

Le fondement de ces cas d'ouverture n'est pas uniforme.

Les deux premiers, à savoir, l'enlèvement ou le viol à l'époque de la conception et la séduction (abus d'autorité, promesse de mariage ou fiançailles), évoquent l'idée de faute imputable au prétendu père.

Les troisième et cinquième cas - existence de lettre ou écrits privés émanant du père prétendu, et participation à l'entretien et à l'éducation de l'enfant - correspondent à un aveu exprès ou tacite du père présumé.

Enfin le quatrième cas - concubinage notoire du père prétendu et de la mère, pendant la période légale de la conception - rappelle la présomption de paternité légitime de l'article 300 du CPF.

Quant aux modes de preuve et à l'action proprement dite, le CPF en traite en ses articles 333, 334 et 335.

Que le législateur ait pris soin d'entourer la recherche judiciaire de la paternité de quelques sérieuses précautions, c'est simplement dans le souci de réduire au maximum les déclarations arbitraires.

D'un point de vue général, tout enfant naturel devant établir le fait dont l'existence autorise la recherche de la paternité peut le faire en en rapportant la preuve par tous moyens. Seule, la preuve de l'aveu non équivoque de paternité demeure soumise à des restrictions.

S'agissant particulièrement de la preuve des manoeuvres dolosives, lorsque le demandeur invoque le cas de séduction dolosive, il est tenu de les prouver. La preuve de la séduction a toujours été libre15(*). Le demandeur peut, par tous les moyens, établir que celui qu'il prétend être le père a eu des relations avec la mère.

L'écrit doit faire pleine preuve de l'existence de l'aveu. C'est en effet ce qui ressort des termes de la loi qui exige un écrit « propre à établir la paternité d'une manière non équivoque ».

Le père prétendu, défendeur à la recherche de paternité naturelle peut combattre, lui aussi, par tous les moyens de preuves proposées par l'enfant.

Le CPF permet au défendeur d'opposer à l'action deux fins de non recevoir ;  il s'agit de :

- l'impossibilité physique de cohabitation par suite d'éloignement ou d'impuissance accidentelle par exemple.

- résultat négatif apporté par les données acquises de la science.

L'action est exercée par l'enfant ou par sa mère pendant sa minorité contre le prétendu père ou ses héritier devant le Tribunal de Première Instance.

B- Rapprochement en matière de contestation et de désaveu

Le désir des rédacteurs du code des personnes et de la famille de corriger la situation des enfants nés hors mariage en les assimilant aux enfants légitimes s'exprime aussi par le rapprochement des deux types de filiations en matière de contestation et de désaveu.

Ce rapprochement se rapporte non seulement aux cas de contestation possibles de la filiation naturelle et aux cas d'ouverture du désaveu de l'enfant légitime, mais également aux procédés de preuve admissibles.

a) Contestation de la filiation naturelle

Cette contestation se rapporte à la reconnaissance volontaire qui établit la filiation naturelle et qui peut être attaquée par tout intéressé qui en fait la preuve contraire.

Contester une reconnaissance revient à démontrer que l'enfant n'est pas de la personne qui l'a reconnu. La contestation est donc possible chaque fois que l'enfant n'est pas né de la femme qui l'a reconnu, ou n'a pas été conçu par le père prétendu, auteur de la reconnaissance.

Il est rare que les reconnaissances émanant des mères fassent l'objet de contestation. En effet, il est plutôt exceptionnel qu'une femme s'attribue un enfant naturel qui n'est pas le sien. Il lui serait difficile d'établir un faux accouchement.

Par contre, un homme peut accepter de reconnaître naturel qui n'est pas le sien. C'est souvent le cas d'hommes qui épousent une femme ayant eu un enfant naturel d'un autre que d'eux et qui manifestent le désir de reconnaître comme le leur cet enfant, afin de le légitimer par leur mariage avec la mère.

On est alors en présence de reconnaissances volontairement inexactes, mensongères. Parfois, par contre, la reconnaissance faite par le père est involontairement inexacte, erronée16(*). Ce qui est certain, le CPF consacre une réforme certaine et heureuse en matière d'établissement de la filiation naturelle.

La contestation est possible aussi bien contre les reconnaissances mensongères que contre les reconnaissances erronées.

Le législateur n'a établi aucune restriction quant aux modes de preuves dont on peut se servir pour contester une reconnaissance. Il admet comme preuve suffisante aussi bien les témoignages que les présomptions pour démontrer que la personne qui a reconnu l'enfant n'en est pas le père ou la mère.

Par ailleurs, dans certains cas comme ceux d'une preuve négative, l'examen des sangs pourra être opposé. Parfois même, il suffit de procéder à une simple comparaison entre l'âge de l'enfant et celui de l'auteur de la reconnaissance pour établir la fausseté de cette reconnaissance.

Le législateur a prévu une action judiciaire, l'action en contestation, pour établir l'inexactitude d'un lien de filiation affirmé par une reconnaissance. L'action en contestation de la reconnaissance obéit, comme « toutes les actions en établissement ou en contestation de filiation » aux dispositions générales fixées à l'article 289 du CPF.

L'action en nullité de reconnaissance tend à établir que l'une des conditions exigées par la loi pour la validité de la reconnaissance n'était pas remplie et non l'exactitude ou non de celle-ci. En effet, lorsque par exemple le mari attaque la reconnaissance qu'un tiers a faite d'un enfant né de sa femme, il intente, non une action en contestation de reconnaissance, mais une action en nullité de reconnaissance.

b) Désaveu de la filiation légitime

La présomption pater is est peut être combattue par le mari : c'est le désaveu de pa ternité, et par toute personne intéressée : c'est la contestation de légitimité.

Aujourd'hui, le code permet à la femme mariée, même en l'absence de désaveu, de remettre en cause la paternité de son mari. C'est la contestation de paternité. La contestation de légitimité est une action par laquelle une personne cherche à priver l'enfant de la légitimité dont il bénéficie du fait de son acte de naissance ou de sa possession d'état : le requérant prétend démontrer que l'enfant a été conçu dans des conditions telles que la présomption pater is est ne lui est pas applicable.

La contestation de légitimité peut être fondée, soit sur l'absence de mariage entre les parents, soit sur la naissance avant le mariage, enfin sur la conception postérieure à la dissolution du mariage. En ce qui concerne le désaveu de paternité, il peut se faire par preuve de non paternité ou par simple dénégation. Le désaveu de paternité sous-entend une action réservée au mari (et exceptionnellement à ses héritiers).

Le désaveu par preuve de non paternité a été prévu à l'article 305 du code :

« Le ma ri peut désavouer l'enfant conçu pendant le mariage :

- S'il prouve que pendant le temps qui a couru depuis le trois centième (300e) jour jusqu'au cent quatre vingtième (180e) jour avant la naissance de cet enfant, il était dans l'impossibilité physique de cohabiter avec sa femme ;

- Si, selon les données acquises de la science, il est établi qu'il ne peut être son père ;

- Par tous moyens, si la femme lui a dissimulé la grossesse ou la naissance de l'enfant dans des conditions de nature à le faire douter gravement de sa paternité ».

Quant au désaveu par simple dénégation, le code le réglemente en son article 301. Il est possible dans les cas où l'enfant a été conçu, soit avant le mariage, soit pendant que les époux avaient légalement un domicile séparé, l'obligation de cohabitation étant l'un des fondement de la présomption pater is est

Aux termes de l'article 300 du code des personnes et de la famille, la preuve des faits expliquant l'action en désaveu du mari est libre. En effet, « (...) celui-ci pourra désavouer l'enfant en justice s'il justifie de faits propres à démontrer qu'il ne peut en être le père ».

Ces faits-là sont justement les mêmes qui fondent les divers cas où le mari peut mettre en doute sa paternité vis-à-vis de l'enfant de son épouse.

Le législateur a consacré jusque-là une sorte de monopole de l'action en désaveu par le mari. Aujourd'hui, le code des personnes et de la famille permet à la femme mariée de contester la paternité de son mari vis-à-vis de l'enfant né d'elle. Ce qui est certain, dans un cas comme dans l'autre, la paternité du mari est mise en cause.

L'action en désaveu de paternité ne peut, en principe, être exercée que par le mari. Il est en effet seul juge de sa paternité et des graves intérêts familiaux mis en jeu par le désaveu. Les héritiers du mari, ne pourront exercer l'action en désaveu que si celui-ci avait déjà engagé l'action de son vivant ; à moins qu'il n'y ait eu désistement ou péremption d'instance. Le législateur béninois est clair à ce propos à travers les articles 293 et 308 du CPF.

Quant à celui contre qui elle peut être exercée, il s'agit en principe de l'enfant qu'elle tend à rejeter de la famille légitime. Le CPF s'y prononce en son article 309 alinéa 1. Lorsque l'enfant est encore mineur, il doit être représenté par un tuteur ad hoc ou par sa mère. Lorsque, par contre, l'enfant est majeur, l'action en désaveu est dirigée contre lui-même.

Par ailleurs, le Code ouvre en son article 310, alinéa 2, une possibilité nouvelle et importante de contestation de paternité du mari en créant une action en contestation de la paternité à la requête de la mère. Ainsi la loi permet aux vrais parents de l'enfant de l'accueillir dans le foyer légitime constitué par le remariage de la mère. Cette action ne tend donc pas à l'établissement d'une filiation illégitime, mais à substituer une filiation légitime, conforme à la vérité, à une légitimité fictive.

L'action en contestation de paternité dirigée contre le mari ou ses héritiers doit, aux termes de l'article 310 alinéa 3 du CPF, à peine d'irrecevabilité , être jointe à une demande de légitimation. Elle doit être introduite par la mère et son nouveau conjoint dans les six (6) mois de leur mariage et avant que l'enfant n'ait atteint l'âge de sept (7) ans. Le principe même de la contestation de paternité par la mère a cependant été vivement discuté.

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Paragraphe 2 - Discrimination de l'enfant naturel

Le CPF consacre une réforme certaine et heureuse en matière d'établissement de la filiation naturelle.

Cette loi s'est cependant montrée restrictive à l'égard des enfants naturels issus des rapports incestueux auxquels elle fait toujours un traitement discriminatoire par rapport aux autres enfants. L'enfant incestueux, qui nuit peut-être moins à la famille que le législateur ne veut bien le reconnaître, s'en sort ainsi avec « une contrefaçon de filiation ».

La discrimination de la loi vis-à-vis de l'enfant incestueux ressort des réserves émises ici et là par le législateur.

Aux termes de l'article 319, alinéa 3, il leur est en effet interdit d'établir leur filiation à l'égard de leurs deux parents à la fois. Cette interdiction ne manquera pas de causer à ces enfants, de graves préjudices.

A- L'interdiction de la double filiation pour l'enfant incestueux

Le code prohibe en son article 319, alinéa 3 l'établissement de la double filiation des enfants incestueux. En effet, il y est stipulé ce qui suit : « (...) s'il existe entre les père et mère de l'enfant naturel un des empêchements à maria ge prévus par le présent code pour cause de parenté, la filiation étant déjà établie à l'égard de l'un, il est interdit de l'établir à l'égard de l'autre ».

La loi a pu en décider ainsi, étant donné le principe de divisibilité de la filiation naturelle qui s'établit en effet séparément à l'égard des père et mère naturels.

Cette interdiction faite à cette catégorie d'enfant n'a pourtant pas manqué de nous surprendre ; surprise d'autant plus désagréable que les rédacteurs du code béninois des personnes et de la famille ont émis la volonté de corriger le sort défavorable jusqu'ici imposé aux enfants nés hors mariage.

Le triste constat qui ressort pourtant de l'analyse de l'article 319 du code des personnes et de la famille est que les enfants issus de rapports incestueux n'ont pas vu leur sort vraiment amélioré.

La liberté dorénavant reconnue aux enfants naturels d'établir leur filiation n'est que partielle à leur égard. Autrement dit, on pourrait parler d'une liberté partielle d'établissement de la filiation incestueuse.

C'est là une disposition d'autant plus humiliante que tout être humain naît forcément de deux parents, c'est-à-dire d'un père et d'une mère. Sur la base de ces observations, une disposition prohibant la double filiation pour une catégorie d'enfants nous semble pénible à comprendre.

Est-ce toujours par souci de décourager les auteurs d'actes incestueux que les rédacteurs de ce code ont retenu une telle règle à l'encontre d'enfants qui sont pourtant loin d'être responsables des conditions de leur conception ?

S'agissant des empêchements à mariage pour cause de parenté et d'alliance, nous nous sommes posé la question de savoir ce que la loi signifiait par les termes « parenté », « alliance » et jusqu'à quel degré de parenté ou d'alliance elle interdit l'union entre sujets de droit.

C'est l'article 378 qui éclaire vraiment sur le contenu du terme « parenté ». Il stipule en effet que :« La parenté résulte de la filiation et d'elle seule (...) ». A la question de savoir jusqu'à quel degré la loi prohibe l'union pour cause de parenté, l'article 380, alinéa 2 répond en précisant qu'en principe, la parenté ne produit aucun effet au-delà du sixième degré ; sauf donc les exceptions déterminées par la loi elle-même.

En ce qui concerne l'alliance, elle naît, d'après l'article 383 du code, du mariage et ne peut résulter que de lui dans les conditions déterminées par le même article.

En tout état de cause, la loi parle d'inceste lorsque intervient une union entre deux personnes pour lesquelles existe un empêchement à mariage pour cause de parenté ou d'alliance, et condamne tout enfant issu de telles relations à ne se prévaloir que d'une filiation unilinéaire, une demie filiation.

Nous reconnaissons volontiers que l'inceste est un fait répréhensible, et il est tout à fait légitime que le législateur manifeste le souci de le combattre. Mais cette nécessité ne nous semble pas justifier le sort imposé à l'enfant incestueux quant à l'établissement de sa filiation.

Par ailleurs, il y a un autre point de la loi qui nous semble un peu paradoxal : il s'agit de la question de la légitimité putative abordée à l'article 153 du code.

Dans l'hypothèse d'un mariage survenu au mépris ou non de la loi entre deux personnes pour lesquelles existe un empêchement à mariage pour cause de parenté ou d'alliance, le législateur a prévu le système de légitimité putative pour protéger tout enfant qui serait issu d'une telle union.

Ainsi, étant donné que la loi facilite la légitimité putative en supprimant la condition de bonne foi de l'un au moins de deux pa rents, l'enfant incestueux peut conserver la qualité d'enfant légitime qui lui avait été conférée par le mariage de ses parents ; et ceci, même si tous deux étaient de mauvaise foi.

Or, compte tenu du caractère indivisible de la filiation légitime, l'enfant incestueux dont les parents n'ignoraient pas l'empêchement à mariage résultant de leur lien de parenté, bénéficie quand même de la double filiation. C'est là une initiative positive, compte tenu du souci de protection des enfants.

Mais, pourquoi le législateur conçoit-il facilement la légitimité putative et refuse en même temps de permettre l'établissement de la double filiation de l'enfant incestueux ?16(*).

Les raisons morales et autres qui expliquent l'interdiction de la double filiation de l'enfant incestueux à l'égard de ses parents non mariés ne devraient-ils pas être aussi valables pour prohiber la légitimité putative ?

De la même façon, si l'intérêt de l'enfant ou de la famille recommande la légitimité putative, les mêmes raisons devraient recommander l'établissement de la filiation complète de l'enfant, les circonstances de leur naissance étant les mêmes.

C'est en cela que réside le paradoxe, pour nous : A l'étape actuelle, ne serait-ce pas une façon d'infliger la plus lourde peine au moins coupable ?

Ce qui est certain, cette interdiction faite aux enfants incestueux de se prévaloir d'une filiation complète comme tout être humain né d'un père et d'une mère entraîne pour eux un sort qui nous interpelle tous.

B- Une interdiction qui n'arrange pas le sort de l'enfant incestueux

Ce traitement discriminatoire que fait la loi à l'égard de l'enfant incestueux constitue un désagrément qui fragilise sa situation sociale et qu'il urge de corriger.

Les enfants, d'une façon générale, constituent une couche extrêmement vulnérable. C'est pour cette raison qu'ils ont droit à la protection sociale, à la sécurité, quelle que soit l'origine de leur filiation, et donc quand même ils seraient issus de relations adultérines ou incestueuses.

Mais les rédacteurs du code ne semblent pas s'en être vraiment préoccupés, surtout en ce qui concerne l'enfant incestueux qui se retrouve dans une situation sociale désastreuse, avec un état civil incomplet.

Or, avant toute chose, il a besoin comme tout enfant, d'un bien-être moral, psychologique et social que ne lui offrent pas les discriminations sur sa filiation.

L'intérêt de l'enfant, quel qu'il soit, doit être privilégié à tout point de vue, au-delà de toutes autres considérations. Il faut donc veiller avec soin à son éclosion dans un cadre propice qui détermine l'épanouissement entier de son être. Il importe donc d'éviter à l'enfant incestueux ces préjudices psychiques et de lui garantir une filiation bilatérale légalement établie.

Sur la base de ces observations faites, il s'avère impérieux que le législateur repense les dispositions sur l'établissement de la filiation de l'enfant incestueux pour les corriger et donner à celui-ci la possibilité de se prévaloir, comme les autres enfants, d'une filiation à l'égard, et de son père, et de sa mère.

Dans le fond, ce ne serait que justice, étant donné que l'enfant n'est pas coupable de l'acte incestueux qui est à l'origine de sa conception.

Il faut alors que soit procédé à des modifications déjà au niveau de l'article 319 du CPF en son alinéa 3.

En effet, la filiation fonde le statut juridique et social de tout être humain et détermine son avenir au sen de la communauté.

SECTION II : LES EFFETS SUCCESSORAUX DES FILIATIONS LEGITIME

ET NATURELLE

Comparativement au sort réservé jusque-là aux enfants nés hors mariage, le code des personnes et de la famille a considérablement amélioré leur situation en édictant des règles qui assimilent la filiation naturelle à la filiation légitime.

Etant donné que pour emporter vocation successorale véritable, le lien de filiation doit être légalement constaté (c'est le lien de filiation qui constitue le support juridique des droits revenant à l'enfant, c'est-à-dire de sa succession et de son statut social en général), les rédacteurs du code béninois des personnes et de la famille ont en effet veillé à réparer le tort longtemps fait aux enfants naturels en normalisant l'établissement de leur filiation.

La conséquence directe de cette situation se ressent au niveau des effets de cette filiation corrigée. On pourrait parler ici, en termes plus exacts, des effets de la filiation naturelle légalement établie.

Contrairement donc au traitement qui découlait des dispositions du code civil de 1958, en l'occurrence sur la filiation de ces enfants, le code des personnes et de la famille a réalisé des innovations incontestables : celles-ci se résument en une consécration du principe d'égalité des droits entre tous les enfants (Paragraphe 1).

Ce principe n'a cependant pas été étendu à l'enfant incestueux qui reste toujours privé d'une partie de ses droits (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 - Consécration du principe d'égalité des droits

Le principe d'égalité des droits s'étend non seulement aux droits patrimoniaux des enfants à l'égard de leurs parents, mais aussi à ceux des parents à l'égard de leurs enfants, compte tenu du principe de la réciprocité du droit de succession.

Désormais donc, naturel simple, adultérin ou incestueux, les enfants naturels peuvent, à l'instar des enfants légitimes, aller à la succession de leurs parents, et réciproquement.

A- L'égalité des droits à l'égard des parents et autres ascendants

A l'instar de la loi du 3 janvier 1972 en France qui a posé le principe de l'égalité des filiations légitime et naturelle, le code béninois des personnes et de la famille élimine autant que possible la discrimination dans toutes les formes où elle s'est manifestée jusque-là, à travers le code civil de 1958.

L'enfant naturel jouit désormais des mêmes rapports de droit que l'enfant légitime vis-à-vis de ses parents et vis-à-vis de ses ascendants autres que les père et mère.

1) A l'égard des parents

Pour délivrer les enfants naturels de l'infériorité dans laquelle ils se sont trouvés jusque-là, les rédacteurs du CPF ont veillé à créer entre enfants et parents naturels des droits et devoirs réciproques identiques à ceux qui existent entre enfants et parents légitimes, les plus importants de ces droits et devoirs étant le droit aux aliments et le droit successoral.

a- Le droit aux aliments

Le droit aux aliments découle de l'article 158 du code qui dispose que : « Le mariage crée la famille légitime. Les époux contractent ensemble, par leur mariage, l'obligation de nourrir, entretenir, élever et éduquer leurs enfants ».

Dans la même optique, l'article 337 du même code énonce que : « Dans le mariage, l'obligation alimentaire (...) des époux envers les enfants fait partie des charges du mariage ( ...) ».

Assimiler l'enfant naturel à l'enfant légitime sur le plan du droit aux aliments signifie par conséquent qu'il existe désormais, entre lui et ses parents, une obligation réciproque identique à celle qui existe entre l'enfant légitime et ses parents.

A cet effet, nous pouvons recourir à l'article 392 du CPF : « Les enfants naturels dont la filiation est régulièrement établie ont vis-à-vis de leurs auteurs, les mêmes droits et obligations alimentaires que les enfants légitimes ».

Il semble donc évident que le législateur béninois recherche une réelle assimilation de l'enfant naturel à celui légitime.

b- Le droit successoral

La volonté des rédacteurs du code de corriger l'inégalité de traitement qui existait entre les enfants naturels et légitimes s'exprime clairement dans les termes d'un certain nombre de ses articles.

Il s'agit, pour commencer, de l'article 328 cité plus haut : « Lorsque la filiation est également établie, les enfants nés hors mariage ont les mêmes droits que les enfants légitimes (...) ».

Au titre des successions, les dispositions vont dans le même sens. En effet, « les enfants, quelque soit l'origine de leur filiation, jouissent des mêmes droits successoraux, sous réserve des dispositions de l'article 621 ».

Qu'ils soient donc légitimes ou naturels, tous les enfants sont appelés à la succession de leurs parents, père et mère, et ont droit à la même part : plus aucune distinction n'est faite par la loi.

C'est également ce qui se dégage de l'article 590 aux termes duquel : « les héritiers légitimes ou naturels (...) sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt (...) », ce qui n'était pas du tout le cas, vu les dispositions des articles 758, 759, 760, 762, 763, et 764 du code civil de 1958.

Lesdites dispositions fixaient une part précise à l'enfant naturel, différente de celle de l'enfant légitime et selon le type de successible avec lequel il vient à la succession de son père ou de sa mère.

Les articles 762, 763, et 764, quant à eux, spécifient le cas des enfants adultérins et incestueux, beaucoup plus lamentable que celui des enfants naturels simples. Aux termes de ces articles en effet, la loi ne leur accorde que des aliments. Ces aliments sont réglés, eu égard aux facultés du père ou de la mère, au nombre et à la qualité des héritiers légitimes.

De plus, si le père ou la mère de l'enfant adultérin ou incestueux lui a fait apprendre un métier ou si l'un d'eux lui a assuré des aliments de son vivant, l'enfant ne pourra lever aucune réclamation contre leur succession. Il s'agit là des dispositions de l'article 764 du code civil de 1958.

La loi visait, de cette façon, à protéger certains membres de la famille légitime, notamment les enfants légitimes issus du mariage et le conjoint victime de l'adultère, en présence d'enfants adultérins.

En comparaison de ce traitement fait aux enfants naturels en général et aux enfants adultérins et incestueux en particulier par le législateur de 1958, le code des personnes et de la famille a réalisé un véritable exploit, une véritable innovation en introduisant le principe d'égalité des droits entre tous les enfants.

Le code béninois des personnes et de la famille supprime en outre les distinctions précédemment faites entre les enfants compte tenu du sexe ou de l'âge. C'est ce qui ressort des dispositions de l'article 619 du code béninois : « les enfants ou leurs descendants succèdent à leur père et mère (...) sans distinction de sexe ni d'âge (...) ».

C'est là un point qui, au Bénin, vient en correction aux privilèges de masculinité et de primogéniture consacrés p ar le coutumier du Dahomey.

Dorénavant, ces privilèges n'influencent plus le partage des droits successoraux entre les enfants : il n'est plus tenu compte, ni de l'âge, ni du sexe, ainsi qu'à leurs autres ascendants ; ce qui est vraiment positif à beaucoup de points de vue. Non seulement le législateur offre les mêmes droits, et donc les mêmes chances aux filles et aux garçons, mais aussi, qu'il s'agisse de l'aîné, du cadet ou du benjamin d'une famille, le même traitement, la même part dans la succession de leurs parents.

Cette option du code des personnes et de la famille s'harmonise bien, non seulement avec les idéaux des Droits de l'Homme, mais aussi avec les dispositions de son propre article 1 dont les termes prônent une égalité absolue de traitement de la personne humaine, quels que soient sa race, sa couleur, son sexe, sa religion, sa langue, son opinion politique, son origine nationale ou sociale, sa fortune ou quelque autre situation, et ce, de sa naissance à son décès.

2) Extension des droits à l'égard des autres ascendants

Cette extension se rapporte à la fois aux droits alimentaires et aux droits successoraux.

Avec le CPF, l'enfant naturel lég alement reconnu a droit à l'intégration dans la famille de ses auteurs au même titre que l'enfant légitime. L'obligation alimentaire est désormais admise dans les rapports de l'enfant naturel et de ses autres ascendants.

C'est ce que nous retenons à travers les termes de l'article 391 dudit code selon lesquels : « L'obligation alimentaire résultant de la parenté est réciproque. Entre parents, elle existe en ligne directe, sans limitation de degré. En ligne collatérale, elle est simplement morale ».

En effet, si nous nous référons à l'article 378, alinéa 1 du même code selon lequel : « la parenté résulte de la filiation et d'elle seule », il est facile de comprendre, par les dispositions de l'article 391 précité que l'obligation alimentaire ne se limite plus aux père et mère, exclusivement, mais à tous autres ascendants et parents, pourvu qu'existe le lien de parenté.

En tout état de cause, étant donné la volonté d'assimilation des enfants naturels aux enfants légitimes et, sur la ba se des dispositions de l`article 392, les enfants naturels jouissent des mêmes droits que ceux légitimes si leur filiation est légalement établie. Il est donc tout à fait normal qu'ils puissent bénéficier d'aliments de la part de leurs autres ascendants, tout comme l'enfant légitime.

Cette extension de l'obligation alimentaire aux ascendants de l'enfant naturel autres que ses père et mère est conforme à la conception africaine selon laquelle l'étendue et la solidarité de la famille, qu'elle soit légitime ou naturelle, n'ont d'autres limites que celles qu'imposent l'ignorance et l'existence du lien de parenté ou le manque de biens à partager avec le prochain.

C'est dire qu'exclure les collatéraux et notamment les frères et soeurs du champ d'application de l'obligation alimentaire n'est pas africain, mais européen, et que c'est plutôt condamner l'assistance familiale traditionnelle à disparaître à brève échéance à une époque où l'assistance publique à l'européenne est encore à peu près inexistante.

Une autre innovation du code des personnes et de la famille se dégage des dispositions de l'article 619 : les droits successoraux des enfants naturels vis-à-vis de leurs autres ascendants.

En effet, « les enfants ou leurs descendants succèdent à leurs père et mère ou autres ascendants (...) ». La compréhension qui se dégage de ce texte de loi est que tous les enfants, de même que leurs descendants peuvent aller à la succession, et de leurs père et mère, et de leurs autres ascendants, grands parents, oncles et tantes, par exemple ; ce qui était impossible d'après l'article 757 du code civil de 1958 selon lequel « la loi n'accorde aucun droit aux enfants naturels sur les biens des parents de leur père ou de leur mère ».

Evidemment, le législateur vise ici les grands-parents d'enfants naturels. A ce niveau, il s'est posé jusque-là la question des rapports entre l'enfant naturel et ses grands-parents qui nécessitait une réglementation sans équivoque.

Les rédacteurs du code béninois des personnes et de la famille semblent donc avoir pris en compte la question pour élaborer une nouvelle disposition, l'article 619, qui étend la vocation successorale des enfants naturels à l'égard de leurs ascendants autres que leurs père et mère. Ainsi, tout comme les enfants légitimes, les enfants naturels peuvent aussi leur succéder.

Compte tenu du caractère réciproque du droit de succession, les parents peuvent, eux aussi, aller à la succession de leurs enfants naturels.

B- Les droits des parents à l'égard des enfants naturels et légitimes

L'enfant naturel (dont la filiation est légalement établie) ayant, dans la fa mille de chacun de ses auteurs, les droits d'un enfant légitime, il est normal que, à titre réciproque, ses père et mère, ainsi que les membres de cette famille aient le droit de bénéficier de certains droits et de venir à sa succession comme s'il s'agissait d'un enfant légitime.

En outre, les frères et soeurs de l'enfant naturel, qu'ils soient légitimes ou naturels, peuvent prétendre à des droits dans sa succession.

1) Droits des père et mère naturels et autres ascendants

Ces droits sont dus par l'enfant naturel à ses parents, père, mère et autres ascendants, en vertu du principe de réciprocité posé par la loi. Il s'agit notamment des droits alimentaires et ceux successoraux.

L'obligation alimentaire résultant de la parenté (que celle-ci soit légitime, naturelle ou adoptive) est, en vertu de l'article 391 du CPF, réciproque.

De la même façon donc que les parents de l'enfant naturel (père, mère et autres ascendants) sont tenus par la loi de lui fournir des aliments, ce dernier est, lui aussi, automatiquement tenu de la même obligation : il devra, au moment opportun, assurer des aliments à ses père et mère, de même qu'aux ascendants autres que ces derniers qui sont dans le besoin.

C'est là une disposition qui concorde parfaitement avec « la bonne nature de l'homme », le sens de l'humanisme, de la spontanéité de l'humain envers son prochain. En un mot, cette disposition n'a fait qu'édicter une attitude tout à fait normale, une attitude qui s'est d'ailleurs toujours bien conçue en Afrique où les valeurs traditionnelles ont toujours prôné l'égard envers le prochain.

En tout état de cause, il va parfaitement de soi que parents et enfant s'occupent réciproquement les uns des autres, que ce soit en Afrique, en Europe ou ailleurs dans le monde. Il est des choses qui devraient être innées en l'homme, quelle que soit son appartenance raciale.

Avec le code des personnes et de la famille, l'enfant naturel a été pratiquement assimilé à celui légitime. C'est ce qui justifie que les dispositions sur les droits successoraux des parents d'enfants naturels soient les mêmes qui se rapportent aux droits successoraux des parents d'enfant légitimes. Plus aucune distinction n'est vraiment faite dorénavant.

En cela, nous avons d'ailleurs remarqué que les dispositions du code des personnes et de la famille sur les nouveaux droits successoraux des ascendants n'est qu'une copie exacte de celles du code civil de 1958 sur les successions déférées aux ascendants. Il n'y a donc pas eu vraiment d'innovations à ce niveau non plus.

Aux termes de l'article 622 dudit code, dorénavant : « Si le défunt n'a laissé ni postérité, ni frère, ni soeur, ni descendants d'eux, la succession se divise par moitié entre les ascendants de la ligne paternelle et ceux de la ligne maternelle.

L'ascendant qui se trouve au degré le plus proche recueille la moitié affectée à sa ligne, à l'exclusion de tous autres. Les ascendants au même degré se succèdent par tête »

Pour ce qui est du cas particulier de l'enfant incestueux, compte tenu de l'interdiction de double filiation qui lui est faite à l'alinéa 3 de l'article 319 du code des personnes et de la famille, les implications que cela suppose en matière successorale et du caractère réciproque du droit de succession, nous comprenons tout simplement que, seul celui de ses auteurs qui l'aura reconnu et dont il aurait le droit d'aller à la succession pourra, à son tour, prétendre à une part dans la succession de cet enfant incestueux.

2) Droits successoraux des frères et soeurs de l'enfant naturel

Le code civil de 1958 les organisait séparément (précisément au chapitre 4 du titre premier dénommé SUCCESSIONS IRREGULIERES) compte tenu de la distinction systématique que faisait le législateur entre enfants naturels et légitimes.

Le code consacre les droits des frères et soeurs sur les biens des enfants naturels.

Les droits successoraux qu'attribuait le législateur de 1958 aux frères et soeurs légitimes de l'enfant naturel sont contenus dans l'article 766 du code aux termes duquel : « En cas de prédécès des père et mère de l'enfant naturel décédé sans postérité, les biens qu'il en avait reçus passent aux frères et soeurs légitimes, s'ils se retrouvent en nature dans la succession ; les actions en reprise, s'il en existe, ou le prix des biens aliénés, s'il en est encore dû, retournent également aux frères et soeurs légitimes (...) »

Il s'agit du droit de retour légal que le législateur reconnaissait aux frères et soeurs légitimes de l'enfant naturel.

Qu'en était-il de la part des frères et soeurs naturel ?

Aux termes de l'article 766 du code civil de 1958 précité « (...) Tous les autres biens passent aux frères et soeurs naturels ou à leurs descendants ». La distinction était donc clairement établie entre les parts auxquelles pouvaient prétendre les frères et soeurs naturels ou à leurs descendants »

Aujourd'hui, le code des personnes et de la famille a introduit des changements notables à ce niveau. Il ne dispose pas distinctement sur la base du type de filiation des frères et soeurs. Désormais, qu'il s'agisse de frères et soeurs, légitime ou naturels, d'un enfant légitime ou d'un enfant naturel, la loi dispose de façon générale, sans aucune distinction.

C'est ainsi que les articles 623, alinéa 2 à 627 du code béninois des personnes et de la famille ne sont, eux aussi, que de simples reprises des articles 748, alinéa 2 à 752 du code civil de 1958 qui organisaient les droits de frères et soeurs dans la succession d'un enfant légitime.

Paragraphe 2 - Persistance de la discrimination envers l'enfant

naturel

Les efforts des rédacteurs du code béninois des personnes et de la famille pour mettre fin aux discriminations envers les enfants naturels ne se sont pas vraiment étendus aux enfants incestueux pour lesquels subsiste toujours une hypothèse d'infériorité.

Etant donné qu'il ne leur est concédé qu'une moitié de filiation aux termes de l'article 319, alinéa 3, ils n'ont par suite, droit qu'à une succession réduite.

Au-delà donc du regroupement des enfants nés hors mariage sous le terme général d'enfants naturels et du traitement apparemment commun qui ressort d'un certain nombre de dispositions, le code des personnes et de la famille écarte, dans le fond, les enfants incestueux pour leur réserver un sort toujours différent.

C'est une situation assez préoccupante que nous essaierons d'expliquer ici, et que le législateur ferait bien de corriger en vue d'une certaine équité envers eux.

A- Une succession amputée pour l'enfant incestueux

L'intention du législateur de faire un sort particulier à l'enfant incestueux est manifeste à travers un bon nombre de dispositions du code béninois des personnes et de la famille.

Il est évident que son statut juridique a été spécialement étudié, de façon à « l'écarter » des autres enfants naturels qui ont pu voir le leur corrigé, amélioré. Il ne fait aucun doute que les rédacteurs du code des personnes et de la famille ont soigneusement veillé à établir les bases juridiques d'une situation discriminatoire pour les enfants incestueux.

En effet, les implications de l'article 319 alinéa 3 s'étendent à plusieurs points qui définissent, enfin de compte, pour ces enfants, un contexte juridique et social préoccupant.

Etant donné que le lien de filiation établi conditionne le statut de l'enfant à divers niveaux, notamment aux niveaux juridique, social et économique, on comprend que les rédacteurs, aient particulièrement pris soin de fixer les règles de l'établissement de leur filiation de façon à leur rendre impossible le bénéfice de l'assimilation dont les enfants naturel simple et adultérin ont fait l'objet par rapport à l'enfant légitime.

Une première manifestation se retrouve à l'article 328 dudit code où il est stipulé que : « lorsque la filiation est légalement établie, les enfants nés hors mariage ont les mêmes droits que les enfants légitimes, sous les réserves prévues au titre des successions » .

Il serait donc plus sage de prendre quelque recul à la lecture de cette disposition qui accorde les mêmes droits à tous les enfants, et de tenir compte des réserves émises par la suite.

L'enfant incestueux, pour être précis, et surtout sans vouloir être hypocrite, est carrément exclu du lot des autres enfants naturels qui peuvent aujourd'hui jouir d'un statut juridique franchement corrigé ; nous voulons parler des enfants naturels et adultérins.

Il faut relever qu'au chapitre des successions, le législateur insiste sur les réserves déjà émises au niveau de l'établissement de la filiation. L'intention de traiter différemment ce type d'enfant persiste et on ne saurait dire qu'il s'agit là d'un hasard.

Aux termes de l'article 619, en effet, les enfants ou leurs descendants peuvent aller à la succession de leurs père et mère ou autres ascendants (...) sous réserve des dispositions prévues relativement aux enfants incestueux. L'article précise bien qu'il s'agit de l'enfant incestueux et pas celui adultérin ou naturel simple.

L'enfant incestueux a donc bien été mis de côté et il en est de même au niveau de l'article suivant, c'est-à-dire le 620 où l'enfant incestueux est clairement écarté : « les enfants, quelle que soit l'origine de leur filiation jouissent des mêmes droits successoraux, sous réserves des dispositions de l'article suivant ».

Ainsi, les réserves sont à chaque fois maintenues par le législateur vis-à-vis de l'enfant incestueux, tandis que les articles s'annoncent les uns les autres.

C'est le cas de l'article 620 qui renvoie au 621 où les rédacteurs du code précisent clairement le sort qu'ils réservent à l'enfant incestueux quant à sa part réelle de droits dans la succession de ses auteurs.

Le code ne reconnaît de droits successoraux à cet enfant qu'à l'égard de celui de ses auteurs qui l'aura reconnu et non à l'égard des deux. C'est la conséquence directe de l'alinéa 3 de l'article 319 du même code qui ne permet à l'enfant incestueux qu'une filiation à sens unique, c'est-à-dire une filiation unilinéaire, une moitié de filiation.

En dehors donc de celui de ses parents qui l'aura reconnu, l'enfant incestueux ne pourra prétendre à aucun droit dans la succession, ni de son autre auteur, ni d'aucun de ses autres ascendants. L'article 621 est suffisamment éloquent à cet effet : « l'enfant incestueux n'a de droits successoraux qu'à l'égard du parent qui l'a reconnu conformément à l'article 319 du présent code »

Il est donc clair que cette catégorie d'enfant n'a pas la moindre issue : Le législateur ne lui donne pas vraiment le choix ; il a plutôt pris grand soin de lui imposer une situation juridique dont il lui sera extrêmement difficile de se défaire. Ses droits héréditaires se trouvent ainsi amputés de moitié, ce qui n'est pas pour l'arranger du tout, à aucun point de vue.

Contrairement donc aux enfants adultérins et naturels simples qui peuvent aller à la succession de leurs deux parents, les enfants incestueux ne peuvent prétendre qu'à la succession, soit de leur père, soit de leur mère, c'est-à-dire celui d'entre eux qui l'aurait reconnu et d'aucun autre ascendant.

De la même façon, ils ne pourront, en vertu de l'article 6, alinéa 2 du CPF, porter que le nom du parent, père ou mère, qui les aura reconnus. L'enfant incestueux est ainsi inévitablement condamné à des pertes économiques sérieuses qui fragilisent d'autant plus son statut social.

En définitive, il se trouve, sans aucune objection, dans une situation bien inconfortable. Cette situation aurait pourtant été déplorable si la loi ne lui arrachait pas également la moitié de ses droits aux aliments (B).  

B- Une amputation qui s'étend au droit alimentaire

Aux termes de l'article 385 du code, les aliments comprennent tout ce qui est nécessaire à la vie, notamment la nourriture, le logement, les vêtements, les frais de maladie.

L'obligation alimentaire rend les parents débiteurs de leurs enfants pour la satisfaction des besoins essentiels de leur vie. Qui fait l'enfant, dit-on, doit le nourrir. C'est là un adage qui pose en substance une règle de profonde justice, d'équité.

Le code béninois des personnes et de la famille, en prohibant pourtant l'établissement d'une double filiation aux enfants incestueux, les prive par là même de la moitié de leurs droits aux aliments.

Par le terme « moitié », nous voudrions juste signifier l'ensemble des droits dont l'enfant incestueux est automatiquement privé du côté du parent qui ne peut pas le reconnaître, compte tenu de l'interdiction de double filiation qui lui est faite. En effet, l'obligation alimentaire ne résulte que de la parenté, qui elle, « résulte de la filiation et d'elle seule17(*) ».

Or, le lien de filiation étant impossible à établir vis-à-vis de l'un des auteurs pour l'enfant incestueux, il est clair que, de la même manière que les droits successoraux ont été amputés, ses droits aux aliments s'en trouvent eux aussi divisés en deux.

Ainsi, il lui sera tout simplement impossible de prétendre à des droits alimentaires vis-à-vis de celui de ses parents qui ne l'a pas reconnu, ou du moins, qui ne peut le reconnaître, le support juridique d'une prétention étant inexistant, interdit d'établissement.

Dans ces conditions, et sachant que les femmes sont généralement moins nanties que les hommes (produit de notre héritage culturel), quelle pourrait être la consistance des droits d'un enfant incestueux reconnu par sa mère18(*) ? Il serait condamné à une situation encore plus critique. Nous voyons là jusqu'à quel point l'interdiction de la double filiation peut rattraper l'enfant et compromettre inévitablement ses droits à quelque niveau que ce soit.

Autrement dit, l'ombre de l'infamie de l'inceste dont il a été couvert dès sa conception le poursuit en quelque sorte partout où il peut être question de ses droits et les réduits automatiquement, étant donné les prescriptions légales relatives à l'établissement de sa filiation.

En réalité, nous ignorons si le législateur a soupesé toutes les implications de cette interdiction de double filiation, mais, à voir la persistance des dispositions du code des personnes et de la famille pour écarter l'enfant incestueux des autres enfants naturels, cela ne fait pas vraiment de doute, à notre sens.

On pourrait en dire plus : ainsi que nous l'affirmions plus haut, les rédacteurs du code ont pris grand soin d'imposer à cette catégorie d'enfants, une situation juridique sans issue, étroite et difficilement attaquable.

Il faut à tout prix que les rédacteurs du code réétudient leur situation dans le sens d'une correction du tort qui leur est fait, ainsi que nous avons pu le remarquer à travers nos analyses. Le législateur doit être non seulement conséquent envers lui-même, mais aussi faire preuve d'un brin d'équité vis-à-vis de chaque sujet de droit.

CHAPITRE II :

LES DIFFICULTES D'APPLICATION DE L'EGALITE DES DROITS SUCCESSORAUX DES ENFANTS LEGITIME ET NATUREL

Comme toute réforme, la réforme du droit successoral béninois si vivement souhaitée, ne manquera pas de soulever des difficultés d'application.

Mais, ces difficultés, si elles sont bien appréhendées permettront d'obtenir de bons résultats de la réforme. C'est pourquoi nous avons entrepris dans le développement suivant, d'évaluer ceux-ci afin de leur proposer des solutions.

Les difficultés d'applications de la réforme sur la filiation et le droit des successions sont ici regroupées en deux sections : les problèmes juridiques, et les pesanteurs psychosociologiques.

SECTION I : LES PROBLEMES JURIDIQUES

Sur le plan juridique, nous aurons les insuffisances du principe d'égalité (paragraphe 1) et les difficultés d'application du code dans le temps et l'espace (paragraphe 2).

Paragraphe 1 - Les insuffisances du principe d'égalité

Le manque de clarté des articles 325 et 328 du CPF ne permet pas une bonne application du principe d'égalité.

En plus, le principe d'égalité consacré par le CPF subit quelques exceptions en ce qui concerne les enfants sans filiation légale.

A- Les imprécisions des articles 325 et 328 du CPF

La forme de l'article 328 du CPF diffère de l'article 334 du code civil auquel il correspond. Contrairement au législateur français, les rédacteurs du CPF n'ont pas consacré l'égalité des deux ordres de filiation au début de la rubrique concernant l'enfant né hors mariage. Mais cet écart ne gène en rien l'application du principe et reste sans doute dénué d'intérêt.

Toutefois, l'article 328 du CPF n'annonce pas l'entrée de l'enfant né hors mariage dans la famille de son auteur. Il se contente d'affirmer que « ... Les enfants nés hors mariage ont les mêmes droits que les enfants légitimes... »

Ce manque de précision est-il prémédité ?

Le CPF devrait rompre avec cette incertitude et établir clairement le rapport juridique entre l'enfant naturel et ses grands parents. Car, dans l'ancien droit en vigueur au Bénin, le cercle de la famille naturelle ne dépasse pas le premier degré (l'enfant, le père ou la mère) : la filiation naturelle ne créait qu'un rapport inter-individuel, sans intégration au groupe familial.

Par ailleurs, l'article 325 du CPF couvre un domaine plus vaste que sa portée réelle. Il dispose que « La volonté de reconnaissance par un homme marié ou une femme mariée d'un enfant né hors mariage doit être notifiée à son conjoint soit par écrit, soit par exploit d'huissier ». En vertu de cet article, l'enfant adultérin ne pourrait venir à la succession de son auteur, qu'autant que sa reconnaissance a été notifiée au conjoint victime de l'adultère.

L'obligation de notification est une mesure protectrice de la famille légitime contre l'intrusion des enfants naturels quels qu'ils soient ou d'où qu'ils viennent. Elle permettra aussi d'éviter l'imposture de l'autre conjoint qui voudra dissimuler l'existence de l'enfant naturel.

Cette règle rationnelle s'applique à tout enfant reconnu pendant la période de validité du mariage. Il ne s'observe pas lorsque la reconnaissance de l'enfant naturel intervient avant la célébration du mariage ou après sa dissolution.

Mais à qui incombe l'obligation de notification ? Le code ne le précise pas18(*).

On peut également s'interroger sur l'opportunité ou l'utilité d'un tel formalisme19(*), alors même que l'adultère déjà difficile à avouer - la plupart des veuves ayant la surprise de ne découvrir les autres enfants du mari qu'à l'enterrement - n'est pas facile à pardonner.

Il faut reconnaître le mérite des auteurs du code des personnes et de la famille, car l'article 325 n'a pas la même portée que l'article 337 du code civil auquel il ressemble si bien20(*).

B- La situation des enfants n'ayant pas de capacité successorale

Les enfants naturels qui n'ont pas été reconnus et qui n'ont pas obtenu la déclaration judiciaire de leur filiation sont purement et simplement exclus de la succession21(*). Mais la loi leur accorde une créance alimentaire contre la succession de leur père et mère dès qu'ils établissent une filiation de droit ou de fait.

L'enfant naturel simple a toujours un véritable droit de succession à l'égard de ses père et mère du seul fait qu'il peut établir sa filiation.

Mais lorsqu'il n'a pas une telle preuve, l'enfant naturel ne dispose d'aucun droit à faire valoir contre la succession de ses père et mère. Peut-il réclamer des aliments à la succession ?

La jurisprudence admet que l'enfant naturel simple dont la filiation n'est pas légalement établie peut, s'il justifie par un moyen quelconque une filiation de fait, réclamer des aliments à la succession. 

En revanche, la jurisprudence permet à l'enfant adultérin de réclamer des aliments à ses père et mère de leur vivant lorsqu'il établit par un moyen quelconque une filiation de fait22(*).

L'assimilation de l'enfant naturel à l'enfant légitime n'est réalisée que lorsque la filiation de l'enfant naturel est légalement établie.

Or, si la filiation légitime est prouvée de la façon la plus simple dans la majorité des cas, il n'en est pas de même pour la fil iation naturelle.

En effet, la filiation naturelle se prouve normalement par reconnaissance volontaire du père ou de la mère. Mais lorsqu'il n'a pas été reconnu volontairement, l'enfant naturel doit faire établir sa filiation par une décision de justice. Tous ne le peuvent pas.

Pour ces derniers, l'assimilation est vaine. Ils peuvent tout au plus réclamer des aliments s'ils établissent une filiation de fait.

Le CPF n'a pas défini explicitement la situation de l'enfant naturel dont la filiation n'est pas légalement établie mais s'est contenté de subordonner la vocation successorale de l'enfant naturel à l'établissement de sa filiation23(*).

Paragraphe 2 - Difficultés dans le temps et l'espace

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Le premier problème qui risque de se poser à notre avis est la compréhension que doit avoir la plus grande partie de la population béninoise analphabète et encore attachée aux coutumes, des nouveaux textes et ensuite le problème de leur appropriation.

La population aura-t-elle l'impression que les dispositions du CPF sont conçues pour s'appliquer à elle ?

Au sein même des populations urbaines et alphabétisées, est-ce que tous les individus pourront s'approprier le texte ?

Nous restons très sceptiques sur ces points surtout que, comme nous l'avons déjà démontré, l'enfant naturel part de la condition d'étranger pour être hissé au rang d'héritier véritable. Il y a certainement à faire à ce niveau un travail de sensibilisation accru.

En outre, l'article 1021 du Livre 4 portant Application du code dans l'espace et dans le temps et dispositions transitoires dispose que : « Les mariages contractés conformément à la coutume, antérieurement à la date d'entrée en vigueur du présent code, demeurent soumis pour leur validité, aux conditions de fond et de forme en vigueur lors de la formation du lien matrimonial. Il en est de même des mariages célébrés conformément au Code Civil. Leurs effets postérieurs sont régis par la loi nouvelle selon les distinctions établies ci-après :

- les effets des mariages déclarés ou non, contractés conformément à la coutume, sont régis par les dispositions du présent code, sous réserve de la pluralité d'épouses que peuvent comporter ces mariages ;

- les effets des mariages contractés conformément au Code Civil sont régis par les dispositions du présent code ».

Autrement dit, les enfants issus des mariages célébrés conformément à la coutume antérieurement à l'avènement du Code des personnes et de la famille, pourront bénéficier de l'attribution des droits successoraux.

Mais un problème risque de se poser en ce qui concerne les enfants des mariages coutumiers non transcrits, qui ne peuvent justifier d'aucune preuve écrite permettant de situer la date de célébration du mariage. Si aucune contrainte ne leur est imposée, cela pourrait permettre aux enfants des personnes mariées devant la coutume postérieurement au code, de prétendre à des droits successoraux à l'image de ceux définis par le Code des personnes et de la famille. Il s'agit donc de trouver à ce niveau un moyen de contrecarrer ces derniers par exemple en exigeant la transcription de tous les mariages coutumiers dans un registre ouvert à cet effet.

SECTION II: LES PESANTEURS PSYCHO SOCIOLOGIQUES

Les pesanteurs psychosociologiques qui pourraient rendre difficiles l'attribution de droits successoraux aux enfants naturels sont nombreuses et variées.

Paragraphe 1 - Le respect du mariage et de la famille légitime

Le nouveau statut qui est souhaité pour l'enfant naturel n'a pas à léser les droits de la famille légitime. Le législateur béninois dans son élan vers une amélioration du statut des enfants naturels devra servir la cause du mariage et protéger les membres de la famille légitime.

A- La remise en cause de l'institution du mariage

L'une des obligations découlant du mariage est le devoir de fidélité imposé aux conjoints. Par conséquent, l'adultère est proscrit dans les relations conjugales et constitue une cause péremptoire de divorce aux termes des articles 229 et 230 du code civil. Le mariage est une noble institution que la loi et la société entendent protéger. C'est donc dans l'intérêt de la famille légitime que le code limitait de manière importante les droits successoraux des enfants naturels.

Et si l'enfant naturel est traité comme un enfant légitime, l'adultère serait-il encore puni ? Devons-nous aller vers une certaine dépénalisation du délit d'adultère ? Le mariage monogamique aura-t-il encore un sens ? Dans cette situation, on tendra vers une prolifération de la polygamie24(*). Or en raison des nombreux aspects négatifs de la polygamie, les législateurs de tout temps, dans l'intérêt des enfants, ont toujours prôné la monogamie. Ainsi, si tous les enfants doivent avoir les mêmes droits, c'est légaliser d'une manière ou d'une autre toutes les relations extraconjugales ; mais comment qualifier ces relations d'un point de vue juridique ? N'est-ce pas une forme de polygamie qui ne dit pas son nom ? Dans ces conditions, quel avenir pour la monogamie ? Et qu'adviendrait-il des ménages monogames ?

En d'autres termes, l'innovation en matière de filiation apportée par le code des personnes et de la famille risque d'ébranler la morale sociale. Ainsi, le mariage de ses parents ne crée plus de privilège pour l'enfant légitime : légitime, naturel simple, adultérin ou incestueux, il bénéficie du même statut successoral. L'assimilation crée un sentiment de frustration pour les enfants légitimes. De même, la femme épouse survivante du de cujus doit concourir avec les enfants naturels de son mari prédécédé. Le mariage est donc vidé de son sens.

L'assimilation de l'enfant naturel à l'enfant légitime, du point de vue successoral, affaiblit la famille légitime fondée sur le ma riage.

B- Le protection des droits de la famille légitime

Le Bénin semble, à travers le code des personnes et de la famille, avoir fait le choix de défendre les intérêts de l'enfant naturel. Mais cette option prend t-elle en compte les convictions religieuses et morales des béninois ? Cette option protège-t-elle la famille légitime ?

Pour la majorité des doctrinaires, les enfants naturels malgré tout, conservent un aspect immoral parce qu'ils sont nés de relations extraconjugales, ce qui fait que l`idée d'une éventuelle égalité entre eux et les enfants légitimes procède d'une gageure. Pour Lamine SIDIME par exemple « Les enfants adultérins présentent cette particularité qu'issus de personnes non mariées entre elles, leur naissance est en outre affectée d'une « illicéité » et d'une immoralité supplémentaire en ce qu'elle est le fruit de l'adultère25(*) ».

Cette situation fait que si la législation n'institue aucune différence entre l'enfant adultérin et l'enfant légitime, il est à craindre que le respect des droits de la famille légitime soit compromis dans l'opinion publique. En effet, en proclamant l'infériorité légale des « enfants illégitimes », le législateur sert la cause de la famille légitime. En d'autres termes, toute mesure qui tend à rapprocher les effets des deux filiations légitime et naturelle est une « prime à la débauche et à l'union libre ».

La législation béninoise doit évoluer mais progressivement. Dans le domaine du droit de la famille, il serait raisonnable au fond de ne rien brusquer, de laisser s'édifier progressivement les fondements d'une société nouvelle d'ailleurs en pleine gestation. Colette SAUJOT écrivait à propos de la condition juridique des enfants adultérins que « Protection de l'enfant adultérin, défense de la famille légitime, tels sont les deux impératifs entre lesquels le juriste doit choisir et son choix dépendra des moeurs, des conceptions religieuses et morale de l'époque »26(*).

Paragraphe 2 - Le risque de dégénérescence des moeurs

Accorder à l'enfant adultérin une stricte égalité en droits avec l'enfant légitime reviendrait à ne tenir aucun compte de l'existence d'intérêts moraux qui entrent en jeu.

On est conduit à se demander si l'égalité consacrée entre la filiation légitime et la filiation naturelle est de nature à justifier les comportements d'infidélité des époux.

En effet, la morale est une notion capitale que la société et le droit entendent sauvegarder pour le respect des bonnes moeurs. L'adultère est `'le fait d'avoir volontairement des rapports sexuels en dehors des liens du mariage''27(*). Ainsi, les enfants adultérins, qu'on le veuille ou non, portent un cachet spécial qui va à l'encontre de certaines règles imposées par la morale sociale.

Comme ledit SAUJOT « tous les enfants naturels qu'ils soient naturels simples, adultérins ou incestueux, sont une offense au mariage. Ils sont la preuve vivante et permanente du manquement au premier des devoirs conjugaux, au devoir de fidélité »28(*).

Ainsi, le mot « adultérin » à lui seul suffit pour choquer les intérêts moraux. Il est impossible que la loi autorise un libertin à publier légalement et impunément qu'il est coupable d'adultère ; la loi peut tolérer une faiblesse, elle ne peut pas supposer un crime ; s'il existe, elle doit le punir.

En permettant une stricte égalité entre l'enfant légitime et l'enfant naturel, le législateur béninois du 7 juin 2002 se rend-t-il compte qu'il autorise un certain comportement contraire à la morale ? Se rend-il compte que tout conjoint peut commettre l'adultère sans se soucier des conséquences ? Cependant, le désir légitime de venir en aide à l'enfant innocent et la nécessité de protéger la famille imposent de ne pas sacrifier l'un sur l'autel de l'autre.

Plus qu'une lecture à la lettre, le développement suivant sera consacré aux perspectives pour la primauté du droit dans l'application effective du nouveau régime juridique béninois des successions. Il donnera lieu à une interprétation des droits de différents pays et une comparaison entre eux.

De ce développement découleront des suggestions pour la garantie de l'attribution de droits successoraux aux enfants naturels avec l'avènement du CPF au Bénin.

DEUXIEME PARTIE :

LES PERSPECTIVES POUR LA PRIMAUTE DU DROIT DANS L'APPLICATION EFFECTIVE DU NOUVEAU REGIME JURIDIQUE BENINOIS DES SUCCESSIONS

Hormis le fait que ses deux parents soient mariés entre eux, l'enfant légitime dans le CPF ne présente aucune spécificité par rapport à l'enfant naturel simple qui lui est assimilé en tous points en matière successorale. Bien évidemment cette situation n'est que le résultat d'une évolution qui s'est faite dans le temps et qui est conforme aux nouvelles tendances sociologiques marquées par le déclin du mariage et la prolifération des unions libres29(*).

S'il est vrai que les auteurs du Code des personnes et de la famille du Bénin se sont fortement préoccupés de réaliser l'égalité et la justice entre tous les enfants sur le terrain successoral, ils n'en ont pas moins tenu à sanctionner l'adultère et l'inceste.

En effet, l'enfant naturel béninois, continue de subir une discrimination non négligeable par rapport aux enfants légitimes, à cause de l'inapplicabilité du principe d'égalité consacré par le code. Cette situation mérite d'être revue d'autant plus que de nos jours liberté et égalité semblent être le fondement de toutes les normes juridiques.

Il s'agira de manière plus explicite dans cette deuxième partie, de présenter un plaidoyer pour la primauté du droit dans l'application effective du nouveau régime des successions des enfants légitime et naturel. Pour cela, nous partirons d'une étude critique comparée avec les droits étrangers (chapitre 1) pour aboutir à une analyse approfondie des dispositions du CPF et faire des suggestions pour une meilleure prise en compte de l'intérêt de l'enfant (chapitre 2).

CHAPITRE 1 :

LES ENSEIGNEMENTS TIRES DU DROIT COMPARE

Après examen de l'applicabilité de l'égalité des droits successoraux que le nouveau Code a institués en faveur des enfants légitime et naturel, il serait opportun de chercher à connaître la position des législateurs étrangers sur la même question et profiter de leurs expériences.

En Afrique, des pays comme le Burkina Faso, le Togo, la Côte d'Ivoire, le Sénégal, le Mali, etc... se sont depuis plusieurs années, forgé une expérience que nous allons comparer au droit du Code des personnes et de la famille (section 2).

De même, la France a évolué sur la question depuis 1958. D'importantes réformes ont été introduites dans son droit successoral (section1).

SECTION I : CAS DU DROIT FRANCAIS

L'enfant naturel français n'a pas toujours bénéficié des droits successoraux. La même conception de l'enfant naturel qui reposait sur la discrimination de ce dernier par rapport à l'enfant légitime a longtemps prévalu dans toute l'Europe, et en France notamment.

Nous ferons état de ce cheminement afin de montrer que l'octroi des droits successoraux à l'enfant naturel dans le droit français ne s'est pas fait en une seule réforme, mais a suivi le cours de l'évolution progressive des mentalités (paragraphe 1), qui ont consacré l'intégration complète de l'enfant naturel à la famille grâce à des droits nouveaux plus importants (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Evolution des droits successoraux des enfants

naturels dans le droit français

L'ancien droit français, dans le but de protéger la famille légitime, manifestait de la rigueur envers les enfants naturels. Il ne leur reconnaissait aucun droit successoral et ne leur accordait que des aliments, même lorsqu'ils avaient été reconnus.

Les principes de liberté et d'égalité de la révolution française de 1789 les avaient mis sur un pied d'égalité avec les enfants légitimes en leur accordant une succession à pa rt égale ; mais la recherche de leur filiation était prohibée.

En revanche le code napoléonien a institué à nouveau la hiérarchie des filiations30(*). L'enfant naturel est alors distingué de l'enfant légitime ; et entre les enfants naturels, l'enfant naturel simple a une situation meilleure que les enfants adultérins et incestueux.

L'enfant naturel simple est l'enfant dont les parents n'étaient engagés dans aucun lien de mariage avant sa conception. L'enfant naturel simple allait toujours à la succession de ses père et mère, et non à celle des parents de ses auteurs puisqu'il ne fait pas partie de la famille. Il ne sera appelé qu'à la succession de ses frères et soeurs naturels et non à celle des enfants légitimes. Il ne pouvait exercer son droit de succession que lorsque sa filiation est légalement établie, par reconnaissance volontaire ou par décla ration judiciaire. Mais cette condition indispensable n'est pas toujours suffisante. Il faut qu'elle soit assortie de l'absence de préjudice au conjoint victime et aux enfants issus du mariage concomitant à sa reconnaissance.

L'enfant né d'une infidélité conjugale de l'un au moins de ses parents est adultérin. Est incestueux, l'enfant dont les auteurs ne pouvaient contracter mariage l'un avec l'autre en raison d'un lien de parenté ou d'alliance, constituant un empêchement à un degré prohibé.

L'ancien droit français fait une condition défavorable aux enfants adultérins et incestueux. D'une part, l'établissement de leur filiation est interdit, que ce soit par reconnaissance volontaire ou par déclaration judiciaire. D'autre part, tout droit successoral leur est refusé, ils n'ont droit qu'à des aliments.

L'enfant adultérin ne recevant que la moitié de sa part successorale réparait, dans l'esprit de la loi un préjudice. Ce préjudice trouvait sa source en l'adultère commis par son parent marié. Cette moitié d'héritage profitait ainsi tantôt au conjoint survivant, tantôt aux enfants légitimes. En d'autres termes, l'article 760 du Code civil mettait à la charge de l'enfant la réparation du préjudice commis par son père ou sa mère et résultant en une relation sexuelle extraconjugale.

En réalité, le code civil de 1958 n'est que la reproduction presque parfaite de celui de 1804. Or le courant idéologique en ce temps était de réintroduire l'impératif public d'organisation de la société : la famille redevenait une cellule de base qui doit être rigoureusement organisée, ce qui suppose que le mariage et la filiation légitime fondée sur lui, retrouve leur monopole ; la filiation hors mariage n'est pas ou est mal considérée31(*).

Par la suite, sans revenir sur l'infériorité de la filiation adultérine et sans leur donner un véritable statut familial, les rédacteurs du code civil ont cherché à améliorer la situation des enfants adultérins en leur accordant des droits alimentaires, droits alimentaires n'ayant aucunement pour objectif d'établir la filiation adultérine.

En France, le législateur avait lié la légitimation au mariage des parents en retenant deux (2) formes de légitimation : la légitimation par mariage subséquent et la légitimation « post nuptias ». Ce n'est en effet qu'avec la réforme du 3 janvier 197232(*), que le législateur a élargi le champ de la légitimation en prévoyant la légitimation par autorité de justice comme une solution palliative pour les cas où le mariage est impossible entre les parents de l'enfant naturel.

La loi du 3 janvier 1972 a par ailleurs accordé à l'enfant naturel les mêmes droits qu'à l'enfant légitime, en admettant la successibilité des enfants adultérins. Cette loi a consacré l'égalité des enfants légitimes et naturels, et l'abolition des différentes catégories d'enfants naturels.

Dans cette logique, le nouveau code français a opéré dans ce sens une réforme salutaire. En effet, la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 200133(*) a profondément bouleversé l'ordre des successions en France. Elle accroît les droits de l'enfant naturel et ce faisant dimunie les droits des autres héritiers.

Le principe d'égalité entre les filiations en matière successorale est aujourd'hui totalement consacré. Tous les articles relatifs au statut restrictif de l'enfant naturel sont abrogés.

L'article 733 du Code civil dispose désormais : « La loi ne distingue pas entre la filiation légitime et la filiation naturelle pour déterminer les parents à succéder ».

Ces dispositions sont entrées en vigueur le lendemain du jour de la parution de la loi au Journal officiel, soit le 5 décembre 2001, et s'appliquent aux successions déjà ouvertes à ce jour, dans la mesure où l'acte de partage n'a pas encore été signé.

Paragraphe 2 - Les droits des enfants naturels à l'issue de la

réforme du droit successoral français

La réforme du 3 décembre 2001 en France a permis à ce pays de rattraper la tendance actuelle de l'accroissement des droits de l'enfant naturel observée dans toute l'Europe d'une part. D'autre part, des données sociologiques se reposant sur la dimension du cercle familial ont motivé cette révolution.

Désormais, les droits de l'enfant naturel en France, sont supérieurs à ceux organisés par le CPF. La France continue donc d'avoir de l'avance sur le Bénin sur la question de l'attribution de droits successoraux aux enfants légitimes et naturels. Ce pendant, on pourrait admettre ce léger retard du droit béninois sur le droit français actuel car l'évolution socioculturelle dans les pays d'Europe n'est pas semblable à celle des pays d'Afrique.

De même ce pays, a depuis plusieurs années, tel que démontré dans l'évolution des droits successoraux en France, une pratique accrue de l'attribution de droits aux enfants naturels que le Bénin ne saurait rattraper en une seule réforme, sans craindre de bouleverser les valeurs sociales.

La mesure la plus attendue, suite à l'affaire MAZUREK, est la suppression du troisième alinéa de l'article 334 du Code civil et des articles en découlant. La Cour européenne s'est en effet fondée sur l'article 14 de la C.E.D.H. pour condamner la France, et a ainsi affirmé que : « L'enfant adultérin ne saurait se voir reprocher des faits qui ne lui sont pas imputables ».

Le principe affirmé, le législateur français a supprimé toutes les dispositions qui matérialisent la discrimination. Il abroge ainsi :

- l'interdiction faite à l'enfant adultérin d'être élevé au domicile conjugal sans le consentement du conjoint de son auteur (article 334-7 du Code civil).

- l'interdiction qui leur était faite de bénéficier des libéralités en sus de leur part successorale (article 908 du Code civil).

- la réduction de sa réserve à la moitié au bénéfice des enfants légitimes (article 915 du Code civil).

- l'impossibilité qu'ils avaient de pouvoir demander la conversion de l'usufruit en rente viagère (article 1070-1 du Code civil).

- l'article 760 du Code civil qui réduisait la part de l'enfant adultérin de moitié dans la dévolution successorale des enfants légitimes ou du conjoint a été réécrit.

Enfin, l'action en retranchement est désormais ouverte à l'ensemble des enfants qui ne sont pas issus du mariage dissous par le décès (article 1527 alinéa 2 du Code civil).

Plus récemment encore, au cours de l'année 2005, une ordonnance présentée en conseil des ministres supprime du Code civil la distinction faite depuis 1804 entre enfants `'légitimes'', nés d'un couple marié, et enfants `'naturels'', nés d'un couple hors mariage.

L'ordonnance abandonne les notions de filiations légitime et naturelle, qui avaient perdu toute portée juridique et pratique depuis que le législateur avait consacré l'égalité parfaite entre les enfants quelle que soit leur filiation.

Aujourd'hui, 46% des enfants français naissent hors mariage, contre environ 10% dans les années 70. Près de 90% de ces enfants dits « naturels » sont reconnus par leurs parents34(*).

Des textes adoptés jusqu'en 2002 ont supprimé toutes les inégalités avec les enfants légitimes, notamment en matière de succession.

Il s'agit donc de consacrer définitivement ces réformes dans l'abandon des terminologies. La disparition des termes « légitime » et « naturel » dans le code civil sera effective le 1er Juillet 2006.

L'ordonnance modifie et simplifie par ailleurs le droit de la filiation en réduisant de moitié les articles du code civil relatifs à ce problème.

La filiation maternelle sera établie par la désignation de la mère dans l'acte de naissance de l'enfant, qu'elle soit mariée ou non, et sans qu'elle ait besoin de faire la démarche de reconnaissance.

En revanche, la présomption de paternité du mari, qui établit automatiquement la filiation à son égard est conservée. Les pères non mariés devront toujours reconnaître l'enfant pour établir le lien de filiation.

Enfin, le régime des actions judiciaires relatives à la filiation est simplifié. Il sera possible de faire établir en justice la maternité ou la paternité durant les dix ans suivant la naissance, l'action étant rouverte à l'enfant pendant les dix ans suivants sa majorité.

SECTION II : LES APPORTS DE CERTAINS SYSTEMES JURIDIQUES AFRICAINS

En matière successorale, beaucoup de pays africains ont déjà, ignorant ou non leurs pratiques coutumières, posé des principes de dévolution dans le sens du droit moderne. Ils ont depuis plusieurs années, mis en place un code des personnes et de la famille. On peut noter par exemple, que le Mali a procédé à l'unification et à l'uniformisation de son droit interne depuis 1962, la Côte d'Ivoire depuis 1964, le Sénégal en 1972, le Togo en 1984, le Burkina Faso en 1990.

La plupart de ces pays ont institué en faveur des enfants naturel et légitime, des droits successoraux dont la nature, les conditions de jouissance, le quantum varient d'un pays à l'autre.

L'analyse synthétique et comparative des droits des enfants légitime et naturel dans les différents pays (paragraphe 1), sera suivie de l'analyse de leurs expériences (paragraphe 2).

Paragraphe 1 - Analyse des droits successoraux des

enfants naturels dans le contexte africain

A travers les législations35(*) de la Côte d'Ivoire, du Togo, du Burkina Faso et du Gabon, etc., nous allons étudier les droits des enfants légitime et naturel dans les pays africains.

Sous réserve de quelques divergences propres aux codes de chaque pays, on peut d'ailleurs parler d'une certaine uniformisation des statuts personnels en Afrique francophone ; dans l'ensemble, les mêmes dispositions se retrouvent dans presque tous les codes.

Avec pour centre d'intérêt les dispositions favorables aux enfants naturels, nous allons relever les observations provenant de la lecture croisée de ces codes.

Au Burkina Faso, le législateur n'a retenu que quatre (4) cas à l'article 459 du code des personnes et de la famille dans lesquels il juge possible la déclaration judiciaire de la paternité hors mariage :

- l'enlèvement ou le viol, lorsque l'époque de l'enlèvement ou du viol se rapportera à celle de la conception,

- la séduction à l'aide de manoeuvre dolosives, abus d'autorité, promesse de mariage ou fiançailles,

- lorsque le père prétendu et la mère ont entretenu pendant la période légale de conception des relations stables et continues,

- lorsque le père prétendu a pourvu ou participé en qualité de père de l'enfant à l'entretien de la mère pendant la période de la grossesse, ou à l'entretien ou à l'éducation de l'enfant.

Contrairement donc au législateur béninois, le législateur burkinabé ne crédibilise pas « le cas où il existe des lettres ou quelque autre écrit émanant du père prétendu, propre à établir la paternité d'une manière non équivoque », car il ne le cite pas. Il ne parle pas non plus de paternité naturelle, mais de paternité hors mariage.

Par contre, le troisième cas qu'il retient, à savoir celui où le père prétendu et la mère ont entretenu pendant la période légale de conception des relations stables et continues, correspond au quatrième cas retenu par les articles 340 ancien du code civil français et 333 du code béninois des personnes et de la famille, à savoir le concubinage notoire pendant la période légale de conception.

Enfin, le législateur burkinabé a retenu, à la différence de son homologue béninois, le cas où le père prétendu a pourvu ou participé en qualité de père de l'enfant à l'entretien de la mère pendant la période de la grossesse.

Au Burkina Faso, aucune contestation n'est plus recevable, quand il existe une possession d'état conforme à la reconnaissance et qui a duré dix ans au moins depuis celle-ci, à moins que l'action ne soit introduite par un autre parent, l'enfant lui-même ou les parents véritables.

Contrairement à la situation qui a prévalu pendant longtemps en matière de contestation de paternité, la loi n° 2002-07 portant Code des personnes et de la famille au Bénin a emboîté le pas à la loi ZATU N°AN VII 0013/FP/PRES du 16 novembre 1989, portant institution et application d'un Code personnes et de la famille au Burkina Faso, pour supprimer le monopole traditionnellement concédé au mari.

Le code burkinabé en son article 733 alinéa 1 supprime, à l'instar du code béninois des personnes et de la famille, les distinctions précédemment faites entre les enfants compte tenu du sexe ou de l'âge.

Au Burkina Faso, le législateur prévoit à l'article 435 du code des personnes et de la famille que « L'enfant né hors mariage, dès lors que sa filiation est établie à l'égard de ses père et mère et que ceux-ci se trouvent réunis par les liens du mariage, est réputé né dans le mariage ».

Cependant, le législateur béninois n'a même pas voulu, à l'instar de son homologue burkinabé, concéder aux enfants naturels la « solution de secours » que présente la légitimation par autorité de justice.

En effet, c'est là un procédé qui aurait pu atténuer un peu les conséquences dues à l'interdiction de la double filiation pour les enfants et leur offrir une issue acceptable. La légitimation est une institution qui a pour but de conférer l'état d'enfant légitime à un enfant naturel ; par son effet donc, un enfant naturel, qu'il soit simple, adultérin ou incestueux, acquiert les droits d'un enfant légitime.

Pour qu'elle puisse avoir lieu, il faut :

1) que le mariage soit impossible entre les parents de l'enfant, ce qui signifie que la légitimation est irrecevable si les parents peuvent se marier mais ne le veulent pas. En effet, le législateur n'a pas institué la légitimation par autorité de justice pour offrir aux parents un choix entre deux voies parallèles indifféremment ouvertes à eux.

L'impossibilité du mariage peut résulter soit de l'existence d'un empêchement tenant à un lien de parenté ou d'alliance, soit du décès d'un des parents, soit de ce que l'un des parents est déjà marié avec une autre personne et qu'il ne veut pas divorcer ou qu'il ne peut pas divorcer.

2) que la filiation naturelle de l'enfant soit légalement établie à l'égard du ou des requérants. Les enfants incestueux dont la filiation ne peut être établie qu'à l'égard d'un seul parent ne peuvent donc pas faire l'objet d'une légitimation demandée conjointement par les deux parents. Mais rien n'interdit qu'ils soient légitimés à la demande de celui de leurs parents au regard duquel leur filiation est légalement établie.

3) que l'enfant ait la possession d'état d'enfant naturel à l'égard des parents qui requièrent sa légitimation. Cette condition permet de faire obstacle aux demandes qui ne correspondent pas à l'intérêt de l'enfant.

4) enfin, que le parent de l'enfant désireux de le légitimer obtienne l'autorisation de son conjoint à cette fin si, au temps de la conception, il se trouvait dans un lien de mariage qui n'est pas encore dissout. Cette condition permet d'éviter que l'époux adultère puisse imposer une légitimation à l'époux victime de cet adultère.

Enfin de compte, la légitimation par autorité de justice présente énormément d'intérêts pour tous les enfants naturels.  Malheureusement, nulle part dans notre code des personnes et de la famille, il n'a été prévu la possibilité d'un recours à cette technique. Il est donc clair que, consciemment, le législateur béninois s'est abstenu de donner le moindre choix aux enfants incestueux.

Par la technique de la légitimation par autorité de justice, ils auraient pu se voir donnés la latitude, la possibilité d'être légitimés par l'un de leurs parents. Et une fois légitimé, l'enfant précédemment naturel a les mêmes droits et devoirs que l'enfant légitime.

En son état actuel, le code béninois des personnes et de la famille ne fait plus aucune mention de l'action à fins de subsides, contrairement au code burkinabé36(*) qui a reconduit cette technique juridique. Au terme de cet article «Tout enfant dont la filiation paternelle n'est pas légalement établie peut réclamer des subsides à celui qui a eu des relations avec sa mère pendant la période légale de conception (...) ». 

S'agissant de la filiation naturelle, l'acte de naissance ne peut prouver que l'accouchement37(*). En revanche, l'enfant légitime peut en exhibant son acte de naissance se prévaloir de sa filiation : ce qui était injuste et dégradant. Mais le CPF rompt irrémédiablement avec cette option et affirme que « l'indication du nom de la mère sur l'acte de naissance de l'enfant suffit à établir la filiation maternelle... »38(*) . Il s'agit d'un changement notable précédemment adopté par les législateurs gabonais et sénégalais dans leur code de la famille4. Mais les innovations du CPF dépassent ce changement.

En ce qui concerne la suppression de la discrimination faite à l'enfant naturel, le CPF a pris le contre pied du droit moderne français en vigueur au Bénin à l'instar de l'article 22 de la loi ivoirienne N° 64-379 du 7 décembre 1964 relative aux successions et de l'article 413 du code de la famille du Togo.

Alors que la loi ivoirienne se contente de la preuve par témoins, le code béninois des personnes et de la famille exige à l'alinéa 3 de son article 329, et à l'exemple du droit burkinabé, la preuve par tous moyens pour la contestation de la filiation naturelle.

S'agissant de la forme de l'aveu, les rédacteurs du code béninois, à l'instar du législateur ivoirien parlent de lettres ou de quelque autre écrit. Sur la base des interprétations de la jurisprudence, on a pu retenir comme exemple d'écrits, les photocopies de lettres, un écrit signé du père prétendu.

En cas de non respect de l'article 325 (défaut de notification pour valider la reconna issance), le législateur sénégalais indique non pas la suppression du droit successoral de l'enfant, mais seulement la réduction de moitié39(*).

Au total, le législateur du CPF peut bien s'inspirer des droits des pays africains qui ont légiféré en la matière, afin de supprimer les inégalités existantes entre les enfants naturels et les enfants légitimes.

Paragraphe 2 - L'expérience des pays africains

L'étude des droits successoraux des enfants légitime et naturel dans les pays choisis nous a permis de constater que seul le fait que la législation existe ne garantit pas l'attribution effective de droits successoraux aux enfants naturels.

En effet, dans beaucoup de pays africains, l'avènement du Code des Personnes et de la Famille n'a en réalité pas changé grand-chose aux moeurs.

Au Burkina Faso, on expose que depuis près de 15 ans que le pays est doté d'un code, on note toujours une ignorance de leurs droits par les bénéficiaires. D'où la nécessité d'organiser des séances de sensibilisation et des actions de réprimandes en direction des contrevenants à la loi. On initie des projets dans le but de renforcer la conscience et le respect des droits des enfants. Des formations et enseignements dans le but de prendre connaissance de leurs droits fondamentaux sont donnés aux groupes sociaux, sous le financement des Organismes Internationaux tel que l'UNESCO, la DANIDA avec la participation des ONG locales.

Au Togo, malgré l'existence du Code, les enfants naturels continuent de subir les différentes sortes de servitudes qui humilient l'enfant naturel. Et pourtant selon leur code des personnes et de la famille, les enfants ont les mêmes droits successoraux.

Dans d'autres pays encore, on pourrait croire qu'il est encore loin, le moment où l'enfant naturel ira à la succession.

De façon générale, on retient que les causes du non-respect des droits des personnes et dans ce cas spécifique, des droits successoraux des enfants naturels sont :

- ignorance de l'existence des textes ou difficultés de leur mise en oeuvre ;

- méconnaissance et complexité des procédures de protection de ces droits ;

- manque de formation des organes judiciaires ;

- peur du prétoire.

Dans les différents pays étudiés, les stratégies de lutte préconisées pour garantir l'attribution effective de droits successoraux aux enfants naturels sont les suivants :

- informations sur les avantages de l'attribution des droits successoraux aux enfants naturels ;

- valorisation des enfants au sein des communautés religieuses, sociales, professionnelles et politiques ;

- promotion du mariage civil ;

- règlements impartial et rapide des contentieux entre les couples ;

-plaidoyer pour une application effective des textes par les acteurs judiciaires ;

- changement de mentalité à tous les niveaux ;

- volonté politique à légiférer, à développer.

Car, selon Madame Haridiata DAKOURE, écrivain de nationalité burkinabé, « Les acteurs qui sont chargés soit de créer les lois, soit d'appliquer les règles coutumières ou légales doivent être les premiers agents du changement. L'exercice et le respect des droits dépendent dans une très large mesure, des acteurs judiciaires (magistrats, avocats et police judiciaire) ; ils dépendent également des acteurs extrajudiciaires tels que les chefs traditionnels et religieux qui interviennent dans la résolution informelle des conflits »40(*).

Nous pouvons donc en déduire qu'il ne suffit pas seulement de prendre des lois pour voir s'améliorer au Bénin, le statut des enfants naturels. Il faudrait donc déjà, en même temps que le Code entre en vigueur, commencer à mettre en application les recommandations de ces pays qui l'ont précédé dans cette pratique.

CHAPITRE II :

NOS SUGGESTIONS

Par respect pour les droits de l'homme et au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant béninois, nous devons aller vers une vision de justice à l'égard de l'enfant naturel. En passant par une rénovation du droit de la filiation au Bénin lui accordant ainsi des droits successoraux et ne perdant pas de vue qu'il faut une équité de la loi envers l'enfant incestueux. Et puisque «légiférer c'est choisir, choisir c'est éliminer »41(*), le législateur du CPF devra choisir de supprimer les divergences du droit telles qu'elles sont contenues dans le code.

Il s'agit pour nous à présent, d'apprécier le principe d'égalité entre les enfants et de nous projeter dans l'avenir afin d'examiner ce que serait sa mise en oeuvre concrète.

Dans une première section intitulée: Pour la prévalence d'une justice sociale en matière successorale, nous ferons des propositions adéquates et préciserons leur intérêt au regard du sort des enfants adultérins et incestueux - l'enfant naturel simple, étant lui, assimilé désormais à un enfant légitime.

Dans une seconde section qui portera: La nécessité de révision de certaine dispositions du code, nous montrerons que le CPF recèle de dispositions discriminatoires et controversées à l'égard des enfants naturels qu'il convient de réviser.

SECTION I : POUR LA PREVALENCE D'UNE JUSTICE

SOCIALE EN MATIERE SUCCESSORALE

Les analyses faites jusque-là de la situation des enfants nés hors mariage révèlent que l'enfant incestueux est toujours victime d'une certaine discrimination. Il urge alors que la loi corrige cette situation en lui permettant d'établir normalement sa filiation et de jouir totalement des droits qui lui reviennent en tant qu'enfant (paragraphe I).

Au lieu de s'en prendre à des innocents, elle devrait veiller à prévoir des normes assez sévères pour décourager toute personne tentée de commettre, soit l'adultère, soit l'inceste ou pour punir ceux qui s'en seraient rendus coupables. Non seulement cela éviterait les injustices, mais ce serait la meilleure façon de combattre le mal à la racine (paragraphe II).

Paragraphe 1 - Pour une équité de la loi envers l'enfant naturel

Contrairement aux autres enfants qui peuvent librement établir leur filiation et bénéficier des droits découlant de cette filiation, l'enfant incestueux se trouve obligé de ne faire constater la sienne qu'à l'égard d'un seul de ses auteurs, et implicitement, de ne pouvoir prétendre à des droits qu'envers celui-là qui l'a reconnu.

Non seulement, il se trouve privé de la moitié de ses droits successoraux, mais il ne peut prétendre à des aliments que vis-à-vis d'un seul parent, celui qui l'a reconnu, conformément aux dispositions de l'article 392 du code des personnes et de la famille.

Il faut avoir le courage de reconnaître que c'est là une situation défavorable et fort ennuyeuse pour des êtres qui n'ont pas demandé à naître, encore moins dans des circonstances aussi infamantes que l'inceste.

C'est un point qui, comme nous essayons de le démontrer, est difficile à accepter pour nous, compte tenu des diverses raisons évoquées.

Bien entendu nous comprenons le dilemme des auteurs de la réforme qui devaient penser en même temps aux intérêts de la famille légitime et à ceux des enfants nés hors de ce cadre légal : promouvoir la famille légitime et établir en même temps une égalité stricte entre enfants naturels et légitimes ; accepter la double filiation de l'enfant incestueux sans mettre en péril la morale collective n'est pas chose aisée, c'est certain.

Mais il faut bien pouvoir aller au-delà de ces difficultés qui, dans le fond, sont beaucoup plus le fruit de la morale trop souvent hypocrite, malheureusement. Il est préférable de mettre la société face à ses responsabilités sans trop de ménagement ; autrement dit, la forcer à diagnostiquer elle-même ses problèmes et à les résoudre courageusement.

Jusque-là, la société béninoise n'a rien fait d'autre que de fuir les questions brûlantes et en faire des tabous : nous n'en voulons pour prouver que la question même d'inceste qui reste inabordable ; à croire qu'elle engendre un malaise difficile à supporter.

Pourtant, il faudra bien un jour regarder la réalité en face et nous pensons qu'il en est temps ; ce serait stupide et regrettable de se leurrer plus longtemps, soi-disant pour préserver une morale aux dessous hypocrites.

D'un autre côté, il faut dire que le dilemme auquel ont fait face les concepteurs de notre CPF, au-delà de son ampleur, n'était pas difficile à surmonter.

En effet, préserver la famille légitime et protéger les enfants naturels en même temps est une chose tout à fait possible, car s'il faut combattre la famille naturelle, c'est à ceux qui la créent qu'il faut s'en prendre et non aux enfants qui n'en sont que des dérivés et aussi des victimes innocentes.

En leur état actuel, les dispositions relatives spécifiquement aux enfants incestueux ont quelque chose d'anormal et une relecture s'impose.

D'ailleurs, notre pays a bien consenti à ratifier le traité sur les droits de l'enfant et il n'y a pas de raison à ce qu'une catégorie d'enfant soit écartée et privée d'une part de ses droits : ce ne serait pas logique ; de plus, ce serait injuste.

Mieux, le Bénin pourrait bien aller jusqu'à se faire condamner pour les discriminations contenues dans son CPF, un peu à l'exemple de la France qui s'est vue condamnée par la cour européenne des droits l'homme et des libertés fondamentales par l'Arrêt Mazurek du 1er février 200042(*) pour les discriminations contenues dan sa législation à l'encontre de certains enfants adultérins.

On a pu considérer en effet que le but poursuivi par le gouvernement français, qui est la protection de la famille, ne peut être considéré comme légitime qu'à la condition que les moyens employés pour y parvenir soient proportionnés et adéquats ; or, la discrimination résultant de la différence de traitement entre les enfants adultérins et les enfants légitimes, quant à la succession de leurs auteurs, ne traduisait pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé43(*).

Le parlement béninois devrait donc veiller à ce que les textes indexés soient effectivement relus et corrigés en faveur des enfants incestueux. Parce que «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits»44(*), et que le Bénin a ratifié la plupart des conventions régionales et internationales portant sur la lutte contre les discriminations à l'égard des enfants45(*).

Ces derniers demeurent en effet des enfants, au même titre que les autres, et de ce point de vue, ils ont tout autant besoin de sécurité, d'une famille normale, de parents qui puissent les reconnaître et les aimer ; ce que ne pourra jamais leur procurer un environnement aussi discriminatoire que celle actuellement générée par l'article 319 du CPF en son alinéa 3.

Les enfants incestueux devraient donc pouvoir bénéficier de la totalité de leurs droits à l'égard de chacun de leurs auteurs, sans aucune restriction comme c'est aujourd'hui le cas. Il est nécessaire que la loi les réintègre totalement dans leurs droits, qu'il s'agisse des droits successoraux ou des droits alimentaires.

L'état béninois en a le devoir et aussi les moyens : une législation non discriminatoire. Pour ce faire, les dispositions du code relatives à l'établissement de la filiation incestueuse, en l'occurrence l'article 319, alinéa 3 du CPF doivent être revues et rectifiées dans ce sens. C'est en effet, à ce niveau que se joue l'essentiel, c'est-à-dire le fondement juridique de la filiation.

A défaut, il faudrait tout au moins que le législateur opte pour la légitimation par autorité de justice, ainsi d'ailleurs que son homologue français l'a fait46(*), car il s'agit là d'une véritable « solution de secours » pour tous les enfants naturels en général et pour l'enfant incestueux en particulier.

C'est pour cela que, rester indifférent à la situation actuelle de ces enfants et appliquer le code en l'état serait regrettable à notre avis. Il nous semblerait en effet plus juste que ceux-là même qui se sont rendus coupables d'actes prohibés par la loi soient plutôt directement punis, c'est-à-dire personnellement sanctionnés (paragraphe 2).

-

Paragraphe 2 - Nécessité d'introduire des mesures dissuasives

S'attaquer à l'enfant incestueux dans la perspective de promouvoir la famille légitime est une erreur ; nous le pensons, c'est se tromper totalement de cible.

Il serait en effet plus juste et plus intelligent d'accentuer plutôt la répression pénale sur les auteurs de cet acte répréhensible.

Le droit pénal, jusque-là, aborde la question de l'inceste avec une fausse pudeur, si bien que l'infraction n'est pas spécialement réprimée ; le droit civil, quant à lui semble pratiquement impuissant devant les auteurs de cet acte ; et c'est là une situation totalement anormale.

En clair, le législateur béninois n'a manifestement jamais prévu de mesures punitives suffisamment fortes pour décour ager réellement les uns et les autres.

L'inceste, et il en est de même de l'adultère, est devenu un fait de plus en plus courant. On s'en accommode, on s'y habitue et, hypocritement bien sûr, à petits pas sûrs, on s'y plaît. Des pères de famille se plaisent à entretenir des relations sexuelles avec leurs filles, avec leurs belles soeurs, etc ; des frères et soeurs ne s'embarrassent pas pour orienter leurs rapports dans le sens où ils ne devraient pas ; il en de même entre diverses personnes de proches parenté ou alliées et nous en somme tous conscients.

Dans la plupart des cas, ce sont des relations qui sont soigneusement tenues secrètes, même si l'une des parties n'est pas consentante ; à citer par exemple la situation d'une fille que le père oblige à coucher avec lui et qui n'a pas le courage de dénoncer celui-ci ... Les cas foisonnent ; et en tout état de cause, c'est une situation d'autant plus préoccupante que si l'on ne réagit pas promptement en légiférant en la matière, on finirait par faire face à une société quasiment irrécupérable.

A une certaine époque pourtant, et jusqu'à présent, dans certaines régions du Bénin, l'inceste est rejeté au point que ceux qui s'en rendent coupables ne sont pas tolérés. Ils sont en effet purement et simplement expulsés, contraints de quitter la région. On considérait, entre autres, que c'était une question de santé publique.

Quant aux enfants issus de ces relations, loin d'être écartés, sont récupérés et ne subissent aucun traitement particulier ; ils sont acceptés sans problème et intégrés dans la société comme les autres enfants.

Dans d'autres régions, les populations elles-mêmes se chargent de châtier les délinquants en les faisant promener nus tout autour du marché (Savalou) ou en les éliminant tout simplement (vindicte populaire). Parfois encore, la peine de mort est décidée pour les amants incestueux sur décision du Roi.

Evidemment, il s'agit là de sanctions extrêmes et surtout incompatibles avec le respect des droits de l'Homme ; mais toujours est-il que ces sociétés marquaient clairement leur désapprobation de l'acte d'inceste ; malheureusement, on ne peut pas en dire autant de la législation applicable jusque-là dans notre pays ; nulle part il ne figure la répression de l'inceste et c'est davantage dommage avec le quasi-silence du CPF en la matière.

Les rédacteurs de ce code, au lieu d'aller à la source d'un aussi mauvais comportement que l'inceste en réprimant correctement les coupables, s'en prennent lâchement aux enfants qui naissent de cet acte. C'est là une attitude pour le moins ridicule, mais surtout hypocrite, irresponsable et révoltante : il n'est pas normal que les concepteurs de normes aussi importantes que celles du code des personnes et de la famille n'aient pas le courage d'appréhender les faits tels qu'ils s'imposent. Minimiser un fait aussi condamnable que l'inceste au point de négliger l'élaboration de dispositions fermes à son encontre nous semblent imprudent ; et faire subir le martyre aux enfants en guise de sanction de l'infraction est décevant.

Pour nous situer dans un cadre plus englobant, c'est-à-dire en incluant les enfants adultérins, il nous faut faire savoir que plutôt que de s'acharner contre les enfants nés, soit de l'infidélité de leurs parents, soit de leurs relations incestueuses, le législateur devrait donc réfléchir à des dispositions suffisamment dures pour freiner toute velléité d'infidélité ou d'inceste.

En définitive, et à l'exemple de M. Noël A. GBAGUIDI, nous estimons qu'il va falloir que de nouvelles dispositions soient fixées en conséquence, que la commission des lois étudie très sérieusement la possibilité de renforcer le CPF par de sérieuses mesures punitives ; qu'en clair, l'on sanctionne solidement et correctement les responsables de tels actes ; il urge pour ainsi dire que le législateur prenne ses responsabilités et sévissent réellement. Ce qui est sûr, ce serait la meilleure façon de combattre, de supprimer progressivement, le mal à la racine et, par la même occasion, éviter les injustices faites envers les enfants qui, en réalité, nous ne dirons jamais assez, sont de véritables innocents.

SECTION II : LA NECESSITE DE REVISION DE CERTAINES

DISPOSITIONS DU CPF

Le droit béninois, à travers le code des personnes et de la famille, tel que envisagé dans les droits successoraux des enfants recèle de dispositions discriminatoires et controversées à l'égard des enfants naturels. Comme le dit RIPERT « Il appartient à la jurisprudence de corriger par une interprétation raisonnable, l'incohérence des dispositions légales »47(*). Ainsi, pour une amélioration équitable et sans polémique du statut juridique de l'enfant naturel, nous suggérons la révision de certaines dispositions du code des personnes et de la famille.

Paragraphe 1 - Nécessité d'une clarification des articles 392 et 325

du Code des Personnes et de la Famille

L'article 392 alinéa 2 confirme la volonté du CPF de faire un statut inférieur à l'enfant naturel. En effet, le CPF soumet l'entrée de l'enfant naturel au domicile conjugal au consentement du conjoint.

L'application de l'article 392 alinéa 2 pourrait amener à exclure l'enfant né hors mariage de toute la famille. Ainsi, les conjoints de ses père et mère, peuvent refuser l'un après l'autre, leur consentement pour l'entrée de l'enfant naturel au domicile conjugal. L'enfant constitue alors un corps étranger dont la présence gène la famille légitime qui est la cellule de base de toute organisation sociale.

Il est injuste que l'enfant né dans des circonstances indépendantes de sa volonté, soit victime de la faute de ses parents. Ainsi, pour maintenir une certaine cohérence de l'édifice juridique, les auteurs du CPF doivent reformuler l'article 392 du CPF en y ajoutant un second alinéa au terme duquel, l'enfant naturel pourra intégrer la famille légitime de son auteur sans aucune restriction.

Un notable Aïzo a affirmé que les enfants adultérins et incestueux ne sont pas défavorisés par la coutume locale en matière successorale, parce qu'une différence pourrait attirer l'attention sur l'origine de leur filiation et leur causer des préjudices psychique48(*).

Cette opinion devrait inspirer les auteurs de la réforme.

Les enfants ont besoin d'un environnement non-discriminatoire pour leur protection psychologique. Il est injuste que l'enfant né dans des circonstances indépendantes de sa volonté soit victime de la faute de ses parents.

En ce qui concerne l'article 325 du CPF, il dispose que « la volonté de reconnaissance par un homme marié ou une femme mariée d'un enfant né hors mariage doit être notifiée à son conjoint par écrit, soit par exploit d'huissier ».

La notification est une condition de validité de la reconnaissance.

Le projet de code limitait les effets de la reconnaissance pour défaut de notification. Cette restriction portait sur des intérêts pécuniaires et s'appliquait à l'enfant adultérin.

Mais le CPF n'a plus précisé ce qui adviendrait à l'enfant naturel dont l'auteur de la reconnaissance aurait transgressé l'article 325. Logiquement, une telle reconnaissance ne serait pas valable et l'enfant sera exclu de tous droits successoraux.

Les auteurs du CPF ont trouvé un prétexte pour protéger la famille légitime contre les enfants naturels.

Mais le moyen employé par le législateur ne se justifie pas pleinement.

L'Etat béninois, en ratifiant le Traité sur les droits de l'enfant s'engage à faire accepter par son opinion publique nationale, que les enfants, même incestueux ont besoin d'une protection particulière. Cette protection ne doit faire l'objet d'aucune discrimination due à l'origine de la filiation.

De plus, le contexte international49(*) indique, en cas de non respect de l'article 325, non pas la suppression du droit successoral de l'enfant, mais la réduction ; de moitié par exemple comme décidé par le législateur sénégalais50(*).

En effet, le défaut de notification peut résulter de l'ignorance de la loi.

S'agissant toujours de l'article 125, le consentement du conjoint trompé à la reconnaissance de l'enfant par l'époux adultère51(*) est sans intérêt même si cet enfant est susceptible d'être en concours avec les membres de la famille légitime de son auteur et qu'il a été conçu pendant le cours du mariage qui leur confère cette légitimité.

En conséquence, pour éviter toute interprétation individuelle liée au silence observé par le code sur ce point, nous proposons qu'il soit précisé dans un second alinéa que le consentement du conjoint trompé est sans intérêt quant à la validité de la reconnaissance.

Paragraphe 2 - Nécessité d'étendre le domaine de l'article 126

du CPF.

L'article 126 alinéa 2 du CPF dispose que : « Seul le mariage célébré par un officier de l'état civil a des effets légaux ». Le CPF a ainsi consacré la monogamie comme la seule forme légale du mariage au Bénin. En d'autres termes, tout mariage célébré sous la coutume religieuse ne peut avoir d'effets légaux, c'est-à-dire ne peut être protégé ni bénéficier des avantages de loi, comme le droit de succession. Le mariage sur lequel repose les droits successoraux des enfants doit obligatoirement être un mariage à l'état civil.

Cette disposition limite le caractère de la réforme sur la filiation car, dans notre environnement socio-culturel, le mariage civil n'a de valeur qu'aux yeux d'une minime fraction de la population. Il s'agit d'une minorité de personnes qui selon une expression consacrée `' ont bu à grands traits la coupe du progrès''.

D'autres se soumettent à l'institution du mariage pour bénéficier des avantages professionnels. Mais pour la grande majorité que constituent les populations rurales desquelles on attend de profondes mutations, il y a mariage lorsque la dot a été payée ou parfois même lorsque l'homme et la femme vivent en concubinage avec ou sans enfants (mariage de fait).

C'est donc difficile pour la majorité des béninois de se soumettre aux conditions de forme du mariage.

L'article 126 al 2 se trouve être une reprise du droit moderne52(*) et ne s'inscrit pas dans notre environnement socio-culturel composé pour la plupart de populations rurales.

Alors, pour une application complète du régime d'assimilation, le législateur gagnerait à étendre le domaine de l' article 126 du CPF.

Suivant le dictionnaire LAROUSSE, le mariage est un acte solennel par lequel un homme et une femme établissent ente eux une union dont les conditions, les effets et la dissolution sont régis par les dispositions juridiques en vigueur dans leur pays, par les lois religieuses ou par la coutume.

Il ressort de cette définition que même le mariage religieux célébré par le ministre du culte tout comme le mariage coutumier qui est le paiement de la dot constituent également une forme de mariage.

Il est souhaitable que le législateur consacre le mariage coutumier et le mariage religieux. L'essentiel est que le mariage coutumier soit enregistré dans le registre du chef de village et que le mariage religieux soit enregistré dans le registre du ministre du culte. Ainsi, tous les enfants qui naîtront de ces différents mariages seront légitimes.

Outre ces précisions qui devraient être apportées à la rédaction des articles, tant qu'elles n'en altèrent ni le sens, ni la portée, une large vulgarisation du texte pourrait permettre d'éclaircir les notions et ainsi une meilleure appropriation de ce code pa r les destinataires que sont les populations.

CONCLUSION GENERALE

Une chose est évidente, c'est que le législateur du code béninois des personnes et de la famille s'est montré vraiment audacieux dans les innovations introduites au niveau des dispositions sur la succession, après le traitement discriminatoire qui a été fait pendant longtemps aux enfants nés hors mariage. Désormais, comme l'enfant légitime, l'enfant naturel peut librement et légalement faire constater sa filiation et prétendre à tous les droits qui lui sont dus. C'est là une heureuse initiative, étant donné qu'elle s'inscrit dans l'optique d'égalité qui s'imposait par rapport à la situation des enfants.

D'un autre côté, nous avons pu constater que le législateur n'est pas allé jusqu'au bout de sa volonté d'égalité : certains enfants continuent de se voir traités moins bien encore que d'autres, et ce, sur la base de certaines raisons qui ne nous semblent pas justifiées. D'où la problématique de l'applicabilité du principe d'égalité des droits consacré par le nouveau régime des successions au Bénin.

Face à cet état de chose, et compte tenu des réflexions faites le long de ce travail, nous estimons que le législateur devrait procéder à une relecture des textes et à des rectifications aux fins d'étendre aux enfants incestueux, la possibilité d'établir leur filiation comme tous les autres enfants et d'introduire des mesures plus dissuasives envers ceux qui se rendent coupables d'adultère et d'inceste.

En cela, le législateur devrait étudier les points du code relatifs à la filiation naturelle qui posent des problèmes, étudier la possibilité d'introduire la technique de la légitimation par autorité de justice pour tous les enfants naturels, ainsi que des mesures dissuasives à l'encontre des auteurs d'actes prohibés par la loi.

L'absence de dispositions explicites et suffisamment efficaces en matière de sanction dans les divers cas de violation (adultère, inceste) fait en effet penser à une sorte de relâchement qui encourage le non respect de la loi. C'est une situation anormale que le législateur devrait prendre en compte, car elle engendre beaucoup de déconvenues à divers niveaux : les réels coupables ne subissent aucune sanction, maintiennent leurs mauvais comportements et entraînent d'autres personnes dans leurs vices pendant que des enfants se voient privés de leur droit de jouir pleinement d'une situation juridique.

A défaut de pourvoir revenir sur l'élaboration des textes qui suscitent à polémique, nous préconiseront aux parlementaires et juristes béninois de prévoir des lois additives susceptibles de les préciser ou de les corriger. En tout état de cause, il est absolument nécessaire que des dispositions claires et sérieuses soient fixées et imposées au respect de tous : les valeurs du mariage et de la famille légitime ne s'en trouveraient que plus préservées, sans pour autant que des injustices soient crées.

L'intérêt des enfants ne doit être délaissé pour aucune raison, qu'ils soient légitimes, naturels simples, adultérins ou incestueux. « Vi wè nyi lé » dit un adage fon, ce qui signifie « l'enfant est le bénéfice ». Un enfant, comme nous le dirons toujours, est et reste un enfant. Et l'enfant, parce qu'il est le devenir de toute société, on ne pourrait et on ne devrait pas se désintéresser de son sort.

Il est donc important de poursuivre les réflexions sur les conséquences réelles de la réforme du droit des personnes et de la famille. Sur ce dernier point, c'est à la doctrine et à la jurisprudence qu'il reviendra de peaufiner l'oeuvre entamée et de nouvelles réformes viendront combler les failles constatées. Aucune oeuvre humaine n'étant parfaite, tous les systèmes législatifs sont passés par-là.

De par sa fragilité et son manque de maturité, l'enfant est un être à protéger ; de plus il est un homme en devenir et, dans cette perspective, la société et l'Etat béninois se doivent absolument de créer, l'un par une attitude non discriminatoire et l'autre par une législation appropriée, les conditions harmonieuses de son développement dans la société./.

ANNEXES

SOMMAIRE DES ANNEXES

ANNEXE 1 : Code des Personnes et de la Famille : Dispositions relatives à la filiation

ANNEXE 2 : Code des Personnes et de la Famille : Dispositions relatives à la

succession des descendants

ANNEXE 3 : Code Civil Français de 1958 : Dispositions relatives à la filiation

ANNEXE 4 : Code Civil Français de 1958 : Dispositions relatives à la

succession des descendants

BIBLIOGRAPHIE

l - OUVRAGES GENERAUX

1- CARBONNIER Jean: Droit civil : la famille Tome 2, Paris, PUF, 1960, 421 pages.

2- CHEVALLIER (J.), Droit civil, 1ère année, Paris, SIREY, 1997, 573 pages.

3- FLOUR Jacques et SOULEAU Henri: Les successions, Paris, Armand Colin, 1991, 375 pages.

4- GRIMALDI Michel, Droit patrimonial de la famille, 2ème partie, Les successions, Paris, Dalloz Action, 1998, 270 pages.

5- MARTY (G.) et RAYNAUD (P.) Droit civil, Tome 1, Paris, édition Sirey, 1967, 846 pages.

6- MAZEAUD (Henri, Léon, Jean) Leçons de Droit civil: Les successions Paris, Editions Montchrestien, 1968, 932 pages.

7- RIPERT (G.) et BOULANGER (J.), Traité de Droit Civil Tome 1, Paris, LGDJ, 1957, 655 pages.

II - OUVRAGES SPECIALISES

1- HAUSER Jean, La Filiation, Paris, DALLOZ, 1996, 83 pages.

2- JOUAN (M-P) : A la recherche des enfants de rue, Paris, édition Karthala, 1998, 270 pages.

3- KOUASSIGAN Guy: Quelle est ma loi? Tradition et modernisme dans le droit privé de la famille en Afrique noire francophone, Paris, édition A. Pedone, 1974, 309 pages.

4- PLANIOL Marcel et RIPERT Georges, Traité pratique de droit civil français : La Famille, Paris, Tome II, LGDJ, 1952, 1086 pages.

III - ARTICLES DE DOCTRINE

1. AKANKOSSI DEGUENON Véronique : « De l'intérêt des enfants en Droit positif béninois » RBSJA, numéro spécial, Décembre 1990, 16 pages.

2- GBAGUIDI Noël : « Egalité des époux, égalité des enfants et le projet de Code des personnes et de la famille du Bénin » RBSJA, numéro spécial, Octobre 1995, 26 pages.

3- SAUJOT (N.) :« La condition juridique des enfants adultérins », in Revue Trimestrielle de Droit Civil, 1996, 6 pages.

IV - MEMOIRES

1- ADENIYI Ganiyatou et DONOUMASSOU Pulchérie: Le droit successoral béninois et le projet de code des personnes et de la famille, Abomey Calavi, FASJEP/UNB, 1997, 60 pages.

2- ALLADAYE Clarisse et AMOUSSOU Eustache La filiation naturelle dans le code des personnes et de la famille au Bénin, Abomey Calavi, FADESP/UAC, 2004, 72 pages.

3- KEKE Franck Arnaud L'enfant né hors mariage dans le projet de code des personnes et de la famille au Bénin, Abomey Calavi, FASJEP/UNB, 2000, 82 pages.

4- PADONOU Vénéranda Le statut juridique de l'enfant adultérin dans le droit béninois : Analyse et Perspectives, Abomey Calavi, FADESP/UAC, 2004, 35 pages. 5- TCHIBOZO Jacques, Les successions dans le projet de code des personnes et de la famille du Bénin, Mémoire de DEA, Université de Perpignan, CERJEMAF, 2000, 147 pages.

6- YETCHE Micrète, Réflexions sur les droits successoraux de l'enfant naturel dans le Code des personnes et de la famille au Bénin, Abomey Calavi, FADESP/UAC, 2004, 58 pages.

V- TEXTES OFFICIELS ET CODES

1- Circulaire AP 128 du 19 mars 1931 portant Coutumier du Dahomey, Porto Novo, Imprimerie du Gouvernement, 1940.

2- Code civil applicable au Bénin (Edition 1958).

3- Loi 2002-07 portant Code des Personnes et de la Famille du Bénin, promulguée le 24 Août 2004 et publié au J.O. en décembre 2004, Présidence de la République, Imprimerie L.D. WHANNOU.

4- Code civil français, édition Dalloz, 2003.

6- Code Civil, Tome I Droit des Personnes et de la Famille en République de Côte d'Ivoire (Loi n° 64-379 du 7 octobre 1964) ;

7- Code des Personnes et de la famille du Togo (Ordonnance n°80-16 du 31 janvier 1980);

8- Code de la Famille de la République de Populaire du Congo (Loi n° 0073-84 du 17 octobre 1984) ;

9- Code Civil 2è partie de la République du Gabon (Loi n° 19/89 du 30 décembre 1989);

10- Code des Personnes et de la Famille du Burkina Faso (Loi Zatu an VII du 16 novembre 1989) ;

VI- AUTRES DOCUMENTS

1- Article 308835 du 9/03/2005 sur le site du quotidien français LIBERATION http://www.liberation.fr

2- Affaire MAZUREK c. FRANCE (Requête n° 34406/97) publié sur le site de la cour européenne des droits de l'homme http://www.credho.org/cedh/session 07-06.htm arrêts rendus en 2000.

3- http://www.jurismag.net/articles/article-adultérin.htm

4- http://playmendroit.free.fr/droit_civil/filiation_legitime.htm

3- R. GUILLEN et J. VINCENT, Lexique des termes juridiques, 12è édition, Dalloz, 1999.

TABLE DES MATIERES

Dédicaces 3

Remerciements 4

Répertoire des sigles et abréviations 5

Sommaire 6

Introduction Générale 7

Première partie : L'applicabilité de l'égalité des droits successoraux

des enfants légitime et naturel 13

Chapitre I : L'organisation des successions des enfants légitime et naturel 15

Section I : L'établissement du lien de filiation 15

Paragraphe I : Rapprochement des filiations légitime et naturelle 15

A- Liberté d'établissement de la filiation naturelle 16

B- Rapprochement en matière de contestation et de désaveu 25

Paragraphe II : Discrimination de l'enfant naturel 29

A- L'interdiction de la double filiation pour l'enfant incestueux 29

B- Une interdiction qui n'arrange pas le sort de l'enfant incestueux 31

Section II : Les effets successoraux des filiations légitime et naturelle 32

Paragraphe I : Consécration du principe d'égalité des droits 33

A- L'égalité des droits à l'égard des parents et autres ascendants 33

B- Les droits des parents à l'égard des enfants naturel et légitime 37

Paragraphe II : Persistance de la discrimination envers l'enfant naturel 40

A- Une succession amputée pour l'enfant incestueux 40

B- Une amputation qui s'étend au droit alimentaire 42

Chapitre II : Les difficultés d'application de l'égalité des droits successoraux des

enfants légitime et naturel 44

Section I : Les problèmes juridiques 44

Paragraphe I : Les insuffisances du principe d'égalité 44

A- Les imprécisions des articles 325 et 328 du CPF 44

B- La situation des enfants n'ayant pas de capacité successorale 46

Paragraphe II : Difficultés dans le temps et l'espace 47

Section II : Les pesanteurs psycho sociologiques 48

Paragraphe I : Le respect du mariage et des droits de la famille légitime 48

A- La remise en cause de l'institution du mariage 48

B- La protection des droits de la famille légitime 49

Paragraphe II : Le risque de dégénérescence des moeurs 50

Deuxième partie : Les perspectives pour la primauté du droit dans

l'application effective du nouveau régime juridique

béninois des successions 52

Chapitre I : Les enseignements tirés du droit comparé 54

Section I : Cas du droit français 54

Paragraphe I : Evolution des droits successoraux des enfants naturels

dans le droit français 54

Paragraphe II : Les droits des enfants naturels à l'issue de la réforme du droit

successoral français 57

Section II : Les apports de certains systèmes juridiques africains 59

Paragraphe I : Analyse des droits successoraux des enfants naturels dans le

contexte africain 59

Paragraphe II : L'expérience des pays africains 63

Chapitre II : Nos suggestions 65

Section I : Pour la prévalence d'une justice sociale en matière

successorale 65

Paragraphe I : Pour une équité de la loi envers l'enfant naturel 66

Paragraphe II : Nécessité d'introduire des mesures dissuasives 69

Section II: La nécessité de révision de certaines dispositions du CPF 71

Paragraphe I : Nécessité d'une clarification des articles 392 et 325 du CPF 71

Paragraphe II : Nécessité d'étendre le domaine de l'article 126 du CPF 73

Conclusion Générale 75

Annexes 78

Bibliographie 80

* 1 Héritage de la colonisation, l'ancien droit béninois a été marqué par un dualisme juridique dans les matières civiles. Ce dualisme qualifié d'archaïque, de source d'illusion et d'insécurité par la doctrine béninoise se caractérise comme suit : d'un côté, des individus relevant du statut moderne, de l'autre, ceux appartenant au statut coutumier.

* 2 GUILLEN R. et VINCENT J., Lexique des termes juridiques, 1999, Dalloz.

* 3 Les dispositions des articles 758, 759, 760, 762, 763 et 764 du code civil de 1958 accentuaient les différences entre enfants en matière successorale, le mariage et surtout la monogamie ayant pendant longtemps, été considérés par le colonisateur français comme étant les seuls types d'union valable. L'enfant légitime était avantagé dans la succession de ses auteurs (part successorale et représentation) au détriment de l'enfant naturel (part successorale amputée de moitié au profit de l'enfant légitime, exigence préalable d'une reconnaissance, représentation non admise, obligation de requérir auprès du tribunal l'envoi en possession etc.). L'enfant adultérin n'avait droit à rien dans la succession de son auteur l'ayant reconnu, tant qu'il subsistait des enfants légitimes au de cujus ou à son conjoint survivant. C'est-à-dire que quand bien - même sa filiation aurait été établie, il ne prétendrait à quelque part successorale que ce soit, qu'à la condition que tous ses frères (consanguins ou utérins selon le cas) légitimes, ainsi que le conjoint survivant, fussent tous morts. La loi ne lui accorde qu'une créance alimentaire encore que celle-ci disparaît lorsque l'auteur de l'adultère fait apprendre à l'enfant adultérin un art mécanique, ou n'importe quel autre métier, ou encore s'il lui verse en un coup, un certain capital. Il en est de même pour l'enfant incestueux.

* 4 «La famille est une entité orientée en priorité vers l'enfant, et l'établissement de la filiation ne mettait pas nécessairement en jeu des données biologiques  », Guy A. KOUASSIGAN, Quelle est ma loi ? Edition Pedone, 1974 P. 203.

2 Points 181 et suivant du Coutumier du Dahomey.

* 5 Ahomagnon Noël GBAGUIDI « Egalité des époux, égalité des enfants et le projet de code de la famille et des personnes du Bénin » RBSJA n° spécial octobre 1995 p. 23

* 6 En effet, les enfants incestueux sont interdits de double filiation à l'alinéa 3 de l'article 319 dudit code et, par suite, privés de la moitié de leurs droits successoraux.

* 7 Un enfant est dit légitime lorsqu'il est né d'un couple marié ou lorsqu'il a été conçu pendant le mariage de ses parents. Le code civil ne retient en effet que la date de conception de l'enfant pour déterminer s'il est ou non légitime. La période de conception s'étend du 300ème jour au 180ème jour précédant la date de la naissance de l'enfant.

2 Fabienne JOURDAIN THOMAS, Pascal CHASSAING et Richard CRONE, La filiation, 1ère commission du 91è Congrès des Notaires de France, Le Droit et l'enfant, Tours 21/24 mai 1995, page 156.

* 8 MAZEAUD Henri, Léon & Jean, Leçons de droit civil, Famille-Incapacités, tome 1er, Paris, éditions Montchrestien, 1968, page 290.

* 9 MAZEAUD Henri, Léon & Jean, Leçons de droit civil, op.cit., page 292

* 10 MAZEAUD Henri, Léon & Jean, Leçons de droit civil, op.cit. page 293

* 11 Fabienne JOURDAIN, Pascal CHASSAING et Richard CRONE, La filiation op.cit., page 156

* 12 MAZEAUD Henri, Léon & Léon, Leçons de droit civil, op.cit, page 293

* 13 MAZEAUD Henri, Léon & Jean, Leçons de droit civil, op.cit. page 303.

* 14 SARASSORO Yacinthe, L'enfant naturel en droit ivoirien, Les Nouvelles Editions Africaines, Abidjan-Dakar-Lomé, NEA-SUP, 1984, page 31.

* 15 MAZEAUD Henri, Léon & Jean, Leçons de droit civil op.cit., page 338.

* 1 MAZEAUD Henri, Léon & Jean, op.cit., page 301

* 16 Ahomagnon Noël GBAGUIDI, Egalité des époux, égalité des enfants et le projet de code de la famille et des personnes du Bénin, RBSJA N° spécial, octobre 1995, page 18.

* 17 Article 378 du Code béninois des personnes et de la famille

2 Il ne s'agit pas des femmes citadines qui ont généralement une « autonomie certaine sur le plan financier » selon Véronique AKANKOSSI-DEGUENON, De l'intérêt de l'enfant en droit positif, RBSJA

* 18 Toute personne qui y a intérêt, suivant une opinion de GBAGUIDI Ahomagnon Noël, « Egalité des époux, égalité des enfants et le projet de code de la famille et des personnes du Bénin » op.cit., p 21

* 19 Selon WEIL et TERRE «Cette disposition protégera l'auteur de la reconnaissance contre des manoeuvres dolosives en même temps qu'elle assure la conservation de l'acte et lui confère date certaine» Alex WEIL et François TERRE Droit Civil (Les personnes, la famille, les incapacités) 5ème édition Dalloz. 1983 P. 602.

* 20 Contrairement à l'article 337 du code civil édition 1958, l'article 325 ne fait état que de notification. La doctrine française est dans l'ensemble hostile à l'article 337. Cette hostilité aboutira à son abrogation en 1970. MARTY Gabriel, RAYNAUD Pierre, Introduction Générale : Etude du droit et des instituions judiciaires, les personnes, Page 945.

* 21 Article 762 alinéa 1 du Code civil

* 22 MAZEAUD (Henri et Léon), Leçons de droit civil, op. cit. P. 86

* 23 Article 328 du CPF. Le projet de code avait prévu pour ces enfants des subsides (article 337 al 1 du Projet de Code de Personnes et de la Famille) « ... à réclamer des aliments à toutes personnes ayant eu des relations sexuelles avec sa mère pendant la période légale de la conception ... »

* 24 Entendre par polygamie ici, polygynie seulement.

* 25 LAMINE Sidimé, in Encyclopédie Juridique d'Afrique, op.cit. p.393

* 26 C. SAUJOT La condition juridique des enfants adultérins, Revue Trimestrielle de Droit Civil, 1966

p. 144.

* 27 Dictionnaire Le Petit Robert 1, 1991.

* 28 N. SAUJOT, La condition juridique des enfants adultérins, op. cit. P 144.

* 29 « De nos jours, la stabilité des couples est devenue au Bénin, comme pratiquement partout ailleurs, une notion problématique. Les couples se font et se défont à un rythme inhabituel » Me Véronique AKANKOSSI DEGUENON citée par Vénéranda PADONOU in Le Statut Juridique de l'Enfant Adultérin dans le Droit Béninois : Analyse et perspectives, Mémoire de maîtrise en Droit, Université Abomey Calavi, 2003-2004, P. 25

* 30 Article 766 du Code Civil Edition 1958

* 31 J. HAUSER, La Filiation, Dalloz, 1996, P.3

* 32 La loi n° 72-3 du 3 janvier 1972 portant modification du statut des enfants nés hors mariage.

* 33 Sur l'ensemble des détails liés à cette réforme, voir Loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modifiant diverses dispositions du droit successoral en France.

* 34 Site du quotidien français LIBERATION http://www.libération.fr article 308835.

* 35 Il s'agit de la loi n° 64-379 du 7 octobre 1964 régissant les successions pour le cas de la Côte d'Ivoire, l'Ordonnance n° 80-16 du 31 janvier 1980 portant Code des Personnes et de la Famille au Togo, la loi n° 673/84 du 17/1/1984 portant Code de la Famille pour le Congo, la loi Zatu an VII du 16 novembre 1989 portant institution et application d'un code des personnes et de la famille au Burkina Faso, la loi n°13/89 du 30 décembre 1989 portant Code Civil de la République du Gabon.

* 36 Article 465 du Code burkinabé des personnes et de la famille

* 37 Voir supra Première Partie, Chapitre I.

* 38 Art 322 al 1 du CPF.

4 Art 414 du code civil gabonais et articles 189 et 190 du code de la famille du Sénégal

* 39 Article 534 du Code sénégalais de la famille.

* 40 www.wildaf-ao.org/fr/ress_ii

* 41 Claire NDOKO «Les marques du droit de la famille en Afrique noire» Revue Internationale de Droit Civil (RIDC) n° 1 1991 P.89.

* 42 Dans l'affaire Mazurek un enfant adultérin ayant reçu la moitié de ce qu'il aurait reçu s'il avait été légitime dans une succession, a saisi la Cour européenne des droits de l'homme pour violation du principe de l'égalité de tous devant la loi. Il a obtenu gain de cause et la France a été condamnée à lui verser des dommages-intérêts. http://www.credho.org/cedh/session / pages / mazurek

* 43 HAUSER Jean et CASEY Jérôme (sous la direction de), Code des Personnes et de la Famille. Textes-commentaires-conseils pratiques-biliographies, Jurisclasseur, Juriscode, Editions Litec 2002, Groupe.

* 44 Article 1er de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme adoptée par Résolution 217 A (III) de l'Assemblée Générale des Nations Unies le 10 décembre 1948.

* 45 Il s'agit au plan universel de la Déclaration universel des droits de l'homme du 10 décembre 1948, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 et plus spécialement, la Déclaration des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ; au plan régional de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples du 18 juin 1981 et plus spécialement la Charte africaine des droits du bien-être de l'enfant ratifiée par le Bénin le 02 juin 1996.

* 46 Articles 333 à 333-6 du Code civil, Dalloz 2002.

* 47 G. RIPERT, « Condition des enfants adultérins après la loi du 15 juillet 1955 et 5 juillet 1956 », page 134

* 48 Opinion rapportée par Ahomagnon Noël GBAGUIDI, Egalité des époux, égalité des enfants et le projet de code de la famille et des personnes du Bénin op.cit., page 19.

* 49 - Convention Internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1983.

- Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant.

* 50 Article 534 du Code sénégalais de la famille.

* 51 Le CPF est d'ailleurs resté muet sur ce point, ne subordonnant donc pas la vocation successorale de l'enfant au bon vouloir ou à la rancoeur du conjoint trompé.

* 52 A la vérité, le CPF est resté très lacunaire sur plusieurs aspects des règles applicables en matière de succession, se contentant de piocher par-ci par-là les dispositions du Code civil français; ce qui laisse supposer que dans les domaines où il n'a pas marqué son originalité ce sont ces dernières qui s'appliquent.






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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault