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Efficience de la mémoire de travail chez des écoliers burundais entendant et non entendant: etude comparative

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par Reginas NDAYIRAGIJE
Université du Burundi - Licence( Bac+4) 2011
  

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    UNIVERSITE DU BURUNDI
    FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES
    SCIENCES DE L'EDUCATION

    DEPARTEMENT DE PSYCHOLOGIE

    EFFICIENCE DE LA MÉMOIRE DE TRAVAIL CHEZ
    DES ÉCOLIERS BURUNDAIS ENTENDANT ET NON
    ENTENDANT : ETUDE COMPARATIVE.

    Par
    Réginas NDAYIRAGIJE

    Sous la direction Mémoire présenté et défendu en vue

    Du Professeur Béatrice MVUKIYE de l'obtention du grade de Licencié en

    Psychologie

    Option : Psychologie clinique et sociale

    Bujumbura, Août 2011.

    DEDICACE

    A notre regrettée mère qui a quitté la vie si tôt ;
    A notre très cher papa pour nous avoir fait aimer la lecture et les études;
    A nos frères et soeurs;

    REMERCIEMENTS

    Si nous arrivons au terme de ce travail de recherche, c'est grace aux efforts déterminants conjugués par beaucoup d'individus agissant isolément ou en synergie. Cela étant dit, à tout seigneur tout honneur ! Que le professeur Béatrice MVUKIYE qui a bien accepté de diriger ce travail accepte aussi nos très sincères remerciements. Elle a été plus qu'une enseignante ; nous garderons toujours d'elle l'image d'une éducatrice méticuleuse et pleine de grandes valeurs humaines.

    Nos remerciements vont ensuite à l'endroit de notre cher papa qui, par son sens d'abnégation, a satisfait aux exigences de notre scolarisation. Pour nous avoir toujours rappelé que la réussite est la première dette que l'enfant doit à ses parents, qu'il trouve dans ce travail une raison de fierté et une récompense pour les efforts qu'il a consentis. Nous devons aussi une dette de reconnaissance à la descendance Busongoye qui a toujours été à nos côtés chaque fois que nous avons eu besoin de son concours.

    Nous serions aussi ingrat et injuste si nous omettions de remercier tous les enseignants qui ont contribué à notre formation. La grande majorité d'entre eux ont été, tout à la fois, des modèles et des guides. A chacun pour la trace qu'il a laissée dans notre vie, nous disons infiniment merci !

    Aux écoliers qui ont accepté de participer à notre recherche, à leurs enseignants, aux directeurs des écoles choisies à titre expérimental ou pré-expérimental, nous sommes également très reconnaissant.

    Tous nos anciens camarades de classe ont laissé des traces indélébiles dans notre vie. Nous gardons de chacun et de tous des souvenirs inaltérables de complicité et de profonde amitié.

    Enfin, à tous nos amis qui nous ont encouragé de plusieurs manières, nous citons, sans être exhaustif, Diane Gahimbare, Jean Bosco Ndikumana, Ndayikeje Guy Vivien, Augustin Niyongabo, Christian Ngendahimana, Nadia Kaneza, Seconde Nyanzobe,... nous disons mille fois merci !

    TABLE DES MATIERES

    DEDICACE i

    REMERCIEMENTS ii

    TABLE DES MATIERES iii

    0. INTRODUCTION 1

    PREMIERE PARTIE : CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE 3

    CHAPITRE I. ELUCIDATION DES CONCEPTS CLES 4

    I.1. La mémoire 4

    I.2. La mémoire de travail 6

    I.3. L'handicap 7

    I.4. La surdité 8

    I.5. La surdité totale 8

    CHAPITRE II. THEORIES PSYCHOLOGIQUES DE LA MEMOIRE 9

    II.1. Introduction 9

    II.2. Différentes formes de la mémoire 9

    II.2.1. La mémoire sensorielle 10

    II.2.2. La mémoire à court terme 10

    II.2.3. La mémoire à long terme 11

    II.3. Les bases anatomiques de la mémoire 12

    II.4. Mémoire versus oubli 13

    II.5. Les pathologies de la mémoire 17

    II.5.1. Les hypermnésies 18

    II.5.2. Les amnésies 19

    II. 5.3. Les distorsions de la notion du temps 19

    CHAPITRE III. THÉORIES PSYCHOLOGIQUES DE LA SURDITÉ 21

    III.1. Formes de surdités 21

    III.1.1. La classification clinique des surdités 21

    III.1.1.1. La déficience auditive de transmission 22

    III.1.1.2. La déficience auditive de perception 22

    iv

    III.1.1.3. La déficience auditive rétro~cochléaire 23

    III.1.2. La classification selon la date de l'acquisition de la surdité 23

    III.1. 2.1. Déficiences auditives précoces 23

    III. 1. 2. 2. Déficiences auditives acquises postnatales et pré-linguistiques 24

    III.1.2.3. Déficiences auditives linguistiques 24

    III.1.2.4. Déficiences auditives post-linguistiques 24

    III.1.3. La classification audiométrique des surdités 25

    III. 2. Causes de la surdité 25

    III.3. Conséquences de la surdité 26

    DEUXIEME PARTIE : CADRE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE 29

    CHAPITRE IV. PROBLÉMATIQUE, HYPOTHÈSES DE RECHERCHE ET

    VARIABLES 30

    IV.1. Problématique 30

    IV.2. Hypothèses de recherche 33

    IV.2.1. Hypothèse générale 33

    IV.2.2. Hypothèses opérationnelles et variables 34

    IV.2.2.1. La variable « Concrétude » 34

    IV.2.2.2. La variable « Type d'opération mnémonique » 34

    IV.2.3. Une variable neutralisée 35

    CHAP V. ASPECTS METHODOLOGIQUES DE RECHERCHE EMPIRIQUE 36

    V. 1. Méthode de recherche : L'expérimentation 36

    V.2. Technique de recueil des données : Le test 37

    V.3. Instruments de collecte des données : Deux tests de mémorisation 38

    V.3.1. Présentation générale 38

    V.3.2. Présentation détaillée des tests 39

    V.3.2.1. Le test 1: Rappel libre 39

    V.3.2.2. Le test 2: Reconnaissance de mots 43

    V.4. Modalités d'administration des tests 44

    V.5. Population de recherche 45

    V.6. Visites préliminaires de reconnaissance du terrain de recherche 45

    V.7. Echantillonnage 46

    V.8. Administration des épreuves expérimentales 47

    V. 8.1. La pré-expérimentation 47

    V.8.2. L'expérimentation proprement dite 48

    V.8.2.1. Déroulement 48

    V.8.2.2. Difficultés rencontrées 48

    V.9. Procédés d'analyse des données 49
    TROISIÈME PARTIE : ANALYSE DES DONNEES ET DISCUSSION DES

    RESULTATS 50
    CHAPITRE VI. ANALYSE DESCRIPTIVE DES DONNÉES ET DISCUSSION

    DES RÉSULTATS 51

    VI.1. Présentation des données recueillies 51

    VI.2. Analyse descriptive des données et discussion du jeu des variables retenues 53

    VI.2.1. Analyse de l'éventuel effet de la variable « Concrétude » 55

    VI.2.2. Mise à l'épreuve de l'effet de la variable « Type d'opération mnémonique » 59

    VI.3. Vers une analyse inférentielle des données 61
    CHAPITRE VII. ANALYSE INFÉRENTIELLE APPLIQUÉE AUX PREMIERS

    RÉSULTATS 62

    CONCLUSION 66

    BIBLIOGRAPHIE 69

    ANNEXE 72

    1

    0. INTRODUCTION

    La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, elle--même puisant son inspiration dans le Siècle des Lumières, a consacré le droit à la différence et la tolérance qui en découle comme conséquence logique. Cette révolution culturelle a eu des répercussions notables sur les centres d'intérêts de chercheurs oeuvrant dans diverses disciplines scientifiques. La psychologie n'est pas restée en marge de la vague. Elle a notamment cherché à cerner la personne humaine dans ce qu'il a de particulier et même d'anormal, et ce, en comparaison à la majorité de ses semblables. Ainsi, le handicap est, par exemple, devenu un sujet intéressant en psychologie. A ce propos, l'heure n'est plus aujourd'hui à l'apitoiement mais plutôt à la compréhension de ces personnes «différentes» (qualificatif emprunté à Ndayisaba et De Gramont, 1999). Jadis considéré comme une honte pour la famille de celui qui en souffrait et une peste à fuir pour le voisinage, l'handicap est, de nos jours, vu et vécu comme une différence à comprendre et sur laquelle il est possible d'agir avec un espoir de plus en plus accru d'aboutir à des résultats probants. Il est maintenant inconcevable de réduire les personnes atteintes d'handicaps à d'éternels assistés ou de coller systématiquement à l'handicap les cachets d'irréversibilité et d'inaptitude absolue. Pour permettre aux personnes handicapées de s'épanouir dans la société, de cueillir des roses de la vie, il faut d'abord bien les connaître, et cela est notamment possible grâce à des recherches scientifiques.

    Le souci de notre recherche qui s'inscrit dans cette visée est de voir s'il y a une différence significative au plan de l'efficience de la mémoire de travail entre des écoliers non entendant d'une part et ceux entendant d'autre part. Nous devons reconnaître que nous ne sommes pas premier à nous intéresser à une étude comparative sur le plan du fonctionnement cognitif de personnes entendant et non entendant. Oléron (1969) nous y a entre autres précédé à travers une étude menée sur des sourds-muets et qui consistait à soumettre à ces derniers des épreuves types dont la réussite nécessite la mise en jeu de telle ou telle fonction cognitive (voir Virole, 2000, p.48). Les résultats étaient ensuite comparés à la moyenne obtenue par les enfants entendant du même âge.

    2

    Plus d'un pourraient s'interroger sur la motivation qui nous pousse à nous intéresser à une étude comparative entre écoliers entendant et non entendant. Ladite motivation repose sur notre conviction que l'action éducative dont les enfants non entendant ont besoin ne peut prendre racines que d'abord dans de plus en plus de connaissances scientifiques mises au point à leur sujet. Aussi, avons-nous voulu inscrire une de nos premières expériences de recherche scientifique dans une réflexion qui conduirait à l'élaboration de stratégies éducatives qui seraient plus en harmonie avec le style de fonctionnement intellectuel, et plus particulièrement mnésique, de ces enfants « différents ». La possible portée pédagogique des résultats de notre recherche a donc motivé notre choix.

    L'étude dont la présente dissertation rend compte s'articule autour de trois principales parties. Premièrement, le cadre conceptuel de référence. Il est fait de trois chapitres à savoir l'élucidation des concepts clés de la recherche, les théories psychologiques de la mémoire et les théories psychologiques de la surdité. Deuxièmement, la partie méthodologique de la recherche qui circonscrit le problème à l'étude, dégage les hypothèses tant générale qu'opérationnelles, énonce et justifie les choix méthodologiques opérés pour pouvoir mettre en évidence l'effet des variables retenues. Troisièmement, l'analyse des données de la recherche et la discussion des résultats auxquels nous avons abouti. Quatrièmement et enfin, notre dissertation se termine par une conclusion générale qui dégage les principaux résultats auxquels la recherche a abouti tout en retraçant le cheminement suivi.

    PREMIERE PARTIE : CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE

    CHAPITRE I. ELUCIDATION DES CONCEPTS CLES

    La démarche habituelle dans toute recherche scientifique consistant à commencer par l'élucidation des concepts clés répond à un but précis à savoir celui de choisir les bonnes clés d'entrée dans l'investigation sur le sujet choisi. En effet, l'identification des significations utiles des mots clés évite par la suite au chercheur de naviguer à vue, de se perdre dans des tâtonnements à n'en point finir à l'instar d'un touriste sans boussole dans une jungle qui lui est complètement inconnue.

    Les concepts que nous avons jugés clés à notre étude et qui nécessitaient d'être clarifiés sont respectivement la mémoire, la mémoire de travail, l'handicap, la surdité et la surdité totale.

    I.1. La mémoire

    La mémoire peut être définie comme étant la capacité de l'être vivant à garder les traces des événements passés. Le mot dérive du latin « memoria » tiré du verbe « memorare » signifiant rappeler. Sillamy (1980, p.729) s'inscrit dans la mouvance de cette conception latine quand il affirme que la mémoire renvoie à la capacité de conservation des informations du passé avec capacité de les rappeler ou de les utiliser. Et il ajoute : « Elle est d'une importance indiscutable car d'elle dépendent l'accoutumance, l'habitude et l'éducation » (ibid.).

    Il serait erroné, cependant, de partir de cette signification étymologique pour conclure sans réserve qu'il s'agit là d'une fonction simple. La fonction a des mystères qui échappent à l'irréflexion du vulgaire et sous une apparente simplicité se cachent les apories d'importants problèmes (Filloux, 1967, p.5). Sa complexité repose sur deux éléments. Premièrement, elle est loin d'être une photographie fidèle de ce qui a été vu, senti, touché, entendu, bref vécu. Il résulte de la mémoire une structuration de l'information et des règles qui régissent la manipulation et la transformation de cette information (Bartz, 1979, p.1). Ce constat est aussi partagé par Michaux (1974, p.16) quand il définit la mémoire comme une fonction générale du système nerveux dont la base est la propriété qu'ont des éléments de conserver une modification reçue et de former des associations. Michaux (ibid.) poursuit que la mémoire implique les activités comme la fixation

    5

    de certains états, leur reproduction et leur localisation dans le temps mais, cette dernière étant facultative parce qu'elle se trouve être un attribut de la mémoire achevée. De là, nous comprenons que le travail de la mémoire n'est pas mécanique mais réorganisateur. Deuxièmement, elle implique plusieurs autres activités tributaires du processus de développement. C'est du moins l'avis défendu par Lieury (1975, p.251) quand il dit que la mémoire est l'ensemble des processus biologiques et psychologiques qui permettent, selon le degré de développement phylogénétique (espèce animal) ou ontogénétique (le niveau de développement de l'enfant), plusieurs catégories de comportements - la recognition sensori-- motrice, action et imitation différée, souvenir image ou conduite de récit - dont la fonction commune est la conservation des informations (perceptions ou actions).

    De toutes ces définitions retrouvées, nous avons retenu, en définitive, que la fonction de la mémoire ou la faculté mnésique se résume en deux verbes d'action clés à savoir : capter (retenir) et restituer (sa finalité ultime). Nous notons que cette finalité de la mémoire requiert une certaine réorganisation par le sujet. Cela veut dire que la mémoire imprime à ses objets quelques modifications. Ce postulat est d'autant plus vrai que ces modifications s'appliquent non seulement sur le cas précis de la mémoire individuelle mais aussi sur celle collective (voir Halbwachs, 1975, p.289). Cependant, bien que cette mise au point mette en exergue une certaine unanimité entre auteurs, nous constatons l'absence d'une convergence de vues quant aux formes de la mémoire. Par exemple, une théorie de Delay (1950) appréhendant la mémoire en termes d'hiérarchies distingue trois formes de mémoire : la mémoire sensori--motrice (celle des sensations et mouvements), la mémoire sociale se matérialisant par le développement des catégories logiques, et la mémoire autistique apparaissant dès l'age de trois ans et exploitant le matériel emprunté aux sensations vécues dans la prime enfance. D'autres classifications se fondent soit sur les processus psychiques mis en oeuvre dans la mémorisation (mémoire spontanée, mémoire volontaire), soit sur les organes de sens impliqués dans l'activité mnésique (mémoire visuelle, auditive, gustative, tactile,...), soit sur le moment de l'évocation (mémoire immédiate, mémoire à court terme ou mémoire de travail, mémoire à long terme).

    expérimentale requise par notre sujet d'investigation scientifique. Aussi, faut-il souligner que la forme de mémoire qui nous intéresse plus particulièrement est celle de la mémoire à court terme connue aussi sous le nom de mémoire de travail car se prêtant mieux à la méthode expérimentale que nous avons mise à contribution pour mener notre étude. Or, la méthode expérimentale requiert des mesures, ce qui n'est possible qu'avec la mémoire de travail. Cette expression de mémoire de travail également rangée parmi les termes clés de notre étude mérite, à son tour, d'être clarifiée.

    I.2. La mémoire de travail

    La mémoire de travail ou la mémoire à court terme (Matlin, 2001, p.166) est aussi appelée « mémoire primaire » (Fontaine, 1999, p.134) ou « mémoire immédiate » (Colin, 1979, p.47). C'est à elle que nous faisons recours de façon permanente. Le nombre d'items susceptible d'être mémorisé (empan mnésique) varie entre 5 et 7 éléments (Michaux, 1974, p.47). Tel est aussi l'avis de Miller (1956) à travers sa formule de 7#177;2 (Matlin, 2001, p.168). Bien que ces chiffres sur la capacité de la mémoire à court terme soient avancés comme tels, il est à noter qu'elle ne possède pas une capacité fixe et rigide car dépendante aussi bien des caractéristiques de la tâche que des différences individuelles (Matlin, 2001, p.172).

    Dans le cadre de notre recherche, nous avons considéré la mémoire de travail comme cette capacité de reproduire les stimulations auxquelles l'individu humain a été soumis après que ces dernières aient disparu de son champ perceptuel depuis un temps relativement court compte tenu de la quantité et de la longueur des items faisant objet de notre expérimentation.

    En plus, dans cette abondante terminologie (mémoire de travail, mémoire à court terme, mémoire primaire, mémoire immédiate), nous avons opté pour l'usage du concept de mémoire de travail car faisant référence au complexe travail de la mémoire qui ne se réduit pas au simple stockage. En plus de ce concept de mémoire de travail, un autre concept clé qu'il s'avère indispensable de clarifier est celui d'handicap.

    I.3. L'handicap

    Il n'est pas très aisé de définir le concept du handicap dans la mesure où il en existe plusieurs formes de handicaps : handicaps mentaux, handicaps sensoriels, handicaps moteurs, handicaps survenant à la suite de maladies chroniques, etc. Cependant, il reste possible de chercher leur(s) dénominateur(s) commun(s). Dans tous les cas, nous estimons que la notion de handicap renvoie à un dysfonctionnement d'un organe ou d'une fonction limitant ainsi sa jouissance effective.

    Plusieurs sources s'accordent pour reconnaître que ce vocable est d'origine anglaise mais les versions diffèrent quant à sa genèse (voir par exemple Tremblay, 1987 ; Geaudreau et Canavaro, 1990). Au départ, il désignait une pratique sportive consistant à tenir d'une main une tasse de café pendant qu'on joue au tennis avec un challenger de talents modestes (Ndayisaba et De Grandmont, 1999, p.60). Cela permettait ainsi de redistribuer les cartes car l'adversaire le plus fort était mis dans une situation d'inconfort. Il est donc évident que le handicap décrivait une situation d'infériorité nécessitant une compensation, une mesure correctrice. Autrement dit, la notion d'handicap insinue l'idée d'infériorité en termes d'aptitudes. Telle est aussi à peu près la conception de Lafon (1973) à la seule différence qu'elle s'applique aux enfants. Sa conception fait référence à la notion de retard par rapport aux autres enfants de méme age réel. L'handicap, vu sous cet angle, ne se percevrait donc que par comparaison et deviendrait relatif. En face de cette considération normative, il se dresse aussi des approches du handicap qui se basent sur ses répercussions sur le plan social. L'handicap est en fait un désavantage social résultant d'une déficience ou d'une incapacité qui limite ou interdit forcément l'accomplissement d'un rôle attendu de la personne qui en est atteinte, par son milieu (voir Naniwe, 1995). De cette définition, il apparaît clairement que l'handicap porte une connotation sociale. Nous sommes même tenté de nous demander si l'handicap (méme s'il présente dans la plupart des cas des manifestations physiques incontestables) n'est pas beaucoup plus une création de la société plutôt qu'une donnée absolue. Notre interrogation se fonde sur le constat que les implications sociales de l'handicap pèsent parfois plus lourd sur la personne atteinte d'handicap que son handicap lui-même. La notion d'handicap est relative aux normes d'usage, au niveau de développement et aux capacités de tolérance du groupe auquel appartient la personne handicapée (Doron et Parot, 1991, p.324).

    Après cette clarification du concept d'handicap en général, nous pouvons cette fois-ci envisager la définition de la surdité en tant qu'une de ses formes.

    I.4. La surdité

    Le mot surdité dérive du latin « surdus ». Il désigne l'état d'une personne qui perçoit vaguement les stimuli auditifs ou qui en est carrément insensible. Pour Robert (1971, p.35), est sourd celui qui perçoit insuffisamment les sons ou ne les perçoit pas du tout. La surdité est aussi définie comme étant une diminution de la sensibilité de l'oreille (Gribenski, 1957, p.75). La notion de diminution nous fait penser à une comparaison par rapport à une période antérieure. Partant de cette observation, nous déduisons que la surdité n'a rien d'absolu car la diminution dont il est fait mention n'est pas une norme. C'est pour cette raison que Trannoy (1971) propose une définition beaucoup plus objective fondée sur des indices chiffrés et chiffrables. Le sourd est celui dont le déficit auditif est inférieur à 65 décibels (voir Trannoy, 1971, p.13). Nous notons que la forme la plus sévère des autres formes de surdité est celle connue sous le nom de surdité totale.

    I.5. La surdité totale

    La notion de surdité totale se rapporte à la privation totale de la faculté d'entendre. Elle est attestée par un déficit auditif supérieur à 65 décibels (Trannoy, 1971, p.13). Cependant, cette conception ne fait pas unanimité au sein des spécialistes de la surdité. La qualification de la surdité totale varie d'un pays à l'autre et elle tend à différer selon qu'on a en vue l'éducation du sujet, le choix d'un emploi ou l'octroi d'une indemnité (Wall, 1955, p.255). Nous comprenons donc par là que c'est la finalité en ligne de mire qui conditionne l'approche définitionnelle.

    Dans le cas précis de notre étude, nous avons considéré comme écolier non entendant tout écolier dont l'insensibilité aux stimuli auditifs est avérée, en faisant abstraction des différentes formes de surdité. Ce choix repose sur le fait que nous avons voulu réaliser notre recherche dans un cadre scolaire. Or, lorsqu'elle est légère, une surdité peut passer inaperçue au sein de la famille, mais peut entraver sérieusement la scolarisation d'un sujet (Ndayisaba et De Grandmont, 1999, p.143). Etant donné que la mémorisation est une condition de la sauvegarde des apprentissages scolaires, nous pouvons présumer que tout ce qui est préjudiciable à la mémoire a de fortes probabilités de l'être à la scolarisation.

    9

    CHAPITRE II. THEORIES PSYCHOLOGIQUES DE LA MEMOIRE

    II.1. Introduction

    Le concept de la mémoire est un concept que nous pouvons qualifier de fourre-tout, de passe-partout. En effet, il est utilisé dans plusieurs disciplines scientifiques ou domaines de la vie courante mais, généralement, avec des sens qui ne se recoupent que très partiellement. Il est utilisé notamment en sciences humaines et plus particulièrement en histoire, en neuroscience ou en psychologie, en informatique, etc. Dans le cadre de notre recherche, nous nous intéressons à la mémoire comme « pôle crucial de nos activités cognitives » (Matlin, 2001, p.101). Pour mieux comprendre la portée de notre sujet d'étude, il s'est imposé à nous de passer d'abord en revue certaines théories psychologiques relatives à la mémoire.

    Ainsi, nous débattons dans le présent chapitre de certains aspects de la mémoire comme ses différentes formes, ses bases anatomiques, la notion de l'oubli, ainsi que ses possibles pathologies.

    II.2. Différentes formes de la mémoire

    La mémoire est, comme nous l'avons mis en évidence dans le premier chapitre, une fonction qui permet de capter, coder, conserver et restituer les stimulations et/ou les informations perçues par nos différents organes de sens. Cependant, derrière cette définition d'une simplicité suscitant peu de commentaires, se cache tout un débat nourri autour du fonctionnement de la mémoire. Il se dégage d'un bilan fait des grands courants de la psychologie sur la mémoire (Lieury, 1975, p.174) que l'associationnisme a conduit à voir la mémoire comme un ensemble de copies dont le code est l'association ; tandis que les théories d'inspiration cybernétique la considèrent comme un lieu d'enregistrement d'informations qui nécessitent des programmes pour être enregistrées ou récupérées. Les conséquences découlant de ces conceptions sont que, dans le premier cas, la mémoire est considérée comme fonctionnant de façon autonome avec ses lois propres, et dans le second cas, la mémoire est considérée comme fonction reliée à une logique (les programmes) mais existant indépendamment de celle-ci.

    Des théories plus récentes (Matlin, 1998) appréhendent le fonctionnement de la mémoire en termes de modalités différentes : la mémoire sensorielle, la mémoire à court terme connue aussi sous le nom de mémoire de travail et la mémoire à long terme. C'est cette approche que nous avons choisie d'adopter dans le cadre de notre recherche et ce, pour la simple raison que, par le fait qu'elle fait explicitement référence à la notion du temps pendant lequel l'individu peut rester en possession du matériel mémorisé, elle rend possible la méthode expérimentale susceptible de nous permettre de comparer les écoliers entendant et ceux non entendant. Ainsi, notre étude qui se veut comparative devient possible grâce aux tests de rappel libre et de reconnaissance après que nos sujets aient pris connaissance du matériel à mémoriser, un certain temps avant la tâche de remémoration.

    II.2.1. La mémoire sensorielle

    D'après une définition de Matlin (2001, p.103), la mémoire sensorielle se distingue par sa brièveté. Elle correspond généralement au temps de la perception des stimuli par les organes récepteurs. Il s'agit d'un système qui possède une grande capacité de stockage des informations qui sont enregistrées par les récepteurs sensoriels de manière suffisamment précise. Matlin (ibid.) en isole deux formes à savoir la mémoire iconique se rapportant à la mémoire sensorielle visuelle, et la mémoire échoïque, qui est synonyme de la mémoire sensorielle auditive. Sa persistance est variable et est comprise généralement entre 300 et 500 millisecondes pour la mémoire iconique, et elle est approximativement la même pour la mémoire échoïque.

    II.2.2. La mémoire à court terme

    La mémoire à court terme joue un rôle de premier plan dans la cognition et le processus d'apprentissage de nouvelles informations. Elle est caractérisée par son caractère éphémère et sa capacité limitée et porte sur un nombre réduit d'informations (l'empan) particulièrement sensibles à toute activité d'interférence (Houdé et al., 1998, p.257).

    Faisant le bilan des recherches réalisées sur le fonctionnement de la mémoire à court terme
    (Postman, 1975 ; Crowder, 1982b ; Baddeley et Gathercole, 1993), Matlin (2001, pp.172-182)
    retient que la mémoire à court terme opère par un processus de codage acoustique

    (principalement), visuel et sémantique. Elle se compose de trois structures à savoir le registre phonologique, la mémoire de travail visuo-spatiale et le système exécutif central. La première composante se charge de maintenir une information restreinte sous forme acoustique pendant quelques secondes, la seconde de stocker l'information visuelle et spatiale mais aussi l'information verbale sous forme d'images visuelles, et la troisième s'occuperait non seulement de l'intégration, la gestion et la régulation de l'information en provenance du registre phonologique et de la mémoire de travail visuo-spatiale mais aussi elle jouerait un rôle décisif dans l'attention, la planification et la coordination du comportement.

    II.2.3. La mémoire à long terme

    La mémoire à long terme, connue aussi sous le nom de mémoire tertiaire (Fontaine, 1999, p.142), est apte à conserver des données reçues pendant un moment plus long en comparaison à la mémoire à court terme ou à la mémoire sensorielle. Elle est en fait la dépositaire de nos expériences, de nos souvenirs et de nos apprentissages, bref de notre histoire. De là, la question qui se pose est celle de savoir comment justement les informations en mémoire à long terme sont organisées.

    En effet, les informations en mémoire à long terme sont régies et structurées par des systèmes qui travaillent de manière à la fois distincte et synergique. Certaines sources (Matlin, 2001 ; Fontaine, 1999) font état de l'existence de deux systèmes mnésiques autonomes à savoir la mémoire épisodique et sémantique. En fait, la mémoire épisodique est la mémoire des épisodes de notre vie, des souvenirs d'événements ou d'expériences (Da Silva Neves, 1999, p.36) tandis que la mémoire sémantique contient les connaissances du sujet sur le monde qui l'entoure, les mots et les symboles et est mobilisée de façon inconsciente (Fontaine, 1999, p. 144). Mais Fontaine (ibid.) constate que les relations structurales entre ces deux systèmes font objet de débats théoriques car la mémoire sémantique semble malgré tout « perméable » à la conscience. D'où la théorie de Winograd (1975) reprise par Fontaine (1999, p.144) s'inspirant de l'intelligence artificielle faisant la distinction entre la mémoire déclarative se rapportant aux connaissances verbalisables et la mémoire procédurale concernant un savoir-faire perceptivo-moteur et cognitif, d'habituation ou de conditionnement. En clair, la différence fondamentale entre la

    mémoire déclarative et la mémoire procédurale repose en ceci que la première est la mémoire du « savoir » alors que la seconde est la mémoire du « savoir-faire » (Da Silva Neves, 1999, p.37).

    II.3. Les bases anatomiques de la mémoire

    Après cette ébauche de catégorisation des différentes formes de mémoire impliquant aussi parfois la différence au niveau de la nature du matériel intéressant l'une ou l'autre forme de mémoire (cas par exemples de la mémoire procédurale et de la mémoire sémantique), il nous paraît judicieux de nous poser une question sur le fond anatomique qui sous-tend cette différenciation.

    En effet, l'idée de la spécialisation des zones du cerveau voudrait que l'une ou l'autre région du cerveau soit en partie ou exclusivement responsable du contrôle de telle ou telle autre fonction sensorielle, motrice et/ou psychique. Cependant pour Lieury (1975, p. 214), l'étude des mécanismes cérébraux de la mémoire montre qu'il est vain de chercher un centre ou une zone unique qui serait le siège de la mémoire. Il poursuit en disant que la mémoire est étroitement liée aux autres fonctions de même que ses mécanismes sont divers. En effet, précise-t-il, même si l'unité de base, l'atome du système nerveux est le neurone, il n'en demeure pas moins que le système nerveux n'est pas une collection de neurones mais une organisation d'une grande complexité, composée de centre nerveux communiquant entre eux par de nombreuses voies (voir Lieury, 1975, p.230).

    Concernant la localisation anatomique de la mémoire, des études montrent l'importance cruciale des lobes frontaux dans la programmation des stimulations, la régulation en fonction des signaux verbaux et aussi dans la mise en oeuvre des schèmes complexes du comportement. C'est l'activité des lobes frontaux qui est la base biologique des schèmes opératoires de l'organisation temporelle et peut-être aussi de la mémoire temporaire de travail. De plus, ajoute-t-il, la mémoire à court terme serait sous le contrôle du cortex préfrontal, la mémoire sémantique sous celui du néocortex. Le corps strié et le cervelet se chargeraient du contrôle de la mémoire procédurale alors que l'hippocampe coordonnerait le fonctionnement de la mémoire déclarative. C'est aussi le même hippocampe qui serait chargé de la coordination des informations stockées dans les différentes zones cérébrales. Son intervention serait capitale pour faire passer les souvenirs de la mémoire à

    court terme vers la mémoire à long terme. Le système limbique- dont l'hippocampe et l'amygdale sont des centres primordiaux- joue le rôle de cerveau fondamental parce qu'il intéresse toutes les activités du comportement, le système hippocampe-amydale joue le rôle d'intégrateur cognitif en permettant, par ses relations avec le néo-cortex, la détection de la nouveauté et aussi le rôle d'intégrateur cognitif-affectif en donnant aux informations une valeur affective, c'est-à-dire bonne ou mauvaise du point de vue de l'organisme(voir Lieury, 1975, pp.226-230).

    Nous réalisons, grâce à cette revue critique de la littérature, que la mémoire et son fonctionnement reposent sur un support anatomique. Connaître les bases anatomiques de la mémoire nous permet de comprendre les contours de son fonctionnement. Cependant, nous avons estimé que le débat sur la mémoire et ses capacités, dans le cadre de notre étude, serait incomplet si nous ne prenions pas un temps pour discuter d'un autre phénomène qui lui est forcément indissociable, à savoir l'oubli. La question que nous nous sommes posé est de savoir pourquoi certains éléments sont frappés par l'oubli méme en cas d'intégrité de tout le dispositif anatomique impliqué dans le fonctionnement mnésique. Cela nous a amené à envisager ci-dessous une nouvelle section relative au phénomène de l'oubli et aux mécanismes qui le sous-tendent.

    II.4. Mémoire versus oubli

    L'oubli est en quelque sorte l'antithèse de la mémoire. Autant la maladie constitue une source de renseignements sur le fonctionnement de l'organisme vivant, autant l'oubli peut nous éclairer tant sur les modalités de fonctionnement de la mémoire que sur ses caractéristiques. Comme nous avons eu l'occasion de le souligner dans le premier chapitre dédié à l'élucidation des concepts clés de notre étude, la matérialisation de la mémoire s'opère par la reproduction plus ou moins fidèle du matériel présenté alors que ce dernier s'est éclipsé du champ perceptuel de l'individu.

    De fait, la performance du sujet dépend de ses capacités perceptives comme de ses capacités mnésiques (Colin, 1979, p.45). Il résulte de cette intrication réciproque qu'il est malaisé de séparer parfaitement ce qui revient à l'une comme à l'autre entre ces deux groupes de fonctions ; celles-ci ne sont que théoriquement indépendantes. C'est cette complexité qui est à la base de la

    difficulté à cerner les facteurs qui sont à l'origine de la solidité ou de la fragilité de certains souvenirs. S'agissant justement de ces facteurs, Michaux (1974, pp.38-40) en a isolé trois à savoir le caractère utilitaire du matériel à mémoriser, son aspect sémantique ainsi que la motivation d'achèvement

    Considérons en premier lieu le caractère utilitaire du matériel à mémoriser en tant que facteur à l'origine de la solidité des souvenirs. Michaux (1974, p.38) prévient, cependant, que l'influence favorisante de l'intérêt sur l'acquisition des souvenirs n'est pas illimitée et inconditionnelle. Elle serait même dommageable à la mémoire au-delà d'un certain seuil car une motivation trop intense mettrait l'individu sous une haute tension et déclencherait des troubles émotifs qui inhiberaient l'activité mnésique. Autrement dit, une attention trop accrue et trop passionnée porterait préjudice à l'enregistrement des souvenirs.

    Considérons en deuxième lieu, à propos des facteurs qui sont à l'origine de la solidité ou de la fragilité des souvenirs, l'aspect sémantique du matériel à mémoriser. La mémoire aurait toute la peine du monde à retenir un matériel peu ou pas structuré (les mots ou les chiffres isolés).

    Par ailleurs, la mémorisation serait tributaire du contexte affectif, conscient ou inconscient, auquel se rapporte le matériel à mémoriser. En effet, le matériel présentant une charge affective agréable serait plus mémorisable que le matériel à connotation affective négative et ce dernier le serait plus qu'un matériel neutre.

    Néanmoins, pour Michaux (1974, p.39) cela est loin d'être un absolu. La notion de délai est aussi très déterminante. Et cela est d'autant plus vrai que les expériences agréables et désagréables sont également remémorées à court terme. Cependant, l'auteur considère que si l'évocation est plus tardive, les expériences agréables seraient plus remémorées que les expériences désagréables. En conclusion, sur ce facteur de la mémoire (versus l'oubli), il faut éviter des positions radicales car il existe des nuances qu'il importe d'émettre chaque fois.

    conservation des acquis mnésiques. L'expérience ayant permis de dégager cette conclusion se serait basée sur une vingtaine de tâches dont la moitié était restée en suspens et l'autre moitié achevée. Les résultats furent surprenants. La fixation s'était portée curieusement sur les travaux non achevés. L'explication fournie est que l'exécution d'une tâche déclenche une tension qui ne cesse que lorsqu'elle est achevée. Ce serait justement cette tension qui favorise la fixation mnésique, tandis que la détente consécutive la défavorise. Mais, il existe aussi des cas où l'inverse se produit (Michaux, 1974, p.39).

    Dans chacun de ces trois cas, la perte de souvenirs repose sur les trois mécanismes que sont : la détérioration, l'absence ou l'insuffisance des schèmes, les inhibitions pavloviennes (c'est-à-dire quand un stimulus conditionnel n'est plus accompagné d'un renforcement positif la réponse conditionnée ne se produit plus) et les interférences (cas d'analogie de réponses ou d'excitants conditionnels) (Michaux, 1974, p.40).

    Le premier mécanisme est imputable à un processus psychophysiologique, mettant en cause une manière d'extinction du souvenir lorsque le rappel des stimuli originels ne l'entretient pas. Ce phénomène peut être comparé au phénomène de l'épuisement de l'immunité obtenue à la suite d'une vaccination lorsque celle-ci n'a pas été renouvelée. Il peut aussi être dû à un processus anatomique résultant d'une désagrégation progressive des systèmes de traces mnésiques.

    Le deuxième mécanisme, en rapport avec l'absence de schèmes, est une inspiration de la conception piagétienne. En effet, pour cette icône de la psychologie, le souvenir a pour substrat un schème. Ce dernier est la figure abrégée représentant les traits essentiels, d'un objet, d'une personne (schèmes visuels) ou d'un mouvement (schème moteur). L'oubli peut résulter d'une absence de schème, cette absence s'opposant à la mémoire : c'est le cas de l'enfant. Dans d'autres cas, il ressort à l'incoordination des schèmes, c'est-à-dire à leur différenciation et fonctionnement insuffisant (Michaux, ibid.).

    Enfin, le troisième mécanisme qui est celui relatif à la conception dite néo-associationniste fait état d'une inhibition pavlovienne et des possibles interférences. Sans pour autant conclure sans réserve à une assimilation, cette conception rapproche le mécanisme de l'oubli des processus de conditionnement pavlovien. Par ailleurs, elle empreinte à la physiologie inspirée des expériences

    de Pavlov la notion d'inhibition. Autrement dit, l'oubli intervient quand la remémoration ne s'accompagne pas de la gratification (renforcement positif). Pour Michaux (1974, p.41), on retrouve dans la provocation de l'oubli un processus analogue d'extinction, d'inhibition, lorsque le stimulus conditionnel est depuis longtemps mis en oeuvre sans adjonction conséquente du stimulus absolu, inconditionnel. On remarque que l'inhibition est susceptible de prendre fin lorsque le stimulus conditionnel longtemps abandonné est de nouveau réinstauré. Il prévoit néanmoins la possibilité de l'intervention des interférences (à comprendre ici comme étant des erreurs de circuits). L'erreur de circuit peut être rétroactive quand elle aboutit à l'évocation d'un souvenir fixé antérieurement ou proactive dans la mesure où elle se rabat aux souvenirs postérieurs à celui recherché.

    Après ce débat sur le phénomène de la mémoire (versus l'oubli), nous sommes en droit de nous interroger si ce phénomène ne pourrait pas être expliqué différemment selon les diverses formes de mémoire. Cette interrogation est fondée dans la mesure où méme notre étude ne s'intéresse pas sur la mémoire en général mais se focalise sur une de ces composantes, en l'occurrence la mémoire de travail.

    En effet, concernant la mémoire sensorielle, le nombre de mots rappelés décroît rapidement lorsque le délai de rappel est augmenté. Quant aux informations en mémoire à court terme, trois mécanismes expliquent le phénomène de l'oubli à savoir celui de la taille limitée du tampon de mémoire, celui du déclin naturel de la trace mnésique à la suite de l'absence de l'entretien par autorépétition et celui de l'interférence. S'agissant de la sauvegarde ou non des informations conservées en mémoire à long terme, l'oubli ne correspond pas à l'effacement complet d'une trace mnésique, mais plutôt à sa détérioration en raison d'interférences provoquées par l'encodage postérieur ou antérieur d'autres informations et/ ou d'une usure naturelle de la force de la trace jusqu'à des seuils tels que son activation n'est pas suffisante pour permettre la récupération (voir Da Silva Neves, pp.26-41).

    Nous réalisons, enfin de compte à propos de l'oubli, que celui-ci est un phénomène qui
    s'explique par beaucoup de facteurs dont certains sont soit liés aux caractéristiques propres aux
    objets à mémoriser, soit à l'individu concerné par l'activité de mémorisation. Par ailleurs,

    l'expérience de la vie courante nous apprend que, qu'on le veuille ou non, l'oubli est incontournable; l'être humain est quotidiennement soumis à un si grand nombre de stimulations (informations) qu'il est pratiquement impossible de se remémorer de toutes. C'est la raison pour laquelle l'oubli est, à l'exception de certains cas extrêmes, considéré comme un phénomène normal. Toutefois, il reste incontestable que certaines situations d'excès ou de déficit de la mémoire renvoient à des cas de pathologies de la mémoire.

    II.5. Les pathologies de la mémoire

    Notre intérêt de débattre sur les pathologies de la mémoire dans le cadre d'une étude portant sur la comparaison de l'efficience de la mémoire de travail entre des écoliers non entendant et écoliers entendant repose sur le fait que certains écarts peuvent être expliqués par l'une ou l'autre des pathologies de la mémoire plutôt que par le simple fait d'être entendant ou non. Autrement dit, notre souci est ici de comprendre les pathologies de la mémoire afin de nous éviter de sombrer éventuellement dans des inférences erronées par rapport au sujet traité.

    Qui plus est, les cas de pathologies constituent des opportunités d'observations spontanées auxquelles le psychologue fait très souvent recours suite à l'impossibilité de procéder à des expériences provoquées pour des raisons d'éthique. Cela étant dit, faire abstraction de cette réalité dans notre revue critique de la littérature serait synonyme de nous priver délibérément d'une fructueuse source d'informations.

    Les troubles de la mémoire dont il est question sont respectivement les hypermnésies, les amnésies et les distorsions de la notion du temps vécu. D'un point de vue étymologique, il apparaît que ce sont aussi bien des pathologies par défaut que par excès et dont l'étiologie peut se situer soit au niveau organique, soit à celui affectif (voir Pélicier, 1981, p.362).

    II.5.1. Les hypermnésies

    Les hypermnésies, comme le laisse transparaître la morphologie du mot, renvoient à des situations de capacités excessives de la mémoire. Ces pathologies traduisent une suractivité fonctionnelle de la mémoire d'évocation, car elles ne portent pas sur l'acquisition des souvenirs mais sur leur fixation. On en distingue de deux ordres à savoir les hypermnésies diffuses et les hypermnésies partielles. Les hypermnésies diffuses sont très fréquentes dans l'excitation maniaque où elles s'associent à l'euphorie ; le sujet se montrant bizarrement très dégourdi, expansif. On les observe aussi à la phase du début de la paralysie générale, dans l'ivresse alcoolique et après l'absorption de substances psychodysleptiques. Elles se distinguent des hypermnésies partielles par le fait qu'elles sont libres de toute prédilection particulière (Michaux, 1974, p.57).

    Quant aux hypermnésies partielles, elles sont systématisées sur des souvenirs liés à des préoccupations affectives intenses. Ces hypermnésies affectives sont l'opposé des amnésies sous-- tendues par une genèse affective due au refoulement. Il en existe trois tableaux cliniques : l'hypermnésie délirante courante chez les délirants passionnels (les érotomanes vont par exemple exploiter un fait non porteur de grande signification en soi mais simplement parce qu'il permet d'alimenter leur illusion délirante d'être aimé et cela s'observe également chez les paranoïaques qui ne manquent aucune occasion pour grossir les moindres détails dans le sens d'une persécution sans merci), les hypermnésies partielles rencontrées chez les obsédés dont l'exaltation mnésique serait orientée dans le sens d'une obsession, d'une phobie et prend les allures d'une véritable torture, et enfin, le syndrome d'hypermnésie émotionnelle paroxystique tardif fréquent chez les sujets ayant fait l'expérience d'un passé particulièrement terrifiant comme celui de déportés, de rescapés de génocide ou de catastrophes naturelles de grande envergure (Michaux,1974, p. 58).

    Nous tirons également de notre source d'information (Michaux, ibid.) que les hypermnésies partielles sont en quelque sorte l'opposé et le symétrique des amnésies de genèse affective. En effet, précise l'auteur, si ces dernières dépendent du refoulement de souvenirs désagréables, les hypermnésies affectives ressortissent à la dilection passionnée des faits plus ou moins anciens soigneusement conservés et parfois déformés.

    Il convient par ailleurs de noter que la complexité des hypermnésies est telle qu'il est possible de
    distinguer l'hypermnésie authentique (pure remémoration) des fausses hypermnésies oniriques
    qui sont l'expression des hallucinations trouvant leur origine dans le passé (Michaux, 1974, p.59).

    II.5.2. Les amnésies

    Les amnésies traduisent une suspension plus ou moins longue de la mémoire, impliquant ses principales fonctions qui sont notamment la fixation, la conservation, l'évocation et la reconnaissance. Aussi, distingue-t-on les amnésies de fixation, les amnésies de remémoration et les ecmnésies (Pélicier, 1981, p.313).

    Les amnésies de fixation sont antérogrades. Dans ce cas, l'évocation des souvenirs anciens reste intacte. C'est dire alors que « le nuage mnésique s'étend en avant aussi longtemps que dure le trouble de l'acquisition mnésique » (Pélicier, ibid.). On ne peut donc pas parler d'amnésie de fixation si les perceptions sont abolies par un trouble sensoriel ou suspendues par le coma. Les amnésies de remémoration, par leur essence même rétrogrades, sont détectables par évocation. Et elles sont de cinq ordres : les amnésies d'évocation rendant impossible l'accès aux souvenirs pourtant bien conservés, les amnésies résiduelles de fixation (amnésies lacunaires ou crépusculaires), les amnésies de conservation, les amnésies de reconnaissance et les amnésies sélectives d'origine affective (voir Pélicier, ibid.).

    Il est clair que les troubles ci-dessus repris sont pour l'essentiel quantitatifs, mais notons avec Pélicier (1981, p.314) qu'il existe d'autres troubles qualitatifs surtout ceux touchant le rapport que le sujet entretient avec la notion de temps.

    II. 5.3. Les distorsions de la notion du temps

    Concernant les distorsions de la notion du temps, Pélicier (1981, p.314) isole deux grands ensembles en l'occurrence les troubles de la synthèse mnésique immédiate et les troubles de la remémoration du passé. Les troubles de la remémoration se présentent sous quatre aspects à savoir la fabulation, la falsification rétrospective délirante, l'ecmnésie et les visions panoramiques du passé.

    Premièrement, la fabulation se traduit chez l'adulte par une dissolution de la mémoire sociale et est considérée comme normale chez l'enfant non encore socialisé. La fabulation se révèle être un cocktail imprécis de souvenirs et de constatations présentes. En plus, elle se distingue du mensonge par le fait que le menteur est mystificateur, conscient, au moment où le fabulateur est « à la fois élaborateur et la dupe » (Pélicier, 1981, p.314). Deuxièmement, quant à falsification rétrospective délirante, elle se démarque par le fait que le délirant imprime ses propres déformations, de bonne foi, à des événements antérieurs à son délire, les harmonisant avec les thèmes délirant ultérieurs. Troisièmement, l'ecmnésie, de son côté, est surtout rencontrée dans des cas de démences séniles, mais peut exceptionnellement être causée par une tumeur du quatrième ventricule. Le malade se cramponne à une époque précise de sa vie comme si toutes les autres acquisitions postérieures avaient été entièrement élaguées. Quatrièmement et enfin, le délirant qui souffre de visions panoramiques a comme impression que son passé se débobine en un seul coup.

    CHAPITRE III. THÉORIES PSYCHOLOGIQUES DE LA SURDITÉ

    La surdité, comme nous avons eu à le souligner dans le chapitre premier consacré à l'élucidation des concepts clés de notre étude, décrit une situation de handicap se matérialisant par un déficit auditif. Elle se présente sous de multiples formes tout comme son étiologie est aussi variable (Sillamy, 1980, p.1150).

    Avec le présent chapitre, nous reprenons et discutons certaines théories susceptibles de nous permettre de mieux comprendre ce phénomène de la surdité et surtout son éventuelle incidence sur le plan de fonctionnement cognitif en général et sur la mémoire de travail en particulier de l'individu qui en est atteint. Nous nous intéressons notamment aux différentes formes de surdités, aux différents modèles de classification clinique des surdités, aux causes de la surdité et à ses conséquences.

    III.1. Formes de surdités

    Il existe plusieurs modèles de classification des surdités. La classification que nous avons choisie de considérer dans le cadre de notre dissertation est celle que propose Virole (2000) ; car elle nous paraît plus complète que les autres par le fait qu'elle tient compte de plusieurs axes. Elle fait valoir trois groupes de surdités selon trois axes de critères pris en compte : une classification dite clinique, une classification fondée sur la date de l'acquisition, et une classification dite audiométrique.

    III.1.1. La classification clinique des surdités

    La classification des surdités dite clinique se fonde sur la partie anatomique de l'oreille dysfonctionnelle et/ ou traumatisée. Cela étant dit, elle établit trois formes de déficiences auditives à savoir la déficience auditive de transmission, la déficience auditive de perception et la déficience auditive retro-cochléaire. Examinons, ci-dessous, la manifestation de chacune d'elles.

    III.1.1.1. La déficience auditive de transmission

    Selon nos deux auteurs de référence (voir supra), la déficience auditive de transmission se traduit par une déficience auditive de l'oreille moyenne, du tympan et de la chaîne ossiculaire. Elle est soit acquise (cas de l'otite séreuse qui est la cause la plus fréquente de l'hypoacousie de transmission chez l'enfant) ou soit génétique (cas de l'aplasie mineure de la chaîne ossiculaire). Dans ces deux situations, elle est généralement (99% de cas) consécutive aux traumatismes de l'oreille externe ou de l'oreille moyenne en méme temps qu'elle occasionne peu de déformations acoustiques. La déficience auditive de transmission laisse intacte la cochlée et la perte auditive dépasse très rarement les 60 décibels HTL (Hearing Tone Level). Il s'agit d'une déficience réversible par traitement médicamenteux. Cette forme de déficience auditive présente peu de conséquences sur le plan psychique quoi qu'elle occasionne un problème d'accès à l'information retentissant sur le développement du langage et la scolarisation normale. Cela doit cependant faire objet de nuance car les cas d'aplasies totales et partielles de l'oreille externe et / ou du conduit auditif sont porteurs de difficultés psychologiques particulières comme les troubles de l'image du corps.

    III.1.1.2. La déficience auditive de perception

    Nous apprenons toujours de Virole (2000, pp.84-85) que la déficience auditive de perception est celle secondaire à des atteintes de l'oreille interne (surtout au niveau des cellules sensorielles de l'organe de corti de la cochlée). Elle est irréversible car résultant du traumatisme total ou partiel de l'épithélium neurosensoriel. C'est cette forme de déficience auditive qui fournit la gamme de surdités sévères avec des incidences profondes sur le développement du langage. L'individu qui en souffre présente de très sérieuses difficultés de discernement de deux sons de fréquences voisines.

    Il existe cependant, nuance-t-il (ibid.), des cas de déficiences auditives mixtes associant aussi bien la surdité de perception que celle de transmission. Ces déficiences mixtes sont soit transitoires (otite séreuse ou séro-muqueuse), soit définitives (malformations complexes, syndrome de Mondini).

    III.1.1.3. La déficience auditive rétro-cochléaire

    La déficience auditive rétro-cochléaire serait très peu fréquente. Elle ne peut être isolée que par l'audiométrie par clicks et la mesure de seuils différentiels temporels. Les atteintes rétrocochléaires ne peuvent pas être mises en évidence par l'audiométrie simple. On commence par les soupçonner sur l'anamnèse et devant certaines discordances entre le niveau de compréhension ou d'expression du langage oral (Virole, 2000, p.85).

    III.1.2. La classification selon la date de l'acquisition de la surdité

    La perspective de classification fondée sur la date de l'acquisition de la surdité est d'un grand intérêt pour notre étude, surtout que la variable relative à l'époque d'apparition a été prise en compte dans la définition opérationnelle du mot surdité retenue pour notre recherche. L'approche de classification des déficits auditifs basée sur la date de l'acquisition distingue les déficiences auditives précoces des déficiences auditives acquises postnatales et pré-linguistiques.

    III.1. 2.1. Déficiences auditives précoces

    Les déficiences auditives dites précoces remontent généralement à la période prénatale. Elles sont soit génétiques (le plus souvent géniques, parfois chromosomiques), soit causées par des pathologies embryonnaires ou foetales (rubéole congénitale, foetopathie à cytomégalovirus) ou résultent carrément des pathologies périnatales ou postnatales (pathologie néonatale anoxique, infectieuse, grande prématurité) (Virole, 2000, p.86).

    Les surdités génétiques (ibid.) sont les plus fréquentes ; elles représentent au moins 40% de tous les cas de surdités précoces et peuvent être associées à d'autres séquelles neurologiques ou sensorielles. La majorité des cas de surdité précoce induisent des troubles électifs de l'audition sans pour autant occasionner d'autres répercussions organiques majeures.

    III. 1. 2. 2. Déficiences auditives acquises postnatales et pré-linguistiques

    Les déficiences auditives acquises postnatales et pré-linguistiques se manifestent durant la première année de la vie et surtout avant l'acquisition du langage. Il existe toutefois des cas particuliers de fragilités cochléaires où l'enfant, pourtant né avec une audition fonctionnellement irréprochable, décompense par suite d'affections ORL mineures. Au regard de la bénignité de ces affections (qui n'auraient pas dü- dans des conditions normales- avoir des complications aussi graves), il est permis de penser qu'elles ne sont pas la cause réelle de cette surdité mais que l'enfant en était potentiellement affecté (Virole, 2000, p.87).

    III.1.2.3. Déficiences auditives linguistiques

    Les déficiences auditives linguistiques sont des déficiences qui apparaissent en même temps que l'acquisition du langage. Elles produisent sur ce dernier des effets moins notables que les surdités pré-linguales. Cela est d'autant plus vrai que certains acquis articulatoires ou phonétiques vont subsister après que la surdité se soit installée. Le constat est tel que les deux ou trois premières années de pleine audition et communication vaco-acoustique tombent sous la coupe de l'amnésie infantile (Virole, 2000, p.87).

    III.1.2.4. Déficiences auditives post-linguistiques

    Les déficiences auditives post-linguistiques sont, d'après Virole (2000, p.87) celles acquises après l'installation complète du langage. Dans cette variété de surdité, on recense notamment les presbyacousies du troisième age et les surdités acquises de façon brutale. Elles s'accompagnent des effets audiophonologiques singuliers comme la perte de contrôle audiophonatoire de la voix qui, privée d'autorégulation acoustique, se traduit par la perte de qualités harmoniques.

    Sur le plan psychologique, cette catégorie de surdité s'accompagne d'un vécu particulièrement douloureux s'accompagnant d'une dépression grave et des phénomènes de désorganisation perceptive pouvant aller même jusqu' à des troubles psychopathologiques graves (Virole, 2000, p.88).

    III.1.3. La classification audiométrique des surdités

    La classification audiométrique des surdités correspond à la troisième typologie selon Virole (2000). Elle se fonde, d'après eux, sur la notion de seuil liminaire d'une audition normale, la normalité étant entendue ici au sens d'une valeur statistique du seuil d'audition chez un grand nombre d'adultes jeunes à oreilles normales (Virole, 2000, p.88). L'audiométrie étant l'étude métrologique de l'audition ; cette approche métrologique a, de l'avis de nos deux auteurs de référence, produit un effet sensible sur le vocabulaire usité dans le monde de la psychologie. Ils observent qu'il est devenu de bonne presse de parler de déficient auditif en lieu et place des termes arbitraires et péjoratifs de « sourd », « demi-sourd » et « malentendant ». Et l'ampleur d'une déficience auditive est appréciée à l'aune d'une échelle de gravité établie par le Bureau International d'Audiophonologie (cfr Virole, 2000, p.90).

    Sous cette perspective, ajoute-t-il, on distingue l'audition normale (seuil auditif inférieur à 20 décibels sur la moyenne des fréquences nécessaires à la perception de la parole), la déficience auditive légère (seuil compris entre 20 et 40 décibels), la déficience auditive moyenne (seuil variant entre 40 et 70 décibels), la déficience auditive sévère (seuil variant entre 70 et 90 décibels) et la déficience auditive profonde (seuil d'audition supérieure à 90 décibels). Enfin, retenons-nous de lui, pour les écoliers à déficience auditive, les perceptions auditives sont produites par des bruits de forte intensité mais sont entendues avec des atténuations.

    Pour compléter notre tableau de compréhension du phénomène de la surdité, et suite à ce survol des formes de surdité et des indices de leur manifestation, nous avons alors orienté la revue critique de la littérature sur la découverte de ses causes.

    III. 2. Causes de la surdité

    Tout comme les formes de la surdité, ses causes sont aussi très variées. Egalement, sur ce sujet, formes et causes ne sont pas totalement indépendantes. Trannoy (1971, p.13) isole par exemple deux formes de surdité respectivement liées à deux causes différentes : la surdité de nature héréditaire et la surdité acquise.

    Pour lui (ibid.), la surdité prénatale est, dans les proportions de 30 à 40%, héréditaire, tandis qu'elle est acquise dans le reste des cas. Pendant la grossesse, les causes les plus fréquentes sont les infections pendant la grossesse comme une intoxication médicamenteuse, des irradiations, et l'incompatibilité rhésus.

    S'agissant des causes néo-natales, il relève notamment les causes suivantes : la prématurité, l'anoxie, l'ictère, le traumatisme obstétrical. Quant aux surdités de transmission post-natale, il en identifie notamment les traumatismes, obstruction de conduits, angiome, infections (otites), tandis que les surdités de perception sont causées par des lésions du labyrinthe, détruisant des fonctions cochléaires et vestibulaires, certains virus et médicaments.

    III.3. Conséquences de la surdité

    Une autre question à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire, dans le cadre de notre recherche de compréhension du phénomène de la surdité, est celle relative aux conséquences qui en découlent d'autant plus que ce sont elles qui affolent, déstabilisent, posent problème.

    En effet, la surdité, comme tout handicap d'ailleurs, présente des conséquences notoires tant pour celui qui en est atteint que pour son entourage. Le choix de nous appesantir sur cet aspect en rapport avec les conséquences de la surdité nous est, de toute évidence, imposé par la nature de notre sujet d'étude qui s'inscrit dans une logique comparative. La comparaison envisagée entre les écoliers entendant et non entendant est autrement dit une façon d'envisager les probables conséquences de la surdité sur le fonctionnement mnésique. Cela étant dit, il apparaît que pour juger de la situation du sourd, c'est toute l'évolution, la formation de l'intelligence et de la personnalité qu'il faudrait embrasser. Une déficience physique n'est jamais strictement locale (Oléron, 1969, p.5). Il est donc légitime et logique de présumer que les répercussions de la surdité affectent toute la vie personnelle et sociale du sujet. Cette idée est également corroborée par Colin (1978, p. IX) quand il dit que la privation de l'ouï atteint le développement d'un ensemble de capacités et d'aptitudes en rapport avec l'acquisition de la langue et ne favorise pas un développement harmonieux de la personnalité. De là, nous sommes en droit de déduire que la première conséquence de la surdité, surtout quand elle intervient pendant la phase pré-

    linguistique, est la mutité. Ces deux déficiences, comme le souligne Oléron (1969, p.7) ne sont pas réunies par hasard, c'est- à -dire simplement juxtaposés. La langue, résultat du processus de socialisation, ne s'acquiert qu'en entendant les autres la pratiquer.

    Sur le plan du développement physique, il semble qu'il n'y a pas de grande différence entre l'enfant sourd et l'enfant normal. Néanmoins, la marche interviendrait avec un grand retard en comparaison à la moyenne d'enfants. L'explication à ce phénomène serait que, dans le cas de perte auditive, le sens de l'équilibre (on sait que l'oreille interne en est le siège) serait atteint (Oléron, 1969, p.29). Comme explication complémentaire, il est aussi dit que le retard de l'acquisition de la marche est imputable au fait que l'enfant sourd ne peut pas entendre les encouragements et les exhortations qui l'aideraient à se risquer dans cette nouvelle activité (Oléron, 1969). Nous estimons de notre côté que cette idée reste contestable dans la mesure où le langage d'encouragement n'est pas qu'exclusivement verbal. De petites gratifications ou un simple regard encourageant sont autant des signes de complicité de nature à impulser l'enfant à plus d'efforts. Virole (2000, p.282) ne dit pas le contraire quand il objecte que si le travail éducatif perd en intensité ou en qualité, les enfants sourds peuvent être très rapidement pris dans une spirale régressive due au fait que la pauvreté des interactions avec le monde physique empêche le développement des activités motrices rendant alors les interactions encore plus difficiles.

    Nous déduisons de cette appréciation de Virole qu'il ne serait pas pertinent de considérer les effets de la surdité comme étant irréversibles et absolus. Ils dépendent beaucoup plus des aspects relationnels caractéristiques de l'environnement de vie de la personne sourde.

    Sur le plan psychologique, il n'y a pas de profil psychologique propre aux personnes sourdes. « Ce sont des individus, des personnalités atteints de déficience auditive, chez lesquels la surdité a pu majorer, restreindre, dévier un trait de personnalité né de l'interaction de l'individu et de son milieu » (Lavallée, 1989, p.94). A propos justement des relations du sourd avec son environnement, Gakobwa (1998, p.17) dit qu'il s'en suit une raréfaction de sécurisation par rapport à l'enfant entendant ; ce dernier est averti par expérience des bruits familiaux qu'on s'occupe de lui ou tout au moins qu'il n'est pas seul. Alors que l'enfant entendant, poursuit-elle

    (ibid.), apprend les interdits, les renforcements positifs ou négatifs (routines, valeurs, normes) par les échanges avec l'entourage via la parole, l'enfant sourd peut atteindre l'age scolaire sans qu'il ait acquis certains apprentissages indispensables à sa socialisation. Le problème est d'autant plus complexe que le langage gestuel, supposé être un palliatif, ne permet pas de véritable insertion dans le monde des entendants.

    De surcroît, en milieux éducatifs, l'enfant sourd se heurte nécessairement à des refus. Cela est tout à fait normal et courant car il serait irréaliste de prétendre à la satisfaction de toutes les revendications en même temps et au même moment. Cela est frustrant pour toute personne mais la situation risque de s'exacerber pour l'enfant non entendant surtout qu'il est difficile de lui fournir une explication ou lui faire une promesse pour plus tard. Il y a donc une forte probabilité que l'enfant développe une impression d'hostilité alors que cela relève d'une simple banalité pour l'enfant entendant dont les propos affectueux des parents ou autres éducateurs, pour justifier le refus, finissent par le convaincre qu'il est aimé. De cette anomalie des contacts sociaux, peuvent donc s'en suivre des modifications de la vie affective du sourd qui risque de se sentir incompris et pourrait éprouver des sentiments négatifs à l'endroit de l'entendant (Oléron, 1969, p.34).

    Par ailleurs, de par les réactions parfois hostiles et méprisantes de l'entourage à l'endroit de la personne atteinte de surdité, cette dernière risque de se sentir comme continuellement attaquée et son amour propre pourrait en pâtir. Cela justifie peut être pourquoi la surdité provoque des réactions très fortes émotionnellement pour l'handicapé lui-même qui finit parfois par se considérer comme un être sans valeur, objet de ridicule et une risée publique. Ce vécu psychologique parfois fait de frustration causée par les attaques ouvertes ou sordides de la communauté induit parfois des conséquences sur le plan comportemental. C'est vraisemblablement suite à ce constat que certains théoriciens ont adopté un langage globalisant qualifiant le sourd d'être instable, coléreux, impulsif, égocentrique, frustré, méfiant, dépendant et suggestionnable, sans esprit critique et immature (voir Colin, 1978, p.96). Ces propos paraissent pour nous discutables. Cela est moins convaincant de réduire la personnalité de l'individu à son statut d'handicapé ou non. Nous disons simplement qu'il existe des différences sur le plan comportemental entre les personnes « non entendant », tout comme il en existe d'ailleurs entre les personnes « entendant ».

    DEUXIEME PARTIE : CADRE METHODOLOGIQUE DE LA

    RECHERCHE

    CHAPITRE IV. PROBLÉMATIQUE, HYPOTHÈSES DE RECHERCHE ET
    VARIABLES

    IV.1. Problématique

    Depuis des lustres, l'handicap n'a cessé d'intriguer les sociétés ; il a toujours suscité des sentiments mitigés allant de la pitié à l'hostilité. Il constitue souvent un véritable choc dans l'esprit de la famille de la personne handicapée, un sérieux coup dur à son équilibre au niveau micro et une vraie question de société sur le plan macro.

    Les réactions vis-à-vis du handicap et du handicapé ont toujours été différentes selon les sociétés ou, pour mieux dire, selon ce que les sociétés considèrent pour elles comme idéal. Par exemple, dans l'Antiquité grecque à Spartes, avec une forte civilisation guerrière, les enfants qui naissaient avec un handicap ostentatoire étaient systématiquement éliminés car considérés comme inaptes au combat, à la défense des intérêts de la cité. En Ouganda, sous le règne du dictateur Idi Amin Dada (1971-1978), il se raconte que des centaines d'handicapés et autres catégories de marginalisés vivant de la mendicité ont été jetés, vivants, dans le lac Albert. Ces cas d'intolérance poussée à l'extrême ne sont que des illustrations choisies par hasard car ces phénomènes d'homicide dirigés contre les handicapés ont, dans le passé, existé dans diverses sociétés (voir Ndayisaba et De Grandmont, 1999, p.60).

    Au Burundi, l'handicap revêtait dans le passé, et méme encore aujourd'hui, une connotation négative. Pour s'en convaincre, il suffit d'analyser la morphologie du mot qui, en kirundi (la langue du Burundi), désigne la personne handicapée. Ce mot est « Ikimuga ". Sa structure morphologique est la suivante : i-- ki--muga. L'élément « i--" est, dans cette structure, l'augment ou la voyelle initiale comme on en trouve à tous les substantifs. L'élément «-- ki--" est un préfixe nominal, tandis que «-- muga" correspond au thème, sémantiquement véhiculant l'idée méme

    d'handicap/handicapé. Normalement, lorsqu'un thème soulève l'idée d'une personne, on luiapplique comme préfixe nominal l'élément (le morphème) « -- mu--" (de la classe 1 dans une

    classification de seize préfixes nominaux) (voir Ntahokaja, 1994, p.61). Si tel avait été le cas, la
    personne handicapée serait, en kirundi, désignée pour ce concept par le vocable « umumuga " (u--

    mu-- muga). Mais il n'en a pas été ainsi; la langue a préféré pour ce concept le vocable « ikimuga ", substituant ainsi le préfixe nominal «-- mu--" par « --ki-- " (de la classe six de la classification des préfixes nominaux) avec, derrière, cette idée à double sens : d'une part « une chose ", donc pas une personne, d'autre part, une « personne antipathique ". Autrement dit, quand ce préfixe nominal est utilisé pour désigner une personne, cela traduit généralement une dépréciation de sa valeur.

    Certes, au Burundi, la tradition a toujours toléré la naissance d'un enfant handicapé. Mais il n'en demeure pas moins que cet enfant n'était pas l'objet de fierté familiale. La parfaite illustration en est le fait que l'enfant handicapé n'était pas montré aux visiteurs. Il vivait caché à l'arrière--cour, un peu à l'écart de la société. Enfin, un proverbe consacré comme « Ikimuga gisumba imva » (Mieux vaut un handicapé qu'une tombe) prouve en revanche à suffisance que l'handicapé a une valeur infinitésimale.

    Avec le temps, les mentalités ont pu évoluer. L'handicap, quoi que nul ne le souhaite ni pour lui ni pour les siens, est devenu un mal que l'on apprivoise et sur lequel il est possible d'agir afin de rendre la personne handicapée plus ou moins autonome. Aujourd'hui, le mot « handicap " ne rime plus forcément avec dépendance totale et irréversible. La personne handicapée peut aspirer à toutes les opportunités qu'offre la vie. Par exemples, les meilleures télévisions du monde disposent de créneaux dans les horaires pour des informations destinées aux personnes « non entendant ", et certaines grandes universités exigent que leurs enseignants soient à mesure de communiquer dans le langage des signes, de même que des centres d'éducation spécialisée adaptés aux différentes formes d'handicaps se sont développés par--ci par--là. Cette révolution des mentalités procède d'une conviction que cette catégorie d'êtres humains est dotée des mémes potentialités que le reste de ses semblables. Cela étant dit, les personnes handicapées ont légitimement droit à tous les droits dont celui à la culture.

    Le fait que le thème de la surdité (une forme d'handicap) ait été au centre de recherches conduites par des étudiants de notre Faculté de Psychologie et des Sciences de l'Education à l'Université du Burundi (voir Gakobwa, 1998 ; Hakizimana, 1995 ; Muhitira, 1984 ; Nijimbere, 1991 ; Niyonsaba, 2008 ; etc.) nous paraît être aussi un indicateur de l'intérêt sans cesse croissant que

    suscite ce phénomène dans le contexte burundais. Cependant, s'il est évident que la surdité a pu exercer un attrait pour des recherches psychologiques et éducationnelles, force est pour nous de constater que l'aspect qui y est principalement récurrent est celui relatif à ces implications psychosociales ou aux représentations que s'en fait la communauté. L'aspect de ses incidences sur le plan du fonctionnement cognitif n'a pas encore été abordé dans le cadre de la culture burundaise.

    L'originalité de notre étude par rapport à celles-là qui l'ont précédée réside dans le fait qu'elle cherche à comprendre particulièrement le fonctionnement cognitif chez des personnes sourdes. Sous cet angle, le choix de la fonction mnésique repose sur la conviction que la mémoire est une composante essentielle du fonctionnement intellectuel de l'être vivant. Elle est la fonction psychologique qui nous est la plus familière tant elle est liée à toutes nos activités quotidiennes. C'est en raison de son importance que depuis l'Antiquité, les plus grands philosophes se sont intéressés à cette capacité étonnante que possèdent les animaux, celle de pouvoir conserver des souvenirs passés et de se les rappeler, de les utiliser dans les activités présentes (Fontaine, 1999, p.126).

    Le constat qui s'impose est que les études comparatives sur la mémoire de travail chez les sujets entendant et les sujets non entendant ne sont pas nombreuses. Les quelques cas relevés dans les contextes autres que le contexte burundais nous ont éclairé en matière de connaissance de ce champ de recherche, en foi de quoi nous avons voulu explorer ce terrain relativement vierge. En effet, notre revue critique de la littérature, dans sa section consacrée aux conséquences de la surdité, nous a permis de réaliser que les effets de la surdité sur le plan psychosocial sont incontestables. Or, l'individu fonctionnant comme un tout indissociable, il s'avère également pertinent de présumer que le phénomène peut avoir des répercussions sur le plan intellectuel, notamment sur la mémoire. Cette supposition n'est pas en contradiction avec les propos suivants de Lang (1976, p. 37), toujours sur la surdité : « Il existe en dehors de la fréquence d'un retard de la marche et des troubles légers de l'équilibre, une mauvaise mémoire verbale et abstraite, des difficultés conceptuelles essentiellement liées au retard intellectuel qui, les unes que les autres vont entraîner des difficultés d'apprentissage ». De surcroît, les sourds précoces sont généralement privés du langage alors que ce dernier est à la fois un outil et un support de la

    pensée permettant l'assimilation des notions abstraites (Ndayisaba et De Grandmont, 1999, p.131). Par ailleurs, le test d'intelligence par l'échelle d'intelligence de Borelli et Oléron fait état d'une supériorité d'au moins une année d'avance des enfants entendant sur les enfants sourdsmuets méme quand ces derniers ont bénéficié d'un enseignement spécialisé (cfr Perron, 1979 repris par Ndayisaba et De Grandmont, 1999 ).

    En général, la plupart des recherches comparatives déjà menées portant sur la mémoire font état d'une supériorité des personnes entendant sur celles non entendant. Par exemple, Colin (1979, p.48) remarque qu'une étude de Pintner et Paterson (1917) portant sur un échantillon de 500 sujets âgés entre 7 et 26 ans a permis de dégager une supériorité des personnes entendant en comparaison aux personnes non entendant. Par ailleurs, Colin (ibid.), reprenant les résultats de la recherche menée par Babauzit (1949) sur un échantillon de 242 sujets âgés de 8 à 20 ans, a également mis au grand jour une supériorité notoire des sourds tardifs sur les autres sourds. Néanmoins, outre le fait que ces recherches sont relativement anciennes, il reste également évident qu'elles ont eu pour population d'étude des personnes issues d'aires culturelles et géographiques éloignées des nôtres. Cela étant dit, dans le cas de notre recherche que nous voulions mener au Burundi, la question qui nous tenait à coeur était celle de savoir s'il y a des différences de fonctionnement cognitif entre des écoliers entendant et ceux non entendant, et particulièrement en ce qui est de la performance de la mémoire de travail. Nous avons fait de cette question notre question problématique générale. Face à elle, nous avons par la suite émis des réponses provisoires (hypothèses) que nous avons alors soumises à la vérification.

    IV.2. Hypothèses de recherche IV.2.1. Hypothèse générale

    C'est dans le cadre des cultures occidentales que quelques études comparatives entre des personnes entendant et des personnes non entendant ont permis de conclure à une supériorité des premières sur les dernières. Corollairement à ces résultats et dans le cadre d'une culture différente, nous avons émis l'hypothèse selon laquelle les écoliers entendant du Burundi seraient aussi plus performants que les écoliers non entendant sur le plan de l'efficience de la mémoire de travail.

    34 IV.2.2. Hypothèses opérationnelles et variables IV.2.2.1. La variable « Concrétude1 »

    Les performances de la mémoire ne dépendent pas exclusivement des capacités intrinsèques du sujet dont les capacités mnésiques sont sous évaluation. Elles sont aussi influencées par les caractéristiques propres aux objets à mémoriser. C'est notamment le cas pour la variable « concrétude ». Celle-ci revét deux modalités à savoir la nature concrète ou abstraite de l'information véhiculée par l'item à mémoriser.

    Dans un contexte non burundais, il a été mis en évidence que « la mémoire abstraite et verbale est moins développée chez les sourds en comparaison avec celle des sujets entendant » (voir Lang, 1976, p.37). Tenant compte de ces résultats, nous avons émis l'hypothèse selon laquelle l'efficience de la mémoire de travail chez les écoliers entendant du Burundi serait plus élevée que celle des écoliers non entendant du même milieu quand le matériel à mémoriser se rapporte aux phénomènes abstraits. En revanche, l'écart se réduirait entre ces deux catégories d'écoliers au cas où le matériel à mémoriser se rapporterait aux phénomènes concrets.

    IV.2.2.2. La variable « Type d'opération mnémonique »

    Il pourrait y avoir une différence de l'efficience de la mémoire selon que le «Type d'opération mnémonique» proposé à titre expérimental est un test de rappel libre ou un test de reconnaissance. Cette combinaison des tests visant à exploiter des informations en provenance de deux sources différentes (l'information en provenance du registre d'information sensorielle pour le test de rappel libre et celle en provenance de la mémoire à long terme pour le test de reconnaissance) est justifiée par le fait que le concept de mémoire de travail (MT) figure l'idée d'un « espace de travail » de capacité réduite dans lequel les informations en provenance du registre de l'information sensorielle (RIS) et de la mémoire à long terme (MLT) sont « chargées » provisoirement, et où la sélection et la mise en oeuvre des opérations appliquées à ces

    Variable psycholinguistique ayant deux modalités : Mots concrets et Mots abstraits (cfr Rondal et Seron, 1999, p.419).

    informations sont réalisées (Da Silva Neves, 1999, p.35). Sur ce, nous avons émis comme hypothèse que l'écart au niveau des scores entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant burundais serait plus grand quand il s'agit d'un test de rappel libre que quand il s'agit d'un test de reconnaissance. En d'autres termes, nous présumons l'existence de l'effet du «Type d'opération mnémonique» sur la différence de la performance de la mémoire de travail entre les écoliers entendant et non entendant du Burundi.

    IV.2.3. Une variable neutralisée

    Il est admis que le rendement de l'activité mnémonique est influencé par la nature de l'information à mémoriser ; certaines informations étant plus difficiles à mémoriser que d'autres. Sans pour autant méconnaître cette réalité relevant du bon sens, nous avons choisi de neutraliser la variable facilité ou difficulté de l'information à mémoriser. Nous avons fait la neutralisation de cette variable de trois façons. D'abord en choisissant des items tous relativement courts ; les items constituant notre instrument de collecte des données, pour le cas du test de rappel libre, ne dépassent pas quatre syllabes au maximum. Ensuite, en évitant de faire figurer dans nos items, pour l'épreuve de rappel libre, ceux portant des signes diacritiques (des accents). Et troisièmement enfin, en choisissant des items familiers à notre population d'enquête; les items ont été choisis dans des manuels scolaires utilisés dans les classes de sixième année de l'enseignement primaire burundais.

    Après avoir formulé notre question problématique générale et nos hypothèses de recherche et dégager les variables avec lesquelles nous allions jouer, nous avons mis au point l'approche méthodologique conséquente.

    CHAP V. ASPECTS METHODOLOGIQUES DE RECHERCHE

    EMPIRIQUE

    V. 1. Méthode de recherche : L'expérimentation

    Après l'étape de la formulation des hypothèses de recherche, il s'en suivait l'interrogation sur comment procéder pour les soumettre à une vérification scientifique en vue de leur infirmation ou leur confirmation. La nécessité de tester nos hypothèses de recherche était justifiée par leur nature même qui est « spéculative, conjecturée et provisoire » (expression empruntée à Sockeel et Anceaux, 2002, p.41). Et nous définissons également dans cette section les modalités de notre recherche empirique.

    La méthode à suivre pour la recherche empirique est forcément tributaire de la question à l'étude qui détermine la nature des données qui sont attendues. Pour le cas qui nous concernait, il s'agissait à cette étape d'investigation de voir quelle méthode pouvait répondre le mieux à notre souci de comparaison de l'efficience de la mémoire de travail entre des écoliers entendant et des écoliers non entendant.

    En effet, la dimension à l'étude - la mémoire de travail--, à l'instar d'autres fonctions intellectuelles, ne se préte pas à l'observation directe et spontanée. La méthode expérimentale qui a le pouvoir de susciter chez les sujets des réactions qu'ils n'auraient peut--être jamais eu l'occasion d'avoir autrement, en les mettant dans des situations qui n'auraient peut-être jamais existé si l'expérimentateur n'en avait jamais eu besoin (Ghiglione et Richard, 1999, p.303), constituait la réponse idéale à la situation. La nature des données que nous souhaitions récolter nous a imposé de créer une situation expérimentale nous permettant de dégager la comparaison que nous ambitionnions. Or, « expérimenter, c'est intervenir activement pour réaliser les conditions nécessaires à la vérification des hypothèses relatives aux causes ou aux propriétés des phénomènes étudiés » (Sockeel et Anceaux, 2002, p.31). Le schéma expérimental que nous avons adopté est celui décrit par Fontaine (1999, p.127) comportant trois phases d'opérations mentales à savoir l'acquisition, l'élaboration et la récupération.

    Cependant, même en ayant arrêté la méthode de recherche à mettre en oeuvre et le schéma expérimental de référence, il subsistait une autre question non moins fondamentale, celle notamment de l'instrument conséquent de collecte des données.

    V.2. Technique de recueil des données : Le test

    D'entrée de jeu, nous avons estimé que la question problématique générale de départ, la méthode de recherche, la technique et les instruments de recueil des données sont complémentaires car répondant respectivement aux questions de quoi, comment et avec quoi. C'est donc la question de recherche et la méthode qui en découle qui guident le chercheur vers le choix d'une technique ou d'un instrument de recherche. Il apparaissait donc clair que nous ne pouvions pas prétendre à une comparaison de l'efficience de la mémoire de travail entre des écoliers entendant et ceux non entendant sans administrer un ou des test(s).

    Le choix du test comme technique de recueil des données ayant ainsi été fait, il restait à savoir quel ou quels tests précis il fallait utiliser puisqu'il en existe une multitude. Pour pouvoir répondre à cette question, nous nous sommes inspirés de Sockeel et Anceaux (2002, p.53) qui disent qu' « il est parfois possible de puiser dans l'assortiment des instruments déjà existants les techniques nécessaires à l'observation ou à la vérification des hypothèses ». Cela étant, les types de tests que nous pouvions utiliser sont ceux couramment usités quand on veut mettre en évidence l'empan mnésique, la mesure de la mémoire. Ce sont entre autres les tests de rappel libre et de reconnaissance. Ces deux catégories de tests sont des tests dits directs ou explicites (voir Fontaine, 1999, p.129). Elles ont constitué notre instrument de collecte des données.

    Le test de rappel libre consiste à demander au sujet de retrouver le maximum d'informations présentées durant la phase de l'acquisition, sans lui fournir aucune aide. S'agissant du test de reconnaissance, après avoir demandé au sujet, dans la phase de l'acquisition, de stocker le maximum de mots, il allait être appelé à les reconnaître dans des listes de mots qui contenaient ceux de la phase de l'acquisition auxquels nous avions rajouté un certain nombre d'autres (cfr. Fontaine, ibid.).

    V.3. Instruments de collecte des données : Deux tests de mémorisation V.3.1. Présentation générale

    Les instruments de collecte des données que nous avons mis au point sont au nombre de deux. Le premier est un test de rappel libre et le second est un test de reconnaissance. Leur caractéristique principale et commune est d'être des tests de mémorisation.

    Le test de rappel libre est composé de treize séries de neuf mots ou items chacune. Les trois premières sont des pseudo-tests et servent d'épreuve d'essai. Parmi ces trois pseudo-tests, les deux premières séries correspondent au test d'essai proprement dit tandis que la troisième est un test d'essai transitoire. Le test d'essai transitoire est constitué d'un mélange d'items se rapportant les uns aux phénomènes concrets, les autres à des phénomènes abstraits. La première série d'essai contient des mots dont les référents sont abstraits tandis que la seconde est faite de mots traduisant des référents concrets. Cette distinction entre le test d'essai transitoire et le test d'essai proprement dit repose sur le fait que le test d'essai proprement dit est passible de corrections et de retours en arrière, ce qui n'est pas le cas pour le test d'essai transitoire qui s'enchaîne sans transition ni interruption avec le test proprement dit.

    Dans le but de pouvoir vérifier notre première hypothèse opérationnelle, la moitié des séries du test proprement dit, soit cinq séries sur dix, porte sur des informations abstraites tandis que la seconde moitié (cinq séries également) se rapporte à des informations concrètes. Ces deux types d'informations correspondent aux deux modalités de la variable « Concrétude » retenue.

    S'agissant du second test qui est un test de reconnaissance, nous lui avons doté d'une structure de six séries de dix--huit mots ou items chacune. De ces six séries, les trois premières ont servi de test d'essai. De ce dernier, les deux premières séries constituent des épreuves d'essai proprement dites tandis que la troisième est une épreuve d'essai transitoire. Enfin, les trois autres séries restantes constituent l'épreuve de mémorisation (reconnaissance) proprement dite. Le choix du chiffre neuf comme nombre d'items constituant chaque série de mots à rappeler, tant pour les exercices d'essai que pour les exercices expérimentaux, s'inspire de théories avancées en

    psychologie cognitive situant la limite maximale de l'empan de la mémoire à neuf items (voir Matlin, 2001, p.68 et Michaux, 1974, p.47).

    Les dix-huit items constitutifs de chaque série sont des mots choisis par hasard, mais neuf d'entre eux font partie d'une mini-liste dont la présentation aux sujets précède d'une seconde celle de la grande liste (les 18 items). La tâche consiste à reconnaître dans la grande liste les items de la mini-liste présentée antérieurement et à les reproduire par écrit sur des lots de papiers distribués à cet effet. Dans tous les cas, le choix des items s'est exclusivement basé sur des mots connus des écoliers et qui ont été repérés au hasard dans le livre de lecture du français de la classe de sixième année et dans les fichiers du maître de la même classe des cours de français et calcul.

    V.3.2. Présentation détaillée des tests V.3.2.1. Le test 1: Rappel libre

    a. Trois pseudo-épreuves

    Exercice d'essai proprement dit 1.1

    Dieu

    Folie

    Lieu

    Temps

    Nom

    Son

    Vie

    Baisse

    Lent

    Exercice d'essai proprement dit 1.2

    Lit

    Chaise

    Bouteille

    Chaussure

    Oreille

    Couteau

    Fleur

    Arbre

    Voiture

    Exercice d'essai de transition 1

    Amour

    Futur

    Salon

    Miroir

    Corde

    Scie

    Jardin

    Banane

    Victoire

    b. Epreuves expérimentales de rappel libre
    b1. Séries de mots désignant des idées abstraites

    Exercice expérimental 1.1

    Vent

    Paix

    Air

    Genre

    Riche

    Salut

    Peur

    Mal

    Sage

    Exercice expérimental 1.2

    Couleur

    Salaire

    Foudre

    Fureur

    Faute

    Travail

    Action

    Nouvelle

    Valeur

    Exercice expérimental 1.3

    Lourdeur

    Air

    Ton

    Odeur

    Achat

    Vie

    Regard

    Masse

    Milieu

    Exercice expérimental 1.4

    Aisance

    Volume

    Sagesse

    Absence

    Disparition

    Intelligent

    Puissance

    Vengeance

    Justice

    Exercice expérimental 1.5

    Pardon

    Fin

    Fraction

    Nation

    Signe

    Espoir

    Espace

    Prix

    Soin

    b2. Séries de mots désignant des idées concrètes Exercice expérimental 1.6

    Chemise

    Viande

    Table

    Route

    Femme

    Bille

    Mangue

    Sifflet

    Nez

    Exercice expérimental 1.8

    Baguette

    Poisson

    Plante

    Chasseur

    Avion

    Tableau

    Classe

    Drapeau

    Latte

    Exercice expérimental 1.8

    Cahier

    Champ

    Ballon

    Fruit

    Pierre

    Assiette

    Crayon

    Terrain

    Clous

    Exercice expérimental 1.9

    Enfant

    Sac

    Torche

    Costume

    Carte

    Tomate

    Rire

    Salive

    Eau

    Exercice expérimental 1.10

    Lion

    Manger

    Souris

    Classe

    Cour

    Serpent

    Riz

    Danser

    Culotte

    V.3.2.2. Le test 2: Reconnaissance de mots2

    i. Exercice d'essai proprement dit 2.1 :

    Français, Visiteurs, Maman, Relation, Livre, Manger, Activité, Chèvre, Pont, Nuit, Voiture, Acheter, Garçon, Cuisine, Exercice, Bébé, Largeur, Ciment

    ii. Exercice d'essai proprement dit 2.2 :

    Souris, Odeur, Silence, Cahier, Repos, Crayon, Corde, Regard, Eglise, Allumer, Bâton, Punir, Carte, Repas, Livre, Ville, Point, Directeur

    iii. Exercice de transition 2 :

    Photo, Stylo, Argent, Craie, Terrain, Lac, Forêt, Calcul, Problème, Ballon, Maîtresse, Voleur, Pouvoir, Retard, Volonté, Rédaction, État, Capital

    iv. Exercice expérimental 2.1 :

    Doux, Ailleurs, Ici, Glacé, Bouillant, Caresser, Centre, Dur, Nuit, Recette, Cuisine, Banque, Coeur, Sauter, Culture, Retour, Bouger, Rire

    v. Exercice expérimental 2.2 :

    Maïs, Non, Faux, Feu, Paysan, Voyage, Révision, Nager, Vivre, Pronom, Texte, Fraction, Trajet, Mobile, Vente, Serpent, Vision, Lecture

    2 Les mots en gras sont ceux que les sujets avaient la tâche de reconnaître.

    vi. Exercice expérimental 2.3 :

    Jus, Bâton, Vélo, Rideau, Film, Bureau, Discours, Partage, Passif, Adjectif, Complément, Sept, Distance, Marmite, Village, Adverbe, Sang, Police

    V.4. Modalités d'administration des tests

    Les items des deux tests de mémorisation utilisés sont tous des lexèmes de la langue française. La tâche des sujets consiste à écrire le maximum d'items restés en mémoire immédiatement après la perception visuelle des séries, une à une. Le choix du français comme langue de conception des items alors que le test s'applique à des écoliers du Burundi normalement kirundiphones nous a été dicté par un souci de standardisation sur deux niveaux. Premièrement dans le système scolaire burundais, la langue d'enseignement au troisième degré, tant pour les écoliers entendant que pour ceux non entendant, est le français. Deuxièmement, la différence fondamentale entre les écoliers entendant et non entendant repose sur la pratique langagière ; le kirundi est la langue première des écoliers entendant tandis que la langue première des écoliers non entendant est le langage des signes. Cependant, pour toutes les deux catégories d'écoliers concernées par notre recherche, la langue seconde est le français, le français langue orale et écrite pour les premiers et le français langue écrite pour les seconds. Nous comprenons donc ici que les soumettre tous à un test conçu dans cette même langue seconde est une façon de les mettre sur le même piédestal en matière de standardisation de la situation expérimentale.

    S'agissant de la restitution des items à l'écrit, nous estimons que pour pouvoir mesurer l'efficience de la mémoire de travail, deux éventualités sont possibles : la restitution écrite et la restitution verbale. Or, la restitution verbale n'est possible que pour les seuls écoliers entendant. Le choix de l'écrit s'explique donc par le méme souci de la standardisation de la situation. La même préoccupation a prévalu au choix du mode de présentation des items à mémoriser : au lieu de faire une présentation orale, nous avons opté pour une présentation visuelle du matériel à mémoriser, à savoir sa projection sous forme de diapositive.

    En peu de mots, c'est l'exigence de la standardisation qui a été la boussole de ces choix procéduraux notamment à propos de la langue de conception des items à mémoriser, la nature de la tâche et le mode de présentation des items.

    V.5. Population de recherche

    Les trois critères réunis (la forme de présentation des items, le type de réponse attendue, et la langue dans laquelle étaient libellés les items à mémoriser) nous ont poussé à prendre pour sujets d'étude les écoliers de la classe de 6ème année du cycle d'études primaires, la population parente étant l'ensemble des écoliers burundais entendant et non entendant.

    V.6. Visites préliminaires de reconnaissance du terrain de recherche

    Les visites préliminaires de reconnaissance du terrain de recherche ont été effectuées dans huit écoles primaires accueillant les écoliers tant entendant que non entendant. Elles nous ont permis d'affiner nos procédés méthodologiques, de mettre au point notre instrument de recherche et de décider sur les écoles qui allaient être concernées par la récolte des données. Il s'agit de visites qui se sont étendues sur une semaine et que nous avons effectuées au Centre d'Education Spécialisée pour les Déficients Auditifs-Notre Dame de la Persévérance (CESDA-NDP), aux écoles primaires Mushasha I, Mushasha II, christ Roi et Marie Notre Reine en province de Gitega d'une part, au centre Ephphatha et aux écoles primaires de Gasenyi et de Gikungu en mairie de Bujumbura d'autre part.

    Grâce à ces visites, nous avons fait connaissance avec des autorités scolaires à différents niveaux pour requérir leur autorisation à mener notre recherche, nous avons discuté avec les enseignants titulaires des classes qui nous intéressaient sur les objectifs de la recherche, nous leur avons exprimé nos attentes par rapport à leur appui, et nous avons consulté les manuels disponibles en vue de choisir les items qui allaient constituer notre test de mémorisation. C'est aussi suite à ces visites préliminaires que nous avons décidé de prendre pour sujets d'étude tous les écoliers de la classe de sixième année du centre d'éducation spécialisée pour les déficients auditifs - Notre Dame de la Persévérance et les écoles primaires de Mushasha. Nous avons choisi de travailler sur le CESDA--NDP car le Burundi compte deux centres scolaires pour enfants non entendant.

    L'autre centre, Ephphatha, ayant servi à la préexpérimentation, il s'imposait à nous de prendre pour notre expérimentation le centre qui reste, le CESDA--NDP. Et les classes de sixième année dans les deux centres sont caractérisées par des effectifs réduits, ce qui ne nous permettait pas de compléter notre sous-échantillon d'écoliers non entendant.

    V.7. Echantillonnage

    Pour déterminer sur quelles écoles et les classes sur lesquelles notre expérimentation allait porter, nous avons procédé à un échantillonnage par grappe. En effet, « il est parfois utile de constituer des échantillons qui ne sont pas composés d'individus mais d'unités composées d'individus qu'on appelle les grappes» (voir Niyongabo, 2006, p.53).

    Comme il y avait quatre écoles primaires (Mushasha I, Mushasha II, Christ Roi et Marie Notre Reine) à proximité du centre CESDA--NDP dans lequel nous avons choisi de mener la recherche pour la catégorie des sujets non entendant, c'est dans celles--ci que nous avons choisi de tirer l'échantillon de sujets entendant de la comparaison. Nous avons mis dans un petit panier quatre morceaux de papiers sur lesquels nous avons inscrit les noms des quatre écoles. Nous avons réduit en boules ces morceaux de papiers pour en cacher le contenu, nous les avons mélangés et avons procédé à un tirage au sort une fois. Le morceau de papier qui a été tiré est celui qui portait l'inscription Christ Roi. Nous avons alors considéré l'école primaire Christ Roi comme notre unité échantillonnée.

    Etant donné que cette école compte trois classes de sixième année, nous avons utilisé la même procédure pour décider sur la classe qui allait être concernée par notre investigation. Ainsi, la classe de sixième année C a été retenue. Au sein cette classe, nous n'avons pas eu besoin de cibler un échantillon ; tous les quarante-deux écoliers qui la composent ont tous été retenus.

    Avec l'analyse des résultats, nous avons intégré les deux écoliers non entendant de l'école primaire Christ Roi dans le sous-échantillon des écoliers non entendant du CESDA--NDP. En effet, les écoliers non entendant les plus performants sont transférés aux écoles primaires environnantes pour pouvoir passer le concours national qui donne accès à l'enseignement secondaire.

    V.8. Administration des épreuves expérimentales V. 8.1. La pré-expérimentation

    Il est d'usage dans la recherche de commencer par tester les instruments de recueil des données. Ainsi, nous avons testé notre instrument de recherche auprès de 16 écoliers entendant de la classe de sixième année A de l'école primaire de Gikungu (Bujumbura) et de 13 écoliers non entendant, également de sixième année, du centre Ephphatha pour enfants sourds-muets (Bujumbura).

    A la suite de l'analyse des données de cette pré-expérimentation, nous avons été amené à revoir certains aspects de notre consigne. En effet, nous avons constaté que certains écoliers écrivaient illisible pour nous mettre dans l'embarras surtout quand ils ne se rappelaient plus d'un mot donné. Nous avons alors reformulé la consigne en insistant sur le critère lisibilité des réponses.

    Par ailleurs, nous avons constaté que les écoliers de Gikungu n'étaient pas très éveillés lors de la pré-expérimentation et nous avons estimé que cela pourrait être lié au fait que l'administration du test avait eu lieu juste après un autre test, d'entraînement au concours national de passage à l'école secondaire. Nous avons alors décidé d'administrer le test à l'expérimentation proprement dite après nous être renseigné sur les activités à l'agenda du jour pour contourner d'éventuelles interférences.

    En plus, alors qu'il était initialement prévu de distribuer des feuilles de travail type format A4 pour la restitution des réponses, la pré-expérimentation nous a fait changer d'option ; ces papiers n'étaient pas pratiques pour nos sujets habitués à travailler avec des feuilles de type « cahiers scolaires ». La forme quadrillée est parue meilleure.

    Enfin, au cours de la pré-expérimentation, nous avons aussi constaté que, même en ayant bien exposé la consigne en ce qui est du test de reconnaissance, son assimilation demeurait problématique et nous avons dû improviser un autre exemple pour illustrer plus concrètement ce qui était demandé à nos sujets. Ainsi, nous avons invité deux écoliers à se mettre devant le reste de la classe. Puis, nous avons demandé aux écoliers restés sur leurs bancs de retenir les visages des deux écoliers invités à se mettre devant eux. Après leur présentation au reste des écoliers,

    nous leur avons demandé de regagner leurs places respectives. Quelques secondes après, nous avons invité un groupe de six écoliers dont les deux précédemment invités à se mettre devant. Nous avons demandé aux écoliers restés dans les bancs de reconnaître les deux qui leur avaient été déjà présentés. A titre de conclusion, nous leur avons dit que l'exercice était similaire à la démonstration que nous venions d'improviser. Comme cette illustration nous avait permis une meilleure compréhension de la tâche du test de reconnaissance, nous avons décidé de continuer à nous en servir lors de l'expérimentation proprement dite.

    V.8.2. L'expérimentation proprement dite V.8.2.1. Déroulement

    L'expérimentation proprement dite a bénéficié de leçons apprises de la phase pré-expérimentale. Nous sommes arrivé sur le lieu d'expérimentation la veille de l'administration des épreuves. Cette stratégie nous a permis de négocier à temps des modalités pratiques de notre expérimentation, solliciter l'appui des enseignants qui tiennent les classes de sixièmes années concernées par notre étude et tester notre dispositif expérimental à savoir l'ordinateur et le rétroprojecteur.

    A notre arrivée à chaque école, nous devions présenter l'attestation de recherche délivrée par notre université et l'accord du Directeur du Bureau diocésain de l'éducation. Ce dernier document était surtout de rigueur au CESDA--NDP. En revanche, les responsables de ces écoles nous présentaient aux titulaires des classes choisies et qui nous appuyaient alors dans l'administration des épreuves.

    V.8.2.2. Difficultés rencontrées

    Une première difficulté rencontrée dans le cadre de notre recherche tient des infrastructures inadaptées à notre recherche. En effet, alors que notre expérimentation requérait un dispositif expérimental qui nécessite une alimentation en l'électricité, l'école primaire Christ Roi en est dépourvue. Il nous a fallu négocier à la fois avec les directions de l'école primaire Christ Roi et du lycée de Gitega qui, lui, en est pourvu, pour pouvoir déplacer nos sujets et les tester dans ce dernier établissement.

    Une seconde difficulté rencontrée et non des moindres, est celle relative à notre manque de maîtrise de codes de communication des sourds-muets. Comme solution, nous nous sommes fait relayer par l'enseignante titulaire de la classe de sixième année du CESDA--NDP pour notre présentation personnelle en tant que chercheur et pour l'exposé de la consigne. Nous nous exécutions verbalement, et, à chaque énoncé, l'enseignante nous servait d'interprète.

    V.9. Procédés d'analyse des données

    Nous avions prévu de corriger les feuilles de travail des sujets en attribuant un point par bonne réponse fournie, c'est-à-dire par item remémoré. A la fin de cette opération, ce sont les notes totales obtenues par les élèves qui constituent les données de la recherche et qu'il faut alors analyser. L'encodage de ces dernières dans une feuille de données « Excel » devait par la suite conduire à une analyse statistique, descriptive dans un premier temps et inférentielle dans un second temps.

    TROISIÈME PARTIE : ANALYSE DES DONNEES ET DISCUSSION DES

    RESULTATS

    CHAPITRE VI. ANALYSE DESCRIPTIVE DES DONNÉES ET

    DISCUSSION DES RÉSULTATS

    VI.1. Présentation des données recueillies

    Après l'administration du test de mémorisation, nous avons corrigé les copies des sujets en vue d'attribuer des notes individuelles conformément à la consigne (voir Annexe). Après l'annotation des copies d'évaluation, les notes obtenues ont été encodées dans un tableau « Excel ». Ces notes encodées nécessitaient cependant d'être analysées pour pouvoir leur faire acquérir une certaine intelligibilité, un certain sens. Ainsi, nous avons procédé à une analyse descriptive des données complétée par une autre, cette fois-ci inférentielle, pour nous permettre de nous prononcer sur le caractère significatif ou non des différences constatées. Ainsi, cette double analyse nous a finalement permis de décider du sort à réserver à nos hypothèses de départ, c'est-à -dire leur confirmation ou leur infirmation.

    Tableau1 : synthèse des notes obtenues par les sujets au test de mémorisation

     

    Notes obtenues au test de rappel libre

    Notes obtenues

    au test de reconnaissance

     

    Ecolier

    Statut

    (entendant/ non

    entendant)3

    Information abstraite (sur
    45 points)

    Information concrète (sur
    45 points)

    Total «Concrétude» (sur 90 points)

    Reconnaissance (sur 27 points)

    Score

    total

    (sur 117 points)

    1

    2

    10

    8

    18

    18

    36

    2

    2

    26

    35

    61

    25

    86

    3

    1

    28

    28

    56

    19

    75

    4

    2

    33

    38

    71

    22

    93

    5

    1

    39

    29

    68

    20

    88

    6

    2

    14

    10

    24

    13

    37

    7

    1

    31

    34

    65

    16

    81

    8

    1

    34

    25

    59

    17

    76

    9

    1

    34

    28

    62

    17

    79

    3 Légende: 1 désigne écolier entendant, 2 désigne écolier non entendant.

    10

    1

    17

    21

    38

    21

    59

    11

    1

    31

    32

    63

    25

    88

    12

    2

    33

    36

    69

    26

    95

    13

    1

    21

    28

    49

    22

    71

    14

    1

    26

    27

    53

    17

    70

    15

    1

    25

    24

    49

    25

    74

    16

    1

    39

    44

    83

    22

    105

    17

    1

    28

    24

    52

    23

    75

    18

    1

    22

    26

    48

    20

    68

    19

    1

    32

    36

    68

    24

    92

    20

    1

    32

    30

    62

    23

    85

    21

    2

    8

    15

    23

    26

    49

    22

    2

    16

    18

    34

    15

    49

    23

    1

    26

    18

    44

    21

    65

    24

    1

    33

    35

    68

    23

    91

    25

    1

    26

    24

    50

    23

    73

    26

    1

    21

    17

    38

    23

    61

    27

    1

    24

    27

    51

    18

    69

    28

    1

    32

    27

    59

    22

    81

    29

    1

    31

    34

    65

    26

    91

    30

    1

    24

    24

    48

    20

    68

    31

    1

    34

    23

    57

    17

    74

    32

    2

    30

    40

    70

    18

    88

    33

    1

    25

    24

    49

    20

    69

    34

    2

    16

    19

    35

    15

    50

    35

    2

    6

    8

    14

    21

    35

    36

    1

    35

    27

    62

    20

    82

    37

    1

    36

    38

    74

    27

    101

    38

    2

    21

    30

    51

    21

    72

    39

    1

    34

    35

    69

    24

    93

    40

    1

    29

    21

    50

    17

    67

    41

    1

    32

    30

    62

    23

    85

    42

    2

    38

    38

    76

    26

    102

    43

    1

    16

    24

    40

    23

    63

    44

    2

    7

    5

    12

    18

    30

    45

    1

    33

    32

    65

    23

    88

    46

    1

    23

    24

    47

    24

    71

    47

    2

    16

    23

    39

    23

    62

    48

    1

    20

    18

    38

    18

    56

    49

    2

    27

    35

    62

    24

    86

    50

    1

    22

    23

    45

    16

    61

    51

    2

    10

    11

    21

    17

    38

    52

    1

    24

    23

    47

    18

    65

    53

    1

    23

    24

    47

    21

    68

    54

    2

    24

    40

    64

    25

    89

    55

    1

    31

    24

    55

    17

    72

    56

    1

    25

    25

    50

    20

    70

    57

    1

    30

    30

    60

    20

    80

    58

    2

    17

    17

    34

    19

    53

    VI.2. Analyse descriptive des données et discussion du jeu des variables

    retenues

    Après avoir fait les calculs informatisés sur les notes obtenues, nous avons constaté que la moyenne générale des notes obtenues par les écoliers entendant était de 76.3 points sur 117, soit l'équivalent d'une moyenne de 5.87 items sur neuf alors qu'elle était de 63.88 points sur 117, soit une moyenne de 4.9 items sur neuf. Deux conclusions se dégagent de ces résultats. Premièrement, une différence s'observe entre la performance mnémonique des écoliers entendant et celle des écoliers non entendant, et ce, en faveur des premiers. Deuxièmement, la norme déjà établie dans la culture occidentale par certains psychologues cognitivistes (voir par exemples Miller, 1956 ; Michaux, 1974 ; Matlin, 2001,...) situant le seuil minimal normal de l'empan mnésique à 5 items et le seuil maximal à 9 items s'applique, dans notre étude, aux écoliers entendant et non aux écoliers non entendant pour qui il manque quelques poussières de points pour se situer à la barre minimale (4.9 items au lieu du minimum de 5). Le fait que les écoliers non entendant n'arrivent pas à atteindre le seuil de la compétence mnémonique considérée comme minimal nous pousse à cette conclusion : la mémoire de travail des écoliers non entendant du Burundi n'est pas déficiente mais elle est peu efficiente.

    La graphique 1 nous permet de comparer l'efficience de la mémoire de travail entre les écoliers entendant et ceux non entendant. Elle compare les totaux des notes obtenues par les écoliers entendant et ceux non entendant (voir tableau synthétique des notes obtenues, dernière colonne) ramenés à une moyenne de 9 items.

    Graphique 1: Comparaison de la performance de la mémoire de travail entre les écoliers entendant et non entendant (en ordonné le total des notes obtenues sur 117 points ramené à la moyenne de 9 points et en abscisse la catégorie d'écoliers)

    Comparaison de la performance de la mémoire de travail entre les écoliers entendant et ceux non entendant

    6 5.8 5.6 5.4 5.2

    5 4.8 4.6 4.4

     
     

    Entendant Non entendant

    L'allure de ce graphique nous amène à confirmer notre hypothèse générale qui postulait une possible supériorité des écoliers entendant sur ceux non entendant si nous nous situons sur le plan de l'efficience de la mémoire de travail. Cependant, cela n'est qu'une tendance générale qu'il importe de prendre avec précaution d'autant plus que sur les dix meilleures notes qui sont respectivement de 105, 102, 101, 95, 93, 93,92, 91,91, et 89, quatre reviennent à des écoliers non entendant. Pourtant, ils représentent un peu moins du tiers des sujets testés (exactement 18 sujets non entendant contre 40 sujets entendant, soit 31.03% de l'échantillon).

    En outre, alors que la meilleure note chez les écoliers entendant est de 105 points sur 117, elle est de 102 chez les non entendants, soit 89.74% contre 87.14 %. Les notes les plus basses sont 56 sur 117 chez les écoliers entendant, soit 47.86 % contre 30 points sur 117 chez les écoliers non entendant soit l'équivalent de 25.64 %. L'écart entre les meilleures notes est de 2.60% alors qu'il est de 22.22% pour les basses notes. Comme illustré aussi par les graphiques nos 2 et 3, ce contraste veut dire que les scores sont massés autour des moyennes pour les écoliers entendant alors qu'ils sont distribués pour ceux non entendant.

    Graphiques 2 &3: Comparaison de la distribution des scores autour des moyennes(en abscisse le nombre d'écoliers et en ordonné la note totale obtenue sur un total de 117 points)

    La structure de ces deux graphiques 2 et 3 nous pousse à affirmer que, bien que les écoliers non entendant obtiennent une faible moyenne en comparaison avec les écoliers entendant de même niveau scolaire, il ne serait pas sensé de conclure que le fait d'être entendant s'accompagne toujours de déficiences de la mémoire de travail. Par contre, nous déduisons par là que quand le fait d'être non entendant s'accompagne de déficience de la mémoire de travail, cette dernière est alors profonde.

    Nous avons également postulé avec nos hypothèses opérationnelles que certains facteurs notamment la « Concrétude » et le « Type d'opération mnémonique » pourraient être explicatifs de la différence entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant. L'analyse de l'effet de ces variables ou facteurs fait l'objet de la section qui suit.

    VI.2.1. Analyse de l'éventuel effet de la variable « Concrétude »

    entendant) revêt deux modalités à savoir la nature concrète ou abstraite de l'information véhiculée par l'item à mémoriser. Si nous essayons de comparer les notes obtenues par les sujets en isolant cette variable, nous remarquons que les écoliers entendant obtiennent, pour les items faisant référence à une information abstraite, une moyenne de 27.83 sur 45, soit 61.84% tandis que les écoliers non entendant obtiennent une note moyenne de 19.56 sur 45 soit 43.53%. L'écart entre les deux moyennes est de 8.27 points, l'équivalent d'un écart de 18.38%.

    Avant de dégager une quelconque conclusion découlant de cette analyse de données, nous avons d`abord fait référence à Sockeel et Anceaux (2002, p.101) pour qui « une bonne façon d'évaluer l'effet d'une variable indépendante sur une variable dépendante consiste à la représenter graphiquement. .Si l'échelle est continue on utilise une courbe, si elle ne l'est pas, un histogramme ». Ainsi, dans notre cas, l'échelle d'évaluation n'étant pas continue, nous avons construit l'histogramme correspondant (voir graphique 4 ci--dessous).

    Graphique 4 : Comparaison des moyennes des notes obtenues par les sujets entendant et ceux non entendant lorsque les items font référence à une information abstraite (en abscisse la catégorie d'écoliers et en ordonné la moyenne de la note obtenue par chaque catégorie d'écoliers sur 45 points)

    comparaison des moyennes des notes des écoliers entendant et des
    écoliers non entendant

    Moyenne des résultats

    30 25 20 15 10 5 0

     
     
     

    Non entendant Entendant

    A travers la structure de ce graphique, nous constatons que la moyenne des notes obtenues par les
    écoliers entendant est plus grande que celle des notes obtenues par les écoliers non entendant
    quand les items à mémoriser renvoient à des réalités abstraites. Cela revient à confirmer

    provisoirement une partie de notre première hypothèse opérationnelle qui postulait que l'efficience de la mémoire de travail chez les écoliers entendant du Burundi serait plus élevée que celle des écoliers non entendant du même milieu quand le matériel à mémoriser se rapporte aux phénomènes abstraits.

    Par contre, les écoliers entendant, quand il est question de mémoriser des items renvoyant à une information concrète, obtiennent la note moyenne de 26.78 points sur 45, soit 59.51% contre 23.66 soit 52.58%. L'écart entre les deux moyennes est d'exactement 3.12 points, soit 6.93%. La graphique 5 compare les écoliers entendant et non entendant quand l'information faisant objet de mémorisation est concrète.

    Graphique 5: Comparaison des moyennes des notes obtenues par les sujets entendant et ceux non entendant lorsque les items font référence à une information concrète (en abscisse la catégorie d'écoliers et en ordonné la moyenne de la note obtenue par chaque catégorie d'écoliers sur un total de 45 points)

    27

    26

    25

    24

    23

    22

    Entendant Non entendant

    Moyenne de la note obtenue

    Dans tous ces deux cas de figure (graphiques 4 et 5), il apparaît que la performance mnémonique des écoliers entendant est supérieure à celles des écoliers non entendant c'est-- à- dire à la fois lorsque l'information à rappeler est de nature abstraite et lorsqu'elle est de nature concrète.

    de --2.33%. Par contre, les écoliers non entendant obtiennent un pourcentage de 45.53% lorsque les items sont abstraits alors qu'ils obtiennent 52.58% lorsque les items sont concrets, soit une différence de +7.02%. Il est clair que les écoliers entendant affichent une performance moindre quand les items sont liés à un référent concret que quand ils font appel à un référent abstrait. Cependant, l'ampleur de l'écart entre ces deux situations ne nous permet pas de conclure que les écoliers entendant ont des problèmes de mémorisation des items dont les référents sont concrets car la perte de points peut être expliquée par la fatigue du moment que la présentation des items abstraits a précédé celle des items concrets. Par contre, le gain de points de l'ordre de 7 % est une preuve irréfutable que les écoliers entendant ont une réelle facilité à mémoriser les items dont les référents sont concrets.

    Notre première hypothèse particulière postulait que l'écart entre ces deux catégories d'écoliers serait grand quand le matériel à mémoriser se rapporte aux objets abstraits mais tendrait à se réduire lorsque le matériel à mémoriser se rapporte aux objets ou phénomènes concrets. Cela nous a amené à vouloir vérifier cette seconde partie de notre hypothèse opérationnelle en comparant les écarts entre ces deux catégories d'écoliers au niveau de leur efficience mnémonique eu égard aux deux modalités de la variable « Concrétude » (voir graphique 6 ci-- dessous).

    Graphique 6 : Comparaison des écarts entre les écoliers entendant et ceux non entendant selon que le matériel à mémoriser fait appel à des phénomènes concrets ou abstraits (en abscisse le type d'item et en ordonné la moyenne de l'écart entre les ecoliers entendant et non entendant selon le type d'item)

    Ecart entre les deux categories d'écoliers selon la nature des items à mémoriser

    Concret Abstrait

    3.12

    8.27

    Le présent graphique 6 met en lumière le fait que l'écart entre les écoliers entendant et ceux non entendant est plus grand quand le référent est, dans les items, une réalité abstraite que quand il évoque une réalité concrète.

    Ici également, il s'est avéré indispensable de tester si la différence entre les deux situations est statistiquement significative, pour pouvoir nous y prononcer avec assurance. Ce travail fait objet de la section consacrée à l'analyse inférentielle des résultats (voir plus loin). Mais avant d'y arriver, parlons d'abord de l'effet potentiel de notre deuxième variable retenue à savoir le « Type d'opération mnémonique».

    VI.2.2. Mise à l'épreuve de l'effet de la variable « Type d'opération mnémonique »

    Nous avions estimé qu'en plus de la nature des items à mémoriser (voir hypothèses de recherche), le « Type d'opération mnémonique » demandée pouvait également avoir un effet sur l'efficience de la mémoire de travail. Nous avons sérié la variable « Type d'opération mnémonique » en deux modalités à savoir l'opération de rappel libre et l'opération de reconnaissance.

    Au regard des données recueillies par rapport aux deux modalités de la variable « Type d'opération mnémonique », les écoliers entendant obtiennent une note moyenne de 55.4 points sur 90 pour le test de rappel libre contre 52.66 sur un total de quatre vingt-- dix points soit respectivement 61.55% et 58.51%. Si nous ramenons ces scores sur neuf, soit le score maximal en termes d'items pour chaque exercice expérimental, nous avons respectivement 5.54 items et 5.26 items, ce qui fait un écart de 0.32 items. Quant au test de reconnaissance, les écoliers entendant y ont obtenu en moyenne 20.88 points sur 27, soit 77.33%, tandis que ceux non entendant ont obtenu une moyenne de 20.66 points sur 27, soit 76.52%. En ramenant ces notes moyennes sur 9 items, les deux catégories d'écoliers obtiennent respectivement 6.96 et 6.88 items. Cela fait une différence de 0.08 items.

    En comparant ces écarts moyens (Voir graphique 7), nous constatons que l'écart entre la performance mnémonique chez les écoliers entendant et les écoliers non entendant est minime pour le test reconnaissance que pour le test de rappel libre. Cela est une confirmation de notre hypothèse opérationnelle qui postulait que l'écart au niveau des scores entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant serait plus grand quand il s'agit d'un test de rappel libre que quand il s'agit d'un test de reconnaissance.

    Graphique 7 : Illustration de l'écart moyen des scores entre les écoliers entendant et ceux non

    entendant selon le type d'opération mnémonique (en ordonné le type d'opération

    mnémonique et en abscisse l'écart total entre les écoliers entendant et non

    entendant ramené à la moyenne de 9 points)

    Etendu de l'écart selon le type d'opération mnémonique

    Test de reconnaissance

    Test de rappel libre

     

    0 0.2 0.4

    VI.3. Vers une analyse inférentielle des données

    Si l'analyse descriptive des données qui est ci-- haut reprise nous a permis de confirmer toutes nos hypothèses, tant l'hypothèse générale que les hypothèses opérationnelles, nous admettons qu'il s'agit là d'une confirmation à portée provisoire.

    En effet, cette analyse descriptive fait état d'écarts entre les écoliers entendant et les écoliers non
    entendant en fonction des variables « Concrétude » et « Type d'opération mnémonique », mais

    elle reste muette sur le caractère significatif de ces écarts. C'est justement cela qui nous a amènéà envisager une section consacrée à l'analyse inférentielle afin de pouvoir conclure définitivement, si les différences constatées sont statistiquement significatives ou non.

    CHAPITRE VII. ANALYSE INFÉRENTIELLE APPLIQUÉE AUX PREMIERS RÉSULTATS

    Pour mener à bon port l'analyse inférentielle qui s'est averée indispensable au vu des résultats de l'analyse descriptive, nous avons dü procéder à un choix d'un test statistique parmi toute une diversité : le test d'égalité des moyennes. C'est un test qui nous a été suggéré par Sockeel et Anceaux (2002, p.106) quand ils considèrent qu' « on vérifie l'effet d'un facteur élémentaire sur la variable dépendante par la comparaison des moyennnes des performances constatées pour chaque degré de ce facteur ». Le traitement de données opéré a abouti aux résultats qui sont repris par le tableau 2 qui suit.

    Tableau 2 : Résultat de l'analyse inférentielle des données

     

    Test de Levene

    sur l'égalité des

    variances

     

    F

    Significa- tion.

    t

    Degré de

    liberté

    Signification (bilatérale)

    Diffé- rence

    de

    moyen- nes

    Diffé-

    rence écart-type

    Intervalle de

    confiance 90%

    de la différence

    Infé-

    rieure

    Supé-

    rieure

    Abstrait

    Hypothèse

    de variances égales

    13.678

    .000

    4.087

    56

    .000

    8.269

    2.023

    4.216

    12.323

    Hypothèse

    de variances inégales

     
     

    3.323

    21.894

    .003

    8.269

    2.488

    3.108

    13.431

    Concret

    Hypothèse

    de variances égales

    50.354

    .000

    1.341

    56

    .185

    3.108

    2.319

    -1.536

    7.753

    Hypothèse

    de variances inégales

     
     

    1.002

    19.422

    .329

    3.108

    3.103

    -3.377

    9.594

    Rappel libre

    Hypothèse

    de variances égales

    43.132

    .000

    2.752

    56

    .008

    11.378

    4.135

    3.095

    19.661

    Hypothèse

    de variances inégales

     
     

    2.090

    19.844

    .050

    11.378

    5.444

    .016

    22.739

    Recon- naissan- ce

    Hypothèse

    de variances égales

    5.307

    .025

    .217

    56

    .829

    .208

    .960

    -1.714

    2.131

    Hypothèse

    de variances

     
     

    .190

    24.772

    .851

    .208

    1.097

    -2.052

    2.469

     

    inégales

     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Total

    Hypothèse

    de variances égales

    43.261

    .000

    2.508

    56

    .015

    11.586

    4.619

    2.333

    20.839

    Hypothèse

    de variances inégales

     
     

    1.907

    19.866

    .071

    11.586

    6.076

    -1.094

    24.267

    Ce test d'égalité des moyennes a les spécifications suivantes :

    1. H0 : M1 = M2, c'est- á- dire que M1-M2=0

    2. H1 : M1? M2, c'est-á-dire que M1-M2?0

    De ces deux formules, nous lisons que l'hypothèse nulle (H0) suppose l'égalité entre la moyenne 1 (M1) et la moyenne 2 (M2). Lorsque c'est le cas, cela veut dire que la différence entre la moyenne 1 et la moyenne 2 est nulle. Si non, l'hypothèse alternative postule que les moyennes 1 et 2 (M1 et M2) sont inégales ; autrement dit, leur différence est une valeur différente de zéro (valeur négative ou positive) au niveau de confiance de 90%.

    Selon les résultats du tableau 2 dans sa colonne des significations bilatérales, nous lisons que la valeur de la signification bilatérale pour le rappel libre est de 0.08, une valeur qui se situe dans l'intervalle comprise entre -.1 et +.1, donc dans la zone de rejet de l'hypothèse nulle. Cela étant, nous rejetons l'hypothèse nulle qui postulait l'égalité des moyennes 1 et 2 et confirmons l'hypothèse alternative. En d'autres mots, au niveau de confiance de 90% et au seuil de signification de 10%, la différence entre les écoliers entendant et ceux non entendant est statistiquement significative. Nous confirmons donc notre hypothèse générale de départ qui postulait que les écoliers entendant du Burundi seraient plus performants que les écoliers non entendant sur le plan de l'efficience de la mémoire de travail.

    Par ailleurs, l'analyse descriptive des données nous avait indiqué que des facteurs comme la « Concrétude » des items á mémoriser et le Type de l'opération mnémonique demandée aux sujets avaient un impact sur l'écart de l'efficience de la mémoire de travail entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant du Burundi.

    En effet, à propos du jeu de la variable « Concrétude », nous constatons que la valeur de la signification bilatérale, pour les items abstraits et l'hypothèse nulle, est de .000. Or cette valeur est comprise entre +0.1 et -01 (10% de niveau de signification) et ne se situe donc pas par conséquent dans la zone d'acceptation de l'hypothèse nulle (cfr loi de la distribution normale de Gauss et Laplace). Cela signifie que la différence entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant est statistiquement significative pour le cas précis des items renvoyant aux objets abstraits.

    Par contre, la valeur de la signification bilatérale, pour les items concrets, est de .185. Cette valeur ne se situe pas entre +0.1 et -0.10 et, en nous référant à la loi de la distribution normale de Gauss et Laplace, elle se trouve dans la zone d'acceptation de l'hypothèse nulle. Nous déduisons donc que la différence entre la moyenne 1 et la moyenne 2 est nulle. En conséquence, nous concluons que la différence entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant n'est pas statistiquement significative lorsque les items à mémoriser font référence aux objets et phénomènes concrets. Autrement dit, les deux groupes d'écoliers (entendant et non entendant) sont « homogènes » ou « équi-performants » quand les référents des items à mémoriser sont des objets ou phénomènes concrets. Cela revient à confirmer notre première hypothèse opérationnelle de départ selon laquelle l'efficience de la mémoire de travail chez les écoliers entendant du Burundi serait plus élevée que celle des écoliers non entendant du même milieu quand le matériel à mémoriser se rapporte aux phénomènes abstraits. En revanche, l'écart se réduirait entre ces deux catégories d'écoliers au cas où le matériel à mémoriser se rapporterait aux phénomènes concrets.

    Avec les résultats de l'analyse descriptive, nous avions réalisé que l'écart entre les écoliers entendant et non entendant se réduit quand les items à mémoriser sont concrets en comparaison à leur écart quand les items sont abstraits. L'analyse inférentielle est venue la compléter ; elle prouve finalement qu'il ne s'agit pas d'une simple réduction de l'écart mais que la différence entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant n'est pas statistiquement significative au seuil de signification de 10%.

    Enfin, à propos du jeu de la variable « Type d'opération mnémonique » sur l'efficience de la mémoire de travail, nous réalisons, à la lecture des valeurs du tableau 2, que la signification bilatérale pour la modalité test de rappel libre de la variable « Type d'opération mnémonique » est de .050. Cette valeur est comprise entre 0.10 et -0.10. Donc, cela veut dire qu'elle se situe dans la zone de rejet de l'hypothèse nulle si nous nous référons à la loi de la distribution normale de Gauss et Laplace. Autrement dit, la différence est significative. Nous rejetons par conséquent l'hypothèse nulle qui postule l'égalité des moyennes 1 et 2 et concluons qu'au seuil de signification de 10%, la différence entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant est statistiquement significative quand l'opération mnémonique en jeu est le rappel libre.

    S'agissant de la modalité test reconnaissance de la variable « Type d'opération mnémonique », la valeur de la signification bilatérale est de .829 . Cette valeur se situe dans la zone d'acceptation de l'hypothèse nulle selon la loi de distribution normale de Gauss et Laplace car elle n'est pas comprise entre .10 et -.10 . Cela signifie que l'hypothèse nulle qui suppose l'égalité des moyennes 1 et 2 est retenue. En d'autres termes, la différence entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant, au seuil de signification de 10%, n'est pas statistiquement significative quand l'opération mnémonique requise est la reconnaissance.

    En conclusion, la différence des scores entre les écoliers entendant et ceux non entendant est statistiquement significative en ce qui est du test de rappel libre mais elle ne l'est pas pour le cas du test de reconnaissance. Cela confirme notre seconde hypothèse opérationnelle qui avançait que l'écart au niveau des scores entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant burundais serait plus grand quand il s'agit d'un test de rappel libre que quand il s'agit d'un test de reconnaissance.

    66
    CONCLUSION

    Comme le met en lumière notre formulation du sujet d'étude, notre recherche s'était assignée comme objectif de procéder à une comparaison de l'efficience de la mémoire de travail entre des écoliers burundais entendant et non entendant. Pour y parvenir, nous avons débuté nos investigations par un questionnement large axé sur le thème central que ledit objectif soulève. Ce questionnement large nous a servi de fil conducteur pour un passage à une autre étape, celle de la revue critique de la littérature en rapport avec le même thème.

    Finalement, en confrontant les résultats de la revue critique de la littérature à nos pré-requis en matière de psychologie et aux besoins de notre recherche, nous avons arrêté les définitions opérationnelles des concepts que nous considérions comme névralgiques dans le cadre de notre étude. Egalement, un cadre théorique de référence a été constitué dans lequel nous n'avons retenu que les aspects qui touchent directement aux volets psychologiques de la mémoire et de la surdité. C'est sur base dudit cadre théorique que nous avons explicité la problématique que soulève l'étude et formulé des hypothèses qui devaient alors être soumises à un travail de vérification. En effet, il s'est agit ici d'adopter la méthode dite « scientifique générale qui consiste à formuler des énoncés, appelés hypothèses ou encore des systèmes d'énoncés, appelés également théories, puis à les mettre à l'épreuve des faits un par un » (Sockeel et Anceaux, 2002, p.16).

    Ladite vérification d'hypothèses nous a engagé dans une récolte de données, mais nous avons dû préalablement déterminer la méthode de recherche à suivre à cet effet, à savoir la méthode expérimentale. L'instrument de collecte des données que nous avons utilisé dans ce cadre, est constitué de deux tests de mémorisation à savoir un test de rappel libre et un test de reconnaissance.

    Le test de rappel libre a deux composantes bâties sur deux modalités de la variable «Concrétude»
    (la modalité Item concret et la modalité Item abstrait). Quant au test de reconnaissance, sa
    pertinence reposait sur la nécessité d'une confrontation de ses résultats avec ceux du test de

    rappel en vue de vérifier l'effet d'une autre variable, la variable «Type d'opération mnémonique».

    Le test a été administré à cinquante-huit sujets entendant et non entendant dans les proportions respectives de quarante et dix-huit. Après la collecte des données et leur encodage, nous avons procédé à leur analyse descriptive. Cette dernière a provisoirement confirmé nos hypothèses de recherche émises. En effet, (i) les écoliers entendant du Burundi s'affichent plus performants que les écoliers non entendant sur le plan de l'efficience de la mémoire de travail. Par ailleurs, (ii) l'efficience de la mémoire de travail chez les écoliers entendant est plus élevée que celle des écoliers non entendant quand le matériel à mémoriser se rapporte à des phénomènes abstraits. En revanche, l'écart se réduit entre ces deux catégories d'écoliers lorsque le matériel à mémoriser se rapporte à des phénomènes concrets. Enfin, (iii) l'écart au niveau des scores entre les écoliers entendant et les écoliers non entendant est plus grand quand il s'agit d'un test de rappel libre que quand il s'agit d'un test de reconnaissance.

    Cependant, l'analyse descriptive à elle seule ne permet pas par nature de déterminer si les différences constatées sont statistiquement significatives ou non. Alors, pour tendre vers une confirmation définitive de nos hypothèses de recherche, nous avons fait par la suite recours à un test de la statistique inférentielle : le test de comparaison des moyennes.

    Effectivement, la mise en jeu de ce dernier nous a permis de confirmer d'une part que, sur le plan de l'efficience de la mémoire de travail, les écoliers entendant sont plus performants que les écoliers non entendant au seuil de signification de 10%. Cependant, cette différence dépend tant de l'opération mnémonique demandée que de la concrétude des items à mémoriser.

    Il s'est en effet avéré que la différence entre la performance mnémonique des écoliers entendant et celle des écoliers non entendant est statistiquement significative au seuil de signification de 10% lorsque les items à mémoriser renvoient à des objets abstraits mais qu'elle ne l'est pas lorsque les items à mémoriser font référence à des objets concrets. Par ailleurs, le type d'opération mnémonique s'est révélé être une variable explicative de la différence observée entre nos deux catégories d'écoliers. La différence entre elles, toujours au seuil de signification de

    10%, est significative quand l'épreuve requiert le rappel libre mais elle ne l'est pas quand la tâche concerne la reconnaissance.

    En définitive, notre objectif était de comprendre le fonctionnement cognitif, et surtout mnémonique, des sujets non entendant du Burundi par le biais d'une comparaison avec d'autres sujets du même milieu, mais eux entendant. Nous jugeons que notre objectif a été largement atteint car nous avons pu découvrir, à la lumière de la comparaison avec des écoliers entendant, les zones d'effort et les zones de confort des écoliers non entendant en ce qui est de la mémorisation en mémoire de travail. Nous reconnaissons toutefois que la mémoire de travail n'est qu'une composante de la dimension cognitive humaine parmi bien d'autres. Ainsi, nous clôturons cette dissertation en tendant le témoin à toute autre initiative de recherche qui viendrait comparer sujets entendant et non entendant sur d'autres fonctions cognitives.

    69
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    Niyonsaba, G. (2008). Problématique de la prise en charge psychosociale des handicapés auditifs en milieu institutionnel. Mémoire de licence non publié, Université du Burundi (Faculté

    de Psychologie et des Sciences de l'Education), Bujumbura, Burundi.

    & Paris: Agence de Coopération Culturelle et Technique. Oléron, P. (1969). Les sourds muets. Paris: P.U.F.

    Piaget, J., & Inhelder, B. (1968). Mémoire et intelligence. Paris: P. U.F.

    Pélicier, Y. (Dir.) (1981). La vie psychologique normale. Univers de la psychologie (tome

    II & II). Paris : Editions Lidis.

    Robert, P. (1981). Petit Robert I. Paris: Le Robert.

    Rondal, J.-A., & Seron, X. (Ed.). (1999).Troubles du langage: Bases théoriques, diagnostic et

    rééducation. Sprimont (Belgique): Pierre Mardaga.

    Sillamy, N. (1980). Dictionnaire encyclopédique de psychologie. Paris: Bordas.

    Trannoy, A. (1971). Adaptation des enfants handicapés physiques. Paris: Casterman.

    Sockeel, P., & Anceaux, F. (2002). La démarche expérimentale en psychologie. Paris: IN PRESS EDITIONS.

    Tremblay, L. (1987). Lettre circulaire aux abonnés du service des plaques porte-clés. Montréal: Association les amputés de guerre du Canada, succursale de Québec.

    Virole, B. (Ed.). (2000). Psychologie de la surdité. Bruxelles: De Boeck université.

    Wall, W.D. (1955). Education et santé mentale. Paris: I.F.M.R.P.

    ANNEXE

    PRISE DE CONTACT AVEC LES SUJETS ET CONSIGNE A. Prise de contact et consigne en Kirundi

    A0. Prise de contact et motivation

    Ndabaramukije. Nitwa REGINAS NDAYIRAGIJE. Ndiko ngerageza kuraba ko hari ubudasa bwoba buri hagati y'abanyeshuri bumva n'abatumva mu bijanye no gufata ku mutwe. Kugira bishoboke ndaza kubaha ikibazo co gufata ku mutwe. Munyuma, nzogikosora ndabahe amanuta mukwiye, ni ukuvuga bivanye n'igitigiri c'inyishu nziza muzoba mwashoboye kwibuka mukandika. Ndabasavye ko mwokorana ishaka mukamenya kuko ni ihiganwa hagati ya mwebwe n'abandi banyeshure bumva/batumva.

    A.1. Consigne générale

    Tuza gutangurira ku myimenyerezo ibiri. Muri iyo myimenyerezo ibiri, murafise uburenganzira bwo kumbaza ibibazo ku vyo mudatahura neza. Mu nyuma duca dutandukira ikibazo nyamukuru. Mu gihe c'ikibazo nyamukuru, nta burenganzira bwo kumbaza ibibazo muzoba mugifise, musabwe gusa guca mwandika inyishu , ni ukuvuga amajambo muzoba mwafashe ku mutwe.

    A.2. Consigne pour l'épreuve de rappel libre

    Muri aka kabazo ka mbere, ndabasavye mubanze mwuzuze ku rupapuro rwa mbere amazina n'amatazirano yanyu, igitsina canyu (ko uri umuhungu canke umukobwa), imyaka yanyu n'ishuri mwigamwo. Munyuma ndaza gusaba izi mashini zanje ko zibereka amajambo icenda mu kiringo c'amasegonda cumi n'atanu gusa. Ico gihe c'amasegonda cumi n'atanu giheze, nca nyegeza ayo majambo. Mpejeje kuyanyegeza, ubwo nyene muce munyandikira ku rupauro nzoba mpejeje kubereka amajambo yose mwibuka muri ayo icenda muba muhejeje kubona. Ivyo bisigura ko uwuza kwibuka amajambo yose azoba atoye ikibazo. Uko mwandika amajambo menshi mu yo mwabonye ni kwo muronka amanuta menshi. Umwimenyerezo umwe umwe umara amasegonda mirongo ine n'atanu gusa. Mutegerezwa kugerageza mukandika ibisomeka kugira ntimuhave mutakaza amanuta.

    A.3. Consigne pour l'épreuve de reconnaissance

    Muri aka kabazo kagira kabiri, ndaza kubereka urukwirikirane rw'amajambo icenda mu kiringo c'amasegonda cumi n'atanu gusa. Mpejeje kuyabereka nca ndayazimanganya, hanyuma nce ndabereka uwundi murwi w'amajambo cumi n'umunani. Muri ayo majambo cumi n'umunani harimwo amwe icenda ya mbere mwari muhejeje kubona. Mugihe muzoba muriko mwandika inyishu, ayo majambo cumi n'umunani aguma ari imbere yanyu atanyegeje. Igikorwa canyu ni ugutora muri ayo majambo cumi n'umunani amwe icenda ya mbere na mbere nari nazimanganije muce muyandika ku rupapuro. Umwanya ndabaha kugira mwandike inyishu n'amasegonda mirongo ine n'atanu gusa. Inyishu nziza yose muza gutanga muzoyironkako inuta rimwe. No ngaha nyene, imbere yo gutangura akabazo nyamukuru, ndabaha imyimenyerezo ibiri. Mu kiringo c'imyimenyerezo, murashobora kubaza utubazo twose mwiyumvira dufatiye ku gikorwa musabwe gukora, nanje ndaheza ndabishure. Mu gihe tuzoba twatanguye akabazo nyamukuru, nta burenganzira bwo gusiguza muzoba mugifise. Muza kwandika gusa inyishu, ni ukuvuga amajambo icenda mutoye muri ayo cumi n'umunani mwibuka ko mwari muhejeje kubona muri rwa rukurikirane rwa mbere rw'amajambo icenda

    B. Traduction en français de la consigne B0. Prise de contact et motivation

    Bonjour. Je m'appelle RÉGINAS NDAYIRAGIJE. Je suis en train de chercher à découvrir si des écoliers entendant et ceux non entendant ont ou pas les mêmes capacités de mémorisation. Pour pouvoir faire cette comparaison, je vais vous proposer des exercices de mémorisation. Je corrigerai vos réponses et vous donnerai les points mérités, c'est-à-dire en fonction des bonnes réponses que vous aurez réussies à rappeler. Je vous invite donc à bien travailler pour réussir le test car il s'agit d'une compétition entre vous et d'autres écoliers entendant/non entendant.

    B.1. Consigne générale

    Avec le test proprement dit, vous n'aurez plus le droit de me poser des questions, vous allez seulement écrire les réponses, c'est-à-dire les mots mémorisés.

    B.2. Version en français de la consigne pour l'épreuve de rappel libre

    Dans cette première épreuve, je vous demande d'abord d'écrire à la première page votre nom et votre prénom, votre sexe, votre age et votre école. Ensuite, je vais projeter sur l'écran disposé devant vous une liste de neuf mots. Quinze secondes après la projection de cette liste de neuf mots, je vais faire disparaître la liste. A la suite de cette disparition, votre tâche sera d'écrire immédiatement sur la page que je vous aurai indiquée le maximum de mots possible parmi les mots précédemment lus. A chaque bonne réponse correspond un point. Gela signifie que celui qui aura reproduit beaucoup de mots aura plus de points. Ghaque exercice dure quarante-cinq secondes seulement. Je vous recommande de faire votre mieux pour écrire le plus lisiblement possible afin de ne pas perdre gratuitement des points.

    B.3. Version en français de la consigne pour l'épreuve de reconnaissance

    Dans cette seconde épreuve, je vais d'abord vous présenter une liste de neuf mots pendant quinze secondes puis la faire disparaître. Après cette disparition, je vais projeter devant vous une autre liste de dix- huit mots mais parmi lesquels figurent les neuf qui venaient de vous être montrés et neuf autres. Les dix-huit mots resteront affichés devant vous quand vous serez en train d'écrire les bonnes réponses. Votre tâche sera de reconnaître parmi les dix-huit mots les neuf premiers de la dernière liste et de les écrire sur votre bloc- papiers à la page indiquée. Le temps qui vous est accordé pour écrire les réponses est de quarante-cinq secondes seulement. A chaque bonne réponse, correspond un point.

    Nous allons d'abord faire deux exercices d'entraînement pendant lesquels vous allez poser toutes les questions que vous pourrez avoir et je vais y répondre. Ensuite va venir le moment de l'épreuve proprement dite. Quand celle-ci aura commencé, vous ne pourrez plus me poser de questions, vous allez seulement écrire les neuf mots que vous reconnaîtrez avoir fait partie de la récente liste de neuf mots.






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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore