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La reconnaissance des mouvements rebelles dans la pratique internationale contemporaine

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par Gabriel MUGISHO Dunia
Université Catholique de Bukavu - Licence en droit public interne et international 2012
  

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    0. INTRODUCTION GENERALE

    I. PROBLEMATIQUE

    Dès lors qu'il est par essence appelé à se mouvoir dans le concert des Nations avec ses pairs, l'État nouveau ne saurait se satisfaire de la réunion en son chef des trois éléments essentiels à savoir un territoire, une population et un gouvernement effectif et indépendant. Faut-il encore que d'autres sujets du droit international, principalement les États, en vérifient ou en constatent aussi l'existence et en tirent par conséquent, toutes les conséquences juridiques.1(*) Cette procédure de constatation constitue ce qu'on va appeler la reconnaissance des autres sujets du droit international. Celle-ci porte essentiellement sur un fait, une situation ou un sujet de droit (État nouveau, gouvernement nouveau parvenu au pouvoir par des voies inconstitutionnelles, un mouvement rebelle,...). Si le nouvel État ou le gouvernement ainsi reconnus constituent l'objet le plus significatif de la reconnaissance, il n'est pas rare aujourd'hui que d'autres mouvements sans personnalité juridique soient reconnus tels que les rebelles. Cette nouvelle donne de la pratique internationale contemporaine en matière de reconnaissance soulève cependant, sur le plan du droit international classique, des nombreuses objections car elle méconnaît certains principes intangibles, tels que celui de non-ingérence dans les affaires intérieures prolongé par la non-ingérence dans une guerre civile, et celui du non recours à la force.

    La reconnaissance n'a aucune valeur quant à la personnalité internationale du nouvel État, qui dépend directement d'une situation de fait.C'est vrai au plan interne comme au plan international.1(*)Il est certain que ces mouvements s'opposent violemment à un gouvernement effectif et indépendant. Leur reconnaissance reviendrait à diviser la population d'un État ou à implanter deux organisations qui se font obéir. Il n'existe pas par ailleurs des critères objectifs qui permettent de se rassurer de leur réalité. En effet, pour qu'un nouvel État soit reconnu, faut-il qu'existe une collectivité satisfaisant aux critères habituels de son identification. En d'autres termes, une population établie sur un territoire et placé sous la juridiction exclusive d'un gouvernement effectif et indépendant. Ce sont là d'après le professeur CIFENDE, des critères objectifs qui permettent de se rassurer de la réalité de l'État, objet de la reconnaissance,2(*) que les mouvements rebelles ne sauraient remplir. Eu égard à cela, une question mérite d'être posée : quel problème juridique pose la reconnaissance des mouvements rebelles dans la pratique internationale contemporaine ?Nous avons tenté d'apporter une réponse à cette question tout au long de ce travail.

    II. HYPOTHESE

    Le problème juridique que poserait une telle reconnaissance serait la reflexionsur les mécanismes traditionnels en matière de reconnaissance. Par ailleurs la pratique internationale donnerait lieu à leur simple évanescence.

    III. METHODOLOGIE

    La méthodologie juridique sous sa variante de l'exégèse nous a inspiré tout au long de notre travail. Elle a consisté à interpréter les prescrits de la Charte des Nations Unies signée à SAN FRANCISCO le vingt-six juin mil neuf cent quarante-cinq. Nous allons commenter tout au long de ce travail, les « dix Principes directeurs » applicables aux déclarations unilatérales des États susceptibles de créer des obligations juridiques qui ont été adoptés, le 4 août 2006, par la C.D.I. À sa cinquante-huitième session,2(*) la reconnaissance en constituant une.Nous devons souligner qu'à l'état actuel du droit international, il n'existe pas un texte consacré spécialement à la reconnaissance. Conscient de cet état de fait, on sent immédiatement la difficulté de traiter un sujet comme celui-ci, d'où sa complexité. Un allègement peut toutefois être rendu possible en recourant à une technique appropriée.

    La technique documentaire a facilité la compréhension du contenu de ce texte. Elle a consisté en la collecte et au tri de la documentation pertinente: ouvrages, articles, sites internet, et autres documents divers.

    IV. CHOIX ET INTERET DU SUJET

    Le choix du sujet fut motivé par un intérêt évident.

    · Sur le plan social, la pertinence sociale de ce travail découle de son apport à la société internationale en général et la population congolaise en particulier qui n'est pas bien informée sur la reconnaissance des mouvements rebelles dans la pratique internationale contemporaine.

    · Sur le plan pédagogique, cet exercice scientifique nous a permis de réviser le concept de reconnaissance. Cette révision est passée par l'approfondissement de plusieurs notions du droit international public tel que le principe suivant lequel ce dernier ne serait pas formaliste.

    · Sur le plan scientifique, nous avons abouti à une nouvelle option significative dans le domaine de la reconnaissance. Nous avons en effet ré-réfléchi sur les conditions de la reconnaissance, ses effets, avec une attention particulière au problème de sa licéité.

    Au regard de la complexité de ce sujet toute fois, découlant du fait que la pratique internationale contemporaine est large et n'est pas susceptible d'appréhension sans circonscription ; une délimitation s'est avéré d'une grande importance en vue de réaliser les principes essentiels de la recherche scientifique qui veulent que celle-ci porte sur un champ précis.

    V. DELIMITATION DU TRAVAIL

    Notre travail est limité tant sur le plan temporel que sur le plan spatial, étant donné que BALLEYGUIER a écrit que tout chercheur est forcément limité.2(*)

    Sur le plan temporel, nous allons nous intéresser à la situation en Libye depuis la chute de KADHAFI. Pour la Syrie, nous nous intéresserons à la situation survenue depuis 2001. Pour la RDC, nous remonterons aux années 1996 pour mieux saisir le déroulement des situations aujourd'hui. Sur le plan spatial, l'essentiel de notre travail tourne autour de trois espaces à savoir : la Syrie, la Libye, et la RDC.

    VI. PLAN DU TRAVAIL

    Ce travail est divisé en deux chapitres en plus de l'introduction générale et de la conclusion générale. Le premier chapitre porte sur la théorie de la reconnaissance de la belligérance. La reconnaissance est définie dans une première section. Dans une deuxième section, nous dissertons sur ses différentes formes avant de poser la problématique de la reconnaissance de la belligérance dans une troisième section.

    Le second chapitre porte sur les cas, les formes et les conséquences de la reconnaissance des mouvements rebelles, bref le problème de licéité. La reconnaissance du CNT en Libye constitue la première section. L'analyse du cas de reconnaissance des rebelles en Syrie intervient dans la deuxième section, alors que la troisième section traite du cas particulier de la RDC.

    CHAPITRE PREMIER : DE LA THEORIE DE LA RECONNAISSANCE DE LA BELLIGÉRANCE

    Gérard CORNU définit la reconnaissance de belligérants comme étant « l'Acte par lequel un État déclare qu'il considère désormais des insurgés comme belligérants, c'est à dire comme admis au bénéfice du droit de la guerre. »2(*) Le problème juridique que pose cette reconnaissance (S3), doit être compris en définissant la reconnaissance internationale, (S1) et en en déterminant ses différentes formes (S2).

    Section première : Définition de la reconnaissance

    Il sied donc de consacrer ce point à l'analyse des différentes définitions nous proposées par la doctrine des éminents internationalistes. L'objectif principal est de faire ressortir dans les différentes définitions, explicitement ou implicitement, la nouvelle forme apparue avec la pratique internationale contemporaine à savoir la reconnaissance des mouvements rebelles.

    Gérard CORNU définit la reconnaissance comme « l'Acte unilatéral par lequel un État fait connaître explicitement ou implicitement qu'il admet, pour ce qui le concerne, l'existence d'un fait ou d'une situation (apparition d'un État nouveau, changement de régime intervenu par la violence, édiction d'un acte juridique, etc.) et qu'il en accepte les conséquences dans ses relations extérieures. Elle intervient soit de jure, soit seulement de facto. »2(*)

    Malgré que le droit international ne soit pas formaliste, cette définition précise que la reconnaissance peut être expresse ou implicite. Elle indique in fine que la reconnaissance intervient soit de jure, soit seulement de facto. Nous nous y appesantirons dans la deuxième section portant sur les différentes formes de la reconnaissance internationale. L'auteur se limite cependant à dire que l'État peut reconnaître une situation ou un fait. Dans le second chapitre de ce travail, nous cherchons à savoir si les mouvements rebelles sont des faits ou des situations pour qu'ils soient reconnus. En attendant, analysons à présent la définition de la reconnaissance d'après ANZILOTTI pour en rechercher les lacunes et les mérites à notre niveau.

    La reconnaissance est d'après ANZILOTTI, « une manifestation de la volonté de considérer comme légitime un état de choses donné, une prétention donnée, etc. »2(*) C'est donc une manifestation de la volonté pour traduire l'idée de consentement. Nous y reviendrons assez souvent pour démontrer que les règles de droit liant les États procèdent de la volonté de ceux-ci, volonté qui peut être manifestée dans différentes sources du droit international.

    Cette définition a l'avantage d'insister sur la légitimité d'un état de choses donné sur lequel peut porter la reconnaissance. Mais ce dernier n'est pas bien précisé. Se pose alors l'épineuse question de savoir si l'État peut reconnaître n'importe quelle situation. Nous pensons qu'une telle définition est très restrictive et ne comporte pas un objet large comme le voudrait la pratique internationale contemporaine. Il en découle qu'un État peut considérer légitime une prétention et décide de montrer son soutien à celle-ci. Mais, la reconnaissance des mouvements rebelles que nous cherchons à faire ressortir dans cette définition ne se fait pas clairement ressortir. D'où la nécessité de continuer avec notre démarche en empruntant cette fois-ci la voie d'un vocabulaire admis en droit international.

    Selon JOLICOEUR, la reconnaissance serait « l'acte par lequel un État, constatant l'existence de certains faits (un État nouveau, un gouvernement, une situation, un Traité, ...), déclare ou admet implicitement qu'il les considère comme des éléments sur lesquels seront établis ses rapports juridiques, cela avec des modalités explicites ou implicites que peut comporter cette reconnaissance. »2(*) Cette définition n'est pas tellement différente de celle de CORNU car l'auteur insiste sur le fait que l'État déclare ou admet implicitement (...). Nous remarquons cependant, et ce, la différence, que pour insister sur la possibilité pour les États de reconnaître plusieurs situations, l'auteur se penche vers l'idée selon laquelle, il est également considéré que la résistance opérée par ces mouvements constitue le plus sacré de leurs droits et le plus indispensable de leurs devoirs. Nous reviendrons quant à nous sur cette prétendue justification des irrégularités dans le second chapitre. Comprenons tout simplement à ce niveau qu'une telle reconnaissance ne peut que polariser des controverses. En attendant cette discussion, nous cherchons une autre définition de la reconnaissance dans la théorie et la pratique de la fonction exécutive en droit international.

    Georges SCELLE, dans Théorie et Pratique de la fonction exécutive en droit international, définit la reconnaissance comme étant « la procédure de constatation de la régularité des investitures gouvernementales. »2(*) Cette définition a le désavantage de s'éloigner même de la nature juridique de la reconnaissance. Elle n'insiste pas sur le caractère unilatéral de celle-ci dont toutes les définitions de la reconnaissance font un élément définitionnel très important. Certes, la reconnaissance est une procédure d'identification sur la scène internationale. Ce que l'auteur souligne sans ambages. Mais nous pensons à ce niveau, qu'il fallait insister beaucoup plus sur le caractère d'acte unilatéral et en conséquence un acte juridique autonormateur.

    Cette définition a aussi l'inconvénient de limiter trop le champ de la reconnaissance. Elle considère comme objet de la reconnaissance sans réserve, la régularité des investitures gouvernementales. Le fait pour l'auteur, de ne pas être exhaustif quant à ce, traduit la méfiance des auteurs à l'égard de certaines reconnaissances. Ce qui réduit lamentablement l'objet de la reconnaissance qui, comme on le dira est élargi par la pratique internationale contemporaine. Elle s'acclimaterait ainsi à la reconnaissance comme nation définie par CORNU comme : « L'acte par lequel un État déclare son intention de reconnaître comme État, si elle conquiert son indépendance, une collectivité encore incorporée à un autre État.»3(*)

    Il sied soit d'intégrer dans la définition de la reconnaissance un tel objet, soit discuter du problème de licéité auquel il donne lieu. C'est ce que nous faisons d'une part dans cette section pour la première hypothèse et d'autre part, dans le second chapitre pour la deuxième hypothèse. Nous démontrerons par ailleurs qu'un tel élargissement du champ de la reconnaissance traduit la nécessité pour le droit international de s'arrimer à la vie de la société internationale.

    Aucune de ces définitions n'est canonique et ne s'impose en pratique.

    Nous démontrerons dans le second chapitre, qu'aucun gouvernement ne renoncerait à réprimer une tanche minorité de sa population qui déstabilise les institutions de l'État et qui en conséquence met à mal la bonne marche et le bon fonctionnement de ses institutions. Quant au refus de reconnaissance auquel l'auteur ne fait pas allusion, il faut retenir que plusieurs doctrines insistent sur le fait qu'il existe une obligation pour les États de ne pas reconnaître certaines situations. C'est notamment la doctrine TOBAR, ESTRADA et la doctrine STIMSON,...; Il importe de faire l'économie de ces deux premières. Quant à la troisième, nous en parlerons plus.

    D'après la doctrine TOBAR, il existe à la charge des États une obligation juridique de refus de reconnaissance des gouvernements établis par la force.4(*) Le principe de non recours à la force a été considéré comme un principe coutumier, sinon de jus cogens. Ce qui élargit le champ ou laisse la place aux Règlements pacifiques des différends. Sur base de ces deux principes, on peut s'interroger à juste titre si vraiment les mouvements rebelles valent d'être reconnus. Dans le second chapitre, nous porterons une attention particulière à cette considération de taille. En effet, la doctrine TOBAR citée ci-haut insiste finalement sur ce sacro principe de non recours à la force dans les rapports internationaux auxquels les Etats ont donné un fondement coutumier même s'ils ne le respectent que très imparfaitement.

    Néanmoins, cette doctrine telle que pensée, ne fut jamais reconnue en dehors des Amériques et ne s'est pas imposée comme un principe du droit international. Les Etats ne pouvaient l'admettre comme tel.

    Elle a donc cédé la place à la doctrine ESTRADA. Celle-ci stipule que « le Mexique ne se prononce pas sur le point d'un octroi de reconnaissance. Il considère en effet que c'est là une pratique offensante, qui outre qu'elle attente à la souveraineté d'autres nations, fait que les affaires intérieures de celles-ci peuvent être l'objet d'appréciations, dans un sens ou dans un autre de la part d'autres gouvernements. »5(*) Cette déclaration du ministre des affaires étrangères du Mexique s'inscrivait dans la droite ligne du respect de l'autonomie constitutionnelle. Celle-ci est connue en droit international comme un principe phare, malgré qu'aujourd'hui la souveraineté n'est plus étanche suite au passage de la pyramide au réseau.

    Le choix d'un gouvernement étant la conséquence du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, il relève des questions que le droit international réserve à la compétence nationale en effet. Toute prise de position sur ce sujet (positive ou négative) s'analyse en une ingérence prohibée par le droit international.

    Les exigences de la vie politique et le principe de non-ingérence ne laissent pas la possibilité aux États de reconnaître des mouvements rebelles donc. Nous y reviendrons dans le second chapitre pour démontrer que le Conseil de sécurité aurait interdit les États de les reconnaître en vertu de ce dernier principe ci-haut cité.

    Les différentes doctrines de refus de reconnaissance qui ont été développées dans le temps, dénotent l'absence d'une valeur juridique pour les cas qui nous occupent, de la reconnaissance des mouvements rebelles, les gouvernements ne le faisant qu'en violation de toutes ces doctrines dans leur substance. Pour cette raison, un grand spécialiste de la question, VERHOEVEN, n'hésite pas à affirmer que « la reconnaissance est bien ainsi en voie d'éradication.»6(*) Du latin ra dix, ce terme d'éradication signifie racine. VERHOEVEN considère ainsi que la racine de la reconnaissance telle que définie serait en train d'être extirpée, mieux d'être arrachée, pour en faire disparaître le fondement même à savoir l'identification sur la scène internationale. Nous verrons dans la deuxième section de ce chapitre que la reconnaissance n'est soumise à aucune condition, ce qui fait qu'en pratique les États peuvent faire naître des situations anormales. Cette discrétion dans le chef des Etats traduit ainsi l'éradication de la reconnaissance préconisée par VERHOEVEN ; Ce dernier étant spécialiste de la question, insiste-je.

    En dépit de son caractère discrétionnaire cependant, nous verrons que la reconnaissance, d'État ou de gouvernement, peut être subordonnée au respect ou à la réalisation de conditions particulières, dont notamment, l'État de droit et la démocratie. Vous pouvez penser qu'après tout le problème du changement et de l'adaptation du droit aux besoins sociaux n'est pas propre au droit international et c'est vrai : marque d'une « politique qui a réussi »7(*), la norme de droit, dans quelque ordre juridique que l'on se situe, a inévitablement pour objet de figer les situations acquises et de les perpétuer. A notre avis la reconnaissance n'est que la décision politique des États préexistants, permettant l'établissement de rapports normaux avec le nouvel État. Les effets de la reconnaissance seront en général l'établissement de relations diplomatiques, une attitude favorable du point de vue politique, le caractère plus formel des rapports; mais tout cela n'a rien à voir avec la personnalité. On s'approche de la réalité lorsqu'on dit que la reconnaissance est à la base des relations internationales «volontaires», ce qui présuppose que l'État nouveau, du fait même de son existence, jouit de tous les bénéfices découlant du droit international général.8(*)

    La pratique contemporaine qui vient d'élargir le champ d'application de la reconnaissance avait dans le temps, tendu à encadrer l'appréciation étatique avec deux facteurs :

    Ø L'interdiction de la reconnaissance des situations acquises par la force; ici, toutes les doctrines de refus de reconnaissance semblent être reconduites.

    Ø La subordination de la reconnaissance au respect de l'État de droit, de la démocratie et des droits de l'homme. Ce facteur méritera plus d'analyses dans le second chapitre où nous traitons de la prétendue justification de la reconnaissance des mouvements rebelles tirée du fondement de l'Etat de droit, la démocratie et les droits de l'homme. C'est ainsi qu'en 1991, la Communauté européenne et ses États membres ont subordonné leur reconnaissance des nouveaux États en Europe orientale et en Union soviétique à la constitution de ces États sur « une base démocratique.»9(*) Cependant, les systèmes juridiques internes, qui reposent sur le monopole de la réglementation de l'usage de la force par l'État en son sein, sont loin de l'utiliser de manière toujours satisfaisante. Cela pourrait être justifié par le fait qu'aucun critère ne paraît être exigé pour la forme du gouvernement d'un État donné. A LOME, les Chefs d'État et de Gouvernement de l'O.U.A. avaient énoncés des principes qui insistent sur le fait qu'on ne peut pas reconnaître un changement anticonstitutionnel de gouvernement. Pour les rendre efficaces et pratiques, ils avaient décidé de donner la définition suivante aux situations pouvant être considérées comme un changement anticonstitutionnel de gouvernement :

    Ø un coup d'état militaire contre un gouvernement issu d'élections démocratiques ;

    Ø une intervention de mercenaires pour renverser un gouvernement issu d'élections démocratiques ;

    Ø une intervention de groupes dissidents armés et de mouvements rebelles pour renverser un gouvernement issu d'élections démocratiques ;

    Ø le refus par un gouvernement en place de remettre le pouvoir au parti vainqueur à l'issue d'élections libres, justes et régulières.10(*)

    Sur ces bases, nous examinerons d'une part si le CNT en Libye et d'autre part la coalition nationale syrienne valaient d'être reconnus. Est-ce qu'ils ne peuvent pas être considérés comme des situations voulant provoquer un changement anticonstitutionnel de gouvernement ? Car un État, dictatorial qu'il soit, devrait avoir un texte fondamental qui le régit, assimilé à une constitution. Le renversement de son gouvernement signifierait une violation de cette constitution. Par conséquent, il s'agirait d'un changement anticonstitutionnel de gouvernement. Nous verrons surtout qu'il est difficile de savoir dans les faits un État qui est démocratique ou non. En conséquence, nous réfléchirons sur certaines constitutions injustes car imposées par le pouvoir et qui peuvent donner lieu à une révolution aboutissant à un changement « anticonstitutionnel ». Une reconnaissance qui interviendrait serait alors illicite. Si le droit international considère que l'existence d'un appareil politique, un gouvernement, est indispensable à l'existence même de l'État, au même titre que la population et le territoire, écrit Robert BEN ACHOUR, il n'en demeure pas moins vraie qu'il ne va pas jusqu'à exiger que l'État ait une forme déterminée de gouvernement ou adopte des modalités particulières d'accession au pouvoir.11(*) Alors, l'analyse de l'enseignement de la Déclaration du 10 juillet 2000 sur les changements anticonstitutionnels de gouvernement (2000), adoptée en juillet 2000, à LOME au TOGO, par l'Assemblée des Chefs d'État et de Gouvernement de l'O.U.A., dont le texte intégral est reproduit en Anglais dans HumanRights Law in Africa, nous pousse à affirmer que cet enseignement n'aurait plus de raison d'être en ce sens que le droit international n'est pas exigeant quant à ce. C'est avec cette analyse que nous concluons cette section en ces termes.

    Nous retenons en définitive que si l'idée de la reconnaissance paraît claire, la définition précise est cependant malaisée. Si les théoriciens en droit international n'établissent pas clairement la différence entre les points de vue politique et juridique de la reconnaissance en effet, son objet à cet effet, tel qu'il apparaît en droit strict n'est pas bien établi. Voilà pourquoi, la pratique internationale contemporaine en profite pour reconnaître n'importe quelle situation. Pourtant, nous ne le dirons jamais assez, si la reconnaissance est discrétionnaire, elle ne devrait pas cependant contribuer à réconforter des situations illicites. Conscient de cette assertion, nous devons préciser qu'en matière de reconnaissance, le jus cogens doit demeurer intact. Si non, le Conseil de sécurité de l'ONU doit imposer l'obligation de ne pas reconnaître. La jurisprudence internationale émerge dans ce cens. En effet, la CIJ avait émis à l'occasion d'un avis dans l'affaire de la Namibie, le 21 juin 1971, l'obligation de ne pas reconnaître une entité qui aurait été créée en violation des résolutions de l'ONU.12(*) Certes, les résolutions de l'assemblée générale ne revêtent pas toutes les caractères de norme de jus cogens. Elles n'acquièrent ce caractère que lorsqu'elles codifient le droit coutumier existent. Somme toutes, dans cette affaire, on tire un fondement général quasi coutumier de ce principe sous analyse.

    Les États, ne se conformant cependant que rarement et difficilement aux exigences de la vie en société internationale, ils se cachent derrière des définitions laconiques. Ils arrivent ainsi à respecter une norme à la lettre, sans suivre son esprit ou à respecter sa substance sans suivre son objectif. Une telle confusion crée dans le domaine du droit une incertitude plutôt inquiétante au regard du fait que le droit international serait par fonction conservateur. Cela nous pousse à discuter des effets de la reconnaissance en général pour mieux cerner plus tard les conséquences de la reconnaissance des mouvements rebelles.

    Section 2 : Les différentes formes de reconnaissance

    Les reconnaissances (ou les non reconnaissances) par les États des situations les plus diverses ne sont assujetties à aucune forme particulière.13(*) De ce point de vue, il appartient souverainement à l'État intéressé d'exprimer en conséquence sa volonté de la manière qu'il juge la plus appropriée. Elle peut être expresse ou implicite (§I) comme elle peut être de jure ou de facto (§II). La reconnaissance conditionnelle s'oppose à la reconnaissance sans réserves. (§3)

    §I. Reconnaissance expresse et reconnaissance implicite

    VERHOEVEN a écrit que les auteurs qui retiennent une définition stricte de la reconnaissance, sont particulièrement critiques à l'égard de la reconnaissance conditionnelle.14(*) Celle-ci s'oppose à la reconnaissance sans réserves comme dit ci-haut et comme on aura à le développer plus tard. La reconnaissance expresse, forme la plus courante, suppose l'adoption d'un acte juridique plus ou moins solennel qui exprime clairement la reconnaissance. La reconnaissance tacite ou implicite se déduit de certains faits ou de certains actes normalement réservés aux relations inter étatiques accomplis par l'État préexistant. La reconnaissance tacite pose un problème de preuve cependant. En effet, on s'interroge sur les faits ou actes qui ont indiscutablement cet effet. La solution proposée, d'après NGUYEN, est tirée du fait « qu'il ne fait aucun doute que l'établissement de relations diplomatiques correspond à une reconnaissance tacite, lorsqu'il n'est pas précédé ou accompagné d'une reconnaissance expresse. »15(*)

    Pour que deux États établissent ainsi et entretiennent des relations diplomatiques, il ne suffit pas qu'ils soient l'un et l'autre, sujets de droit international, il faut encore qu'ils souhaitent nouer de telles relations, ce qui implique, à tout le moins, qu'ils se reconnaissent. On se rend compte du rapprochement entre l'établissement des relations diplomatiques et la reconnaissance ; l'un et l'autre étant dépendants de l'autre. Cette interdépendance est cependant atténuée par certains facteurs. L'établissement des relations diplomatiques est donc une manifestation de la reconnaissance mutuelle de deux États. Par l'envoi d'une mission diplomatique, l'État accréditant exprime sa reconnaissance de l'État accréditaire et de son gouvernement. En cas de changement de gouvernement de l'État accréditaire se produisant de manière tumultueuse, le maintien en place d'une mission diplomatique ne signifie pas nécessairement reconnaissance de ce gouvernement. La mission se bornera d'ailleurs à de simples contacts officieux ou privés ne portant que sur des questions urgentes et de routine ou s'abstiendra de tout rapport avec les nouvelles autorités. Une telle attitude ne peut, par la nature des choses, qu'être brève. La reconnaissance expresse intervient donc par un acte juridique. Cet acte n'est pas bilatéral ou multilatéral mais unilatéral et plus ou moins solennel et exprime clairement l'intention de son auteur. Mais il peut être collectif ou conjoint. Ce qui ne signifie pas qu'il perd son caractère unilatéral. Il doit provenir d'un État16(*), ou d'une organisation internationale dans tous les cas. Mais dans ces matières comme dans bien d'autres, le droit des gens n'est pas formaliste. L'intention de l'État qui reconnaît peut jouer un rôle très important. La reconnaissance internationale est en définitive le procédé par lequel un sujet de droit international, en particulier un État, qui n'a pas participé à la naissance d'une situation ou à l'édiction d'un acte, accepte que cette situation ou cet acte lui soit opposable, c'est à dire, admet que les conséquences juridiques de l'une ou de l'autre s'appliquent à lui.17(*)

    Cela démontre la quintessence même de la distinction entre reconnaissance explicite et implicite. Eu égard à ce qui précède, on se rend compte que le consentement de l'État demeure de grande importance. L'important est de savoir que si la reconnaissance peut être émise de manière expresse, elle peut également l'être de manière implicite.

    Si l'établissement des relations diplomatiques emporte reconnaissance implicite, ce n'est donc pas une présomption irréfragable ; elle cède devant la preuve d'une intention contraire. En revanche, la reconnaissance d'État ou de gouvernement n'implique pas nécessairement l'établissement des relations diplomatiques. Celles-ci se distinguent des relations consulaires. Il est important de noter que les relations consulaires ont essentiellement un caractère administratif et non politique. Par conséquent, leur établissement est indépendant de celui des relations diplomatiques et même de la reconnaissance mutuelle des États concernés. Inversement, la rupture des relations diplomatiques n'entraine pas nécessairement celle des relations consulaires.

    §II. Reconnaissance de jure et reconnaissance de facto

    On distingue la reconnaissance de jure, par laquelle l'État admet un fait durablement établi, et la reconnaissance de facto, révocable, par laquelle il reconnaît une situation précaire. Il n'existe pas une différence de nature, mais seulement de degré entre la reconnaissance de jure et la reconnaissance de facto.La reconnaissance de facto, révocable, est une reconnaissance provisoire, et qui produit des effets plus limités. Elle ne doit pas être confondue avec la reconnaissance implicite. Celle-ci se distingue de la première par le fait que cette dernière peut être de jure c'est à dire l'État admet un fait durable, mais reste tacite car déduite de certains faits ou de certains actes normalement réservés aux relations interétatiques. Inversement, la reconnaissance de facto peut être expresse, car un État peut s'engager de manière révocable ou provisoire mais tout en adoptant un acte juridique plus ou moins solennel qui exprime clairement la reconnaissance. Si le nouveau gouvernement est bien effectif, il ne tolérera pas qu'elle perdure et il faudra ou bien reconnaitre ou bien fermer la mission. Par ailleurs, l'agrément donné à l'envoyé du nouveau gouvernement ainsi que l'acceptation des lettres de créances qui en émanent ou la remise des lettres qui lui sont adressées valent reconnaissance. En principe donc, lorsqu'on ne reconnait pas un État on n'a pas de relations diplomatiques avec lui. Toutefois, dans ce domaine comme dans d'autres, l'intention des parties peut jouer un rôle pratique important.18(*)

    Lorsqu'un État procède à une reconnaissance de facto, il agit dans le souci d'aider un groupe humain qui est en train de se constituer en État et pour sauvegarder ses propres intérêts. Néanmoins, il s'abstient de s'engager définitivement ; car le processus de création n'est pas achevé et son issue reste aléatoire. Cette forme de reconnaissance est donc un expédient mais un expédient nécessaire et conforme au droit international. Elle permet d'éviter une reconnaissance prématurée. Dans l'avenir, si l'État naissant se consolide, la reconnaissance de facto sera transformée en reconnaissance de jure ; si, à l'inverse, l'indépendance n'est pas acquise, la reconnaissance sera révoquée. NGUYEN illustre ces propos par un exemple : « Les reconnaissances de facto octroyées en 1920 aux provinces sécessionnistes de Géorgie, d'Arménie et d'Azerbaïdjan ont été retirées après le succès de la reconquête par les forces bolcheviks sur la reconnaissance des États baltes lorsqu'ils ont recouvré l'indépendance. »Nous démontrerons dans le second chapitre que la plupart de fois, la reconnaissance des mouvements rebelles intervient de facto au regard de la dichotomie qui s'observe entre deux gouvernements implantés dans un même pays et de la nécessité d'un équilibre entre paix et justice. Cette prudence fait qu'un État observe une réserve à sa reconnaissance : c'est la reconnaissance conditionnelle. Celle-ci s'oppose à la reconnaissance sans réserves.

    §III. Reconnaissance sans réserves et reconnaissance conditionnelle

    La reconnaissance conditionnelle consiste, de la part de l'État qui reconnaît, à subordonner l'octroi ou le retrait de sa reconnaissance à la réalisation de conditions autre que celles qui résultent de situations objectives. Il fait ainsi dépendre sa reconnaissance d'un événement futur dont la réalisation est incertaine. On sait que telle reconnaissance est en principe illicite car la reconnaissance doit être pure et simple. Mais ne perdons pas de vue car dans cette matière comme dans d'autres, l'intention de l'État qui reconnaît peut jouer un rôle important.

    La Commission d'arbitrage de la conférence pour la paix en ex Yougoslavie a estimé d'ailleurs que la reconnaissance « est un acte discrétionnaire que les autres États peuvent effectuer au moment de leur choix, sous la forme qu'ils décident librement ».19(*)

    Une telle position s'ajoute à plusieurs autres émises par la doctrine contemporaine. Mais nous la considérons erronée à plus d'un titre. En effet, la Commission d'arbitrage ci-haut citée avait précisé que les États sont tenus de respecter les conditions mises à l'acte de reconnaissance par le droit international et par la Déclaration et les lignes directrices du 16 décembre 1991.

    Il s'agit en ce qui concerne le droit international des conditions juridiques, politiques ; auxquelles on peut ajouter l'obligation de ne pas reconnaître telle que prônée par STIMSON. En effet, en ces matières comme dans bien d'autres de droit des gens, les règles de jus cogens ne doivent pas être méconnues (condition juridique à laquelle nous ne nous attèlerons jamais assez). Par ailleurs, la reconnaissance est accordée sur la seule base des avantages que son auteur entend obtenir ou des intérêts de même ordre qu'il a pour souci de défendre (raisons politiques). Quant à la doctrine STIMSON, voire le précédent de MANDCHOUKOUO loin.

    La reconnaissance est donc en principe conditionnelle même si l'on soutient qu'il existe des conditions de la reconnaissance qui n'emportent pas ce caractère. Néanmoins, lorsqu'elle est envisagée comme soumise à des conditions autres que celles citées ci-haut et qui semblent plutôt subjectives, l'on parle alors d'une reconnaissance conditionnelle sous entendue comme une forme particulière, niée cependant.

    Ces auteurs auxquels il fait allusion voient dans la reconnaissance, une déclaration de capacité telle qu'elle résulte de faits objectifs. Il s'agit alors selon ces tenants, de conditions objectives qui sont imposées mais qui n'entachent pas la forme de la reconnaissance. SCELLE corrobore ces propos en disant que « la reconnaissance est nécessairement pure et simple, puisqu'elle est un acte de constatation de légalité. »20(*) Elle ne saurait être avec réserves.

    Une question importante attire notre attention à ce niveau : il s'agit de l'établissement des relations diplomatiques, avec réserves sur la reconnaissance. Est-ce qu'on peut établir des relations diplomatiques en émettant une réserve sur la reconnaissance ? Car cela n'est pas ignoré du droit international.

    A cette question, VERHOEVEN répond de la manière suivante : « Si un État est disposé à établir des relations diplomatiques en faisant des réserves sur la reconnaissance, cette intention fait évidemment loi. »21(*) Il donne ainsi comme exemple, l'établissement des relations diplomatiques entre les États-Unis et la Syrie ainsi que le Liban au courant de l'année 1941 alors que les premiers ne reconnaissent pas ces derniers comme des États indépendants.

    Section 3. Problématique de la reconnaissance de la belligérance

    La reconnaissance de belligérance attribue aux insurgés la personnalité internationale d'un gouvernement "de fait" sur la portion de territoire qu'ils contrôlent. A ce titre, MAZZESCHI a écrit que « leur responsabilité internationale pourra être engagée lorsqu'ils triomphent du gouvernement légal. »22(*) L'objet de la reconnaissance tel qu'il apparaît en droit international strict, n'est essentiellement si pas fondamentalement un fait, une situation ou un sujet de droit (État nouveau, gouvernement nouveau parvenu au pouvoir par des voies inconstitutionnelles). Cependant, la reconnaissance de la belligérance dont le régime juridique (§III) sera accordé en prenant en compte une situation spécifique, a des origines et repose sur les idées générales (§I) qui méritent d'être confrontées à la pratique internationale (§II).

    §I. Origines et idées générales de la reconnaissance de la belligérance

    Cette doctrine de reconnaissance est d'origine nord-américaine. Il s'agit là d'une pratique généralement appliquée à la fin du XIX ème siècle, notamment à l'égard du Chili, du Venezuela, du Brésil et du Cuba. Elle semble avoir été inaugurée par les États-Unis au lendemain de l'insurrection cubaine de 1868 contre l'Espagne, le Département d'État ayant dénié à cette occasion tous droits de belligérance aux insurgés tout en reconnaissant l'existence d'un état d'insurrection. Mais il y a eu à la même époque, plusieurs cas analogues qui n'ont entraîné aucune reconnaissance d'insurrection de la part des États-Unis.22(*) On se rend compte ici qu'elle s'est répandue à l'Amérique, les États-Unis ayant joué un rôle clé dans l'attribution ou la non attribution des droits de belligérance. Ceux-ci sont refusés indépendamment de la reconnaissance de l'état d'insurrection. Celle-ci ne confère pas ipso facto des tels droits. Ces derniers ne sont reconnus que lorsque les insurgés sont admis au bénéfice du droit de la guerre, c'est à dire lorsqu'ils sont reconnus désormais comme belligérants. On se rend compte également ici de la différence entretenue entre la nature des droits accordés aux belligérants de ceux accordés aux insurgés. Ces derniers sont du reste amoindris que les premières. Mais dans toutes ces matières, les époques ne se ressemblent pas.

    AGO écrivit à cet effet: « Il y a là une raison de difficultés beaucoup plus subtile, plus cachée et, en dernière analyse, beaucoup plus grave que celle qui est représentée par l'influence de doctrines d'ordre politique dont le fondement et les finalités sont d'ailleurs trop évidents pour qu'on s'y méprenne. »23(*)Mais il reste que l'on se trouve ici en face d'une contradiction fondamentale entre les normes fondamentales du droit des gens, selon qu'il s'agit de guerre étrangère ou de guerre civile.

    Tandis que dans les relations inter étatiques, la guerre est devenue un acte illicite, un délit, voir un crime et le Pacte BRIAND-KELLOGG, à la suite d'une évolution rapide, a constitué la renonciation solennelle de presque tous les gouvernements à la compétence de guerre, nous allons constater ou voir dans le second chapitre de ce travail, que le droit des gens moderne continue à reconnaître la compétence de guerre entre partis politiques à l'intérieur d'un même État. Comme nous le remarquerons, il ne peut pas y avoir de cloison étanche entre l'ordre constitutionnel interne et l'ordre constitutionnel international, et les procédés d'investiture réprouvés par l'un ne devraient pas pouvoir être tolérés dans l'autre.

    L'article X du Pacte de la Société des Nations, en prohibant la conquête par la force des compétences internationales, mais en admettant implicitement la conquête par la force des compétences internes, est un illogisme vivant, qui fait toucher du doigt l'inconséquence de la doctrine dualiste. Il n'y a malheureusement qu'un remède lointain, et qui semble actuellement impraticable, à cet état de choses anarchique : le contrôle de la société internationale sur le jeu des institutions constitutionnelles internes. Il existe pourtant un précédent dont la doctrine a fait état à juste titre, en raison de la façon dont il tranche sur la pratique coutumière. C'est la reconnaissance « comme nation », au cours de la Grande Guerre, de la Pologne et de la Tchécoslovaquie avant même que les dirigeants de la collectivité insurrectionnelle aient pu acquérir sur le territoire où ils voulaient établir leur pouvoir cette effectivité qui est à la base de la reconnaissance de fait.24(*)

    C'est le cas de figure le plus ancien et le plus classique. Il correspond à la situation de révolutionnaires ou de séparatistes qui, à l'occasion d'une guerre civile, ont établi effectivement leur autorité sur une partie du territoire de l'État, alors que la lutte continue avec le gouvernement légal. Il peut alors arriver que les États tiers reconnaissent aux insurgés le statut juridique de belligérants, c'est à dire qu'ils acceptent d'appliquer par rapport à eux les règles du droit de la guerre. C'est le passage d'un statut à l'autre. C'est notamment l'exemple de la France et la Grande Bretagne, en 1861, qui reconnaissent comme belligérants les "confédérés " sudistes. Deux conditions essentielles s'imposent pour qu'il y ait reconnaissance de belligérance :

    Ø Il faut que le belligérant contrôle effectivement une partie du territoire ;

    Ø Il faut qu'il se comporte en quelque sorte comme un gouvernement régulier.25(*)

    Les pouvoirs de l'autorité « belligérante » sur la portion de territoire qu'elle contrôle sont assimilables à ceux d'un occupant de guerre. L'ordre juridique mis en place par l'organisation insurrectionnelle est opposable au sujet du droit des gens et justifie que soit engagée la responsabilité internationale des autorités insurgées lorsqu'elles triomphent du gouvernement légal. Le cas de l'Alliance pour la Force Démocratique de la Libération en RDC nous édifie davantage. Nous y reviendrons dans le second chapitre. Dans la conduite du conflit armé, le pouvoir légal et les insurgés doivent respecter le Droit International Humanitaire. Les États tiers devront respecter la neutralité. L'affaire des activités armées, RDC c. Ouganda nous édifie d'avantage. La CIJ avait condamné l'OUGANDA pour avoir violé l'article 2, §4 de la Charte de Nations unies et les principes cardinaux du droit international humanitaire. Nous en parlerons lorsqu'il sera question de traiter du cas de reconnaissance en République démocratique du Congo dans le second chapitre. A la différence des autres types de reconnaissance, la reconnaissance de la belligérance n'a que des effets limités et temporaires. Elle se distingue ainsi de la reconnaissance de l'État ou du gouvernement. Le parti ainsi reconnu, dit ROUSSEAU, sera traité comme un État, mais seulement pour ce qui est des opérations militaires.26(*)

    La reconnaissance de belligérance n'a qu'un effet limité aux effets militaires avions-nous dit et elle n'est que temporaire. Ainsi, la reconnaissance de la belligérance permet d'attribuer aux belligérants la personnalité juridique internationale d'un gouvernement « de facto » local.Cela se comprend mieux lorsque la reconnaissance intervient par un acte juridique. Le problème est posé autrement lorsque la reconnaissance n'est que factuelle. C'est à dire, elle a été implicite ou silencieuse. Alors la reconnaissance apparaît comme une bouteille à encre. La capacité de sujet du droit international sera ainsi reconnue. La reconnaissance comme insurgés intervient alors au détriment des thèses de la reconnaissance déclarative. Selon celles-ci, une reconnaissance ne confère pas la capacité juridique. Les États qui ont reconnu les insurgés comme belligérants, admettent que ceux-ci ont le droit d'exercer à leur égard les prérogatives des États belligérants à l'égard des neutres. Mais cela ne signifie pas d'emblée que leur personnalité est absolue. L'acte de reconnaissance, en général, définit et limite les compétences des belligérants, par rapport à l'État qui reconnait, dans leur lutte contre l'autorité établie.27(*)

    Cette reconnaissance de belligérance se distingue de la reconnaissance comme insurgés. On soutient qu'une reconnaissance d'insurrection met en place un statut particulier. Sommes toutes, cette théorie nous a permis de baliser notre chemin. Maintenant, nous allons aborder la question essentielle de notre travail de recherche : la problématique de la reconnaissance des mouvements rebelles dans la pratique internationale contemporaine.

    §II. État de la pratique internationale

    On a dit qu'une reconnaissance d'insurrection met en place un statut particulier. Celle-ci se définit comme « un acte par lequel un État déclare que les individus qui luttent contre lui les armes à la main seront soustraits au traitement habituel appliqué aux rebelles. »28(*) Après avoir été largement utilisée, la pratique internationale semblait traduire une désuétude de cette forme de reconnaissance. Aujourd'hui, elle apparaît sous d'autres formes ; ce qui complique davantage son régime juridique. Les États qui ont reconnu les insurgés comme belligérants admettent que ceux-ci ont le droit d'exercer à leur égard les prérogatives des États belligérants à l'égard des neutres. En effet, un effet pratique est ressenti par exemple dans le domaine maritime. Cela est surtout traduit par :

    Ø Le droit d'instaurer un blocus ;

    Ø Le droit d'inspection et de visite des navires neutres.

    Ø La mise en oeuvre du droit de prise, le cas échéant.

    La doctrine a essayé de faire en sorte de limiter cependant les cas où une reconnaissance de belligérance pourrait être licitement prononcée.29(*) Nous y reviendrons dans le point suivant relatif au régime de cette reconnaissance. Dès lors, si l'on doit reconnaître les gouvernements de fait, il faut également reconnaître comme légitime l'action préparatoire qui doit leur permettre de s'introniser, c'est-à-dire l'insurrection. Lorsque les insurgés ont fait preuve d'une certaine faculté de stabilisation, notamment lorsqu'ils occupent une aire territoriale et s'y font obéir, il y a lieu de leur reconnaître une compétence analogue à celle que confère, dans la guerre internationale, l'occupatio bellica. La règle de l'effectivité du pouvoir s'accorde ici avec le principe de souveraineté et l'autonomie gouvernementale. La reconnaissance ne pourrait être refusée que si les insurgés, par leur conduite ou par leurs déclarations, répudiaient les normes générales du droit des gens, se mettaient eux-mêmes hors de la Communauté internationale.30(*)

    La doctrine a essayé de faire en sorte de limiter les cas où une reconnaissance de belligérance pourrait être licitement prononcée. C'est à dire des conditions nouvelles sont apparues en terme d'évolution du droit international. En effet, il faut que le belligérant contrôle effectivement une partie du territoire et se comporte en quelque sorte comme un gouvernement régulier. GREEN n'est pas de cet avis. Selon lui, « la reconnaissance de la belligérance est demeurée un acte essentiellement discrétionnaire souvent subordonné à des considérations d'opportunités politiques. »31(*) La jurisprudence internationale a quant à elle souvent rappelé ce principe de liberté. La reconnaissance est un acte exclusivement politique. La pratique internationale atteste que l'influence de la reconnaissance sur la réalisation d'une effectivité est décisive. Dans la pratique, elle est accordée ou refusée pour des raisons politiques. Un État refuse de reconnaître en effet sur la seule base des avantages qu'il entend obtenir. Il peut s'agir également des intérêts de même ordre qu'il a pour souci de défendre.

    C'est ainsi que l'on arrive à nier non seulement l'existence du droit international, mais également et surtout la possibilité, même théorique, de son existence, quand on considère les États comme l'ultime point auquel puisse arriver la capacité des hommes à s'associer dans des formes juridiques, et même le seul milieu où ils arrivent à concevoir ces relations comme juridiques.32(*) On comprend sans peine le particularisme ou le caractère réfractaire du droit international à ce niveau: un droit qui régit essentiellement les rapports entre sujets égaux, indépendants et souverains. Seuls ceux-ci seraient assujettis à la reconnaissance car ayant la reconnaissance. Mais cet élément objectif peut être en conflit avec un autre, subjectif en nature, à savoir le consentement des États.

    Ceux-ci ne respectent les principes de droit international que très imparfaitement. Ils s'entendent ainsi pour reconnaître des situations analogues mais qui n'ont pas de personnalité juridique internationale. Cela traduit la pratique nouvelle dont l'équivalence constitue la simple évanescence de la reconnaissance sous son aspect traditionnelle.

    Les États ont en effet pendant longtemps considéré de tels conflits comme participant de leurs affaires internes, régies par le droit national. Aucun État n'est par conséquent prêt à accepter que ses citoyens puissent mener une guerre contre son gouvernement. En d'autres termes, aucun gouvernement ne renoncerait d'avance à punir ses propres citoyens pour leur participation à une rébellion. Une telle renonciation, pourtant, constitue l'essence même du statut de combattant prévu dans le droit des conflits armés internationaux. Malgré l'intensité des combats terrestres dans les insurrections contemporaines, il paraît toujours préférable aux États de ne pas entrer dans une controverse sur l'état de guerre, en raison de la condamnation de principe du recours à la force et des incertitudes du principe d'autodétermination (non-reconnaissance du droit de sécession).33(*)

    §III. Régime de la reconnaissance de la belligérance

    A cet égard, concernant la reconnaissance des mouvements qui emploient la force, nous savons que le droit international tend à l'interdire. Cette attitude est depuis lors connue sous le nom de « doctrine STIMSON ». Le jus cogens demeure par ailleurs un bloc de règles qui ne doivent pas être entachées d'irrégularités. En effet, un acte unilatéral contraire à une norme jus cogens est nul de nullité absolue.34(*)

    Le Secrétaire d'État américain STIMSON avait refusé de reconnaître une situation acquise par la force en contradiction avec le Pacte de Paris (dit Pacte BRIAND-KELLOGG) d'août 1928. Depuis le précédent de MANDCHOUKOUO, il a été maintes fois souligné que le États ont l'obligation de ne pas reconnaître l'annexion d'un État. Cette obligation s'étendait également à tout ou partie du territoire d'un autre État. Cette interdiction ne jouait qu'à condition que l'annexion d'un État soit réalisée par la force des armes. L'autre condition était la violation du droit international en y procédant. A la suite de l'occupation en 1931 par le Japon de la Province chinoise de MANDCHOURIE, le Japon entreprit de créer un État fantoche, le MANDCHOUKOUO. Nous nous rappelons ici des limitations au caractère discrétionnaire de la reconnaissance que nous avons analysées dans la première section de ce chapitre et auxquelles nous reviendrons amplement dans le second chapitre. Selon NGUYEN, « cette première tentative d'encadrement de la compétence de reconnaissance paraissait se solder par un échec. »35(*)

    Le jus cogens constitue l'ensemble des principes généraux indélogeables de droit international. Certains principes du droit international, considérés jusque-là comme intouchables ont subi des modifications subtiles cependant. S'il est interdit de reconnaître une situation qui viole le jus cogens, il n'est pas certain qu'une insurrection le viole au cas où l'on se range vers son aspect humanitaire. Ce dernier temps, la pratique internationale insiste sur sa portée humanitaire. Toutefois, il faut toujours analyser chaque cas isolement. On peut alors affirmer, sans avoir peur d'être contredit, qu'il s'agit plus de la diplomatie qui va jouer à la place du droit dans l'organisation des rapports internationaux. Nous y reviendrons dans le second chapitre. La nature juridique de l'acte de reconnaissance « est essentiellement sinon en la forme, du moins au fond, un acte de juridiction matériel, puisqu'il s'agit de vérifier la régularité d'une situation juridique objective. »36(*)

    Ainsi, les intérêts à tirer d'une reconnaissance illicite ne peuvent pas empêcher aux États qui le veulent de reconnaître une situation contraire aux objectifs des normes envisagées. N'en déplaise au fameux jus cogens dont les contours sont d'ailleurs indécis malgré la fameuse définition contenue à l'article 53 de la Convention de vienne sur les droits des Traités de 1969. Sur cette notion, ROBLEDO avait déjà émis ses inquiétudes en ces termes : « Nous devons nous demander à présent si le jus cogens international devra irradier aussi, en tant que loi authentique de la communauté internationale, aux actes unilatéraux des États. » Mais il va de soi que cette reconnaissance de facto est la moins étendue de toutes. Elle ne comporte que les compétences strictement nécessaires pour la conquête éventuelle du pouvoir gouvernemental. Elle implique donc de la part des gouvernements tiers une stricte neutralité. Ils doivent s'abstenir de toute participation à la lutte. Nous ne disons point de toute intervention, car le contrôle même de l'effectivité du pouvoir belligérant et de la conformité de ses vues avec les principes généraux de droit constitue une intervention. Nous disons égale abstention, c'est-à-dire application du principe même qui est à la base du régime de la neutralité dans le système classique de la guerre. C'est bien en ce sens que paraît se développer à l'heure actuelle l'initiative du Gouvernement français en ce qui concerne l'accord qu'il préconise entre les gouvernements européens en vue d'organiser l'abstention des gouvernants tiers dans la guerre civile espagnole.37(*)

    Alors que le droit international traditionnel avait un caractère strictement inter étatique, le droit international contemporain régit formellement mêmes certaines relations entre États et individus, et d'autres entités non étatiques. C'est-à-dire qu'il ne régit plus formellement que des relations entre États et, ensuite, entre organisations internationales inter se ou entre États et Organisations internationales. La pratique internationale contemporaine évolue vers la reconnaissance des entités non étatiques sans personnalité juridique internationale. Elle est par ailleurs indécise. Il s'agit là, en effet, du cas limite de la reconnaissance du pouvoir de facto. Tant que la société internationale dans sa quasi-totalité restait imbue du principe monarchique et reconnaissait une compétence gouvernementale de droit divin, on pouvait considérer que l'insurrection était une atteinte au principe universel de la légitimité, et la reconnaissance de la belligérance, un acte hostile envers le gouvernement régulier. Louis XVI hésita longtemps, bien que la France fût en guerre avec l'Angleterre, à reconnaître la belligérance des colonies révoltées. Il implique comme corollaire le droit des nations à « se donner » le gouvernement qu'elles veulent. C'est une sorte de corollaire de la « souveraineté populaire » qui emporte à son tour ce qu'on pourrait appeler la compétence de révolution.38(*)

    CHAPITRE II : CAS, FORMES ET CONSEQUENCES DE LA RECONNAISSANCE DES MOUVEMENTS REBELLES DANS LA PRATIQUE INTERNATIONALE CONTEMPORAINE : Le problème de la licéité

    La reconnaissance du CNT en Libye (S1), a été suivie par la reconnaissance de la Coalition nationale syrienne(S2). Le RCD offre quelques éléments en matière de reconnaissance mais l'on ne saurait conclure à une reconnaissance du M23 en RDC (S3).

    Section 1. La reconnaissance du Conseil National de Transition (CNT) en Libye

    Nous allons d'abord présenter les faits (§1) avant d'en faire découler un problème de licéité (§2). Nous finirons par disserter sur la forme de cette reconnaissance (§3).

    §1. Présentation des faits

    Dans la guerre de la terreur en Libye, on avait fait miroiter que le régime en place emprisonne et torture la population. C'est ainsi que les américains refusèrent de permettre à un tel régime de détenir les armes de destruction massive. La guerre continua cependant sans relâche. La Résolution 1973 fut approuvée par le Conseil de sécurité afin d'empêcher le massacre de civils dans la région de BENGHAZI, où la population était fortement opposée au gouvernement de KADHAFI. C'était sur pied de la doctrine de la responsabilité de protéger la population d'après laquelle,un certain nombre d'interventions militaires peuvent être effectuées en dehors des circonstances qui légitiment l'emploi de la force en droit international telles qu'elles apparaissent dans la Charte des Nations Unies. Elle est définie comme l'ingérence humanitaire armée.39(*)

    En général, cette action de s'immiscer, de s'introduire indûment, sans en être requis ou en avoir le droit, dans les affaires des autres, constitue une action illicite. Une telle intervention en Libye en particulier, n'est pas nécessairement fondée sur les droits de l'homme. En effet, des telles actions sont assez souvent motivées par des intérêts économiques. En Libye par exemple, les français et les autres pays qui ont reconnu ces rebelles, pourraient poursuivre les gisements pétroliers que regorgeait ce pays et qui suscitaient la convoitise des différents pays occidentaux. Si l'on se réfère également à la RDC à l'époque de l'intervention belge de 1964, une telle conclusion s'avère vérifiée. En conséquence, une telle action ne favorise pas l'émergence d'une stabilité. En effet, les objectifs de l'intervention militaire des Belges furent sans équivoque d'après Guy VANTHEMSCHE : « le maintien de cet immense territoire sous la sphère occidentale en vue de faire des bénéfices économiques. »40(*)

    §2. Problème de licéité

    Ces nouvelles formes de reconnaissance infléchissent des normes traditionnelles. Nous avons défini la reconnaissance comme une procédure d'identification de l'État sur la scène internationale. On le sait, l'État de droit est apparu comme une notion légitimant la reconnaissance des mouvements rebelles. Cette notion a été la justification de la guerre à la Libye mais demeure jusqu'en ce jour une notion de droit interne.41(*)

    D'où le problème de licéité de la reconnaissance soutenue sur cette base. Nous démontrerons dans le paragraphe suivant que cette base est erronée et ne saurait nous convaincre amplement. Après KADHAFFI, la situation s'étant empirée, nous sommes d'avis que la compétence étant uniquement basée sur le fait de la détention de la plus grande force ne saurait être garantie. SCELLE a dit qu'elle est à la merci de la force comme elle est fondée sur la force.42(*)

    Pourtant, il peut en être autrement, lorsque le vice originaire se trouve purgé. Une telle purge peut passer soit par le procédé de la constitutionnalisation, soit par celui de la prescription. La première hypothèse semble avoir été suivie par la Libye. Mais de quelle manière ? En analysant le contexte dans lequel intervint l'action en Libye, telle que la présentation des faits ci-haut le démontre, on se rend compte de l'illicéité de la reconnaissance y consécutive. Le gouvernement de KADHAFIétait limité à la région de Tripoli. En ce sens,il ne pouvait plus poser de menace à la population civile. Néanmoins, l'opération militaire de l'OTAN se poursuivit. Sur un plan technique, l'appréciation de la pratique internationale contemporaine est bien plus complexe. L'insuffisance des capacités militaires des rebelles pour battre les troupes de KADHAFI, même en recevant de l'aide internationale, avait poussé l'OTAN à intensifier les bombardements, parfois d'une façon exagérée. D'où la nécessité de se poser la question si l'OTAN s'avérait incapable d'effectuer une distinction entre les deux camps de combattants, était-elle en mesure de ne viser que des cibles militaires, en épargnant toute la population civile comme le suggère les principes cardinaux du droit international humanitaire. La réponse est qu'elle n'a rien décidé : Cela révèle les crimes de guerre commis par l'OTAN. Ce qui constitue également une violation du principe de distinction connu en droit international humanitaire et selon lequel : « Toute personne impliquée dans un conflit armé doit distinguer les personnes civiles et militaires. »43(*)

    Pourquoi reconnaître de tels mouvements s'ils veulent acquérir le pouvoir par la force ? Les obligations internationales (établies par les Conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et sur les relations consulaires par exemple) de protéger les ambassades étrangères ou de fournir un accès consulaire aux ressortissants étrangers capturés, sont reconnus à quel pouvoir ? Alors que l'on sait l'indéniable interdépendance entre l'établissement des relations diplomatiques et la reconnaissance, l'on se demande le bienfondé de cette dernière quand l'effectivité du gouvernement joue encore sur une partie du territoire. Alors qu'une déclaration unilatérale en conflit avec une norme impérative du droit international est nulle44(*), les États se sont empressés à reconnaître le CNT. Une telle déclaration viole en substance ce huitième principe directeur applicable aux déclarations unilatérales.

    La reconnaissance du CNT a dans ce sens entravé le gouvernement dans l'exercice de son devoir de protection. Le seul critère en droit pour la reconnaissance d'une autorité ou d'un groupe en tant que gouvernement d'un État, est l'exercice d'un contrôle efficace sur le territoire de l'État. La France avait reconnu le CNT en plein début du conflit. Presque cinq mois après cette reconnaissance, le CNT ne possédait pas un «contrôle efficace» sur la Libye. La capitale du pays, Tripoli, restait encore sous le contrôle de KADHAFI. Il en découle qu'une telle reconnaissance intervient en violation du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures. L'illicéité d'une telle mesure se fait clairement voir au regard de la théorie évoquée dans le premier chapitre.

    La reconnaissance d'un groupe belligérant en tant que gouvernement alors qu'un autre gouvernement exerce ses fonctions dans la capitale du pays est, selon le droit international, une ingérence illégale dans les affaires intérieures d'un pays. Au demeurant, de cette diversité définitionnelle, l'on retient que la reconnaissance peut porter sur un nouvel État ou un gouvernement nouveau parvenu au pouvoir par voies inconstitutionnelles. Dans ce dernier cas, il s'agit d'un État déjà existant et reconnue comme État, mais dont l'ordre politique a connu des changements fondamentaux: coups d'État, révolution, etc. Il lui faudra alors l'imperium. C'est ainsi que l'institution de droit international (IDI) avait défini cette forme de reconnaissance comme étant « l'acte par lequel un ou plusieurs États constatent qu'une personne ou un groupe de personnes sont en mesure d'engager l'État qu'elles prétendent représenter en témoignant de leur volonté d'entretenir avec elles des relations. »45(*) Le fait que cette définition est muette quant à la nature du gouvernement ou à la manière avec laquelle il est arrivé au pouvoir malgré les doctrines de refus de reconnaissance qui ont été développées, ne nous aide pas à démontrer que les mouvements rebelles ne doivent pas être reconnus suivant en cela la manière avec laquelle ils se constituent et se lancent dans des opérations militaires en vue du renversement d'un gouvernement légitime ou non.

    Le devoir d'intervention humanitaire reconnu parfois en lieu et place de l'obligation de non-ingérence, peut-il donner force à cette reconnaissance ? Il existe c'est vraie, une tension réelle entre cette nouvelle pratique consistant à reconnaître des mouvements sans personnalité juridique internationale et le principe fondamental de la souveraineté de l'État. Mais, est-ce qu'on doit dénier à un État qui estime qu'il est dans son obligation de reconnaître ces mouvements une telle prérogative ? Aliis verbis, ne serait-il pas une façon de l'empêcher d'exercer ses obligations conformément au droit international ?

    D'après WESTMORELAND-TRAORÉ : « Les principes de la souveraineté de l'État et d'égalité entre les États sont invoqués comme moyens de protection contre un exercice abusif du droit d'intervention. Dans la foulée d'interventions étatiques de différentes natures, les intéressés recherchent les fondements juridiques de telles interventions ainsi que les moyens d'encadrement efficaces pour prévenir leur détournement de l'objectif humanitaire. »46(*)

    Est-il alors encore légitime de jeter les pierres aux États qui reconnaissent les mouvements rebelles alors qu'il est dans leur devoir de le faire ? Le principe de souveraineté qui fonderait cette attitude n'est plus étanche. Le principe d'égalité est théorique. Les fondements juridiques ne manquent pas d'ampleur. Alors, pourquoi le débat ? Nous restons persuadé que perdre de vue sur la nature des choses serait compromettre même la substance du droit international. Celui-ci, lorsque pris classiquement, considère la reconnaissance qui ne porterait pas sur l'État ou le gouvernement comme une violation et que les conséquences seraient de nature à compromettre les relations internationales.

    La reconnaissance par la France du CNT en tant que gouvernement de la Libye en 2011, au-delà d'une violation du droit international, présente donc des conséquences drastiques eu égard à ce qui précède. La conséquence de la reconnaissance du CNT est d'entrée de jeu l'entrée de l'OTAN dans le conflit afin d'écarter KADHAFI du pouvoir. Il s'agit de l'intervention dans une guerre civile. Celle-ci est d'après le droit international une affaire intérieure. En effet, le principe de non intervention dans les affaires intérieures d'un autre État est prolongé par celui de non intervention dans une guerre qui l'oppose avec ses ressortissants. La reconnaissance qui intervient au mépris de ce principe est alors vue comme une violation du droit international.

    Au-delà de toutes ces considérations, on peut également se pencher du côté des États qui ont reconnu le CNT, pour savoir exactement la raison d'être d'une telle reconnaissance. Il est admis que les gouvernements des pays dits « démocratiques » sont hostiles aujourd'hui à tout gouvernement qui ne le serait pas. Ils chercheraient alors à tout prix à se débarrasser de lui en vue de se conformer aux exigences de la vie internationale en usant de tous les moyens possibles comme ce fut le cas pour les peuples coloniaux luttant pour l'indépendance.

    Mais Serge HALIMI s'inquiète. Il dit : « Qui croit (...) que des États, quels qu'ils soient, consacrent leurs ressources et leurs armées à l'accomplissement d'objectifs démocratiques ? »47(*) Conscient que cette assertion est en phase de tout ce qui se déroule aujourd'hui dans le monde et qu'on tente de légitimer ; nous estimons que de tels intérêts pourraient faire naître de nouveau l'impérialisme exacerbé.Si les États qui ont reconnu le CNT après la France n'étaient pas totalement encouragés par des objectifs poursuivis par la France dans le conflit, ils ont été néanmoins submergés par de nombreux autres intérêts. D'après DELAGELA, le Livre Blanc de Défense et de Sécurité Nationale (LBDSN) rédigé en 2008 et indiquant les priorités stratégiques françaises pour les 15 ans à venir précisait bien qu'il s'agissait de concentrer les capacités de prévention et d'intervention françaises sur l'axe Méditerranée / Golfe Arabo-persique / Océan Indien. Cette zone y est vue d'après l'auteur, comme un arc de crise, espace prioritaire où les risques impliquant les intérêts stratégiques de la France et de l'Europe sont les plus élevés.48(*)

    L'action en Libye a été vue dans cette perspective comme une stratégie personnelle de Nicolas SARKOZY. La reconnaissance par la France du CNT, loin de consister à l'instauration d'un État de droit en Libye, a conservé l'initiative politique, diplomatique et stratégique pour renforcer son statut de puissance stratégique à vocation mondiale. Les rudiments des informations de la presse qui ne nous intéresse pas totalement, ni ne nous emporte, dénote également une attitude similaire. Il convient donc de se poser la question suivante : Y a-t-il eu amitié entre le pays qui reconnaît et le pays dont le gouvernement est renversé ? Ou au contraire, il ne s'agit que d'un règlement de compte ?

    Il est évident que la défense des intérêts français peut supposer l'entrée en concurrence avec les intérêts des autres. Dans ce cas, le choix de la France a été de « continuer la politique par d'autres moyens »49(*), avec les armes. Certes sous mandat international, mais l'usage des armes en plus de l'action diplomatique, constituent une violation du principe de non recours à la force. Face à des mouvements structurés avec un même commandement civil, un même commandement militaire, les actes ne doivent plus tendre vers une sécession avons-nous dit. Face à la règle initiale selon laquelle l'on ne pouvait reconnaître qu'un nouvel État ou un gouvernement, l'on constate immédiatement les démarcations de cette reconnaissance particulièrement au problème posé par celle-ci. La lecture par échelle permet de tenter de clarifier l'ensemble des intérêts imbriqués les uns aux autres. Il manque cependant une échelle à étudier, et sur laquelle l'engagement en Libye aurait forcément un impact, car la nature exacte de l'échelle française semble s'orienter vers des intérêts autres que ceux de protéger la population. Ce qui nous pousse à dire que cette reconnaissance est vraiment illicite. La forme elle-même dans laquelle elle est intervenue prouve à suffisance que les intérêts l'ont emporté sur la volonté d'instaurer en Libye un régime respectueux des libertés publiques. Cela étant, il est impérieux de s'interroger sur cette forme dans le point suivant.

    Il est difficile cependant d'emblée de préciser les conditions auxquelles le droit international général subordonne l'octroi de la reconnaissance. Est-ce à dire que sa légitimité tombe ? Ou encore, est-ce à dire que cette notion peut légitimer des situations anormales ? D'où une forme quasi dérogatoire.

    §3. Forme de reconnaissance

    La forme dans laquelle la reconnaissance est intervenue en Libye est suivant les détails contenus en deuxième section du premier chapitre, expresse et de jure. Les différentes déclarations unilatérales des États concernant la reconnaissance du CNT témoignent de cet état de fait. Nous pouvons discuter du bien-fondé des telles déclarations et constater qu'elles ont peu d'importance s'agissant d'évaluer leurs effets juridiques. La pratique internationale étant mal établie; les États peuvent aussi préciser que leur comportement n'équivaut pas à une reconnaissance. Ou alors se contenter à ne reconnaître que de manière implicite. Le droit des gens est en cette matière comme dans bien d'autres moins formaliste.

    Cependant, l'essentiel est que la volonté de reconnaître soit établie de façon certaine. Un État peut toujours écarter l'interprétation favorable à une reconnaissance implicite par une déclaration contraire. Il ne s'agit par exemple d'une présomption irréfragable lorsqu'il y a établissement des relations qu'il y a nécessairement reconnaissance. L'intention contraire est d'une importance pratique énorme. Le fameux dicton de la Cour permanente de justice internationale précité dans l'épigraphe, à part sa référence claire aux sources primordiales du Droit international public, ne révèle-t-il pas également l'importance que présente même à nos jours, la volonté étatique pour la formation des relations internationales ?

    Dans le milieu international en effet, les États, à côté de l'arsenal conventionnel, procèdent également à des initiatives unilatérales, en vue de défendre leurs intérêts, nous dit KYRIAKOPOULOS.50(*)

    La reconnaissance du CNT a été expresse eu égard aux différentes déclarations intervenues, la volonté des pays de reconnaître ayant été établie de façon certaine. Aucun problème de preuve ne doit se poser en principe. L'acte juridique adopté par la France en conséquence, a été plus ou moins solennel ; qu'il a exprimé la reconnaissance clairement. Les États qui ont reconnu le CNT, n'ont pas émis de doute. Nous écartons donc l'idée d'une reconnaissance conditionnelle.

    Section 2. La reconnaissance de la Coalition Nationale Syrienne

    Les rebelles syriens ont été reconnus (§2) dans la droite ligne du modus operandi de la pratique internationale contemporaine. Celle-ci a développé une tendance à reconnaitre la personnalité juridique internationale à des mouvements de lutte armée contre des régimes dictatoriaux et qui violent massivement et systématiquement les droits de l'homme disions-nous. Le peuple Syrien ne voulant plus de BASHAR ALLASSAD, (§1) n'est pas resté indifférent. D'où l'émergence des nouvelles pratiques et des nouvelles formes de reconnaissance. (§3).

    §1. Présentation des faits

    Différents avis ont été exprimés à propos de la mesure dans laquelle les effets juridiques d'une déclaration unilatérale sont déterminés par les réactions des interlocuteurs. M. MATHESON pense qu'« il est difficile de tirer une conclusion générale sur les réactions des États. »51(*)En Syrie, une crise naît suite à la grave détérioration des droits de l'homme. La population se révolte et la guerre éclate au grand jour. Suivant les règles pertinentes du droit des gens, lorsqu'il y a atteinte à la paix et à la sécurité internationale, le conseil de sécurité peut intervenir par des mesures coercitives. Une telle action nécessite cependant un vote au conseil de sécurité. Les modalités de ce vote sont déterminées dans la Charte des Nations Unies. L'incapacité de l'ONU à pouvoir imposer un recours à la force en vertu du chapitre VII de la Charte de Nations Unies, va faire que les crimes ignominieux vont se commettre au mépris des règles du droit international humanitaire comme l'interdiction d'attaquer les civils non combattants, etc. On ne sait pas distinguer très clairement les exactions commises par les rebelles et celles commises par le régime en place. En dépit de cette incertitude, les rebelles vont être reconnus par beaucoup de pays. Ces derniers ne vont point se préoccuper de la sagacité émotionnelle du peuple opprimé mais des différents intérêts qu'ils tirent de la reconnaissance. Sur le plan du droit, des nombreuses objections au regard des principes contenus à l'article 2 de la Charte des Nations Unies.André CHAMY, un sociologue et avocat français, regrettant une telle situation a écrit : « Les pays qui reconnaissent les rebelles syriens vivraient sur leurs propres sols le cauchemar qu'on impose au peuple syrien depuis deux ans. »52(*)Face à la grave détérioration de la situation en Syrie dont le pouvoir demeure le premier responsable selon les Ministres du gouvernement en place, il convient de voir dans quelle mesure la reconnaissance des rebellions serait une violation du droit international et le problème juridique auquel il donne lieu.

    §2. Problème juridique

    L'existence du droit d'une société telle que la Communauté internationale a, d'après Robert AGO, toujours constitué une source de difficultés pour la science juridique.53(*)Ces difficultés apparaissent à travers la reconnaissance des rebelles en Syrie comparativement à celle qui intervint en Libye. Une reconnaissance en morceau, vient s'ajouter à bon nombre de difficultés soulevées par la science juridique lui-même, le droit international. Le président français est le premier à reconnaître les rebelles syriens. Il va considérer ce geste comme une avancée significative sur le plan de la diplomatie. Il considère qu'il milite pour l'avènement et l'instauration d'un État de droit en Syrie. L'État de droit qui appartient pourtant à l'univers du droit constitutionnel et de la théorie générale de l'État, fait partie de la terminologie usitée en droit interne. Il est surprenant qu'il puisse constituer le fondement de cette reconnaissance au regard du principe de l'égalité des États qui fait qu'aucun État n'est soumis à la critique de l'autre. Par ailleurs, une telle ingérence devrait être inquiétante. En effet, comme les couleurs de l'arc-en-ciel changent insensiblement, en droit, les catégories juridiques, les diverses sources, les objectifs poursuivis ne se distinguent plus nettement les uns des autres, qu'ils s'entremêlent, qu'on passe des uns aux autres sans toujours s'en rendre compte. Si l'arc-en-ciel a une valeur esthétique certaine, il n'est pas sûr que ce caractère flou soit toujours heureux en droit.54(*)

    Il est cependant considéré comme un modèle qui remplace ipso jure toute situation d'État de police qui existe et qui ne se conforme pas ce faisant aux principes cardinaux du droit international. L' :«État dont l'organisation interne est régie par le droit et la justice et qui se caractérise plus particulièrement par diverses institutions et techniques juridiques : la séparation des pouvoirs, l'indépendance des juges, le contrôle de la constitutionnalité des lois et de la légalité des actes administratifs ainsi que la protection des droits des personnes »,55(*) constitue un État de droit. Il apparaît clairement que l'idéal serait que tous les États se conforment à cette règle. Mais à défaut pour les États de la respecter, y a-t-il possibilité de les y contraindre au regard du fait que la loi internationale est muette quant à ce ?

    Une telle justification serait démise dans les pays où l'opposition ne parle ni ne bouge, où le peuple est moins écouté, alors qu'il n'y a que formalisme démocratique ? Aliis verbis va-t-on les considérer comme démocratiques ? Thierry HYBERT affirme que la pratique internationale rassure du dédoublement fonctionnel du droit international en ce que les moments de reconnaissance influencent les événements déstabilisant l'État.56(*)

    Dès lors qu'il y a culte du président à notre avis, on tire à bout portant, c'est un État policier quelle que soient les issus des élections démocratiques. Reconnaître les rebelles sur une telle base est alors erronée dès lors que certains pays se disent démocratiques alors qu'ils ne sont pas en réalité. L'autre prétexte avancé pour la reconnaissance des mouvements rebelles fondé sur le droit à la démocratie impose de savoir si le droit du peuple à la démocratie peut prétendre à quelque consistance juridique, au-delà de sa simple affirmation. Est-ce que la protection internationale des droits de l'Homme relative au droit à des élections libres concourt à l'affermissement de ce droit à la démocratie ? La démocratie apparaît-elle comme l'unique modèle politique envisagé et, partant, le seul qui soit compatible avec le droit international ? A cet égard, la réponse fondamentale que l'on puisse se proposer est celle de savoir que l'on ne peut pas résister à un régime hostile dans la paix. Les rebelles syriens commettent eux aussi des atrocités autant que BASHAR AL ASSAD, président syrien. Les civils sont inviolables dans un conflit armé auquel ils ne sont pas partis. En effet, d'après les règles pertinentes du droit international applicable aux conflits armés, les personnes civiles sont protégées contre les attaques. Sauf bien entendu si elles participent directement aux hostilités et pendant la durée de cette participation.57(*) Lorsqu'ils sont attaqués par les rebelles, car les armes ne distinguent pas, nous ne voyons pas le bien fondé de reconnaître ces mouvements face à la règle interdisant de reconnaître des situations illicites. En effet, le principe ci-haut énoncé est coutumière.

    Le président français avait demandé au ministre des Affaires étrangères Laurent FABIUS, lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne, de poursuivre le travail de conviction pour que la reconnaissance que la France avait déjà faite puisse être prolongée par d'autres déclarations venant de pays européens et de l'UE. Plus encore, la France s'aligne sur la position anglaise concernant la livraison d'armes aux bandes armées en Syrie, qui est du reste anormale. Réagissant à ces propos, André CHAMY, du réseau Voltaire France, explique en quoi la position belliqueuse appelant à armer « l'opposition » en Syrie est tout simplement illégale à la lumière du droit international et porte un coup très sévère à la réputation de la France dans le monde. Mais Alain PELLET lui pense qu'il faut réprimer le régime syrien actuel pour les actes ignobles et inhumains et pour les crimes ignominieux qu'il commet sans sagacité émotionnelle.

    Dans l'État, suivant cet auteur, « quelles que soient la forme de son organisation politique et la nature de ses institutions, il existe toujours des mécanismes permettant d'ajuster les règles inadaptées aux besoins de la société. Cela peut se faire par la révolution qui permet, par des changements drastiques de l'ordre juridique, de répondre à un bouleversement radical des rapports sociaux. »58(*)

    A notre avis, la reconnaissance des mouvements rebelles est un acte d'ingérence dans une guerre civile mais également et surtout un acte de haute irresponsabilité. L'on ne saurait en effet reconnaître des groupes belligérants sans méconnaître un certain nombre des règles immuables. Cette reconnaissance des rebelles syriens ne trouve pas de base fondamentale en un texte coulé en forme de Traité ni en une coutume. Cela traduit encore une fois l'instabilité et le détournement du droit international. Nous déplorons par ailleurs que d'autres modes de production ou de formation du droit puissent contribuer à cet état de fait. Parmi ces autres sources, les actes unilatéraux occupent une place de choix. Une telle assertion légitime les révolutions et suit la droite ligne de la nouvelle doctrine qui fut admise en jurisprudence depuis 1885 par la Cour de district sud de New York dans l'affaire de l'AmbroseLight, relativement à l'arrestation en haute mer d'un navire colombien insurgé par un bâtiment de guerre américain.59(*)

    La Coalition nationale syrienne a ainsi poursuivi sa restructuration interne, qui avait déjà vu son élargissement à de nouveaux membres, de manière à rendre cette structure plus inclusive et plus représentative, avec notamment l'entrée du « pôle démocratique » constitué autour de M. Michel KILO. Très variés sont les intérêts russes qui se manifestent dans l'affaire syrienne. Les livraisons d'armement ont aisément survécu à l'effondrement de l'URSS. Mais Moscou défend aussi traditionnellement dans cette région les minorités chrétiennes, en même temps qu'elle valorise le laïcisme affiché du régime alaouite contre les tentations islamistes. Plus largement, la Russie se réinsère dans le jeu moyen-oriental, tout en réaffirmant contre l'Occident la prééminence du principe de non-ingérence.60(*) En définitive, au regard du droit international, la reconnaissance par la France et beaucoup d'autres pays, qui seront cités dans le point suivant, des mouvements rebelles syriens est illégale. Pour comprendre le caractère illicite de cette reconnaissance, il faut se référer à l'article 2 de la Charte de Nations unies qui énonce les différents principes devant régir les relations internationales. L'on remarque que la pratique internationale contemporaine insiste sur le fait qu'une guerre juste, sinon une guerre licite doit être reconnue. D'après l'évolution du droit international, on sait dire que telle norme est violée, mais l'on ne saurait pas empêcher sa violation au regard de ce caractère évolutif. Ainsi selon VERHOEVEN : « Aucune norme ne revêt un caractère d'éternité ou d'immuabilité qui la protégerait contre l'érosion du temps.»61(*)

    L'organisation des Nations Unies et ses Membres, dans la poursuite des buts énoncés à l'article 1, doivent agir conformément aux principes suivants :

    1. L'organisation est fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses Membres.

    2. Les Membres de l'Organisation, afin d'assurer à tous la jouissance des droits et avantages résultant de leur qualité de Membre, doivent remplir de bonne foi les obligations qu'ils ont assumées aux termes de la présente Charte.

    3. Les Membres de l'Organisation règlent leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, de telle manière que la paix et la sécurité internationales ainsi que la justice ne soient pas mises en danger.

    4. Les Membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies.

    5. Les Membres de l'Organisation donnent à celle-ci pleine assistance dans toute action entreprise par elle conformément aux dispositions de la présente Charte et s'abstiennent de prêter assistance à un État contre lequel l'Organisation entreprend une action préventive ou coercitive.

    6. L'organisation fait en sorte que les États qui ne sont pas Membres des Nations Unies agissent conformément à ces principes dans la mesure nécessaire au maintien de la paix et de la sécurité internationale.

    7. Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État ni n'oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente Charte; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l'application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII.62(*)

    En ce qui concerne la Syrie, nous sommes persuadé, c'est vraie, que le président syrien n'envisage aucun dialogue ; en revanche, il n'existe pas en droit international un texte permettant aux États de reconnaître alors les rebelles, de même qu'il n'existe aucun texte les y autorisant. Le droit international demeure jusqu'en ce jour moins formaliste et la pratique est hésitante. Le seul texte qui nous paraît de référence est constitué des principes directeurs parmi lesquels on peut mentionner : « Relevant que la question de savoir si un comportement unilatéral de l'État lie celui-ci dans une situation donnée dépend des circonstances de l'espèce, relevant aussi qu'en pratique, il est souvent difficile d'établir si les effets juridiques découlant du comportement unilatéral d'un État sont la conséquence de l'intention qu'il a exprimée ou dépendent des expectatives que sa conduite a fait naître chez d'autres sujets du droit international, la Commission du droit international a adopté les principes directeurs qui ne portent que sur les actes unilatéraux stricto sensu, revêtant la forme de déclarations formelles formulées par un État dans l'intention de produire des obligations en vertu du droit international.»63(*) L'on considère que ces déclarations unilatérales ne doivent pas contrarier des règles qui existent déjà. C'est à dire que les normes coutumières restent intactes et ne doivent pas être touchées. Alors, on conçoit mal qu'une reconnaissance des mouvements rebelles intervienne alors que celle-ci porte fondamentalement sur l'État nouveau ou le gouvernement. Une telle évolution est en conséquence débitrice des doutes. Celles-ci s'expriment mieux lorsqu'on se déplace vers un échelon plus ou moins spectaculaire traduisant une émergence des règles quasi scélérates. On se déplace en conséquence vers un nouveau mode de production du droit qui s'opère en un passage de la pyramide au réseau. Nonobstant cette évolution, il demeure que le droit international n'entend accorder de valeur juridique à une norme qui contrarie celles qui lui sont antérieures. La CIJ s'est exprimée dans le même sens dans l'affaire du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne) en relevant « qu'essayer d'établir unilatéralement des limites maritimes internationales sans tenir compte de la position juridique d'autres États est contraire aux principes reconnus du droit international ».64(*)

    §3. Forme de reconnaissance

    Après les bavures diplomatiques en Afrique ayant abouti au limogeage d'un certain nombre de responsables au Quai d'Orsay et alors que les perspectives d'enlisement se font jour au Mali, André CHARMY considère la déclaration de la guerre à la Syrie par la France comme une décision sans signification. A cet effet, cette forme de reconnaissance ne pose pas un problème particulier si ce n'est le problème général de la reconnaissance des mouvements rebelles. Les États-Unis se sont montrés plus réservés. Avant d'aller plus loin dans une reconnaissance, Washington a voulu d'abord s'assurer de la façon dont la coalition va s'organiser sur le terrain et montrer sa représentativité. La Ligue arabe considère pour l'instant la nouvelle coalition comme « son principal interlocuteur ».65(*)

    La reconnaissance de la Coalition nationale syrienne est intervenue pour la première fois par la déclaration de François HOLLANDE, le président français. Il en découle que cette reconnaissance est intervenue de jure et de manière expresse dans un acte de l'exécutif. D'autres pays ont fait une déclaration de la guerre à la Syrie. Une telle déclaration constitue indépendamment d'un acte de reconnaissance, une reconnaissance implicite. D'autres pays ne se sont engagés que de manière réservée. Les États Unis d'Amérique et la Grande Bretagne se sont engagés, se limitant à confirmer leur appui à la Coalition tout en indiquant qu'elle devait encore faire ses preuves avant de pouvoir être reconnue comme le seul représentant légitime de l'opposition. La Ligue Arabe qui s'est réunie au Caire au lendemain de la réunion de Doha en présence des ministres européens a publié une déclaration appelant au soutien de la Coalition, mais sans aller au-delà en dépit de l'activisme du Qatar ; deux pays : l'Irak et l'Algérie, s'y seraient opposés. La Ligue Arabe a décidé également le maintien de ses observateurs en Syrie. Comme on pouvait s'y attendre, la Russie et la Chine ont contesté la représentativité de la Coalition. Moscou qui s'est plus particulièrement mis en avant, a rappelé sa position de base selon laquelle la solution devait passer par le dialogue avec le pouvoir, ce que l'accord signé à Doha rendrait impossible. La question de la fourniture d'armes à l'opposition est également essentielle pour les Russes et M. LAVROV n'a pas non plus abandonné l'espoir de faire revenir l'Iran dans le jeu.66(*)La reconnaissance a été donc conditionnelle pour ces pays. Elle intervient toujours à bon escient mais cette fois-ci, elle semble être monnayée. Pour les monarchies du Golfe en revanche, la coalition est désormais le « représentant légitime du peuple syrien ». On peut en déduire que les modalités de reconnaissance de cette coalition ont été multiformes. A cet égard, il faut voir dans la déclaration de guerre, une forme implicite de reconnaissance. Cela est corroboré par des engagements de livraisons d'armes. Même si rien d'officiel n'a été publié, ce point est déterminant pour les organisations syriennes. Cela traduirait également une reconnaissance avec réserves de la part des États-Unis, qui ont décidé ainsi. La Coalition a été reconnue par les États du Golfe au cours d'une réunion. La reconnaissance de la France avait été annoncée par M. Hollande lors de son intervention télévisée. La Turquie a également reconnu la Coalition.67(*)

    En conclusion pour cette section, le gouvernement légal, dès l'instant qu'il n'a plus la force de gouverner, se trouve avoir perdu compétence, car la détention de la force est une des conditions juridiques de l'attribution des compétences gouvernementales, au même titre que la possession d'un esprit sain est une des conditions juridiques de l'exercice des compétences privées. La succession révolutionnaire des gouvernements s'analyse donc de la même façon que l'établissement (hypothétique) d'un premier gouvernement dans une société primitive, pour autant qu'il n'existe pas d'autorité super sociale ayant compétence pour intervenir et assurer la garantie des pouvoirs constitutionnels et la régularité de leur exercice. La reconnaissance des mouvements rebelles, si elle peut être contemporaine, ne manque pas à violer l'un des principes ci haut cités. Pourtant, la doctrine et la jurisprudence ne considèrent qu'un acte unilatéral tel que la reconnaissance ne doit violer les règles existantes. Ainsi, dans l'affaire du Statut juridique du GROËNLAND oriental, la CPJI a considéré que les déclarations sur l'occupation de ce territoire faites par le Gouvernement norvégien en 1931 étaient « illégales et non valables » dans la mesure où elles portaient atteinte à la situation juridique existante.68(*)

    S'il en est ainsi en droit interne, nous retrouverons fatalement, et plus fréquemment, le même phénomène en droit international. Dans ce milieu inorganisé et à tant de points de vue primitif qu'est le milieu inter étatique, la survenance du gouvernement de fait est extrêmement fréquente.69(*) C'est ainsi que les mouvements rebelles semblent être encouragés à bouleverser l'ordre ancien. A notre avis, cette reconnaissance ne devrait qu'être expresse et de jure pour ne pas susciter des problèmes de preuve. Nous reviendrons sur cette discussion dans le point suivant pour enrichir le débat.

    Section 3. Les cas particuliers du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD) et du Mouvement du 23 mars (M23) en République Démocratique du Congo

    En République démocratique du Congo, on a toujours assisté à des rebellions. Nous cherchons à comprendre dans la présente section si elles sont reconnues et dans quelle forme. Nous devons d'abord savoir si le RCD est un groupe rebelle ou un parti politique qui peut nous offrir certains éléments de reconnaissance (§I). Pour le M23, une rébellion récente (§II), la question fondamentale consiste à savoir s'il a été reconnu.

    §I. Le cas du RCD

    Le RCD, une rébellion qui avait toujours été empreint d'animosité, commença à l'Est de la RDC. Cette rébellion fut également un parti politique parmi ceux instaurés après la guerre dite de libération du Congo. Le RCD70(*) est une faction non gouvernementale à l'instar du MLC, ou des MAYI-MAYI. Toutes ces factions naquirent tout juste après l'arrivée au pouvoir du feu Laurent Désiré KABILA. Il découle déjà de ces prémisses que le RCD constitue à la fois une rébellion, auquel cas les règles applicables aux groupes rebelles lui sont applicables ; mais également un parti politique et qui existe même aujourd'hui. Dans le présent travail, nous portons notre intérêt au RCD en tant que mouvement rebelle susceptible d'être reconnu dans la pratique internationale contemporaine ou l'ayant été pendant la guerre dite du RCD. L'autre conclusion qui s'impose est que l'intention de l'État auteur de l'acte est un facteur déterminant: les conséquences diffèrent selon que l'État auteur souhaite que l'acte ait des conséquences juridiques ou entend lui donner une portée exclusivement politique.71(*)

    Sur ce plan, diverses sont les interrogations. Le Rwanda qui l'a soutenu militairement, l'a-t-il également reconnu ? Si oui, il s'agissait de quelle forme ? On soutient généralement que le Rwanda et d'autres pays limitrophes de la RDC peuvent l'avoir reconnu d'abord comme insurrection. Mais cette guerre dépassera par la suite une simple insurrection. Une telle position est très discutable.

    L'insurrection interne, parce qu'elle remet en cause l'unité nationale et l'effectivité gouvernementale (d'où des atteintes à la sécurité des biens et des personnes, dont il devient difficile de rechercher la responsabilité), oblige fréquemment les États tiers à prendre position en vue de protéger leurs intérêts. Une manière formellement admise pour exprimer de tels intérêts est de déclarer unilatéralement qu'on reconnaît une situation quelconque. Dans ce cas, il est difficile de conclure à une certaine reconnaissance intervenue.

    Le terme insurrection est utilisé généralement pour indiquer un mouvement collectif violent et décidé par une tranche importante des habitants d'un territoire, qui se rebellent, par les armes, contre le gouvernement en place. Elle se distingue ainsi de la rébellion. La rébellion s'identifie à un conflit armé non international lorsqu'elle correspond aux caractéristiques fixées par l'existence de ce type de conflit. Si ce niveau n'est pas atteint, on parlera alors plutôt d'émeute.72(*)

    §II. Le cas du M23

    Officiellement, c'est pour protester contre la non application d'un accord par Kinshasa que cette rébellion a vu le jour. Il s'agit de l'accord du 23 mars 2009 qui donne le nom au groupe rebelle. Le gouvernement congolais n'étant pas prêt à négocier, il entrevoit la possibilité de mettre fin au système CNDP au Nord-Kivu et attaque la nouvelle rébellion. Il faut dire qu'au départ, le M23 n'a que peu de moyens et d'hommes. D'après le groupe d'experts de l'Organisation des Nations unies (ONU), le Rwanda et l'Ouganda auraient apporté leur soutien au M23, ce que les deux pays démentent.73(*) Il s'agit d'un conflit avec des discours donnant à penser que le Rwanda veut absolument une sécession en vue de la naissance d'un nouvel État. Y a-t-il eu reconnaissance ? Voyons de quelle manière, la pratique internationale concevrait la reconnaissance du M23.

    D'abord les États n'agissent que compte tenu de leurs intérêts. Par ailleurs, ils peuvent aller à des oppositions extrêmes pour renforcer leur souveraineté.

    Il est alors difficile de conclure vraiment à une reconnaissance au vrai sens telle qu'elle apparaît en Syrie ou en Libye. Cependant, le silence de certains pays qui collaborent directement avec le M23 serait interprété comme un acquiescement de ce mouvement sur la scène internationale. En effet, et comme le souligne à juste titre ANZILOTTI quant à l'importance du silence en la matière, la reconnaissance peut résulter aussi bien des déclarations explicites que des faits concluants (reconnaissance tacite). « La simple manière de se comporter d'un État, y compris, dans des circonstances déterminées, même son seul silence, peut signifier la volonté de reconnaître comme légitime un état de choses donné. »74(*)

    La pratique internationale récente revêt une dimension surprenante. Regardant de très près les situations qui se déroulent au Nord-Kivu, on se demande si réellement elles ont été reconnues. Comme pour le RCD, on ne sait pas affirmer, contrairement à la Syrie et à la Libye, qu'il y ait eu une reconnaissance des mouvements rebelles. Mais au cas où une telle reconnaissance serait intervenue, sa forme serait silencieuse ou implicite. Les conséquences seraient alors de taille. Le professeur DUPUY a écrit : « Souvent effectuée par voie de déclaration explicite, la reconnaissance peut néanmoins aussi bien résulter d'un comportement à la condition que celui-ci soit clairement imputable aux organes compétents de l'État concerné. »75(*)

    Le droit positif est donc, là, très éloigné du but fixé à son avancement. L'invitation par le secrétaire général des Nations unies du M23 semble renfermer une ébauche nous permettant de répondre à la question relative à la reconnaissance. Le M23 semble ainsi être admis au bénéfice du droit de la guerre.

    En droit international, dès lors qu'il n'existe pas d'autorité supra étatique, des situations se déroulent sous l'impulsion des grandes puissances. La reconnaissance quant à elle est subjective. Le professeur Auguste MAMPUYA Kanuk'a-tshiabo, parlant de l'immense territoire du Congo que son inventeur va faire reconnaître comme un État indépendant, distinct du royaume dont il était le roi, nous renseigne sur ce qui suit: « Chacun y reconnaitra une véritable fiction, un État juridiquement virtuel mais que les puissances vont admettre dans le concert des nations, véritable exception à nombre de normes de droit international sur la création et la reconnaissance des États et abandon, temporaire, du droit régissant la colonisation pour appliquer fictivement les normes interétatiques à quelque chose qui n'était un État que par fiction.»76(*) De cela, nous voyons que pour les rebelles du M23, certains peuvent les considérer comme vivants alors que d'autres les reconnaissent comme morts. Cela traduit en quelque sorte les faiblesses du droit international.

    Cela est bien établi par les principes directeurs applicables aux actes unilatéraux. Mais ces principes ne parlent que des déclarations unilatérales. Ce qui nous pousse à affirmer qu'acte unilatéral et déclaration unilatérale revient au même. La reconnaissance en tant qu'acte autonormateur demeure de l'apanage de ces principes, aucun autre texte ne la régissant en pratique. Sommes toutes, en cette matière comme dans bien d'autres du droit des gens, l'intention de l'État est capitale. Il n'existe pas en effet des modèles autorisés pouvant nous servir de soubassement à l'analyse. Ce qui est sûr ce que l'on ne doit pas méconnaître dans la pratique internationale la valeur qu'a un silence d'un État donné sur une situation donnée. L'auteur ajoute qu'un élément très important en pratique, ainsi que le démontre la jurisprudence, doit être souligné : « Du fait que la reconnaissance peut résulter également d'un comportement, aussi bien passif qu'actif, l'absence de protestation d'un gouvernement face à l'apparition d'une situation de fait ou de droit susceptible d'avoir des incidences sur ses intérêts est la plupart du temps considérée comme un acquiescement à la validité et l'opposabilité de cette situation à son égard, sur lequel il ne saurait revenir. »76(*)

    La question essentielle est de savoir à quelle condition un mouvement rebelle peut être reconnu. Se déplaçant loin des frontières africaines, dirigeons-nous vers la Chine pour essayer de mieux comprendre la question. En 1949, selon l'histoire, Mao installe le Gouvernement de la République Populaire de Chine à Pékin et TCHANG KAI-CHEK se replie sur Formose avec son gouvernement nationaliste, mais les deux gouvernements prétendent avoir autorité sur toute la Chine. Les pays reconnaitront l'un ou l'autre des gouvernements. Jusqu'en 1971, c'est la CHINE nationaliste qui conserve le siège chinois à l'ONU, donc le droit de véto ; d'où une crise avec l'URSS et sa politique (sachant qu'abstention = véto à l'époque). En 1971, la République Populaire de Chine représente finalement la CHINE à l'ONU (contexte de réchauffements des relations SINO-AMÉRICAINES). ROUSEAU dénie en effet l'acceptation automatique du silence en tant qu'acquiescement tacite, en soulignant que celle-ci ne constituant pas une variété d'acte unilatéral, une modalité particulière d'expression de la volonté unilatérale de l'État, « ne possède-t-il la portée d'un acquiescement tacite que dans certains cas déterminés. »77(*)La révolte de MAO TSE TSUNG avait débuté en une rébellion avant de devenir une insurrection. Mais lorsqu'il a conquis la plus grande partie du territoire en tant que force rebelle, en respectant les coutumes de la guerre, un changement de statut intervenait immédiatement et l'on devait considérer qu'on était en face des belligérants. La distinction s'opérait ainsi entre trois statuts à savoir le statut de rebelles, le statut d'insurgé et le statut propre aux belligérants. La question que nous nous posons maintenant est la raison d'être de la reconnaissance des mouvements rebelles.

    De là, nous voyons que l'assistance donnée aux rebellions constitue une raison d'être de la reconnaissance des mouvements rebelles. Le M23 a également bénéficié d'une assistance de la part du Rwanda comme le rapport des Nations unies l'indique (Rapport spécial du Secrétaire général sur la République démocratique du Congo et la région des Grands Lacs). On peut en déduire qu'une violation du droit international par ce pays est en effet admise comme une reconnaissance à de tels mouvements d'une personnalité juridique internationale. Celle-ci est un fait acquis du droit international public contemporain, encore que de manière sélective. Il nous semble que quand l'homme est sorti de l'état de nature, il a créé l'État, accédant ainsi à la valeur régulatrice de toute vie en société: le Droit. Et pourtant, en plus, le droit international existe et n'est pas muet face à la violence.78(*)Une telle reconnaissance a été implicite et n'a pas été contestée. Une telle reconnaissance est simplifiée car elle n'est pas très exigeante. Nous pensons cependant qu'une telle reconnaissance serait peu efficace au regard du fait qu'elle est difficilement prouvée. Il n'existe pas un acte expressément émis pour ce type de reconnaissance. La reconnaissance implicite implique tout simplement la manifestation de certains comportements. Nous pensons qu'une telle reconnaissance n'est pas même intervenue en République démocratique du Congo (RDC). Car en effet, on donne souvent l'exemple d'une reconnaissance implicite, l'établissement de relations diplomatiques. Il faut donc au moins l'établissement de certaines relations de grande ampleur. Ce qui n'a pas été le cas pour le M23. Lorsqu'on analyse la situation du M23, on se rend compte qu'une reconnaissance peut n'être qu'implicite. A ce titre, elle peut être émise implicitement de diverses manières. Suivant le Compte rendu analytique de la 2 772 ème séance sur les Actes unilatéraux des États, l'on nous parle que l'Afrique du Sud a entretenu des relations diplomatiques avec la Rhodésie, ce qui impliquait la reconnaissance.79(*) Cette attitude est cependant contrariée par la doctrine. Une telle forme ne doit pas être automatique. Déjà qu'une reconnaissance implicite est difficilement prouvée, une reconnaissance silencieuse est plus compliquée en ce sens qu'elle ne repose sur aucun acte pouvant prouver son existence. D'ailleurs, en droit international, aucun acte n'est imposable à l'État si ce n'est par consentement mutuel. L'exigence de la volonté traduit ipso facto le fait que le silence auquel l'État ne donnerait pas une valeur d'acquiescement ne le serait point. Or, pourtant, la valeur prônée d'un acte illégal ne saurait être admis par l'État en question de peur qu'il ne se salisse. Du point de vue de l'image dont il a besoin, il sera bon pour lui de contester purement et simplement. D'après Charles ROUSSEAU : « Il existe une différence importante entre le droit interne - où le silence équivaut à une manière tacite de volonté dans des cas précis où cet effet a été prévu et déterminé par la loi - et le droit international, où le principe contraire a prévalu en raison de la nature propre des rapports internationaux et de la liberté de choix des États quant au mode de manifestation de leur volonté. »80(*)

    Pour le cas du M23, le silence des pays voisins ne saurait être déterminant pour être considéré comme manifestation de leur reconnaissance. Pour le Rwanda par exemple, il y a eu protestation de l'implication dans le conflit malgré les différents rapports l'y impliquant. Ainsi, on ne peut pas dire que le Rwanda a reconnu sans prouver en dehors d'un moindre doute qu'il consent à cette affirmation. Alors né l'impossible débat sur la nature juridiquement admise du silence comme source d'obligations étatiques.

    En définitive, nous pensons que la forme n'étant pas prescrite, il faut toujours se référer aux conditions spécifiques. Chaque cas particulier peut être révélateur ou non d'une acceptation automatique tacite. Il reste que le droit international est dominé par les intérêts à pourvoir. A ce titre, remarquons que la conséquence d'une reconnaissance des mouvements rebelles est le renversement du régime en place. Parfois c'est tout le système qui est visé, parfois c'est le chef de l'État dont on veut le départ qui est visé. Pour ce qui concerne notre pays, la reconnaissance des mouvements rebelles n'aurait qu'une conséquence, la balkanisation. Le préambule des principes directeurs applicables aux déclarations unilatérales des États susceptibles de créer des obligations juridiques, insiste aussi sur cette possibilité en ces termes : « La Commission du droit international, relevant que les comportements susceptibles d'engager juridiquement les États peuvent consister en des déclarations formelles ou se traduire par une simple conduite informelle, y compris le silence qu'ils peuvent garder dans certaines situations, sur lesquelles les autres États peuvent raisonnablement tabler.»81(*)

    Avant de conclure ce travail, il sied de rappeler que la reconnaissance des mouvements rebelles est nouvelle. Il convient donc d'en rechercher une définition. En tant que penseur, nous proposons la définition suivante : La reconnaissance des mouvements rebelles est l'acte par lequel un État déclare son intention de reconnaître comme entité, si elles s'opposent à un régime policier, de personnes qui se constituent en révolution et résistent à un gouvernement hostile à leurs droits.

    CONCLUSION GENERALE

    La reconnaissance des mouvements rebelles est en vogue dans la pratique internationale contemporaine. Celle-ci a développé une tendance à reconnaître à des mouvements de lutte armée contre des régimes dictatoriaux et qui violent massivement et systématiquement les droits de l'homme une personnalité juridique internationale. Celle-ci n'est pourtant reconnue qu'aux États indépendants et souverains. Telle est la situation normale en droit international public.

    L'État, pour qu'il soit reconnu, doit préalablement réunir les éléments ci-après :

    Ø L'élément physique ou géographique: le territoire ;

    Ø L'élément humain: la population ;

    Ø L'autorité étatique.

    Ø Un élément international : la reconnaissance.

    Mais la reconnaissance, constituant un élément qui sert à l'identification de l'État, ne devrait pas être conçue en dehors du cadre dans lequel le droit classique la prend. Un mouvement rebelle ne s'acclimate pas à ces éléments ci-haut cités. Voilà pourquoi, nous nous sommes posé la question de savoir les cas et les différentes formes de reconnaissance des mouvements rebelles en insistant surtout sur le problème juridique que cela pose dans la pratique internationale contemporaine.

    Trois cas ont ainsi été identifiés suivant l'approche minimaliste. Il s'agit du cas de la reconnaissance du CNT en Libye, du cas de la reconnaissance de la Coalition nationale syrienne, et du cas particulier du RCD et du M23 en RDC. La forme de cette reconnaissance n'est pas en principe prescrite par le droit international. En cette matière comme dans bien d'autres, le droit des gens n'est pas formaliste. Il appartient souverainement à l'État intéressé d'exprimer en conséquence sa volonté de la manière qu'il juge la plus appropriée. Mais l'on s'accorde qu'elle peut être de jure ou de facto, expresse ou implicite, etc. La jurisprudence et les principes directeurs régissant les déclarations unilatérales susceptibles de créer les obligations juridiques démontrent qu'elle peut être aussi silencieuse. Quant au problème de licéité que cela pose, au-delà du fait que la discrétion et la liberté dans le chef de chacune des parties qui reconnaît a pour effets qu'elle est refusée pour des raisons d'opportunité. Il demeure que la politique émerge dans ce sens tout en piétinant le droit. Une telle reconnaissance est ainsi illicite car méconnaît certains principes du droit des gens tels que celui de non-ingérence dans les affaires intérieures et celui du non recours à la force dans les relations internationales.

    La méthodologie juridique sous sa variante de l'exégèse, appuyée par la technique documentaire a été choisie pour mener à merveille notre recherche. Elle nous a permis de démontrer un certain nombre de postulats.Dans le premier chapitre, nous avons démontré que le droit international est un droit vivant si par nature il est évolutif ; si par fonction il est conservateur ; mais un droit jeune et contesté. Dans le second chapitre, nous avons démontré que l'État est l'auteur principal du droit international et le garant de sa mise en oeuvre. Il est l'alpha et l'oméga du droit international.

    L'affaire du LOTUS de la CPJI et par la suite la sentence MAX HUBERT insistent successivement sur le fait que le droit international régit les rapports entre des États indépendants. Les règles de droit liant les États procèdent donc de la volonté de ceux-ci, volonté manifestée dans les Conventions ou dans des usages acceptés généralement comme consacrant des principes de droit et établis en vue de régler la coexistence de ces Communautés indépendantes ou en vue de la poursuite des buts communs. Ainsi, en l'absence d'un texte interdisant aux États de reconnaître les mouvements rebelles, une marge de manoeuvre leur est ainsi octroyée.

    Le prétexte de démocratie ou d'État de droit comme fondement de reconnaissance des mouvements rebelles est cependant très discutable dans les cas qui nous occupent. En effet, le droit du peuple à la démocratie n'a pas de consistance juridique au-delà de sa simple affirmation. La protection de ce droit à travers les élections démocratiques ne concoure pas nécessairement à l'affermissement de ce droit. Quant à l'État de droit, c'est une notion de droit interne qui n'apparaît en droit international que récemment et dont les contours sont indécis. L'aide apportée aux rebelles par la livraison des armes, constitue également une atteinte à l'intégrité territoriale de l'État. En effet, livrer des armes à des combattants qui attaquent l'armée régulière d'un État et de ses forces de sécurité est une violation des principes cardinaux du droit international humanitaire.

    BIBLIOGRAPHIE

    -ACTES NORMATIFS

    - Charte des Nations Unies signée à San FRANCISCO le vingt-six juin mil neuf cent quarante-cinq.

    - Déclaration sur les lignes directrices sur la reconnaissance des nouveaux États en Europe orientale et en Union soviétique signée à Bruxelles le seize décembre mil neuf cent nonante et un.

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    - Résolution sur la reconnaissance des nouveaux États et des nouveaux gouvernements signée le vingt-trois avril mil neuf cent trente-six1936.

    -JURISPRUDENCE

    -Arrêt du 18 décembre 1951 de la Cour internationale de justice en l'affaire des Pêcheries ANGLO-NORVÉGIENNES.

    -Arrêt du 15 juin 1962 de la Cour internationale de justice en l'affaire du Temple de PREAH-VIHEAR.

    -Arrêt du 7 septembre 1927 de la Cour permanente de justice internationale en l'affaire du Lotus.

    - Arrêt du 24 février 1982 de la Cour internationale de justice en l'affaire du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne).

    - Arrêt du 5 avril 1933 de la Cour Permanente de Justice Internationale en l'affaire du Statut juridique du GROËNLAND oriental, 1933, série A/B no 53.

    - OUVRAGES

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    3. http: // www.tv5.org / information / l'oeil de la rédaction

    4. http: // www.un.org / law / ilc / index.htm

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    -AUTRES DOCUMENTS

    - CIFENDE Kaciko, M., Cours de Droit international public, Université catholique de BUKAVU, Faculté de droit, 2013.

    - Compte rendu analytique de la 2 772 ème séance sur les Actes unilatéraux des États, Extrait de l'Annuaire de la CDI, 2003.

    - Compte rendu analytique provisoire de la 2 855 ème séance, Cinquante septième session (Deuxième partie), 2005.

    - Compte rendu n° 82 de la Commission des affaires étrangères, Audition de M. AHMAD ASSI AL-JARBA, président de la Coalition nationale syrienne , Mardi 23 juillet 2013 , Séance de 17 heures 30, session ordinaire de l'Assemblée nationale française, 2012-2013.

    - Déclarations officielles françaises de politique étrangère du 04 juin 2013.

    - GIRAUD, E., « Le droit positif : ses rapports avec la philosophie et la politique », Hommage d'une génération de juristes au président BASDEVANT, Paris, Pedone, 1960.

    - KAKULE Kinombe, C., Le Conseil de sécurité des Nations Unies et la Cour Pénale internationale : Dépendance ou indépendance, Faculté de droit, UCB, Travail de mémoire inédit.

    - Lettre adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Comité du Conseil de sécurité concernant la RDC, 2012.

    - PELLET, A., L'Adaptation du droit international aux besoins changeants de la société internationale, Conférence inaugurale de lasession de DIP, 2007.

    Table des matières

    0. INTRODUCTION GENERALE - 1 -

    CHAPITRE PREMIER : DE LA THEORIE DE LA RECONNAISSANCE DE LA BELLIGÉRANCE - 4 -

    Section première : Définition de la reconnaissance - 4 -

    Section 2 : Les différentes formes de reconnaissance - 10 -

    §I. Reconnaissance expresse et reconnaissance implicite - 11 -

    §II. Reconnaissance de jure et reconnaissance de facto - 12 -

    §III. Reconnaissance sans réserves et reconnaissance conditionnelle - 13 -

    Section 3. Problématique de la reconnaissance de la belligérance - 15 -

    §I. Origines et idées générales de la reconnaissance de la belligérance - 15 -

    §II. État de la pratique internationale - 18 -

    §III. Régime de la reconnaissance de la belligérance - 20 -

    CHAPITRE II : CAS, FORMES ET CONSEQUENCES DE LA RECONNAISSANCE DES MOUVEMENTS REBELLES DANS LA PRATIQUE INTERNATIONALE CONTEMPORAINE : Le problème de la licéité - 22 -

    Section 1. La reconnaissance du Conseil National de Transition (CNT) en Libye - 22 -

    §1. Présentation des faits - 22 -

    §2. Problème de licéité - 23 -

    §3. Forme de reconnaissance - 27 -

    Section 2. La reconnaissance de la Coalition Nationale Syrienne - 28 -

    §1. Présentation des faits - 28 -

    §2. Problème juridique - 29 -

    §3. Forme de reconnaissance - 33 -

    Section 3. Les cas particuliers du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD) et du Mouvement du 23 mars (M23) en République Démocratique du Congo - 35 -

    §I. Le cas du RCD - 35 -

    §II. Le cas du M23 - 36 -

    CONCLUSION GENERALE - 41 -

    BIBLIOGRAPHIE - 43 -

    TABLE DES MATIERES.................................................................................................................................-47-

    * 1 M. CIFENDE Kaciko, Cours de Droit international public, Université catholique de BUKAVU, CERDHO, 2013, p. 14, inédit.

    * 1 A. PELLET, L'Adaptation du droit international aux besoins changeants de la société internationale, in Conférence inaugurale de la session de DIP, 2007, p. 18.

    * 2 M. CIFENDE Kaciko,idem, p. 18.

    * 3 E., DAVID, C., VAN ASSCHE, Code de droit international public, 5 ème édition, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 491.

    * 4. G. BALLEYGUIER, cité par C. KAKULE Kinombe, Le Conseil de sécurité des Nations Unies et la Cour Pénale internationale : Dépendance ou indépendance, UCB, Faculté de droit, Travail de mémoire inédit, p. 7.

    * 5 G. CORNU, Vocabulaire juridique, 8 ème édition, Paris, PUF, 2000, p. 724.

    * 6 Ibidem.

    * 7 ANZILOTTI, Cours de Droit international, Paris, Panthéon-As sas, 1999, p. 426.

    * 8 A. JOLICOEUR, « De la Reconnaissance en droit international », in Les Cahiers de droit, volume 6, n° 2, 1965, p. 3.

    * 2 G. SCELLE, Théorie et pratique de la fonction exécutive en droit international, Paris, Pedone, 1936, p. 112.

    * 3 G. CORNU, op.cit., p. 724.

    * 4 R. BEN ACHOUR, État de droit et droit international, Tunis, Association des études de droit international, 2010, p.12.

    * 5 D. NGUYEN QUOC, op.cit., p. 419.

    * 6 R. BEN ACHOUR, op.cit., p. 13.

    * 7 E. GIRAUD, « Le droit positif : ses rapports avec la philosophie et la politique », in Hommage d'une génération de juristes au président BASDEVANT, Paris, Pedone, 1960, p. 234.

    * 8 R. Q U A D R I , C o u r s général de droit international public , Milan, The hague academy of international Law, 1964, p. 453.

    * 9 Déclaration sur les lignes directrices sur la reconnaissance des nouveaux États en Europe orientale et en Union soviétique, Bruxelles, 16 décembre 1991, RGDIP, 1992, p. 261.

    * 10 Voir Déclaration du 10 juillet 2000 sur les changements anticonstitutionnels de gouvernement (2000), adoptée enjuillet 2000, à LOME au TOGO, par l'Assemblée des Chefs d'État et de Gouvernement de l'O.U.A., texte intégral reproduit en Anglais dans HumanRights Law in Africa, 2004, p. 280.

    * 11R. BEN ACHOUR, op.cit., p. 6.

    * 12 Voir son avis rendu à l'occasion de l'affaire des conséquences juridiques pour les États de la présence de l'Afrique

    du Sud en Namibie, à l'occasion de laquelle, elle paraît lui donner un fondement général quasi coutumier.

    * 13 P. REUTER, A. GROS, Traités et documents diplomatiques, Paris, PUF, 1963, p. 510.

    * 14 J. VERHOEVEN, Droit.....op.cit., p. 63.

    * 15 D. NGUYEN QUOC (et alii), op.cit., pp. 630-631.

    * 16Ibidem.

    * 17 J. BASDEVANT, Règles générales du droit de la paix, Paris, IDI, 1936, p.638.

    * 18 J. VERHOEVEN, La Reconnaissance internationale dans la pratique contemporaine, Paris, Pedone, 1975, § 159.

    * 19 Commission d'arbitrage de la conférence pour la paix en ex Yougoslavie, Avis n°10 du 4 juillet 1992, §4, RGDIP,1993, p. 594.

    * 20 G. SCELLE, op.cit., p. 113.

    * 21 J. VERHOEVEN, La Reconnaissance.....op.cit., § 159.

    * 34 R. P. MAZZESCHI, Responsabilité de l'État pour violation des obligations positives relatives aux droits de l'homme, Milan, Giffre, 2008, p. 202.

    * 22 C. ROUSSEAU, Droit international public : les compétences, Toulouse, Sire y, 1977, p. 606.

    * 23 R. AGO, Science juridique et droit international, Milano, Giffre, 1956, p. 859.

    * 24 G. SCELLE, op.cit., pp. 117-118.

    * 25 L. C. GREEN, op.cit., p. 5.

    * 26 C. ROUSSEAU, op.cit., p. 597.

    * 27 L. C. GREEN, op.cit., p. 6.

    * 28 G. CORNU, op.cit., p. 724.

    * 29 L. C. GREEN, op.cit., p. 5.

    * 30 G. SCELLE, op.cit., p. 117.

    * 31 L. C. GREEN, idem, p. 6.

    * 32 P. ZICCARDI, op.cit., p. 334.

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    * 63 E. DAVID, S. VAN ASSCHE, op.cit., p. 491.

    * 64 CIJ, Affaire du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), Recueil 1982, p. 52.

    * 65 CIJ, Affaire du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), Recueil 1982, p. 52.

    * 66 Informations suivies sur RFI le Mercredi 14 Novembre 2012 à21:56.

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    * 69 Compte rendu n° 82 de la Commission des affaires étrangères française sur l'Audition de M. AHMAD ASSI ALJARBA, 2012-2013, p. 2.

    * 70 G. SCELLE, op.cit., p. 109.

    * 71 C. D. I., Compte rendu analytiqueprovisoire de la 2 855 ème Séancetenue au Palais des Nations à Genève le jeudi

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    * 72G. NTIRUMENYERWA M. KIMONYO, La Crise dans la sous-région des grands lacs: quand les protagonistes

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    * 73Revue de presse N° 87 (politique), Kinshasa, 06 mai 2013, p. 3.

    * 74ANZILOTTI, op.cit., p. 348.

    * 75 P. M. DUPUY, op.cit., p. 342.

    * 87 J.-P. SEGIHOBE, Le Congo en droit international : Essai historique agonistique d'un État multinational, Bruxelles,

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    * 76P. M. DUPUY, op.cit., p. 33.

    * 77 C. ROUSSEAU, op.cit., p. 430.

    * 78M. KIMONYO, « La Crise dans la sous-région des grands lacs: quand les protagonistes tournent le dos au droit »,

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    * 79Compte rendu analytique des 2 772 ème séances sur les Actes unilatéraux des États, Extrait de l'Annuaire de la CDI, 2003, vol. I, p. 152, disponible sur Http: //www.un.org / Law / ilc /index.htm, consulté le 11 /08 /2013, 13 :58 : 57.

    * 80 C. ROUSSEAU, op.cit., p. 430.

    * 81 E. DAVID, S. VAN ASSCHE, op.cit., p. 491.






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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote