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La reconnaissance des mouvements rebelles dans la pratique internationale contemporaine

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par Gabriel MUGISHO Dunia
Université Catholique de Bukavu - Licence en droit public interne et international 2012
  

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§2. Problème juridique

L'existence du droit d'une société telle que la Communauté internationale a, d'après Robert AGO, toujours constitué une source de difficultés pour la science juridique.53(*)Ces difficultés apparaissent à travers la reconnaissance des rebelles en Syrie comparativement à celle qui intervint en Libye. Une reconnaissance en morceau, vient s'ajouter à bon nombre de difficultés soulevées par la science juridique lui-même, le droit international. Le président français est le premier à reconnaître les rebelles syriens. Il va considérer ce geste comme une avancée significative sur le plan de la diplomatie. Il considère qu'il milite pour l'avènement et l'instauration d'un État de droit en Syrie. L'État de droit qui appartient pourtant à l'univers du droit constitutionnel et de la théorie générale de l'État, fait partie de la terminologie usitée en droit interne. Il est surprenant qu'il puisse constituer le fondement de cette reconnaissance au regard du principe de l'égalité des États qui fait qu'aucun État n'est soumis à la critique de l'autre. Par ailleurs, une telle ingérence devrait être inquiétante. En effet, comme les couleurs de l'arc-en-ciel changent insensiblement, en droit, les catégories juridiques, les diverses sources, les objectifs poursuivis ne se distinguent plus nettement les uns des autres, qu'ils s'entremêlent, qu'on passe des uns aux autres sans toujours s'en rendre compte. Si l'arc-en-ciel a une valeur esthétique certaine, il n'est pas sûr que ce caractère flou soit toujours heureux en droit.54(*)

Il est cependant considéré comme un modèle qui remplace ipso jure toute situation d'État de police qui existe et qui ne se conforme pas ce faisant aux principes cardinaux du droit international. L' :«État dont l'organisation interne est régie par le droit et la justice et qui se caractérise plus particulièrement par diverses institutions et techniques juridiques : la séparation des pouvoirs, l'indépendance des juges, le contrôle de la constitutionnalité des lois et de la légalité des actes administratifs ainsi que la protection des droits des personnes »,55(*) constitue un État de droit. Il apparaît clairement que l'idéal serait que tous les États se conforment à cette règle. Mais à défaut pour les États de la respecter, y a-t-il possibilité de les y contraindre au regard du fait que la loi internationale est muette quant à ce ?

Une telle justification serait démise dans les pays où l'opposition ne parle ni ne bouge, où le peuple est moins écouté, alors qu'il n'y a que formalisme démocratique ? Aliis verbis va-t-on les considérer comme démocratiques ? Thierry HYBERT affirme que la pratique internationale rassure du dédoublement fonctionnel du droit international en ce que les moments de reconnaissance influencent les événements déstabilisant l'État.56(*)

Dès lors qu'il y a culte du président à notre avis, on tire à bout portant, c'est un État policier quelle que soient les issus des élections démocratiques. Reconnaître les rebelles sur une telle base est alors erronée dès lors que certains pays se disent démocratiques alors qu'ils ne sont pas en réalité. L'autre prétexte avancé pour la reconnaissance des mouvements rebelles fondé sur le droit à la démocratie impose de savoir si le droit du peuple à la démocratie peut prétendre à quelque consistance juridique, au-delà de sa simple affirmation. Est-ce que la protection internationale des droits de l'Homme relative au droit à des élections libres concourt à l'affermissement de ce droit à la démocratie ? La démocratie apparaît-elle comme l'unique modèle politique envisagé et, partant, le seul qui soit compatible avec le droit international ? A cet égard, la réponse fondamentale que l'on puisse se proposer est celle de savoir que l'on ne peut pas résister à un régime hostile dans la paix. Les rebelles syriens commettent eux aussi des atrocités autant que BASHAR AL ASSAD, président syrien. Les civils sont inviolables dans un conflit armé auquel ils ne sont pas partis. En effet, d'après les règles pertinentes du droit international applicable aux conflits armés, les personnes civiles sont protégées contre les attaques. Sauf bien entendu si elles participent directement aux hostilités et pendant la durée de cette participation.57(*) Lorsqu'ils sont attaqués par les rebelles, car les armes ne distinguent pas, nous ne voyons pas le bien fondé de reconnaître ces mouvements face à la règle interdisant de reconnaître des situations illicites. En effet, le principe ci-haut énoncé est coutumière.

Le président français avait demandé au ministre des Affaires étrangères Laurent FABIUS, lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne, de poursuivre le travail de conviction pour que la reconnaissance que la France avait déjà faite puisse être prolongée par d'autres déclarations venant de pays européens et de l'UE. Plus encore, la France s'aligne sur la position anglaise concernant la livraison d'armes aux bandes armées en Syrie, qui est du reste anormale. Réagissant à ces propos, André CHAMY, du réseau Voltaire France, explique en quoi la position belliqueuse appelant à armer « l'opposition » en Syrie est tout simplement illégale à la lumière du droit international et porte un coup très sévère à la réputation de la France dans le monde. Mais Alain PELLET lui pense qu'il faut réprimer le régime syrien actuel pour les actes ignobles et inhumains et pour les crimes ignominieux qu'il commet sans sagacité émotionnelle.

Dans l'État, suivant cet auteur, « quelles que soient la forme de son organisation politique et la nature de ses institutions, il existe toujours des mécanismes permettant d'ajuster les règles inadaptées aux besoins de la société. Cela peut se faire par la révolution qui permet, par des changements drastiques de l'ordre juridique, de répondre à un bouleversement radical des rapports sociaux. »58(*)

A notre avis, la reconnaissance des mouvements rebelles est un acte d'ingérence dans une guerre civile mais également et surtout un acte de haute irresponsabilité. L'on ne saurait en effet reconnaître des groupes belligérants sans méconnaître un certain nombre des règles immuables. Cette reconnaissance des rebelles syriens ne trouve pas de base fondamentale en un texte coulé en forme de Traité ni en une coutume. Cela traduit encore une fois l'instabilité et le détournement du droit international. Nous déplorons par ailleurs que d'autres modes de production ou de formation du droit puissent contribuer à cet état de fait. Parmi ces autres sources, les actes unilatéraux occupent une place de choix. Une telle assertion légitime les révolutions et suit la droite ligne de la nouvelle doctrine qui fut admise en jurisprudence depuis 1885 par la Cour de district sud de New York dans l'affaire de l'AmbroseLight, relativement à l'arrestation en haute mer d'un navire colombien insurgé par un bâtiment de guerre américain.59(*)

La Coalition nationale syrienne a ainsi poursuivi sa restructuration interne, qui avait déjà vu son élargissement à de nouveaux membres, de manière à rendre cette structure plus inclusive et plus représentative, avec notamment l'entrée du « pôle démocratique » constitué autour de M. Michel KILO. Très variés sont les intérêts russes qui se manifestent dans l'affaire syrienne. Les livraisons d'armement ont aisément survécu à l'effondrement de l'URSS. Mais Moscou défend aussi traditionnellement dans cette région les minorités chrétiennes, en même temps qu'elle valorise le laïcisme affiché du régime alaouite contre les tentations islamistes. Plus largement, la Russie se réinsère dans le jeu moyen-oriental, tout en réaffirmant contre l'Occident la prééminence du principe de non-ingérence.60(*) En définitive, au regard du droit international, la reconnaissance par la France et beaucoup d'autres pays, qui seront cités dans le point suivant, des mouvements rebelles syriens est illégale. Pour comprendre le caractère illicite de cette reconnaissance, il faut se référer à l'article 2 de la Charte de Nations unies qui énonce les différents principes devant régir les relations internationales. L'on remarque que la pratique internationale contemporaine insiste sur le fait qu'une guerre juste, sinon une guerre licite doit être reconnue. D'après l'évolution du droit international, on sait dire que telle norme est violée, mais l'on ne saurait pas empêcher sa violation au regard de ce caractère évolutif. Ainsi selon VERHOEVEN : « Aucune norme ne revêt un caractère d'éternité ou d'immuabilité qui la protégerait contre l'érosion du temps.»61(*)

L'organisation des Nations Unies et ses Membres, dans la poursuite des buts énoncés à l'article 1, doivent agir conformément aux principes suivants :

1. L'organisation est fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses Membres.

2. Les Membres de l'Organisation, afin d'assurer à tous la jouissance des droits et avantages résultant de leur qualité de Membre, doivent remplir de bonne foi les obligations qu'ils ont assumées aux termes de la présente Charte.

3. Les Membres de l'Organisation règlent leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, de telle manière que la paix et la sécurité internationales ainsi que la justice ne soient pas mises en danger.

4. Les Membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies.

5. Les Membres de l'Organisation donnent à celle-ci pleine assistance dans toute action entreprise par elle conformément aux dispositions de la présente Charte et s'abstiennent de prêter assistance à un État contre lequel l'Organisation entreprend une action préventive ou coercitive.

6. L'organisation fait en sorte que les États qui ne sont pas Membres des Nations Unies agissent conformément à ces principes dans la mesure nécessaire au maintien de la paix et de la sécurité internationale.

7. Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État ni n'oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente Charte; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l'application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII.62(*)

En ce qui concerne la Syrie, nous sommes persuadé, c'est vraie, que le président syrien n'envisage aucun dialogue ; en revanche, il n'existe pas en droit international un texte permettant aux États de reconnaître alors les rebelles, de même qu'il n'existe aucun texte les y autorisant. Le droit international demeure jusqu'en ce jour moins formaliste et la pratique est hésitante. Le seul texte qui nous paraît de référence est constitué des principes directeurs parmi lesquels on peut mentionner : « Relevant que la question de savoir si un comportement unilatéral de l'État lie celui-ci dans une situation donnée dépend des circonstances de l'espèce, relevant aussi qu'en pratique, il est souvent difficile d'établir si les effets juridiques découlant du comportement unilatéral d'un État sont la conséquence de l'intention qu'il a exprimée ou dépendent des expectatives que sa conduite a fait naître chez d'autres sujets du droit international, la Commission du droit international a adopté les principes directeurs qui ne portent que sur les actes unilatéraux stricto sensu, revêtant la forme de déclarations formelles formulées par un État dans l'intention de produire des obligations en vertu du droit international.»63(*) L'on considère que ces déclarations unilatérales ne doivent pas contrarier des règles qui existent déjà. C'est à dire que les normes coutumières restent intactes et ne doivent pas être touchées. Alors, on conçoit mal qu'une reconnaissance des mouvements rebelles intervienne alors que celle-ci porte fondamentalement sur l'État nouveau ou le gouvernement. Une telle évolution est en conséquence débitrice des doutes. Celles-ci s'expriment mieux lorsqu'on se déplace vers un échelon plus ou moins spectaculaire traduisant une émergence des règles quasi scélérates. On se déplace en conséquence vers un nouveau mode de production du droit qui s'opère en un passage de la pyramide au réseau. Nonobstant cette évolution, il demeure que le droit international n'entend accorder de valeur juridique à une norme qui contrarie celles qui lui sont antérieures. La CIJ s'est exprimée dans le même sens dans l'affaire du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne) en relevant « qu'essayer d'établir unilatéralement des limites maritimes internationales sans tenir compte de la position juridique d'autres États est contraire aux principes reconnus du droit international ».64(*)

* 53R. AGO, op.cit., p. 85.

* 54 H. GAUDEMET-TALLON, Le Pluralisme en droit international privé : richesses et faiblesses (Le funambule etl'arc-en-ciel) Cours général, tome 312, Lei den/Boston, Martinusnijhoffpublishers, 2006, p. 23.

* 55 J. SALMON, op.cit., p. 456.

* 56 T. HUBERT, L' Évolution du droit international, Milan, The hagueacademy of international Law, 1990, p. 22.

* 57 J.-M. HENCKAERTS, « Étude sur le droit international humanitaire coutumier. Une contribution à lacompréhension et au respect du droit des conflits armés », in Revue internationale de la Croix-Rouge, Volume 87,Sélection française, 2005, p. 313.

* 58 A. PELLET, L'Adaptation du droit international aux besoins changeants de la société internationale, Conférence

inaugurale, session de droit international public, 2007, p. 19.

* 59 C. ROUSSEAU, op.cit., p. 605.

* 60 F. PICHON, La Syrie, quel enjeu pour la Russie au Moyen-Orient ? Paris, PUF, 2013, p. 1.

* 61 J. VERHOEVEN, Droit...op.cit., p. 674.

* 62 Article 2 de la Charte des Nations unies signée à San FRANSISCO le vingt-six juin mil neuf cent quarante-cinq, p.4.

* 63 E. DAVID, S. VAN ASSCHE, op.cit., p. 491.

* 64 CIJ, Affaire du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), Recueil 1982, p. 52.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci