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Femme et politique au tchad: cas des parlementaires et des membres du gouvernement(1962-2018)par Nadjilem Ribar CHRYSSEL Université de Yaoundé 1 - Master 2024 |
UNIVERSITE DE YAOUNDE I THE UNIVERSITY OF YAOUNDE I ******** ******** CENTRE DE RECHERCHE ET DE POST GRADUATE SCHOOL FOR SOCIAL FORMATION DOCTORALE EN SCIENCES AND EDUCATIONAL SCIENCES HUMAINES, SOCIALES ET EDUCATIVES
******** UNITE DE RECHERCHE ET DE DOCTORAL RESEARCH UNIT FOR FORMATION DOCTORALE EN SCIENCES SOCIAL SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES
******** DEPARTEMENT D'HISTOIRE DEPARTMENT OF HISTORY FEMME ET POLITIQUE AU TCHAD : CAS DES Mémoire de Master en Histoire soutenu le 13 septembre 2024 Spécialisation : Histoire Économique et Sociale Par Chryssel NADJILEM RIBAR Jury Président : KENNE Faustin, Pr Rapporteur : Gabriel Maxime DONG MOUGNOL, Pr Examinateur : NEBEU Jean Daniel, CC Septembre 2024 À mes parents Romain Ribardjé Djetobalmian et Emilienne Londogoto. SOMMAIRE II SOMMAIRE ii AVERTISSEMENT iii SOMMAIRE REMERCIEMENTS iv SIGLES ET ACRONYMES v LISTE DES ILLUSTRATIONS vii RESUME viii ABSTRACT ix INTRODUCTION 1 CHAPITRE I : LA FEMME TCHADIENNE AU PARLEMENT ET AU GOUVERNEMENT A L'ERE DU MONOPARTISME (1962-1990) 27 I- LES DIFFERENTS REGIMES POLITIQUES A L'ERE DU MONOPARTISME ET LEUR HOSTILITE VIS-À-VIS DE LA FEMME (1962-1990) 28 II- LES PARCOURS DE QUELQUES FIGURES FEMININES MARQUANTES DE L'HISTOIRE POLITIQUE DU TCHAD 38 CHAPITRE II : L'EMANCIPATION POLITIQUE DE LA FEMME TCHADIENNE DEPUIS L'INSTAURATION DE LA DEMOCRATIE EN 1990 44
AU TCHAD 65 CHAPITRE III : LES POLITIQUES LIEES AUX FEMMES ET LEUR NIVEAU DE MISE EN OEUVRE AU TCHAD 73 I. LA POLITIQUE NATIONALE DE GENRE AU TCHAD 74 II- LE CODE DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE 86 III- LES AUTRES POLITIQUES LIEES AUX FEMMES : LA STRATEGIE DE LUTTE CONTRE LES VIOLENCES BASEES SUR LE GENRE AU TCHAD 93 CHAPITRE IV : LE QUOTA ET LA PARITE : DEUX STRATEGIES DE RESOLUTION DE LA SOUS-REPRESENTATION DES FEMMES TCHADIENNES EN POLITIQUE 97
INSTANCES DE PRISE DE DECISION 107 CONCLUSION 117 ANNEXES 117 SOURCES ET REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 117 TABLES DES MATIERES 117 III AVERTISSEMENT Ce document est le fruit d'un long travail approuvé par le jury de soutenance et mis à disposition de l'ensemble de la communauté universitaire élargie. Il est soumis à la propriété intellectuelle de l'auteur. Ceci implique une obligation de citation et de référencement lors de l'utilisation de ce document. Par ailleurs, le Centre de Recherche et de Formation Doctorale en Sciences Humaines, Sociales et Educatives de l'Université de Yaoundé I n'entend donner ni approbation, ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire ; ces opinions doivent être considérées comme propre à leur auteur. iv REMERCIEMENTS Nous exprimons notre reconnaissance à tous ceux qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation de ce travail. Hommage rendu particulièrement au Professeur Gabriel Maxime DONG MOUGNOL, pour sa disponibilité et ses qualités professionnelles et humaines. Malgré ses multiples occupations, il a toujours trouvé le temps pour nous. Qu'il trouve dans ces propos, notre profonde reconnaissance et le fruit de ses exigences scientifiques. Nous remercions également tous les enseignants du Département d'Histoire de l'Université de Yaoundé I, pour leurs enseignements dont la portée a été particulièrement significative dans notre formation. Nos sincères remerciements à l'Assemblée Nationale du Tchad, au Secrétariat Général du Gouvernement, au Centre de Formation pour le Développement, au Centre Al-Mouna et à la Bibliothèque Nationale du Tchad, pour nous avoir fourni les informations nécessaires pour la réalisation de ce mémoire. Une pensée précisément aux Dr. BAKARI Sali, Dr. WALBADET Sir Lucain, Dr. NOM-OSSO Dara, et Dr. Marcelin Abdelkerim. Un merci aussi à tous nos informateurs, pour leur disponibilité. Nos sincères remerciements vont à l'endroit de Caleb Mbaindigabé, Olivier Mouita, Enos Londogoto, Hyppolite Mbairamadji, Julius Ndaidouradé, Laomaye Yotoloum, Dieudonné Desmang, Julien Laomian, Éveline Londogoto, Saturnin Laomaye, Tirolien Laotaye Guy, Jean Bouanougam, pour leur appui moral durant notre parcours universitaire au Cameroun. Ces remerciements vont également à notre promotion du Département d'Histoire de l'Université de Yaoundé I, en particulier Marie Noëlle Madjingar, Abdel-Salam Abdoulaye Harine, Djebaroum Madjitoingar, pour leurs encouragements. Merci également à l'ainé académique, Dr. Dalouta Tououpain Mouncharou, pour ses conseils. À nos frères et soeurs qui n'ont jamais cessé de manifester leur affection, qu'ils trouvent ici, l'expression de notre sympathie. Qu'ils reçoivent également un sentiment de reconnaissance en raison de leur assistance, leur considération pendant notre séjour au Cameroun. SIGLES ET ACRONYMES V AFA : Association Fille Aussi AFED : Association des Femmes pour l'Entraide au Développement AFEM : Association Femme en Marche AFJT : Association des Femmes Juristes du Tchad ASTBEF : Association Tchadienne pour le Bien-être Familial BEPC : Brevet d'Étude du Premier Cycle CCFAN : Conseil de Comité des Forces Armées du Nord CEFOD : Centre de Formation pour le Développement CELIAF : Cellule de Liaison des Associations Féminines CEDEF : Convention sur l'Élimination de la Discrimination à l'Égard des Femmes CNS : Conférence Nationale Souveraine CNIFD : Comité National d'Intégration de la Femme au Développement CSM : Conseil Supérieur Militaire CST : Conseil Supérieur de la Transition DAPRO : Direction de l'Analyse et de la Prospective EDST : Enquête Démographique et de santé au Tchad FAN : Forces Armées du Nord FAR : Fédération Action pour la République FROLINAT : Front de Libération Nationale du Tchad IFD : Intégration de la Femme au Développement MASSNF : Ministère de l'Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille OFUNIR : Organisation des Femmes de l'UNIR (Union Nationale pour l'Indépendance et la Révolution) PAA : Plan d'Action Annuel PPT/RDA : Parti Progressiste Tchadien/section du Rassemblement Démocratique Africain PSIT : Parti Social Indépendant du Tchad RAJEUNIR : Rassemblement des Jeunes de l'Union Nationale pour l'Indépendance et la Révolution REFEMP/T : Réseau des Femmes Ministres et Parlementaires du Tchad UDR : Union pour la Démocratie et le Renouveau UDT : Union Démocratique Tchadien vi UNACOT : Union Nationale des Commerçants UNDR : Union Nationale pour la Démocratique le Renouveau UNIR : Union Nationale pour l'Indépendance et la Révolution URD : Union pour le Renouveau et la Démocratie TBS : Taux Brut de Scolarisation LISTE DES ILLUSTRATIONS vii Tableaux Évolution de la représentation feminine au parlement de 1962 à 1990 35 Évolution des femmes parlementaires et nombre du gouvernement de 1962 à 1990 37 Nombre des femmes au Parlement de 1991 à 2018 49 Nombre des femmes au Gouvernement à l'ère du multipartisme de 1991 à 2018 54 Quelques partis politiques dirigés par les femmes de 1990 à 2018 102 Photos Bourkou Louise Kabo : Première femme élue à l'Assemblée Nationale tchadienne de 1962- 1973 39 Fatime Kimto : Première femme Secrétaire d'État puis ministre du Tchad de 1982-1986 40 Khadidja Touré : Femme militante, avocate et défenseuse des droits humains 42 Carte Carte administrative du Tchad 7 Diagrammes Evolution des nombres de femmes élues au parlement à l'ère du monopartisme entre 1962 et 1990 36 Evolution des nombres de femmes nommées au gouvernement à l'ère du monopartisme entre 1962 et 1990 37 Nombre de femmes au parlement de 1991 à 2018. 50 Evolution des nombres des femmes aux gouvernements entre 1991 à 2018 55 VIII RESUME La présente étude intitulée «Femme et politique au Tchad : cas des parlementaires et des membres du gouvernement (1962-2018)». L'interrogation principale qui sous-tend cette analyse est la suivante : la femme tchadienne est-elle valablement représentée au parlement aussi bien qu'au gouvernement de son pays depuis l'indépendance ? Ceci étant, cette étude se propose de passer au crible à évaluer les réalisations de la femme tchadienne dans la vie politique au Tchad. Elle analyse la situation de la femme tchadienne au parlement et au gouvernement à l'ère du monopartisme, démontre l'émergence de l'émancipation politique de la femme tchadienne depuis l'instauration de la démocratie en 1990, identifie les politiques liées aux femmes et leur niveau de mise en oeuvre au Tchad, examine la politique du quota à la parité comme stratégie d'implication des femmes dans la vie politique. Pour évaluer les réalisations de la femme tchadienne, plusieurs sources ont été indispensables, il s'agit de celles écrites, iconographiques, orales et l'approche invitée est la diachronie. La méthode utilisée a permis d'obtenir les résultats selon lesquels malgré la clarté de la loi fondamentale qui dit que les Tchadiens de deux sexes ont le même droit et les mêmes devoirs, ils sont égaux devant la loi. Pendant longtemps, la femme a été écartée de la sphère décisionnelle, aussi bien au parlement qu'au gouvernement. Ceci s'explique, entre autres, par le poids de la tradition et la politique peu favorable. En effet, la femme est considérée comme un être inférieur. Outre cette situation, le contexte politico-institutionnel marqué par les guerres et les violences politiques n'a guère favorisé l'émergence des femmes en politique. Force est de constater que même dans l'exercice de l'activité politique, les femmes continuent d'être victimes des discriminations ; d'où l'impérieuse nécessité de soutenir l'action politique féminine en institutionnalisant le système de quota et de la parité dans les listes électorales, en finançant les femmes, ou encore les aidant à organiser leur campagne politique. Mots clés : Femme, Politique, Parlement, Gouvernement, Tchad. ix ABSTRACT This study entitled «Women and politics in Chad: case of parliament and government (1962-2018)».The main question underlying this analysis is the following: have Chadian women been validly represented in parliament as ell in the government of their country since independence? This being said, this study aims to assess the achievements of Chadian women in political life in Chad. She analyzes the situation of Chadian women in parliament and government in the era of one-party politics, demonstrates the emergence of the political emancipation of Chadian women since the establishment of democracy in 1990, identifies policies related to women and their level of implementation in Chad, examines the policy of the parity quota as a strategy for involving a large number of women in political life. To evaluate the achievements of the Chadian woman, several sources were essential, it is about those written, iconographic, oral and the invited approach is the diachrony. The method used made it possible to obtain the results according to which despite the clarity of the fundamental law which says that Chadians of both sexes have the same rights and the same duties, they are equal before the law. For a long time, the woman was excluded from the decision-making sphere, as well particularly in parliament and government. This is explained, among other things, by the weight of tradition and unfavorable politics. Indeed, the woman is considered as an inferior being. In addition to this situation, the politico-institutional context marked by wars and political violence has hardly favored the emergence of women in politics. It is clear that even in the exercise of political activity, women continue to be victims of discrimination; hence the imperative need to support women's political action by institutionalizing the quota system in the electoral lists, by financing women, or by helping them to organize their political campaign. Keywords: Women, Politics, Parliament, Government, Chad. INTRODUCTION 1 2 1- CONTEXTE HISTORIQUE La conquête des libertés, la reconnaissance et le respect des droits des individus ne s'obtiennent pas sans heurt. Les guerres furent et demeurent nécessaires pour triompher des tyrannies. Les révolutions ont coûté d'innombrables vies humaines aux Nations qui se sont soulevées pour parvenir à leur indépendance de la domination coloniale. Dans ces Nations, les hommes et les femmes ont été les principaux acteurs de la conquête de cette liberté. Toutefois, au moment de récolter les fruits du succès si durement acquis, les femmes ont été parfois privées de reconnaissance pour leur participation à ces différentes manifestations1. Cette discrimination trouve sa justification dans des préjugés, selon lesquelles la femme est naturellement faible pour mener des luttes. Ce sont des préjugés fondés sur des mythes et des légendes que se font les hommes à l'égard des femmes car, comme l'écrit Pierre Bourdieu, «le mensonge à soi-même, collectivement entretenu et encouragé (...) est, en toute société au fondement des valeurs les plus sacrées et, par-là de toute l'existence de la société''2. D'abord, le concept femme. Littéralement, on entend par femme, la femelle de l'homme. Elle désigne un être humain de sexe féminin3. Dans le cadre de cette étude, le mot «femme'' désigne les personnes de sexe féminin, y compris les filles4. Un humain de sexe qui conçoit et met au monde des enfants. Dans la croyance populaire, la femme ayant pour raison première la procréation, est un être inférieur à l'homme, et doit à cet effet jouer un rôle de second plan. Cette perception imaginaire est soutenue par Laobele Dangde pour qui la femme ne doit pas oublier son statut éternel de féminité, c'est-à-dire un être sur la terre pour donner des enfants aux hommes5. Une telle perception est le fruit d'une simple imagination qui résume à suffisance l'état d'esprit qui prévaut à l'endroit de cette catégorie d'être humain et minimise sa contribution majeure à la société. Dans la société traditionnelle africaine, la femme en réalité, occupe une place fondamentale non pas seulement sur le plan moral de l'éducation des enfants, mais aussi et surtout sur le plan politique. En plus de l'éducation des enfants, elle est le pilier de la famille 1 E. Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes à la vie politique au Tchad : 1990-2003'', Mémoire de Maîtrise en Sciences Juridique et Politique, UCAC, Yaoundé, 2003, p.30. 2 P. Bourdieu, La place des Femmes : enjeux de l'identité et de l'égalité au regard de Sciences Sociales, Paris, Karthala, 1998, p.34. 3 Le Petit Larousse Illustré, 2013, p.452. 4 Art.1er al. (g) du Protocole à la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique. 5 L. Dangde, «La Place de la femme dans la société traditionnelle Igbo'', Revue Scientifique du Tchad - Série A-décembre 2015, p. 55. 3 qui doit former le foyer et préserver les traditions ; bref la formation de l'homme à la culture citoyenne dans la société traditionnelle relève de sa compétence6. En général la femme, qu'elle soit noire, blanche ou jaune, comparativement à l'homme, est spécifique en son genre pour le don gratuit de la vie. C'est pourquoi, elle a un charisme qui incarne et porte les véritables valeurs de l'amour. Or, rien de grand ne se construit sans le don de l'amour parce que l'égoïsme détruit7. En Afrique, la situation de domination, de soumission et de négation de droits de la femme n'est pas aussi totale car, il y eut des femmes qui se sont illustrées par leur présence (Brunehaut, Jeanne d'Arc) en Occident, tout comme il y eut des sociétés qui étaient gouvernées par des femmes en Afrique, notamment Abla Pokou, la généreuse reine Baoulé qui accepta de sacrifier son fils pour sauver son peuple; de Ranavalona III de Madagascar ; Aline Sitoe Diatta du Sénégal, symbole de la résistance casamançaise ; Ngaliforou de la RDC, souveraine du Royaume Téké ; les reines Candace qui dirigèrent l'empire Koushite de Méroé (Soudan) ; Ana Nzinga d'Angola, qui s'opposa à la domination portugaise ; Néfertiti d'Égypte et Efunroye Tinubu du Nigeria8. Ces femmes, ont marqué l'histoire du leadership féminin politique en Afrique. Les femmes étaient autrefois, dans de nombreux villages africains, des autorités religieuses et des membres puissants et respectés de leurs communautés9. Sur la scène politique, même si bien souvent que le rôle de la femme n'était pas au premier plan, elle était toujours consultée pour la prise de grandes décisions, nomination d'un chef, acte d'alliance, acte de guerre, de destitution etc. Son rôle dans le développement de la conscience politique traditionnelle a laissé des empreintes indélébiles10. Elle forgeait le moral des guerriers en les exhortant par des chansons poétiques et pleines de signification, valorisant le courage et reléguant la mort à l'arrière- plan. Au niveau du règlement des affaires internes, dans la société traditionnelle, les femmes se placent derrière les hommes pour orienter les débats, suggérer les questions, faire valoir leurs points de vue11. L'élément central de la loi est la femme, car, c'est elle qui transmet de génération en génération les moeurs, la langue, les idées à l'homme qui demain, va prendre les commandes 6 J. Guirayo et al, «Le rôle de la femme dans la gestion de la cité au Tchad», Annales de l'Université de Moundou, Série A-FLASH Vol.7(2), Juin, 2020, p. 2. 7 Ibid, p.3 8 S. Serbin, Reines d'Afrique et Héroïnes de la diaspora Noire, Paris, Sépia, 2004, p.12. 9 Guirayo et al, «Le rôle de la femme», p. 4. 10 Ibid, p.5. 11 Ibid, p. 6. 4 de la cité12. Sous l'arbre à palabre constitué des notables et du chef, la femme intervient. Elle parle toujours assise, c'est un honneur qu'on lui rend, une vénération, un respect pour ce que l'homme lui doit de reconnaissance. En 1962 Bourkou Louise Kabo13, entra à l'hémicycle en tant que première femme parlementaire au Tchad. Avec le flux démographique des années 1970, les crises sociales liées aux coups d'État et les guerres civiles de 1977 et 198414, le pays va se plonger dans une crise politique et sociale défavorable à l'intégration de la femme dans la politique. A partir de cette date, la vie politique fut dominée par les militaires. Les femmes se retrouvèrent absentes du partage du pouvoir, mais étaient employées dans la fonction publique et dans le secteur privé industriel. Il a fallu attendre 1982 pour qu'une femme, Fatimé Kimto entre dans le gouvernement au poste de Secrétaire d'État au Travail et à la Promotion Féminine, puis Ministre des Affaires Sociales et de la Promotion Féminine en 198415. En effet, les régimes qui se sont succédés au Tchad n'étaient que de courtes durées et étaient beaucoup portés à régler leurs dissensions internes. Dans cette atmosphère de violence politique et de terreur, la femme n'avait pas voix au chapitre. Elle se trouvait confinée à son rôle d'épouse et de mère ainsi qu'agent économique. Cette situation de guerre a accentué l'absence de la femme tchadienne de l'activité politique. Avec les tentatives de démocratisation vécues dans de nombreux pays d'Afrique subsaharienne à l'aube des années 1990, on assiste à une nette présence féminine dans le domaine public à travers les associations et leur militantisme dans les partis politiques16. Le multipartisme ouvrit pour ainsi dire la voie aux manifestations publiques tant du côté des formations politiques que du côté des organisations de la société civile avec une émergence des femmes longtemps vues comme des citoyennes de seconde zone. Ce dernier a permis à la femme d'être active dans la vie politique à travers les partis politiques, les mouvements syndicaux, les associations féminines. Cette action lui confère le rôle d'actrice politique au sens plein du terme, où son implication dans la gestion des affaires de la nation n'est plus à discuter. Force est de constater que cette volonté féminine d'investir le champ politique reste émaillée d'embuches en Afrique et plus particulièrement au Tchad. 12 Guirayo et al, «Le rôle de la femme», p. 2. 13 M. N'gangbet, Peut-on encore sauver le Tchad, Paris, Karthala, 1984, p 12. 14 R. Buijtenhuijs, Le FROLINAT et les guerres civiles au Tchad (1977-1984), Paris, Karthala, 1997, p.47. 15 Ngartebaye Le-yota, `La participation des femmes», p.10. 16 E. Sherif, «La participation politique des Femmes au Sahel», rapport d'activité, Avril 2013, Bruxelles, p. 2. L'histoire est en effet, dans une perspective évolutive, sanctionnée par une infinité d'éléments naturels et géographiques qui lui ont servi de cadre et de support. Le cadre géographique est 5 Un tel thème a été choisi certainement pour plusieurs motivations. Ainsi les raisons du choix sont déclinées dans les prochaines lignes.
Dans cet angle, il est question de faire non seulement de faire une étude géographique du Tchad, mais également une justification chronologique. 3.1- Cadre spatial Le cadre spatial est nécessaire dans une recherche en Histoire. Il permet de mieux définir la zone d'étude du chercheur. L'histoire a pour objet d'étudier l'homme. L'on ne peut pas faire une analyse historique en écartant l'homme de son environnement. A ce titre le professeur Albert Pascal Temgoua affirme que : 6 d'une grande importance dans la dynamique sociale, politique et économique, car les sociétés humaines sont en respiration avec le milieu naturel17. La présente analyse portant sur «femme et politique au Tchad : cas du parlement et du gouvernement (1962-2018)», impose la description préalable de la situation géographique du Tchad. Ainsi donc, le Tchad est situé au coeur de l'Afrique, entre le 8ème et le 24ème degré de Latitude Nord et comprise entre le 13ème et le 24ème degré de Longitude Est, le Tchad couvre une superficie de 1.284.000km2 ; il est le cinquième pays le plus vaste d'Afrique après le Soudan, l'Algérie, le Zaïre actuelle RDC et la Libye. Du Nord au Sud, il s'étend sur 1700 km et, de l'Est à l'Ouest, sur 1000km. Il partage ses frontières avec six pays voisins. Au Nord, la Libye, à l'Est, le Soudan, au Sud, la République Centrafricaine et, à l'Ouest, le Cameroun, le Nigeria et le Niger18. De par sa position géographique, au Sud du tropique du Cancer et au coeur du continent africain, le Tchad est marqué par une continentalité accentuée dont l'étranglement économique est l'une des conséquences. En effet, le pays est dépourvu de toute façade maritime. C'est-à-dire, le pays est enclavé et ne dispose d'aucun accès à la mer. Le port le plus proche est le Port Harcourt (Nigeria), à 1700 km de N'Djamena et celui de Douala (Cameroun), situé à environ 2000 km de N'Djamena, la capitale. Cet enclavement extérieur est accentué par une insuffisance des réseaux routiers qui rend difficile la circulation durant une bonne partie de l'année19. Peuplé d'environ 17.000.000 d'âmes 20 , le Tchad appartient politiquement et économiquement à l'Afrique Centrale, mais en raison des similitudes des conditions climatiques, il est rattaché également aux pays sahéliens. Il occupe le bassin du lac Tchad, une vaste cuvette continentale de faible altitude (environ 200m). A l'extrémité du Nord, le massif du Tibesti culmine à 3415m au pic d'Emi-koussi. La capitale N'Djamena se trouve à la confluence des fleuves Chari et Logone. La capitale économique se trouve à Moundou, au Sud du pays21. L'agriculture et l'élevage constituent essentiellement les deux mamelles de l'économie nationale (plus de 80% de la population active) n'arrivent pas à assurer des 17 A. P. Temgoua, Le Cameroun à l'époque allemande 1884-1916, Paris, L'Harmattan, 2014, p.192. 18 D. Kélos, «Pauvreté des Ménages et Travail des enfants au Tchad : Niveaux et Déterminants», Mémoire de Master Professionnel en Démographie, IFORD, 2009, p.9. 19 Kélos, «Pauvreté des Ménages et Travail», p.10. 20 A. Ramadji, «l'opposition partisane dans le système politique tchadien : 1993-2011», Thèse de Doctorat en Science Politique, Université de Bordeaux, 2015, p.24. 21 Ibid, p.11. 7 revenus substantiels aux populations en raison d'une pluviométrie souvent déficitaire et d'une avancée sans cesse du désert22. Ainsi donc, l'on présente la carte administrative du Tchad. Carte 1: Carte administrative du Tchad Source : INSEED, Deuxième Recensement Général de la Population et de l'Habitat `'résultats globaux et définitifs», Ministère du Plan et de la Coopération Internationale, 2012, p 1. 22 Ramadji, «L'opposition partisane», p.16. 8 Après avoir délimitée géographiquement, l'on présente le cadre temporel. 3.2- Cadre temporel L'on s'accorde avec joseph Ki-Zerbo, lorsqu'il affirme « l'historien qui veut remonter le passé sans repère chronologique ressemble à un voyageur qui parcours dans une voiture sans compteur une piste sans borne chronologique23». Le cadre temporel s'étend de 1962 à 2018. La première date est la borne inferieure, elle s'explique par le fait que l'année 1962 introduit la nouvelle législature qui accordait la participation de la femme dans la vie politique du Tchad indépendant24. C'est cette année qu'une première femme politique, Bourkou Louise Kabo est élue à l'hémicycle en tant que parlementaire25. L'année 2018 quant à elle est la borne supérieure. Elle marque la signature d'une ordonnance accordant un quota de 30% de places aux femmes dans toutes les fonctions nominatives et électives26. Il s'agit d'une nouvelle politique de la femme tchadienne dans la vie politique. Pour mieux cerner les mots clés de cette thématique, une clarification conceptuelle est évidente. 4- CLARIFICATION CONCEPTUELLE Pour mieux saisir le sens des termes et expressions clés utilisées dans ce travail, un cadre conceptuel s'impose. Émile Durkheim précise d'ailleurs que «le savant doit d'abord définir les choses, dont-il traite afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est question (...)''27. Cette conceptualisation porte entre autres sur les expressions suivantes : La politique Le terme «politic» désigne les «produits» de l'action gouvernementale, c'est-à-dire les programmes, des décisions et d'actions imputables aux autorités politiques : on parlera ainsi de la «politique étrangère du Tchad ou du Cameroun» ou de la «politique culturelle» de Jack Lang par exemple. Et le terme «politics» désigne plutôt les «processus» liés à l'exercice et à la conquête du pouvoir d'État dans une société donnée28. Des auteurs comme Georges Burdeau et Pierre Braud, n'hésitent pas à cultiver l'androgynie au masculin «le politique» intègre l'ensemble des régulations qui assurent l'unité et la pérennité d'un espace 23 J. Ki- zerbo, Histoire de l'Afrique noire d'hier à demain, Paris, Hatier, 1972, p.16. 24 N'gangbet, Peut-on encore sauver, p.12. 25 Ibid, p.13. 26 Ordonnance No 012/PR/2018 du 22 mai 2018 instituant la parité dans les fonctions nominatives et électives en République du Tchad. 27 E. Durkheim, les règles de la méthode sociologique, Paris, PUF, 1968, p.95. 28 E. Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes à la vie politique au Tchad : 1990-2003», Mémoire de Maîtrise en Sciences Juridique et Politique, UCAC, Yaoundé, 2003, p.30. 9 social hétérogène et confidentiel ; au féminin, «la politique» indique la scène où s'affrontent les individus en compétition pour la conquête et l'exercice du pouvoir29; ce qui laisse une ouverture pour la participation politique. Dans le cadre de ce travail, la politique indique la scène, où s'affrontent les individus en compétition pour la conquête et l'exercice du pouvoir. La participation politique Participer c'est prendre part à une action, c'est contribuer soit directement ou indirectement à la construction d'une chose, d'un État, bref d'une société30. La participation politique signifie l'acte par lequel le citoyen assume et tente d'influencer, directement ou indirectement le cours des affaires publiques dans sa société31. Elle suppose une décision consciente et libre de la part du citoyen, de s'occuper de ce qui est censé orienter la vie de tous dans la cité. C'est pourquoi elle se situe à l'opposé de l'apathique c'est-à-dire du citoyen qui néglige de prendre part à la discussion et à la gestion des problèmes de la cité. Pour Huntington et Nelson32, la participation politique est une activité opérée par des citoyens privés «private citizens» et qui vise à influencer la formation des décisions gouvernementales. La participation politique désigne les activités volontaires par lesquelles les citoyens prennent part aux sélections des dirigeants, directement ou indirectement, à la formation de l'action publique. Ou encore, elle renvoie comme le soulignent Verba et Nice, à ces activités exercées par des citoyens privés qui visent plus ou moins directement, à influencer la sélection du personnel gouvernemental et/ou des actions qu'il entreprend33. Dans le cadre de ce travail, la participation politique désigne l'ensemble des activités d'ordre politique que peuvent avoir les individus dans une société. La représentation La représentation est le fait de représenter une personne ou un groupe et de parler en leur nom34. En d'autres termes, la représentation est une action de représenter quelqu'un, le fait de tenir sa place ou de parler en son nom. En droit, la représentation est le fait de remplacer quelqu'un, d'agir à sa place. Représentation du mandat par le mandataire. En 29 G. Grunberg, «Acteurs et comportement politiques : la participation politique», Cahiers français, n° 276, 1996, p.10. 30 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes», p.30. 31 Ibid, p. 31. 32 M. Grawitz et J. Leca, Traite de sciences politiques : T3 ; action politique, Paris, PUF, 1985, p.76. 33 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes», p.32. 34 M. Legain, (dir), Le Nouveau Dictionnaire petit Robert, Paris, 1993, p. 1943. 10 politique, c'est le pouvoir législatif exercé par les représentés élus. La représentation dans le cadre de ce travail, désigne la proportion des femmes à l'assemblée Nationale Tchadienne et au gouvernement. Mais force est de constater une disproportion entre elles et les hommes dans cette représentation nationale. Parlement Le parlement est une institution représentative titulaire d'un pouvoir législatif à caractère consultatif et prend forme en Grande-Bretagne au XIIIème siècle. Il se définit comme étant un système de séparation souple des pouvoirs. C'est un régime politique dans lequel le Gouvernement est dirigé par un Premier Ministre, responsable devant le parlement35. Par contre, un parlementaire est une personne physique, membre du Parlement, élue dans une circonscription déterminée pour faire partie d'une Assemblée délibérante. En effet, il porte soit le titre de sénateur, soit de député. Les parlementaires constituent l'ensemble des composantes humaines institutionnalisées dont la fonction est la représentation du peuple souverain36. Le Tchad comme tout État africain issu de la colonisation française, va adopter le système parlementaire. En effet, la constitution de 1962 consacre le parlement comme un pouvoir public succédant au pouvoir exécutif. Il est constitué d'une chambre unique dit Assemblée Nationale ou Monocamérale dont les membres portent le titre de Députés. Gouvernement Organe chargé de mettre en oeuvre la politique du président. Ce concept désigne l'ensemble de ceux qui gouvernent un État, membre d'un même ministère. Le gouvernement est le troisième élément constitutif d'un État. Pour qu'un gouvernement soit obéit, il doit être légitime. C'est pour cela que pour maintenir l'ordre sur le territoire, il doit devenir légitime et respecter les règles en vigueur dans la société. Cette notion du gouvernement a un double sens. Le premier sens, utilisé communément désigne l'exécutif, le législatif et le judiciaire et le deuxième sens ne concerne que le premier ministre et son équipe37. Leadership Le terme leadership vient de l'anglais «leader» qui désigne un chef (choisi par ses paires) d'un parti politique. Le leadership est la capacité, la qualité, l'art de conquérir, exercer 35 S. Hadidja, «L'institution parlementaire et l'État de Droit au Cameroun», Mémoire de Master en Droit Public, Université de N'Gaoundéré, 2013, p.12. 36 Ibid, p.16. 37 F. Kaponga, «Le désengagement du gouvernement congolais face à l'efficacité des politiques de développement des entités locales : cas de la ville de Lubumbashi», Mémoire de Master en planification de Développement, Institut Supérieur interdiocésain Monseigneur Mulowa, 2010, p. 23. 11 et conserver une fonction de leader. Dans la langue française, le leadership est une forme d'anglicisme qui désigne un meneur, un chef de file «un dirigeant de terrain, un acteur influent, écouté, qui conduit des personnes vers un objectif »38 . L'usage du mot leader dans ce mémoire est compris dans le sens de meneur d'Hommes, pour l'expression de la féminité d'une part et d'autre part, est leader cette femme qui fait preuve d'une grande influence dans la communauté ou dans la société. Enfin le leader est aussi cette femme qui inspire et suscite de l'engouement auprès de la population du fait de sa personnalité, de son comportement et sa position sociale. Leadership féminin En allant dans le même sens que le mot leadership, le leadership féminin commence à se développer à partir de l'accession des femmes aux postes de pouvoir (travail rémunéré, administration, commandement, accession aux postes électifs...). Le leadership féminin vise à analyser les efforts fournis par les femmes dans la sphère publique. Plus concrètement, le leadership féminin vise à mettre en évidence «les forces et les faiblesses» du genre féminin dans le processus du développement. La particularité du leadership féminin est qu'elle prend en compte les approches personnalistes et situationnelles dans la perspective de l'entrepreneuriat, de l'économique, de management et de la gestion. L'on peut donc reconnaitre que «s'intéresser au leadership des femmes, c'est s'intéresser à la construction du genre féminin et aux représentations de la féminité»39 . Après avoir clarifié les concepts clés, il convient de présenter la revue critique de la littérature. 5- LA REVUE CRITIQUE DE LA LITERRATURE La recherche est un domaine qui est loin d'être statique. L'on est toujours appelé sur ce que les autres avaient déjà évoqués mais dans d'autres aspects, c'est à dire que l'on est loin d'être les premières personnes à aborder un thème de recherche. Il revient à dire que certains auteurs ont abordé la question de la femme et la politique que ce soit sur le volet social, le domaine économique, ou encore dans le domaine politique. C'est ce qui donne raison à Guillaume Fongang lorsqu'il tirait la sonnette d'alarme en ces termes : 38 E. Wassouo, «Représentations du leadership politique féminin différences Culturelles : comparaison entre la France et le Cameroun», Thèse de doctorat en psychologie, Université de Grenoble Alpes et Université de Yaoundé I 21 avril 2017, p.25. 39 N. A. Gaudreau, «Représentations sociales : femme leader, leader idéal et leadership personnel, une approche biographique du leadership», Mémoire en Psychologie, Université du Québec à trois rivières, 2016, p.23. 12 L'essentiel de la découverte scientifique ne tient pas seulement à la nouveauté d'une observation, mais aussi au fait d'établir un rapport solide entre le déjà connu et ce qui était jusqu'alors inconnu, car c'est grâce à ce processus que l'on parvient le plus surement à la compréhension véritable et au progrès réel.40 Il devient vital de passer en revue ces multiples publications en rapport avec ce travail. C'est pourquoi l'étude de la revue critique de la littérature est capitale. Car elle permet de voir si les études ont été faites sur la femme et la politique dans tous les aspects. C'est sans doute dans cette perspective que Michel Beaud41 écrit ?ce qu'on attend d'une thèse, comme dans tout travail de recherche c'est un progrès dans la connaissance : soit un éclairage sur la question en débat, soit la reconstruction d'un corpus explicatif, soit un approfondissement de la connaissance dans le domaine qu'elle analyse.» Cette rigueur méthodologique oblige le chercheur à faire une fouille des documents d'une manière minutieuse en rapport avec le thème à traiter. Pour combler cette exigence scientifique, l'on a eu recours à moult publications scientifiques en rapport avec ce thème, d'une manière directe ou indirecte. Il s'agit des travaux de : Fred Constant42 , dans son livre intitulé : «la citoyenneté», pense que, contrairement à l'idée populaire, la citoyenneté est loin de disparaître. Selon ses dires, ce serait plutôt la représentation universelle, spécifique de celle-ci et de son implication dans l'espace public qui serait en dégénérescence. Pour soutenir sa thèse, l'auteur avance, que la citoyenneté se présenterait sous de nouveaux visages. Pour lui, ce serait l'aboutissement d'une forme récente d'implication dans le domaine public. Conséquemment, la citoyenneté ne peut être un acquis pour tous. Elle est considérée par l'auteur comme un métier qui nécessiterait une longue formation. De plus, un citoyen sera porté à participer dans le système à partir du moment, où il devient conscient de ses exigences civiques ; d'où l'idée constante chez l'auteur que la participation politique est directement corrélée au degré d'intégration de l'individu à la collectivité. Constant admet que le fait d'avoir la potentialité de prendre part à l'exercice du pouvoir, ne permet pas de régler les conflits. Encore faudrait-il que le citoyen puisse abroger les clivages majeurs qui sont présentes dans la société. L'auteur ne montre pas l'indispensabilité de la femme et la citoyenneté. Il y a pourtant lieu de penser que la citoyenneté est indispensable comme un défi majeur pour la bonne gouvernance et le vivre ensemble. 40 G. Fongang, les mutations du secteur agricole bamiléké (Cameroun) étudiées à travers ses acteurs ; une analyse à partir des localités de Fokoué et de Galim, Paris, Gregnon, 2008, p. 24. 41 M. Beaud, l'art de la thèse, Paris, la découverte, 1997, p. 78. 42 C. Fred, La citoyenneté, Paris, Montchrestien, 1998. 13 Pour Bérengère Marques-Pereira, le problème se pose autrement. Dans son ouvrage, l'auteure met en garde contre toute considération spécifique quand on traite de la citoyenneté des femmes. Pour cette dernière, la citoyenneté révélerait des images métaphoriques qu'ont les sociétés d'elles-mêmes et «l'état de réflexivité que sociologues et politistes entretiennent à leur champ politique»43. Cette thèse se confirme dans ses propos quand elle affirme que c'est à partir des années quatre-vingts que les politicologues ont commencé à aborder la question de la citoyenneté des femmes dans la perspective des genres. Nonobstant, l'apport bénéfique de cette question à la théorie politique et à la sociologie politique, cette dernière n'est toujours pas considérée comme un thème de recherche distinct. Marques-Pereira explique cela par la forte domination des hommes dans les domaines de la science et la sociologie politique. Dans ce cas-là, il n'est pas étonnant de voir que la question de la citoyenneté des femmes ne fut pas consacrée comme objet de recherche. L'avis de l'auteur attire l'attention puisqu'elle ne montre pas l'importance de la citoyenneté des femmes dans le développement politique au Tchad. Il convient de saisir la difficulté pour les femmes de s'identifier à un modèle donné de citoyen. Pour Jane Jenson44, c'est le citoyen issu de la Révolution française qui fut considéré comme le modèle type de citoyenneté. D'ailleurs, de nombreux mouvements de femmes l'ont dénoncé lors des deux grandes vagues du féminisme en Europe occidentale. Aujourd'hui, ce prototype a grandement évolué. Il fut rejeté au profit d'une toute autre définition de la citoyenneté ainsi que de la démocratie. Mais aussi, c'est grâce à l'acquis des droits politiques des femmes, que d'autres images de la citoyenneté sont apparues. Désormais, cette dernière n'est plus figée dans le temps ni l'espace, mais définie par la diversité des statuts des citoyens et des besoins distincts de ces derniers. Malheureusement, cette diversité ne facilite en aucun cas l'engagement politique des femmes. Par ailleurs, l'auteure soutient l'idée que les femmes ont fait d'énormes efforts pour rendre les pratiques politiques plus accessibles, plus égalitaristes. Ces dernières sont devenues beaucoup moins hiérarchiques et attirent de plus en plus de gens. Toutefois, le travail à effectuer est colossal puisque les femmes ne sont toujours pas pourvues d'une citoyenneté à part entière. Elles font face à des contrariétés phénoménales quand vient le temps de s'engager dans la vie publique. Cet ouvrage explique clairement que les différents problèmes que rencontrent les femmes sont d'ordre politique. Toutefois, l'auteure ne montre pas les obstacles de la participation de la femme dans le domaine 43 B. Marques-Pereira, La citoyenneté politique des femmes, Paris, Armand Colin, 2003. 44 U. Jost Hans, M. Pavillon et F. Valloton (sous la dir.), La politique des droits. Citoyenneté et construction des genres au 19 et au 20 siècle, Paris, Éditions KIMÉ, 1994. 14 politique au Tchad. Dans l'actuel mémoire, le souci est aussi de montrer que, l'État tchadien accorde une certaine importance à la question de la femme et la politique au Tchad. Dans l'ouvrage, Les femmes et la politique,45 les auteurs mettent l'emphase sur la difficulté qu'ont les femmes à s'investir dans la vie publique malgré leur citoyenneté théorique. Ils évoquent trois raisons majeures pour lesquelles les femmes s'engagent peu en politique. Il s'agirait d'une question de pouvoir, de possibilité et d'opportunité. Donc, en mots clairs, les femmes n'auraient ni la possibilité, ni la volonté et même pas l'opportunité de s'engager. De plus, les auteurs pointent la famille du doigt puisque ce serait au sein de cette dernière que l'organisation des rapports de sexe consacrerait la domination masculine. Il y a aussi la question de la représentation de la féminité qui est ardemment discutée dans le texte. Ainsi, il est dit que les représentations de la féminité seraient construites et fonctionneraient sur et selon des règles purement masculines. De ce fait, le pouvoir serait vu comme tabou. Donc, prohibé aux femmes. Ce qui explique, selon les auteurs, que ce dernier soit antinomique aux représentations de la féminité. L'argument de force de ce livre demeure l'idée de nature. Ainsi, cette dernière serait à la base de la conception qu'ont les gens des sexes. Les auteurs affirment que c'est derrière l'idée de nature que se cache le statut et le rôle des sexes. Cela a pour effet de s'insinuer dans un discours oppressant qui renforce et maintient la domination des hommes sur les femmes. Cette domination masculine serait le vecteur de l'exclusion des femmes du domaine de la politique. Selon Catherine Achin, les femmes se seraient trouvées des moyens d'engagement alternatifs pour contrer la discrimination dont elles sont les sujets de choix. L'ouvrage de ces auteurs est intéressant pour la rédaction de ce mémoire car, il met en lumière le caractère durable de la représentativité de la femme au sein de la politique. Mais ces auteurs ne montrent pas le rôle qu'occupe la femme dans la politique au Tchad. C'est pourquoi il revient de montrer dans ce travail de recherche, le rôle de la femme dans la scène politique au Tchad. Dans le livre Femmes en politique46, l'auteure avance que les femmes sont dominées en politique en grande partie à cause des facteurs structurels liés au fonctionnement du champ politique, renforcés par les représentations sociales de la division de travail entre les sexes. De ce fait, malgré les grands efforts déployés, les capitaux politiques ne changent pas. Ainsi, l'être politique est et «demeure l'homme blanc quelque peu âgé, issue de la classe supérieure possédant un fort capital culturel et soutenu par un parti politique. Quant à la femme, elle est 45 S. Piochon et D. Grégory, Les femmes et la politique, Grenoble, Presses Universitaires de Grenoble, 2004. 46 C. Achin et S. Lévesque, Femmes en politique, Collection Repères, Paris, La découverte, 2006. 15 et reste campée dans l'éternel rôle féminin qu'elle endosse elle-même ou qu'on l'impose». Donc, qu'importe ce qu'elles font, les femmes ne peuvent s'en sortir autrement. Leur exclusion est savamment orchestrée. Cette orchestration prend une forme particulière pour Carolle Simard. Mais l'auteure ne montre pas les obstacles à la participation de la femme dans la politique au Tchad. Dans ce travail, il est donc important de montrer les obstacles liés à la participation de la femme dans l'arène politique au Tchad, afin de combler ce vide dans l'historiographie relative à la femme tchadienne. Dans un article publié dans «Changement et insertion des femmes dans le système politique»47, Simard Carolle aborde la question de la participation politique des femmes d'une façon particulière. Dans son texte, elle mentionne que les femmes participent réellement à la vie politique. Cependant, elles peuvent être exclues ou incluses selon les secteurs d'activités politiques. Donc, les femmes ne seraient pas exclues du système représentatif, mais bien dans le processus de décision finale. Dès lors, leur intégration politique reste partielle, voire incomplète. Simard attribue cet état de choses au fait que le pouvoir est mâle et qu'en politique la réalité ne s'exprime qu'à travers un univers essentiellement masculin. Force est de constater que «les femmes s'auto-excluent tandis que les hommes ont le sentiment, né de la conviction, que l'univers politique leur appartient, à eux seuls». Bien que cet article donne des éléments sur l'exclusion de la femme des instances décisionnels mais ne montre pas comment les femmes parviennent à faire face aux obstacles politiques pour se hisser dans les instances de prise de décisions politique. En effet, ce travail montre comment la femme parvient à faire face aux obstacles politiques pour se hisser dans les instances de prise de décisions politique au Tchad. Yolande Cohen48 rejoint cette idée d'auto-exclusion dans une autre mesure. Dans son texte, elle prétend que la littérature féministe a longtemps laissé comprendre que les femmes subissaient une oppression farouche. Selon elle, ce serait plus ou moins vrai. Les femmes devraient être tenues pour responsables de leur absence. Celles-ci se seraient elles-mêmes exclues de la vie politique puisqu'elles auraient développé des pouvoirs sécants pour s'exprimer. De ce point de vue, il résulte que la force des femmes découlerait du quotidien. Cependant, des nuances se dégagent dans les propos de l'auteure. Cohen soutient que les femmes se servent de leur quotidien pour combattre un patriarcat dévastateur. De plus, ces dernières seraient loin de normaliser les rapports sociaux entre les sexes qui découlent des 47 C. Simard, «Changement et insertion des femmes dans le système politique», Politique, no 05, 1984, pp.1-13. 48 Y. Cohen, Réflexions désordonnant les femmes du pouvoir, Grenoble, Presses Universitaires de Grenoble, 2005. 16 règles et des codes préétablis. Par le fait même, elles dénonceraient les tabous et les préjugés qui les dérobent de leurs droits. Par ailleurs, Cohen atteste que les femmes se feraient critiques face à la politique, l'ignoraient, s'esquiveraient au lieu de la confronter. Malgré cela, ces dernières finiraient toujours par se placer ailleurs de celle-ci. Pour Cohen, les femmes tenteraient même de se replier dans une sphère qui leur appartiendrait, soit la sphère privée. L'auteur ne prend cependant pas l'exemple des associations qui luttent sur la promotion féminine dans l'arène politique au Tchad. Ceci dit, il convient de montrer la contribution des associations qui luttent pour la promotion féminine au Tchad et enfin mener des stratégies pour la bonne participation de la femme tchadienne dans la politique. Michael Taoyang Warai, dans son Mémoire de Master a abordé en 2013 le sujet sur la participation politique des femmes à l'Extrême-Nord du Cameroun. Il a mis l'accent sur les obstacles socioculturels, économiques et institutionnels empêchant les femmes d'être visibles sur la scène politique camerounaise. L'auteur a montré que malgré le vent d'Est qui a soufflé en 1990 ouvrant une nouvelle ère démocratique et impliquée toutes les composantes de la société dans la gestion des choses publiques et politiques, les femmes restent sous-représentées dans les instances de prise de décisions de l'État camerounais49.Ces analyses et sont évidemment d'une grande congruité, mais l'auteur n'a pas évoqué tout au long de sa démarche, les stratégies pour une forte implication de la femme dans les instances de prise de décisions de l'État Tchadien. Eugène-Le Yota Ngartebaye, dans son Mémoire de Maîtrise s'est penché sur l'aspect participatif de la femme dans la vie politique au Tchad. Il a démontré dans son travail les inégalités que la femme a subies sous les différents régimes qui se sont succédé au Tchad. Néanmoins, la femme a connu un réveil spectaculaire avec l'avènement de la démocratie en Afrique et particulièrement au Tchad. Aussi, l'auteur a-t-il démontré les stratégies qu'a utilisées la femme tchadienne pour pouvoir contourner les obstacles socioculturels et politique afin de se hisser dans les institutions gouvernementales et parlementaires50. Toutefois, l'on trouve navré le fait que l'auteur n'a pas évoqué la politique du quota comme une stratégie d'implication de la femme dans la scène politique. Dans un rapport d'Évaluation du Genre, Élisabeth Powley s'est penchée sur le rôle que jouent les femmes dans le renforcement de la démocratie au Tchad. Le rapport d'évaluation 49 M. Taoyang Warai, «La participation politique des femmes au Cameroun : le cas de l'Extrême-Nord», Mémoire de Master en Science Politique, Université de N'Gaoundéré, 2013. 50 E. Ngartebeye Le-Yota, «La participation de la femme à la vie politique au Tchad», Mémoire de Maîtrise en Sciences Juridiques et Politiques, Université Catholique d'Afrique Centrale, Yaoundé, 2003. 17 du Genre met en exergue la question du genre et d'égalité au Tchad. Dans ce rapport, il a été aussi souligné le retard du Tchad en matière d'égalité entre les hommes et les femmes. Pour ce faire, le Tchad est l'un des pays subsahariens où le taux des femmes au parlement est plus faible51. Au vu de tout ce qui précède, il faut préciser qu'aucun historien du Tchad, s'est penché sur l'étude ayant trait à la présente thématique portant sur «femme et politique au Tchad : cas du parlement et du gouvernement (1962-2018)». A cet effet, le présent mémoire se veut original et compte analyser de manière objective la politique de l'Etat tchadien dans le processus de l'implication de la femme dans la politique au sein du parlement qu'au gouvernement. Après avoir élaboré une revue critique de la littérature à partir de différentes lectures, il apparait donc crucial qu'une problématique de recherche soit formulée. 6- PROBLEMATIQUE La problématique est une étape importante qui est construite autour d'une question centrale, permettant une meilleure approche et un traitement fécond du sujet choisi. Elle constitue donc la lampe du travail de recherche et son absence dans un travail scientifique pourrait être vide de sens. La question de la femme et la politique au Tchad n'est pas un thème nouveau dans le domaine de la recherche. En effet, depuis l'indépendance, le Tchad est resté, en proie à la guerre civile opposant les pouvoirs centraux successifs à des groupes armés qui cherchent à se renverser. Ceux-ci, le plus souvent, parviennent à leurs fins avant d'être eux-mêmes chassés du pouvoir. C'est donc un cycle infernal de prise violente de pouvoir que le pays a connu depuis à peu près trois décennies. Cette situation de guerre a «militarisé la vie politique» pour ainsi dire, a vu l'absence de la femme tchadienne de l'activité politique. Cependant, les femmes font face à de nombreuses barrières qui leur empêchent de participer pleinement à la vie politique. Celles-ci sont également des barrières empêchant la participation des femmes tchadiennes à la vie politique. Dans ce contexte, l'on pose la question ci-après : la femme tchadienne est-elle valablement représentée au parlement aussi bien qu'au gouvernement de son pays depuis l'indépendance ? De cette question principale, découlent quatre autres questions secondaires qui méritent quant à elles une réponse. Il s'agit de : 51 E. Powley, (Dir.), «les élections au Tchad : le rôle des femmes dans le renforcement de la démocratie», rapport d'évaluation du genre financé par Agence Américaine pour le Développement International (USAID), Global Civil Society Stregthening (GCSS), counterpart international, janvier, 2010. 18 - Quelle est la situation de la femme tchadienne au parlement et au gouvernement à l'ère du monopartisme ? - Quelle place occupe-t-elle au parlement et au gouvernement dans les instances de prise de décision à l'ère démocratique de son pays ? - Quelles sont les politiques liées aux femmes et leur niveau de mise en oeuvre au Tchad ? - Que faire pour une forte implication de la femme tchadienne dans les instances de prise de décision au parlement et au gouvernement de son pays ? Ainsi la problématique posée, il est important de voir quelles sont les théories qui en découlent. 7- ETUDE THEORIQUE En Histoire, toute activité relevant de l'homme mérite d'être connue et comprise grâce aux théories considérées comme outils scientifiques, que le chercheur doit utiliser pour rendre intelligible son objet d'étude. Les théories jouent un rôle de premier plan dans une recherche scientifique car, elles permettent de donner un sens propre à notre objet d'étude. Ainsi, étymologiquement, le terme théorie vient du mot grec théoricien, qui signifie : contempler, observer ou examiner. Une théorie est donc un ensemble d'explications, de notions ou d'idées sur un sujet précis, pouvant inclure des lois et des hypothèses, induites par accumulation de faits trouvés par l'observation ou l'expérience52. Cependant, la théorie scientifique est donc un ensemble d'éclaircissements de concepts ou des vues sur une thématique précise. Elle se présente ainsi donc, comme un assemblage d'hypothèses qui se construit à partir des recherches des prédécesseurs dans la science et des faits d'une expérience personnelle ou d'une observation critique propre53. Selon Gilles Willet, les théories scientifiques ne sont que des explications provisoires susceptibles d'être remises en cause par la découverte de nouveaux faits. Il synthétise enfin que, la théorie crée une réalité qui permet de concevoir, de percevoir, de comprendre et d'expliquer un aspect du réel de manière logique et formelle54. 52 G. Lecointre, Les sciences face aux créationnismes. Ré-expliciter le contrat méthodologique des chercheurs, Paris, éditions Quae, 2012. p.82. 53 E. Mbonji et P.F Ebongue, Propédeutique à l'anthropologie sociale et culturelle, Paris, l'Harmattan, 2007, p.126. 54 W. Gilles, «Paradigme, théorie, modèle, schéma : qu'est-ce donc ?» Communication et organisation, n°5, 1994, p.21. 19 La première théorie convoquée pour étayer cette étude est la théorie dite du néo-institutionnalisme sociologique et la seconde théorie que cette étude préconise invitée est le constructivisme structuraliste. Le néo-institutionnalisme sociologique Issue du courant néo-institutionnaliste, le néo-institutionnalisme sociologique est en vogue depuis les années 1980 dans les sciences sociales, notamment en science politique, sociologique mais également en science économique. Le néo-institutionnalisme sociologique appréhende les institutions comme variable indépendante, c'est-à-dire la variable explicative puisqu'elles façonnent les acteurs et font naitre leurs intérêts et leurs préférences «les institutions ne se contente pas de contraindre les choix possibles ; elles établissent le critère fondamental au travers duquel les acteurs découvrent leurs préférences55». Hall et Taylor de dire que «les institutions sont des règles, procédure ou normes formelle, mais aussi les systèmes de symboles, les schémas cognitifs et les modèles moraux qui fournissent les cadres de signification guidant l'action humaine56». En effet, les institutions structurent le comportement des acteurs par deux canaux : elles leur fournissent d'abord des schémas formels qui se répètent jusqu'à se transformer en pratique routinière intériorisées comme telles ; elles offrent ensuite des systèmes de sens et d'interprétation partagés, des catégories et de cadres normatifs et cognitifs, des paramètres guidant l'action, qui leur permettent d'interpréter les phénomènes sociaux et de choisir non seulement le comportement qui satisfait mieux leur intérêts. Il développe aussi l'idée selon laquelle les institutions incarnent et reflètent des symboles et des pratiques culturelles tenaces qui façonnent les perceptions des acteurs et «informent» la reproduction institutionnelle57. Il met l'accent sur le caractère institutionnel, l'influence de l'environnement institutionnel sur les hommes et les structures organisationnelles. Selon cette perspective, les institutions par les codes culturels cognitifs qu'elles génèrent, reproduisent, situent les frontières du politique et inculquent aux acteurs des idées précises à propos de la légitimité de leur action. Cette variante institutionnaliste à l'instar des autres variantes (historique et choix rationnel), accorde aux institutions une influence déterminante dans les constitutions de préférences et des idées. Dans le cadre de la présente recherche, cette théorie dite néo-institutionnalisme sociologique est convoquée pour permettre de comprendre par quelle alchimie la sous- 55 Hall et al, «la Science Politique et les trois néo-institutionnalismes», Revue française de Science Politique, vol. 47, no 3-4, 1997, p. 469. 56. Ibid, p.470. 57 Ibid. 20 représentation des femmes au sein du parlement et du gouvernement tchadien comme la résultante des valeurs que défendent les structures traditionnelles fortement ancrées dans les institutions dites modernes. En effet, ces schémas de pensée déclassent la femme en lui accordant des attributs contraires à son émancipation voire à sa participation à la chose politique. De l'institution familiale aux cadres de promotion politique tels que les partis politiques et Associations, tout est minutieusement organisé en défaveur de la gent féminine. Le constructivisme structuraliste Fondé par Pierre Bourdieu, le constructivisme structuraliste est un courant de pensée qui se définit selon l'auteur à la jonction de l'objectif et du subjectif : «Par structuralisme ou structuraliste, je veux dire qu'il existe dans le monde social lui-même (...) des structures objectives indépendantes de la conscience et de la volonté des agents, qui sont capables d'orienter ou de contraindre leurs pratiques ou leurs représentations. Par constructivisme, je veux dire qu'il y a une genèse sociale d'une part des schèmes de perception, de pensée et d'action qui sont constitutifs de ce que j'appelle habitus58 et d'autre part des structures sociales, et en particulier de ce que j'appelle des champs». Le structuralisme affirme ici la soumission de l'individu à des règles structurelles et le constructivisme quant à lui fait du monde social le produit de l'action libre des acteurs sociaux et amène à croire que tout est construit par les individus dans la société et qu'il n'y a pas de données naturelles. A travers ces explications, Bourdieu veut ainsi souligner que le monde social est constitué des structures qui sont seules construites par les acteurs sociaux selon la position constructiviste mais, qui, une fois constituées conditionnent à leur tour l'action de ces agents selon la position structuraliste. Dans le cadre de ce travail de recherche, l'on a fait appel à cette théorie pour expliquer les controverses qui existent entre les `féministes» d'une part, et les `antiféministes» d'autre part de la représentation de la femme dans les instances du parlement et du gouvernement tchadien. Une politique entretenue par les acteurs politiques, qui visent à écarter les femmes de la sphère politique. D'aucuns pensent que la place de la femme est dans la cuisine, c'est-à-dire pour les antiféministes, la femme n'est pas à mesure intellectuellement ou physiquement à assurer les fonctions politiques. D'autres par contre, pense que la femme peut aussi faire de la politique au même titre que l'homme. Tout cela consiste à maintenir la femme dans le statu quo. C'est un construit car tout phénomène social est un construit, rien n'est naturel. Le 58 Ensemble des dispositions, des schèmes d'action ou de perception que l'individu acquiert à travers son expérience sociale par socialisation. Cette étude se veut un éveilleur des consciences citoyennes en général et les femmes tchadiennes en particulier sur leur faible représentation dans les sphères de prise de décision 21 constructivisme structuraliste permet de lever le verrou et est au carrefour de l'interactionnisme. Consécutivement au cadre théorique, il est indispensable d'évoquer les intérêts qui en découlent de cette étude. 8- INTERET DU SUJET Tout travail de recherche vise à solutionner un problème et à apporter éventuellement sa contribution à la science. En effet, constatant la sous représentativité des femmes tchadiennes en politique à des prises de décisions, notamment au parlement et au gouvernement, il est important de se soucier de l'intérêt que pourrait apporter une étude sur la femme et la politique au Tchad. Il s'agit de l'intérêt scientifique, politique, social, théorique et personnel. Intérêt scientifique Sur le plan scientifique, la présente recherche s'inscrit dans la réflexion sur la problématique de la femme et la politique au parlement et au gouvernement du Tchad. Cette question n'a pas fait l'objet d'une attention scientifique particulière. Les travaux effectués par nos devanciers ne s'y attardent pas suffisamment. L'analyse met en exergue la faible représentation de la couche féminine dans les instances politiques. L'étude apporte un éclairage dans l'historiographie politique et sociale du Tchad à travers les dynamiques féminines dans un pan de l'appareil sociopolitique du pays à savoir le parlement et le gouvernement. En d'autres termes, une contribution à la connaissance de la prise en compte de la femme dans les institutions sociopolitiques du Tchad. Intérêt politique La représentation des femmes au parlement et au gouvernement peut légitimer le pouvoir du politique en impliquant les femmes dans la chose politique, et peut contribuer à la stabilité politique voire sociale du pays. Cette étude peut aider à changer la donne et enfin la contribution dans la problématique du «women empowerment» étant d'actualité. Aussi, cette étude permettra d'attirer l'attention des gouvernants pour que l'État tchadien s'arrime aux bonnes pratiques des autres États. Intérêt social 22 spécifiquement au parlement et au gouvernement. Ceci pourra aider les femmes à mieux s'organiser, définir leurs objectifs et élaborer des stratégies pouvant changer la donne. Intérêt personnel Cette étude permettra d'entrer en contact avec des personnes ressources, ayant de l'expérience et de l'expertise en la matière, afin de recueillir au tant que possible leurs avis sur la femme et la politique au Tchad, notamment au parlement et au gouvernement, et au besoin, consigner les résultats des analyses et les interprétations des données rassemblées dans un document pouvant servir les générations actuelles et futures. Dans le souci de mener à bien cette analyse, l'on a opté pour les objectifs. 9- OBJECTIFS Les objectifs de recherche sont le point de départ d'une recherche. Ils indiquent l'intention de l'étude, les objectifs, l'idée principale. Cette idée principale est issue d'un besoin (le problème de recherche) et affinée dans des questions spécifiques (les questions secondaires). D'où le besoin de formuler clairement les questions de recherche pour pouvoir faire ressortir l'idée centrale de ces objectifs de recherche59. Dans le cas de cette étude, l'on a les objectifs suivants : objectif général et spécifiques. Objectif général Concernant l'objectif général, il vise à faire une évaluation objective de la représentativité de la femme politique au sein du parlement qu'au gouvernement du Tchad. Objectifs spécifiques Pour ce qui est des objectifs spécifiques, ils visent à : - Montrer la situation de la femme tchadienne au parlement et au gouvernement à l'ère du monopartisme ; - Démontrer l'émergence de l'émancipation politique de la femme tchadienne depuis l'instauration de la démocratie en 1990 ; - Identifier les politiques liées aux femmes et leur niveau de mise en oeuvre au Tchad. - Et en fin, examiner la politique du quota à la parité comme stratégie d'une forte implication de la femme tchadienne dans la vie politique. 59 https://edutechwiki.unige.ch/fr/Objectifs_et_questions_de_recherche, consulté le 23 juillet 2022 à 15h 04. 23 A l'issue des objectifs de l'étude, il est important de fixer une approche méthodologique car, cela permet de mener de manière plus efficace et efficiente ce travail de recherche. 10- CADRE METHODOLOGIQUE Tout travail scientifique nécessite l'usage des sources diverses et complémentaires, qui se résument dans les bibliothèques publiques, privées et internet. Après la collecte, vient le classement des informations, suivi de l'analyse et de l'interprétation sous forme de fiche de lecture60. Ces données collectées de sources diverses permettront de mieux en servir dans la rédaction proprement dite de la thèse ou du mémoire. Cette démarche renvoie à un ensemble de méthodes appliquées à un domaine de la science. Ainsi, la méthode sous cet angle est considérée comme la marche rationnelle de l'esprit. C'est dans cette logique que Michel Beaud61 s'inscrit lorsqu'il dit : Chaque domaine de la recherche possède des théories instituées et des méthodes éprouvées. Il incombe à l'étudiant chercheur de les connaitre et d'en apprécier les fondements et les postulats avant d'engager sa propre recherche (...) il faut s'enquérir et s'imprégner des méthodes existantes. Il importe de montrer la méthode de collecte des données et d'approches d'analyse. Dans le cadre de cette étude, quatre principales catégories de sources ont été mises à savoir la source écrite, la source orale, la source iconographique, et la source numérique. Pour ce qui est des sources écrites, elles sont de deux ordres : les sources primaires d'une part, qui sont constituées d'archives, des rapports de formation organisée. Ces archives ont été consultées aux Archives du Ministère du Genre et de la Solidarité Nationale, au Conseil National de Transition. Certaines archives ont été consultées aux Archives du Secrétariat Général du Gouvernement. Ces archives ont été d'une importance capitale dans la compréhension du fonctionnement de la femme tchadienne dans la politique. Et d'autre part des sources secondaires qui à leur tour sont constituées des ouvrages, des articles, des Thèses et des Mémoires, ainsi que les rapports de stage. L'essentiel de cette documentation a été trouvé dans les bibliothèques au campus de l'université de Yaoundé I, notamment de la bibliothèque du Cercle d'Histoire-Géographie-Archéologie (CHGA), et du cercle Philosophie- Psychologie- Sociologie-Anthropologie (CPPSA), et la bibliothèque de la Faculté des Arts, Lettres et Sciences Humaines (FALSH), dans la bibliothèque de l'Université 60 Y. Kouotou, «La société d'exploitation forestière du Noun (SRFN) et le développement de l'arrondissement de Massagam 1972- 2004», Mémoire de Maitrise en Histoire, Université de Yaoundé I, 2004, p.6. 61 Beaud, L'art de la thèse, p.48. Aucune recherche scientifique n'est faite sans contraintes majeures, pour ce faire, quelques difficultés rencontrées sont décrites postérieurement. 24 de N'Djamena, principalement dans la bibliothèque de la faculté des sciences politiques et Juridiques (FSPJ). L'on est aussi rendu dans la bibliothèque nationale du Tchad ainsi qu'à la bibliothèque de l'institut français du Tchad (IFT). La recherche de la documentation a aussi conduit au Centre d'Étude et de Formation pour le Développement (CEFOD), sans oublier le Centre Al-Mouna. Tous ces centres documentaires ont permis d'avoir non seulement accès aux travaux déjà menés sur la question de la femme et la politique, mais aussi de renforcer les éléments de méthodologie et de compléter et confronter les informations collectées sur le terrain nécessaire pour la production de ce travail. En ce qui concerne la source orale, le présent travail est le fruit des informations et des orientations à travers une catégorie de personnes bien connues. Au regard de l'échantillon choisi, une bonne partie des informations a été obtenue lors des entretiens publics et privés sur le terrain. L'on a effectué les enquêtes avec le personnel administratif. Les informateurs ont été choisis en fonction de leur ancienneté au sein de la politique. Ces entretiens ont été privés et la plupart des cas groupés. Le but visé était d'obtenir plus d'informations sur les activités menées par les femmes. Après avoir passé au crible rationnel, la divergence des sources orales collectées, elles ont permis d'atteindre les résultats escomptés sur la nature des difficultés auxquels sont confrontées les femmes. Ces multiples informations collectées ont permis d'enrichir celles lues dans les documents. La quasi-totalité des sources iconographiques est constituée des photos des femmes. La plupart de ces photos ont été collecté sur les archives lors des différentes descentes sur le terrain. Ces images ont permis d'exposer certaines réalités que les textes n'ont pas suffisamment démontrées. La source numérique quant à elle est le fruit de l'utilisation de l'outil internet. Cet outil des techniques de l'information et de la communication a permis d'accéder au site web de certaines institutions notamment le Conseil National de Transition et le Ministère du Genre et de la Solidarité Nationale, afin d'exploiter les différentes informations. La source numérique a été d'une importance capitale dans la mesure où elle a permis d'accéder à moult informations qui étaient introuvables dans d'autres sources. Dans ce travail, l'on a utilisé les méthodes diachroniques. La méthode diachronique parce que le thème se situe dans le temps et dans l'espace. 25
On entend par plan de travail, l'ossature dont ce mémoire est structuré. Ainsi le premier chapitre est intitulé «la femme tchadienne au parlement et au gouvernement à l'ère du monopartisme (1962-1990)». Ce chapitre présente la situation de la femme tchadienne dans la scène politique et les parcours de quelques figures féminines marquantes de l'histoire politique du Tchad. Le deuxième chapitre est intitulé : «l'émergence de l'émancipation politique de la femme tchadienne depuis l'instauration de la démocratie en 1990». L'on démontre l'évolution de la femme tchadienne au parlement et gouvernement à l'avènement de la démocratie au Tchad. Le troisième chapitre quant à lui s'attèle sur «les politiques liées aux femmes et leur niveau de mise en oeuvre au Tchad». Il est question dans ce chapitre de présenter la question spécifique du niveau de réalisation des politiques que l'État tchadien met en oeuvre dans le cadre du règlement des multiples problèmes dont les femmes sont les victimes. L'on va mettre 26 en exergue la dignité des femmes, à savoir la politique du genre, le Code des personnes et de la famille ainsi que la question des violences basées sur le genre. Le quatrième chapitre porte sur «le quota et la parité : deux stratégies de résolution de la sous représentativité de la femme tchadienne en politique». Dans ce chapitre, la politique du quota et de la parité semble être deux issues pour l'augmentation du nombre des femmes tchadiennes à des postes de responsabilités politiques. 27 GOUVERNEMENT A L'ERE DU MONOPARTISME (1962-1990) LA FEMME TCHADIENNE AU PARLEMENT ET AU CHAPITRE I : 28 Les années qui ont suivi l'accession des États africains à l'indépendance, ont marqué un profond basculement des régimes politiques africains. En effet, les pays africains ont abandonné le multipartisme dès les indépendances pour le parti unique1. Le monopartisme correspond à la situation d'un État, où un seul parti exerce le pouvoir effectif sans qu'il y ait de possibilité d'alternance politique.2 Le Tchad ne manqua pas à cette politique. C'est à partir de 1962, lorsque François Tombalbaye, le tout premier Président du Tchad indépendant, abolît le multipartisme et érigea son parti le PPT-RDA (Parti Progressiste Tchadien - section locale du Rassemblement Démocratique Africain) comme parti d'État, que le Tchad commença à sombrer dans un système monopartite3. La même année, la nouvelle constitution fut promulguée, introduisant une nouvelle législature et a vu la participation de la première femme aux élections législatives. L'année 1990 annonce la fin du monopartisme, du régime politico-militaire, du régime dictatorial, ainsi que de l'instabilité politique au Tchad. Ce premier chapitre est consacré à la femme tchadienne au parlement et au gouvernement à l'ère du monopartisme (1962-1990). Il présente les différents régimes politiques à l'ère du monopartisme et leur hostilité vis-à-vis de la femme (1962-1990) et analyse également les parcours de quelques figures féminines marquantes de l'histoire politique du Tchad. I- LES DIFFERENTS REGIMES POLITIQUES A L'ERE DU MONOPARTISME ET LEUR HOSTILITE VIS-À-VIS DE LA FEMME (1962-1990) Pour mieux comprendre la situation de la femme tchadienne sous les régimes politiques à l'ère du monopartisme et leur hostilité vis-à-vis de la femme, il est préférable de commencer d'abord par les années de l'indépendance à partir du régime présidentialiste de Ngarta Tombalbaye, en passant par le régime militaire de Félix Malloum Ngakoutou Bey-Ndi et les Gouvernements de Transition jusqu'au régime dictatorial de Hissein Habré. 1- Le régime présidentialiste de Ngarta Tombalbaye (1960-1975) La première République ou le régime présidentialiste de Ngarta Tombalbaye (19601975) ; connut ses premières années de paix avant de sombrer dans les troubles dûs aux rébellions. Dans le contexte de l'indépendance, la scène politique tchadienne resta marquée par un foisonnement de partis politiques. L'on décompte le Parti Progressiste Tchadien (PPT), 1 Les partis qui ont existés avant et après les indépendances avant le monopartisme (Parti Progressiste Tchadien (PPT-RDA), Union Démocratique Tchadienne (UDT), Mouvement Socialiste Africain (MSA), Union Nationale Tchadienne (UNT), Parti National Africain (PNA), Action Socialiste Tchadienne (AST), Gouvernement des Indépendants Ruraux du Tchad (GIRT). 2 Toupictionnaire, Dictionnaire de politique, monopartisme, https://www.toupie.org/Dictionnaire/Monopartisme.htm, consulté le 20 juillet 2022 à 19h30. 3 Ramadji, «L'opposition partisane», p.50. 29 l'Union Démocratique Tchadienne (UDT), le Mouvement Socialiste Africain (MSA), l'Union Nationale Tchadienne (UNT), le Parti National Africain (PNA), l'Action Socialiste Tchadienne (AST), le Gouvernement des Indépendants Ruraux du Tchad (GIRT), etc.4 Cette situation ne dura pas longtemps car, un an après l'indépendance, un congrès fut convoqué par le Président Ngarta Tombalbaye à Abéché sur le thème «unité nationale», lequel congrès s'était soldé par un ralliement des principaux partis d'opposition à celui du Président5. Ngarta Tombalbaye affirma alors sa volonté de créer un parti unique, où il pourrait «régner en maître». Il prononça la dissolution de tous les autres partis politiques ainsi que l'Assemblée Nationale le 19 janvier 19626. Aussitôt, la nouvelle constitution promulguée, la législature de 1962 a vu la participation de la première femme aux élections législatives. Il s'agissait de Bourkou Louise Kabo, l'unique femme députée élue au suffrage universel à siéger à l'Assemblée Nationale sous la bannière du Parti Progressiste Tchadien7.Vinrent ensuite, pour la deuxième législature de 1963-1968, les députés Kaltouma Guémbang et Hawa Brahim8. Cette présence est demeurée longtemps symbolique et discontinue au parlement. Il se referma le 30 mars 1963, compte tenu de l'enlisement politique au Tchad. Un climat de méfiance s'installa dans les rangs de l'opposition dont les leaders traqués, n'avaient pour seule issue que la lutte clandestine9. En septembre 1963, une sanglante répression suivie de l'arrestation des principaux dirigeants, se déroula à Fort-Lamy. Ces événements, déclenchèrent un mouvement de mécontentement populaire dans le Nord. Ce mouvement débouchera sur une rébellion. C'est dans ce climat qu'en 1963, éclata à Mangalmé (Est du Tchad), une révolte des paysans contre les agents de l'administration pour abus de prélèvements d'impôts. Ce qui donna naissance au Front de Libération National du Tchad (Frolinat), créé lors de la Conférence de Nyalla (au Soudan) sous la direction d'Ibrahim Abatcha en Juin 196610. Le Frolinat était né de la réunion de l'Union Nationale Tchadienne (UNT) dirigée par Ibrahim Abatcha et du Front National de Libération du Tchad (FNLT) animé par Ahmed 4 M. Abdelkerim, Les régimes politiques du Tchad 1960-1990 : esquisse d'une analyse juridico-politique, Saint-Denis, Edilivre, 2015, p.27. 5 Ibid, p.30. 6 M. Mahamat Mey, «Les gouvernements du Tchad : Hommes et enjeux 1959-2008», Mémoire de Master en Histoire, Université de Maroua, 2009, p.80. 7 Ibid, p.81. 8 C. Mbaigolmem, «Femme et politique», Carrefour, no 66, 21 mai 2011, p.9. 9 Ramadji, «L'opposition partisane», p.80. 10 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes», p.21. 30 Hassan Moussa11. Le Frolinat avait donc dès sa naissance du plomb dans l'aile. Il utilisera comme moyen d'action la religion et la tribu12. Cette organisation politico-militaire encadra désormais la révolte sur le terrain et s'en fait le porte-parole à l'étranger. Mais, il connut très tôt des divisions dans ses rangs, «le Frolinat est un mouvement profondément divisé, division qui, au fond, date du début même de la rébellion''13, cette division commença en 1970, lorsque Baghalmi, alors Vice-président du Frolinat, créa l'Armée du Volcan, puis le Conseil Démocratique Révolutionnaire (CDR) d'Acyl Ahmed14. A la troisième législature de 1971, Bourkou Louise Kabo est la seule femme à être réélue à l'Assemblée Nationale. A partir de 1973, l'insécurité grandit à l'Est et au Nord, les arrestations reprirent. Devant cette situation, le Président Ngarta Tombalbaye décida de dissoudre, en août 1973, le parti unique, le PPT - RDA, pour le remplacer par le Mouvement National pour la Révolution Culturelle et Sociale (MNRCS), dont le but était de promouvoir une révolution culturelle authentique «en réactualisant des cultures traditionnelles tchadiennes, notamment à travers la pratique du yondo''15. Le yondo16 avait été institué pour créer un climat de confiance entre les ressortissants du Sud face à la menace de ceux du Nord ; car tous les initiés devaient faire allégeance à Ngarta Tombalbaye. Le régime se dégrada progressivement, plusieurs officiers accusés de complots, notamment, le commandant de la Gendarmerie Nationale, colonel Djimet Mamari NGakinar et le Commandant Alphonse Kotiga Guérinase17. Le président fait arrêter aussi son directeur de cabinet militaire, le général Negué Djogo. Face à cette tension politique, l'armée se vit dans l'obligation de prendre ses «responsabilités'', et fomenta le coup d'État du 13 avril 1975, mettant de ce fait fin à la vie du premier dirigeant politique tchadien, Ngarta Tombalmbaye. 11 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes'', p.22. 12 A. Dadi, Tchad, L'État retrouvé, Paris, L'Harmattan, 1987, p. 44. 13 Buijtenhuijs, Le Frolinat et les guerres civiles, p. 27. 14 Abdelkerim, Les régimes politiques du Tchad, p.55. 15 Ces changements concernaient aussi bien le nom des villes que celui des individus : Fort-Archambault devient Sarh ; Fort-Lamy devient N'Djamena et pour donner le ton François Tombalbaye devient Ngarta Tombalbaye. 16 Le Yondo ou retour aux sources est une pratique courante de l'éducation des adolescents chez les peuples non christianisés qui sert à la transmission de génération en génération : `l'esprit de la tribu, et des aïeux et le capital de connaissance acquises. Le yondo doit préparer l'adolescent aux réalités du monde adulte. A cet effet, le caractère de l'initié est minutieusement étudié en vue d'un remodelage selon les normes définies. On apprend aux jeunes le respect des ainés, la maîtrise des impulsions, à savoir se taire, à ne pas intervenir dans les discussions entre les plus âgés''. Il est pratiqué dans le Sud du Tchad. 17 J. Tesseyre, «Éphéméride : 13 avril 1975, le Tchad connait son premier coup d'État'', Tchad infos, no 07, 13 avril 2021, p.1. 31 Une nouvelle ère naissait pour le Tchad. A cette période de répression, la femme tchadienne fut absente de la vie politique, mais présente aux activités économiques du pays. Sa situation ne fut guère reluisante durant le règne militaire du Général Félix Malloum Ngakoutou Bey-Ndi et les Gouvernements de Transition (1975-1981). 2- Le régime militaire du Général Félix Malloum Ngakoutou Bey-Ndi et les Gouvernements de Transition (1975-1981) Au lendemain du coup d'État militaire du 13 avril 1975, le régime militaire faisait office de gouvernement et était composé de neuf (09) membres notamment le général de brigade Félix Malloum Ngakoutou Bey-Ndi (président), le colonel Mamari Djimet Ngakinar (vice-président), le général de brigade Noel Odingar Milarew (membre), le chef d'escadron Wadal Abdelkadre Kamougué (membre), le capitaine Roasngar Mbaindoloumal (membre), le capitaine Zakaria Wawa Dahab (membre), le lieutenant Mahmoud Abderamane Haggar (membre) et le lieutenant Gouara Lassou (membre)18. Aucune femme n'en faisait partie, car la femme tchadienne n'avait pas encore intégré l'armée nationale. Plusieurs des officiers de ce conseil venaient de sortir des geôles de Ngarta Tombalbaye, à la faveur du Coup d'État. Le régime était confronté à plusieurs problèmes. D'abord à la rébellion qui sévissait dans le Nord du Tchad, ensuite il fut en proie à des dissensions internes, quand il fut question de la réconciliation nationale. Ce fut dans ce contexte de fragilité interne que le gouvernement militaire engagea des négociations avec la rébellion armée. Les premières négociations donnèrent les «accords de Khartoum». Ces accords étaient conclus avec le Conseil de Commandement des Forces Armées du Nord (CCFAN) de Hisssein Habré, le 17 septembre 197719. Par ces accords, Hissein Habré, le chef rebelle, devenait Premier Ministre et Chef du Gouvernement20. Les accords attribuaient le «pouvoir réel» de la gestion des affaires de l'État au Premier Ministre, même si le Général Félix Malloum Bey-Ndi demeurait nominalement à la tête de l'État, comme Président de la République. Ce pouvoir détenu par Hissein Habré était d'autant plus affirmé, qu'il ne doit pas de compte au «Comité de Défense et de Sécurité» composé à moitié par le Conseil de Commandement des Forces Armées du Nord (CCFAN), et par le Conseil Supérieur Militaire (CSM). Cette cohabitation Felix Malloum Bey-Ndi - Hissein Habré était devenue difficile. Dans ce contexte de «crise politique aiguë» faite de résistances populaires, paralysie au 18 E. Nadjitam, «Tchad : ce qui s'est passé après le coup d'État du 13 avril 1975», Tchad infos, no 15, 13 avril 2021, p.3. 19 Buijtenhuijs, Le Frolinat et les guerres civiles, p. 27. 20 Ibid, p. 27. 32 sommet de l'État, la guerre civile au Tchad éclata le 12 février 1979.21 Cette guerre divisa le Tchad en deux. Le Colonel Wadel Abdelkadre Kamougué se replia au Sud avec les éléments des Forces Armées Tchadiennes (FAT), tous originaires de la zone méridionale. Il créa à Moundou un organe politique dénommé le «Comité permanent». Présidé par le Colonel Wadel Abdelkadre Kamougué, ce Comité représentait les différentes préfectures de la «zone méridionale», et constituait en quelque sorte un «gouvernement du Sud». Il avait pris en charge l'administration du Sud et nommait des responsables à tous les postes. Le reste du pays était sous l'autorité du Frolinat, dont les responsables étaient Goukouni Weddeye et Hissein Habré22. Le «pouvoir central» au Tchad n'existait plus, le pays était pratiquement scindé en deux régions géopolitiques antagonistes. C'est dans ce contexte de «guerre civile» qu'intervint la Conférence de Kano I tenue en mars 1979 et qui donna naissance au Conseil d'État provisoire (CEP) présidé par Goukouni Weddeye23. Le CEP vit à peine le jour à cause des difficultés d'application des clauses de la Conférences de Kano I du 07 au 14 mars 197924. Quelques semaines plus tard, on assistait à l'ouverture d'une autre «Conférence de réconciliation» de Kano II du 03 au 11 avril 197925.Celle-ci donna le jour au gouvernement intérimaire présidé par Lol Mahamat Choua, gouvernement qui ne dura que cinq (05) mois (Avril -Septembre 1979).Après la démission de Lol Mahamat Choua le03 septembre 1979, Goukouni Weddeye fut désigné par le Gouvernement d'Union Nationale de Transition pour former un gouvernement de transition à la suite d'une conférence de réconciliation nationale tenue à Lagos (Nigeria) en Août 197926. Le GUNT, présidé par Goukouni Weddeye, avait pour Vice- Président le Colonel Wadel Abdelkadre Kamougué, Hissein Habré qui fut Ministre de la Défense, Mahamat Abba était le Ministre de l'intérieur et Acyl Ahmat était Ministre des Affaires étrangères27. Au sein du GUNT, des luttes ouvertes s'engagèrent entre les Nordistes et les Sudistes, autour de la question de la laïcité de l'État. Ce climat aboutit à un affrontement armé entre les Forces Armées du Nord (FAN) de Hissein Habré et les Forces Populaires de Goukouni Weddeye en 1979. Cet affrontement, connu sous le nom de «deuxième bataille de N'Djamena», fit 21 Derlemari, Le Labyrinthe de l'instabilité, p. 30. 22 Abdelkerim, Les régimes politiques du Tchad, p.35. 23 Ibid, p.36. 24 Buijtenhuijs, Le Frolinat et les guerres civiles, p. 30. 25 Ibid, p.33. 26 N'Gangbet, Peut-on encore sauver, p. 39. 27 Ibid, p. 41. 33 plusieurs milliers de morts28.Le Président Goukouni Weddeye et la coalition gouvernementale qui le soutenait contre Hissein Habré demanda, et l'obtint, le soutien militaire de la Jamahiriya arabe libyenne. La «deuxième bataille» de N'Djamena déboucha sur la défaite militaire des FAN de Hissein Habré, qui se réfugièrent à l'Est du pays, proche de la frontière soudanaise29. Le GUNT connut une deuxième tentative de renversement avec les accrochages qui opposèrent les FAP de Goukouni Weddeye au Conseil Démocratique Révolutionnaire (CDR) d'Acyl Ahmed, ministre des Affaires Étrangères. Ce dernier avait reçu le soutien de la Libye30. Le 29 octobre 1981, le GUNT décida du retrait des troupes Libyennes du Tchad pour les remplacer par une Force Interafricaine (FIA), composée des ressortissants nigérians, sénégalais et Zaïrois. Cette force initiée sous les auspices de Goukouni Weddeye avait pour mission de s'interposer entre les Forces Armées du Nord (FAN) de Hissein Habré et les forces gouvernementales afin d'empêcher la poursuite des hostilités entre les belligérants31. La vie politique au Tchad se militarisa, éclipsant complètement la présence féminine. Dans cette atmosphère de violence politique et de terreur, la femme, n'avait pas voix au chapitre. Elle se trouvait confinée à son rôle d'épouse et de mère, mais employée dans la fonction publique et dans le secteur privé industrielle. Après trois années passées à la tête de la gestion du pays, Goukouni Weddeye céda la place à Hissein Habré quand les Forces Armées du Nord (FAN) réussirent à pénétrer dans la capitale tchadienne. La vie politique devint un «jeu de cache-cache» entre les militaires32. Cette situation de guerre a militarisé la vie politique. Elle a entretenu l'exclusion de la femme tchadienne de toute activité politique. La situation de cette dernière allait-elle s'améliorer sous le régime dictatorial d'Hissein Habré ? 3- Le régime dictatorial de Hissein Habré (1982-1990) Le contexte de la décennie 1980 est mondialement marqué par une mouvance en faveur de l'émancipation de la femme en général. Serait-il alors fondé de relier l'option prise par Hissein Habré à ce contexte international favorable à la femme ? Le 07 Juin 1982, les Forces Armées du Nord (FAN) dirigées par Hissein Habré entraient triomphalement à N'Djamena33. 28 N'Gangbet, Peut-on encore sauver, p. 43. 29 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes», p.23. 30 Ibid, p. 24. 31 A. Dingammadji, Ngarta Tombalbaye: parcours et rôle dans la vie politique du Tchad (1959-1975), Paris, L'Harmattan, 2007, p.18. 32 Derlemari, Le Labyrinthe de l'instabilité, p. 36. 33 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes», p.25. 34 Si l'entrée d'une femme tchadienne au parlement a eu lieu juste deux ans après l'indépendance du pays, il a fallu attendre 1982, pour la voir entrer au gouvernement. Avec l'UNIR, on assista pour la première fois à la nomination d'une femme à un poste ministériel. Il s'agissait de Fatimé Kimto qui accéda au poste de Secrétaire d'État au Travail et à la promotion féminine en 198234. Dès le 21 octobre 1982, l'acte fondamental de la République rendu public et le 06 mars 1983, fut installé à N'Djamena, le premier Comité Populaire des Forces Armées du Nord (COPOFAN) défini par le nouveau Président, comme «un instrument d'encadrement, d'organisation et de sensibilisation des masses'' 35 . D'autres comités furent installés dans tout le pays. A la date du deuxième anniversaire de sa prise du pouvoir, soit le 7 juin 1984, Hissein Habré annonça la dissolution des FAN. Il projeta la création d'un parti unique, ouvert à tous les Tchadiens, parti conçu comme «un cadre rénové et dynamique'', pour tous les nationaux36. En 1984, Hissein Habré institua officiellement l'Union Nationale pour l'Indépendance et la Révolution (UNIR). Présidé par Hissein Habré, ce nouveau mouvement fut doté de plusieurs institutions à savoir le Comité Central, le Congrès, le Bureau exécutif, et des organes affiliés dont l'Union Nationale des Commerçants (UNACOT), l'Organisation des Femmes de l'UNIR (OFUNIR), Rassemblement des Jeunes de l'UNIR (Rajeunir)37. On note ici une réapparition des femmes sur la scène politique à travers une organisation qui leur était propre notamment l'organisation des Femmes de l'UNIR. Cette réapparition se fit de plus en plus ressentir à travers les groupes d'animation politique encore appelés «groupes chocs''38. Les femmes participent ainsi à la vie politique. En 1984, Fatimé Kimto devient ministre des Affaires sociales et de la promotion féminine. Cette dernière fut remplacée, en mars 1986 par Ruth Yanéko Romba au même ministère39. Cette consécration mobilisa de plus en plus les femmes car, elles trouvèrent en Hissein Habré une personne qui plaidait pour la cause féminine. Ce règne connut d'intenses activités politiques comme le référendum constitutionnel de 1989, les élections législatives de 08 juillet 1990 ou l'on peut noter l'élection à l'Assemblée Nationale de cent vingt-trois (123) sièges parmi lesquels l'on dénombrait sept (07) femmes députées, soit 5,69%40. 34 Dingammadji, Ngarta Tombalbaye, p.21. 35 Buijtenhuijs, Le Frolinat et les guerres civiles, p. 300. 36 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes'', p.26. 37 Abdelkerim, Les régimes politiques du Tchad, p.38. 38 J. Spiegel, «Tchad : l'éternel second rôle féminin», Jeune Afrique, no 23, 5 avril 2012, p.5 39 Ibid, p. 6. 40 A. Dadi, Tchad, L'État retrouvé, Paris, L'Harmattan, 1987, p. 47. 35 Quel est le mode de recrutement des femmes à l'Assemblée Nationale proposée lors des différentes législatures ? Dans la législature, celle du règne du président Hissein Habré, le nombre de femmes a été fixé par l'ordonnance N0 13/PR/9041 du 24 avril 1990, portant organisation des Élections législatives. Cette ordonnance a fixé le nombre total des députés à cent vingt-trois (123) et le nombre de femme à cinq (5). Moins de deux mois avant sa chute le 01 décembre 1990, le président Hissein Habré, avait choisi des hommes et une femme avec lesquels il a voulu travailler dans un gouvernement formé le 19 octobre 1990. Dans cette équipe gouvernementale de 39 membres, Hissein Habré, en plus de son titre de «Président de la République, chef de l'État, Président du conseil de ministre», occupe le poste de ministre de la Défense nationale, des anciens combattants et des victimes de guerre42. Au total, vingt-un (21) ministres pleins, deux (02) délégués, deux (02) secrétaires généraux et (13) treize secrétaires d'État, une seule femme est nommée au poste des Affaires sociale et de la Promotion féminine. L'on présente l'évolution du nombre de femmes élues au parlement ou nommées au gouvernement tchadien à l'ère du monopartisme de 1962 à 1990. Tableau 1: Évolution de la représentation féminine au parlement de 1962 à 1990
Source : Archives à l'Assemblée Nationale du Tchad, 13 avril 2022. Le procédé pour avoir ce pourcentage : Femme aux gouvernement x 100 Nombre de femme - Total des membres du gouvernement Ce tableau présente le nombre des femmes élues au parlement à l'ère du monopartisme de 1962 à 1990. Il convient de dire que l'évolution de la femme au parlement demeure 41 A. Dadi, Tchad, L'État retrouvé, Paris, L'Harmattan, 1987, p. 51. 42 B. Dingaodouba, «Tchad : les ministres du dernier gouvernement d'Habré», Tchad infos, no 15, 27 août 2021, p.3. 36 longtemps symbolique et discontinue compte tenu de l'enlisement politique au Tchad. Toutefois, on remarque une évolution féminine dans le pouvoir législatif, mais de manière lente. Graphique 1:Evolution du nombre de femmes élues au parlement à l'ère du monopartisme entre 1962 et 1990 Nombre d'Homme Nombre des femmes 140 120 100 40 20 60 80 0 Source : Graphique réalisé à partir du tableau ci-dessus. Ce graphique présente l'évolution de nombres de femmes élues au parlement à l'ère du monopartisme entre 1962 et 1990. Il ressort que l'évolution de la femme au parlement demeure longtemps symbolique et discontinue compte tenu de l'enlisement politique au Tchad. Ces années sont marquées par une période des violences politiques et de répressions qui vont se poursuivre et se durcir. Les libertés fondamentales ont bien eu du mal à s'exprimer. On note une faible représentation des femmes. C'est entre 1989-1990 qu'il aura une moyenne croissance de la femme au parlement. Toutefois, on remarque une évolution féminine dans le pouvoir législatif, mais de manière lente. Depuis donc le règne de Ngarta Tombalbaye en passant par Hissein Habré, le pays vit de la dictature et de conflits interethniques43. 43 Abdelkerim, Les régimes politiques, p.27. 37 Tableau 2 : Évolution du nombre de femmes nommées au gouvernement tchadien à l'ère du monopartisme de 1962 à 1990
Source : Archives du Secrétariat Général du Gouvernement du Tchad, 23 mai 2023. Ce tableau présente un récapitulatif de nombre de femmes nommées au gouvernement tchadien l'ère du monopartisme de 1962 à 1990. Il convient de noter que ces années sont marquées par une période des violences politiques et de répressions qui vont se poursuivre et se durcir. Les libertés fondamentales ont bien eu du mal à s'exprimer. On note une faible représentation des femmes au gouvernement. C'est en 1982 qu'on assiste à une nette présence de femmes au gouvernement. Graphique 2: Evolution des nombres de femmes nommées au gouvernement à l'ère du monopartisme entre 1962 et 1990
1962 1975 1982 1990 Source : Graphique réalisé à partir du tableau ci-dessus. 38 Ce graphique présente l'évolution de nombres de femmes nommées au gouvernement à l'ère du monopartisme entre 1962 et 1990. Il ressort qu'il n'y a pas une amélioration, et les femmes demeurent sous-représentées. Le nombre des femmes dans chaque gouvernement n'a jamais atteint une dizaine. L'un des facteurs qui enfreint l'accès des femmes à la fonction ministérielle est la «militarisation croissante de la fonction ministérielle''44, c'est-à-dire la monopolisation de la vie politique au Tchad depuis 1975 par les militaires. Il s'agit de l'incursion des militaires et des «anciens maquisards''45, au-devant de la scène politique. Depuis 1975, le nombre des ministres militaire et anciens maquisards n'a cessé d'augmenter au sein des gouvernements. Cette emprise de la fonction ministérielle par les militaires écarte les femmes de la gestion de la vie politique et publique dans les décennies 1980. L'on va présenter non seulement les différents régimes politiques à l'ère du monopartisme et leur hostilité vis-à-vis de la femme mais également les parcours de quelques figures féminines marquantes de l'histoire politique du Tchad. II- LES PARCOURS DE QUELQUES FIGURES FEMININES MARQUANTES DE L'HISTOIRE POLITIQUE DU TCHAD Les femmes tchadiennes étaient dans les luttes pour l'émancipation de leurs peuples, notamment au parlement qu'au gouvernement. Il convient de voir les parcours de quelques figures féminines marquantes de l'histoire politique du Tchad. L'on s'intéresse à Bourkou Louise Kabo, Fatimé kimto, et Kadjidja Touré. 44 A. Dingammadji, les gouvernements du Tchad : De Gabriel Lisette à Idriss Deby Itno 1975 à 2010, Paris, L'Harmattan, 2011, p.305. 45 Le terme maquisards désigne les anciens ou les Ex-rebelles tchadiens qui, certains avaient réussi à s'emparer du pouvoir central tels Goukouni Weddeye et Hissein Habré respectivement (1975-1989), d'autres regagnaient aussi le Bercail par la voie de la négociation au par le ralliement. 39 1- Bourkou Louise Kabo : première femme élue à l'Assemblée Nationale tchadienne de 1962-1973 Source : Archives de l'Assemblée Nationale du Tchad, 03 juillet 2023. Née le 05 juillet 1934 à Fort-Archambault (Sarh), Bourkou Louise Kabo est institutrice de formation. Sa carrière l'a amenée à servir successivement à Moundou, Doba, Fort-Lamy (N'Djamena), Ati et Mao46. Son engagement politique au sein du Parti Progressiste Tchadien a commencé dès l'école primaire à Fort-Archambault, à l'ombre de François Tombalbaye. En mars 1962, elle a été la première femme tchadienne à être élue député à l'Assemblée nationale. Pour Bourkou Louise Kabo, c'est le début d'une longue carrière parlementaire qui n'a été interrompue que par le coup d'État d'avril 197547. Elle a été membre de l'organisation des femmes du PPT/RDA et présidente du Conseil National des Femmes Tchadiennes, une organisation apolitique à but social48. En dehors de la politique, Bourkou Louise Kabo est une femme militante de la première heure de la cause féminine. Elle avait très tôt fait de la scolarisation des filles et la lutte contre les coutumes rétrogrades ses principales préoccupations. Partout où elle a eu à enseigner, elle a toujours incité les mères à envoyer leurs filles à l'école. En tant que députée, elle s'est battue pour obtenir des autorités que les filles enceintes ne soient plus renvoyées de 46 M. Tubina, Parcours de femmes. Les nouvelles élites. Entretiens, 1997-2003, Paris, Éditions Sépia, 2004, p.335. 47 Mahamat Mey, «Les gouvernements du Tchad», p.85. 48 A. Dingammadji, On l'appelait Kélou Bital Diguel suivi de parcours de quatre figures féminines marquantes de l'histoire politique du Tchad, N'Djamena, Éditions salon des belles lettres, 2020, p. 100. 40 l'école comme par le passé. Son oeuvre sociale la plus remarquable a été la création de 1967 à 1968 du Centre d'Enseignement Féminin du quartier Klémate à Fort-Lamy, grâce à un appui financier américain49. Après la chute de Tombalbaye, elle a travaillé à la direction de l'enseignement. En 1979 comme de nombreux autres Tchadiens, elle fuit la guerre civile pour se réfugier en RCA et enfin en France. C'est en 1991 qu'elle rentre au Tchad. Elle a activement participé à la conférence nationale souveraine et a été membre du Conseil Supérieur de Transition de 1993 à 1996. Bourkou Louise Kabo est décédée à N'Djamena le 13 juin 2019. Après avoir présenté le parcours de Bourkou Louise Kabo, il est judicieux de présenter celui de Fatimé Kimto. 2- Fatime Kimto : première femme Secrétaire d'État puis ministre du Tchad de 1982-1986 Source : Archives de l'Assemblée Nationale du Tchad, 04 juillet 2023. Fille de Mahamat Abdoulaye dit Mahamat Maurice et de Hadjé Achta Hatoloum, tous deux originaires de Beboro dans le Département du Bahr Sara, Fatimé Kimto est la quatrième d'une famille nombreuse50.Née en 1950 à Fort-Archambault (Sarh), où elle a passé une enfance paisible, elle a effectué ses études primaires à l'école régionale de cette ville puis secondaire au collège Ahmed Mangué jusqu'en classe de 4ème en 1964.Mariée très jeune, elle a interrompu ses études pour suivre son époux Doungous Kimto en France, où elle a séjourné 49 Ibid, p. 102. 50 J. Spiegel, «Tchad : l'éternel second rôle féminin», Jeune Afrique, no 23, 5 avril 2012, p. 6. 41 pendant plusieurs années. De retour au pays, elle reprend ses études dans un collège de Fort-Lamy, puis s'inscrit à l'université du Tchad, où elle a obtenu une capacité en droit51. En 1975, à la chute de Tombalbaye, son mari, Doungous Kimto est arrêté par la junte militaire. Fatimé Kimto interrompt ses études pour s'occuper de ses enfants, en travaillant à la Coopérative des Transporteurs Tchadiens. Fatimé Kimto et sa famille se réfugient, comme de milliers d'autres «N'Djamenois», dans la ville camerounaise de Kousseri52.Inconnue du grand public avant la guerre, sa carrière politique a commencé lorsque les cadres des Forces Armées du Nord (FAN) de Hissein Habré sont venus la solliciter, avec insistance en 1979, dans le camp des réfugiés tchadiens de Kousseri pour mettre sur pied à N'Djamena, un embryon d'organisation politique des femmes au sein des FAN53. Après la prise de pouvoir par Hissein Habré le 7 juin 1982, la dynamique de mobilisation et de promotion politiques des Femmes s'accélère. C'est ainsi que le 5 août, est créée l'Union Nationale des Femmes du Tchad (UNAFT), dont la présidence est confiée à Fatimé Kimto54. Le 21 octobre 1982 que l'action de Fatimé Kimto dans les hautes sphères de l'État a véritablement commencé. Hissein Habré crée un Secrétariat d'État au Travail et à la promotion féminine, qu'il confie à Fatimé Kimto. Il s'agit d'une grande première, car depuis l'indépendance de 1960, le Tchad a connu des femmes députées, mais jamais de femme ministre.55Le 24 juillet 1984, Fatimé Kimto est promue ministre des Affaires sociales et de la promotion féminine, poste qu'elle conserve jusqu'en 1986. Parallèlement, elle a occupé d'importants postes au sein du Bureau Exécutif du Comité Central du parti unique UNIR, de 1984 à 1990. La promotion de Fatimé Kimto est l'expression d'une volonté politique, celle du Président Habré en faveur de l'émancipation de la femme tchadienne. Il s'agit de marquer une rupture historique avec les conceptions et pratiques surannées qui consistent à toujours reléguer la femme au second plan. Pour lui, «une société qui ne favorise pas la promotion de la femme est vouée à la sclérose et à l'immobilisme».56 Après la chute de Habré, elle fait allégeance, à l'instar de la plupart des dignitaires de l'ancien régime, au nouveau pouvoir. Elle adhère alors au MPS, dont elle est restée pendant longtemps, un des membres influents. De 1991 à 2006, elle a occupé plusieurs postes 51 Tubiana, Parcours de femmes, p.337. 52 Dingammadji, On l'appelait Kélou, p. 102. 53 Dingammadji, On l'appelait Kélou, p. 106. 54 Dingammadji, Ngarta Tombalbaye, p.30. 55 Ibid, p.35. 56 Tubina, Parcours de femmes, p.338. 42 politiques à la présidence de la République ainsi qu'au gouvernement. Elle a aussi été candidate malheureuse aux législatives de février 2011, dans la circonscription du Bahr Sara57.En dehors de la politique, Fatimé Kimto milite dans plusieurs associations féminines et de défense des droits de l'homme. Après avoir obtenu une licence en sciences juridiques suivie par un stage de formation notariale de 2007, elle a brièvement exercé comme notaire. Elle est décédée le 22 mai 2015 à N'Djamena.58Ayant présenté le parcours de Fatimé Kimto, il conviendra de présenter celui de Khadidja Touré. 3- Khadidja Touré : Membre parlementaire et militante, avocate et défenseuse des droits humains Source : Archives de l'Assemblée Nationale du Tchad, 05 juillet 2023. Membre parlementaire, Kadjidja Touré est née en 1959 dans la capitale tchadienne de Fort-Lamy (N'Djamena). Sa mère était d'origine arabe et son père, tchadien d'origine ouest-africaine. Elle a fait ses études secondaires au Sacré Coeur Collège59. A seize ans, comme c'était la coutume, son père arrangea son mariage, ce qu'elle refusa. Quelque temps plus tard, elle a cédé et a accepté d'épouser l'économiste Aboubakar Sherif Touré, s'installant avec lui en France en 197660.Pendant son séjour en France, Khadija a commencé sa longue carrière en tant que défenseur de la démocratie et des droits de l'homme dans son pays natal. Elle a rejoint l'Association des étudiants tchadiens (AET) et est devenue membre du mouvement 57 Ibid, p.338. 58 Dingammadji, Ngarta Tombalbaye, p.40. 59 Ngartebaye Le-yota, «La participation des femmes», p.71. 60 Tubina, Parcours de femmes, p.350. 43 rebelle du Nord qui a émergé à la fin des années 1970, connu sous le nom de Libération Nationale du Tchad - FROLINAT (Front National de Libération du Tchad)61. Avec la victoire militaire d'Hissein Habré en 1982, Khadija fait partie d'une organisation secrète pour lutter contre la dictature imposée par le régime gouvernemental, étant arrêtée, torturée et exilée jusqu'en 1990. De 1990 à 1995, elle est devenue l'une des femmes les plus connues pour le combat pour la démocratie dans son pays natal. Son parti, l'Union pour la Démocratie et la République - UDR (Union pour la Démocratie et la République) l'a désignée pour rejoindre la commission parlementaire constituante. En 1992, elle a dirigé des manifestations contre le nouveau gouvernement pour violation des droits de l'homme contre les populations civiles dans les zones de guerre contre les armées rebelles. En 2015 Khadidja Touré a témoigné dans un procès international intenté contre l'ancien président Habré devant un tribunal de la ville de Dakar au sujet des abus qu'elle et d'autres femmes opposantes au régime ont subis dans leur intégrité et dans leur corps, dans la prison de l'armée. La trajectoire de Khadidja Touré illustre la résilience des femmes dans la lutte pour la défense des droits humains fondamentaux sur le continent. Dans ce chapitre, il était question de présenter la femme tchadienne au parlement et au gouvernement à l'ère du monopartisme (1962-1990). L'on peut retenir que la promulgation de la nouvelle constitution et la législature de 1962, ont favorisé l'entrée d'une femme au parlement. L'unique femme élue députée au suffrage universel à siéger à l'assemblée nationale sous la bannière du Parti Progressiste Tchadien. Il s'agissait de Bourkou Louise Kabo. Cette présence est demeurée longtemps symbolique et discontinue. Elle se renferma aussi assez vite à cause de l'enlisement politique au Tchad. Il a fallu attendre 1982 pour voir une première femme au gouvernement, du nom de Fatimé Kimto. En effet, les régimes qui se succédaient au Tchad n'étaient que de courtes durées et étaient beaucoup portés à régler leurs dissensions internes. La vie politique fut dominée par des militaires. Les femmes se retrouvèrent absentes du partage du pouvoir. Elles se trouvèrent confinées à leurs rôles d'épouse et de mère. Depuis donc le règne de Ngarta Tombalbaye en passant par Hissein Habré, le pays vit de la dictature et de conflits interethniques. Cependant, il va de soi de démontrer postérieurement l'émancipation politique de la femme tchadienne depuis l'instauration de la démocratie en 1990. 61 Dingammadji, Ngarta Tombalbaye, p.45. 44 CHAPITRE II : L'EMANCIPATION POLITIQUE DE LA 45 La femme était marginalisée, opprimée, reléguée au second rang, bien qu'elle assure toutes les charges, notamment gestionnaire de foyer, mère et agent économique. Mais, des voies se sont levées pour réclamer une égalité effective des deux sexes et surtout une équité et un peu plus de justice entre les êtres humains qui naissent libres et égaux en droit et en dignité. La chute du régime dictatorial d'Hissen Habré en 1990, et le vent de la démocratie qui soufflait désormais sur le continent africain ont dû permettre aux Tchadiens de reposer la question du multipartisme dans leur pays. La démocratie en décembre 1990 a ouvert la voie aux revendications de la femme tchadienne. Dans ce chapitre, l'on présente le combat pour l'égalité de droit, la conquête des droits politiques, et le leadership féminin en politique au Tchad. I- LE COMBAT POUR L'ÉGALITÉ DE DROITSL'émancipation des femmes tchadiennes est la garantie pour celle-ci de disposer des mêmes opportunités et des mêmes chances que les hommes, pour construire et mener leur vie. Il s'agit d'une question d'équité1 et de question politiques et sociale et de penser aux rapports sociaux qui nivellent les conditions des hommes et des femmes tchadiennes qui permettent de lutter, d'aplanir les inégalités qui semblent inhérentes à la société. L'on va démontrer le combat pour l'égale participation aux débats publics et enfin, la conquête des droits politiques. 1- Le combat pour l'égale participation aux débats publics En politique, les femmes font toujours face à de nombreux obstacles lorsqu'il s'agit d'être traité sur un pied d'égalité avec leurs collègues masculins. Elles sont souvent confrontées à des idées préconçues sur l'apparence, le discours et le comportement qu'elles doivent adopter. Pour les femmes, le simple fait de s'engager en politique revient souvent à défier les rôles traditionnels et à provoquer une redistribution du pouvoir qui appartient traditionnellement aux hommes2. Les résultats du deuxième Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH2) de 2009 au Tchad ont démontré que les femmes représentent plus de 50,3% de la démographie nationale. Malgré qu'elles soient minoritaires dans les instances de décisions, leur apport dans le développement économique du Tchad est salutaire. 1 B. Ndiaye, «Au Tchad ou ailleurs, les hommes de qualité ne craignent pas l'égalité», Le Monde Afrique, https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/26/au-tchad-ou-ailleurs-les-hommes-de-qualite-ne-craignent-pas-l-egalité,consulté le 20 décembre 2022 à 13h20. 2 Union Inter Parlementaire (UIP), «La violence à l'égard des femmes dans les parlements», 2018, p.12. 46 La participation des femmes aux prises de décisions politiques est à l'évidence un des enjeux prioritaires de la lutte pour plus d'égalité, perçue comme exigence du développement3. Le nombre des femmes exerçant des fonctions politiques n'est pas le meilleur indicateur de l'importance de la participation féminine à la vie politique ni de l'efficacité de celle-ci pour influencer les orientations politiques dans un sens favorable aux préoccupations des femmes. Mais, dans le secteur formel, les femmes à compétences et à postes égaux au Tchad sont rémunérées à un niveau inférieur. Elles sont aussi pour une large part dans le secteur informel. Quant aux postes de décision, elles sont souvent largement minoritaires dans les secteurs clés de la vie publique4. Au total, la participation directe des femmes à la politique à travers les structures formelles de prise de décision ou les mécanismes d'expression de citoyens en démocratie est encore faible5. Il n'empêche qu'elles se manifestent à travers des expressions politiques non conventionnelles et arrivent à influencer des décisions politiques d'envergure, voire à faire reculer les pouvoirs en place sur des questions qui les concernent6. A cela s'ajoute le droit à l'égalité du genre et de justice. 2- Le droit à l'égalité du genre et de justice La notion d'égalité des sexes renvoie à la notion d'égalité de droits, mais lorsque l'on l'accole à l'égalité des chances, elle convoque aussi, englobe une autre notion ; celle d'équité et donc de justice7. Il est une chose de prôner l'égalité de sexe, il est autre chose de la mettre en oeuvre et de faire en sorte que chaque homme, chaque femme ait accès à ces droits, à ce droit à l'égalité. L'égalité de chance pose en effet, de manière sous-jacente, tous les handicaps que peut porter un sexe par rapport à l'autre8. L'application progressive du principe d'égalité fondamentale exige la prise de mesures pour assurer des chances égales aux hommes et aux femmes, ainsi que des mesures pour corriger les inégalités de pouvoir entre les hommes et les femmes. Comme les rôles masculins et féminins sont construits socialement et maintenus par la voie de la culture patriarcale, la convention sur l'Élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDEF) prévoit que les États soient tenus de prendre les mesures voulues pour 3 Archives du Ministère de la Santé Publique, de l'Action Sociale et de la Solidarité Nationale du Tchad (AMSPASSNT), «Rapport national d'évaluation des vingt (20) ans de mise en oeuvre des recommandations du programme d'action de Beijing», juin 2014, p.18. 4 Rokhaya Aw Ndiaye, «De l'égalité de sexes», pp.1-2. 5 Z. Beine, 45ans, enseignant-chercheur à l'Université de Toukra, N'Djamena, le 10 août 2022. 6 Adjamagbo-Johnson, «La politique est aussi l'affaire des femmes», p.66. 7 Rokhaya Aw Ndiaye, «De l'égalité de sexes», p.1. 8 Ibid, p. 2. 47 modifier les modèles et stéréotypes socioculturels, et pour éliminer les préjugés et les pratiques culturelles qui reposent sur des idées sexistes9. Fini le combat pour l'égalité de droit, l'on démontre la conquête des droits politiques. |
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