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L'identité en débat - Représentations et idéologies dans les discours sur l'immigration au sein de l'espace public

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par Jean-Marie GIRIER
Université Lyon II - Université Lyon III - ENS-Lsh Lyon - Master 2 recherche en Sciences de l'information et de la communication 2007
  

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Le malaise du PS sur le terrain de l'immigration

Notons que cette situation place l'opposition dans une situation complexe dans la mesure où un débat imposé sur un texte déjà porteur d'une volonté de communication l'oblige à débattre à partir d'un objet non avoué. Par exemple, lorsque Bernard Roman (PS) déclare que  « ce texte est inutile car l'essentiel de ce que vous appelez l'immigration choisie pouvait être traité par voie règlementaire. Ce texte est dangereux car il remet en cause un certain nombre de valeurs qui fondent la République française», le ministre de l'Intérieur répond : « Je relève tout de même une faille dans son raisonnement. Il a soutenu l'idée que nous pourrions réformer par simple circulaire. Cela est très surprenant de la part d'un législateur. Qui pourrait nous en vouloir de porter le débat démocratique devant l'Assemblée nationale ? Convenons d'ailleurs qu'il est parfaitement anormal que l'immigration ne fasse pas plus souvent l'objet de débats au Parlement ».

Revenons un instant sur la situation de l'opposition. La fusion du débat sur l'immigration dans le cours du récit de la campagne électorale a placé le Parti socialiste dans une situation délicate. A peine sorti du débat sur le CPE et en plein processus de désignation de son candidat pour les élections présidentielles, le PS s'est trouvé dépourvu d'une argumentation d'opposition crédible sur le thème de l'immigration36(*). Tout d'abord, le dépôt en urgence d'un deuxième texte en un même mandat, quelques mois avant la fin de la session parlementaire, a pris de court le groupe socialiste. De plus, alors que le PS proposait jusque-là un traitement européen de la question migratoire, deux autres évènements, le Non au référendum en 2005 et la position de la France dans l'Union viennent discréditer la thèse de critères d'immigration élaborés en concertation avec les partenaires de l'espace Schengen.

Sans nous appesantir, notons que le traumatisme du 21 avril 2002 est venu déstabiliser ce parti sur le thème de l'immigration. Alors que le gouvernement Jospin n'a pas mené à bien la question du vote des étrangers ni celle de Sangatte, un imaginaire de laxisme et d'incompétence du Parti socialiste sur cette question a été construit par les médias et renforcé par la majorité de droite durant ce débat. Les socialistes ont d'ailleurs peiné à se légitimer par des actions symboliques, c'est pourquoi ils se sont tournés vers le collectif Uni(e)s contre une immigration jetable. Il est intéressant de prendre en compte le discours médiatique à ce propos. Celui-ci se compose comme un commentaire qui vient qualifier la stratégie symbolique établie par le Parti socialiste. C'est principalement le quotidien Libération qui évaluera sa position symbolique dans l'espace public du débat. Ainsi, dans un article intitulé « Le PS s'indigne, mais pas trop fort », l'énonciation journalistique offre un aperçu du positionnement socialiste en en soulignant les divisions sur le fond. En évoquant « Un PS bien discret sur le projet de loi Sarkozy », Libération rappelle que « posture d'opposants oblige, les socialistes se déclarent largement contre le projet de loi. Toutefois, aucun ne semble prêt à entonner le discours de l'extrême gauche lorsqu'elle demande la régularisation de tous les sans-papiers. Et, sur le fond, le projet socialiste est assez flou ».

Le malaise, le flottement sémantique que propose le PS dans l'espace public est expliqué par l'absence d'un consensus interne et l'échec de certaines mesures lorsque la gauche était au pouvoir. Dès lors, la majorité UMP s'emploie à relever les contradictions et autres indécisions dans les rangs de l'opposition. Nicolas Sarkozy procède tout d'abord à une mise en avant de l'absence de propositions, et n'hésite pas à rappeler que de nombreux leaders socialistes tels Dominique Strauss-Kahn, ou Malek Boutih sont favorables au principe des quotas qu'il défend :

« Mon seul regret est que sur un sujet aussi essentiel que la politique d'immigration, le Parti socialiste ait été dans l'incapacité de proposer des mesures positives, se bornant à présenter des amendements de suppression.

Certes, j'ai noté que quelques voix raisonnables avaient fait des propositions au sein du Parti socialiste. J'ai pris connaissance avec grand intérêt des travaux inventifs de M. Malek Boutih, membre de la direction du Parti socialiste et partisan d'une régulation quantitative de l'immigration. J'ai entendu également des propos très raisonnables de la part de M. Manuel Valls et de M. Bruno Le Roux, mais je regrette que leurs voix n'aient guère porté jusqu'à la rue de Solferino et qu'elles n'aient pu trouver de traduction sous la forme d'amendements. »

Le rappel de la pression électorale est constant, d'autant que ce type de remarque est largement relayé dans les médias, en particulier Libération. Le député Richard Mallié (UMP) se plait à caricaturer en expliquant que « la différence entre les deux côtés de l'hémicycle est très simple : en face, on est laxiste et angélique ». Pour sa part Jérôme Rivière (UMP) se permet de défier la gauche sur son absence de position claire :

«  En tant que membre de la majorité, je suis particulièrement déçu de voir que l'opposition ne fait pas de propositions. Nos concitoyens ne sont pas dupes. Ils écoutent, ils regardent et ils savent qu'il n'y a rien à attendre de la gauche, alors qu'il s'agit d'un sujet capital qui mériterait un peu plus de sérieux et un vrai débat parlementaire de fond ».

Au total, plus d'une trentaine d'interventions de membres du gouvernement ou de députés de la majorité viendront construire une di-vision de l'action politique sur l'immigration. Dans cette situation, l'argumentation des élus socialistes va les mener à se recentrer sur les valeurs de la République. Face à des éléments techniques, l'opposition de gauche formula ses interventions à partir de l'idéal républicain, du nécessaire respect des droits de l'humain, de la liberté individuelle ou de la devise nationale. Par ailleurs, ils individualiseront leurs interventions en prenant des exemples très précis de travailleurs étrangers, de sans-papiers expulsés afin de crédibiliser leur travail de terrain et de noyer un dialogue général dans des cas particuliers.

* 36 On constate une production littéraire importante au moment de ce débat : LANG, Jack et LE BRAS, Hervé, Immigration positive, 2006 ; AUBRY, Martine (dir.), Immigration, comprendre, construire !, 2006.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo