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La protection des droits culturels dans la construction européenne : un parent pauvre des droits fondamentaux ?

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par Dominique KAMWANGA KILIYA
Université de Liège - Master Complémentaire en Analyse Interdisciplinaire de la Construction européenne 2008
  

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CONCLUSION

Il ressort de l'analyse faite tout au long de cette étude que, à lui seul, le droit à la liberté d'expression contenu dans les instruments internationaux et européens qui existent déjà ne saurait assurer la garantie de tous les droits culturels. Cette situation est due au fait que les droits culturels, même s'ils sont reconnus comme une catégorie spécifique des droits de l'homme, ont jusqu'alors un contenu ambigu, diversifié, assez vague et moins précis. Celui-ci n'appelle pas l'unanimité dans leur perception et leur interprétation dans les différents Etats membres du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne. Evoquer les droits culturels comme élément fondamental de définition et de détermination de la racine de chaque couche sociale composant la Communauté européenne sous son aspect institutionnel actuel constitue un danger pour la cohésion et l'harmonie déjà acquises dans le processus d'intégration. En conséquence, il en résulte la difficulté, sinon l'impossibilité, d'adoption d'un instrument juridiquement contraignant et autonome susceptible de leur assurer une peine effectivité.

A la place des droits culturels conçus comme des droits subjectifs à l'identité, au particularisme culturel que détient tout individu dont le respect s'impose à toute structure politique et sociale quels qu'en soient sa nature et ses objectifs, au sein de l'Union européenne, il a été pensé ingénieusement à la notion de citoyenneté européenne ou à celle de culture commune dont les considérations purement politiques et idéologiques ne sauraient s'y substituer. Le concept de citoyenneté européenne est, en effet, devenu un thème récurrent des discours politiques et journalistiques. La plupart des commentaires médiatiques ont très souvent mis l'accent sur les enjeux ou les effets politiques et sociaux sous-tendus par cette notion. Dans ces conditions, sur le plan interne, il est souvent devenu, d'un côté, un slogan mobilisateur utilisé par les partisans de la construction européenne comme un moyen de ranimer les énergies vacillantes dans une période de doutes sur la poursuite du projet européen. De l'autre côté, il est brandi et interprété par les adversaires farouches de l'Europe comme un thème repoussoir, un épouvantail et un moyen privilégié de laminage des identités nationales, régionales ou locales.128(*) Au niveau externe, la citoyenneté européenne et la culture commune sont utilisées par le politique européen pour montrer à la face du monde que la communauté européenne a une vision unique de la culture, qu'elle est unie et véritablement intégrée alors que son multiculturalisme inébranlable ne manque pas dans certaines circonstances.

Donc, l'hypothèse avancée par le professeur Patrice Meyer-Bisch et selon laquelle les droits culturels demeurent encore « une catégorie sous-développée des droits de l'homme » ou « le parent pauvre des droits fondamentaux »129(*) dans les systèmes de protection tant au niveau international que dans la construction européenne mérite encore sa place et sa raison d'être. Pour parvenir à leur assurer une garantie effective et efficace, les droits culturels devraient, d'abord, être reformulés pour qu'ils aient un contenu clair et précis afin d'éviter des interprétations arbitraires dont ils font encore l'objet dans les Etats. En particulier, que les juridictions réduisent la marge d'appréciation des Etats en matière des droits cultuels qui, le plus souvent, les interprètent en fonction des visions politiques, idéologiques et des perceptions juridiques de leur droit interne. Il est, par ailleurs, important que les droits culturels ne soient pas dissociés des droits économiques, sociaux, politiques et civils comme c'est le cas actuellement, mais qu'ils en soient considérés comme partie intégrante.130(*) Cette dernière approche permet de lier l'identité et la diversité culturelles aux principes universels des droits de l'homme et de la démocratie, conformément aux articles 4 et 5 de la Déclaration universelle de l'UNESCO sur la diversité culturelle.131(*)

Ensuite, les débats déjà engagés sur l'opportunité d'adoption d'un instrument spécifique à la garantie juridictionnelle des droits culturels, notamment le processus de ratification du protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, devraient s'intensifier pour aboutir, dans un horizon très proche, à sa mise en oeuvre. Cela n'est possible que si les droits culturels acquièrent une attention prioritaire qu'ils méritent tant sur la scène européenne que sur celle internationale. Ils ne devraient plus faire objet de politisation qui provoque des craintes et des distanciations dans leur promotion.132(*) Dans le même temps, à titre de mesure d'urgence, le Conseil de l'Europe devrait songer à étendre la compétence de la Cour européenne des droits de l'homme à la sanction des violations de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales étant entendu que cet instrument juridique est d'une performance incontestable mais il est dénué d'effectivité et afin de donner un tonus à la volonté d'assurer la garantie des droits culturels.

Sur le plan social, enfin, le défi consiste à préserver un juste équilibre entre les efforts qui sont demandés à la société et ceux qui sont exigés de l'individu. Il s'agit de rechercher jusqu'à quel point la société peut accepter une adaptation de ses institutions et traditions induite par l'exigence de respect des différences. Il lui revient de concilier ses diverses appartenances et de trouver la meilleure articulation à donner aux divers éléments constitutifs de l'identité de l'individu, fussent-ils antinomiques a priori, et d'exercer, par ses choix, ses libertés et responsabilités. L'enjeu des droits culturels est donc de permettre aux individus d'exprimer leurs identités tout en préservant une liberté de choix à cet égard. Répondre à la question des identités culturelles sous l'angle des droits de l'homme en général, et des droits culturels en particulier, permet utilement de cadrer le débat. Ainsi sont posés les principes de non discrimination et d'égalité, de respect des libertés et de réalisation des droits pour tous.133(*)

En définitive, il faut donc admettre de façon objective que les réponses toutes faites en matière de reconnaissance et de garantie des droits culturels n'existent pas. Ce qui est demandé au droit européen et au droit international c'est offrir des outils qui permettent d'avancer dans le sens de la construction de sociétés multiculturelles, sur un chemin fort long et semé d'embûches.

* 128 Centre de Culture Européenne & Institut Européen des Itinéraires Culturels, « L'Europe continue. Les valeurs culturelles de la citoyenneté européenne », Séminaire organisé dans le cadre de la campagne du Conseil de l'Europe sur « l'Europe, un patrimoine commun », Université de Saint-Jacques de Compostelle, Faculté d'Histoire et de Géographie, 03-05 octobre 2000, pp. 9-10

* 129 MEYER-BISCH P., « Les droits culturels. Une catégorie sous-développée des droits de l'homme », Op.cit., p. 1206

* 130 Unesco, « Etude préliminaire sur les aspects techniques et juridiques relatifs à l'adoption d'un instrument normatif sur la diversité culturelle », Cent soixante-sixième session du Conseil Exécutif, 166 EX/28, Paris, le 12 mars 2003, p. 5

* 131 Article 4 : « La défense de la diversité culturelle est un impératif éthique, inséparable du respect de la dignité de la personne humaine. Elle implique l'engagement de respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales, (...). Nul ne peut invoquer la diversité culturelle pour porter atteinte aux droits de l'homme garantis par le droit international, ni pour en limiter la portée.»

Article 5 : « Les droits culturels sont partie intégrante des droits de l'homme, qui sont universels, indissociables et interdépendants. L'épanouissement d'une diversité créatrice exige la pleine réalisation des droits culturels, tels qu'ils sont définis à l'article 27 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et aux articles 13 et 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Toute personne doit ainsi pouvoir s'exprimer, créer et diffuser ses oeuvres dans la langue de son choix et en particulier dans sa langue maternelle ; toute personne a le droit à une éducation et une formation de qualité qui respectent pleinement son identité culturelle ; toute personne doit pouvoir participer à la vie culturelle de son choix et exercer ses propres pratiques culturelles, dans les limites qu'impose le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales ».

* 132 Institut Interdisciplinaire d'Ethique et des Droits de l'Homme, « Situation des droits culturels. Proposition d'argumentaire pour la plate forme d'ONG sur la diversité et les droits culturels », Observatoire de la diversité et des droits culturels, Document de Synthèse n° 2, p. 3, http://www.unifr.ch/iiedh/droits-culturels/odc-documentation/odc-doc-synthese.htm, consulté le 09 juillet 2008

* 133 BIDAULT M., « Pour ou contre les droits culturels ? », Le Mensuel de l'Université, 1er mai 2008, http://www.lemensuel.net/2008/05/01/pour-ou-contre-les-droits-culturels/, consulté le 13 juillet 2009

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe