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LA Cour de Strasbourg et la Cour du Luxembourg dans la protection juridictionnelle des droits de l'Homme:duo ou duel ?

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par Eric NGANGO. Y
Université Libre de Bruxelles - Master en Droit 2008
  

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DEDICACE

Aux femmes et enfants victimes de violations massives des droits de l'homme, au Soudan et dans la région des Grands Lacs, véritables musées d'horreurs ; vienne le jour où, les épées seront brisées pour en faire des socs, et les lances pour en faire des serpes ...

REMERCIEMENTS

Sur le plan académique ;

Nous tenons à exprimer notre déférente gratitude à tous nos professeurs de L'ULB, qui ont complété notre formation intellectuelle, tout spécialement à Mme Emmanuelle Bribosia, notre tutrice academique, qui nous a materné par ses conseils judicieux dans la réalisation de ce travail. Egalement nous remercions Mr Laurent Scheeck pour les intéressants articles qu'il nous a fournis sur la collaboration informelle des juges européens ; Alain Kwankenda, pour les corrections judicieuses qu'il a apportées à notre manuscrit ; enfin, nos promotionnaires (tout spécialement à Landrette Koka, Barry Ahmadou, Gaëtan Djeumene, William Donkeng), nous leurs disons merci.

Sur le plan extra-académique ;

Nous remercions nos frères. Franck Alex Meyou pour la constance du soutien, Patrice Tabougnia et Violette sa tendre moitié, qui ensoleille ses jours, la famille Laminou.

A nos fidèles compères, par les temps chauds que pendant la brise, Kepdem Christian et Romual Sitchueng, nous leurs exprimons notre gratitude.

« Last but not least », merci à Laurence et Patricia Kana, Caroline Kamdoum, Joséphine Omokolo, Micheline Kiendrebeogo, pour la chaleur de leur amitié.

INTRODUCTION

Assez rarement, une notion aurait été aussi évoquée et débattue ces dernières années que celle de droits de l'Homme1(*) , la question irradie finalement tous les domaines du savoir, (politique, économique, juridique). Ce qui confirme du reste le constat de Frédéric Sudre, pour qui, les droits de l'Homme sont devenus la référence obligée de tout discours moderne2(*) .Pourtant la notion se laisse très mal enfermer dans une définition, eu égard aux intérêts politiques et idéologiques en jeu .Toute définition est en effet susceptible d'entraîner une levée de boucliers selon les différentes sensibilités. L'une des définitions les plus avancées est celle de J Mourgeon qui les appréhende comme « ...des prérogatives gouvernées par des règles que la personne détient en propre dans ses relations avec les particuliers et avec le pouvoir3(*) ».Même si elle n'échappe pas à la critique ,cette définition présente quand même le mérite de la simplicité.

Les droits de l'Homme sont en effet aujourd'hui l'objet d'une consécration, tant par des instruments juridiques nationaux que régionaux4(*) , communautaires et internationaux. Mais au- delà des belles formules juridiques proclamatoires, et parfois même incantatoires, se pose le problème des mécanismes de protection de ces droits. Comme l'a souligné fort opportunément, voici plusieurs années déjà, Riccardo Guastini, rien ne sert en effet, à s'activer d'égrener un chapelet de droits et de libertés si on ne parvient pas à en organiser efficacement la protection 5(*) . C'est toute la question de la garantie de droits de l'Homme qui se trouve ainsi posée. Ce qui nous intéresse particulièrement, ce sont les mécanismes juridictionnels (à l'exclusion des mécanismes non juridictionnels)  de protection de ces droits dans le cadre européen : il s'agit du tandem Cour Européenne des droits de L'Homme autrement appelée Cour de Strasbourg6(*) -Cour de Justice des Communautés Européennes, encore appelée Cour du Luxembourg7(*) .

La Cour de Strasbourg a été instituée dans le cadre du Conseil de l'Europe, le 18 septembre 1959 en vue de faire respecter la Convention européenne des droits de l'homme8(*). Elle est le principal juge européen du respect des droits fondamentaux, elle veille par sa jurisprudence au respect des standards minimums communs aux Etats-membres du Conseil de l'Europe.

La Cour de justice des Communautés européennes a, quant-à elle été instituée dans le cadre de la CE/UE, par le traité CECA du 18 avril 1951, avec pour mission (art 31 traité CECA) d'assurer le respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité et des règlements d'exécution. Elle constitue l'institution juridictionnelle communautaire, composée en réalité de trois juridictions : La Cour de justice, le tribunal de première instance et le tribunal de la fonction publique. Cette dernière par une laborieuse construction jurisprudentielle, formalisée  au fil des modifications successives des traités CE et plus tard UE (et surtout avec la Charte de Nice, véritable « Bill of Rights européen »9(*), qui viendra codifier toute cette oeuvre prétorienne), s'est reconnue compétente en matière de droits de L'Homme, considérés comme Principes généraux du droit communautaire dont elle assure la protection10(*).

La question se pose avec acuité aujourd'hui : La Cour de Strasbourg et la Cour du Luxembourg dans la protection juridictionnelle des droits de l'Homme : duo ou duel ?

La problématique n'est pas nouvelle11(*), car les problèmes posés par la coexistence de deux juridictions européennes ayant des compétences en matière de droits de l'Homme ont déjà été abordés, avouons le, sous divers aspects par de nombreux auteurs12(*) . Ce qui enlève évidemment à l'interrogation toute son originalité, mais l'intérêt de cette étude n'en est pour autant pas entamée : d'une part, il est rare en effet qu'une étude en droit, fût-elle un « Traité », épuise tous les aspects d'une question donnée 13(*);d'autre part, le droit européen et les droits de L'Homme sont en effet en ébullition permanente ; ce caractère dynamique impose inévitablement des remises en question, des interrogations toujours croissantes, des remises à jour, des revirements doctrinaux, des analyses juridiques prospectives. On ne saurait donc faire l'économie d'une analyse juridique en la matière, au motif que la question aurait déjà été abordée. D'ailleurs la question présente un intérêt renouvelé .Le traité de Lisbonne14(*) apportera de grands changements dans la construction de l'espace constitutionnel européen 15(*) ,il accordera la personnalité juridique à L'Union Européenne. Ce qui remet sur la sellette la question de l'adhésion à la CEDH16(*) (ce traité prévoit d'ailleurs une telle adhésion ,art 6 II ) ; ensuite , même s'il ne reprend pas le texte intégral de la Charte des droits fondamentaux, l'art 6 par I du traité UE modifié fait référence à la Charte, en lui accordant sans équivoque la même valeur juridique que les traités 17(*) ; enfin le traité de Lisbonne fera disparaître le fameux « temple grec » ( structuration en piliers) de l'Union européenne, en communautarisant tous les piliers de coopération , ceci va inévitablement entrainer un accroissement des compétences de la CJCE , une telle évolution est une source potentielle d'interférences avec la CEDH ,en ceci que, des difficultés en matière de droits de l'Homme pourraient éventuellement naître de ces nouveaux domaines de compétences18(*) .Au plan jurisprudentiel, l'arrêt Bosphorus de la Cour EDH, qui vient donner une autre configuration des rapports entre Strasbourg et Luxembourg, ravive inévitablement la problématique. De fait l'intérêt de cette réflexion se résume à l'effort d'actualisation de la problématique qu'elle réalise, son mérite est de céder à la tentation d'élever le débat au plus haut degré de la théorie du droit19(*).Précisons qu'à côté de toute la littérature juridique en la matière, ce mémoire se veut, une simple pièce versée au costaud dossier de la recherche sur le système européen de protection des droits de l'homme .Le sujet présente également un intérêt théorique indéniable : beaucoup d'auteurs soulignent le grand désordre juridique qui caractérise le monde aujourd'hui20(*) et relèvent que dans cet embrouillamini21(*) , l'Europe à travers son dualisme juridictionnel serait « un laboratoire de la mondialisation du droit »22(*). Autrement dit, les autres ordres juridiques pluralistes en quête de coordination et de cohérence, n'auraient qu'à expérimenter les belles formules de «  chimie juridique » mises au point dans le laboratoire européen .Dans le même sens, Renucci parle du système européen de protection des droits de l'homme comme l'un des meilleurs au monde23(*) . Ces affirmations élogieuses ne sont pas sans susciter l'intérêt du chercheur .Comment expliquer cette efficacité qui contraste, à première vue, avec l'articulation pas toujours glorieuse de ce système ?

Sur un autre plan( toujours théorique ), l'analyse du système européen de protection des droits de l'homme est un fort argument permettant de constater solennellement ,non sans consternation et nostalgie , l'éboulement, dans une mesure bien pesée toutefois, de la pyramide Kelsenienne de la hiérarchie des Lois24(*) et son remplacement, par d'autres modèles théoriques existant déjà ,ou à construire 25(*), ( certains auteurs constatent sa substitution par un modèle réticulaire 26(*)) .

Nous nous intéresserons donc à la nature des rapports entre ces deux juridictions, en matière de protection des droits de l'Homme .S'agit-il, pour reprendre le questionnement de Denis Simon d'une relation à la «  je t'aime moi non plus... ?27(*) »  ou plutôt, pour continuer dans ces expressions imagées, d'une relation à la « on s'est aimé comme on se quitte... ? ». Plus prosaïquement, la relation entre les deux juridictions européennes dans la protection des droits de l'Homme, est-elle une relation de coexistence, de coopération ou de conflit, de subordination ou de coordination28(*) ?

Notre hypothèse se résume en une affirmation simple : sous les allures d'un duel, la relation entre les Cours européennes est à titre principal un duo, si harmonieux, que l'on présage même qu'elle évolue vers un solo pur et simple. Nous proposons de vérifier cette hypothèse à partir d'une summa divisio binaire qui nous permettra d'examiner :

(Première partie) , la relation entre les Cours européennes : les allures d'un duel , on va analyser ici l'articulation même des juridictions européennes d'un point de vue juridique , pour arriver à la conclusion qu'une telle architecture est un nid de divergences potentielles ou avérées . Ce que confirmera d'ailleurs la jurisprudence bien connue en la matière, sur laquelle on s'appuiera. Ensuite nous relèverons que cette relation est, après une analyse minutieuse principalement un duo, en nous plaçant aussi bien sous l'angle de la relation même que sous celui de l'appréciation eu égard à une meilleure protection du justiciable (Deuxième partie).

Enfin nous ne manquerons pas, en conclusion, de faire état de toutes les analyses prospectives, relatives à l'avenir du système européen de protection des droits de L'Homme en rapport avec la problématique de l'adhésion de la CE/UE au système de la CEDH.

La méthode qui présidera à nos développements est le positivisme juridique. Du coup, la question de François Chevrette et Hugo Cyr nous interpelle : de quel positivisme parlez-vous29(*) ? Le positivisme juridique constitue en effet une notion dans laquelle on peut découvrir mille et une significations. Ces deux auteurs nous demandent de bien distinguer chaque fois que l'on emploie le terme, parmi les trois sens suivants : le positivisme perçu comme idéologie, le positivisme vu comme approche théorique et le positivisme comme méthodologie. C'est donc à ce troisième sens que nous nous référons ici.

Une autre difficulté de la notion de positivisme juridique tient en ce qu'elle se présente comme « une église à plusieurs chapelles » : il y'a à l'intérieur du positivisme juridique , le positivisme normativiste autrement appelé le formalisme juridique ; le positivisme logique de l'école de Vienne ; le positivisme factualiste, etc.-  Nous jetons notre dévolu sur cette dernière approche qui consiste à analyser les normes et la jurisprudence en tenant compte de leur contexte de maturation et de leur contexte d'application30(*). Le choix de cette approche n'est ni fortuit, ni gratuit ; il est justifié d'une part par le milieu d'étude -l'ordre juridique européen (ou les ordres juridiques européens), marqué par une absence de hiérarchie, où le droit entretient une relation indiscutable avec les faits, et d'autre part, par la déchéance du positivisme normativiste, et aussi du fait du caractère inachevé des théories de substitution proposées, qui ne peuvent recevoir leurs premières applications expérimentales ici.

PREMIERE PARTIE

LES COURS EUROPEENNES DANS LA PROTECION

DES DROITS FONDAMENTAUX : LES ALLURES

D'UN DUEL

Commençons par lever toute équivoque sur la portée du terme « allures » utilisé ici. Dans le langage courant, il désigne les apparences générales d'une chose31(*). En l'utilisant, nous n'entendons nullement dire que le duel entre les deux Cours n'est qu'apparent ; il existe en réalité, comme le relève pertinemment Olivier Lord32(*), une rivalité entre les Cours européennes. L'examen de la jurisprudence récente des deux Cours est assez révélateur33(*)à ce propos. Nous avons choisi à dessein le terme « allures » pour signifier que les situations de duel sont de faible amplitude .Il est question ici de démontrer que la question du duel n'est pas un faux problème, elle est une question fondée. A Strasbourg comme à Luxembourg, on rejette avec véhémence toute idée de duel entre les Cours .A ce propos, on peut citer un bref extrait du discours de JP COSTA (président de la CEDH ) , à l'occasion de l'ouverture de l'année judiciaire de la Cour EDH : « ...Cette adhésion [de L'UE au système de la Convention ] renforcera l'indispensable convergence entre les jurisprudences des deux grandes juridictions européennes , la Cour de justice des Communautés européennes et la nôtre qui ne sont d'ailleurs nullement concurrentes ,mais fortement complémentaires ,et qui coopèrent déjà dans le meilleur esprit »34(*) :

Du côté de Luxembourg, c'est le même hymne à la paix, Les Pères Fondateurs de la Charte de Nice ont pris soin d'exorciser tout soupçon de concurrence avec le système de la Convention, en faisant des références explicites à la CEDH dans le texte de la Charte  (voir art 52§ 3), ainsi que dans son préambule : « Il y a moins de la coupe aux lèvres !». Ces belles déclarations d'amour réciproques, ne doivent en rien abuser le juriste. Ce qui compte en définitive, c'est l'analyse patiente des rapports, de l'articulation entre les deux Cours et l'exploitation de leurs jurisprudences respectives. Si l'on confond le duel avec la confrontation, on conclurait trop vite à son inexistence entre les deux Cours européennes. Or ces notions ne sont pas tout à fait synonymes : le duel peut être discret, comme dans notre cas. Les droits de l'Homme, dans le cadre de l'UE ne sont qu'un instrument stratégique au service de l'intégration communautaire35(*) , ils ne sont pas une fin en soi36(*). Le contexte de leur émergence (éviter que les Cours constitutionnelles nationales en s'arc-boutant sur la défense des libertés n'entravent la primauté du droit communautaire) en dit long à ce sujet. Dans le même sens, plusieurs décisions de la CJCE ont rappelé avec force que les droits de l'Homme ne sont pas une fin en soi, et que l'intérêt communautaire (structure et objectifs de l'Union) pouvait en justifier des restrictions37(*) . Pour emprunter une phraséologie propre au droit commercial, on dirait que les droits de l'Homme ne sont pas la « raison sociale » de L'Union Européenne, alors que de l'autre côté, ils sont « la cause première » de la Cour européenne des droits de l'homme 38(*) . Au regard de cette divergence d'objectifs stratégiques, il serait très imprudent de conclure aussi hâtivement à une convergence ? Car celle-ci signifierait qu'un des deux systèmes ait renoncé au moins partiellement à sa raison d'être .Cette analyse semble se situer aux confins de la science politique.

Il est possible d'aborder le problème sous un angle pragmatique en repérant minutieusement, dans les jurisprudences respectives de ces deux Cours ,les solutions divergentes et en les présentant selon une systématisation catégorielle , ou encore selon une approche évolutive .Une autre manière d'aborder la question nous semble plus opératoire, en ce sens qu'elle nous permet ,pour parler comme Hubert Legal de nous intéresser à la ruche plutôt qu'au miel 39(*) . Elle a le mérite de considérer le système dans son ensemble, en posant le problème de manière beaucoup plus théorique qu'il ne l'a été jusqu'ici, et aussi de s'appuyer sur des solutions jurisprudentielles à titre illustratif. Elle consiste à dire que la question du duel entre les Cours européennes est fondée, car ce sont deux juridictions

(CHAP I) ; ce sont deux juridictions européennes (CHAP II) ; deux juridictions européennes compétentes en matière de droits fondamentaux (CHAP III) .Du fait qu'elles ont ces trois attributs communs, il va se poser un problème d'articulation et de coordination, qui théoriquement fait le lit des solutions inévitablement divergentes.

CHAP I : LA COUR DU LUXEMBOURG ET LA COUR DE

STRASBOURG SONT DEUX «  JURIDICTIONS ».

Ces deux Institutions ont un caractère « juridictionnel ». Pour un non juriste, c'est un simple constat sans consistance, mais pour le juriste, le premier réflexe est de se poser la question de « l'autorité de chose jugée » ou plutôt de «  l'autorité de chose interprétée  ou déclarée» (la terminologie dépend en effet des spécificités du système considéré), ou plus largement de l'effet des décisions de ces deux Cours. La question du duel ne se serait pas posée ou se serait posée avec moins de vigueur si l'une d'elles n'avait pas le caractère «  juridictionnel  », ou si toutes les deux n'étaient que de simples organes politiques ou « non juridictionnels ». Dans le premier cas, l'autre aurait pu, en cas de conflit, se prévaloir du fameux res judicata pro veritate habetur. On relèvera à ce propos un passage intéressant dans l'arrêt Grant contre South -West trains Ltd du 17 février 1998 ; la Cour de justice des Communautés européennes affirme ne pas être tenue de s'aligner sur la signification que le Comité des Droits de l'Homme semblait avoir reconnu à la notion de « discrimination fondée sur le sexe » telle qu'elle figure aux articles 2 et 26 du PIDCP .Selon la Cour de justice , « cet organe [le Comité des Droits de L'Homme ] qui n'est d'ailleurs pas une instance juridictionnelle , et dont les constatations sont dépourvues de valeur juridique contraignante s'est borné à faire une observation en ce sens sans motivation particulière  »40(*) . Dans le second cas, le différend se serait résorbé alors sur le terrain de la négociation politique. On voit bien que  l'effet attaché aux décisions des Cours européennes, et de manière générale, leur caractère « juridictionnel » commun est source de conflits .Il importe de constater que, de ce caractère commun, il peut sourdre dans l'articulation des Cours européennes, d'abord une difficulté, mieux un conflit horizontal. Très concrètement, quel serait l'effet des décisions de la CJCE sur la Cour EDH et vice-versa, vu qu'il n'y a pas de hiérarchie a priori? (SECT I). Ensuite, cette situation est de nature à placer le juge national en porte en faux, il est en effet dans une situation très inconfortable, en cas de divergences de solutions entre la CJCE et la Cour EDH, en raison de ses doubles obligations conventionnelle et communautaire (SECT II). Cette équation de trilatéralité complexe a été énoncée et analysée avec lucidité par Emmanuelle Bribosia41(*) . Nous aborderons le problème sous un autre angle, pour éviter toute redondance.

SECT I DILEMME HORIZONTAL : LES COURS EUROPENNES

FACE A LA PORTEE42(*) DE LEURS DECISIONS.

Du caractère « juridictionnel » des deux Cours européennes, il se pose un premier dilemme horizontal, celui de l'autorité des décisions en matière de droits fondamentaux de l'une sur l'autre, et vice-versa. On se posera d'abord la question de l'autorité de la jurisprudence de la Cour EDH sur la CJCE (A) ; ensuite l'autorité de la jurisprudence de la CJCE sur la Cour EDH (B). La question peut sembler aberrante, vu que formellement la réponse en est évidente. En l'absence de dispositions juridiques explicites justifiant une telle autorité, la conclusion ne peut être qu'elle est inexistante .Seulement, comme nous l'avons relevé plus- haut, le positivisme- normativiste ne suffit pas à rendre compte de la complexité de la matière. Il importe de tenir compte aussi des considérations tenant par exemple à l'articulation des deux systèmes. Le constat de l'absence d'une autorité juridique ou même factuelle de l'une sur l'autre conduit inévitablement à des divergences d'interprétations que l'on examinera également (C).

PAR I - LA JURISPRUDENCE DE LA Cour EDH EN MATIERE DE DROITS

DE L'HOMME A-T-ELLE AUTORITE SUR LA CJCE ?

Quelle est l'autorité des décisions de la Cour EDH sur la CJCE ? Juridiquement, on répondrait aucune ! Car, ni la CE, ni l'UE n'ont formellement adhéré au système de la Convention. Qu'en est-il alors des différents arguments avancés par la doctrine pour justifier une autorité de la CEDH et de la jurisprudence de la Cour EDH dans l'ordre juridique communautaire ? On examinera ici la pertinence de la question d'une éventuelle autorité formelle, ou tout simplement d'un fondement juridique pouvant justifier l'idée d'une autorité de la jurisprudence de Strasbourg sur celle de Luxembourg. Le positivisme formaliste étant lui seul insuffisant, on prendra également en compte la pertinence de la question au regard de quelques théories qui s'appuient plus sur l'agencement et le fonctionnement des systèmes, plutôt que sur une source normative expresse. De fait, on se limitera à quelques éléments : l'art 6§2 du traité sur l'Union européenne, après la consolidation réalisée par le traité d'Amsterdam 43(*) ; la théorie de la succession d'Etat avancée par le juge Pescatore (infra P 13) ; la théorie des traités successifs ; et enfin on procédera à la vérification de «  la théorie des contraintes juridiques » de Michel Troper (infra p 14) dans le cadre de la relation entre Strasbourg et Luxembourg.

Sur la question de l'existence d'une autorité formelle , il convient de souligner que, les droits fondamentaux au sein de l'ordre juridique communautaire ont d'abord été consacrés par la jurisprudence de la CJCE qui les considère comme les Principes généraux du droit communautaire dont la Cour assure la protection en s'inspirant de la CEDH et des autres instruments internationaux des droits fondamentaux auxquels les Etats membres ont coopéré ou adhéré44(*) . On a ainsi pu soutenir que la CEDH, au sein de l'ordre juridique communautaire, avait le statut « de source d'inspiration ». Autrement dit, de source factuelle permettant à la CJCE de protéger les droits fondamentaux.

L'art 6§2 introduit par le traité de Maastricht : « L'union respecte les droits fondamentaux tels qu'ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, signée à Rome le 4 novembre 1950 et tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres en tant que Principes généraux de droit communautaire », vient codifier cette affirmation de la jurisprudence, en abandonnant la référence aux autres instruments internationaux cités au titre de « source d'inspiration » . La question de la portée de cette disposition ne se serait pas posée avant la modification introduite par le traité d'Amsterdam. Pour rappel, ce traité a étendu la compétence de la Cour de justice à cet article. L'art 6§2 cite nommément la Convention européenne des droits de l'homme. Sans doute, comme le font remarquer F Tulkens et J Callewaert45(*) , cette disposition se réfère « aux droits fondamentaux « tels qu'ils sont garantis par la CEDH » et non à la CEDH elle-même. Une telle nuance ne change pas fondamentalement les choses, car les droits «  tels qu'ils sont garantis par la Cour EDH » sont ceux qui résultent de la Convention et non d'autres instruments juridiques. Ainsi l'art 19 de la CEDH dispose très clairement que la Cour est instituée pour assurer le respect des engagements résultant pour les Parties contractantes de la Convention et de ses protocoles .Certains auteurs soulignent que cet article 6§2 a fait glissé au moins théoriquement la CEDH du statut de « source d'inspiration  » à celui de « source formelle »46(*) , en pratique, la jurisprudence de la CJCE le confirme ,car de plus en plus « tout se passe comme si la CJCE appliquait directement la CEDH47(*)  ». La question que l'on se pose est celle de le portée de cet engagement de l'art 6§2. Peut-on y voir une source d'obligations au titre de la notion de droit international « d'engagement par déclaration unilaterale de volonté » ? Notion si bien admise par une partie de la doctrine en droit international public qui la classe au rang des sources du droit international à côté des sources expresses mentionnées à l'art 38 du statut de la CIJ .Cet argument semble difficilement défendable, au regard du flou qui entoure cette notion ( beaucoup refusent d'y voir une source spécifique du droit international48(*)), mais plus encore du fait que les conditions de validité d'un tel engagement ne sont pas réunies dans ce cas précis .

De même, en se situant non plus sous l'angle du droit international , mais de la légalité communautaire , la question peut se poser de savoir si la CJCE pourrait dans son intervention au titre de la protection des droits fondamentaux, s'écarter de la CEDH, sans qu'on puisse y voir une illégalité49(*) , une violation des traités, en se fondant ,non pas sur une adhésion tacite50(*), mais sur le principe de légalité communautaire ,du moment où le respect de la CEDH inscrite dans les traités constitue une condition de la légalité communautaire .C'est l'expression simple de l'adage patere legem quam ipse fecisti (respecte la loi que tu t'es toi même donnée) .En d'autres termes, quelle est la valeur juridique de la CEDH et de l'interprétation qui en est faite par la Cour EDH, devant le juge luxembourgeois, au regard de cet article ? Certainement, il fait référence à la CEDH et non à son interprétation donnée par la Cour EDH. Ce qui laisserait a priori ouverte la possibilité d'une interprétation autonome dans le cadre de la CJCE. Mais on pourrait se demander si la Convention peut être séparée de son interprétation, lorsqu'on songe un tant soit peu à la jurisprudence de la Cour EDH 51(*)qui a toujours affirmé que la Convention est un instrument vivant et doit être interprétée à la lumière du progrès du monde moderne. Au regard de cette précision, on en déduit que l'interprétation donnée par la Cour EDH est en fait «  l'âme de la Convention » et ne saurait s'en séparer. La fameuse « théorie réaliste française »52(*) , autrement appelée « théorie réaliste de l'interprétation », serait radicale sur ce point, dans la mesure où elle considère que les textes juridiques ne deviennent des normes qu'à travers l'activité d'interprétation qui appartient principalement aux différentes juridictions, en particulier celles dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours. Cette théorie conduit à admettre que l'interprète est le véritable auteur de la norme.

Sans doute, cet article 6§2 fait aussi référence aux traditions constitutionnelles communes aux Etats. Mais il convient de souligner que depuis 1974 ,et même bien avant (date où le dernier Etat-la France a adhéré à la Convention), la CEDH s'est ancrée dans les traditions constitutionnelles des différents Etats de L'Union, au point où on ne puisse véritablement pas faire une séparation étanche entre les sources d'inspiration mentionnées à l'art 6§2 .

En pratique toutefois, il est étonnant que la CJCE ait continué à se fonder sur l'art 220 TCE (ancien art 164), plutôt que sur cet art 6§2, malgré l'entrée en vigueur du traité de Maastricht53(*).Quoiqu'il en soit, cette disposition n'est pas tout à fait convaincante et ne pourrait conduire qu'à conférer un statut équivoque à la CEDH dans l'ordre communautaire54(*) .Olivier Le Bot55(*) va dans le même sens, lorsqu'il souligne la fragilité du fondement juridique sur lequel la CJCE applique la CEDH, car lors même que l'on aurait déduit de l'art 6§2 une force contraignante de la CEDH et de son interprétation devant le juge communautaire56(*), cela ne garantirait rien. Comme le rappelle en effet J P Jaqué, ni l'Union, ni la Communauté ne sont actuellement parties à la Convention européenne des droits de l'homme, celle-ci ne joue un rôle dans le cadre communautaire qu'en raison de la manifestation unilatérale de volonté de L'Union de respecter les normes matérielles par le truchement des Principes généraux du droit applicable de l'art 6§2 du traité UE57(*).

La Charte des droits fondamentaux au cas où le traité de Lisbonne entrerait en vigueur viendra ravigoter la question, eu égard à l'art 52§3 qui dispose que « dans la mesure où la présente Charte contient des droits correspondant à des obligations garanties par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales , leur sens et leur portée sont les mêmes que ceux que leur confère ladite Convention. Cette disposition ne fait pas obstacle à ce que le droit de l'Union accorde une protection plus étendue » .Les critiques de cet article, (absence de valeur contraignante, absence de référence à la jurisprudence en tant que telle de la Cour EDH, indétermination du garant de cette clause)58(*), ne permettent pas de lever toutes les incertitudes qui planent autour de cette éventuelle autorité interprétative de Strasbourg sur Luxembourg.

D'un autre côté, la théorie de « la succession d'Etat », invoquée par le juge Pescatore 59(*) , n'a pas été retenue par la CJCE .On ne s'y attardera donc pas outre mesure. Simplement, relevons qu'elle a été l'objet de nombreuses critiques60(*) : entre autres, les règles de contrôle mises en place par le système conventionnel ne permettent pas à une Organisation internationale ou à ses organes d'être partie à la procédure devant la Commission [ancienne Commission européenne des droits de l'homme] ou la Cour EDH ;de plus, les Etats-membres de la CE étant liés à des degrés différents par la Convention (jeu des réserves) et aux différents protocoles à la Convention, il était difficile de déterminer l'exacte étendue de l'engagement qui eût alors, si la théorie était retenue, été transféré à la Communauté.

Moins intéressante sur ce point, est la théorie des « traités successifs »  selon laquelle les Parties à un traité ne sauraient déroger dans leurs rapports aux obligations contractées dans un traité antérieur. La critique de J P Jacqué sur ce point est on ne peut plus pertinente ; le traité communautaire à l'époque de sa conclusion regroupait des Etats qui n'étaient pas tous parties à la Convention, pour la France, le traité communautaire est le traité antérieur ; de même on ne saurait faire fi du caractère spécifique du traité communautaire, qui est un traité d'intégration61(*).

Une autre théorie qui mérite d'être analysée est la fameuse théorie « des contraintes juridiques » de Michel Troper62(*), qui postule que  dans la vie juridique comme dans d'autres domaines , l'usage de la liberté ou du pouvoir est déterminée par certains facteurs qui contraignent les acteurs à agir comme ils le font qu'autrement , l'hypothèse de la théorie des contraintes juridiques est qu'à côté des facteurs extra- juridiques, il existe d'autres internes qui résultent uniquement de la configuration des systèmes juridiques qui peuvent expliquer la décision des acteurs . La configuration des Cours européennes impliquerait donc des contraintes juridiques de la part de chacune des deux Cours. L'agencement des Cours européennes permet à la Cour EDH d'exercer son contrôle sur la CE/UE, par la médiation de la responsabilité internationale des Etats-membres. De cette configuration, il découlerait une autorité, du moins de facto, des arrêts de la Cour EDH sur la CJCE. Un tel contrôle commanderait, en effet, en vertu « des contraintes juridiques », à la CJCE de ne pas rester indifférente à la jurisprudence de Strasbourg. Il serait difficile, toutefois d'exciper d'un tel contrôle une certaine autorité de la jurisprudence de la Cour EDH sur celle de la CJCE, car ce contrôle, comme on va le voir est sérieusement limité. Et la CJCE peut toujours choisir l'option d'une déviance pure et simple par rapport à la jurisprudence de la Cour EDH, en assumant les conséquences. Cette théorie, pour pertinente qu'elle puisse paraître, n'est pas suffisante pour servir de fondement à une autorité de la jurisprudence de Strasbourg sur Luxembourg. On pourrait également lui ajouter d'autres reproches, elle n'a en effet jamais été consacrée explicitement par la jurisprudence des Cours européennes d'une part ; d'autre part, il ne s'agit pas pour les juges européens de « véritables contraintes », mais plutôt d'un souci réciproque de cohérence, «  de scrupules jurisprudentiels réciproques ».

Au total, seule une adhésion formelle de l'UE au système de la Convention pourrait tirer les choses au clair. En attendant et sous réserve des observations précédentes, on ne peut pas juridiridiquement soutenir l'idée d'une autorité formelle des décisions ou de l'interprétation donnée par la Cour EDH sur la CJCE. Qu'en est-il de l'autorité de celle-ci sur celle-là ?

PAR II - LA JURISPRUDENCE DE LA CJCE EN MATIERE DE DROITS

DE L'HOMME A-T-ELLE AUTORITE SUR LA Cour EDH ?

De la même manière, a priori, les décisions de la CJCE, en matière de droits de l'Homme, n'ont pas autorité sur la Cour EDH. Il semble qu'une telle autorité serait même inenvisageable de facto. Il y'a au moins deux raisons pour lesquelles la Cour EDH ne pourrait pas se référer à la jurisprudence de la CJCE, du moins en tant que source d'inspiration :

-la première est que, comme l'a relevé Olivier De schutter la CEDH occupe une place particulière dans les sources d'inspiration de la CJCE 63(*) . Plusieurs arrêts de la CJCE rappellent d'ailleurs cette « signification particulière » de la CEDH64(*) .Il y'aurait, pour l'auteur et sous réserves que nous allons examiner plus loin ,une certaine convergence interprétative .De ce point de vue , on ne voit pas pourquoi  la Cour EDH se référerait à la jurisprudence de la CJCE en matière de droits de l'homme si une telle jurisprudence n'est que le reflet de l'interprétation qu' elle[ Cour EDH] donne à la CEDH ,et ne saurait de ce fait apporter une plus -value. L'intérêt d'une telle référence se justifierait uniquement dans l'hypothèse où la CJCE se serait inspirée d'autres instruments tels que le PIDCP, ce qui n'était pas impossible65(*), ou aux traditions constitutionnelles communes aux différents Etats-membres. Seulement l'art 6§2 ne cite plus les autres instruments juridiques internationaux au titre de sources d'inspiration auxquelles se réfère la CJCE.

Sans doute, avec la Charte des droits fondamentaux, la situation pourrait changer, vu que cet instrument, comme on va le souligner, est d'un standard plus élevé que la CEDH en ce qui concerne, la reconnaissance des droits de l'homme66(*) . Mais cela n'entraine pas ipso facto , une obligation pour la Cour EDH de se référer à la jurisprudence de la CJCE quant à ces droits nouveaux ,ce en vertu du caractère subsidiaire de la Convention, ( art 53 CEDH ) qui fait d'elle « le minimum vital européen » ; sauf si celle-ci considère au regard de la mission qui lui est reconnue d'adapter la CEDH à l'évolution de la société , que ce minimum a évolué et doit de ce fait s'enrichir de nouveaux droits consacrés par la Charte. On relèvera dans ce sens que, dans l'affaire Christina Godwin c.R.U en 200267(*) , la Cour EDH invoque très clairement la Charte des droits fondamentaux de l'UE ; mais ici encore, rien ne l'oblige à s'aligner sur la jurisprudence de Luxembourg.

- Le second obstacle, du moins théorique à une référence à la jurisprudence de la CJCE par la Cour EDH est l'art 32 de la CEDH qui confie à la seule Cour EDH « toutes les questions concernant l'interprétation et l'application de la Convention et ses Protocoles qui lui seront soumises dans les conditions prévues par les articles 33,34 ,47... » . Donc, au cas où la CJCE aurait sa propre interprétation de la CEDH, en vertu de cet article, on pourrait légitimement penser qu'elle soit sans effet, du moins formellement sur la Cour EDH.

De même, il est possible de vérifier ici également la pertinence de la « théorie des contraintes juridiques », lesquelles résulteraient, dans ce cas, de l'interférence personnelle entre les deux systèmes, tous les Etats-membres de l'Union européenne ont adhéré à la Convention. Beaucoup d'auteurs ont évoqué la possibilité d'un moyen d'action de Luxembourg sur Strasbourg. Très concrètement, les Etats-membres peuvent « boycotter » le système de Strasbourg au cas où il ne tiendrait pas en compte les impératifs communautaires et de manière plus spécifique la jurisprudence de la CJCE en matière de droits fondamentaux, ou au cas où il s'en tiendrait à un standard rigoureux. De cette capacité de nuisance, peut-on déduire une autorité de Luxembourg sur Strasbourg ? Loin s'en faut ! Les critiques relevées plus haut sont transposables mutatis mutandis ici.

De ces deux constats d'absence, du moins d'incertitudes quant au fondement d'une autorité formelle et même factuelle des arrêts de Luxembourg sur Strasbourg et réciproquement, on est inévitablement confronté à des risques graves de divergences68(*)ou même à des divergences réelles, que l'on s'emploiera maintenant à mettre en évidence. Il convient de souligner que, si les exemples ne sont pas légion sur ce point, cela est dû plus à l'impressionnante « diplomatie judiciaire » qui s'est mise en place entre les Cours69(*), plutôt qu'à une certaine cohérence juridique du système. Le paragraphe qui suit est consacrée pour l'essentiel à l'examen de ces divergences.

PAR III - LES DIVERGENCES JURISPRUDENTIELLES

Contrairement à plusieurs auteurs, Raisz Aniko70(*) souligne qu'il n'existe aucune interdépendance, du moins formelle, entre les deux Cours, même si l'interprétation des juges de Luxembourg est susceptible de se rapprocher de celle de Strasbourg. C'est d'ailleurs la conclusion à laquelle nous sommes parvenu plus-haut. On ne se livrera pas ici à une recension complète de divergences jurisprudentielles entre les deux Cours, elles sont, à notre avis bien connues. On se limitera à présenter quelques cas parmi tant d'autres :Dans l'affaire des pêcheurs espagnols, il existait des divergences entre les juges de Luxembourg et de Strasbourg, concernant l'art 7 de la CEDH (principe nulla poena sine lege) .En décidant dans l'affaire Musique diffusion française et Autres c. Commission des Communautés européennes, que la Commission des Communautés européennes n'est pas susceptible d'être soumise au respect de l'art 6 de la CEDH, (droit à un procès équitable) lorsqu'elle agit dans le domaine de la concurrence, la CJCE n'a pas suivi la jurisprudence de la Cour EDH.71(*)Dans l'arrêt Orkem72(*) , la CJCE a rejeté l'idée que cet article (art 6) puisse contenir le droit de ne pas témoigner contre soi-même, la Cour de Strasbourg ayant quant -à elle admis le contraire73(*).

Dans les fameux arrêts Grogan74(*), la Cour Suprême Irlandaise (Irish High Court) a posé une question préliminaire en demandant si la prohibition de la dissémination d'informations sur l'avortement légal à l'étranger était conforme au droit communautaire (rapport à l'art 10 CEDH -liberté d'expression), il s'agit là pour reprendre le raisonnement de Rick Lawson75(*), d'un cas potentiel de divergences vu que la CJCE était appelée à statuer sur un cas où la Cour EDH n'avait pas encore statué. De même, on citera des domaines où les divergences sont bien connues entre les deux Cours, en ce qui concerne le droit au respect de la vie privée garanti par l'art 8 de la CEDH, la Cour EDH a considéré que ce droit s'étendait aux Entreprises76(*) ,telle n'était pas l'opinion de Luxembourg. Dans le même sens, on peut comparer77(*) les arrêts de la CJCE dans les affaires Dufay c. PE78(*), et Marguerite Johnson c.Chief constable of Royal ulster constabulary79(*) , avec la jurisprudence de Strasbourg, en particulier l'arrêt Neigel c France80(*) ; Lombardo c / Italie81(*), et Massa c/ Italie82(*) .La liste des divergences entre les deux Cours européennes est loin d'être complète, on se limitera à ces quelques exemples dans le cadre de notre exposé. Il convient à présent d'examiner le dilemme vertical résultant du caractère juridictionnel et des divergences jurisprudentielles entre Strasbourg et Luxembourg.

SECTI II. DILEMME VERTICAL : LE CONFLIT D'ALLEGEANCE83(*)

DU JUGE NATIONAL

De ce commun «  caractère juridictionnel  », et de ces divergences jurisprudentielles des Cours européennes, il résulte à l'évidence un second dilemme qui lui est vertical et pèse lourdement sur le juge national en raison des ses doubles obligations communautaire et conventionnelle. Le juge national se retrouve alors dans la situation d'un serviteur qui doit servir deux maîtres à la fois, ayant apparemment le même grade et de qui il reçoit des ordres purement contradictoires84(*) . Notons au passage que le « juge national » dans la lancinante question de la coordination entre les deux systèmes européens présente une importance capitale. Autant dans le système communautaire que dans celui de la Convention, il est le juge de droit commun de la Constitution et des traités85(*) . C'est donc devant lui que les deux ordres juridiques européens vont s'affronter. Il lui appartient alors de démêler les ficelles en ménageant chacun de ses deux maîtres .La situation évidemment comme le relève Emmanuelle Bribosia 86(*)ne peut se poser que si on se situe dans le champ d'application du droit de l'Union ; elle ne se poserait également que si elle est en rapport avec les droits fondamentaux.

Pour Olivier de Schutter87(*), la résolution de l'équation est simple : le juge national doit, en pareille hypothèse , faire primer le droit communautaire en raison , du lien direct noué par les mécanismes de renvoi préjudiciel entre le juge national et le juge communautaire , et de ce que l'intervention de celui -ci se situe en cours d'instance ( la situation étant encore sub judice devant le juge national ), plutôt qu'après épuisement des voies de recours au sein de l'Etat . Un autre élément qui appuierait cette option du juge national serait la mise en balance des sanctions auxquelles il (en réalité l'Etat dont il est l'organe) s'expose dans chaque système, suite à une éventuelle violation de ses obligations88(*). De ce point de vue, les sanctions du système communautaire sont plus redoutables surtout avec la reforme de la voie de recours en manquement qui désormais peut déboucher sur une amende89(*) .Ces sanctions peuvent aller d'une suspension, voire d'une exclusion de l'Union européenne, de l'Etat qui ne respecte pas les droits fondamentaux ; alors que dans le système conventionnel, le mécanisme d'exécution des arrêts, tout à la responsabilité du Comité des ministres souffre de quelques défaillances. 90(*)

Les travers d'une telle solution de politique jurisprudentielle toutefois, est qu'elle conduit forcement le juge national à violer l'ordre d'un de ses deux maîtres, notamment l'ordre du système Conventionnel. La situation la plus intéressante serait celle qui essaie de concilier les deux ordres apparemment contradictoires. C'est ici que prend de l'intérêt ce que nous avons appelé plus loin « les éléments autorégulateurs de pacification juridiques internes à chaque système » (voir Titre II, Chap I), car ils vont être très utiles au juge national pour résoudre le dilemme sus évoqué. De fait, le juge national doit être très au fait de la jurisprudence de la Cour EDH relative à ses rapports avec le droit communautaire, (jurisprudence qui peut certes évoluer), il peut anticiper le contrôle que la Cour EDH fera, en se servant du critère dégagé dans l'arrêt Bosphorus et ses suites. Ce faisant, il ôte le risque d'être désavoué ultérieurement par Strasbourg. Il devra aussi utilement tenir compte de la jurisprudence de la Cour de justice sur le respect de la CEDH, résumée par Olivier de Schutter, comme suit : la CJCE veille à ce que la CEDH soit respectée dans au moins trois hypothèses, même si formellement la CE et l'UE n'ont pas adhéré à la CEDH : d'abord, elle contrôle le respect de la CEDH par les Institutions des Communautés et de l'UE (parmi lesquels la CJCE qui aux termes de l'art 7 du traité CE fait partie des Institutions de l'UE)91(*) . Ensuite, elle impose aux Etats- membres de respecter la Convention lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit communautaire ou contribuent à l'application de la CEDH, ou encore lorsque les mesures qu'ils adoptent s'inscrivent dans une exception que ménage à leur bénéfice une disposition du droit communautaire. Enfin, la Cour admet de la part des Etats- membres qu'ils tirent argument des obligations que leurs impose la CEDH, pour limiter l'étendue des obligations que leurs impose le droit communautaire. Connaissant donc la jurisprudence de la CJCE, le juge national peut anticiper la solution qu'elle prendra .Sans doute la CJCE n'est pas liée par la règle du précédent et pourrait toujours revenir sur cette jurisprudence. Mais en procédant ainsi, le juge national diminue le risque de condamnation ultérieure .Le mérite d'une telle solution serait d'assurer la cohérence du système européen en évitant des oppositions frontales. Toutes ces explications, relèvent de la politique jurisprudentielle et rien ne nous autorise à conclure que le juge national ne prendrait pas une autre option. Sous le bénéfice de ces observations, on peut approfondir la question du dilemme du juge national en faisant, pour notre part, un double distinguo de portée inégale, car le premier tire sa source des textes communautaires, le second quant à lui, découle de l'observation des rapports entre le droit national et le droit communautaire :

-d'abord entre la situation du juge national suprême (dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours), et celle du juge dont les décisions sont susceptibles de recours

(Par I) ;

- ensuite, l'observation des rapports entre le droit communautaire et les droits nationaux des Etats-membres , nous permettra d'examiner la situation du juge national ainsi décrite, selon qu'il est un juge qui admet facilement la primauté du droit communautaire, et selon qu'il est un juge qui l'admet avec réticence ou réserve (Par II)

PAR I DISTINGUO JUGE NATIONAL SUPREME /JUGE NATIONAL

NON SUPREME.

Dans le premier cas, les traités communautaires (art 234 CE) font obligation au juge, dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, d'adresser une question préjudicielle à la Cour de justice des Communautés européennes en cas de doute sérieux dans l'interprétation du droit communautaire. en pareille hypothèse, la résolution de la question est alors très simple, en cas de divergences entre les Cours européennes. Car le juge devra tout simplement renvoyer «  la patate chaude » à la CJCE, par le moyen de la question préjudicielle. On sait que l'interprétation qui en sera donnée par la CJ lie le juge national .Il ne pourrait donc craindre, en cas d'application de cette interprétation, la condamnation ultérieure de la Cour EDH, car en vertu de la jurisprudence de cette dernière (Aff. M&CO92(*)), elle ne se reconnait pas compétente pour assurer le contrôle des actes de mise en oeuvre du droit communautaire lorsque l'Etat- membre (entendons ici, le juge national) n'avait manifestement pas un pouvoir d'appréciation. (dans l'arrêt Bosphorus également, le juge strasbourgeois prend en compte l'exercice par l'Etat-membre du pouvoir d'appréciation, comme critère d'exercice de son contrôle)93(*) .Pour être en totale harmonie avec la jurisprudence de Strasbourg ,il devra en plus vérifier par lui-même si le niveau de protection des droits de l'homme qu'offre le droit communautaire par rapport au cas qui lui est soumis, n'est pas « manifestement insuffisant » . Ce qui est une quadrature de cercle, car c'est un critère flou et le contrôle qu'en fait la Cour EDH est à la fois un contrôle concret au cas par cas et abstrait, qui mérite de précisions ultérieures. Donc ce ne serait qu'en cas de doute sérieux, quant à violation de la présomption de conformité du droit communautaire aux droits de l'homme, que le juge national devra alors poser une question préjudicielle (la formulation de la question doit tenir compte du statut des droits de l'homme dans l'ordre juridique communautaire).

Devant le juge dont les décisions sont susceptibles de recours, il a la faculté soit de poser la question préjudicielle comme dans le premier cas, (seulement on se demande bien si le fait de poser une question préjudicielle qui est une simple faculté ne peut pas être considéré par la Cour EDH comme l'exercice d'un  pouvoir d'appréciation, avec les conséquences qui en découlent); soit de ne pas poser une question préjudicielle. Il lui appartient alors de trancher entre les ordres contradictoires de ses deux maîtres pour décider celui qu'il devra mettre en oeuvre .Le problème est alors délicat, il ne faut non plus exagérer la situation du juge national dans ce cas, car il dispose de deux soupapes d'échappement qui sont prévues dans chacun des deux systèmes .Dans le système de la CEDH d'abord, il faut rappeler que la Convention à un caractère subsidiaire (art 53 de la CEDH). Ce qui autorise un dépassement par le haut de la protection que le juge national ( à ce propos ,Vera Morales a si bien montré que la protection que le juge administratif français fait des droits de l'homme dépasse largement celle prévue par la CEDH94(*) ) peut accorder en matière de droits fondamentaux . Il doit donc visiblement, en raison de cela, donner la primeur à la norme du droit communautaire ; mais encore faut-il qu'elle soit d'un niveau de protection plus élevé par rapport à la Convention qui est le « minimum vital européen de protection de droits de l'homme », pour parler comme Fabienne kauff Gazin. 95(*)La deuxième soupape d'échappement est fournie au juge national par l'art 53 de la Charte (sous réserve de son entrée en vigueur) qui règle la question de l'articulation de la Charte avec les Constitutions nationales : « aucune disposition de la Charte ne doit être interprétée comme limitant ou portant atteinte aux droits reconnus par les Constitutions nationales ». Cet article permet au juge national d'écarter l'application de la Charte, si celle ci est moins protectrice que la CEDH. En pratique toutefois, il est difficile de déterminer entre deux normes celle qui confère la protection la plus élevée. En définitive, on aboutit à l'application de la disposition « la plus favorable aux droits fondamentaux », affirmée par de nombreux instruments de protection des droits de l'homme96(*). On remarquera que cet article 53, en dépit de bonnes intentions qui ont animé sans doute ses auteurs, a été vivement critiqué par la doctrine .On lui reproche d'abord d'entrer en opposition frontale avec la primauté du droit communautaire si bien affirmée dans l'arrêt Costa c Enel ;97(*)cet article laisse supposer , et c'est la deuxième critique, que la primauté du droit communautaire sur le droit national serait définitivement acquise. Or telle ne semble pas être l'opinion de certaines Cours constitutionnelles nationales (allemande en particulier.)98(*) . On en arrive ainsi au deuxième distinguo.

PAR II DISTINGUO JUGE NATIONAL ADMETTANT FACILEMENT LA PRIMAUTE DU DROIT COMMUNAUTAIRE /JUGE NATIONAL L'ADMETTANT AVEC

RESERVES

Lorsqu'on parle de la primauté du droit communautaire, on devrait toujours garder à l'esprit la dualité de l'appréciation, en se situant du point de vue de la CJCE, et la primauté telle qu'envisagée par les juridictions nationales suprêmes99(*) . De ce point de vue, on devrait tenir compte des réserves à la primauté émises par ces Cours suprêmes nationales100(*) . A notre avis, l'identité de la Cour nationale, devant laquelle la question du dilemme entre obligations Conventionnelle et communautaire se pose, est de nature à influencer la résolution de cette difficulté. Il importe dès lors de distinguer entre le juge national admettant facilement la primauté du droit communautaire et celui exprimant des « contres-limites », quant à cette primauté ; ces contre-limites qui ,de manière générale, s'appuient sur la Constitution nationale peuvent ,concerner certaines dispositions expresses de la Constitution , les principes structurels , ou encore les droits fondamentaux101(*) ; plus intéressante est la contre-limite tirée de la nécessité de préserver les droits fondamentaux , elles apparaissent comme « une épée de Damoclès » pouvant s'abattre , au cas où le droit communautaire violerait ces limites . En pratique toutefois le problème est marqué par une recherche de compromis102(*). Pour ce qui est par exemple de la Cour constitutionnelle allemande, qui du reste apparaissait comme la plus menaçante, elle s'est réservée le droit de renverser la présomption en cas de baisse générale de la protection des droits fondamentaux103(*) . Des doutes sur les conditions d'une reprise d'un contrôle ont été levés dans le jugement du 7 juin 2000, « Bananes », dans lequel le tribunal apporte avec clarté des précisions quant à la portée de la jurisprudence Solange II. Mais rien ne présage qu'une juridiction nationale suprême ne mette en application ces réserves. Ceci étant, devant le juge admettant facilement la primauté du droit communautaire, le  problème se résoudra normalement comme précisé plus haut .Devant le juge émettant des réserves tirées du respect des droits de l'homme, a priori la solution serait de sanctionner le droit communautaire au détriment du droit conventionnel, au cas où ces réserves seraient violées, le caractère subsidiaire de la Convention conduit les Etats à accorder une protection qui va souvent bien au- delà de celle garantie par la Convention . De la sorte, il y'a de fortes raisons de penser qu'une opposition du droit communautaire à la Convention (minimum vital) serait a fortiori mécaniquement une atteinte aux droits reconnus dans les Constitutions nationales.

Le premier noeud dans l'articulation des Cours européennes étant présenté et examiné, il nous reste maintenant à examiner le second noeud qui résulte du caractère « européen » commun des deux Cours, il légitime tout aussi les allures de duel entre les deux juridictions européennes.

CHAP II DEUX JURIDICTIONS « EUROPEENNES »

La question de l'articulation posée par le caractère commun « européen » des juridictions de Luxembourg et Strasbourg est double. En premier lieu, ce sont deux juridictions de niveau européen (Sect. I). Ensuite on notera qu'elles sont toutes inscrites dans l'espace européen (Sect. II).

SECT I DEUX JURIDICTIONS DE NIVEAU EUROPEEN

Il est question ici de souligner le caractère supranational commun des deux juridictions (par I) .Mais le fait qu'elles sont de niveau européen ne suffit pas théoriquement à y voir une source d'un double standard. Là où le bas blesse, c'est qu'il y'a une certaine interférence personnelle104(*), et surtout une absence de hiérarchie formelle entre elles (Par II). On aboutit inévitablement à des potentielles divergences jurisprudentielles (Par III).

PAR I DEUX JURIDICTIONS SUPRANATIONALES

La Cour EDH a été créée le 18 septembre 1959 dans le cadre du Conseil de l'Europe105(*), avec 10 Etats-membres au départ. Elle compte aujourd'hui 47 Etats. Aux termes de l'art 1 de la CEDH (obligation de respecter les droits de l'homme), les Hautes parties contractantes (47 aujourd'hui) reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et les libertés définis au titre I de la Convention .Plus significatif est l'art 46 -1 (force obligatoire et exécution des arrêts) par lequel les Hautes Parties contractantes s'engagent à se conformer aux arrêts définitifs de la Cour dans les litiges auxquels elles sont Parties. De là, on peut dégager le caractère supranational de la Cour EDH, car le droit international classique pose que les Etats doivent se conformer aux traités qu'ils ont librement consentis. C'est l'application simple du principe pacta sunt servanda.106(*)De plus la jurisprudence de la Cour EDH a plusieurs fois précisé qu'en cas de conflit entre le droit conventionnel et le droit constitutionnel d'un Etat- membre, c'est le premier qui doit primer107(*) . Ainsi dans l'affaire Open Door et Dublin well woman c/ Irlande de 1992108(*), la Cour n'a pas hésité à faire prévaloir le droit conventionnel sur la constitution de l'Irlande avec laquelle il était visiblement en conflit. De même, on peut citer l'arrêt Zielinski et Pradal & Gonzalez et Autres c. France du 28 oct. 1998109(*),la Cour a estimé que la conformité à la Constitution de la loi critiquée ne suffisait pas à établir sa compatibilité avec les dispositions de la Convention .Egalement, dans l'affaire Von Hannover c. Allemagne du 24 juin 2004110(*), la Cour n'a pas suivi la position de la Cour constitutionnelle fédérale qui avait estimé, en se référant à la liberté de presse, que la requérante en tant que personnalité absolue de l'histoire contemporaine, devait tolérer la publication des photos litigieuses . Dans le même sens, la Cour EDH ne va pas suivre la décision de la Cour constitutionnelle en matière d'adoption, dans l'arrêt Wagner c. Luxembourg du 28 juin 2007.

La CJCE a été installée en 1952 dans le cadre de la CECA, avec comme mission première de faire respecter le droit dans l'interprétation et l'application des traités. De ce côté, les choses sont moins simples. Pour reprendre les termes de l'arrêt Costa contre ENEL. A la différence des traités ordinaires , le traité de la CEE a institué un ordre juridique propre intégré aux systèmes juridiques des Etats membres , lors de l'entrée en vigueur du traité, et qui s'impose à leurs juridictions .En instituant une Communauté de durée illimitée dotée d'Institutions propres, de la personnalité, de la capacité juridique, d'une capacité de représentation internationale et plus particulièrement des pouvoirs réels issus d'une limitation des compétences ou d'un transfert d'attributions des Etats à la Communauté, ceux-ci ont limité, bien que dans des domaines restreints , leurs droits souverains et crée ainsi un corps de droit applicable à leurs ressortissants et à eux-mêmes111(*) .On peut citer également les arrêts Simmenthal112(*) et le 1er arrêt Internationale Handelgesellschaft113(*) qui viennent compléter le sens de la primauté du droit communautaire ainsi dégagé. Sous réserve de ce qui a été dit plus- haut au sujet des « contre limites » exprimées par les juridictions constitutionnelles nationales , il apparait que cette primauté du droit communautaire qui s'étend à la jurisprudence de la CJCE , est assez clair sur le caractère supranational de la CJCE .Ce commun caractère supranational n'est pas suffisant en lui-même pour y voir une source d'un double standard ,il faut aussi prendre en compte l'interférence personnelle entre les deux Cours ( voir tableaux en annexe ) , et surtout l'absence de hiérarchie formelle.

PAR II L'ABSENCE DE HIERACHIE FORMELLE ENTRE

LES COURS EUROPEENNES

Il importe de noter qu'il n'ya pas de hiérarchie formelle entre la Cour EDH et la CJCE, les traités originaires régissant chacun de ces ordres juridiques ne font d'ailleurs pas référence l'un à l'autre. Comme le souligne J P Jacqué, il y'a une prétention de certaines Organisations internationales à fonder un ordre constitutionnel propre : pendant que la Cour de justice voit dans les traités une « Charte constitutionnelle », la Cour EDH voit dans la CEDH « l'instrument constitutionnel  d'un ordre public européen »114(*) . La théorie de droit international des « traités successifs » préconisée par certains ne nous semble pas très utile ici. On aboutit donc à « un embouteillage juridique », dont Mireille Delmas Marty s'emploie avec hardiesse, depuis quelques années, à mesurer l'ampleur et à démêler les trames115(*) .

PAR III LES DIVERGENCES JURISPRUDENTIELLES

(Voir supra, P16 &17).

SECT II DEUX JURIDICTIONS DE L'ESPACE EUROPEEN

C'est la deuxième équation résultant du commun caractère « européen » des deux Cours, une équation à double inconnue. En réalité ,il s'agit de deux équations à proprement parlé qui résultent de l'inscription spatiale des deux juridictions dans un univers commun -l'Europe .Il s'agit là d'une notion plus brumeuse qu'un loch écossais , notion qui a d'ailleurs longtemps alimenté de nombreuses discussions , comme en témoigne la déclaration restée célèbre de Robert Schuman à Londres le 5mai 1949 : « La définition de l'Europe comme entité géographique a fait l'objet de savantes polémiques qui continuent , mais l'Europe ne saurait attendre la fin de ce débat , elle se définit elle-même par la volonté de ses populations »116(*) .Sans vouloir nous inviter dans un débat somme toute assez complexe ,disons qu'il faut, pour lever toute équivoque , situer le terme « Europe » dans son contexte , comme beaucoup le font d'ailleurs en parlant de Grande Europe ( Conseil de l'Europe ) et petite Europe (Union européenne ) .Le fait est que, les deux Europes s'emboitent à la manière des poupées russes tout en étant indépendantes formellement l'une de l'autre. Ce qui d'un point de vue juridique est un casse-tête chinois.

En Droit interne, en droit interne Belge en particulier, la compétence, entendue comme la portion de juridiction attribuée par la Loi à chacun des tribunaux de l'ordre judiciaire117(*) , est définie de manière claire et précise, aussi bien la compétence territoriale que matérielle. De même, des mécanismes permettant de pallier d'éventuels conflits de compétences sont prévus118(*) .Comme il n'existe pas de législateur souverain au niveau européen , et du fait de l'interdépendance des deux systèmes , cela conduit inévitablement à des difficultés .Certes, les limites de la grande Europe ne coïncident pas totalement avec celles de la petite Europe , mais depuis l'adhésion de la France en 1974 au système de la Convention , tous les pays membres de L'UE sont aussi membres du Conseil de l'Europe . C'est là l'origine des deux équations évoquées plus haut ; la manière dont les deux systèmes vont gérer cette commune inscription spatiale est symptomatique d'un duel. Du côté de la Cour EDH, on remarquera que la CE /UE a été progressivement investie des pouvoirs qui, à l'origine, étaient exercés par les Etats -membres et appartenaient au domaine de compétence de la Cour EDH. En transférant à la CE/UE de plus en plus des pouvoirs dont l'exercice peut affecter le respect des obligations incombant aux Etats-membres au titre de la CEDH, les Etats-membres, ont du fait, aussi transféré à la CE/UE une partie de leurs responsabilités au titre de la CEDH. Or la CE /UE n'a pas encore donné forme concrète à cette responsabilité puisqu'elle ne s'est pas encore soumise à la juridiction de la Cour EDH. Il en résulte, comme le souligne Peter Van Dijk119(*), une érosion de la juridiction de la Cour EDH aussi bien rationae personae que rationae materiae. Ceci nonobstant le contrôle du respect des droits fondamentaux développé dans le système communautaire, contrôle qui ne peut en rien être comparable à un contrôle extérieur au système120(*) . La Cour EDH a été confrontée a cette impasse. Comme on va le voire, même si le contrôle qu'elle a été amenée à faire a connu un dégel dans l'arrêt Bosphorus, à travers la présomption (toutefois refragable) de conformité des actes communautaires aux droits fondamentaux qu'elle a établie121(*), il faut souligner que cet arrêt apparait comme la suite d'un long épisode jurisprudentiel qui a été l'occasion pour la Cour EDH d'affirmer progressivement son contrôle sur le droit communautaire par le biais du contrôle des Etats-membres. Autant le dire, sous l'angle des rapports entre systèmes, cette attitude laisse clairement apparaitre un manque de confiance, mieux de révérence de la Cour EDH à l'égard du système communautaire122(*) . Certes, bien qu'elle fût invitée à plusieurs occasions par l'ingéniosité des avocats , la Cour EDH n'a pas reconnu sa compétence pour connaitre d'une requête dirigée contre tous les Etats-membres ( les termes de certains arrêts laissent cependant songeur sur ce point) , technique dite de la « substitution »123(*)qui l'eût permis alors d'attribuer l'action ou l'omission dénoncée devant elle à un ou plusieurs Etats-membres , en faisant abstraction du caractère propre de la CE /UE .Mais s'il en a été ainsi , c'est moins en raison d'une marque de respect ou de confiance à l'égard du système communautaire, qu'au résultat inéquitable auquel une telle solution aurait alors abouti. D'une part les Etats-membres auraient ,dans ce cas ,été responsables des mesures qu'ils ont été obligés de prendre ou à l'adoption desquelles ils n' ont joué qu'un rôle mineur . De même, dans l'exécution de l'arrêt, alors que l'art 46§1 de la Convention oblige les Etats à se conformer à l'arrêt, le droit communautaire aurait pu s'opposer à la prise des mesures individuelles et générales nécessaires à l'exécution de cet arrêt, à l'exception de la mesure consistant à verser des dommages et intérêts. D'autre part, la solution aurait été autant inéquitable pour la Communauté que ses lois et ses actions seraient alors examinées dans une procédure au cours de laquelle elle n'a pas la faculté de se défendre.

On remarquera, pour illustrer notre propos et en faisant une comparaison avec les rapports entre la Cour EDH et l'ordre juridique international, que dans les fameux arrêts connexes Behrami c France et Saramali c France, Allemagne, Norverge, la Cour était appelée à statuer sur la recevabilité des requêtes dirigées contre les Etats membres de la mission des Nations -Unies au Kosovo(MINUK) et de la présence internationale de sécurité

(la KFOR) à raison des opérations que les soldats de ces pays menaient au Kosovo, la Cour recherche s'il n'y a pas lieu de lever le voile pour poursuivre les Etats- membres dans les actes et omissions litigieux. La cour va déclarer son incompétence rationae personae pour examiner les griefs dirigés contre les Etats défendeurs et conclure à l'irrecevabilité des requêtes, en se fondant sur les objectifs des NU et sur la nécessité de préserver les opérations de cette Organisation. Dans cette affaire , alors que les requérants faisaient valoir que la protection des droits fondamentaux offerts par la KFOR sur les plans tant substantiel que procédural n'était pas « équivalente » à celle assurée par la Convention ,au sens donné à ce terme par la Cour dans l'arrêt Bosphorus,ce qui renverserait, selon eux ,la présomption du respect de la Convention par les Etats défendeurs . La Cour EDH souligne les différences des circonstances de l'espèce ayant donné lieu à l'arrêt Bosphorus et de celles de l'espèce présente. On peut douter de la pertinence de cet argument, vu que la Cour relève par la suite qu'en tout état de cause, il existe une différence fondamentale entre la nature de l'Organisation de la coopération [CE/UE] en cause dans l'affaire Bosphorus, et celle en cause en l'espèce (ONU-MINUK). Visiblement, la Cour EDH juge l'intérêt communautaire inferieur à l'intérêt international -paix et sécurité internationale et fait ainsi deux poids deux mesures ; la décision de la Cour est telle qu'on pourrait légitimement penser qu'elle accorde une quasi-immunité aux actes découlant de l'ordre juridique international issu du système des Nations -unies124(*).

Du côté de la CJCE, le duel résultant de la commune appartenance à un univers se caractérise par une autonomisation croissante par rapport au système de la Convention. Certes, l'Union européenne n'a pas encore adhéré formellement au système de la Convention, mais dès lors qu'elle admet la Convention comme source d'inspiration, elle devrait pouvoir admettre aussi l'interprétation qui en est faite par la Cour EDH. On va voir également à travers la jurisprudence de la CJCE que la tendance est à une quête d'autonomie toujours croissante. Cela peut, certes, s'expliquer par d'autres raisons, mais l'idée de duel comme explication ne semble pas dénuée de pertinence .Voici donc posée la première équation qui résulte de l'inscription des deux juridictions dans un commun univers et dont la résolution par les deux juridictions européennes dénote clairement l'existence d'un duel discret. Nous analyserons cette situation en (SECT I).

La deuxième équation personnelle peut-être appréhendée en se plaçant sous l'angle du justiciable (Etat ou personne privée) .Il y'a dans son chef un certain conflit de juridiction, car il se trouve être sous la juridiction de deux Cours européennes. Dans un sens, cela pose inévitablement la question de la sécurité juridique, dans un autre sens, cela pourrait amener les justiciables les plus hardies à user « du forum shopping ». Ces affirmations doivent être toutefois nuancées car l'accès de certaines catégories de justiciables devant la CJCE est sérieusement limité .Cette seconde équation nous occupera dans une (SECT II).

PAR I LA PREMIERE EQUATION PERSONNELLE : LES QUESTIONS

DU CONTRÔLE DE LA CE/UE PAR LA Cour EDH,

ET DE L'AUTONOMISATION DE LA CJCE

PAR RAPPORT AU SYSTÈME DE LA CONVENTION

Nous examinerons le contrôle croissant de la CE/ UE par la Cour EDH (A) et l'autonomisation croissante de la CJCE par rapport au système de la Convention (B).

A- LE CONTRÔLE CROISSANT DE LA CE/UE PAR LA Cour EDH125(*)

L'analyse de la jurisprudence de la Cour EDH en la matière  laisse clairement apparaitre une situation assez paradoxale qui se situe entre une extension croissante du contrôle de la Cour au champ des différents actes communautaires quelle que soit leur nature, ( par le biais du contrôle des actes nationaux, la Cour de Strasbourg menaçant même souvent de mettre en cause la Communauté en elle-même par le biais de la responsabilité des Etats-membres ) d'une part ; et l'admission, d'autre part , de plus en plus prononcée des limites ( toutefois ambiguës ) à un tel contrôle . On est donc en présence d'une jurisprudence « en dents de scie ».

1- L'extension du contrôle de Strasbourg en fonction de la nature des

différents actes de droit communautaire en cause

Face aux limites du système de protection des droits de l'Homme de la CJCE, les citoyens de l'Union qui s'estimaient victimes de violations des droits que leurs reconnaissaient la CEDH, par les Institutions communautaires, se sont retournés vers la Cour EDH qui a progressivement étendu son contrôle en fonction de la nature juridique de l'acte communautaire en cause. Le mouvement peut être résumé en quatre points : contrôle des actes nationaux pris en exécution du droit communautaire (a) , contrôle des actes découlant du droit communautaire dérivé (b), contrôle des actes découlant du droit communautaire primaire (c), contrôle des actes découlant du droit communautaire dérivé, lorsque l'Etat membre n'a visiblement pas exercé son pouvoir d'appréciation (d).

a - Contrôle des actes nationaux pris en exécution du droit communautaire

Au départ, la Commission européenne des droits de l'homme écartait les recours dirigés contre la Communauté en tant que telle ,et portant sur le droit primaire , au motif qu'ils étaient irrecevables ratione personae .Dès lors que la Communauté n'était pas partie à la Convention , la Commission a considéré que les Etats- membres de la Communauté ne pouvaient être tenus responsables des décisions du Conseil, dans la mesure où ,en participant à l'adoption de ces décisions, ils n'avaient pas exercé leur « juridiction » au sens de l'art 1 de la CEDH ( Voir affaire CDFT c Communautés européennes126(*) ) . Les organes de Strasbourg se refusant de se déclarer compétents pour examiner les requêtes concernant le droit communautaire dérivé, ont par contre accepté d'examiner sur le fond des requêtes portant sur les actes nationaux pris en exécution du droit communautaire.

Lorsque les Etats membres disposent d'une marge d'appréciation dans la mise en oeuvre du droit communautaire, leur responsabilité, quant à la manière dont ils exécutent, a été affirmée (Arrêt Procola c Luxembourg127(*) ; voir également Etienne tête, Requête n°1123 / 84, décision du 9 déc. 1987) .Lorsque les Etats membres ne disposent pas par contre d'une telle marge d'appréciation, leur responsabilité a été exclue, étant donné que la Communauté européenne assure une « protection équivalente » des droits fondamentaux (Comm. Eur. .DH M&CO c République fédérale d'Allemagne 128(*) .

Dans l'arrêt du 15 nov.1996, la Cour EDH estime que le fait que le droit interne applicable s'inspire presque mot pour mot d'une directive communautaire ne le soustrait pas à l'empire de la Convention.129(*)

b- Contrôle des actes découlant du droit communautaire primaire

Dans l'arrêt Matthews en 1999 , la Cour de Strasbourg a clairement établi sa compétence en matière de contrôle du droit communautaire primaire , pour lequel la CJCE n'est pas compétente .Dans cette affaire, la Cour a surmonté le problème délicat de la personnalité juridique distincte des Communautés européennes au moyen de la « théorie de l'effet utile » de la Convention, elle a estimé qu'il ne serait pas possible de maintenir un contrôle efficace du respect de la CEDH par toutes les Parties contractantes , s'il ne lui était pas possible d'exercer son contrôle sur les actes des Etats ,également dans les domaines des pouvoirs transférés . En effet, le transfert de souveraineté ne devrait pas se traduire par l'impossibilité de contrôler les pouvoirs transférés en termes de respect des droits fondamentaux. Selon la théorie de la « succession d'Etat », les Etats -membres de la Communauté devraient être tenus responsables des violations de la CEDH découlant des actes des Institutions communautaires.

c- Contrôle des actes nationaux traduisant sans appréciation le droit

Communautaire €dérivé

L'arrêt Bosphorus130(*) fût une autre étape , en ce qu'il posait le problème de la responsabilité d'un Etat membre du fait d'une atteinte portée aux droits de l'homme ,résultant du droit communautaire dérivé .La Cour accepte reconnait sa compétence pour vérifier la conformité au regard de la Convention d'une mesure nationale prise sur le fondement d'un règlement communautaire ( droit communautaire dérivé) ; « ...La Cour a (...) jugé que les parties contractantes sont responsables au titre de l'art 1 de la Convention de tous les actes et omissions de leurs organes ,qu'ils découlent du droit interne ou des nécessités d'observer des obligations juridiques internationales .Ledit texte ne fait aucune distinction quant au type de normes ou de mesures en cause... » § 153. Cela constitue une avancée, qui viendra atténuer certainement le désenchantement d'une partie de la doctrine qui avait reproché à l'arrêt M&Co d'avoir conféré une quasi -totale immunité au droit communautaire131(*) .L'une des particularités de cette affaire tient en ce que l'Etat-membre n'avait pas exercé son pouvoir d'appréciation .Ce qui naturellement aboutissait à un contrôle indirect mais certain de l'acte du droit communautaire , lors même que la Communauté n'a pas formellement adhéré à la Convention . Toute chose qui conduit Benoit Rohmer à voir en cet arrêt une adhésion contrainte de l'Union à la Convention132(*).La Cour de Strasbourg a posé toutefois des limites à son contrôle, limites qui demeurent hélas ! assez ambiguës.

2- L'ambiguïté des limites du contrôle de la CE/UE par la Cour EDH

L'examen de ce point se fera en deux mouvements : Le premier nous permettra d'analyser d'une manière générale l'ambiguïté des limites du contrôle du système communautaire telles qu'elles résultent de la jurisprudence de Strasbourg ; le deuxième nous permettra d'analyser en particulier la limite apportée par l'arrêt Bosphorus.

a- L'ambiguïté des limites du contrôle de la CE /UE par le Cour EDH-

vue générale

Malgré l'extension du contrôle de la Cour EDH aux actes qui trouvent leur source d'une manière ou d'une autre dans le droit communautaire, il y'a des limites que Strasbourg n'a jamais franchies. Autant le dire, ces limites sont plus qu'ambiguës et méritent de ce fait d'être nuancées :

Une chose est claire, la Cour EDH n'a jamais admis sa compétence pour contrôler les actes de la Communauté en tant que tels, c'est- à-dire les actes de l'ordre juridique communautaire qui n'ont pas d'une manière ou d'une autre été insérés dans l'ordre juridique national. Elle a toujours affirmé au fil de sa jurisprudence que la CE/UE n'ont pas adhéré à la CEDH et ne peuvent être mises en cause devant elle .Dans l'arrêt Bosphorus par exemple, s'agissant du transfert de pouvoir à une Organisation , la Cour souligne que «  ...en tant que détentrice des pouvoirs souverains ainsi transférés , l'Organisation internationale concernée ne peut, tant qu'elle n'est pas partie à la Convention ,voir sa responsabilité engagée au titre de celle-ci ,pour les procédures conduites devant ses organes ou les décisions rendues par eux... », et la Cour cite sa jurisprudence pertinente allant dans le même sens 133(*) . Cette limitation se retrouve également dans l'affaire Connolly 134(*)où la Cour rappelle, à propos de la question d'une éventuelle responsabilité de l'Union européenne, que cette Organisation n'a pas adhéré à la Convention et qu'elle ne peut donc voir sa responsabilité engagée au titre de celle-ci . Sans doute dans l'arrêt Matthews comme souligné plus -haut ,la Cour relève que le transfert de souveraineté ne saurait conduire à une immunité des Etats-membres, eu égard au respect des droits fondamentaux .Ce transfert souligne la Cour ,ne pourrait pas se traduire par l'impossibilité de contrôler les pouvoirs transférés en termes de respect des droits fondamentaux . Ce qui pourrait faire penser qu'elle pourrait directement contrôler les actes des Institutions communautaires. Mais dans cet arrêt, il convient de souligner que c'était la loi électorale nationale qui était l'objet du contrôle, bien que celle-ci traduisait fidèlement l'acte du Parlement européen de 1976.

La situation la moins claire concerne l'hypothèse des requêtes dirigées contre les Etats-membres pris collectivement. Certains justiciables ingénieux ont plusieurs fois essayé de mettre en cause la CE/UE en passant par le moyen détourné d'une responsabilité collective des Etats-membres. La Cour, après quelques hésitations, a fini par établir clairement comme on vient de le voir, son incompétence rationae persone, du fait que la Communauté / UE n'ont pas adhéré formellement à la Convention (voir aussi arrêt CDFT c/ Communautés européennes supra). Mais cette position de la Cour semble plus qu'ambiguë .D'une part, elle intervient après une série d'espèces qui donnent quand-même à réfléchir : d'abord, dans l'arrêt du 4juillet 2000135(*) (Société Guérin Automobile c les quinze Etats -membres),la requête était dirigée contre les 15 Etats -membres .Dans le souci de contourner l'incompétence rationae persone, de la Cour EDH ; s'agissant des mesures prises par les Institutions communautaires, la requérante a tenté de mettre en cause la responsabilité collective des Etats-membres. La Cour rejette comme irrecevable rationae materiae, en tant qu'elle échappe au champ des droits garantis par la Convention et ajoute une précision qui se passe de tout commentaire : elle souligne en effet que , dans l'hypothèse où la requête n'aurait pas été irrecevable en tout état de cause, elle aurait été contrainte de statuer sur la question portant sur la recevabilité de la requête dirigée contre les 15 Etats contractants ; ensuite, l''arrêt Senator lines eut été une occasion pour la Cour de préciser sa position dans cette problématique136(*) . Dans cet arrêt, la requête était dirigée à nouveau contre les 15 membres de l'UE pris collectivement .La cour EDH va déclarer la requête irrecevable rationae materiae. Il était reproché à la Commission européenne d'avoir violé les articles 6 et 13 de la CEDH. Il importe, pour comprendre l'arrêt de la Cour de prendre en compte comme le suggère Laurent Scheeck137(*) , les antécédents intervenus trois semaines avant que la Cour ne prenne sa décision, notamment la décision du tribunal du 30 septembre 2003 qui annule l'amende portée contre la société Senator lines. De ce fait la Cour decide :  « ...The applicant was inadmissible by declary that the applicant company could not claim to be a victim of a violation of the ECHR ,as there was not clearly no violation left, after the annulment of the annulment of the fine and because of the CFI decision of the 30 September 2003 .»138(*); enfin l'arrêt Segi et Gestoras pro-amnistia et autres c. Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, RU et Suède 139(*) : l'affaire concerne la lutte contre le terrorisme . Les requérants inscrits sur une liste annexée à la position commune 2001 /931/PESC ( pour rappel, aucun contrôle juridictionnel des mesures adoptées dans le cadre du titre V TUE n'existe à ce jour dans le système communautaire , et le recours en annulation n'est pas ouvert aux particuliers dans le cadre du titre VI TUE ) vont introduire un recours devant la Cour EDH pour violation de leur droit à la présomption d'innocence , de leur liberté d'expression et d'association ainsi que du droit au recours effectif et à un procès équitable. La Cour à jugé la requête irrecevable, estimant que les requérantes ne pouvaient se prétendre « victimes » d'une atteinte à leurs droits en raison de l'adoption des positions communes 2001/930/PESC et 2001/931/PESC .La Cour rappelle que « l'existence d'un droit au recours individuel ne peut avoir pour objet de prévenir une violation de la Convention » . Elle juge qu'en l'espèce la simple présence du nom de la requérante sur la liste constitue « un lien trop tenu, pour justifier l'application de la Convention » et relève que cette présence peut être gênante, sans en tirer les conclusions qui s'imposent. La cour se prononce ici encore sur sa compétence matérielle, sans donner des précisions sur sa compétence rationae persone.

Ces différentes solutions laissent persister de nombreuses ambiguïtés. Cette jurisprudence se situe dans le continium de ce que A Bultrini140(*) qualifiait de « jurisprudence attentiste... », C'est -à- dire qu'elle s'inscrit dans l'attente d'une adhésion de la CE/UE à la Convention. Elle ne traduit donc nullement une certaine courtoisie accordée au système communautaire par le système conventionnel. De plus, cette limitation tient plus, comme on l'a indiqué plus haut, à la situation de grande injustice à laquelle une admission de la responsabilité de la CE/UE aurait conduit , autant pour les Etats-membres qui devraient alors être tenus responsables des actes à l'adoption desquels ils n'ont pas forcement participé ou pour lesquels ils ne pourront seuls apporter des réparations, compte tenu de la répartition des compétences dans l'Union européenne ; que pour les Institutions de la CE/UE qui auraient été mises en cause sans qu'elles ne soient représentées à Strasbourg, et sans possibilité par ailleurs de se défendre au cours de la procédure.

La deuxième ambiguïté liée à cette limitation ressort des termes même de l'arrêt Connolly. La Cour souligne en effet que les griefs du requérant sont incompatibles ratione personae, « ...du moment où à aucun moment, l'un ou l'autre Etat n'est intervenu dans le litige opposant les organes de la Commission au requérant ... ». Elle conclut que le requérant ne relevait pas de la juridiction des Etats-membres au titre de l'art 1 de la CEDH. Cette précision laisse penser que si l'un de ces Etats était intervenu dans la procédure, elle se serait déclarée compétente rationae personae. La cour introduit la notion « d'imputabilité » qui doit être encore clarifiée ; elle souligne en substance « qu'en conséquence, les violations alléguées de la Convention ne sauraient être imputées aux Etats mis en cause dans la présente affaire».

Une troisième situation concerne les actes des Etats-membres qui traduisent fidèlement des normes communautaires sans exercice par ces derniers d'une marge d'appréciation. Contrôler ces actes reviendrait indirectement, mais certainement à contrôler les actes de la CE/UE. La jurisprudence de la Comm EDH, de l'ancienne et de la nouvelle Cour EDH dans ce domaine, n'est également pas à une ambiguïté près .Selon A Bultrini, la Commission a toujours considéré que la responsabilité d'un Etat-membre pouvait être engagée lorsqu'il mettait en oeuvre une réglementation communautaire. Cet auteur souligne avec pertinence que la jurisprudence de la Commission au départ semble faire abstraction de la marge d'appréciation dont disposent les Etats. La seule véritable limite serait l'hypothèse des actes étatiques d'exécution purement formelle d'actes communautaires de droit dérivé (Aff. M&Co infra)141(*). Dans cette dernière hypothèse la Cour établit une « présomption d'équivalence ».

Quoi qu'il en soit, il est moins probable que la Cour se prononce à l'avenir sur ces différentes incertitudes, au regard de son arrêt Bosphorus, qui incontestablement vient restreindre le contrôle qu'elle fera désormais des actes ayant leur source dans le droit communautaire. Cet arrêt appelle toutefois de nombreuses observations et laisse des questions en suspens.

b- L'arrêt Bosphorus et les limites du contrôle de la CE/UE

par la Cour EDH : ambiguïtés et incertitudes juridiques

La cour adopte dans cet arrêt, parmi plusieurs solutions qui s'offraient à elle, une solution prudente, sans renoncer pour autant à son contrôle. Après avoir relevé que « la Convention n'interdit pas aux parties contractantes de transférer des pouvoirs souverains à une Organisation internationale [ y compris supranationale ] à des fins de coopération dans certains domaines d'activité » § 152 , elle souligne que « ...mais il serait contraire au but et à l'objet de la Convention que les Etats soient exonérés de toute responsabilité au regard de la Convention dans le domaine d'activités concerné  » . Les garanties prévues par la Convention pourraient être limitées ou exclues discrétionnairement, et être par là même privées de leur caractère contraignant ainsi que de leur nature concrète et effective .l'Etat demeure responsable au regard de la Convention pour les engagements pris en vertu des traités postérieurement à l'entrée en vigueur de celle-ci. La Cour reconnait la spécificité du système juridique communautaire, en particulier la singularité de ses rapports avec les ordres juridiques nationaux, et érige les particularités de cet ordre juridique en « intérêt général », reconnu par l'ordre juridique de la Convention. La Cour souligne en substance que ,la saisie d'un aéronef au titre de sanctions contre l'ex- république de Yougoslavie ne procédait pas de l'exercice par les autorités irlandaises d'un quelconque pouvoir d'appréciation, mais plutôt du respect par l'Etat irlandais de ses obligations juridiques résultant du droit communautaire, et en particulier de l'art 8 du Règlement n°990/93 142(*) .Pour concilier le respect de la Convention avec l'intérêt communautaire , elle a recours à une présomption de conformité du droit communautaire avec la Convention , présomption qui peut être renversée si le droit communautaire n'offre pas une protection équivalente à celle garantie par la Convention : «... Une mesure de l'Etat prise en exécution de pareilles obligations juridiques doit être réputée justifiée, dès lors qu'il est constant que l'Organisation en question accorde une protection à tout le moins équivalente à celle assurée par la Convention » § 155 .Et dans l'affaire Bosphorus, on ne saurait considérer que la protection des droits de la société requérante était entachée d'une « insuffisance manifeste » . Par équivalente, la cour entend une protection comparable et non identique, concernant tant le fond que les procédures de garantie.

Les incertitudes juridiques et ambiguïtés lancées par l'arrêt Bosphorus, tiennent en trois raisons au moins : la première raison est liée au caractère « réfragable » de la présomption .Certes la solution dans cet arrêt, comme le relève J P Jacqué143(*), n'est pas sans rappeler le modèle Solange II145(*),  (du coup on pourrait aujourd'hui s'interroger en passant sur le constat d'une « intransposabilité » du modèle Solange II aux rapports entre Luxembourg et Strasbourg146(*)). Mais il convient de noter que dans l'arrêt Bosphorus ,la Cour EDH se réserve discrètement la possibilité de renverser la présomption et de mettre en cause les actes de droit communautaire . A côté du contrôle abstrait qu'elle opère, elle effectue également un contrôle concret, au cas par cas .Ce qui permet de faire clairement le départ entre « la présomption » établie par la Cour constitutionnelle allemande dans l'affaire Solange II et celle qu'établit la Cour EDH. Donc rien ne garantit l'impossibilité d'un revirement ; la deuxième grande incertitude est liée au manque de clarté quant aux notions utilisées et à leur implication. Ce qui ouvre directement la voie à de nombreuses controverses. Beaucoup critiquent , par exemple, la référence à une « insuffisance manifeste » comme un critère devant entrainer une baisse de standard de protection. Le problème, comme l'a souligné la doctrine résultait de ce qu'il fallait entendre par « insuffisance manifeste »147(*) . Kathrin Kuhnert souligne à ce propos que :

 « It may be assumed that a deficiency arises when the ECJ lacks competences been too restrictive in allowing individual 148(*)access to it, or in case of an obvious missing or misapplication by the ECJ of an ECHR right, or of a deviation from well etablished of the ECtHR .However, not every deviation from the ECtHR's case-law can be considered shortcoming, as Article 53 ECHR ensures that allowing more rights or interpreting that broadly will be give legitimate effect as well.»

La notion « d'insuffisance manifeste » pouvant renverser la présomption a suscitée de nombreuses critiques eu égard à ses implications. Beaucoup y ont vu la consécration d'un seuil d'exigence relativement bas (voir sur ce point l'opinion concordante de l'arrêt Bosphorus) ; c'est aussi notre sentiment. Au regard de ses premières applications par la Cour149(*), « le critère d'insuffisance manifeste » semble introduire une condition supplémentaire (du moins de fond), pour l'accès à la Cour EDH des requérants victimes d'une violation ou d'une omission qui trouve sa source dans le système communautaire. Il faut désormais, outre les conditions traditionnelles, renverser la présomption de conformité aux droits fondamentaux des actes communautaires .C'est un critère structurel qui consiste à apporter la preuve d'un dysfonctionnement structurel. Ce qui est une vraie gageure. il va certainement entrainer une baisse dans la garantie des droits qu'offrait jusque- là la Cour EDH. Comme le souligne Clémence Bouin. C'est le recours individuel qui fait d'ailleurs l'originalité de cette juridiction international qui se trouve ainsi menacé. Il faut noter en plus que ce critère ne sera appliqué que si la première condition du contrôle de la Cour EDH est remplie à savoir l'exercice par l'Etat- membre de son pouvoir d'appréciation.

Dans le même sens, la présomption de conformité aux droits fondamentaux du droit communautaire pose en elle -même quelques difficultés. Comme on vient de le souligner, la solution si elle se rapproche du modèle Solange II, ne lui est toutefois pas comparable en tous points ( supra ) comme l'a si bien montré le professeur Harastch150(*) .Nous nous rallions à une partie de la doctrine pour regretter les implications d'une telle approche . Ce n'est pas tant la doctrine de la protection équivalente dont Clémence Hardy souligne d'ailleurs qu'elle n'est pas nouvelle151(*), que sa signification et le raisonnement de la Cour qui font problème . Si la Cour prend en compte( § 159 ,§ 165) aussi bien la place des droits fondamentaux dans l'Union européenne que l'accès au juge , pour arriver à la conclusion que la présomption d'équivalence peut s'appliquer en l'espèce , on peut regretter le fait qu'elle ne pose pas des conditions devant permettre à la dynamique du respect des droits fondamentaux dans l'UE de suivre son cours : elle aurait pu exiger, par exemple ,la reconnaissance de la valeur juridique de la Charte151(*)et la nécessité de faciliter un plus grand accès des recours individuels152(*).

Autrement dit, on reproche à la Cour à la fois de fermer les yeux sur les travers du système communautaire qui sont bien connus et décriés par tous153(*) ; le système communautaire pourrait rester dans le même état sans avoir à craindre un renversement de la présomption. Certes la Cour prend le soin de souligner qu'une telle présomption est renversable dans le cadre d'une affaire donnée, si elle estime que la protection des droits donnée par la Convention est entachée « d'une insuffisance manifeste » . Selon la doctrine, cette hypothèse ne peut se produire que dans deux cas :soit dans le cas d'une évolution de la jurisprudence de la Cour , soit dans celui d'une régression du système communautaire , pour reprendre ici les deux hypothèses potentielles de renversement de la présomption posées par Kauff Gazin154(*) .La solution dégagé par Strasbourg n'est pas trop loin d'un « chèque en blanc » donné au système communautaire avec toutefois un droit de regard.

- La troisième incertitude est liée à l'avenir de la jurisprudence Bosphorus ; la place qu'elle occupe dans la jurisprudence de la Cour EDH ne nous permet pas d'écarter l'hypothèse d'un revirement. A ce propos il importe de remarquer que la Cour est restée constante, et a, en même temps, évolué par rapport à sa jurisprudence .Ainsi la Cour n'hésite pas à examiner la conformité d'un acte mettant en oeuvre le droit communautaire à la Convention. Elle estime que ( § 153) l'art 1 de la CEDH ne fait aucune distinction quant au type de normes ou de mesures en cause , et ne soustrait aucune partie de la « juridiction » des Parties contractantes à l'empire de la Convention .Elle avait par le passé affirmé sa compétence pour apprécier aussi bien la conformité d'un acte mettant en oeuvre un règlement communautaire155(*) que celle d'un acte pris en application d'une directive communautaire155(*) . De plus ,pour apprécier la responsabilité de l'Etat irlandais ,la Cour prend en compte le pouvoir d'appréciation de l'Irlande à travers un ensemble d'éléments ,pour arriver à la conclusion que l'atteinte litigieuse ne procédait pas de l'exercice par les autorités irlandaises d'un quelconque pouvoir d'appréciation ,que ce soit au titre du droit communautaire que du droit Irlandais, mais procédait plutôt du respect par l'Etat irlandais de ses obligations juridiques résultant du droit communautaire et en particulier de l'art 8 du règlement ( CEE n°990/93) . Selon Clémence Hardy156(*) , si une marge de manoeuvre avait été laissée à l'Etat- membre dans le processus d'intégration de l'acte communautaire dans son ordre juridique, la Cour aurait alors considéré cet acte national comme un acte ordinaire de l'Etat-membre, et aurait exercé un contrôle habituel de l'acte en question. Cette solution n'eut à l'évidence pas été sans rappeler la jurisprudence de la Cour dans les affaires Procola et Cantoni (supra). En revanche, cet arrêt semble être un revirement par rapport à la jurisprudence Matthews ( supra ) où la Cour avait été formelle en affirmant que les Etats- membres devraient être tenus responsables des violations de la Convention découlant des Institutions communautaires . On se rappelle que dans cette affaire la Cour avait contrôlé la conformité à la Convention d'un acte de droit communautaire primaire, ne laissant par définition pas de marge d'appréciation aux Etats-membres. Mais ici encore, il faut le préciser, c'était la mesure nationale- la loi électoral du RU quoique traduisant fidèlement le contenu de l'Acte du Parlement européen de 1976, qui était l'objet de contrôle, et non cet Acte en lui-même. Au total l'arrêt Bosphorus laisse planer des incertitudes juridiques, il ne peut suffire à régir les rapports entre Luxembourg et Strasbourg.

Du côté de Luxembourg, le duel se traduit par une autonomisation croissante par rapport au système de la Convention.

* 1 Soulignons que la terminologie est l'objet d'une déroutante controverse ; entre autres expressions utilisées, on peut citer « Droits fondamentaux » ; « Droit de la personne Humaine  » ... Voir les précisions relatives à la controverse sur la dénomination, sur le site www.aidh.org/droits .Nous utiliserons indifféremment dans notre exposé l'une ou l'autre, pour faire l'économie des discussions sur ce point.

* 2 Frédéric Sudre ; Droit international des Droits de l'Homme Puf, «Droits fondamentaux » 4ème Ed 1999 N° 4 in fine.

* 3 J Mourgeon ; Les Droits de L'Homme « Que sais-je ? », Puf 6ème Ed 1996, P6.

* 4 A ce titre on peut citer certains instruments non- européens comme ,la Convention américaine relative aux droits de l'Homme du 22 novembre 1969 , entrée en vigueur en 1976, complétée par le protocole du 17 novembre 1988 traitant des droits économiques ,sociaux et culturels, elle institue un mécanisme juridictionnel- la Cour interaméricaine des droits de l'Homme ; on peut également citer dans le cadre africain , la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples ,adopté le 27 juin 1981 à Nairobi ,par la Conférence de L'OUA et entré en vigueur en 1986, dont la sauvegarde est confiée à la Cour africaine des droits de l'Homme .

* 5 Riccardo Guastini ; Réflexions sur les garanties des droits constitutionnels et la théorie de l'interprétation ; RDP, 4ème trimestre, 1991 ; P 1079 et s...

* 6 La CEDH a été instituée dans le cadre du Conseil de l'Europe, institué lui- même par le traité de Londres du 5 mai 1949, au départ 10 Etats membres, ils sont aujourd'hui au nombre de 47 ; J P Costa ; La charte des droits fondamentaux de Nice et la problématique de l'adhésion à la Convention, (Florence, Institut Universitaire Européen ; 16 janv. 2004 ; P1).

* 7 Elle a quant-à elle été instituée par le traité de Paris du 18 avril 1951, avec pour mission principale de veiller au respect du droit communautaire ; J P Costa ; La Charte...op. Cit ...Ibidem.

* 8 Signée le 04 novembre 1950 et entrée en vigueur en 1953, sa dénomination officielle est : Convention européenne pour la sauvegarde des droits et des libertés fondamentaux .Depuis l'entrée en vigueur de la CEDH , 13 protocoles additionnels ont été adoptés auxquels on ajoutera le protocole 14 qui attend encore la ratification de la Russie ; les protocoles n°1 , 4 ,6,7 , 12 et 13 ont ajouté des droits et des libertés à ceux consacrés par la Convention ; le protocole n°2 a donné à la Cour le pouvoir de rendre des avis consultatifs ;le protocole n°9 a ouvert aux requérants individuels la possibilité de porter leur cause devant la Cour, sous réserve de la ratification de cet instrument par l'Etat défendeur et de l'acceptation de saisine par un Comité de filtrage, le protocole n°11 a restructuré le mécanisme de contrôle ; les autres protocoles concernaient l'organisation des Institutions mises en place par la Convention et la procédure devant être suivie devant eux.

* 9 Sean Gabb ;A bill of rights for Europe; Published by the Adam Smith Institute , London .

* 10 Cette jurisprudence constante a été rappelée dans l'affaire Kadi de la CJCE ; Affaires jointes C-402/05P et C-415/05P ; Yassin Abdullah Kadi, Al Barakaat International Foundation, du 03 sept 2008, pt 283. Elle a été affirmée pour la première fois dans l'arrêt Stauder du 12 nov 1969, puis réaffirmée dans l'arrêt Internationale Handelgeselschaft.

* 11 Elle s'inscrit d'ailleurs dans une problématique plus générale, résultant de la coexistence bien connue de deux Europes, celle de Jean Monnet et celle de Renes Cassin, nous empruntons le symbolisme à E Decaux ; L'Europe et ses Miroirs Etudes n°1, juillet-déc. 2001 ; P 5. 

* 12Citons à titre illustratif l'ouvrage collectif (dir.A Fenet). Coexistence des systèmes de protection des droits de l'Homme en Europe : Enjeux européens ; Puf 1998 .

* 13 C'est certainement, consciente de la nécessité des études croissantes en la matière que, concluant un magnifique ouvrage collectif sur le plurijuridisme, Mireille Delmas Marty affirmait : « Nous avons besoin de tous les talents, internistes, comparatistes et internationalistes, théoriciens et praticiens , juristes, sociologues et anthropologues du droit , tous ceux dont la vision s'ouvre aux yeux du multiple et du complexe ... » ; Le Pluri- juridisme ; Actes du 8ème congrès de l'association internationale de méthodologie juridique, Aix- en- Provence 4-6 sept ; Presses universitaires d'Aix Marseille 2005 .

* 14 Dans l'espoir qu'il entrera en vigueur . Après le referendum Irlandais du 12 juin 2008 rejetant ce traité ,les doutes sont désormais permis . Pour les innovations de ce traité dans la protection des droits de l'homme au sein de l'UE, voir Jeanne Dupendant ; Le futur panorama des droits fondamentaux au sein de l'UE à la suite de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne ; http:// m2bde.u-paris10 .fr/blogs...

* 15 F Tulkens et Johan Callewaert ; La Cour de justice, la Cour européenne des droits de l'homme et la protection des droits fondamentaux, in L'avenir du système juridictionnel de l'Union européenne Ed (Marianne Dony et E. Bribosia.) ; Bruxelles 2001.

* 16 On se rappelle que dans l'avis 2 /94, rendu en 1996 à la demande du Conseil de L'UE, la CJCE avait indiqué que pareille adhésion (de l'UE à la Convention), en raison de son envergure constitutionnelle exigeait une base juridique, une disposition des traités, et que l'UE n'avait pas la personnalité juridique internationale pour le faire.

* 17 Marianne Dony ; Droit de l'Union Européenne .Ed de l'université de Bruxelles, 2008, P 47 et s. On se rappellera que beaucoup stigmatisaient justement cette absence de valeur juridique contraignante de la Charte , faisant d'elle un simple accord interinstitutionnel et un engagement politique de la part des Etats, la question de son statut et d'une éventuelle inscription dans les sources du droit communautaire ,soulevée en 2000 a été renvoyée à la Conférence intergouvernementale de 2004 ; la Convention sur l'avenir de l'Europe n'a pas permis aux Etats de mettre d'accord sur la question . Dans un tel contexte , l'innovation du traité de Lisbonne est remarquable .L'art 6 par I se lit comme suit : « L'Union reconnait les droits, les libertés et les principes énoncés dans la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 07 décembre 2000 ,telle qu'adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg laquelle a la même valeur juridique que les traités ».

* 18 Marianne Dony ; Droit...op. Cit. P 289 .

* 19 A Bultrini ( voir son intéressant article intitulé ; La responsabilité des Etats-membres de l'Union européenne pour les violations de la Convention européenne de droits de l'homme imputables au système communautaire ; RTDH , 2002 ; P 7 et 8 .) mettait justement en garde contre le risque de céder à cette tentation d'élever le débat au plus haut degré de la théorie du droit , tout en soulignant la nécessité de préférer l'approche pragmatique aux débats théoriques, ceci au plus grand bien des droits fondamentaux qui commanderaient selon lui de s'en tenir à « l'essentiel » plutôt qu'aux aspects formels . Cette dimension théorique nous semble pourtant plus qu'intéressante, car la relation entre les Cours européennes pourrait peut-être permettre de dégager les jalons d'une théorie moderne du droit à laquelle nous avons fait référence. De même, le principal reproche qu'en cours une lecture très concrète du problème est qu'elle s'en tient au résultat et laisse de côté les causes véritables qui rendent ce résultat possible, elle est de ce fait fortement réductrice.

* 20 Par euphémisme, on parle plutôt de pluralisme juridique ou de pluri juridisme ; parmi ces auteurs citons Mireille Delmas Marty ; Le pluralisme ordonné ; les forces imaginantes du droit ; Ed Seuil 2006.

* 21 Mireille Delmas Marty, Introduction aux quatre leçons intitulées « L'Europe, laboratoire de la mondialisation du Droit » , données dans le cadre des cours du collège de France ; décembre 2008.

* 22 A ce propos, l'arrêt Bosphorus a mis en évidence les difficultés posées par ce pluralisme, la Cour s'est en effet livrée dans cet arrêt à un jeu périlleux d'équilibriste à la Thémis, il fallût en fait, jongler entre l'intérêt de la communauté internationale ( la lutte contre le terrorisme) , l'intérêt communautaire ( l'intégration européenne ) et l'intérêt des Etats ( la nécessité de remplir leurs engagements conventionnels ) ; Cour EDH Bosphorus Hava ,Yollari Turizim Ve Ticaret As contre Irlande 30juin 2005 , Req n° 45036 .98 ) . Voir sur ce point Fabienne Kauff Gazin ; L'arrêt Bosphorus de la CEDH : Quand le juge de Strasbourg pallie le retard du constituant de l'UE en matière de protection des droits de fondamentaux ; L'Europe des libertés N° 17.

* 23 J F Renucci ; Droits européen des droits de L'homme LGDJ 2ème Ed ; P8.

* 24 C'est d'ailleurs aussi l'opinion de J P Jacqué , qui relève qu'« ...une vision fondée sur la hiérarchie , celle de la pyramide kelsenienne , ne permet pas aujourd'hui de rendre compte de la réalité , si ce n'est au prix d'une analyse terriblement réductrice...Elle [vision kelsenienne] reste désarmée face aux rapports complexes entre systèmes . » ;J P Jacqué Droit constitutionnel national , Droit communautaire ,CEDH, Charte des Nations Unies ;L'instabilité des systèmes juridiques ; Puf / RFDC 2007-n°69 .

* 25 Voir à ce sujet, la deuxième leçon de Mireille Delmas Marty intitulée « Reformer le formalisme juridique ...elle constate en effet le remplacement du modèle de subordination par la coordination.

* 26 Voir M Van de Kerchove et François Ost ; De la pyramide au réseau ? Pour une théorie dialectique du droit ; Publication des facultés universitaires de Saint Louis 2002. L'ouvrage constate la crise du modèle pyramidal et son remplacement par la des paradigmes concurrents comme celui du droit en réseaux, sans que disparaissent pour autant des résidus du premier, ce qui complexifie encore la situation ; P14.

* 27 Denys Simon ; Des influences réciproques entre CJCE et CEDH : « Je t'aime, moi non plus ... » ; Le Seuil /Pouvoirs 2001/1 ; N° 96, disponible sur http// www .revue-pouvoirs.fr/Des-influences réciproques-entre.html.

* 28 Les avis sont partagés sur la question, certains affirment péremptoirement que la guerre des juges européens n'a pas lieu (Ex : E Decaux ; L'Europe à ses miroirs supra.) ; D'autres en revanche (Renucci ; Droit européen ...op... cit; P567.) reconnaissent que malgré l'interdépendance des systèmes, il y'a des risques importants de conflits.

* 29 François Chavrette et Hugo Cyr ; De quel positivisme parlez-vous ; http : //papyrus .bib.umontreal.ca/jspui.

* 30 Voir sur ce point Marcel Waline « positivisme philosophique, juridique et sociologique, in mélanges Carré de malberg ; Paris, Sirey, 1933, P517et s...

* 31 Dictionnaire Nouveau Petit Robert, Grand format, 2009.

* 32 Il souligne en effet : « il existe ...une certaine rivalité entre les deux Cours en matière de droits de l'Homme, à Luxembourg on préserve jalousement l'interprétation autonome des droits énoncés dans la Convention européenne...Dans le même temps à Strasbourg ,on vérifie la compatibilité du droit communautaire primaire avec la convention et ses protocoles ... » Olivier Lord ; Systèmes juridiques nationaux et Cours européennes : De l'affrontement à la complémentarité ?; Pouvoirs N° 96 janv. 2001 ; P 15 . Cette affirmation doit certainement être nuancée, voir la contribution de F Tulkens et Johan Callewaert (la Cour de justice, la Cour européenne et la protection des Droits fondamentaux), à l'ouvrage collectif ; L'avenir du système juridictionnel de L'Union Européenne (dir. M Dony et E Bribosia) ; Op...Cit. P 177 et S.

* 33 Voir sur ce point Spielmann Dean ; Jurisprudence des juridictions de Strasbourg et Luxembourg dans le domaine des droits de l'homme : Conflits, incohérence et complémentarités ; dans Alston philip ; L'UE et les droits de l'homme ; BXL 2001.

* 34 J P COSTA ; Discours d'ouverture de l'année judiciaire 2008 ; Rapport de la CEDH 2007.

* 35 Olivier de Schutter a si bien souligné cette fonction instrumentale originelle des droits fondamentaux dans le cadre de la CE/UE, il relève en effet : « ...Plutôt que d'être poursuivis pour eux-mêmes, les droits fondamentaux sont apparus jusqu'à présent en ordre dispersé, en fonction des nécessités liées aux progrès de la construction européenne » ; Olivier de Schutter, Les droits fondamentaux dans le projet européen. Des limites à l'action des institutions à une politique des droits fondamentaux, in Une constitution pour l'Europe ; Réflexions sur les transformations du droit de l'Union européenne, Ed Larcier ,2 Ed. file://les droits fondamentaux dans le projet européen .htm ; P1

* 36 Il convient de souligner que cette opinion est en tout cas discutable, voir sur ce point la brillante thèse de madame Emmanuelle Bribosia, soutenue à l'ULB en 2000 ; La protection des droits fondamentaux dans l'ordre juridique communautaire : le poids respectif des logiques fonctionnelle et autonome dans le cadre normatif et jurisprudentiel (introduction) .

* 37 On peut citer plusieurs arrêts dans ce sens ; CJ 13 juillet 1989, Aff. 5/88, Wachauf ; Pt 18; Rec. P 2609 ; CJ 11juillet 1989, Aff. 265/ 87, H Schräder HS Kraftfutter Gmb H & Cokg ; Pt 15 ; Rec. P 2237 ; CJ 20 octobre 1991, Aff. C-44 189 G Von Seetzen ; Pt 28 ; Rec. P 5119 ; CJ 13 décembre 1979, Aff. 44 /79 Hauer c/ Land Pfalz ; Pt 29 Rec. P 3727. Source Olivier de Schutter ; P 215.

* 38 Dans ce sens, on remarquera que l'art 3 du statut du Conseil de l'Europe dispose que « tout membre du Conseil de l'Europe reconnait le principe de prééminence du droit et le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction, doit jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales » . De même ,le préambule de la Convention européenne rappelle l'attachement des Etats-parties au « patrimoine commun » § 5 et réaffirme que le maintien de la justice et de la paix repose « sur un régime politique véritablement démocratique », et d'autre part sur « un commun respect des droits de l'homme » .Voir sur ce point le mémoire de Delphine Calonne ; En attendant Senator lines ; Réflexion sur une protection plurielle des droits de l'homme en Europe ; Institut européenne de l'université de Genève ; P 15 .

* 39 Hubert Legal ; Composition et fonctionnement des Cours européennes ; Revue Pouvoirs N° 96 Les Cours européennes ; Luxembourg et Strasbourg, janvier 2001, P65-84.

* 40 Voir sur ce point Olivier de Schutter ; L'influence de la Cour européenne des droits de l'homme sur la Cour de justice des Communautés européennes CRIDHO workpaper 2005/07 , l'auteur relève toutefois que ces précisions de la CJ tiennent en réalité à d'autres raisons qu'à la nature non juridictionnel du Comité des Droits de l'Homme.

* 41 Voir Contribution de E .Bribosia ; Le dilemme du juge national face à des Obligations contradictoires en matière de protection des droits fondamentaux issus des deux ordres juridiques européens. In L'avenir du système juridique de l'UE ...Op...Cit...P 265 et S.

* 42 A ce propos, on constate, une grande confusion entre les termes «  portée des arrêts », « autorité », « influence de la jurisprudence ». En ce qui nous concerne, nous nous posons la question d'une autorité formelle des décisions de l'une sur l'autre et non de leur influence jurisprudentielle.

* 43 Après consolidation réalisée par le traité d'Amsterdam, ce nouvel article 6-1 dispose que : « L'Union est fondée sur les principes de libertés fondamentales, ainsi que l'Etat de droit, principes qui sont communs aux Etats-membres ».

* 44 Cette formule définitive a été consacrée par l'arrêt Wachauf ; CJCE 5/88 ,Hubert Wachauf c.Bundesamt für Ermährung und Forstwirstschaft, arrêt du 13 juillet 1989 ; La référence aux traditions constitutionnelles communes aux Etats-membres de la communauté s'est faite pour la première fois dans l'arrêt Internationale Handelgesellschaft ; CJCE 11/70 , Internationale Handelgesellschaft mbH contre Einfur-und vorratsstelle für Getreide und Futtermittel,arrêt du 17 déc. 1970 ; c'est dans l'arrêt Nold ,CJCE 4/73,Nold Kohlen und BaustoffgroBhandlung contre Commission des communautés européennes, arrêt du 14 mai 1974 ,que la Cour s'est référée aux instruments internationaux concernant la protection des droits de l'Homme auxquels les Etats ont coopéré ou adhéré, et a affirmé qu'ils peuvent également fournir des indications dont il convient de tenir compte dans le cadre du droit communautaire. C'est aussi dans cet arrêt que la CJCE fait référence  pour la première voir à la CEDH ; Raisz Anico, la protection des droits de l'homme au niveau double européen, Miskolc journal of international law, vol 3 (2006) N° 1 ,P 17-37 .

* 45 Françoise Tulkens ; Johan Callewaert ; La Cour de justice, la Cour européenne des droits de l'homme et la protection des droits fondamentaux in L'avenir du système juridictionnel de l'Union européenne ...Op...Cit...P 177 et S.

* 46 Voir sur ce point Simon Denys, Des influences réciproques...Op...Cit...P 36 et s ... L'auteur souligne que c'est dans l'arrêt des « treillis soudés » que le CJCE a abandonné la référence indirecte à la Convention i e de source d'inspiration pour s'en référer directement.

* 47

* 48 Voir sur ce point, Joe Verhoeven ; Précis de la faculté de l'université de Louvain ; Droit international public, Larcier 2000 .P 441 et s ...

* 49 La CJCE a d'ailleurs affirmé que le respect des droits fondamentaux constitue une condition de légalité des actes communautaires, avis 2/94 précité, Pt 34), et que ne sauraient être admises dans la Communauté des mesures incompatibles au respect de ceux-ci (Arrêt Schnidberger, C-112/00, Rec., P, I-5659, Pt73.

* 50 J P Jacqué rappelle en effet de rester très prudent, car cet article exprime une volonté unilatérale de L'Union de s'approprier la Convention comme source d'inspiration et on ne saurait de ce fait parler d'adhésion tacite ...La Cour EDH et la CJCE et la protection des droits de L'homme-Quelques observations, in L'avenir du système juridique de L'Union européenne ; P 257 et S.

* 51 Voir par exemple l'arrêt Marckx de la Cour EDH, du 13 juin 1979.

* 52 Théorie défendue par Michel Troper, elle apparait comme une variante particulière du positivisme juridique, voir aussi la critique d'Otto Pfersmann à ce sujet ; Une théorie sans objet, une dogmatique sans théorie .En réponse à Michel Troper ; RFDC ,2002 /4-N°52, http:// www.cairn.info/article.php,2002/4-N°52; On peut voir aussi Réplique à Otto Pfersmann par Michel Troper ; Puf, RFDC (Revue française de droit constitutionnel), 2002/2-N°50.

* 53 Olivier de Schutter ; L'influence de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme sur la Cour de justice des Communautés européennes ; CRIDHO working paper 2005 /07 ; P 9.

* 54 Denis Simon ; Des influences réciproques...P

* 55 Olivier Le Bot ; La Charte de L'Union Européenne et la Convention de sauvegarde des droits fondamentaux : La coexistence de deux catalogues de droits fondamentaux ; RTDH, N° 2003 /55, P 781 ; Http : www.rtdh.eu/pdf; Voir aussi Simon Denys qui évoque la reconnaissance équivoque du statut de la CEDH (y compris la jurisprudence de la Cour EDH), dans le cadre Communautaire ; Simon Denys, Des influences réciproques...

* 56 Sur cette question , voir aussi l'art de Waebroeck, la CEDH lie t'elle les Communautés , Droit communautaire et droit national ; De Tempel , Bruges , 1965 ; P 305 - 329 ; Voir aussi du même auteur , La Cour de justice et la CEDH , in Cahiers de droit européen N° 5-6 , 1996 , pp 549-553 ;J P Jacque : « La communauté européenne et la Convention européenne des droits de l'homme  » in L .E . ; Pettiti, E Decaux et PH Imbert, la Convention européenne des droits de l'homme, Economica 1999 ; J F Renucci note sur CJCE 28 mars 1996 ; P 499.

* 57 J P Jacqué La Cour de Justice, la Cour européenne des droits de l'homme et les Droits fondamentaux -Quelques observations (à propos de la contribution commune de F Tulkens et Johan Callewaert à ce même ouvrage.) in l'avenir du système juridictionnel de L'UE ; Op...Cit P 260.

* 58

* 59 Pescatore ; « La Cour de justice des Communautés européennes et la Convention européenne des droits de l'homme » in Mélanges Wiarda köln, carl Heymanns Verlags 1988 ; P 450.

* 60 Voir par exp Joël Rideau et J F Renucci ; Dualité de protection européenne des droits fondamentaux : atouts ou faiblesse de la sauvegarde des droits de l'homme ? ; Justices, 1997, N°6.

* 61 J P Jacque ; La Cour de justice, la Cour européenne des droits fondamentaux, Quelques observations in L'avenir du système juridictionnel...Op...Cit.. P 262.

* 62 Lire notamment, Théorie des contraintes juridiques, ouvrage collectif, Troper Michel (dir), Champeil Desplats et Christophe Grzegorczyk ; LGDJ, 2005.

* 63 Olivier de Schutter... L'influence de la Cour européenne des droits de l'homme sur la Cour justice des Communautés européennes...Op...Cit.

47 Plusieurs arrêts de la CJCE illustrent cela, voir notamment CJCE ,15 mars 1986, Marguerite Johnston c. Chief constable of the royal ulster constabulary ; Aff. 222 / 84, Rec. P1651 ; CJCE 28octobre 1992, Ter Voort, Aff. C-219/91, Rec. P5485 ;

* 64 CJCE arrêt Kadi ....Op...Cit.  Pt 283, voir aussi arrêt du 26 juin 2007, Ordre des Barreaux francophones et germanophones e.a C-305/05, Rec.P .I-5305, Pt 29.

* 65

* 66 Olivier Le Bot, Charte de L'Union européenne et Convention de sauvegarde des droits fondamentaux : La coexistence de deux catalogues de droits fondamentaux ; P 11 ; http : //www.rtdh.eu/pdf.

* 67 Cour EDH ; Arrêt du 11juillet 2002 ; Christina Godwin c. R .U .

* 68 Ces divergences sont l'objet de plusieurs articles et études, Voir par exemple Spielmann Dean . Jurisprudences de Strasbourg et de Luxembourg dans le domaine des droits de l'homme : Conflits, incohérence et complémentarités ; Dans Alston Philip ; L'UE et les droits de l'homme, Bxl 2001 ; Egalement Lawson Rick : Confusion and conflits, Diverging interpretation of human rights in Europe, Volume III; Ed Rick Lawson Matthijs Dordrecht; 1994.

* 69 Voir sur ce point Laurent Scheeck ; Solving Europe's Binary Human Rights puzzle .The interaction beetween supranational Courts as a parameter of European Gouvernance . L'auteur souligne dans cet article que l'augmentation de l'interdépendance entre les deux cours à donné naissance à une nouvelle forme de diplomatie judiciaire supranationale entre juges européens.

* 70 Raizs Anico ; La protection des droits de l'homme au niveau (double) européen : Les divergences entre deux jurisprudences. Journal of international Law department of the university of Miskolc; Vol 3 (2006), N°1, P 17-37. Cet article est d'ailleurs notre principale source d'informations concernant ces divergences.

* 71 CJCE, Aff. jointes 100 à 103 /80, SA musique diffusion française et Autres c /Commission des Communautés européennes, 7juin 1983.

* 72 CJCE 374/87, Orkem c / Commission des Communautés européennes, 18 oct. 1989.

* 73 Cour EDH, Funke, toutefois comme le souligne Alexova, il restait toutefois la question de l'applicabilité de l'art 6 aux enquêtes menées par la Commission européenne.

* 74 CJCE, C-159/90, the society for the protection of unborn children Ireland Ltd c/ Stephen Grogan et Autres, 4 Oct 1991.

* 75 Rick Lawson; Confusion and conflicts...Op...cit.

* 76 Cour EDH ; Aff Sunday times c. RU 1979 ou encore l'affaire Open door et Dublin well woman c.Ireland de 1992.

* 77 Alexova Borissova; Politique/s des droits de l'homme en Europe entre Strasbourg et Luxembourg : Enjeux et perspectives ; Mémoire de fin d'études de master en Administration publique ; www.ena.fr.

* 78 CJCE ; Aff 257 /85 , Dufay c. PE , 1987 .

* 79 CJCE , Aff 22/84 , Marguerite Johnson c.Chief constable of Royal Ulster constabulary 1986 .

* 80 Cour EDH , Neigel c/ France , 1997 .

* 81 Cour EDH , Lombardo c / Italie 1992 .

* 82 Cour EDH , Massa c / Italie 1993 .

* 83 L'expression est de J Rideau et J F Renucci, Droit européen des droits de l'homme...Op...Cit...P 107.

* 84 Nous empruntons là mutatis mutandis, une image du très regretté professeur Roger Gabriel Nlep, doyen de la faculté de droit de L'université de Douala. Discours inaugural de l'année universitaire 1997. Le juge de L'Administration face aux libertés publiques ; l'auteur qualifiait ainsi la situation délicate du juge administratif dans l'hypothèse de la théorie de la « loi-écran ».

* 85 Voir l'entretien avec Joël Andriantsimbazovina ; La protection des droits de l'homme au niveau européen. Retrouver cet entretien sur le portail des livres et des idées .mht.

* 86 Emmanuelle Bribosia, Le dilemme du juge national face à des obligations contradictoires en matière des droits fondamentaux issus des deux ordres juridiques européens ; in L'avenir du système juridictionnel de l'union européenne. Op..cit P 267.

* 87 Olivier de Schutter , L'Adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme comme élément du débat sur l'avenir de l'Union, in L'avenir du système juridictionnel de l'Union européenne ...Op cit..P 205 et s...

* 88 Cette triste option est d'ailleurs soulignée par J P Jacqué qui relève que : «...Le risque est alors pour les Etats- membres qui, confrontés à des indications contradictoires, doivent choisir entre violer soit la Convention, soit le droit communautaire. » ; J P Jacqué ; Droit constitutionnel national, Droit communautaire, CEDH...Op...cit ; P 21  et 35.

* 89 Voir Emmanuel Laurent ; L'exécution des arrêts de la CJCE en matière de manquement d'Etats ; disponible sur http//helios.univ-reims.fr/lobos.CERI.

* 90 C'est ce que souligne d'ailleurs avec regret J P Costa, président de la Cour EDH ; « Nos arrêts se heurtent souvent à des retards d'exécution, voire à des refus d'exécuter...Il faut à notre cour beaucoup de pédagogie et...de « diplomatie judiciaire », pour persuader les autorités nationales ... » ; J P Costa , Discours d'ouverture de l'année judiciaire de la Cour EDH 2009.Voir aussi une illustration de ces difficultés , Helene Tigroudja ; Les difficultés d'exécution de l'arrêt de la Cour EDH du 07 juin 2001 , rendu dans l'affaire Kress c /France ;www.rtdh.eu/pdf .Voir également à propos de ces difficultés ,pour ce qui concerne la fédération de Russie , la Résolution intérimaire Res /DH/2009 43 , Exécution des arrêts de la Cour EDH dans les 145 affaires contre la fédération de Russie concernant le manquement ou le retard substantiel à l'obligation de se conformer à des arrêts internes et définitifs rendus contre l'Etat et ses entités ,ainsi que l'absence de recours effectif ; Site du Conseil de l'Europe .

* 91 Sur ce point, CJCE 17 décembre 98, Baustahlgewebe c /Commission des CE, C-185 195 P ; Rec. ; P I- 8417(sanction du délai raisonnable par le tribunal de Ier Instance des CE ...).

* 92 CJCE, M& CO c/ RFA, Req 13258/87; DR 64.

* 93 Il convient de faire une observation à ce niveau , selon A Bultrini ,le critère de contrôle de la Cour EDH sur ce point n'est pas « l'exercice du pouvoir d'appréciation », pour l'auteur dans l'affaire M&Co, c'est le fait que la mesure nationale ne faisait que transcrire formellement la norme communautaire qui impose la retenue de la Cour EDH ...

* 94Vera Morales ; La protection juridictionnelle des droits fondamentaux, révélation d'une entente conceptuelle ;(Cinquième congrès français de Droit constitutionnel, Univ d'Auvergne Clermont I)

* 95 Fabienne kauff Gazin ; L'arrêt Bosphorus de la CEDH: Quand le juge de Strasbourg pallie le retard du constitutionnaliste de L'UE en matière de protection des droits fondamentaux; http // L'Europe des libertés .u-Strasbourg .FR /article .php.

* 96 Article 53de la Charte des droits fondamentaux de L'UE ; Art 53 de la CEDH ; Art 5par2 du PIDCP ; Voir sur ce point Emmanuelle Bribosia, Le dilemme du juge national face à des obligations contradictoires en matière de protection des droits fondamentaux... P 266 in L'avenir du système juridictionnel de L'UE ...Op...Cit.

* 97 CJCE ; 15 juillet 1964, Flamino Costa c / Ente Nazionale per l'Energia Elettrica ; Affaire 6/64.

* 98 Pour ces Critiques, se référer à l'article de Catherine Schneider ; Contribution de la Charte des droits fondamentaux au système de protection des droits fondamentaux dans L'UE ; ...Op...Cit.

* 99 Voir sur ce point Georges Katrougalos, Le problème du rapport entre Droit communautaire et Constitutions nationales à la lumière du « dualisme institutionnel » de l'Union Européenne ; Revue européenne de droit public, vol 12 N° 4, 2000.

* 100 Ces Cours suprêmes sont bien connues, on peut citer la juridiction constitutionnelle allemande, italienne française, espagnole et très récemment le tribunal polonais dans un arrêt du 11mai 2005 relatif à l'adhésion de la Pologne à l'UE constate que une telle adhésion est conforme à la Constitution, soulignant également que la primauté du droit communautaire n'implique pas une primauté sur la Constitution ; Voir JP Jacque ; Droit constitutionnel national...Op...Cit.

* 101 J PJacque ; Droit constitutionnel national ...Op...Cit ...Ibidem.

* 102 Ainsi Delphine Calonne au regard de l'arrêt de 2001 estime qu'on ne devrait pas voir en ces réserves une menace, mais bien les signes d'une coopération entre système national et système européen ; En attendant Senator lines ...Op...Cit.P 47.

* 103 Arrêts Lavranos N. ; Das Solange -prinzip im Verhälnis von EGMR und EuGM, 2006, P. 85.

* 104 Sur cette interférence rationae persone ; Voir les tableaux en annexe.

* 105 Fondée en 1949,elle est la doyenne des Organisations qui oeuvre dans la construction européenne, par le biais des normes juridiques dans le domaine de la protection des droits de l'Homme, du renforcement de la démocratie et de la prééminence du droit en Europe, c'est une Organisation internationale dotée de la personnalité juridique , reconnue par le Droit international public qui rassemble 800 millions d'européens. Source, site du Conseil de L'Europe.

* 106 Le principe est énoncé à l'art 26 de la convention de Vienne de 1969 en ces termes, « Tout traité entré en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi. »

* 107 Voir le discours de Françoise Tulkens du 13 février 2009, Convention européenne des droits de l'homme et Cours suprêmes. Disponible sur le site du conseil de l'Europe.

* 108 CEDH ,29 oct. 1992, 264-A, n° 64 ...

* 109 CEDH, Recours n° 24846/94 ; 34165/96 ; 34173/96.

* 110 Aff. Requête n° 59320 /00.

* 111 CJCE ; Aff. 6 /64 ; Flaminio Costa c/ E .N .E .L .

* 112 CJCE 106/77 ; Simmenthal ; Voir aussi dans le même sens l'arrêt Commission c/ Grèce C-290/94, Rec. ; I-3285 ; Commission/Belgique, 149 /79 ; Rec. ; P 3881.

* 113 Internationale Handelsgesellschaft ; 11/70, Rec. ; P 1125.

* 114 J P Jacqué ; Droit constitutionnel national, Droit communautaire, CEDH ...Op...cit ; P 6. Voir aussi Cour EDH, arrêt du 23 mars 1995, Loizidou c Turquie ; Voir aussi les conclusions de l'avocat général Francis Jacob dans l'affaire Konstantinidis ; Aff. C-168/91, ECR, P 45-46 où il parle de la CEDH comme d'un « code commun des valeurs fondamentales... » .

* 115 On se référera à ses ouvrages successifs sur la question ; Trois défis pour un droit mondial -Le Seuil 1998 ; Les forces imaginantes du droit -Le relatif et l'universel- Le Seuil, septembre 2004 ; Les forces imaginantes du droit II-Le pluralisme ordonné-Le seuil, février 2006 ; Les forces imaginantes du droit III-La refondation des pouvoirs -Le seuil, janvier 2007.

* 116 Discours de Robert Schuman, lors de la signature du traité de Londres instituant le Conseil de L'Europe, 5 mai 1949, disponible sur www.ena.lu.

* 117 Hakim Boullarbah, Cours de Droit judiciaire privé Tome 1, Ed BE, 2007-2008.

* 118 Au niveau européen, la situation est d'autant plus grave que chaque système a autorégulé sa compétence sans tenir compte de l'autre, on peut voir sur ce point l'art 32-2 de la CEDH qui dispose qu'en cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la cour décide.

* 119 Peter Van Dijk, membre de la Commission Venise ; Commentaires sur l'adhésion de l'Union européenne /Communauté européenne à la Convention européenne des droits de l'homme ; 20 août 2007 ; Disponible sur le site Europa.

* 120 Olivier de Schutter voit d'ailleurs en cette externalisation du contrôle de la CE /UE, une plus-value de l'adhésion de l'UE à la Convention...Olivier de Schutter ; l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme, in L'avenir du système juridictionnel de l'union européenne ...Op...cit ; P 228 et s.

* 121 Nul ne saurait d'ailleurs présager des suites de l'arrêt Bosphorus, en dépit de quelques espèces qui laissent apparaitre les premières applications de la présomption de conformité, on devrait pas comme le recommande J P Jacque (Dans ses observations à la contribution de F Tulkens et Johan Callewaert à l'ouvrage collectif l'Avenir du système juridictionnel de l'UE...Op...Cit.) nous laisser duper par une certaine apparence de constance de la jurisprudence de la Cour EDH, dont beaucoup de choses nous poussent à croire qu'elle peut changer inattendument au gré des contingences.

* 122 On remarquera sur ce point que lors des 3ème journées des juristes européens, qui ont eu lieu à Genève les 07 et 09 septembre 2005, le président de la CJCE, Skouris a remercié la Cour EDH de sa décision Bosphorus « pour sa forme et sa substance » , le président rajoute que la CJCE « se réjouit et se sent honoré » ; Source Laurent Scheeck .La diplomatie commune des Cours européennes (inédit ) ; Cette affirmation traduit si bien le rapport prévalant entre les deux Cours avant ledit arrêt.

* 123 Peter Van Dijk ; Commentaire ...Op ...Cit.

* 124 Mme Louise Arbour (Haut commissaire aux droits de l'homme des Nations-unis) dans son discours à l'occasion de la cérémonie d'ouverture de l'année judiciaire de la Cour EDH, le 25 janvier 2008 ne cache visiblement pas sa satisfaction à la suite de ces arrêts connexes Behrami et Saramali .Voir Rapport 2007 de la Cour EDH.

* 125 Les informations données ici sont tirées pour l'essentiel de l'avis CDL-AD (2OO3) 022 ; Avis sur les implications d'une Charte des droits fondamentaux de L'UE juridiquement contraignante sur la protection des droits de l'Homme en Europe ; Adopté par la Commission de Venise lors de sa 57ème session plénière (cadre Conseil de l'Europe). Pour une vue d'ensemble de ce contrôle, voir Sionaidh Douglas Scott « A tale of two Courts : Luxembourg, Strasbourg and the growing European Human Right Aquis » CMLR, 2006, pp 629 et S ; Et Bultrini «  La responsabilité des Etats -membres de l'UE pour les violations de la Convention européenne des droits de l'homme imputables au système communautaire. » ; RTDH 2002 .Disponible sur www.rtdh.eu/pdf/20025/pdf.

* 126 Requête n° 8030/77/CFDT Communautés européennes ; Décision du 10/07/1978, DR 13.

* 127 Aff. Procola c Luxembourg du 28 sept 1995 série A n° 326.

* 128 Comm. Eur. DH M&CO c République fédérale d'Allemagne ; Requête n° 13258/87, Décision du 09/02/90 ; Dr 64 P 138.

* 129 Arrêt du 15nov.1996 ; Cantoni c/France ; § 30.

* 130 Arrêt Bosphorus ; Op cit...

* 131 Voir sur ce point Françoise Tulkens ; « L'Union européenne devant la Cour européenne des droits de l'homme » ; RUDH 2000, p 50, spec, p52.

* 132 Benoit Rohmer ; A propos de l'arrêt Bosphorus Airlines du 30 juin 2005 : l'adhésion contrainte de l'Union à la Convention, in RTDH N° 2005 /64, p 827.

* 133 Confédération française démocratique du travail, arrêt n° 8030 /77 ; Décision de la commission du 10 juillet 1978, DR 13, 231 ; Dufay c. Communautés européennes n° 13539/88 ; Décision de la commission du 19 janvier 1989 non publié ; M&Co, et arrêt Matthews §32.

* 134 Cour EDH ; Requête n° 73274/01.

* 135 Cour EDH ; 4juillet 2000 ; Sté Guerin Automobile c/Les quinze Etats-membres.

* 136 Voir sur ce point Benoît Rohmer « Chronique d'une décision annoncée, l'affaire Senator lines devant la Cour EDH » ; Europe des libertés, dossier, jan 2001, spec, P5;

* 137 L Scheeck , Competition, conflict and cooperation between European Courts and the diplomacy of supranational judicial Network ; Institut d'Etudes Européennes ; Garnet working paper :N°23/07;August 2007;P 8.

* 138

« ... La requête était irrecevable, au motif que la société requérante ne pouvait pas prétendre être victime d'une violation de la Convention européenne des droits de l'homme, du moment où il n'existait plus de violation, après l'annulation de l'amende, et aussi en raison de la décision du tribunal du 30 septembre 2003. » 

* 139Déc. N° 6422/02 et 991/6/02. L'arrêt concerne une « position commune » adoptée par l'Union européenne ;

* 140 A Bultrini, à propos de la jurisprudence de la Commission Européenne des droits de l'homme relative au contrôle du système communautaire ; La responsabilité des ...Op...Cit P 6.

* 141 A Bultrini ; La responsabilité des Etats-membres...Op...Cit...P 12 et S .

* 142 Pour une analyse plus complète de cette affaire, voir Kauff Gazin ; L'arrêt Bosphorus de la Cour EDH : Quand le juge de Strasbourg pallie le retard du constituant de l'UE en matière de droits fondamentaux ...op cit...

* 143 Aff. 144 J P Jacqué ; Droit constitutionnel national, Droit communautaire ...Op cita ...p26

* 145 Voir aussi sur ce point Haratsch Andreas ; Die Solange-Rechtsprechung des Europaïschen Gerichtshofs für Menschenrechte-Das Kooperations verhältnis Zwischen EUGH, Zeitschrift für ausländisches öffentliches Recht und Völkerrecht ; 2006 ; PP 927-947.

* 146 Françoise Tulkens et Johan Callewaert au terme d'une analyse pourtant assez cohérente sont arrivées au constat de l'impossible transposition du Modèle Solange II régissant les rapports entre le Cour de Karlsruhe et La CJCE à la relation entre Strasbourg et Luxembourg  ; in L'avenir du système juridictionnel de L'UE...Op...cit

* 147 Kathrin Kuhnert; Bosphorus -Double standard in Europe human rights protection; http://www.utrechtlawreview.org/publish/articles/000032/article.pdf; P 12.

* 148 « On doit considérer qu'on est en présence d'une insuffisance lorsque le système de compétence de le CJCE apparait assez restrictif pour permettre l'accès aux individus, ou alors dans le cas d'une omission évidente ou une mauvaise application par la CJCE d'une disposition de la Convention, ou d'une déviation par rapport à une jurisprudence bien établie de la Cour EDH ; toutefois , toute déviation par rapport à la jurisprudence de la Cour EDH n'est pas d'office problématique, du moment où l'art 53 de la CEDH assure la possibilité d'accorder une meilleure protection ou une interprétation plus large ».

* 149 Aff Connolly....Aff des Agriculteurs .... Merci à Madame Bribosia de nous avoir fait parvenir ces intéressants arrêts.

* 150 Alors que dans l'affaire Solange II, la Cour constitutionnelle allemande se reserve le droit de renverser la présomption en cas de baisse générale de la protection des droits fondamentaux ; Pour la Cour EDH, une insuffisance manifeste in concreto suffit au renversement ; Haratsch A. ; P 935 et S....

* cite les arrêts M§CO, et Senator Lines, arrêts qui évoquaient déjà une telle théorie.

* 151 Elle constitue en fait un plus dans la dynamique des droits fondamentaux au sein de l'UE, même si elle est officiellement présentée comme une codification à droit constant.

* 152 Beaucoup soulignent l'interprétation restrictive de l'art 230 IV du traité CE, exigence d'un intérêt direct et personnel à agir (arrêt Jégo Quéré de la CJCE, 14 avril 2004) , mais il convient de relever que cette condition qui semblait exclure des recours contre les actes à portée générale, a été l'objet d'une évolution jurisprudentielle dont le traité de Lisbonne vient réaliser la codification en disposant que « toute personne physique ou morale « peut former un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement ; Droit de l'Union européenne ; M DONY ...Op...Cit .P 256 .

* 153 Sur ce point Diane Cottier souligne que l'étroitesse d'accès à la CJCE, ajoutée aux difficultés de certains Etas-membres comme le RU pour s'adapter à la législation européenne en la matière menace le respect des droits fondamentaux en particulier dans le premier pilier de L'UE , on peut ajouter à cela le fait que la CJCE ne soit pas compétente dans les piliers de l'UE qui sont pourtant des domaines de violations potentielles des droits de l'homme ; Diane Cottier l'accès à la CJCE. Disponible sur http// : l'accès à la CJCE ; Diane cottier .interactions entre le droit international et le droit européen.

* 154

* Procola c/ Luxembourg ; 1995 ...Op...Cit.

* 155 Aff Cantoni c/ France ...Op...Cit.

* 156 Clémence Hardy ; L'ordre juridique Communautaire passé au crible de la Convention, disponible sur http://m2bde-u-paris10.fr/blogs.

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