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La protection des attentes légitimes des investisseurs étrangers

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par Hazard Nekaies
faculté de droit et des sciences politiques de Sousse Tunisie - master 3 ème cycle droit public 2013
  

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SECTION II : LA RELATIVITÉ DES NORMES CONVENTIONNELLES DE TRAITEMENT

Cette relativité des normes conventionnelles de traitement se vérifie au niveau des garanties minces de la notion de la non-discrimination (paragraphe 1), et au niveau des limites du principe du traitement juste et équitable (paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1- DES GARANTIES MINCES DE LA NOTION DE LA NON-DISCRIMINATION :

Une fois qu'on parle de l'application du principe de la non-discrimination, on imagine, bien évidemment, l'application totale et incontestable de ces règles. Mais cela veut dire exactement quoi ? La difficulté demeure du fait que cette philosophie dotée d'un idéalisme juste reste utopique. Cela s'explique par l'inefficacité des règles de traitement (A) et aussi par une protection insuffisante en l'absence de limitation de souveraineté économique (B).

A- L'inefficacité des règles de traitement

Des nombreux traités bilatéraux sur les investissements possèdent des exceptions pour le principe de la nation la plus favorisée. Et en se parlant des pays en développement, ces exceptions à la règle se font, la plupart des occasions, vraiment nécessaires : à partir d'une exception à la règle de la nation la plus favorisée accordée, les pays sont désormais autorisés à adopter des pratiques discriminatoires basés sur la nationalité de l'investisseur et de l'investissement. À l'exemple de ces exceptions consacrées dans les articles XX du GATT et XIV et XIV bis du GATS, plusieurs parmi ces traités bilatéraux se sont fondé sur la nécessité de maintenir l'ordre public, la préservation de la sécurité nationale, la qualité de l'environnement ou même à la protection de la santé publique pour justifier de telles exceptions.

Quant au traitement national et le traitement de la nation la plus favorisée : il existe des cas où on ne peut pas identifier des rapports de similarité entre les investisseurs étrangers en raison notamment de la spécificité du traitement accordé ainsi que sa nature très particulière. Il en est ainsi de l'affaire Loewen contre les États-Unis d'Amérique où le tribunal arbitral s'est trouvé dans l'incapacité de statuer. En effet, les arbitres ont rejeté la requête fondée sur la violation de l'article 1102 de l'ALENA au motif qu'il n'existait pas un investisseur dans une situation analogue. Le tribunal arbitral ajoute également que la charge de la preuve des circonstances analogues et plus généralement l'existence d'un traitement inférieur pèse sur le demandeur. Face à cette complexité, la société LGI a proposé quand même une alternative intéressante qui consiste en une approche de l'hypothétique, c'est-à-dire qu'on pourrait imaginer une hypothèse dans laquelle un investisseur étranger serait le seul intervenant au sein d'un certain secteur de l'économie de l'Etat d'accueil.

Finalement, la condition « des circonstances semblables » pose également un autre problème d'application étant donné que le système politique des États-Unis est un système fédéral. En effet, lorsque l'Etat fédéral accorde un traitement national, est-ce qu'il engage, par conséquent, ses entités fédérées ? La réponse à cette interrogation figure dans l'alinéa 3 de l'article 3 du nouveau modèle américain qui dispose que : « 3. The treatment to be accorded by a Party under paragraphs 1 and 2 means, with respect to a regional level of government, treatment no less favorable than the treatment accorded, in like circumstances, by that regional level of government to natural persons resident in and enterprises constituted under the laws of other regional levels of government of the Party of which it forms apart, and to their respective investments». Les investisseurs comparables sont les investisseurs d'un échelon régional du gouvernement c'est-à-dire ceux ayant la nationalité de l'Etat fédéral, quelle que soit leur province d'origine. Or, cette disposition est mentionnée exclusivement au sein de l'article 3 relatif au traitement national sans être comprise dans la clause de la nation la plus favorisée. Pourquoi ce choix ?

Cela s'explique par le fait que les États-Unis ; Etat fédéral, veulent laisser une liberté d'agir au sein de la fédération. En effet, l'Etat fédéré peut accorder à ses propres ressortissants des privilèges spéciaux qu'il n'accorde pas aux investisseurs appartenant à une autre entité fédérée bien que de même nationalité. Il est à craindre que la clause de la nation la plus favorisée ne joue qu'entre des Etats souverains. On assiste à un rapport Etat/Etat. Or, les Etats fédérés n'ont pas la capacité de conclure des traités internationaux étant donné qu'ils n'ont pas de relations juridiques internationales et une personnalité juridique internationale

L'adoption du Trade Act américain de 2002 confirme cette approche. En effet, cette nouvelle loi accorde au président le pouvoir de négocier des accords internationaux avec l'engagement que le Congrès les acceptera ou les rejettera sans pouvoir les modifier. Cette tendance reflète, semble-t-il, le débat entre pays Nord-Nord étant donné que les pays exportateurs de capitaux et notamment les États-Unis se présentent aujourd'hui comme défendeur dans l'arbitrage d'investissement.

Cela amène, en définitive, à l'instabilité et à la création d'un climat défavorable car finalement, ni l'investisseur étranger aux États-Unis, ni l'investisseur américain à l'étranger, ne peuvent identifier de façon sérieuse et exacte le droit et les pratiques de l'Etat hôte en matière de sécurité et d'environnement général.

Ambiguë et imprécise, la disposition de l'article 14 du modèle américain de 2004 va à l'opposé de la volonté des rédacteurs de ce dernier qui cherchent, à tort ou à raison, d'apporter des éclaircissements à l'ambiguïté de la norme du traitement juste et équitable.

Quant au standard minimum de traitement, Il est à craindre que le contenu concret de ces droits de source coutumière demeure toujours ambigu surtout lorsqu'il s'agit d'un droit aussi jeune et en cours de construction que le droit international des investissements. En effet, certains responsables américains notamment des secteurs de l'environnement et de la justice ont estimé que ce traitement risque de se transformer en une assurance contre n'importe quel risque affectant l'investisseur étranger et ont redouté comme a constaté Mohamed ABIDA dans son mémoire intitulé Le modèle américain d'accord de protection et d'encouragement des investissements « que ce standard soit évoqué pour paralyser le pouvoir réglementaire des gouvernements 64(*)». Face à ces inquiétudes, des propositions ont été discutées par l'administration Clinton afin de supprimer la règle de traitement juste et équitable du modèle conventionnel américain ou de soumettre ce traitement à un contrôle interétatique. Toutefois, le projet de révision a été abandonné sous la pression des lobbies des investisseurs et des milieux des affaires.

B- Une protection insuffisante en l'absence de limitation de souveraineté économique.

En reconnaissance de ses récents efforts en faveur du climat de l'investissement, la Tunisie est devenue le 44e pays à adhérer à la Déclaration de l'OCDE sur l'investissement international et les entreprises multinationales. En tant qu'adhérent à la Déclaration, la Tunisie s'engage à offrir le traitement national aux investisseurs étrangers dans les limites des restrictions juridiques mentionnées dans l'Examen.

Donc le traitement national des investissements se confronte à des limitations et des restrictions, essentiellement la souveraineté économique de l'Etat.

Tout d'abord les étrangers n'ont pas le même droit à investir que les nationaux. En effet dans une étude de M. Charpentier, il a montré que, par exemple, dans les Etats socialistes « en réservant à l'Etat, ou à des collectivités placées sous son contrôle, la propriété des instruments de production, interdit radicalement toute implantation de capitaux étrangers ». Ainsi « la plupart des législations internes contiennent des dispositions interdisant aux étrangers, sauf autorisation particulière, de détenir ou d'exploiter certaines ressources naturelles du sous-sol (pétrole, mines) ou du sol (biens fonciers, chutes d'eau) ».

Il ajoute que; « presque tous les pays ont une législation permettant d'orienter les investissements vers les secteurs, matériels ou locaux, jugés les plus utiles à l'économie du pays, grâce à des autorisations exigées ou des avantages accordés en liaison avec le but poursuivi ». Et que ; « de nombreux pays exigent une participation majoritaire de capitaux nationaux dans la plupart des entreprises économiques: c'est limiter quantitativement le droit à investir de l'étranger et c'est lui interdire de tirer de ses capitaux le droit .de diriger l'entreprise dans laquelle ils sont investis ».

Concernant le cas de la Tunisie ,avec le décret n°77-608 du 27 juillet 1977 dispose que :  « tout secteurs : l'acquisition de valeurs immobilières tunisiennes conférant un droit de vote ou de parts sociales de sociétés établies en Tunisie et soumises à l'approbation de la commission supérieure d'investissement, lorsqu'elle est effectuée par une personne morale de nationalité étrangère établie en Tunisie, et quand le taux de la participation étrangère globale dans le capital de ces sociétés est égal ou supérieur à 50% du capital de la société ».

Ce décret a été maintenu par la Troisième Décision Révisée Du Conseil Relative Au Traitement National de l'OCDE qui énonce dans son ANNEXE I Intitulé Projet De Décision Du Conseil Modifiant L'annexe A De La Troisième : Décision Révisée Du Conseil Sur Le Traitement National

« Le Conseil,

Vu la Convention relative à l'Organisation de coopération et de développement économiques en date du 14 décembre 1960 et, en particulier, ses articles 2 c), 2 d), 3, 5 a) et 12 ;

Vu la Déclaration des gouvernements des pays Membres de l'OCDE sur l'investissement international et.................

Décide que l'Annexe A de la troisième Décision révisée du Conseil sur le traitement national est remplacée par la liste suivante qui recense les exceptions au traitement national en vigueur dans les pays adhérents à la Déclaration sur l'investissement international et les entreprises multinationales :

... TUNISIE65(*)

Exceptions au niveau national

I. Investissement par les entreprises établies sous contrôle étranger

Tous secteurs : L'acquisition de valeurs mobilières tunisiennes conférant un droit de vote ou de parts sociales de sociétés établies en Tunisie est soumise à l'approbation de la Commission supérieure d'investissement, lorsqu'elle est effectuée par une personne morale de nationalité étrangère établie en Tunisie, et quand le taux de la participation étrangère globale dans le capital de ces sociétés est égal ou supérieur à 50 % du capital de la société66(*). »

On peut retenir ici que la notion de la non-discrimination est limitée par la liberté de l'Etat d'ouvrir ou non son territoire aux investissements étrangers d'une part mais aussi par les politiques d'investissements des Etats.

Ensuite, il faut rappeler qu'un accord ou traité d'investissement, qui exige d'un pays d'accueil la concession envers un investisseur étranger, normalement national d'un pays développé exportateur de capital, d'un traitement non-discriminatoire complet, exige, que ce même pays d'accueil donne à l'investisseur étranger un traitement que ne soit pas moins favorable, voire exactement égal, en ce qui concerne l'ensemble des lois et normes applicables, à celui donné à d'autres investisseurs internationaux.

En l'absence de tout lien conventionnel spécifique entre l'Etat-hôte et l'Etat fournisseur de capitaux, ces garanties resteront très minces, tant que l'Etat-hôte se prévaudra de son droit souverain de disposer de ses richesses et de ses ressources naturelles : le droit international général ne peut lui interdire que les mesures qui, à travers les biens des étrangers, cherchent à nuire aux Etats dont ils sont ressortissants, en plus de celles qui portent atteinte aux droits fondamentaux de l'Homme.

L'investisseur étranger ne bénéficiera donc d'une protection suffisante que si l'Etat dont le développement a besoin de ses capitaux accepte par un traité de limiter sa souveraineté économique. Les garanties qu'il obtiendra par cette voie seront alors vraisemblablement des prérogatives dont les nationaux ne bénéficieront pas; ce n'est pas, en tout cas, la référence à la situation des nationaux qui permettra de les déterminer.

Le principe de la non-discrimination ne devient un instrument efficace de protection des investissements, que dans les traités conclus entre Etats d'un niveau économique équivalent, lorsque ces Etats veulent égaliser la situation de leurs ressortissants. La notion de la non-discrimination est alors l'obligation de garantir un égal traitement aux nationaux et aux ressortissants des pays signataires. Une telle obligation tend à transformer l'égalité entre les Etats contractants en une « égalité des droits » et à dévaloriser leurs souverainetés respectives; ce n'est donc pas un hasard si elle s'inscrit dans le cadre de mutations vers une structure fédérale. Dans un cadre si différent, elle ne peut manquer de poser des problèmes particuliers.

* 64 Mohamed ABIDA, Le modèle américain d'accord de protection et d'encouragement des investissements 2004, Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, Mastère en droit, 2005. Mémoire en ligne : www.memoireonline.com/.../m_modele-americain-accord-protection.

* 65 À la date du 23 mai 2012

* 66 Source : Décret n°77-608 du 27 juillet 1977 fixant les conditions d'application de la loi n°76-18 du 21 janvier 1976, portant refonte et codification de la législation des changes et du commerce extérieur régissant les relations entre la Tunisie et les pays étrangers, modifié par les décrets n°95-1128 du 8 juin 1995 et n°97-1738 du 3 septembre 1997, article 21 bis.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote