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La protection des attentes légitimes des investisseurs étrangers

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par Hazard Nekaies
faculté de droit et des sciences politiques de Sousse Tunisie - master 3 ème cycle droit public 2013
  

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PARAGRAPHE 2- PRINCIPE DU TRAITEMENT JUSTE ET ÉQUITABLE 

Les traités bilatéraux sur les investissements contiennent des clauses non contingentes instaurant un niveau minimum de protection des investisseurs :

Le traitement juste et équitable est une des modalités de traitement dues à l'investisseur étranger en cas de circonstances ordinaires et qui figure au sein d'un instrument conventionnel, le TBI.

Le traitement « équitable » est mentionné pour la première fois dans la Charte de La Havane instituant une Organisation internationale du commerce de 1948. L'article 11 envisageait que les investissements étrangers soient assurés d'un « traitement juste et équitable » et disposait que l'Organisation internationale du commerce pourrait :

1. recommander et favoriser la conclusion d'accords bilatéraux ou multilatéraux relatifs aux mesures tendant...

2. à assurer un traitement juste et équitable en ce qui concerne l'effort de l'entreprise, les compétences techniques, les capitaux, les procédés ou techniques apportés d'un État membre à un autre.

Sur le plan bilatéral, les traités d'amitié, de commerce et de navigation élaborés par les États-Unis après la Première Guerre mondiale comportaient une référence type au droit international relativement à la protection des ressortissants étrangers et de leurs biens. Pendant la période qui a suivi la rédaction de la Charte de La Havane, les termes «équitable» et « traitement juste et équitable » sont apparus dans certains traités d'amitié, de commerce et de navigation conclus par les États-Unis. Les tenants de la norme la considéraient comme une protection contre les actes contraires aux règles internationalement acceptées.

En 1959, l'article premier d'un projet de convention sur les investissements étrangers élaboré sous la direction de Herman Abs, directeur général de la Deutsche Bank et de Lord Shawcross, procureur général du Royaume-Uni, disposait que « chacune des parties s'engageait à assurer à tout moment un traitement juste et équitable aux biens des ressortissants des autres Parties ».

À la suite de cette initiative, l'Allemagne a proposé à l'OCDE d'élaborer une convention sur la protection internationale de la propriété privée.

Le 12 octobre 1967, les discussions approfondies amorcées à l'OCDE au début des années 60 ont débouché sur l'adoption par le Conseil de l'OCDE du Projet de convention sur la protection des biens étrangers. L'article 1(a) disposait : « Régime des biens étrangers : « Chacune des Parties s'engage à assurer à tout moment un traitement juste et équitable aux biens des ressortissants des autres Parties... ».

Dans la Convention franco-tunisienne du 9 août 1963 l'article 1 stipule : «  Chacune des Hautes Parties contractantes s'engage à assurer sur son territoire un traitement juste et équitable aux investissements ainsi qu'aux biens, droits, et intérêts appartenant à des ressortissants, personnes physiques ou morales, de l'autre partie et à faire en sorte que l'exercice du droit ainsi reconnu ne soit entravé ni en droit ni en fait. A cet effet, chacune des parties accordera à ces investissements, biens, droits et intérêts, au moins la même sécurité et protection qu'elle assure à ceux de ses nationaux ».

Il s'agit d'une norme de traitement à caractère « absolu » et « non contingent », c'est-à-dire une norme qui définit le traitement qui doit être accordé selon des termes dont le sens exact reste à déterminer en fonction d'un contexte spécifique d'application, à l'inverse des normes « relatives » intégrées dans les principes du « traitement national » et de « la nation la plus favorisée », qui définissent le traitement requis eu égard au traitement accordé à d'autres investissements.

A- L'effet direct de la norme du traitement juste et équitable :

La protection des attentes légitimes de l'investisseur semble, aujourd'hui, constituer l'un des principaux éléments de la norme du traitement juste et équitable. La jurisprudence a, d'ailleurs, confirmé le rôle de la notion d'attente légitime dans la définition de la norme du traitement juste et équitable. Ainsi, dans la décision LG&E de 2006, les arbitres ont expressément relevé que la norme du traitement juste et équitable impliquait de prendre en compte les attentes légitimes de l'investisseur. Ainsi, la protection des attentes légitimes de l'investisseur constitue un des éléments du traitement juste et équitable, mais l'on s'est demandé s'il n'était pas possible d'aller plus loin et d'affirmer qu'il s'agit de l'élément central du principe.

La norme du « traitement juste et équitable » est formulée de différentes façons dans les accords d'investissement. Certains accords, en particulier certains traités bilatéraux d'investissement, définissent expressément cette norme en faisant référence au droit international, et d'autres non.

En raison des différentes formulations, l'interprétation appropriée de la norme du traitement juste et équitable dépend du texte spécifique d'un traité, de son cadre, de son objet et de son but ainsi que de l'historique des négociations ou d'autres indications relatives à l'intention des parties.

Par exemple, certains traités comprennent des termes explicites associant ou, dans certains cas, limitant le traitement juste et équitable à la norme minimale de traitement en droit international coutumier.

D'autres traités qui associent la norme au droit international sans préciser s'il s'agit du droit coutumier ou ne font aucune référence au droit international pourraient, selon le contexte ou l'intention des parties, par exemple, être interprétés comme conférant à la norme un champ d'application qui est plus large que celui de la norme minimale définie par le droit international coutumier.

Indépendamment de la manière dont les gouvernements interprètent la norme du « traitement juste et équitable », il est admis que la norme minimale renvoie à un droit international coutumier évolutif qui n'est pas « figé » dans le temps mais peut évoluer en fonction de la pratique générale et cohérente des États et l'opiniojuris, comme en témoigne parfois la jurisprudence issue de l'interprétation et de l'application de ces traités.

L'analyse des opinions des tribunaux arbitraux qui ont tenté d'interpréter et d'appliquer la norme du « traitement juste et équitable » a fait ressortir un certain nombre d'éléments qui, isolément ou conjugués avec d'autres, ont été considérés comme compris dans la norme de traitement.

La plupart des opinions arbitrales recensées mentionnent deux éléments, la diligence due et le respect des procédures régulières (notamment l'absence de déni de justice et d'arbitraire), et un petit nombre seulement mentionnent la transparence et la bonne foi.

Le devoir de vigilance et le respect des procédures régulières, notamment l'absence de déni de justice et d'arbitraire, sont des éléments bien inscrits dans le droit international coutumier, alors que la transparence est souvent définie, dans les accords internationaux, en tant qu'obligation aux termes d'une disposition distincte. La bonne foi semble davantage considérée comme un principe de base sous-tendant une obligation plutôt que comme une obligation distincte à l'égard des investisseurs en vertu de « la norme du traitement juste et équitable ».

Les éléments identifiés semblent posséder un contenu juridique suffisant pour permettre que des affaires soient jugées sur la base du droit conformément à la Convention de Vienne sur le droit des traités et qu'il ne soit pas statué ex aequo et bono34(*).

Il est contre-indiqué pour l'instant d'établir une interprétation définitive de la norme du « traitement juste et équitable ». La jurisprudence qui l'a appliquée et a identifié les éléments de son contenu normatif, relativement récente, n'est pas uniforme et ne permet donc pas de dresser une liste solide et concluante.

L'effet direct de la norme du traitement juste et équitable au regard de l'investisseur dans l'ordre international signifie que ce dernier (l'investisseur étranger) peut, sur le fondement du TBI attaquer directement l'État d'accueil devant un tribunal arbitral qui statuera en vertu des règles du droit international.

Dans quelques affaires récentes, les tribunaux arbitraux ont défini le traitement « juste et équitable » en se fondant sur le concept relativement nouveau de la transparence, qui n'est pas généralement considéré comme constituant une norme du droit international coutumier. Un autre élément est parfois lié à la transparence, à savoir le respect des attentes légitimes de l'investisseur.

Le tribunal a développé son raisonnement en se reportant aux conclusions des affaires NeeretELSI :

« Le tribunal arbitral estime que cette disposition de l'Accord, à la lumière du principe de la bonne foi établi en droit international, exige que les Parties contractantes accordent aux investissements internationaux un traitement qui ne soit pas contraire aux attentes fondamentales qu'avait l'investisseur étranger au moment de l'investissement.

L'investisseur étranger s'attend à ce que l'État d'accueil agisse avec lui de manière cohérente, dénuée d'ambiguïté et entièrement transparente. L'investisseur étranger s'attend également à ce que l'État d'accueil agisse de manière cohérente, c'est-à-dire sans révoquer arbitrairement des décisions qu'il avait prises antérieurement ou des permis qu'il avait déjà accordés et sur lesquels l'investisseur misait pour remplir ses engagements et planifier et lancer ses activités commerciales et professionnelles.

L'investisseur s'attend également à ce que l'État ait recours aux instruments juridiques qui régissent les actions de l'investisseur ou l'investissement conformément à la fonction habituelle de ces instruments, et ne prive pas l'investisseur de l'investissement sans lui verser l'indemnisation applicable.

De fait, le défaut de l'État d'accueil d'adopter ce comportement à l'égard de l'investisseur étranger ou de ses investissements affecte la capacité de l'investisseur d'appréhender le traitement et la protection accordés par l'État d'accueil et de déterminer si celui-ci se conforme au principe du traitement juste et équitable. Par conséquent, l'adoption de ce comportement par l'État hôte est étroitement liée au principe susmentionné, aux possibilités réelles qu'il soit appliqué et à l'exclusion de la possibilité que le comportement de l'État d'accueil soit considéré comme arbitraire, c'est-à-dire comme présentant des lacunes pouvant être perçues comme telles par tout homme raisonnable et impartial ou, en l'absence de violation de règles spécifiques, comme étant contraire à la loi parce qu'il heurte, ou du moins surprend, le sens de la correction juridique » .

Le tribunal a décidé que le comportement du Mexique et les « lacunes » qui en sont découlées équivalaient à un manquement aux garanties relatives au « traitement juste et équitable » inscrites dans le traité bilatéral d'investissement.

On peut finalement dire, qu'existe une garantie de traitement minimum développée par la jurisprudence.

B- le rattachement de la norme du traitement juste et équitable au standard minimum du traitement :

Le traitement juste et équitable est l'un des éléments de la norme minimale de traitement accordé aux ressortissants étrangers et à leurs biens requise par le droit international.

La norme minimale internationale fixe un certain nombre de droits fondamentaux établis par le droit international et que les États doivent accorder aux étrangers, indépendamment du traitement qu'ils réservent à leurs propres citoyens. La violation de cette norme engage la responsabilité internationale de l'État d'accueil et peut fonder un recours international au bénéfice de l'étranger lésé, pour autant que celui-ci ait épuisé les voies de recours internes.

Quant à l'origine de la norme minimale de traitement ; Il a très tôt été reconnu qu'il existe une protection due aux étrangers dans la mesure où les intérêts d'un État peuvent être affectés par l'atteinte portée à l'un de ses ressortissants.

Cette obligation de protection peut trouver son fondement et sa justification dans la sentence Ile de Palmas de 192835(*) qui expose le principe selon lequel il existe une obligation de protéger les droits que chaque État peut réclamer pour ses nationaux en territoire étranger.

Ce droit est d'ailleurs le corolaire du droit exclusif pour l'État d'accueil de régir son territoire.C'est ainsi qu'est née la norme minimale de traitement requise par le droit international coutumier, et qui confère à l'État de nationalité un droit à la protection de ses ressortissants et de leurs biens sur le territoire d'un autre État.

Il s'agit, en outre, d'une norme du droit international coutumier qui régit le traitement des ressortissants étrangers en énonçant un ensemble de principes que les États, indépendamment de leur législation interne et de leurs pratiques, doivent respecter à l'égard des ressortissants étrangers et de leurs biens. Ainsi, cette norme minimale internationale va fixer un certain nombre de droits fondamentaux établis par le droit international que les États doivent accorder aux étrangers indépendamment du traitement qu'ils réservent à leurs propres citoyens. Sa violation engage la responsabilité internationale de l'État d'accueil et peut fonder un recours international au bénéfice de l'étranger lésé.

C'est dans l'affaire Neer36(*) qu'ont été dégagés plusieurs critères d'appréciation de la norme minimale de traitement. Il a ainsi été jugé que cette norme était violée dès lors qu'il y a, de la part de l'État d'accueil envers le ressortissant étranger, soit une inconduite grave, une injustice manifeste ou une atteinte à sa dignité, soit un comportement de mauvaise foi de sa part ou soit un défaut délibéré de l'État d'accueil de se conformer à ses obligations.

En fin, on peut résumer à propos du standard minimum, qu'il y a une norme minimale qui s'impose aux Etats par rapport aux étrangers et leurs biens. Le secrétaire d'Etat américain ROOT a défini le standard minimum (norme de justice fondamentale), il parle de justice fondamentale et élémentaire, facile à réparer qui devait s'imposer aux Etats par rapport aux étrangers. Son contenu ; pas de traitement arbitraire ou discriminatoire, le droit d'ester en justice et de se porter en justice, le droit à la vie et enfin le droit à la sureté.

* 34Ex aequo et bono (latin pour «selon le droit et la bonne» ou «de l'équité et de la conscience») est une expression dérivée du latin qui est utilisé comme un cadre juridique terme technique. Dans le contexte de l'arbitrage, il se réfère à la puissance des arbitres s'entendent pour déroger à l'examen de la loi et de considérer uniquement ce qu'ils considèrent être juste et équitable dans le cas qui nous occupe.

* 35Ile de Palma (États Unis) c. Pays Bas, sentence arbitrale du 4 avril 1928, Cour Permanente.

* 36L.F.H Neer and Pauline E. Neer c. Mexico, 15 octobre 1926, Recueil des sentences arbitrales des Nations Unies, 1926, IV, p. 60 et s.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry