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La distinction pouvoir constituant et pouvoirs constitués au Cameroun

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par NENEO KALDAYA
Université de Douala - Cameroun -  Diplôme d'études approfondies option droit public interne 2008
  

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PARGRAPHE II : LES LIMITES A LA SUPREMATIE CONSTITUTIONNELLE

AU CAMEROUN

Lorsque la probabilité d'une manipulation de plus en plus grandissante par le pouvoir constitué en l'occurrence le pouvoir exécutif est visible, il y a lieu de s'interroger sur la suprématie de la constitution au Cameroun. La solennité d'antan qui accompagne la constitution perd en vitalité, pour devenir une simple loi à la merci du pouvoir institué. La remise en cause de la suprématie constitutionnelle est décelable par l'absence d'un verrou constitutionnel au monopole présidentiel (A), mais surtout, par la dépossession définitive du pouvoir constituant du peuple (B).

A- L'absence de verrou à la manipulation présidentielle de la constitution au Cameroun

Les textes constitutionnels ont été suffisamment assez clairs sur la place à accorder à l'institution présidentielle dans l'ordre constitutionnel camerounais. De tout temps, une place de choix lui a été réservée, en l'occurrence, l'idée qui voudrait que le président de la république soit le garant de la constitution (1) et le seul juge de l'opportunité de la révision constitutionnelle (2).

1- Le président de la république, garant de la constitution

Ce rôle stratégique accordé par le constituant au président de la république, constitue une sorte d'overdose politique susceptible de donner lieu à tout genre de manipulation. VALENTIN MIAFO DONFACK l'a si exagérément souligné en affirmant que « Les changements constitutionnels intervenus depuis l'indépendance ont pour résultat [...]de réaliser ou d'accentuer une concentration des pouvoirs au bénéfice du chef de l'exécutif grâce à un syncrétisme qui emprunte aux différents types des régimes politiques tout ce qui peut renforcer l'exécutif »298(*). Autrement dit, la faille constitutionnelle laissée à l'avantage du président de la république, est une stratégie d'adaptation de la constitution au pouvoir. Les mutations de toute sorte ayant marqué les sociétés politiques ces dernières années ont vu vibrer la constitution au rythme de la cadence présidentielle. Objet de manipulation à dessein, la constitution perd de toute sa grandeur normative jadis réservée au souverain en question. Le constat est désolant comme nous le fait remarquer ce même auteur selon qui « La vie constitutionnelle du Cameroun se caractérise par la maîtrise présidentielle de la cadence constitutionnelle »299(*). La dynamique constitutionnelle est ainsi pilotée peut-on affirmer par un monopolitisme présidentiel, véritable juge de la stratégie.

2- Le président de la république, unique juge de l'opportunité de la constitution

L'opportunité appartient au champ lexical du pouvoir discrétionnaire du chef de l'Etat, à en croire les administrativistes. Il s'agit ici de l'expression de la toute puissance du président de la république dans son ambition de modification de la constitution. Marque de l'autoritarisme avons-nous avoué, mais l'action reste canalisée par le constituant, qui a su faire usage du verbe afin d'éviter ou de dissiper tout malentendu. Etant donné le poids présidentiel sur l'initiative de la constitution, nous sommes en face d'une situation on ne peut plus embarrassante et suspecte, qui voudrait que la constitution soit faite selon le génie du président de la république. L'enjeu est donc de taille, raison pour laquelle souligne VALENTIN M. DONFACK « Toutes les révisions constitutionnelles intervenues depuis la première constitution du 4 mars 1960 l'ont été sur initiative présidentielle »300(*). L'influence présidentielle est ressentie à tous les niveaux d'édiction de la constitution, ceci au grand désespoir du pouvoir constituant.

B- La dépossession du pouvoir constituant du peuple

La stratégie présidentielle sagement mise en place vient ainsi signer l'acte du décès du pouvoir constituant souverain. De toute évidence, les multiples adoptions et révisions constitutionnelles (14 au total), participe de la braderie du pouvoir constituant. Ceci peut s'expliquer par l'irrégularité, mieux l'inutilité de consultation référendaire (1) avec une préférence à la législature constituante (2).

1- L'irrégularité des consultations référendaires au Cameroun

Le politique évoque des problèmes d'ordre financier pour justifier la réticence des gouvernants à porter des questions hautement indispensables comme la constitution à l'approbation du souverain. L'on note avec tristesse la violation du principe démocratique de la participation du peuple à la gestion de la cité. Les référendums de 1960 et de 1972 représentent le moins qu'on puisse dire, ce droit occasionnel et rare d'ailleurs octroyé au citoyen pour donner son point de vue. Or, devons-nous tout de suite affirmer que le référendum ne constitue pas en soi un moyen démodé pour la démocratie. Jusqu'à preuve de contraire, les techniques référendaires font intervenir directement le peuple, titulaire de la souveraineté, pour approuver le projet ou la proposition de révision constitutionnelle. Il s'agit ainsi d'une procédure d'ouverture répondant à n'en point douter au critère de la démocratie selon son sens étymologique.

2- Le mécanisme de la représentation : la législature constituante

La majorité des constitutions camerounaises sont l'objet d'un examen restreint par l'assemblée législative du peuple. Technique idéale, mais les entorses modernes du phénomène de crise de la représentation ternissent ou mieux arrachent de plus en plus la crédibilité de la consultation. Par ailleurs, le fait majoritaire laisse planer une complaisance stratégico-politique entre le gouvernement et la représentation nationale. En effet, l'expérience constitutionnelle camerounaise permet d'étaler au grand jour la presque inexistence de contrôle mutuel des institutions, aux fins de la sauvegarde du principe de la séparation des pouvoirs prévu par le texte fondamental. Ceci confirme cette critique doctrinale dans sa majorité qui voue le parlement en une chambre d'enregistrement,301(*) sans importance réelle pour son électorat. « L'assemblée nationale marque dans une large mesure la dépossession de la souveraineté constituante du peuple »302(*), faisant ainsi du peuple un laissé-pour-compte politique.

Conclusion à la deuxième partie

Toutes ces manoeuvres participent d'une certaine braderie de la constitution, supposée, norme fondamentale et supérieure, et devant guider l'action de toutes les autres institutions. Le président de la république se présente ainsi au vu de ces analyses comme une super-institution qui dicte la constitution grâce à sa position constitutionnelle du garant de la constitution, qui au vu de certains observateurs, est sans préoccupation aucune des enjeux réels qu'est sensé incarner la constitution dans une société politique dite démocratique.303(*) Constitutions et présidents de la république se trouvent ainsi complètement imbriqués et confondus dans le contexte camerounais, et ceci dans l'imagerie populaire, au point d'en appeler à sa diligence lorsque les enjeux politiques réels risquent de basculer dans le système.

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* 298 V. M. Donfack, « Le président de la république et les constitutions au Cameroun », précité, page 252.

* 299 V.M.Donfack, Le président de la république et les constitutions du Cameroun », précité, page 255.

* 300 Op cit, page265.

* 301 Issa Abiabag, Le droit d'amendement dans le droit parlementaire camerounais, précité, page 43 et suivants.

* 302 Luc Sindjoun, « L'imagination constitutionnelle de la nation », article, précité, page 268.

* 303 Lire Ondoa Magloire, « Le droit de la responsabilité public dans les Etats en développement : contribution à l'étude de l'originalité des droits africains » , Thèse de doctorat, UYII-SOA , 1997, page 2.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard