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La distinction pouvoir constituant et pouvoirs constitués au Cameroun

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par NENEO KALDAYA
Université de Douala - Cameroun -  Diplôme d'études approfondies option droit public interne 2008
  

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2- CONSIDERATIONS EPISTEMOLOGIQUES

Il convient ici de lever l'équivoque sur les différentes notions qui composent la thématique en l'occurrence,  les notions de constitution et de pouvoir, les expressions pouvoir constituant et pouvoirs constitués, sans oublier le vocable distinction. Ce travail d'apparence anodine, nous permettra à coup sûr, de ne pas tomber dans des erreurs sémantiques, source de confusion dont la conséquence pourrait entraîner de nombreuses superficialités.

Par constitution donc, on entend grosso modo, un ensemble de textes, écrits ou non, organisant une société politique donnée. Elle peut être déclinée sous deux angles :

- Du point de vue matériel, la constitution s'entend comme « un ensemble des règles qui déterminent l'ordonnancement régulier des pouvoirs publics »11(*). L'intérêt de cette définition découle de sa généralité. On aboutit ainsi à la conclusion selon laquelle tout Etat peut avoir une constitution, qu'elle soit coutumière ou écrite. Pour CLAUDE LECLERCQ, « La caractéristique première des Etats est de s'appuyer sur des constitutions, chartes fondamentales qui tracent essentiellement l'organisation et le fonctionnement de ces Etats »12(*)Telle est l'expression du caractère indispensable de la constitution. Il insiste ainsi sur les bases formelles de la constitution, justification d'un Etat non chaotique.

- La définition formelle de la constitution permet de spécifier celle-ci par rapport aux autres normes juridiques. Pour les positivistes par exemple, la constitution doit être considérée de tout temps comme la norme suprême au sens de la théorie classique de HANS KELSEN. CARL SCHMITT quant à lui, donne la vision politiste de la constitution en abondant qu'elle constitue une décision politique dont l'objet n'est pas de constituer le peuple en tant que tel, mais de constituer la forme de gouvernement. « La constitution au sens positif, c'est-à-dire, des décisions politiques concrètes que prend le sujet du pouvoir constituant sur le genre et la forme d'existence de l'unité politique, n'est nullement identique au contrat social... »13(*). La pratique constitutionnelle étant une autre réalité, l'on croit de plus en plus de nos jours à une profonde crise de légitimité.14(*) Il s'agit de la crise de la représentativité qui constitue une sorte de violation du consensus social à l'issu duquel un certain nombre de mesures d'ordre général sont prises. Tout compte fait, la constitution reste l'acte de naissance de l'Etat, donc elle est l'oeuvre d'une autorité spéciale appelée le pouvoir constituant. Il convient ici de préciser qu'il n'y a de constitution que lorsque sont réunies les conditions permettant la garantie de sa suprématie15(*), rendant ainsi possible la distinction entre pouvoir constituant et pouvoirs constitués , ceci plus précisément dans le contexte camerounais.

Il faut d'abord souligner que la notion du pouvoir vient du latin potestas, qui voudrait dire la capacité à agir. C'est ainsi que MICHEL DE VILLIERS  pense que, « Le pouvoir est la capacité d'agir qui implique une idée de puissance ... »16(*). Appliqué à la matière politique, «  le pouvoir est un phénomène de commandement et d'obéissance, faisant naître une relation égalitaire entre les gouvernants et les gouvernés »17(*). L'approche civiliste du pouvoir entend « une prérogative permettant à une personne de gouverner une autre personne publique ou privée (mandats politiques, autorité parentale, tutelle) ou de gérer les biens d'une autre personne pour le compte de celui-ci (dirigeants des sociétés, représentation légale, judiciaire ou contractuelle) »18(*). L'institutionnalisation du pouvoir consiste à dissocier le pouvoir (concept) des individus qui l'exercent, souligne JEAN-MARIE DENQUIN19(*),s'opposant ainsi à l'individualisation de pouvoir20(*) qui est à la fois source de discontinuité et d'arbitraire.21(*)

L'expression pouvoir constituant connote le pouvoir d'élaborer (pouvoir constituant originaire) ou de modifier (pouvoir constituant dérivé) la constitution.22(*) Le pouvoir constituant est donc l'autorité de la norme constitutionnelle23(*)au Cameroun. Il met donc en place la constitution, définition par excellence du statut juridique de l'Etat, par ailleurs, condition sine qua none d'existence d'un Etat de droit. Pour le professeur M. ONDOA en effet, « L'Etat de droit figure assurément au nombre des techniques juridiques les plus opposées à l'hégémonie d'un homme ou d'un pouvoir autocratique »24(*). CECILE ISIDORO se veut plus explicite dans sa définition lorsqu'elle souligne que : « Le pouvoir constituant peut être défini comme le pouvoir d'établir ou de réviser les règles fondamentales relatives à la dévolution et à l'exercice du pouvoir au sein d'une communauté d'individus »25(*) . Il s'agit donc d'un pouvoir souverain, parce que c'est l'exclusivité du peuple. C'est ainsi qu'il doit être distingué des autres pouvoirs ou organes de l'Etat.26(*)

L'expression pouvoirs constitués désigne l'ensemble des pouvoirs institués par la constitution. C'est à dessein que nous utilisons le pluriel, ceci en vue de faire impliquer toutes les institutions ou instances étatiques susceptibles d'intervenir dans la procédure constituante au Cameroun. Ce sont des pouvoirs de l'Etat dont l'organisation et le fonctionnement sont définis par et dans la constitution. Autrement dit, les pouvoirs constitués sont des actes constituants, agissant dans la limite des pouvoirs de délégation au sens de la représentation que CARRE DE MALBERG a baptisé la souveraineté nationale. L'article 2 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 199627(*) confirme cette théorie au Cameroun. Le problème reste au niveau de la précision de l'autorité de la norme constitutionnelle au Cameroun. La dilution à répétition du pouvoir constituant dans le pouvoir constitué donne l'impression d'une monarchisation du pouvoir constitutionnel. En effet, l'idée de la constitution a été historiquement le produit de la lutte contre l'absolutisme monarchique.

Pour JACQUES CHEVALIER, « Le constitutionnalisme entendait contenir la puissance monarchique de l'assujettissement au droit »28(*). Telle semble être l'essence même de la suprématie de la norme constitutionnelle lorsqu'il ajoute : « La suprématie de la constitution est assurée par le fait qu'elle est mise à l'abri de toute atteinte des pouvoirs qu'elle a institués, les pouvoirs constitués »29(*). Pouvoir constituant et pouvoirs constitués semblent prêter donc à confusion, d'où la nécessité d'une distinction.

La distinction au sens de GERARD CORNU est l'« action d'analyser et de spécifier, de différencier, de séparer, de lever l'équivoque ou de dissiper une confusion »30(*) . A l'évidence, les différentes constitutions camerounaises ne renseignent pas de façon exhaustive sur ces différents pouvoirs, du point de vue de leur fonction. Or, sur le fondement de l'article 16 de la DDHC du 1789 souligne ELIZABETH ZOLLER qu' « une société dans laquelle le pouvoir constituant n'est pas séparé des pouvoirs constitués n'a pas de constitution normative...»31(*). Or, l'absolutisme désigne «  une théorie qui envisage le droit comme un système des normes »32(*). Cela nous oblige à poser le problème de la séparation des pouvoirs dans son ensemble, notamment, la séparation fonctionnelle entre le pouvoir constituant et les pouvoirs constitués au Cameroun.

* 11 Laurent Habid, « La notion de constitution », in Institutions et vie politique : Les notices, La Documentation Française, 1997, page 17.

* 12 Claude Leclercq, Droit constitutionnel et institutions politiques, LITEC, 14è édition, janvier 1984, page 88.

* 13 Ebenezer Taltou, « Constitution et Politique au Cameroun », Thèse de doctorat en science politique, Université de Yaoundé, 2004/2005, page 7, citant CARL SCHMITT, in Théorie de la Constitution, Paris, PUF, 1996, page 126.

* 14 Jean du Bois de Gaudusson, « Quel statut constitutionnel pour le chef d'Etat en Afrique ? », in Le nouveau constitutionnalisme en Afrique, Gérard Conac (Mélanges à), page 332.

* 15 Magloire Ondoa, « La dé-présidentialisation du régime politique camerounais », RAPD, SOLON, vol.2, n°1, 2003, page 31.

* 16 M. de Villiers, Dictionnaire du droit constitutionnel, Armand Collin, 1998, page 149.

* 17 Idem.

* 18 Raymond Guillien et Jean Vincent, Lexiques des termes juridiques, 11è édition, DALLOZ, 1998, page 408.

* 19 J. M Denquin, La science politique, PUF, 1985, page 156.

* 20 Lire M. Ondoa, « La dé-présidentialisation du régime politique camerounais », précité, page 8.

* 21 Eric Olivia, Droit Constitutionnel, 2è édition, SIREY, 2000, pages 7 et 36.

* 22 Idem.

* 23 E. Tenfack Kenfack,  « L'autorité de la norme constitutionnelle au Cameroun », mémoire précité.

* 24 M. Ondoa, « La dé-présidentialisation du régime politique camerounais », précité.

* 25 Cécile Isidoro, « Le pouvoir constituant peut-il tout faire ? », in L'Esprit des Institutions, L'Equilibre des pouvoirs, Mélanges PIERRE PACTET, 2003, page 237.

* 26 Elisabeth Zoller, Droit Constitutionnel, PUF, 1èreédition, Avril 1998, page 58.

* 27 « La souveraineté nationale appartient au peuple camerounais qui l'exerce soit par l'intermédiaire du président de la république et des membres du parlement, soit par voie de référendum. Aucune fraction du peuple, ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice ».

* 28 Jacques Chevalier, L'Etat, DALLOZ, 1999, page 40.

* 29 Idem

* 30 Gérard Cornu, Vocabulaire Juridique, PUF, 1ère édition, 1987.

* 31 Elisabeth Zoller, Droit Constitutionnel, précité, page 57.

* 32 O. Duhamel et Y. Mény, Dictionnaire constitutionnel, précité, page 666.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius