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Le parcours de soins coordonnés

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par Céline PERRUCHET
Université Paris II Panthéon-Assas - Master 2 - Droit Social (Recherche) 2013
  

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SECTION 2 : L'ACCÈS AUX SOINS A L'ÉTRANGER

38- Les différents systèmes de santé. Une première distinction peut se faire entre pays de tradition bismarckienne et pays de tradition beveridgienne, ou universelle. Les pays de tradition bismarckienne, comme la France ou l'Allemagne, se caractérisent par un risque couvert par les assurances sociales. Ils optent généralement pour le paiement à l'acte. En revanche, dans les systèmes universels, comme le Royaume Uni ou l'Espagne, la médecine de ville est intégrée au service public de santé. Ils optent généralement pour la capitation (une somme annuelle allouée par patients) ou le paiement au forfait. Une seconde distinction peut se faire entre trois modèles : Dans le modèle professionnel non hiérarchisé, comme la France, l'Allemagne, ou le Canada, l'organisation des soins primaires est laissée à l'initiative des acteurs. Dans le modèle professionnel hiérarchisé, comme au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, ou en Australie, le médecin généraliste est le pivot du système de santé. Enfin, dans le modèle normatif hiérarchisé, comme en Espagne, en Finlande ou en Suède, le système de santé est organisé autour des soins primaires et régulé par l'État.

39- Tous les pays ont fait face aux mêmes questionnements concernant le financement des soins des usagers. La persistance des déficits, alimentés par une augmentation constante de la part des dépenses de santé dans les PIB, l'amélioration des traitements, les progrès technologiques, l'augmentation de l'espérance de vie mais également le creusement des inégalités dans les conditions d'accès aux soins ont conduit à s'interroger sur l'organisation et la rémunération de la médecine de ville. Dès le début des années 2000, le Royaume-Uni, les États-Unis ou encore l'Allemagne avaient déjà mené des réformes en la matière16(*).

40- Le levier d'une plus grande coopération entre professionnels. Tous les pays développés ont cherché à développer une approche plus coordonnée des soins. Certains pays ont opté pour le regroupement des professionnels autour de pratiques de médecine générale. Ainsi, au Royaume-Uni, les cabinets de groupe se sont fortement développés, et en Allemagne, il en a été de même pour les centres de santé et les polycliniques. Au Canada et en Australie ont été créés des projets expérimentaux dans les provinces pour des Réseaux de soins de première ligne, ou Family Health Networks en Ontario, et Groupes de médecins de famille au Québec. Au Royaume-Uni, un nouveau contrat a été introduit, le New General Practitioner Contract, rationalisant des éléments du contrat traditionnel entre les médecins généralistes et le National Health Service. Enfin, certains ont opté pour le développement de rôles infirmiers ou de métiers nouveaux pour compenser la pénurie de médecins dans certaines spécialités, comme en Finlande ou en Suède.

41- Le levier de l'introduction de modes mixtes de rémunération des médecins. En Suède et en Finlande a été développé dans les années 1990 un nouveau mode de rémunération pour les médecins référents exerçant dans les centres de santé, associant une part salariale, une part à la capitation selon le nombre de patients du cabinet, et une part de paiement à l'acte.

42- Le levier de la régulation de la demande. Ce levier comporte en premier lieu un versant financier. Outre le ticket modérateur, introduit en France dès 1945 et en Allemagne en 2004, la franchise et la participation de 10 ou 20% en Suisse reporte une partie du coût des soins sur le patient. En second lieu, il comporte un versant éducatif. L'éducation à la santé, l'idée de responsabilisation du patient, vise à développer son autonomie et a pour but de freiner la demande de soins.

43- Le levier de la régulation de l'offre : Le système du « gatekeeping ». Selon ce système, des médecins généralistes pilotent le patient dans un parcours de soins, et sont chargés de l'orienter vers d'autres professionnels de la santé, notamment spécialistes. Le médecin généraliste, « gatekeeper », garde en main les clefs de l'accès à d'autres professionnels. Ce système est pratiqué tout d'abord au Royaume-Uni : Le patient doit choisir son médecin généraliste, un choix encadré par une sectorisation géographique. Il doit ensuite passer par ce dernier pour pouvoir consulter un autre praticien. Ce mode d'organisation des soins est également pratiqué en Suède et en Espagne. Dans ces trois pays, les praticiens exercent au sein de cabinets regroupant d'autres professionnels de santé, généralistes ou spécialistes, ce qui permet une véritable coordination des soins entre professionnels. En revanche, en Allemagne ou en Italie, si les soins primaires sont également assurés par des médecins généralistes chargés d'orienter les patients pour la suite des traitements, le regroupement en cabinets collectif n'est pas aussi poussé.

44- Les résultats mitigés du système. Selon de nombreuses analyses, les systèmes étrangers ayant recours à une telle organisation dépensent moins pour la santé17(*). Mais ces mêmes auteurs soulignent toutefois que ces résultats doivent être considérés « avec précaution et validés par de futures études ». Il est également important de mettre en relation toutes les variables d'un système de santé afin d'évaluer correctement la qualité du gatekeeping : En premier lieu, il ressort que le système de gatekeeping et la capitation sont étroitement liés. En second lieu, il ressort également que les conséquences de sa mise en place varient fortement selon les incitations et contraintes adressées aux généralistes : Le généraliste anglais, dans le cadre des Primary care trust, est notamment incité à réduire les recours à la médecine spécialisée puisqu'il gère un budget de soins secondaires. Dans d'autres systèmes, l'absence d'une prescription du généraliste se traduit par une absence totale de remboursement. En troisième lieu, dans de nombreux systèmes de santé, le gatekeeping a pour fonction, non de maîtriser les dépenses, mais de rationaliser l'utilisation d'un système de soins secondaires où l'offre est limitée. Ainsi, la mesure n'aura pas la même portée s'il existe une offre généreuse de médecine spécialisée en ville (comme c'est le cas de la France) ou si, au contraire, celle-ci est cantonnée à l'hôpital et n'est accessible qu'au prix d'une attente plus ou moins longue. Enfin, ce système présente une plus grande efficience dans les pays où sont organisés des regroupements de médecins au sein de cabinets collectifs, comme c'est le cas au Royaume-Uni.

45- L'abandon du système du gatekeeping, l'exemple américain. Aux États-Unis, ce système a été mis en place à partir des années 1990 par des organismes d'assurance. Cependant, dès le début des années 2000, l'utilité du gatekeeping quant à la maîtrise des dépenses de santé a été questionnée. Une étude montrait notamment que les dépenses médicales n'étaient pas nécessairement inférieures, pour le même réseau de médecins, selon que les assurés étaient soumis à un filtrage strict ou à de simples incitations à passer par un médecin généraliste18(*). Une autre a montré des changements de comportements minimes lors de l'abandon par un groupe d'assurance santé de son système de « gatekeeping »19(*). Ces résultats, combinés à un mécontentement grandissant des spécialistes et des patients et à un accroissement considérable des tâches bureaucratiques des généralistes, ont conduit à l'abandon de ce système20(*).

46- En France, un rapport d'enquête de l'Inspection générale des Finances rendu en mars 2003 quant aux expériences étrangères concernant le gatekeeping a d'ailleurs pris acte de ces renonciations, en précisant qu'au « vu des expériences étrangères, il est difficile de conclure sur l'efficacité économique et sanitaire de ce dispositif. De plus, la mise en oeuvre d'une telle mesure apparaît peu pertinente en France aujourd'hui »21(*).

* 16 R. MARIÉ, « L'évolution des techniques de rémunération des médecins de ville : approche de droit comparé », RDSS 2012, p.1049.

* 17 U.-G GERDTAM, B. JÖNSSON, M. MAC FARLAN, H. Oxley, « The determinants of health expenditure in the OECD countries » in P. Zweifel (ed.) Health, « The medical profession and reulation », Kluwer Academic Publishers, 1998.

* 18 J.-J ESCARCE, K. KAPUR, G.-F JOYCE, K. A. VAN VORST, « Expenditures for physicians services under alternatives models of managed care », medical Care Research and Review, vol.57, n°2, 2000.

* 19 T-G. FERRIS, Y. CHANG, D. BLUMENTHAL, D.-D PEARSON, « Leaving gatekeeping behind, effects of opening access for adults in a health maintenance organization », New England Journal of Medecine, November 1, 2001.

* 20 P-L. BRAS, « Le médecin traitant : raisons et déraisons d'une politique publique », Dr. soc. 2006, p. 59.

* 21 « Rapport d'enquête sur la régulation et l'organisation de la médecine de ville : Les enseignements des expériences étrangères », n°2002-M-023-02 - Inspection générale des Finances, mars 2003.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon