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L'influence des principes de la doctrine sociale de l'Eglise sur les politiques de ressources humaines des entreprises

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par Ranim EL-HAGE
Université Paris 1 Pantheon Sorbonne - M2 Recherche Economie des ressources humaines et des politiques sociales 2007
  

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Université Paris I Panthéon-Sorbonne

UFR de sciences économiques 02

Master 2 Recherche
Economie des ressources humaines et des politiques sociales

L'influence des principes de la doctrine

sociale de l 'Eglise sur les politiques de

ressources humaines des entreprises

Sous la direction du Professeur Jean-Marie Monnier
Mémoire présenté et soutenu par Ranim El-Hage

Paris

L'Université de Paris I Panthéon - Sorbonne n'entend donner aucune approbation ni désapprobation aux opinions émises dans ce mémoire ; elles doivent être considérées comme propres à leur auteur.

A la mémoire de Père Simon El-Zind

Remerciements

Je tiens à assurer de mes remerciements tous ceux qui ont contribué à la réussite de ce mémoire.

Ma meilleure reconnaissance va au Professeur Jean-Marie Monnier, directeur de ce travail, qui a généreusement donné de son temps pour orienter mes efforts et me procurer quelques références-clés. Je tiens particulièrement à lui exprimer toute ma gratitude pour ses encouragements réconfortants, surtout lorsque j'allais à nos réunions de travail avec le sentiment d'avoir fait du surplace depuis la dernière rencontre.

Un grand merci à M. le Professeur Bernard Gazier, directeur de ce master. C'est lui qui, dès la réunion de prérentrée, m'a donné le feu vert pour entamer ce sujet pas très exploité dans les filières académiques, et m'a suggéré comme directeur le Professeur Jean-Marie Monnier, expert dans les questions inhérentes au catholicisme social.

Je voudrais surtout exprimer ma très grande gratitude aux interlocuteurs de ce mémoire, MM. Pierre Deschamps, Emmanuel Gravier et Xavier Grenet, qui sont les dignes messagers de la pensée sociale chrétienne et qui confirment la pertinence sociale et la portée humaine de cette doctrine.

Je tiens également à remercier à l'avance tous les membres du jury pour le temps qu'ils accorderont à la lecture et à l'évaluation de ce mémoire.

Finalement, je voudrais remercier mon père, Dr. Youssef Kamal El-Hage, à qui je dois mon éclairage sur la doctrine sociale de l'Eglise et mon intérêt pour ses principes depuis que j'ai décidé, il y a deux ans, de poursuivre mes études dans la voie de l'économie du travail et des ressources humaines.

Introduction

Le communisme, on le sait bien, s'est effondré. Cependant on pourrait, dans une certaine mesure, comparer ses buts à ceux de la « Doctrine Sociale de l'Eglise » (DSE),1 qui s'est progressivement affirmée pendant plus d'un siècle : comparer les buts, certes, surtout celui de contrebalancer le pouvoir du capital lorsque ce dernier piétine la dignité de « l'inférieur », mais pas les moyens. En effet, le communisme «met une arme tranchante au service de sa doctrine, l'arme de la lutte des classes, mobilisant les foules. »2 Cette arme est offensive et souvent sanglante, à l'opposé même de la pensée chrétienne qui, quant à elle, n'espère que réconcilier, de manière harmonieuse et pacifique, capital et travail.

L'histoire de la DSE commence en 1891, avec l'encyclique Rerum novarum du Pape Léon XIII, qui pose les bases des trois axes fondamentaux de l'entreprise : la justice sociale, la recherche du bien commun et le rôle des corps intermédiaires. Mais le terme « entreprise » n'apparaît pour la première fois qu'en 1931. Des concepts tels que « organisation, formation et évolution des carrières » sont encore plus tardifs. Ce n'est qu'après la Seconde Guerre mondiale que l'entreprise s'insère vraiment, en tant que telle, dans l'ensemble de la DSE, dont les exigences et articulations, en perpétuelle expansion, y font de plus en plus référence. Aujourd'hui, on pourrait dire que les grands principes de la DSE sont considérés par les grands entrepreneurs de ce monde, constamment déchirés dans leurs réflexions entre rentabilité financière et solidarité humaine, comme une vision d'ensemble de plus en plus directrice. Cette vision, quant à elle, aspire à « l'organisation de la cité », notamment à l'heure actuelle où le retour du capital et de l'actionnariat, et le développement de la société de consommation et de ses médias, lancent les valeurs chrétiennes de l'entreprise dans une aventure sans précédent. La « guerre non sanglante » de la DSE contre le déséquilibre capital-travail n'est pas encore gagnée, d'autant moins que les armes du capitalisme à outrance se sont encore plus dangereusement développées

1 Par le terme « Eglise », nous entendons plus précisément l'Eglise catholique tout au long de ce travail.

2 Michel Albert, Les Eglises face à l'entreprise, Ed. du Centurion, 1991, p. 9

et que se sont ajoutés à la bataille les chiffres d'affaires colossaux des « monstres internationaux souterrains » qui parasitent l'économie mondiale et la santé humaine.

Le corpus de l'enseignement social de l'Eglise ne cesse, depuis plus de cent ans, de se développer au rythme des besoins de l'humanité. En cela, il consolide les activités de toutes les ONG ramant à contre-courant dans un monde cruel, toujours témoin de la dangereuse séduction de la fortune au détriment des exigences de justice et de solidarité humaine.

Aussi, dès ses premières interventions dans l'entreprise, l'Eglise s'est efforcée d'enrichir de manière convaincante le vocabulaire managérial en ajoutant « participation », « consultation » et « dialogue » à « rentabilité », « déficit » et « marché financier ».

L'Eglise n'a donc ni défendu le socialisme, ni adopté le libéralisme. Elle a soigneusement recueilli de chacun des idées-forces qui, une fois explicitées de façon plus nuancée, se révèlent conformes aux valeurs chrétiennes. Ainsi, la DSE défend la liberté individuelle d'entreprendre et le droit à la propriété privée, tous deux issus du libéralisme, mais seulement dans la mesure où leurs fruits bénéficieront au bien commun, au développement de l'Homme et à la préservation de l'environnement. Et bien que l'Eglise ait sanctionné l'idée de l'existence de « syndicats » pour les travailleurs, idée curieusement amorcée par le libéralisme, elle ne cesse de rappeler que « les rapports au sein du monde du travail doivent être caractérisés par la collaboration », car « dans tout système social, autant le travail que le capital sont indispensables au processus de production. »3 Enfin, si le socialisme entend par principe de subsidiarité l'idée selon laquelle l'Union est tenue de prendre en charge toute tâche qui, du fait de son ampleur et pour des motifs de mise en oeuvre efficace, est susceptible d'être mieux exécutée par l'Union que par les Etats pris isolément, le pape Pie XI entend par contre, dans son encyclique Quadragesimo anno de 1931, que l'élément supérieur aide l'élément inférieur

3 Conseil Pontifical Justice et Paix, Compendium de la Doctrine Sociale de l 'Eglise, Libreria Editrice Vaticana , 2005, n. 306.

à mieux exécuter par lui-même la tâche que ce dernier est à même d'entreprendre de la manière la plus efficace, sans toutefois se substituer à lui ou le faire à sa place. Ainsi, l'Eglise entend encourager l'individu à l'innovation et à la création simultanée de valeur et d'emploi plutôt que de le voir démotivé par l'assistanat et donc démuni de tout esprit d'initiative pouvant servir la communauté.

Cette idéologie nouvelle, une sorte de troisième voie, une doctrine de « juste milieu », soutenue sans réserve par les uns, farouchement contestée par les autres, surtout pour sa position jugée plutôt indécise et sans option ferme, a suscité l'apparition d'une abondante littérature couvrant tous les aspects de la vie sociale, notamment le monde du travail, la vie des entreprises et le partenariat social. Mais c'est bien le « Compendium de la Doctrine Sociale de l'Eglise », publié en 2005 par les soins du « Conseil Pontifical Justice et Paix », qui regroupe le mieux les grands principes de la pensée chrétienne sur la question sociale. Ce Compendium est devenu un peu comme une « Bible du management », qu'un nombre non négligeable de croyants, de prêtres, de penseurs, de sociologues mais aussi d'entrepreneurs et de responsables économiques, consultent régulièrement pour prendre du recul et parfois pour s'y réfugier loin du monde implacable des affaires. Les décideurs chrétiens en affaires deviennent conscients qu'ils sont trop souvent conditionnés par la seule loi du profit, ce qui les éloigne de leur vraie vocation. Ces moments de recul et de recueillement sont certes rares, mais perçus comme chers et sacrés, et parfois déterminants dans toute prise de décision radicale, susceptible de bousculer les collaborateurs dans l'entreprise, le groupe ou le réseau d'entreprises. Que de fois, en effet, une simple signature d'un contrat « mal pensé », ou un deal « appétissant » pour faire monter en flèche la valeur des actions, a pu mettre des centaines de travailleurs au chômage, des milliers d'enfants hors des écoles, et enfoncer d'innombrables foyers dans la misère.

Penser avant d'agir, traduire son idéal de vie par des initiatives quotidiennes, exercer l'autorité pour coordonner et non pour détrôner, résister aux difficultés économiques par la créativité, l'innovation, et l'investissement dans le capital productif, voire essentiellement dans le capital humain, au lieu d'en réduire lâchement l'effectif :

tels sont les principaux défis économico-éthiques posés aux responsables entrepreneuriaux dans les moments de crise et qu'ils sont tenus de relever.

Le but de ce mémoire est de retracer l'histoire de la DSE depuis ses origines et de déceler son impact actuel sur le « business contemporain ».

Dans une première partie, nous passerons en revue les principales encycliques sociales ainsi que quelques interventions des papes dans le monde du travail. Dans cette même partie, l'éthique d'entreprise sera formalisée dans son cadre universel « laïque », sans encore rentrer dans le détail de l'apport spécifique de l'enseignement social de l'Eglise pour cette éthique. Dans une deuxième partie, nous discuterons des principes de la DSE touchant le monde du travail et des ressources humaines, pour dégager ensuite, dans une troisième partie, les fondements d'un modèle de management chrétien. La quatrième partie, empirique quant à elle, présentera diverses associations et regroupements de dirigeants chrétiens en France ainsi que leurs principales activités. La dernière partie, qui complète la précédente, portera sur des entrevues que j 'ai pu passer avec des entrepreneurs chrétiens engagés, soucieux de mettre les exigences de leur foi au service des communautés qu'ils dirigent. Leur souci de rendre aisé mon accès aux locaux de leurs entreprises, l'observation de leur cadre de travail, l'expression des visages de leurs collaborateurs, ainsi que la transparence de leurs entretiens avec moi, seraient en soi dignes d'être longuement relatés tant ils sont intimement corrélés au contenu même des témoignages, eux-mêmes fidèles aux principes fondamentaux de la DSE. Je synthétiserai les difficultés auxquelles ces chefs d'entreprise ont dû faire face, ainsi que les erreurs que nombre d'entre eux ont avoué avoir commises et dont ils ont pu éviter les conséquences néfastes grâce à une négociation loyale avec leurs partenaires dans l'entreprise. Ces cadres occupent des postes de responsabilités différentes : membre d'un directoire hétérogène, DRH, propriétaire PDG. Les marges de manoeuvre dont ils disposent varient en conséquence. Mais autant la marge est réduite, autant le responsable est naturellement porté à incarner un plus grand faisceau de valeurs humaines. Investi de la confiance de ses supérieurs, il peut alors engendrer, grâce à sa conscience professionnelle innée et à

ses convictions éthiques et humaines par-delà l'entreprise, une nette amélioration des conditions de travail.

***

I. Les principaux textes de l'Eglise sur le

monde du travail et l'éthique d'entreprise

I.1 Les principales encycliques sociales sur le travail de Léon XIII à Jean-Paul II

I.1.a Léon XIII : Encyclique « Rerum novarum » sur la condition des ouvriers (1891)

La toute première encyclique sociale de l'Eglise, Rerum novarum, promulguée par Léon XIII en 1891, est apparue au moment du passage d'une partie de l'Europe de l'agriculture à la société industrielle (voir annexe 1). Cette encyclique historique constitue à juste titre la charte des travailleurs et la base de toutes les encycliques sociales ultérieures sur le travail. Son inspiration sera régulièrement célébrée et actualisée par plusieurs encycliques ou lettres apostoliques postérieures (Quadragesimo anno de Pie XI, Mater et Magistra de Jean XXIII, Octogesima adveniens de Paul VI, Laborem exercens et Centesimus annus de Jean-Paul II).

L'axe de réflexion central dans Rerum novarum est la question ouvrière dans toute son ampleur. L'encyclique analyse les rapports travail-capital et les modalités de coexistence des classes dans un climat sain et productif. Travailleurs, capitalistes, et dirigeants publics ont des devoirs les uns envers les autres. Tous ont des droits inaliénables qu'il est digne de respecter et d'acquérir, tout en respectant le principe de collaboration, opposé à la lutte des classes, comme moteur fondamental pour le changement social, une approche en soi tout à fait non-marxiste puisqu'elle n'engendre pas le conflit. C'est le passage de l'ère agricole à l'ère industrielle qui a opéré une transformation dramatique dans les rapports entre patrons et ouvriers. Les nouveaux rythmes de travail industriel, conditionnés par la production de masse et à la chaîne, ont figé les travailleurs et renforcé leur dépendance vis-à-vis de l'usine, devenue leur source, parfois unique, de gagne-pain. A la même époque, les corporations étaient abolies, d'où la disparition d'une protection autrefois indispensable pour les subordonnés. Dans ce contexte, tout sentiment d'appartenance, religieuse ou autre, disparaissait, et les

travailleurs se retrouvaient isolés et sans résistance face à leurs maîtres, qui se partageaient la majorité des richesses mondiales en la concentrant dans leurs réseaux industriels et commerciaux.

Le fait est que chaque partenaire social - travailleurs, patrons, pouvoirs publics - doit apporter son concours pour harmoniser l'action commune dans un environnement désormais déréglementé. Rerum novarum insiste sur le fait que les classes ne doivent pas être ennemies mais complémentaires, et l'équilibre de leur co-existence doit être assuré et entretenu. Une sorte de « solidarité organique » au sein d'une collectivité dans laquelle « l'individu tout en devenant plus autonome apparaît aussi comme plus dépendant. »4 La survie de l'une de ces classes dépend alors de celle de l'autre. L'ouvrier a le devoir d'accomplir fidèlement le travail qu'il s'est engagé à honorer, et ce par contrat libre et initiative personnelle. Il doit prendre soin du capital matériel que son patron lui a confié, et mettre toute son âme pour assurer une production de qualité, quelque soit sa nature. Le travailleur a d'ailleurs bien plus d'estime pour la matière, rare à ses yeux, que le patron. Ses revendications doivent se faire à travers un dialogue noble avec son supérieur. Toute réaction violente doit être évitée. Toutefois, un travailleur intelligent est avant tout vigilant dans le choix de ses maîtres. Il doit savoir échapper à tout contrat qui soit « trop beau pour être vrai », qui ne mènerait qu'à la ruine de la relation d'emploi. Le travail physique n'est point une honte pour l'homme ; bien au contraire. C'est un moyen de préserver son dynamisme et sa vitalité. Le patron doit veiller à la dignité de son dépendant. Au-delà des conditions de travail et du respect des différences d'âge et de sexe, il doit respecter le temps libre du travailleur, que ce dernier aimerait et même devrait consacrer à sa famille et à sa formation continue. Le patron n'a aucun droit d'entraver l'épargne du travailleur, qui n'est pas abondante et dont l'accumulation lui confie un droit de « propriété privée ». L'Etat, quant à lui, doit veiller tout particulièrement sur le sort des travailleurs, qui sont les plus démunis dans l'édifice social, et s'engager à améliorer leurs conditions de vie, tant pour assurer la sécurité générale de tous que pour éviter les crimes de subsistance.

4 Emile Durkheim, Préface de De la division du travail, 1893.

I.1.b Pie XI : Encyclique « Quadragesimo anno » sur l'instauration de l'ordre social (1931)

Quarante ans après Rerum novarum, la relation capital-travail a de nouveau évolué. Deux ans après la grave crise économique de 1929, les entreprises sont en difficulté et le chômage touche de plein fouet le monde ouvrier. Dans la foulée de cette crise mondiale sans précédent, Pie XI publie en 1931 son encyclique Quadragesimo anno pour commémorer les quarante ans de Rerum novarum. Il y préconise un nouvel ordre social, basé sur une nouvelle manière de répartir les fruits de la croissance. L'idée du salaire de subsistance devrait désormais être écartée. Certes, la propriété privée du capitaliste est toujours respectée, mais le développement et la multiplication du fruit du capital ne pourraient avoir lieu sans le roulement et la consommation de la société. Il faut revenir à l'idée de l'accumulation de l'épargne, qui permet au pauvre de faire face aux charges familiales, et à l'incertitude qui le touche en premier. Le subordonné a le droit de pouvoir offrir à ses enfants plus de chances et d'opportunités qu'il n'en a eu lui-même. De ce fait, ouvriers et employés devraient être plus impliqués dans la propriété de l'entreprise, dans sa gestion et dans ses profits.

Léon XIII avait déjà précisé que le salaire ne se calculait pas simplement par une formule mathématique proportionnelle à la productivité du « louage d'ouvrage ». Notons aussi que les professions sont étroitement solidaires, car la force de travail bénéficie aussi bien à l'individu qu'à la société. La rémunération devrait alors augmenter proportionnellement aux avantages dont bénéficie l'entourage suite à la consommation ou l'utilisation de la valeur créée, et ce en particulier à une époque où la femme n'avait pas encore accédé officiellement au marché du travail, et où il était primordial qu'elle ne soit pas obligée de négliger l'éducation des enfants et l'harmonie de son foyer pour travailler à la survie du ménage dans des conditions épuisantes. Le salaire masculin devrait donc suppléer aux besoins de toute la famille, sans pour cela atteindre des niveaux utopiques qui mettraient en péril la compétitivité de l'entreprise et accélèreraient sa ruine, au détriment du travailleur lui-même et de la société, exposée de ce fait à un chômage de masse, voire à une ruine structurelle. En contrepartie, l'entreprise aurait le devoir de ne point négliger le souci de son développement et de son progrès économique, et devrait se

voir dans l'obligation d'assumer la responsabilité pour toute dépression qu'elle aurait pu éviter si elle avait été plus vigilante dans sa gouvernance.

Dans ce contexte de crise généralisée à laquelle l'entreprise est incapable de faire face, même en mettant tous ses efforts dans la bonne gérance interne, les pouvoirs publics ont un rôle primordial à jouer. Et si la prospérité des nations est étroitement liée à la modération des tensions entre les classes, il est nécessaire de faire converger les efforts vers l'élaboration d'une politique salariale qui soit acceptée par tous, une politique qui permette à l'ouvrier de se procurer, au-delà de la simple subsistance, des fonds de réserve lui permettant de saisir les opportunités nouvelles pour améliorer son statut économique. A ce niveau, les autorités publiques ne sont pas uniquement tenues d'améliorer la situation des défavorisés à travers une redistribution des richesses, mais surtout en leur délégant le maximum de tâches qu'ils seraient aptes à entreprendre. Ceci découle du respect du principe de subsidiarité, qui sera par la suite abondamment abordé et mis en valeur dans cette encyclique.

Pour ce qui est de l'ordre social, préconisé par Pie XI, il consiste à regrouper les travailleurs par métiers et par branches d'activité afin qu'ils puissent valoriser leurs intérêts communs et les défendre continuellement, tout en les orientant vers le bien commun de la société, qui ne peut ni être livrée au libre jeu de la concurrence, ni délaissée entre les mains de la dictature, et qui a donc besoin d'institutions intermédiaires conçues sur les principes de justice, de charité et de collaboration économique. On était bien loin de cet idéal dans le monde de Pie XI, régi par des oligarchies sans aucun scrupule éthique ou professionnel. Ces oligarchies accaparaient pouvoir et richesses, disposant illégalement des ressources des nations, qu'ils détournaient à leurs profits personnels. Cette immoralité des dirigeants avait fini par atteindre les travailleurs, surtout les plus jeunes, qui se voyaient lésés, harcelés et désorientés en début de parcours professionnel. Ils étaient alors séduits par l'argent facile et succombaient, souvent bien tôt, aux réseaux de corruption d'autant que la Grande Guerre et la Grande Crise avaient poussé les gens à se lancer dans la criminalité et dans les affaires du « dirty money ».

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius