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Les révisions constitutionnelles au Sénégal

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par Ibrahima DIALLO
Université Cheikh Anta Diop de Dakar -  Maitrise en droit public 2008
  

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Ibrahima DIALLO

Etudiant la FSJP de Dakar

En 4ème année de droit public

Option : Administration publique

Introduction 

Historiquement, c'est à la fin du XVIII°siècle, au moment des révolutions américaines et françaises que le mot constitution tel qu'il est conçu dans l'Etat moderne,( un moyen de conciliation entre l'autorité de l'Etat et la liberté des citoyens), a vu le jour. Sa définition fait appel à deux critères à savoir un critère matériel et un critère formel.

Matériellement, la constitution se définit par son contenu. Dans ce sens, elle renvoie à l'ensemble des règles suprêmes de l'Etat. Il faut entendre par là les règles relatives à la forme de l'Etat1(*) à l'exercice de la souveraineté entre les pouvoirs et celles concernant les droits des citoyens. Partant de là, on peut dire que tout Etat, du fait qu'il existe possède forcément une constitution. En effet on y trouve un certain nombre de dispositions réglant l'organisation et les rapports des organes publics (le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire) et fixant par ailleurs les relations avec les citoyens.

A l'opposée le critère formel s'intéresse à la procédure. La constitution se définit alors comme l'ensemble des règles juridiques élaborées et révisées selon une procédure spéciale et supérieure à celle utilisée pour les lois ordinaires. Il en découle que la constitution est à la fois privilégiée et protégée. Elle est privilégiée en ce sens qu'elle est unique dans son genre, elle est protégée dès lors qu'elle est hors d'atteinte des autres normes qui, par définition, lui sont inférieures. C'est ce qui justifie l'existence du contrôle de constitutionnalité pour veiller au respect de cette suprématie de la constitution.

Généralement ces deux critères coïncident. Autrement dit les règles les plus importantes (critère matériel) bénéficient d'un régime juridique supérieur (critère formel). C'est le cas de la constitution française ou, de la constitution américaine. On parle alors de constitution rigide à savoir une constitution élaborée et révisée selon une procédure supérieure à celle des lois ordinaires.

Toutefois, il est possible qu'un Etat soit doté d'une constitution uniquement matérielle comme le montre l'exemple de la Grande- Bretagne. Dans ce cas il n'existe pas de supériorité par rapport aux lois ordinaires lesquelles peuveut modifier une règle constitutionnelle. D' où la célèbre formule du Genevois Jeans Louis de Lolme « le Parlement anglais peut tout faire, sauf changer une femme en homme et un homme en femme ». On parle alors de constitution souple.

Le Sénégal qui nous intéresse particulièrement, contrairement à la Grande Bretagne, ne fait pas exception à la règle du fait de la supériorité de sa constitution par rapport aux autres normes et compte tenu de la protection particulière dont elle bénéficie (procédure de révision distincte de la procédure législative ordinaire, existence d'un juge constitutionnel spécialisé pour veiller au respect de la constitution)

L a constitution joue un rôle fondamental dans l'Etat. En effet elle un instrument supérieur de protection des droits fondamentaux mais également de détermination du statut des pouvoirs publics. Elle apparaît comme un moyen de conciliation entre l'autorité de l'Etat et la liberté des citoyens .C'est au regard de cette importance que la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de1789 stipule en son article 16 « toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée n'a point de constitution ». De par son contenu, elle constitue un moyen pour l'institution d'une société démocratique. En organisant la séparation des pouvoirs elle limite l'autorité des gouvernants car des mécanismes sont prévue pour que le pouvoir arrête le pouvoir selon l'heureuse formule de Montesquieu ( droit de dissolution, motion de censure etc). En prévoyant des droits et libertés fondamentaux pour les citoyens, elle met un terme à l'oppression dont ils étaient victimes dans les régimes monarchiques. Encore faudrait il qu'elle soit appliquée, que le constitutionnalisme soit effectif. Autrement dit il faudrait que la vie politique soit effectivement régie par les normes constitutionnelles, que les droits et libertés des citoyens soient respectés et sanctionnés en cas de violation.

Malgré cette importance, la constitution n'est pas un acte statique, elle doit évoluer dans le sens du renforcement de la démocratie et de l'Etat de droit, d'où la nécessité d'opérer des révisions constitutionnelles.

La révision se définit comme un procédé de technique juridique par lequel un acte est modifié dans sa forme ou plus fréquemment dans son contenu2(*). Elle s'explique essentiellement par la nécessité d'adaptation de la constitution aux circonstances changeantes afin qu'elle puisse jouer pleinement sa fonction de régulation des rapports entre les gouvernants et les gouvernés.

Toutefois cette nécessaire adaptation ne doit pas être un prétexte pour remettre en cause la stabilité des institutions. C'est la raison pour laquelle le constituant prévoit une procédure spéciale devant être observée pour toute modification de la constitution.

Si on l'analyse telle, qu'elle est définie dans les quatre constitutions que le Sénégal a connues depuis son indépendance, on se rendra compte que, dans les deux premières constitutions à savoir celle du 24 janvier 1959 et celle du 26 août 1960, la procédure se déroule, en deux étapes. En effet il faut une initiative émanant soit du Gouvernement ou de l'Assemblée. Dans le premier cas, le projet doit être approuvé en conseil des ministres. Dans le second cas, il faut un vote des députés à la majorité des 3/5 et lorsque cette majorité n'est pas atteinte, il faut un référendum.

Concernant les deux autres constitutions à savoir celle du 7 mars 1963 et celle qui est en vigueur la procédure se déroule en trois étapes. Il faut d'abord une initiative émanant soit du Président de la République ou d'un Parlementaire. Le texte doit ensuite être adopté selon la procédure législative ordinaire. Et enfin il est approuvé en principe par référendum et exceptionnellement par le Parlement.

En application de cette procédure, le Sénégal a produit une quantité impressionnante de lois constitutionnelles3(*).

Toutefois il n'est pas question d'une étude successive et intégrale de ces lois

constitutionnelles, mais il s'agira de voir les convergences de ces dernières afin de les classer pour comprendre clairement les préoccupations du constituant .Il faut également souligner que seules les modifications les plus significatives expliquant le mieux la raison d'être des révisions seront étudiées. En outre pour étudier les révisions constitutionnelles au Sénégal, il convient de partir de celles relatives à la constitution du 7 mars 1963 car les deux précédentes constitutions n'ont pas connu des modifications significatives en raison de leur courte durée. Enfin la constitution étant appelée à évoluer, d'autres révisions pourront être effectuées en cas de nécessité. Mais dans le cadre de notre étude, seules les révisions définitives seront prises en compte.

Néanmoins, au regard de la dynamique des révisions constitutionnelles, Il est légitime de s'interroger sur le caractère fondamental de la constitution au Sénégal. Autrement dit est ce que la récurrence des révisions constitutionnelles ne remet pas en cause le caractère fondamental de la constitution ? N'assiste t-on pas à une banalisation ou encore à une remise en cause de la suprématie de la constitution ?

Le choix d'un tel sujet nous parait justifié au regard de la fréquence des révisions constitutionnelles. En effet Si la finalité de toute révision constitutionnelle est de permettre la nécessaire adaptation du texte constitutionnel aux circonstances changeantes, l'histoire constitutionnelle de l'Etat moderne, surtout africain, regorge d'exemples de révisions constitutionnelles en déphasage avec une telle finalité, n'ayant d'autres objectifs que la satisfaction des préoccupations personnelles des tenants du pouvoir. L'étude des révisions constitutionnelles sénégalaises est dès lors intéressante car elle permet de comprendre les fondements des changements constitutionnels au Sénégal, lesquels changements demeurent problématiques compte tenu de leur récurrence.

De plus cette récurrence pose le problème de la réalité du constitutionnalisme Sénégalais. En effet comment considérer que la constitution est la norme suprême, qu'elle peut limiter l'autorité des gouvernants lorsqu' elle peut être modifiée au gré des contingences politiques ? C'est la raison pour laquelle récemment il y a eu une convergence de spécialistes en droit constitutionnel à Dakar parmi lesquels le Professeur Ismaila Madior Fall afin d'étudier les causes de cette inflation révisionniste afin d'y apporter une solution

Les recherches documentaires ont été entièrement effectuées au CREDILA, à l'Assemblée nationale, à la bibliothèque centrale et à la salle de travail. Elles ont abouti à un résultat qui sera exposé dans la bibliographie et les annexes.

Si l'on s'intéresse aux lois constitutionnelles, ont se rend compte qu'elles ont trait à des objets divers. C'est ainsi qu'on peut y relever des révisions relatives aux règles du jeu démocratique, aux statut et pouvoirs du Président de la République en déphasage avec la finalité poursuivie par une révision de la constitution( permettre une nécessaire évolution de la constitution), même si on peut noter des initiatives de renforcement de la démocratie et de l'Etat de droit avec le multipartisme, la spécialisation juridictionnelle ou encore la consécration constitutionnelle du principe de la libre administration des collectivités locales :Il s'agit là des révisions de la constitution du 7 mars 1963

Par ailleurs, c'est-à-dire avec les réformes de la constitution de 2001 on peut relever, outre la volonté de se maintenir au pouvoir, une instabilité institutionnelle compte tenu du mouvement de création et de suppression auquel les institutions républicaines sont assujetties, mais aussi une violation du calendrier électoral compte tenu de la double prorogation du mandat des parlementaires.

Pour s'en rendre compte, il faut d'une part analyser les révisions de la constitution du 7 mars 1963 (I) et d'autre part les révisions de la constitution du 22 janvier 2001 (II)

I°) LES REVISIONS DE LA CONSTITUTION DU 7 MARS 1963 :

La constitution de 1963 a connu une pluralité de modifications. Plus exactement elle a été réformée vingt fois. Ces modifications ont trait à divers aspects. Il s'agit de la pérennisation du pouvoir, du renforcement et de la stabilisation des pouvoirs du Président de la République, du multipartisme, de la spécialisation juridictionnelle et enfin de la consécration constitutionnelle des collectivités locales.

1°) la pérennisation du pouvoir en place :

Il s'agit de l'ensemble des révisions entreprises par le régime socialiste en vue de se maintenir au pouvoir. Celles-ci concernent d'abord la suppression de la clause de limitation du nombre de mandats du Président. En effet en 1970, une révision constitutionnelle avait instauré la limitation du nombre de mandats du Président à deux.4(*) Il s'agissait par là de taire les velléités d'occupation du pouvoir à vie contraires à l'alternance des élites politiques au sommet de l'Etat qui ont entraîné des conflits armées dans plusieurs Etats africains. Cependant cette clause sera frappée d'une réelle instabilité car elle alternera suppression et restauration au gré des circonstances politiques. C'est ainsi qu'elle sera supprimée par la révision constitutionnelle de 19765(*).

Il était question par cette réforme d'après la motivation d'une part « de permettre au Président Senghor de poursuivre la tache qu'il s'est assigné pour le plus grand bien du peuple sénégalais »et d'autre part de lui permettre de trouver un successeur à la tête de l'Etat. En réalité il s'agissait de renouer avec l'éligibilité indéfinie afin de maintenir le régime en place. Cela est visible par la mention du nom du Président dans la motivation qui plus pose le problème de la validité de la loi constitutionnelle de 1976 car, par nature, la loi est générale et impersonnelle à fortiori celle qui est destinée à intégrer la norme fondamentale, suprême. En outre cette révision va affecter le statut du Président de l'Assemblée nationale dans la mesure ou le titre de deuxième personnalité de l'Etat et la suppléance du chef de l'Etat lui seront retirés au profit du premier ministre. Ce dernier, en sa qualité de nouveau suppléant du Président de la République sera chef de l'exécutif au lendemain de la démission du Président Senghor jusqu'aux élections présidentielles de1983 qu'il remporta brillamment.

On constate ainsi que le Président sortant a utilisé les mécanismes constitutionnels pour organiser sa propre succession .Sans doute avait -il plus confiance en son premier ministre ou pensait -il qu'il était le plus apte à poursuivre sa mission. Dans tous les cas, on peut noter une certaine patrimonialisation du pouvoir considéré comme un bien devant rester entre les mains de la famille socialiste. Malgré son irrégularité matérielle, cette loi de 76 fera parti du corpus constitutionnel jusqu'en 1991.

En effet suite à la concertation entre l'opposition et le pouvoir sur le système électoral, la limitation du nombre de mandats est restaurée. Ainsi l'article 21 al 2 de la loi n°91-46 du 06 octobre 1991dispose « il n'est rééligible une seule fois ».En outre le mandat du Président passe de cinq à sept ans.

Selon l'exposé des motifs cette réforme devait faciliter l'alternance à la tête de l'Etat. Cependant on peut s'interroger sur la sincérité de cette motivation car la limitation sera levée à la veille de l'élection de 2000. En effet à la veille de cette dernière, une volonté de restaurer l'éligibilité indéfinie du Président se manifesta au sein du parti socialiste. C'est ainsi que son responsable des élections disait « il faut supprimer la limitation du mandat présidentiel », après avoir affirmé que même aux Etats-Unis d'Amérique, la limitation des mandats était de fait et non de droit6(*) ; ce qui n'est pas exacte car aux Etats- unis la limitation est bien de droit depuis le vingt deuxième amendement. En plus supprimer la limitation du mandat présidentiel reviendrait à instaurer une monarchie. Ce qu'on peut supprimer, c'est la limitation du nombre de mandats. A cet effet, le groupe parlementaire socialiste déposa sur le bureau de l'Assemblée Nationale une proposition de loi Elle fut adoptée le 27 Août 1998.

Cette révision constitutionnelle fut mal perçue par l'opposition car elle remettait en cause de façon unilatérale le fruit d'un compromis entre elle et le pouvoir. Pour la justifier, les tenants du pouvoir avaient émis certains arguments. A ce titre , Monsieur  Abdourahim Agne soutenait que le dernier mandat, notamment dans ses dernières années, pouvait constituer une période de relâchement dans la gestion de l'Etat et entraîner une ouverture prématurée de la succession politique, avec les conséquence qui pouvaient en découler7(*). Un tel argument ne peut être valablement soutenu dans un régime démocratique car il remettait en cause le choix éventuel des électeurs à chaque fois qu'il y aurait relâchement dans les dernières années de gestion du pouvoir. Un autre socialiste M Christian Valentin alors rapporteur des travaux de la commission soutenait qu'un texte ne doit pas limiter les mandats, mais qu'il appartient « au peuple dans sa sagesse de décider tous les sept ans ». Ses propos posent le débat sur la légitimité de la clause limitation du mandat. Si pour certains cette clause est antidémocratique force est de reconnaître que, dans un contexte de pérennisation du pouvoir cette clause est salutaire en ce qu'elle permet l'alternance politique8(*).

En outre la révision constitutionnelle de 1998 supprime également le quart bloquant. Pour comprendre cette suppression, c'est sur le terrain de l'opportunisme politique qu'il faut se placer en partant des élections législatives du 24 Mai 1998. En effet celles -ci, avaient enregistré un faible taux de participation et le parti au pouvoir obtenait 50,12% des suffrages exprimés. Ce résultat tout comme le taux de participation était significatif d'une diminution considérable de l'électorat du parti au pouvoir dont une partie avait fini par désavouer ses représentants en raison de la léthargie du système. Le groupe dirigeant compris qu'il y avait un risque d'exposition de son candidat à l'élection présidentielle en vue à des votes sanction ou à une abstention massive qui pourrait le conduire au second tour. C'est la raison pour laquelle il avait pris en compte les arguments techniques des fonctionnaires du ministère de l'intérieur : « supprimer le quart bloquant » pour ne pas ajouter aux déboires à la présidentielle qui pointait .Cela devait lui permettre de remporter plus aisément les élections de 2000.

Néanmoins le résultat escompté ne sera pas atteint puisque c'est le chef de l'opposition d'alors, l'actuel Président de la République qui remportera ce scrutin au second tour. En somme la clause de limitation du mandat et le quart bloquant seront frappés d'une instabilité notoire car ils seront supprimés et restaurés en fonction des préoccupations personnelles des tenants du pouvoir.

Par ailleurs la stabilisation et le renforcement des pouvoirs du Président ont également servi de fondement à des réformes

2°) Le renforcement et la stabilisation des pouvoirs du Président :

Née au lendemain de la crise institutionnelle de décembre 1962, la constitution du 07 mars 1963 a entendu tirer les leçons d'un régime parlementaire dualiste dans le contexte sénégalais. C'est ainsi qu'elle mit en place un régime présidentiel ou tout l'exécutif était dévolu au Président de la République.

Cette dynamique de renforcement des pouvoirs du Président de la République est poursuivie avec la révision constitutionnelle de 1967 qui donne au chef de l'Etat le pouvoir de dissoudre l'Assemblée nationale lequel est au demeurant soumis à des restrictions9(*). C'est ainsi qu'il faut l'écoulement d'un délai de trois ans depuis le début de la législature pour procéder à la dissolution à moins que le Président n'ait été élu pour terminer le mandat de son prédécesseur .Dans ce dernier cas, un an suffit au Président pour prononcer la dissolution .En outre l'exercice du droit de dissolution entraîne un renouvellement simultané des mandats des députés et du Président de la République en raison de leur synchronisation. Cette dernière restriction cantonne le droit de dissolution au strict formalisme car on imagine mal que le chef de l'Etat mette en pratique une règle qui abrègerait son mandat.

Quoi qu'il en soit cette réforme dénature le régime présidentiel mis en place par la constitution de 1963 car fondamentalement un régime présidentiel est un régime de séparation rigide des pouvoirs où il y a une absence de contraintes juridiques entre l'exécutif et le législatif entravant leur indépendance. Cette dénaturation du régime sera accentuée en 1970.

Mais avant d'en arriver là, il faut signaler qu'en 1968, un malaise du monde paysan accentué par une vive tension politique avait affecté le Sénégal. Dans ce contexte, mieux que la fermeture de l'Université ou des établissements d'enseignement public, il fallait des initiatives politiques majeures dans le but de sauvegarder et d'assurer la stabilité des pouvoirs du chef de l'Etat10(*). C'est ainsi que fut opérée une révision constitutionnelle en 1970 pour déconcentrer les pouvoirs du Président en introduisant le poste de premier ministre. Ce dernier est nommé et révoqué par le Président de la République tout comme les autres ministres sauf que pour eux, la nomination est précédée d'une proposition du premier ministre. Cette réforme instaure également la motion de censure permettant au parlement de provoquer la démission du gouvernement .Au demeurant celle -ci est assujettie à un régime juridique assez rigide dans le but d'assurer la stabilité du gouvernement11(*). En outre les actes du Président de la République sont en principe contresignés par le premier ministre et le cas échéant par les ministres et secrétaires d'Etat concernés.

Cela n'entame en rien cependant les pouvoirs du Président de la République qui nomme à tous les emplois, qui est le gardien de la constitution de même qu'il continue à déterminer la politique de la nation qui du reste est appliquée par le premier ministre et ses collègues. Il s'agissait simplement comme le soulignait Monsieur Paul Ngom de « dégrossir les responsabilités politiques du Président de la République » (cours d'histoire des institutions politiques et administratives)12(*).

Ce poste de premier ministre sera confié à Abdou Diouf qui au lendemain de la démission du Président Senghor assurera la suppléance jusqu'a l'élection présidentielle de 1983 qu'il remporta, ce qui lui donna une légitimité populaire.

Après son élection, le Président entrepris une rupture avec l'ordre institutionnel existant en renouant avec le schéma initial de 1963. Ainsi, invoquant la nécessité pour le gouvernement de « plus d'efficacité de rapidité et de simplicité », il annonça le retour du régime présidentiel pur avec un renforcement des pouvoirs du Président13(*). Cette annonce fut faite lors du « message à la nation » prononcé le 3 Avril 1983 à l'occasion de la faite nationale, ce qui va mener à la réforme constitutionnelle de 1983 supprimant le poste de premier ministre. Cette révision entraînera également la suppression du droit de dissolution, de la motion de censure, la restauration de l'incompatibilité entre la fonction ministérielle et la fonction parlementaire. Désormais, le Président est l'exécutif, ce qui n'est pas sans renforcer sa suprématie.

Ce retour au schéma initial de 1963 relatif à la séparation rigide des pouvoirs n'est pas définitif car une nouvelle structuration des rapports entre l'exécutif et le législatif sera définie par la loi constitutionnelle n°91-25 du 5 avril 1991 restaurant le poste de premier ministre.

Selon l'exposé des motifs de celle-ci « l'approfondissement de la démocratie étant toujours allé de pair avec la mise en oeuvre d'une gestion rigoureuse des affaires publiques. » cette révision « tend simultanément au resserrement du dialogue démocratique entre le pouvoir exécutif et l'Assemblée Nationale, dans toutes les composantes de celles-ci, et au renforcement de la cohérence de l'action gouvernementale ». A cet effet, la mise en jeu de la responsabilité du gouvernement devant le parlement est réintroduite.

Au demeurant l'exercice de celle-ci est assoupli puisqu'il suffira dorénavant d'un dixième des députés au lieu d'un quart pour déposer une motion de censure. Le droit de dissolution sera également reconnu au Président de la République pour parer à un exercice abusif de la motion de censure.

En outre il faut souligner que l'action gouvernementale ainsi que l'administration seront dirigées par le premier ministre sous le double contrôle du chef de l'Etat et du Parlement. En outre les délégations de pouvoirs du Président de la République sont abrogées. Cette abrogation révèle la présence d'un souci d'exercice sans partage du pouvoir et la crainte d'un chef du gouvernement qui pourrait se placer en redoutable rival comme ce fut le cas en 1962 entre le Président de la République et le Président du Conseil. Cette crainte est perceptible à la lecture de l'exposé des motifs qui « précise  essentiellement que le Président nomme le premier ministre et met fin à ses fonctions ».

En conclusion le poste de premier ministre sera caractérisé par une réelle instabilité entre 1970 et 1991, créé et supprimé en fonction du souci de renforcer ou de stabiliser les pouvoirs du Président.

Par ailleurs il faut remarquer qu'à coté de ces réformes tournant autour de l'institution présidentielle d'autres réformes plus favorables à la démocratie ont été opérées.

3°) L'instauration du multipartisme :

En accédant à la souveraineté internationale par sa constitution du 26 Août 1960, le Sénégal avait consacré le pluralisme politique qui est inhérent à la démocratie. Cela est visible à la lecture de l'article trois de la constitution de 1960 repris par la constitution de 1963 qui dispose « les partis et groupes de partis concourent à l'expression du suffrage... ». Cependant cette disposition constitutionnelle sera lettre morte face à l'hégémonie du Président Senghor qui, par le jeu des interdictions et des absorptions de partis politiques avait fini par instaurer un système monopartisan. Ce monopartisme de fait puisque n'ayant pas de base légale va prévaloir jusqu'en 1974. En effet cette année marque l'avènement du multipartisme consécutif aux pressions des étudiants, des groupes politiques clandestins et de l'opinion internationale14(*). C'est ainsi que fut autorisée la création du Parti Démocratique Sénégalais (qui se considéra comme « parti de contribution ») pour calmer le mécontentement populaire. Cette autorisation ne sera pas suffisante car les contestations vont se poursuivre.

Pour apaiser le climat politique, une révision constitutionnelle fut opérée par la loi constitutionnelle n°76-01 du 19 mars 1976pour permettre aux groupes politiques clandestins de participer à titre officiel au jeu politique national. Cette loi fixa le nombre de partis politiques à trois avec l'obligation d'appartenir à des courants de pensée différents.

Il s'agissait du socialisme démocratique pris par l'UPS, de la démocratie libérale prise par le PDS reconnu auparavant en 1974 et enfin du communisme ou marxisme léninisme dont s'était approprié le PAI qui venait de sortir de la clandestinité.

Cette réforme a eut des implications positives dans le processus de démocratisation. En effet elle avait entraîné la reconnaissance de la liberté d'opinion politique qui demeure essentielle dans toute démocratie même si elle était canalisée. Ensuite la réforme allait permettre désormais l'organisation d'élections compétitives par opposition à celles qui avaient cours jusqu'ici avec un seul candidat à savoir le Président Senghor. Ainsi les citoyens pouvaient choisir parmi trois candidats pour la présidence de l'Etat sénégalais.

Cette vision positive de la révision de 1976 n'était cependant pas partagée par les adversaires de Senghor. En effet pour certains, Le Président voulait maintenir son hégémonie en admettant que des partis qui seraient juste bons à servir « d'animateurs ». Pour d'autres, il voulait renforcer son prestige international par l'admission de L'UPS, son parti, au sein de l'internationale socialiste et le désir d'obtenir le pris Nobel de la paix ou de littérature. Cependant selon l'exposé des motifs il s'agissait de libéraliser le paysage politique tout en évitant l'anarchie.

Quoi qu'il en soit, cette réforme est louable en tant qu'elle rend possible une réelle élection avec une pluralité de candidatures. Ce processus de libéralisation enclenché sera poursuivi en 1978 par la loi constitutionnelle n°78-60 du 28 décembre 1978 pour tenir compte des conditions de développement de la vie politique en autorisant un quatrième parti politique à savoir le MRS de Me Boubacar Guèye qui s'identifia au conservatisme.

En outre avec cette loi, c'est désormais la constitution qui fixe les courants de pensée des partis politiques en lieu et place de la loi. Une innovation majeure fut également introduite dans la mesure ou il est interdit aux partis politiques de se réclamer « d'une race, d'une ethnie, de l'un des deux sexes, d'une religion, d'une secte, d'une langue ou d'un région de notre pays »15(*). Cette innovation était positive compte tenu de la diversité ethnique, confrérique de la société sénégalaise qui pourrait servir de fondement au clivage des partis politiques ; ce qui serait préjudiciable à l'unité nationale.

En somme l'ouverture démocratique entreprise par le Président Senghor, même si elle rompt avec le monopartisme de fait était contestée en raison de son caractère arbitraire, autoritaire et discriminatoire.  Ce qui va accentuer les revendications des groupes politiques clandestins pour une plus grande ouverture.  Ces revendications coïncidèrent avec l'arrivée du Président Abdou Diouf au pouvoir qui y apporta une solution en instaurant le multipartisme intégral par la loi constitutionnelle n°81-16 du 06 mai 1981. Celle-ci supprime la limitation des partis ainsi que l'indication des courants de pensée. Néanmoins ce libéralisme est assorti d'une obligation « pour échapper à l'anarchie » : il s'agit de « l'obligation pour tout parti de respecter la constitution ». A partir de cette révision, les partis clandestins pouvaient participer à titre officiel au jeu politique national. De ce fait les possibilités qui s'offraient aux électeurs dans le choix de leurs représentants étaient accrues.

Au demeurant, l'observation du paysage politique sénégalais révèle une prolifération des partis politiques dont certains n'ont qu'une existence formelle au regard de leurs résultats lors des élections, ce qui nous amène à penser que le Président Senghor avait peut être raison en limitant le nombre partis politiques.

En somme l'instauration progressive du multipartisme a fortement contribué au renforcement de la démocratie et de l'Etat de droit en tant qu'elle reconnaît la diversité des opinions politiques et qu'elle rend possible leur expression.

Ce renforcement sera accentué par la spécialisation juridictionnelle afin d'optimiser le contrôle juridictionnel

4°) La spécialisation juridictionnelle:

La mise en place des institutions judiciaires au Sénégal au lendemain de l'indépendance était confrontée à un manque de hauts magistrats. De ce fait les pouvoirs publics avaient opté pour un système judiciaire unitaire ayant à son sommet une cour suprême. Cette dernière exercera le rôle de centralisation et d'harmonisation des décisions de justices jusqu'en 1992. A partir de cette date, une spécialisation juridictionnelle va être entamée pour être parachevée plutard en 1999.

a- le début de la spécialisation :

Il est lié d'une par à l'évolution des conditions qui avaient présidé à la mise en place de la cous suprême et d'autre part à la sécurisation du milieu des affaires pour attirer les investisseurs,à l'exercice effectif des droits et libertés fondamentaux et à l'efficience du contrôle juridictionnel . A cet effet la loi constitutionnelle n°92-22 du 30 mai 1992 va supprimer la cour suprême et mettre en place trois hautes juridictions spécialisées respectivement dans le contentieux constitutionnel, dans le contentieux administratif et dans le contentieux des affaires. Il s'agit du conseil constitutionnel, du conseil d'Etat et de la cour de cassation

Le conseil constitutionnel est chargé de veiller au respect de la constitution. Ce faisant, il exerce d'abord le contrôle de constitutionnalité des lois. Ce contrôle a connu des réaménagements sous l'ère de la cour suprême qu'il importe de souligner. Ceux-ci étaient relatifs à la saisine de la cour suprême et au délai du recours à propos du contrôle de constitutionnalité des lois. S'agissant de la saisine, elle était réservée au seul Président de la république. De ce fait les lois votées par l'assemblée nationale, sauf initiative du chef de l'Etat, ne pouvaient être contrôlées par la cour suprême. Pour remédier à une telle situation qui ne pouvait cohabiter avec l'Etat de droit, une réforme fut effectuée en 1978 afin de permettre aux députés de pouvoir contester l'inconstitutionnalité des lois à l'instar du Président de la république. Cette réforme avait fixé le nombre de députés pour intenter un recours en inconstitutionnalité à quinze, lequel sera réduit à dix en 1981.Cette réduction était favorable à l'opposition d'alors qui comptait à l'époque un nombre de 18 députés16(*) .Elle allait permettre aux parlementaires de l'opposition minoritaire à l'Assemblée de contester les initiatives inconstitutionnelles du Pouvoir. En cela elles contribuaient significativement au renforcement de la démocratie et de l'Etat de droit.

Concernant le délai du recours en inconstitutionnalité il présentait la lacune de se superposer au délai de promulgation de la loi. Pour résoudre cette lacune, la loi constitutionnelle n°81-16 du 6 mai 1981procéda à la dissociation de ces délais pour « clarifier la procédure du recours visant à faire déclarer une loi inconstitutionnelle »17(*)

Pour en revenir au conseil constitutionnel, il faut noter qu'il veille ensuite à la constitutionnalité des engagements internationaux. Ce faisant, lorsqu'il déclare qu'un traité est contraire à la constitution, sa ratification doit être précédée d'une révision constitutionnelle. Le conseil s'occupe également du contentieux des élections nationales de même qu'il est compétent pour les exceptions d'inconstitutionnalité soulevées devant le conseil d'Etat ou la cour de cassation.

Cette dernière compétence fait parti des innovations majeures introduites par la réforme de 1992. Elle va permettre désormais à tout citoyen à l'occasion d'un procès particulier d'exiger qu'une loi qu'il juge contraire à la constitution soit écartée du procès. De ce fait elle constitue un moyen pour les citoyens de veiller au respect de la suprématie de la constitution et par voie de conséquence de préserver leurs droits et libertés fondamentaux. Le conseil constitutionnel tranche enfin les conflits de compétence entre la cour de cassation et le conseil d'Etat.

Ses membres bénéficient d'un certain nombre de garanties destinées à les protéger des influences du pouvoir exécutif afin qu'il exercent de manière indépendante et impartiale leur rôle de régulateur de la vie politique et de protecteur des droits et libertés fondamentaux des citoyens. En effet leur mandat qui est de six ans n'est pas renouvelable de même qu'il ne peut être mis fin à leur fonction avant terme, sauf s'ils en font la demande ou en d'incapacité constatée dans les conditions prévues par la loi organique18(*).

Enfin, sauf en cas de flagrant délit, ils ne peuvent être poursuis, arrêtes, jugés en matière pénale sans l'autorisation du conseil. Malgré ces garanties, le conseil constitutionnel est perçu comme étant subordonné au pouvoir exécutif à cause de ces déclarations répétitives d'incompétences19(*) qui vont à l'encontre de sa fonction traditionnelle de gardien constitution en générale et de régulateur de la vie politique en particulier.

Pour remédier à cela, l'autorité du conseil constitutionnel sera renforcée par la loi constitutionnelle n° 98 - 11 du 2 mars 1998 relative au sénat .En effet celle-ci rend obligatoire la saisine du conseil des règlements des assemblées pour vérifier leur constitutionnalité avant toute promulgation. Elle précise également que les décisions de celle-ci ne sont susceptibles d'aucun recours et s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles.

A coté du conseil constitutionnel il y'a également le conseil d'Etat.

Le conseil d'Etat est chargé de contrôler l'excès de pouvoir des autorités administratives en premier et dernier ressort. Ce contrôle se fait en fonction du principe de légalité. De ce fait toute décision d'une autorité administrative allant à l'encontre de ce principe peut être sanctionnée par la voie du recours pour excès de pouvoir. Ce principe est inhérent à l'Etat de droit et sa protection par une haute juridiction spécialisée montre l'attachement des pouvoirs publics à l'évolution irréversible vers l'Etat de droit .A coté de l'excès de pouvoir, le conseil d'Etat vérifie également la régularité des comptes des comptables publics mais également des décisions de la cour de discipline budgétaire. On constate ainsi que le contentieux financier qui était du ressort de la cour suprême est confié au conseil d'Etat. En conséquence sa spécialisation n'était pas encore considérée comme une priorité par le pouvoir. En outre le conseil d'Etat est compétent en dernier ressort concernant le contentieux des inscriptions sur les listes électorales et les élections aux conseils des collectivités locales. Ses compétences seront d'ailleurs élargies par la loi constitutionnelle n°94-55 du 13 juin 1994 aux autres aspects du contentieux administratif que le recours pour excès de pouvoir et cela par la voie du recours en cassation. Ce qui devait permettre d'équilibrer les affaires entre la cour de cassation et le conseil d'Etat. Enfin à l'instar du conseil constitutionnel, les membres du conseil d'Etat, sauf cas de flagrant délit, ne peuvent être poursuivis, arrêtes, jugés en matière pénale sauf, pour ce qui concerne spécifiquement le conseil d'Etat, dans les conditions prévues par la loi organique.

Ce ''statut pénale'' des membres du conseil d'Etat est partagé par ceux de la cour de cassation.

Cette dernière contrairement au conseil constitutionnel et au conseil d'Etat a une compétence de principe. Elle se prononce en toute matière par la voie de la cassation sur les jugements rendus en dernier ressort par les juridictions subordonnées. Ainsi elle intervient en matière commerciale, en matière civile et en matière pénale. Il faut cependant signaler qu'elle ne se prononce pas au fond sur le litige. Son rôle, c'est de vérifier la régularité des décisions rendues en dernier ressort par les juridictions subordonnées. De ce fait elle harmonise et centralise les décisions des juridictions inférieures. En somme la réforme judiciaire de 1992 aura mis en place trois hautes juridictions pour obéir à l'impératif de spécialisation.

Cette spécialisation sera achevée en 1999

b-le parachèvement de la spécialisation juridictionnelle :

Pour parachever la spécialisation juridictionnelle entamée en 1992, le Sénégal s'est doté d'une cour des comptes en 1999. Cette juridiction financière est instituée par la loi constitutionnelle n°99-02 du 29 janvier 1999.Son instauration obéit à des raisons diverses. Outre la nécessité de la spécialisation, il s'agit d'éviter le risque d'encombrement du conseil d'Etat à la suite de l'élargissement de ses compétences au contrôle des actes des nouvelles personnes morales issues du mouvement de la décentralisation20(*). Il y a également la tendance généralisée en Afrique à distinguer les juridictions financières du système indiciaire classique. Il y a l'exigence de spécialisation du contentieux financier par l'UEMOA dont le Sénégal est membre21(*).

De ce fait la réforme de1999 va mettre en place un corps nouveau de magistrats et un conseil supérieur de la magistrature de la cour des comptes. Cette cour juge les comptes des comptables publics. Elle vérifie la régularité des recettes et des dépenses et s'assure du bon emploi des crédits, des fonds et valeurs gérés par les services de l'Etat ou par les autre personnes morales de droit public. Elle assure également la vérification des comptes et de la gestion des entreprises publiques et organismes à participation financière publique .Elle déclare et apure les gestions de fait. Elle sanctionne les fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat, des collectivités locales et des organismes soumis à son contrôle. Il faut enfin signaler qu'il est de la compétence de la cour des comptes d'assister le Président de la République, le gouvernement et le parlement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances en lieu et place du conseil d'Etat.

En somme le Sénégal a mis en place quatre juridictions spécialisées dans le but de renforcer la démocratie, l'Etat de droit, la sécurisation du milieu des affaires, et enfin la transparence dans la gestion des finances publiques. En cela, les révisions opérées sont objectives car n'étant pas fondées sur des considérations partisanes.

Cette objectivité sera poursuivi en 1994 dans le dut de consolider la démocratie au plan local

5°) La consécration constitutionnelle des collectivités locales :

Au lendemain de son accession à la souveraineté internationale, le Sénégal avait opté pour une politique de décentralisation prudente et progressive à propos de la gestion du pouvoir. De ce fait, l'organisation de l'administration territoriale sénégalaise va se faire au fil de l'évolution. A titre illustratif on peut citer le décret n°64-272 du 3 Avril 1964 modifiant la loi n°60-15 du 13 janvier 1960 qui distinguait l'administration de base à l'administration de développement22(*), ou encore la loi n°66-64 du 30 juin 1966 portant code l'administration Communale. On peut également citer la loi n°72-25 du 19 avril 1972 relative aux communautés rurales et celle n°72-27 du 26 mai 1972 concernant les conseils régionaux, départementaux et ruraux.

Mais comme on le constate avec ces quelques exemples, l'administration territoriale n'était régie que par des textes de nature législative et réglementaire. Il faudra attendre jusqu'en 1994 pour que le constituant s'intéresse aux collectivités locales, et cela par biais de la loi constitutionnelle n°94-55 du 13 juin 1994.Cette intervention du constituant est ainsi justifiée par l'exposée du motif « après avoir développé de façon pragmatique une décentralisation à l'échelon local reposant sur les communes et les communautés rurales, le Sénégal aborde aujourd'hui une nouvelle étape de ce processus. Une nouvelle collectivité, la région, est instituée en vue de permettre à la démocratie locale de s'exercer sur des ensembles géographiques plus vastes. Il a paru important de conférer à cette politique une valeur constitutionnelle... » .A cet effet, un titre XI intitulé Des collectivités contenant l'article 90 est introduit. Selon cet article les collectivités locales sont la région, la commune et la communauté rurale. Il y ajoute que les collectivités locales s'administrent librement par des conseils élus dans le respect des lois et règlements. A la lecture de ce texte, il était question de consolider le processus de décentralisation à la fois sur le plan géographique en érigeant une collectivité plus large à savoir la région et sur le plan juridique en intégrant dans la norme suprême le principe de la libre administration des collectivités locales.

Cette intégration a comme conséquence l'obligation de respect de ce principe par les textes inférieurs à la constitution en vertu du principe de la hiérarchie des normes d' une part et d'autre part la sanction de ses violations par le juge constitutionnel. Par ailleurs la brièveté de la partie réservée aux collectivités territoriale (un titre ne contenant qu'un seul article) révèle la prudence du constituant malgré l'importance qu'il attachait à la décentralisation. Cette prudence sera officialisée plutard par le code des collectivités locales en son article premier qui dispose « dans le respect de l'unité nationale et de l'intégrité les collectivités locales sont : la région, la commune et la communauté rurale ».C'est dire qu'il était question de taire d'éventuelles velléités séparatistes pouvant menacer l'unité nationale compte tenu de la diversité ethnique et religieuse du pays. En outre le code des collectivités qui est un prolongement de la réforme initiée par le constituant va fixer l'organisation et le fonctionnement de la nouvelle collectivité qu'est la région.

Dans le but de renforcer la régionalisation, une révision constitutionnelle sera opérée plutard en 1998 avec la loi n°98-11 du 2 mars 1998 créant le sénat qui est ainsi motivée: « cette réforme s'inscrit d'abord dans le prolongement de la régionalisation. Ainsi, le sénat assurera la représentation des collectivités locales, qui procéderont à l'élection des trois quarts de ces membres ... ».

Au demeurant ces politiques de décentralisation consécutives à la révision constitutionnelle de 1994 ont été plus théoriques que pratiques : l'Etat centrale donnant parfois l'impression de décentraliser non pas par conviction mais pour donner des gages d'engagement aux bailleurs de fonds23(*). N'empêche la réforme de 1994 s'inscrit dans le cadre du renforcement de la démocratie locale en introduisant dans la constitution le principe de la libre administration des collectivités locales.

En conclusion il faut dire que la constitution du 7 mars 1963 avait connu plusieurs modifications dont les préoccupations étaient paradoxales. En effet si certaines révisions ont été sous-tendues par la consolidation de la démocratie et de l'Etat de droit, d'autres par contre, malgré la justification officielle dont elles étaient accompagnées, ne visaient qu'à assurer la pérennité du régime ainsi que l'hégémonie du Président de la République, ce qui du reste remet en cause le caractère fondamentale de la constitution .Cela est d'ailleurs observable avec les révisions de la constitution de 2001

II°) LES REVISIONS DE LA CONSTITUTION DU 22 JANVIER 2001 :

Au lendemain du scrutin présidentiel du 19 Mars 2000, une constitution de rupture est adoptée. Elle met un terme au régime constitutionnel antérieur et instaure un nouveau régime politique. Ce renouveau n'est cependant pas absolu car la constitution continue d'être modifiée au gré des contingences politiques. En effet l'inflation révisionniste qui avait affectée la constitution de 1963 est entrain d'atteindre celle du 22 janvier 2001 En témoigne les nombreuses réformes opérées à la veille des élections présidentielle et législative. Certaines d'entre elles avaient pour finalité la réélection du président sortant tandis d'autres prorogeaient le mandat des députés en raison de l'inopportunité politique des législatives pour les tenants du pouvoir.

Par ailleurs on note aussi des réformes relatives à la création à la suppression voire même à la réintroduction d'institutions ayant existé sous l'empire du régime socialiste

1°) La réélection du Président sortant :

En Afrique, il est de coutume que les candidats aux élections présidentielles, une fois au pouvoir , s'intéressent plus à leur réélection à la fin de leur mandat plutôt qu'à la satisfaction des préoccupations du titulaire de la souveraineté( le peuple dans le cas d'une souveraineté populaire, la nation en cas de souveraineté nationale).Ce qui les amène parfois à truquer les élections , à refuser de quitter le pouvoir à la suite d'une victoire d'un opposant ou parfois même en jouant des subtilités du droit tout en respectant les procédures légales et démocratiques.

Le Sénégal qui nous intéresse plus précisément ne fait pas exception à ces pratiques antidémocratiques en raison de ``l'instrumentalisation'' des mécanismes constitutionnels à des fins de maintien du pouvoir en place. Une illustration en est faite par les révisions constitutionnelles à la veille du scrutin présidentiel de 2007. En effet dans ce contexte préélectorale, une loi constitutionnelle ; celle n° 2006-37 du 15 novembre 2006 modifiant l'article 33 de la constitution de 2001 avait procédée à la suppression du quart bloquant et reconnu aux miliaires et paramilitaires le droit de suffrage.

S'agissant du quart bloquant, sa suppression était officiellement ainsi motivée : « la participation aux différents scrutins n'étant pas une obligation, l'exigence d'un quart des...inscrits communément appelé « quart » bloquant en plus de la majorité absolue des votants pour l'élection du président de la république au premier tour qui, au demeurant n'existe dans aucune grande démocratie, est de nature à fausser le jeu démocratique ».Cette argument en faveur de la suppression du quart bloquant est en déphasage avec la substance de celui-ci. En effet ce dernier a pour fondement le renforcement de la légitimité populaire du futur magistrat suprême de l'Etat, or dans une démocratie il y'a une coïncidence entre la légitimité populaire et la légalité constitutionnelle. Autrement dit il faut être élu par le peuple pour présider légalement à ses destinées ; ce qui inclut l'obtention d'une majorité. Il est dès lors contradictoire que le quart bloquant qui est destiné à conforter cette majorité aille à l'encontre du jeu démocratique.

En réalité les raisons qui militent en faveur de sa suppression ne se trouvent pas dans l'exposé des motifs de la loi constitutionnelle 2006-37.En effet, le contexte préélectorale dans lequel il a été supprimé, sur initiative de l'exécutif en accord avec sa majorité parlementaire, révélait déjà la crainte des tenants du pouvoir quant à la capacité de leur parti d'obtenir, en plus de la majorité absolue des suffrages ,le quart des électeurs inscrits pour la réélection de leur candidat au premier tour. Pour comprendre cette crainte, il faut partir du couplage des opérations d'instauration du fichier électorale nationale et de la confection des cartes d'identité nationale. Celui-ci avait versé dans les tablettes de la direction de l'automatisation des fichiers près de cinq millions d'individus24(*). Or il n'était pas évident que tous ces inscrits le soient pour voter, en plus de ceux qui allaient être dans l'impossibilité de voter en raison d'un casier judiciaire chargé ou pour cause de décès. C'est la raison pour laquelle le pouvoir avait préféré alléger les conditions requises pour être élu au premier tour afin de ne pas être contraint à un second tour.

En ce qui concerne le vote des militaires et paramilitaires à première vue sa consécration s'intègre dans le processus de démocratisation dans la mesure ou ceux qui en sont dépositaires sont des citoyens tout comme les civils. Au demeurant la réalité est différente. En effet suite à son accession au pouvoir le Président de la République avait accordé d'importants avantages aux militaires et paramilitaires consistant entre autres à la revalorisation de leurs rémunérations, à la promotion de nombreux généraux. Ce qui fait qu'il les considérait comme une source potentielle de renforcement de son électorat. C'est la raison pour laquelle le droit de vote leur fut octroyé à la veille du scrutin présidentiel de 2007. Néanmoins les craintes du parti au pouvoir ne se sont pas matérialisées car, même avec le maintien du quart bloquant, il aurait remporté les élections dès le premier tour compte tenu du taux de participation et de son résultat au scrutin présidentiel25(*). En somme qu'il s'agisse de la suppression du quart bloquant ou encore de la constitutionnalisation du vote des militaires, le fondement était le même : il était question de faciliter la réélection du Président sortant.

Par ailleurs dans ce contexte préélectoral marqué par un activisme juridique destiné à optimiser les chances de maintien au pouvoir, on peut noter une autre réforme toujours relative au régime de l'élection présidentielle. En effet le 19 février 2007 une autre loi constitutionnelle avait été promulguée, soit huit jours avant le scrutin présidentiel. Celle-ci était relative à l'article 34 de la constitution qui prévoyait qu'on reprenne l'organisation des élections en cas de retrait d'un candidat entre l'arrêt de publication la liste des candidats et le premier tour. La révision a consisté à rompre avec cette disposition pour permettre la poursuite des opérations électorales même en cas de retrait. Cette réforme était motivée par la prévention contre la mauvaise intention d'un candidat qui, par le jeu des retraits de candidature empêcherait définitivement la tenue des élections. Au demeurant il n'est pas superflu de rappeler le contexte politique dans lequel cette réforme fut opérée pour l'appréhendée. En effet avant la révision de l'article 34, on avait assisté à une série de rencontres entre le chef de l'Etat et son ex premier ministre, lesquelles présageaient une réconciliation entre les deux hommes. Or, le premier ministre avait déjà déposé sa candidature pour l'élection présidentielle en vue. Ce qui fait le retrait de sa candidature, en vertu de l'article 34 allait entraîner une reprise de l'organisation du scrutin. Pour permettre à l'ex premier ministre de retirer sa candidature sans pour autant repousser les élections, il était nécessaire de revoir le contenu de l'article 34 ; d'où la loi constitutionnelle du n°2007-19 du 19 février 2007.Néanmois ce dernier avait maintenu sa candidature et était arrivé en deuxième position à l'issue du scrutin.

En conclusion, on peut dire que le souci de se maintenir au pouvoir a été déterminant dans les nombreuses révisions constitutionnelles opérées à la veille de l'élection présidentielle. Il en est de même avec les élections législatives

2°) La prorogation du mandat des députés :

A la veille des élections législatives, une révision constitutionnelle est faite pour proroger le mandat des députés et organiser le couplage des élections législatives et présidentielle qui devaient se tenir respectivement en 2006 et en 2007.Ce fut l'objet de la loi constitutionnelle n°2006-11 du 20 juin 2006. A la lecture de l'exposé des motifs, la réforme était justifiée par le souci de faire face aux dégâts causés par les pluies diluviennes en procurant des abris provisoires aux sinistrés et en finançant le plan « Jaxaay » du chef de l'Etat pour reloger les sinistrés et en même temps éradiquer les bidonvilles autour de la capitale. A cet effet la somme de 45 milliards représentant les ¾ des 60 milliards destinés à la décentralisation des fêtes de l'indépendance ainsi que les 7 milliards prévus pour l'organisation des législatives étaient visés. Il était question également d'éviter deux années de campagne électorale par le couplage des deux scrutins. Pour y parvenir, l'article unique de la loi de révision dispose : « Par dérogation à l'alinéa premier de l'article 60 de la constitution, le mandat des députés élus à l'issue des élections du 29 Avril 2001 est prorogé pour être renouvelé le même jour que l'élection présidentielle en 2007 »26(*). Cette révision connaît deux limites tenant à ses motifs et à son contenu.

S'agissant du fondement de la réforme en dépit de la nécessité de venir en aide aux sinistrés, l'utilisation des recettes allouées aux législatives ne se justifiait guère pour deux raisons. La première est d'ordre financière. En effet dans le budget annuel de l'Etat, il est toujours prévu une catégorie de ressource pour faire face à des dépenses imprévues que l'Etat aurait dû utiliser au lieu de celles prévues pour les législatives. Au cas où ces recettes seraient épuisées et c'est là la deuxième raison, il serait plus judicieux pour un Etat qui se réclame de la démocratie d'utiliser la somme restante des fonds alloués à la décentralisation des fêtes de l'indépendance et préserver celles allouées à l'organisation des élections afin de respecter le calendrier électorale.

Concernant le contenu de l'article unique de la loi constitutionnelle, il faut souligner qu'il n'est pas conforme à l'orthodoxie constitutionnelle. Par définition une constitution est destinée à contenir des principes et règles d'ordre général et non pas des situations particulières. Elle doit régir le structurel et non le conjoncturel. En conséquence cette loi qui s'intéresse à une situation éminemment conjoncturelle ne devrait pas intégrer le corpus constitutionnel. Cette vision n'est pas partagée par le juge constitutionnel, qui, à la suite du recours intenté par l'opposition considère  « ...que le pouvoir constituant est souverain, que sous réserve d'une part des limitations qui résultent des articles 39,40et 52 du texte constitutionnel touchant aux périodes au cours desquelles une révision de la constitution ne peut être engagée ou poursuivie et, d'autre part, du respect des prescriptions de l'alinéa 7 de l'article 103 en vertu desquelles la forme républicaine de l'Etat ne peut faire l'objet d'une révision, il peut abroger,modifier ou compléter des dispositions de valeur constitutionnelle dans la forme qu'il estime appropriée et introduire explicitement ou implicitement dans le texte de la constitution des dispositions nouvelles qui,dans le cas qu'elles visent, dérogent des règles ou principes de valeur constitutionnelle, que cette dérogation soit transitoire ou définitive »27(*). A travers cette décision, le juge constitutionnel considère qu'il n y a de limite au pouvoir constituant dérivé que la forme républicaine de l'Etat et en cas de suppléance du Président de la République ou d'exercice des pouvoirs exceptionnels. Cela étant les tenants du pouvoir peuvent, en ce qui concerne leur mandat, effectuer une révision constitutionnelle pour procéder à sa prorogation sans que cela soit irrégulier sur le plan juridique dès lors qu'ils respectent la procédure décrite par l'article103 de la constitution. En rendant une telle décision le juge constitutionnel contribue à la remise en cause d'un des piliers de la démocratie à savoir l'élection. Ce faisant il faillit à sa fonction de protecteur des principes de la démocratie face aux dérives du pouvoir. Sa décision avalise un précédent dangereux dans un pays africain où la démocratie demeure fragile et réversible. L'absence de barrière juridique quant au pouvoir de proroger le mandat par le biais d'une révision constitutionnelle va conduire à une seconde prorogation à la suite de la décision du conseil d'Etat du 12 janvier 2007 annulant le décret de répartition des sièges des députés. Ce fut l'objet de la loi constitutionnelle n°2007-21 du 19 février 2007.

L'attitude du juge constitutionnel sénégalais, est en déphasage avec celle de son homologue béninois qui, confronté à la même situation, s'est constitué en un véritable rempart contre les dérives du pouvoir politique.

En effet au Bénin les députés avaient prétexté d'une nécessaire rationalisation des finances publiques pour proroger leur mandat. Le juge constitutionnelle, saisi de cette affaire, pour préserver les principes de la démocratie considéra que le mandat :   «( ...) de 4 ans qui est une situation constitutionnellement établie est le résultat du consensus national dégagé par la conférence des forces vives de la nation de février 1990 et consacré par la constitution en son préambule qui réaffirme l'opposition fondamentale du peuple béninois à la confiscation du pouvoir que même si la constitution a prévu les modalités de sa propre révision, la détermination du peuple béninois à créer un Etat de droit et de démocratie pluraliste, la sauvegarde de la sécurité juridique et de la cohésion nationale commandent que toute révision tienne compte des idéaux qui ont présidé à l'adoption de la constitution du 11 décembre 1990 et puis le consensus national principe à valeur constitutionnelle. Qu'en conséquence ; les articles 1 et 2 de la loi portant révision de la constitution n°2006 /13 adoptés par l'Assemblée nationale le 23 juin 2006 sans respecter le principe constitutionnel à valeur rappelée sont contraires à la constitution et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens »28(*).

Avec cette décision, le juge béninois avait tenu son rôle de gardien de la constitution au nom du consensus national en refusant que le pouvoir soit confisqué par les députés. Ce ne fut pas le cas du juge constitutionnel sénégalais qui privilégie les intérêts du pouvoir sur le consens national en lui permettant indirectement d'apprécier l'opportunité d'un report des élections en se déclarant incompétent pour connaître de la constitutionnalité des lois de révisons. Cela va permettre au pouvoir de reporter une seconde fois les élections législatives à la suite de la décision du conseil d'Etat annulant le décret de répartition des sièges des députés29(*).Ce second report fut l'objet de la loi constitutionnelle n°2007-21 du 19 février 2007 qui considérait que « la tenue des élections législatives n'est plus possible dans les délais prévus par l'article L 168 du code électoral qui fait obligation aux déclarations de candidatures d'être déposées soixante jours avant la date du scrutin » compte tenu de la décision du conseil d'Etat.

La conséquence de cette révision fut le découplage des élections qui, auparavant devaient se tenir à la même date, ce qui avait entraîné une seconde prorogation du mandat des députés.

En somme on aura constaté dans ce contexte électoral une fréquence de révisions à des fins de préservation du pouvoir sans que la juridiction constitutionnelle ait joué son rôle de régulateur de la vie politique en préservant la constitution des dérives du pouvoir.

Ces dernières vont par ailleurs entraîner une instabilité institutionnelle compte tenu de la fréquence des création et suppression d'institutions

En effet la dynamique révisionniste que connaît la constitution de 2001 n'est pas spécifique aux règles du jeu démocratique. Certes celles-ci ont été largement secouées, il n'en demeure pas moins que les institutions républicaines sont également concernées. Dans ce sens le premier objet des révisions constitutionnelles fut le conseil de la République pour les affaires économiques et sociales. Plutard pour renouer avec le bicaméralisme, le Sénat est réintroduit. Aujourd'hui, il est question d'un retour de la cour suprême.

3°) Le Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales :

Son instauration fut la première cause de révision de la constitution de 2001.En effet c'est par la loi constitutionnelle n°2003-15 du 19 juin 2003 qu'il a été créé. Celle-ci lui donne le statut d'institution de même qu'elle détermine ses missions et sa nature. Ainsi le conseil est considéré comme une assemblée consultative auprès des pouvoirs publics. Il est consulté par les pouvoirs publics et peut, de sa propre initiative, émettre un avis sur l'ensemble des questions d'ordre social, économique et culturel intéressant les différents secteurs de la nation. Aussi favorise t-il par son activité, une collaboration harmonieuse entre les différentes communautés et les différentes catégories sociales et professionnelles du Sénégal. Le conseil est aussi investi d'une mission de médiation pour l'apaisement des conflits sociaux.

Il faut signaler que, préalablement à sa promulgation, cette loi avait été attaquée devant le Conseil constitutionnel pour inconstitutionnalité. Selon les auteurs de la saisine, elle était votée après leur sortie de l'hémicycle à la suite du refus du Président de l'Assemblé de leur donner la parole ; ce qui, pour eux, constituait une violation des droits de l'opposition reconnus par le préambule et les articles 58 et 103 de la constitution. Pour la juridiction constitutionnelle, sa compétence ne s'étend pas aux révisions constitutionnelles, qu'en conséquence elle ne pouvait se prononçait sur la constitutionnalité de la loi de révision. Tel fut le précédent à la promulgation de la loi constitutionnelle.

En outre celle -ci avait prévu qu'une loi organique détermine le mode de désignation des conseillers ainsi que l'organisation et le fonctionnement de l'institution, d'où la loi 2003-34 du 03 septembre 2003.

Selon cette dernière les membres du conseil sont nommés par décret pour une durée de cinq ans renouvelable une fois.

Au plan organique, le conseil est dirigé par un Président choisi parmi ses membres. Il est assisté de trois vice-présidents et quatre secrétaires élus.

Concernant le fonctionnement les charges sont supportées par le budget de l'Etat.

Par ailleurs il faut signaler que le conseil de la République n'est pas pour autant une nouveauté dans le paysage institutionnel sénégalais. En effet sous l'empire de la constitution de 1963 le Sénégal avait une institution dénommé conseil économique et social. Certes cette dénomination est différente de celle du conseil de la République, mais du point de vue de l'organisation et du fonctionnement ces deux institutions s'identifient. Pourtant au lendemain des élections présidentielles du 19 mars, le Président élu avait supprimé le conseil économique et social au motif « que nous étions un pays pauvre qui ne peut pas se payer le luxe de certaines institutions dont l'utilité n'est pas évidente »30(*) .Au regard de ce qui précède, la mise en place de ce conseil ne procédait pas d'une rationalité institutionnelle. Cela étant qu'est-ce qui pouvait justifier l'instauration du conseil de la République ? Selon le législateur, en adoptant «  la constitution du 22 janvier 2001 le peuple sénégalais a marqué son attachement à la rationalisation de l'aménagement de l'espace institutionnel du pays mais n'a pas renoncé à ses objectifs d'approfondissement du processus démocratique, de renforcement de la gouvernance locale, de concertation et de participation des citoyen à un développement économique, social harmonieux et durable »31(*).A la lecture de ce motif,le législateur avait d'autres préoccupations que la rationalité institutionnelle, en raison de l'usage du terme ''mais'' exprimant une opposition entre l'attachement du peuple sénégalais et les raisons qui ont présidé à la mise en place du conseil de la République. C'est ce qui avait motivé les contestations de l'opposition qui s'était «  engagée publiquement à le supprimer à son arrivée au pouvoir »32(*) ; engagement qui ne pourra être tenu car l'institution est dissoute par le pouvoir en place.

En effet c'est par une loi constitutionnelle votée le 27 novembre 2007 que le conseil a été dissout. Selon celle-ci « la création du sénat par la loi constitutionnelle n°2007-06 du 12 février 2007 modifie l'équilibre institutionnel et prive de sa pertinence l'existence du conseil de la république dont une partie des missions,notamment la représentation des collectivités locales,est désormais assumée par le sénat. Il convient par conséquent de supprimer le conseil de la République pour les affaires économiques et sociales ».Ce faisant l'article 6 de la constitution est modifié pour retirer le conseil des institutions républicaines, de même que le titre VII-1 qui lui était consacré est abrogé.

Au demeurant il y a lieu de s'interroger sur l'objectivité de la dissolution du conseil de la République. En rappel celle-ci était liée au doublon crée par la mise en place du Sénat, or cette dissolution du conseil de la République est simultanée à l'introduction d'une institution de même nature à savoir le conseil économique et social. Pour le constituant, « si la création du Sénat frappe d'obsolescence le conseil de la République dont certaines missions sont désormais assumées par la chambre haute, le Sénégal a besoin d'une assemblée consultative, disposant d'une expertise économique, rassemblant les Forces vives de la nation, chargée de favoriser le dialogue social et garantissant une collaboration harmonieuse entre les communautés et les différentes catégories sociales et professionnelles... ».En faisant un telle affirmation, le constituant remet en cause l'inopportunité du conseil de la République qui avait motivé sa décision de le dissoudre car dit- il que «  le Sénégal a besoin ... », ce qui signifie que l'Etat sénégalais ne peut se passer du conseil économique et social, alors dans ce cas pourquoi dissoudre le conseil de la République qui, il faut le rappeler s'apparente à bien des égards au conseil économique et social ?

N'aurait il pas été plus opportun de lui retirer la mission désormais dévolue au Sénat à savoir la représentation des collectivités locales et de le maintenir en place ? En réalité, c'est dans le contexte politique qui a présidé à `` cette secousse institutionnelle'' qu'il faut se reporter pour tenter de comprendre.

En effet dans ce contexte les relations entre le Président du Conseil et le chef de l'Etat s'étaient détériorés. Dans le but de régler un problème interne à ``son Parti'', le chef de l'Etat avait promis le poste de président du conseil de la République à une figure historique entrée en dissidence puis ralliée. Pour y parvenir, il demanda au Président en exercice de l'institution de démissionner sans succès33(*). Ne pouvant théoriquement pas mettre un terme au mandat de celui-ci compte tenu de l'article 5 de la loi organique relative au conseil de la République34(*), le chef de l'Etat fit adopter en conseil des ministres deux projets de loi relatifs à la dissolution du Conseil de la République et à la création du Conseil économique et social. Néanmoins ces textes n'ont théoriquement pas encore d'effets car n'ayant pas fait l'objet de publication au journal officiel de la République. Tel n'est pas le cas pour celui qui réintroduit le Sénat qui, lui, est opérationnel depuis son retour.

4°) Le retour du Sénat :

Parler de retour du Sénat suppose que celui-ci ait existé par le passé au Sénégal. En effet le Sénat n'est pas nouveau dans le paysage institutionnel sénégalais. Il a été introduit pour la première fois sous l'ère de la constitution de 1963 par la loi constitutionnelle n°98-11 du 2 mars 1998 .Sa création était officiellement liée au prolongement de la régionalisation en assurant la représentation des collectivités locales lesquelles étaient chargées d'élire les trois quarts de ses membres à cet effet ; une autre partie étant nommée par le Président de la République. Pour l'opposition d'alors le Sénat n'avait pas sa raison d'être, elle n'y voyait qu'un moyen pour le parti au pouvoir d'asseoir sa clientèle politique. C'est la raison pour laquelle le constituant de 2001 ne l'avait pas repris parmi les institutions républicaines.

Cependant cette vision du constituant va changer quelques années plutard car une révision constitutionnelle relative au retour du Sénat sera effectuée.

En effet, c'est par la loi constitutionnelle n° 2007-06 du 12 février 2007 que le Sénat réintègre les institutions républicaines du Sénégal. Son retour est justifié par les mêmes motifs qui avaient présidés à son instauration en 1998 : renforcer la décentralisation par la représentation des collectivités locales au Sénat mais également de représenter les sénégalais de l'extérieur35(*).

Concernant la désignation des sénateurs, à l'instar de la réforme de 1998, deux modes sont consacrés : l'élection et la nomination. Une partie des sénateurs est élue dans les départements au scrutin uninominal majoritaire à un tour sur une liste comprenant un titulaire et un suppléant, tandis que l'autre partie est nommée par le président de la République36(*).Toutefois avec le Sénat actuel les sénateurs nommés sont supérieurs à ceux élus contrairement au Sénat de 1998. Ce qui pose un problème de légitimité.

En tant que chambre du Parlement le Sénat se voit étendre certains pouvoirs reconnus à l'Assemblée nationale. Ainsi, il dispose d'un pouvoir consultatif notamment en matière référendaire.

Le Sénat est également compétent en toute matière législative qu'il s'agisse des lois ordinaires, des lois organiques ou des lois constitutionnelles. A cet effet, ses membres à l'instar des députés ont le droit d'initiative, le droit d'amendement mais également le droit de vote. Ces pouvoirs constitutionnels du Sénat ont des effets sur la procédure législative ordinaire et sur la procédure budgétaire.

Concernant la procédure législative ordinaire, c'est le système de la navette qui est adopté pour tenir compte du Sénat .De ce fait, le projet de loi adopté par l'assemblée nationale est transmis au Sénat qui statue dans un délai de vingt jours à compter de la date de réception, ce délai pouvant être réduit en cas d'urgence. Au cas où le Sénat adopte un texte identique, ce dernier est transmis au Président pour sa promulgation, dans le cas contraire l'Assemblée statue définitivement. Cela montre que le bicaméralisme sénégalais n'est pas égalitaire car c'est à l'Assemblée nationale que revient le dernier mot qui plus, par l'intermédiaire de son Président fixe la date d'ouverture des sessions parlementaires.

Quant à la procédure budgétaire, il faut remarquer qu'il n'y avait pas un grand changement. En effet la seule innovation est le vote du budget par le Parlement à savoir les deux chambres réunies et non plus par la seule Assemblée nationale.

Au demeurant cette procédure est réaménagée par une loi constitutionnelle votée le 13 novembre 2007.Cette dernière commence par réformer les sessions parlementaires. En effet il n'est plus question de deux sessions parlementaires, mais d'une session unique qui commence dans la première quinzaine du mois d'octobre et qui prend fin dans la seconde quinzaine du mois de juin de l'année suivante. Le projet de loi de finances est déposé au plutard le jour de l'ouverture de cette session de même qu'il est examiné au cours de cette session.

Mais le plus important avec cette réforme est la consécration du système de la navette pour l'adoption du budget. En effet contrairement à la loi créant le Sénat, celle-ci sépare les deux chambres pour l'adoption du projet de loi de finances. Ce faisant, l'Assemblée statue en premier dans un délai, de 35 jours et le Sénat dispose de15 jours. Si le Sénat adopte un texte identique à celui de l'Assemblée la loi est transmise au Président de la République pour promulgation au cas contraire l'Assemblée statue définitivement, là également l'Assemblée détient le dernier mot.

Par ailleurs cette loi renforce l'irrecevabilité des initiatives et amendements des parlementaires en matière financière en disposant « toutefois aucun article additionnel ni amendement à un projet de loi de finances ne peuvent être proposés par le Parlement, sauf s'ils tendent à supprimer ou à réduire effectivement une dépense, à créer ou à accroître une recette »37(*).

En outre les sénateurs ont un pouvoir de contrôle à l'instar des députés. A cet effet ils exercent un contrôle politique en posant aux membres du gouvernement des questions écrites ou orales, ils exercent également un contrôle juridictionnel contre les hautes personnalités de l'Etat coupables de haute trahison en participant à la haute cour de justice. Au demeurant, contrairement aux députés, ils ne peuvent provoquer la démission du gouvernement .En retour le Sénat ne peut être dissout par le Président de la République.

Par ailleurs concernant le régime des immunités, la réforme n'a pas eu une portée notoire, sauf à signaler que ce régime s'applique désormais aux sénateurs au même titre que les députés. Enfin il faut noter que les sénateurs participent à la consolidation et à l'adaptation de la constitution. Cela passe par les recours en inconstitutionnalité qu'ils peuvent introduire contre les lois qu'ils estiment contraires à la constitution, par leur participation au processus de révision de la constitution notamment avec leur initiative en matière de révision constitutionnelle.

En somme après avoir l'avoir supprimé au lendemain des présidentielles de 2000, le Sénégal renoue avec le bicaméralisme dans un contexte socio-politique hostile. En effet le Sénat est largement contesté par l'opposition, mais également par certains universitaires. Ainsi le professeur Abdoulaye Dièye disait : « dans un Etat unitaire comme le Sénégal, il y a de fortes chances qu'une deuxième chambre législative soit une simple institution pour la galerie,un simple lieu de promotion sociale...une deuxième chambre ,comme celle mise en place en 1998, pratiquement sans pouvoir de remettre en cause la procédure législative ordinaire ou de bloquer une procédure de révision qu'elle juge inopportune ne pourra jamais exercer l'action de freinage qu'imprime par hypothèse la cassure du parlement en deux fraction.. . »38(*).Cette contestation a été renforcée par le mode de désignation des sénateurs car 65 parmi eux ont été nommés par le Président de la République contre 35 qui sont élus, ce qui pose le problème de la légitimité du Sénat perçu comme un moyen pour le pouvoir de caser sa clientèle politique. Cette hostilité vis à vis du Sénat sera d'ailleurs renforcée une la loi constitutionnelle n°2007-2007 du 15 mai 2007 qui fait du Président du Sénat le suppléant du chef de l'Etat en lieu et place du Président de L'Assemblée nationale. Ce qui veut dire que rien ne s'oppose au plan strictement juridique à ce que le Sénégal soit dirigé par un Président qui à été nommé par son prédécesseur comme ce fut le cas avec le Président Diouf en 1980, car le Président du Sénat pourrait bien être nommé compte tenu du mode de désignation des sénateurs. En conséquence sur le plan démocratique, on peut constater un certain recul du fait de la possibilité de remettre en cause le principe de l'élection concernant la transmission du pouvoir.

Par ailleurs, il faut noter qu'en plus du Sénat les révisions constitutionnelles vont entraîner le retour de la cour suprême.

5°) La renaissance de la cour suprême :

A la suite des institutions politiques et socio-économiques, c'est au système judiciaire sénégalais d'être réaménagé. Ce réaménagement a trait à la réintroduction de la cour suprême qui, en 1992, avait été éclatée en trois juridictions supérieures. C'est l'objet de la loi constitutionnelle voté le 8 mars 2008.Cette dernière ne donne pas des explications sur les raisons qui ont amené le constituant à réformer l'appareil judicaire. Il faudra se reporter sur la loi organique relative à la cour suprême pour appréhender les fondements de la réforme. A ce propos, il faut noter qu'elles sont diverses mais pour l'essentiel, c'est la rationalisation des moyens budgétaires et humains, l'amélioration de la qualité du service public de la justice ainsi que la faiblesse des décisions rendues par le conseil d'Etat qui ont sous-tendu la réforme. Ces motifs ne semblaient pas convaincre une large frange des acteurs de la justice qui ont eu à contester la réforme. A cet égard selon certains membres de la commission des lois, de la dé centralisation, du travail et des droits humains, il y a une absence de concertation dans la démarche du gouvernement relative au retour de cette juridiction suprême car soutiennent-ils que « le bâtonnier de l'ordre des avocats, aurait d'ailleurs émis des réserves sur le projet à l'occasion de la rentrée solennelle des cours et tribunaux, tout comme le Président de l'union des magistrats du Sénégal, récemment, par voie de presse ». En outre certains commissaires considèrent que la faiblesse des décisions du conseil d'Etat n'est pas pertinente pour justifier une réforme de l'appareil judicaire, du fait que celle-ci est liée à l'absence de proximité entre les justiciables et la juridiction,par conséquent, l'urgence, c'est de rapprocher les justiciables de la justice « à travers la création des tribunaux administratifs à l'échelle régionale ou à tout le moins par la prise en charge du contentieux administratif,en premier ressort, par les juridictions régionales ou départementales existantes »39(*).

Malgré ces réticences, la cour suprême est réintroduite.

Cependant, il faut apporter des précisions quant à la portée de la révision. En effet la fusion ne concerne que le conseil d'Etat et la cour de cassation. En conséquence les attributions du conseil constitutionnel et de la cour des comptes échappent à la cour suprême qui ressort de la réforme contrairement à celle de 1960.On constate ainsi que le domaine d'intervention de cette juridiction est restreint par rapport à l'ancienne car elle n'est pas compétente pour veiller au respect de la constitution encore moins au bon emploi des ressources budgétaires de l'Etat. Son institution entraînera l'effacement des juridictions concernées des institutions républicaines et du pouvoir judiciaire. Elle mettra un terme aux conflits de compétence entre le conseil d'Etat et la cour de cassation.

Les membres de la nouvelle cour suprême tout comme ce fut le cas pour ceux du conseil d'Etat et la cour de cassation sont soumis à un régime pénale particulier .Ainsi « sauf cas de flagrant délit, les membres de la cour suprême...ne peuvent être poursuivis, arrêtes détenus ou jugés en matière pénale que dans les conditions prévues par la loi organique portant statue des magistrats ».

Il faut toutefois signaler que cette réforme n'est pas encore officielle même si certains considèrent qu'elle va remettre en cause les acquis obtenus jusqu'ici40(*). Cela étant le système judiciaire reste encore tel qu'il est structuré par la réforme de 1992.

En somme il faut remarquer que les institutions républicaines ont été l'objet de plusieurs révisions constitutionnelles au point d'être affectées par une réelle instabilité, ce qui débouche sur une banalisation de celles-ci, et par voie de conséquence de la constitution.

Conclusion :

En somme on note une fréquence des révisions constitutionnelles au regard de la quantité de lois constitutionnelles produites.

Cela est lié essentiellement à la facilité de la mise en oeuvre de la procédure de révision ;

laquelle facilité est à son tour due à des facteurs juridiques et des facteurs non juridiques. S'agissant des facteurs juridiques on note que l'initiative de la révision est partagée entre l'exécutif et le législatif. Ce qui fait que le Président de la République peut entreprendre de modifier la constitution contrairement aux Etats-Unis où il faut 2/3 des membres du Sénat pour initier une révision ou 2/3 des législatures des Etats fédérés, où encore au Burkina où les initiatives sont d'origines parlementaires.

On note aussi que l'adoption se fait selon la procédure législative ordinaire, ce qui est une simple formalité lorsque le parti au pouvoir est majoritaire au Parlement.

Enfin l'approbation se fait en principe par référendum et exceptionnellement par voie parlementaire à la majorité des 3 /5. Toutefois dans la mise en oeuvre de cette étape, c'est le principe qui est transformé en exception et l'exception est devenue la règle. Autrement dit la quasi-totalité des révisions constitutionnelles sénégalaises ont été approuvées par le Parlement. Une seule révision est passée par la voie référendaire. IL s'agit de la révision constitutionnelle de 197041(*) . Cela est lié au fait que la voie parlementaire présente plus de garantie quant à l'approbation du texte42(*).

Au-delà de la procédure on note un refus du juge de contrôler les lois portant révision de la constitution dans la mesure où à chaque fois qu'il est saisi pour vérifier la constitutionnalité d'une loi de révision, il se déclare incompétent sous prétexte que ses compétences sont limitativement énumérées par la constitution et la loi organique relative au conseil constitutionnel. Et donc il ne peut contrôler une révision constitutionnelle car cela ne rentre pas dans ses attributions.

Cela est discutable pour deux raisons :

La première c'est que le conseil constitutionnel s'est prononcé sur la violation de la procédure de révision invoquée par les requérants dans sa décision 3/C/2005 relative à la loi constitutionnelle prorogeant le mandat des députés avant de se déclarer par la suite incompétent dans la même décision. Ce qui est paradoxale car il ne devrait pas se prononcer puisqu'il s'estime incompétent.

La seconde raison est que ses déclarations répétitives d'incompétence à propos des lois constitutionnelles sont inopportunes au regard des exigences de l'Etat de droit qui l'oblige à aller au-delà du minimum d'attributions conférées pour contribuer à la consolidation de l'Etat de droit par une jurisprudence régulatrice et équilibrée pour la protection, la garantie et l'épanouissement de la liberté43(*). Il doit faire preuve d'audace et de hardiesse en procédant lui-même, par les techniques d'interprétations, à l'extension du domaine du contrôle de constitutionnalité  en y incluant les lois constitutionnelles.44(*) C'est à cela que s'est attelé le juge constitutionnel béninois lorsqu'il a soutenu que le principe de la souveraineté populaire ne peut être remis en cause par une loi constitutionnelle lorsque les députés ont voulu proroger leur mandat sous prétexte d'une nécessaire rationalisation des finances publiques. Ce que refuse de faire le juge sénégalais.

Par ailleurs des facteurs non juridiques facilitent aussi les révisions constitutionnelles.

On peut noter dans ce sens l'existence d'un parti ultra dominant disposant d'une majorité qualifiée pour modifier de façon unilatérale la constitution que ce soit sous le régime socialiste ou sous le régime libéral. Ce qui est la conséquence du mode de scrutin à savoir le scrutin majoritaire

IL y a aussi la conception instrumentale de la constitution. Elle est considérée comme un moyen de conserver le pouvoir, de faire la politique, de gouverner. En témoigne les révisions à la veille des élections.

Enfin on peut noter la nature présidentialiste du régime sénégalais qui fait que la volonté du Président de la République est transformée en acte par les parlementaires dès qu'elle est exprimée.

Finalement avec la fréquence des révisions, on assiste à une dévalorisation de la constitution et par voie de conséquence à une banalisation des institutions. Celles-ci restent aussi marquées par une forte instabilité.

Il en résulte des risques d'instabilité comme en témoigne l'agitation de l'opinion publique lors de l'annonce d'une révision de l'article 27 de la constitution.

Au regard de ce qui précède, pour remédier à la récurrence des révisions constitutionnelles, une solution pourrait consister à rendre beaucoup plus rigide la procédure de révision. Autrement dit il faudrait que toute révision passe obligatoirement par la voie référendaire pour qu'elle soit approuvée. Cela permettrait à l'institution issue de la révision d'avoir la légitimité nécessaire qui puisse assurer sa pérennité. Cela permettrait également au peuple de sanctionner les initiatives manifestement inopportunes des politiques.

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III Décisions du conseil constitutionnel :

- Conseil constitutionnel sénégalais décision n°9/C/98 du 9 octobre 1998

- Conseil constitutionnel sénégalais décision n°1/C/2003 du 11 juin 2003

- Conseil constitutionnel sénégalais décision n°3/C/2005 du 18 janvier 2006

- Conseil constitutionnel français décision n°2003-469 DC du mercredi 26 mars 2003

IV Textes officiels:

Loi n° 63-22 du 7 mars 1963 portant constitution du Sénégal, JORS n°3587 du 11mars 1963

Modifiée par :

-la loi n°67-32 du20juin1967, JORS n°3906 du 10 juillet 1967

-la loi n°68-04 du14 mars1968, JORS n°3952 du 30 mars 1968

-la loi n°70-15 du 26 février 1970, JORS n°4089 du 28 février 1970

-la loi n°76-01 du 19 mars 1976, JORS n°4483 du 3 avril 1976

-la loi n°76-27 du 06 avril 1976, JORS n°4485 du 10 avril 1976

-la loi n°78-60 du 28 décembre 1978, JORS  n°

-la loi n°81-16 du 06 mai 1981, JORS n° 4834 du 15 mai 1981

-la loi n°83-55 du 01 mai 1983, JORS n° 4946 du 1 mai 1983

-la loi n°84-34 du 24 mars 1984, JORS n° 5001 du 28 avril 1984

-la loi n°91-20 du 16 février1991, JORS n°5400 du 30 mars 1991

-la loi n°91-25 du 05 avril1991, JORS n° 5402 du 27 avril 1991

-la loi n°91-26 du 05 avril 1991, JORS n°5402 du 27 avril 1991

-la loi n°91-46 du 06 octobre 1991, JORS n°5450 du 7 février 1992

-la loi n°92-14 du 15 janvier 1992, JORS n°5450 du 7 févier 1992

-la loi n°92 -22 du 30 mai 1992, JORS  n°5469 du 1 juin 1992

-la loi n°92-54 du 03 septembre 1992, JORS n°5484 du 5 septembre 1992

-la loi n°94-55 du 13 juin 1994, JORS n°5592 du 6 Août 1994

-la loi n°98-11 du 02 mars 1998, JORS n°5788 du 5 mars 1998

-la loi n°98-43 du 10 octobre 1998, JORS n°5823 du 10 octobre 1998

-la loi n°99- 02 du 29 janvier 1999, JORS n°5842 du 30 janvier 1999

Loi constitutionnelle n°2001-03 du 22 janvier 2001, JORS du lundi 22 janvier 2002 modifiée par :

-La loi n°2003-15 du 19 juin 2003, JORS n°6107 du 19 juin 2003

-La loi n°2006-11 du 20 janvier2006, JORS n° 6260 du 20 janvier 2006

-La loi n°2006-37 du 15 novembre2006, JORS n°

-La loi n°2007-06 du 12 février2007, JORS n°6332 du 10 mars 2007

-La loi n°2007-19 du 19 février 2007, JORS n°6327 du 19 février 2007

-La loi n°2007-21 du 19 février2007, JORS n°6327 du 19 février 2007

-La loi n°2007-26 du 15 mai 2007, JORS n °6353 du 30 juin 2007

* 1 Cette forme renvoie soit au régime présidentiel ou au régime parlementaire

* 2 Lexique des termes juridiques, dalloz, quinzième édition, page 553

* 3 Voir I.M.F, les textes constitutionnels du Sénégal du 24 janvier 1959 au 15 mai 2007, CREDILA, 2007

* 4 Loi n°70-15 du 26 février 1970(JORS n°4089 du 28 février 1970) en son article 21 dispose « Il n'est rééligible qu'une seule fois »

* 5 Loi n° 76-27 du 6 avril 1976 ( JORS n°4485 du 10 avril 1976) supprime la limitation du nombre de mandats du président de la république

* 6 Sud quotidien du 13 février 1998

* 7 Ismaila Madior Fall, Evolution constitutionnelle du Sénégal : de la veille des indépendances aux élections de 2007, CREDILA CREPOS 2007, p.157 et s

* 8 A loada, la limitation du nombre de mandats présidentiels en Afrique francophone, Afrilex n°3, www .u bordeaux 4.fr

* 9 Loi constitutionnelle n°67-32 du juin 1967 portant révision de la constitution, JORS n°3906 du 10 juillet 1967

* 10 Paul Ngom cours d'histoire des institutions politiques et administratives du Sénégal

* 11 Loi constitutionnelle n°70-15 du 26 février 1970 (JORS n°4089 du 28 février 1970) : selon celle-ci, la motion de censure doit à peine d'irrecevabilité être revêtue de la signature du quart des membres composant l'Assemblée. La censure est votée à la majorité absolue mais également lorsqu'elle est effective le président de la république peut dissoudre l'Assemblée

* 12 Voir dans ce sens G Conac, les institutions constitutionnelles et politiques des Etats d'Afrique francophone de la République malgache, Paris, Economica, 1979, p 67

* 13 Gerti Hesseling, Histoire politique du Sénégal : Institutions, droit et société, p.298 et s

* 14 A Tine, DU MULTIPARTISME A L'UN ET VICE VERSA ?essai sur le multipartisme au Sénégal, RCSP, vol 1 n° 3 Août 1997

* 15 Loi constitutionnelle n°78-60 du 28 décembre 1978, article 2 al 3,

* 16 S Sylla «  le contrôle de constitutionnalité des lois au Sénégal », RIPAS n°11,1984, p 819 et s

* 17 Voir exposé des motifs de la loi constitutionnelle n°81-16 du 6 mai 1981, JORS n°4834 du 15 mai 1981

* 18 Voir l'article 5 de la loi organique 92-23 du 30 mai 1992 modifiée

* 19 Conférence organisée par le LEJPO sur «les compétences du conseil constitutionnel à l'épreuve des saisines Remarques sur  le pouvoir jurisprudentiel du juge constitutionnel au Sénégal », samedi 29 mars 2008.Au cours de cette conférence, Monsieur Fara Mbodj qui en était l'animateur fait un constat sur les déclarations répétitives d'incompétences du conseil constitutionnel et considère que celles-ci profitent à l'exécutif en raison de l'inégalité des pouvoirs

* 20 Ismaila Madior Fall Evolution constitutionnelle du Sénégal : de la veille des indépendances aux élections de 2007, CREDILA CREPOS 2007, p 73 : selon M Fall cet argument ne s'est pas justifié

* 21Voir l'exposé des motifs de la loi constitutionnelle n°99-02 du 29 janvier 1999, JORS n°5842 du 30 janvier 1999

* 22 Cette modification d'une loi par un décret a été rendue possible par la Cour Suprême dans son arrêt du 13 juillet 1963

* 23 Ismaila Madior Fall, Evolution constitutionnelle du Sénégal : de la veille des indépendances aux élections de 2007, p.85

* 24 Madior Fall « suppression du quart bloquant : de la portion congrue à la portion magique », sud quotidien mardi 19 septembre 2006

* 25Assane Tham « une constitution ça se révise » Relativisme constitutionnel et Etat de droit au Sénégal, politique africaine n°108, décembre 2007 : « Abdoulaye Wade a été élu au premier tour des élections du 25 février 2007 avec 55,9% des suffrages. Le taux de participation ayant été élevé (70,6%) »

* 26 Loi n°2006-11 du 20 juin 2006, JORS n°6260 du 20 janvier 2006

* 27 Conseil constitutionnel du Sénégal, décision n°3/2005 du 18 janvier 2006

* 28 Cour constitutionnelle béninoise, DCC 2006-74, www.sonagnon.net

* 29 Décret du 8 décembre 2006 :celui-ci donnait à des départements moins peuplés plus de sièges que des départements plus peuplés violant ainsi l'article L 143 du code électoral qui prévoyait la prise en compte de « l'importance démographique ». Exemple le département de Podor avait deux sièges, celui de saint -louis trois alors que le premier compte 343346 habitants contrairement au second n'en compte que 231228.

* 30 Nouvel Horizon n°366, « trois années après l'alternance Wade tire le bilan », 19 mars 2003, page 11

* 31 Voir exposé des motifs de la loi organique n°2003-34 du 3 septembre 2003, JORS n°6121 du 3 septembre 2003

* 32 Ismaila madior Fall, Evolution constitutionnelle du Sénégal de la veille de l'indépendance aux élections de 2007, page 167

* 33 Assane Tham « une constitution ça se révise », Relativisme constitutionnel et Etat de droit au Sénégal, Politique africaine n°108, décembre 2007

* 34 Article 5 de la loi organique relative au conseil de la république « il ne peut être mis fin au mandat d'un membre du conseil de la république avant l'expiration de son terme normal »En conséquence le président du conseil nommé en août 2004 pour cinq ans était théoriquement inamovible jusqu'en août 2009

* 35 Voir exposé des motifs de la loi constitutionnelle n°2007-06 du 12 février 2007, JORS n°6332 du 10 mars 2007

* 36 Voir l'article LO 188-1 du code électoral

* 37 Loi votée le 13 novembre 2007

* 38 Tel est le cas avec le sénat car il ne peut bloquer aucune procédure, qu'elle soit législative ordinaire, budgétaire ou constitutionnelle. En cas de désaccord entre les deux chambres, l'assemblée statue en dernier ressort

* 39 Voir le rapport le rapport fait au nom de la commission des lois, de la décentralisation, du travail et droits humains

* 40 Voir le rapport fait au nom de la commission des lois, de la décentralisation, du travail et des droits humains

* 41 Loi constitutionnelle n°70-15 du 26 février 1970, JORS n°4089 du 28 février 1970

* 42 Voir dans ce sens Stéphane Bolle, «  des constitutions made in Afrique », www. Droitconstitutionnel.org, p 8

* 43 Gérard Conac, le juge constitutionnel en Afrique, censeur ou pédagogue, in les cours suprême, Economica, 1989, p 7 et s

* 44 D Rousseau, droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, 1995, p 151 et s, voir aussi P.JAN, le procès constitutionnel, Paris, LGDJ , 2001, p. 25 selon celui-ci les 17chefs de compétences du conseil constitutionnel français ne se trouvent pas forcément consignés dans les textes qui fixent le ressort de son office. Pour dire tout simplement que c'est par le biais de l'interprétation que le conseil constitutionnel a élargi ses compétences






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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway