WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Féminisme, genre et développement en Amérique latine: le cas de Novib (ONG néerlandaise )

( Télécharger le fichier original )
par Zoé Maus
Université libre de Bruxelles - DEA pluridisciplinaire 2002
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Chapitre II: Savoir du développement: le

Dispositif

Ce chapitre s'attachera non pas à faire une analyse détaillée de la constitution du savoir du développement mais plutôt à observer comment se tissent les liens entre ce savoir et les institutions et organisations qui l'utilisent. Nous mettrons donc l'accent sur l'utilisation du savoir et les conséquences de cette utilisation sur le savoir lui-même. Ce chapitre s'attachera plutôt à montrer la facette "institutionnalisée" de l'utilisation du savoir. Nous verrons par la suite51 comment il est possible d'utiliser ces savoirs à "contre-courant", afin de créer d'autres relations sociales, d'autres structures, qui ne seraient plus basée sur un pouvoir institutionnel mais sur une puissance sociale plus autonome. Nous verrons en particulier comment les ONG arrivent à gérer la double contrainte paradoxale (double bind) dans laquelle elles se trouvent: dépendante du "système" qui les finance (tant en termes strictement financiers, qu'en termes de "fonds de commerce" 52), mais désireuses de se battre contre lui et de le changer.

1. DISCOURS ET LANGAGE

Tout comme un savoir et un discours ont été élaborés sur les femmes et sur le féminisme, un savoir a été élaboré dans le champ du développement. Un corpus conceptuel et explicatif a été élaboré pour comprendre la réalité des pays du Sud, les raisons de leur 'retard économique', les particularités politiques, économiques et sociales de ces pays. Ce savoir n'était pas uniquement altruiste. Depuis la colonisation les connaissances se sont développées sur les pays colonisés afin de pouvoir mieux les comprendre, mais surtout de pouvoir mieux les gérer et les utiliser.

Le développement de ces connaissances a généré un nouveau vocabulaire, le discours devant s'adapter à de nouvelles connaissances et des faits nouveaux. Fruits d'un métissage, ce langage nouveau a permis de mettre en place de nouveau schéma de pensée et d'action. Par un savant va-et-vient entre la pratique et la théorie, un nouveau savoir s'est constitué, qui n'était ni exactement le reflet de la réalité, ni exactement ce que ses concepteurs avaient voulu en faire. A de nouvelles réalités correspondent de nouveaux mots, qui à leur tour entra»nent de nouvelles réalités pour l'objet qu'ils désignent et le sujet de ce savoir. Comme l'écrit Bruyère-Rieder,

"les mots ne servent pas uniquement d'intermédiaire entre le réel, tel qu'il est percu et compris par chaque collectivité, et les hommes. Ils ne sont pas neutres, c'est-à-dire transposables tels quels dans une autre langue; ils délimitent également les contours

du réel, mettent en évidence certaines de ses figures, laissent dans l'ombre quelques-unes de ses composantes, opèrent une structuration particulière de l'espace et du temps, ordonnent les regards, hiérarchisent les valeurs, systématisent l'empirie."53

51 dans la troisième partie, deuxième chapitre, page 56

52 Cette réflexion m'a été faite notamment à propos du rôle des ONG dans les conférences pour la reconstruction en Amérique centrale "post-Mitch". Lors de ces conférences il était clair que les ONG cherchaient d'abord à garantir leur propres subsides (interview avec Maria Teresa Bland--n et Ana Quiroz à Managua, octobre 2000).

53 Citée dans SAINT-HILAIRE Colette, La production d'un sujet-femme adapté au développement. Le cas de la recherche féministe aux Philippines, in Savoirs et gouvernementalité, n° thématique de Anthropologie et Sociétés, vol.20, n°1, Université de Laval, 1996, pp. 81-101, p. 82.

Ce discours, qui pour certains n'existe pas et n'est que mystification, a néanmoins produit quelque chose de 'réel' ou du moins un sujet et une 'réalité'54 adaptés à ce discours que celui- ci rend visible et concret. Escobar décrit le processus de construction de cette visibilité en expliquant comment un ensemble de techniques, de strategies, de pratiques organise, contrTMle et gere la production, la validation et la diffusion du savoir expert sur le développement et sur les populations visies par ses interventions.55

Au delà des mots, ce sont donc

des sujets catégorisés, systématisés, qui apparaissent, sujets qui sont "définis par le discours, construits dans les pratiques".56 Ces sujets deviennent des individus sérialisés, identiques, aux besoins standardisés et aux rTMles attribués d'avance. Ainsi on fait des habitants du Sud, des habitants types, pauvres, peu instruits, ancrés dans leurs traditions, qu'il faut moderniser (occidentaliser). Le fait de nommer ainsi les différentes réalités enleve des "possibles", transforme toute situation concrete en objet d'une expertise, forcement subjective et réductrice. C'est une sorte de mythologie du développement qui est ainsi mise en place, mythologie qui crée des réalités, de problemes et des besoins auxquels la coopération au développement tente de répondre par ses projets.

En parlant de mythologie, loin de nous cependant l'idée que les problemes vécus par les populations du Sud sont des inventions du Nord. Ce que nous appelons mythologie est plutTMt la réalité subjective qui est ainsi décrite par le biais du langage utilisé dans la coopération et qui nous semble, par sa subjectivité, ne donner qu'une interprétation des diverses situations vécues par ces populations. Interprétation qui ensuite suscitent des réactions "adaptées".

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote