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Féminisme, genre et développement en Amérique latine: le cas de Novib (ONG néerlandaise )

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par Zoé Maus
Université libre de Bruxelles - DEA pluridisciplinaire 2002
  

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ii. Citoyenneté desfemmes et reconstruction étatique

Cependant, si cette situation a ouvert aux femmes de nouvelles possibilités d'action elle a également ébranlé bon nombre de leurs certitudes.187 Plusieurs types de barrières, institutionnelles, organisationnelles et idéologiques, ont empêché la participation totale et la satisfaction complète des revendications des femmes.

· obstacles institutionnels et organisationnels

Le premier constat à faire est que la transition démocratique n'implique pas nécessairement ni une sensibilité plus grande de la société à la question de l'équité de genre, ni une diminution du sexisme.

L'ouverture et le changement organisationnel nécessaires à l'intégration des revendications sociales et des nouvelles citoyennetés est difficile à mettre en place, notamment à cause de l'inertie des acteurs sociaux (état, partis, médias, société civile). Dans leur intégration à l'espace public, les femmes (féministes ou non) se heurtent donc souvent à des structures hiérarchisées, verticales, empreintes d'une culture organisationnelle autoritaire et rigide, tant au niveau étatique qu'à celui des autres interlocuteurs sociaux et politiques.188 Dans un contexte de démantèlement de l'Etat-Providence et des contraintes imposées par l'économie de marché, un certain nombre de compétences et programmes ont été délégués aux instances régionales et municipales. Cette multiplication des interlocuteurs sociaux et l'absence de canaux de participation des femmes à ces niveaux du pouvoir n'a guère favorisé l'influence des femmes sur les programmes mis en Ïuvre.

Si des processus de réflexion et des débats publics, alimentés en grande partie par les connaissances développées par le mouvement féministe, ont effectivement lieu, mettant à l'ordre du jour une série de thématiques (sexualité, droits reproductifs, pauvreté), les programmes qui sont mis en place, destinés aux groupes sociaux les plus marginalisés, ont pour la plupart un caractère "asexué". Les revendications d'équité de genre y sont souvent effacées au profit de mesures visant à réduire les inégalités sociales et la pauvreté. Si un lien est effectivement établi entre "femmes" et "pauvreté", c'est en tant que membre d'un foyer ou comme faisant partie de catégories sociales générales (travailleuses, consommatrices, utilisatrices de services publics) que les femmes sont bénéficiaires et non en tant que comme sujets de droits avec une capacité de contrôle sur les ressources et bénéfices. La situation de subordination dans laquelle se trouvent les femmes ne s'en trouve donc pas changée.

· obstacles conceptuels et idéologiques

Alors qu'elles avaient une grande capacité de mobilisation sociale lorsqu'elle avaient un référent politique commun (lutter contre la dictature), leur pouvoir d'influence et de décision est fort réduit dès lors que l'espace public s'élargit et qu'elles doivent transformer leur participation sociale en pouvoir politique. Ainsi le mouvement de femmes est confronté à ses propres limites: socio-organisationnelles mais également conceptuelles et idéologiques.

On observe en effet à cet égard des carences dans le processus de socialisation des réalités féminines. Les femmes font face à la persistance des stéréotypes au sujet de leur engagement: celui-ci est percu comme étant exclusivement lié à leur rôle reproductif. A cet égard, Jelin souligne que la remise en cause du caractère naturel de cet engagement reproductivo-communautaire n'a eu lieu que lorsque la division sexuelle du travail a été

187 VARGAS Virginia, Reflexiones en torno a los procesos de autonom'a y la construcci--n de la ciudadan'a femenina en la regi--n, http://www3.rcp.net.pe/FLORA/reflex/ index.htm

188 MOLINA Natacha, opcit.

modifiée.189 Il n'existe pas non plus de reconnaissance de la diversité des femmes, elles sont considérées comme étant quasi "identiques et donc interchangeables".190

Cette négation des diverses réalités des femmes est lié aux processus d'individuation de celles-ci. Or, comme nous l'avions souligné dans le chapitre précédent concernant la recherche d'autonomie, il est indispensable, afin d'exercer pleinement sa citoyenneté et se reconna»tre comme sujets de droits, de pouvoir se percevoir non seulement comme étant "différente" et "autonome" mais également comme étant un agent social inscrit dans une multitude de relations sociales, et au sein duquel cohabitent différentes positions subjectives qui correspondent à autant de réseaux d'insertion sociale.191 Cette capacité à contrôler, par soi-même, les aspects fondamentaux de sa propre vie et les circonstances dans lesquelles elles se développent, sans se sentir "attachée" aux décisions émanant du mari, de l'église ou du parti192, est en effet indispensable pour que les femmes puissent influencer et contrôler les décisions publiques qui les concernent.193

La réappropriation de leurs revendications par les acteurs sociaux traditionnellement responsables de relayer les demandes sociales, tels les partis, se fait difficilement. Au sein de ces structures en effet, les relations de genre sont invisibles (et invisibilisées) et la citoyenneté des femmes est limitée. Or ce sont ces organisations, plus structurées, qui ont le plus d'influence et de pouvoir de décision. Des lors, les femmes qui étaient déjà inscrites dans de telles structures (états ou partis) vont conserver un lien avec le pouvoir alors que les quelques autres, plus progressistes, assumant des responsabilités vont intégrer les structures étatiques sans réelle base sociale pouvant leur accorder la légitimité dont elles ont besoin. Paradoxalement dit Molina, si des themes centraux à l'équité de genre sont inscrit à l'agenda public, ils sont défendus par les secteurs les plus conservateurs et en des termes fondamentalistes.


· amplification et diversification du mouvement

Ces facteurs, ainsi que l'absence de référents historiques empêchent de construire un concept moderne qui ferait le lien entre le genre et la citoyenneté pour construire un concept inclusif du féminin d'une part, qui engloberait la multiplicité des champs dans lesquels participent les femmes d'autre part. La démocratisation et la construction d'un mouvement social de femmes menant à une société égalitaire (quelque soit le genre, la race, l'ethnie) passe par des processus sociaux de construction d'action et d'identité collective impliquant trois axes: les fins, les moyens et les relations avec l'environnement. Comme l'exprime Escobar, c'est au quotidien que se fait l'intersection entre les processus d'articulation du sens par des pratiques d'une part, les processus de domination d'autre part.194 Il faudrait donc, pour qu'un réel changement ait lieu, arriver à constituer une "masse critique", à créer une communauté d'intérêts susceptible de sensibiliser l'opinion publique à l'importance du rôle des femmes mais aussi des autres diversités (raciales, ethnique s, etc.), tout en continuant d'avancer sur le plan politique institutionnel. 195

189 JELIN Elizabeth, Women and soc ial change in Latin America, UNRISD/Zed Books, London, 1990, p. 6.

190 MOLINA Natacha, p. 10.

191 MEYNEN Vicky et VARGAS Virginia, La autonom'a como estrategia para el desarrollo dessde los multiples intereses de las mujeres, in BARRIG M. & WEHKAMP A., Sin morir en el intento. Experiencias de planificaci--n de género en el desarollo, NOVIB, Ediciones Red Entre Mujeres, Lima, 1994, p. 27.

192 VARGAS Virginia, ReflexionesÉ, opcit., p. 5.

193 MOLINA Natacha, opcit.

194 ESCOBAR Arturo: Culture, Economics, and Politics in Latin American Social Movements Theory and Research, in ALVAREZ Sonia et ESCOBAR Arturo (sous la direction de), The making of the social movements in Latin America. Identity, strategy and democracy, Westview Press, Boulder, 1992, pp. 62-85, p. 72.

195 MOLINA Natacha, opcit, p.5.

Dans leurs processus de socialisation et de construction identitaires, les femmes ont bien sar utilisé différentes stratégies. L'engagement des femmes dans des institutions et espaces publics ayant de plus grandes capacités d'influence et de proposition, telles les ONG, les Universités ou certaines instances gouvernementales a contribué à la création de cette masse critique mais a aussi contribué à la diversification et l'amplification du spectre idéologique de l'action des femmes. Toutefois, cette participation des femmes aux structures du pouvoir ne constitue un réel acquis qu'à partir du moment oil "les organisations, et les femmes, établissent des liens, négocient avec les organisations politiques conventionnelles ou manifestent une aptitude technique de manière novatrice. Faire de la politique, c'est intervenir dans le public".196 Cette intervention dans le public s'est concrétisée de diverses manières et le mouvement des femmes, loin d'être homogène, est parcouru par une série de clivages, de fractures, de conflits mais aussi de points communs qui en ont fait le mouvement riche et dynamique d'aujourd'hui. Nous observerons ci-dessous les tendances récentes de mouvement des femme s ainsi que quelques uns des clivages qui le traversent. .

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