PREMIÈRE PARTIE: LA
DECENTRALISATION: QUEL BILAN EN COTE-D'IVOIRE ?
GENERALITES
En Côte-d'Ivoire, à l'instar de plusieurs pays
indépendants dans le monde, l'autorité de l'Etat s'exerce
à travers plusieurs modes de gestion sur toute l'étendue du
territoire national.
Dans cette gestion, deux modes essentiels se côtoient
tant bien que mal depuis plusieurs décennies. Il s'agit de:
- La déconcentration administrative
C'est un système de gestion, dans le cadre duquel sont
créés et mis en place des services administratifs relevant
hiérarchiquement de l'administration centrale, dont ils sont le
démembrement et le prolongement. Ces services sont
délocalisés sur l'ensemble du territoire national et
dirigés par des responsables nommés.
- La décentralisation
La décentralisation est un
système de gestion dans le cadre duquel, des pouvoirs propres sont
conférés à une entité distincte de l'administration
centrale.
- Elle est technique quand elle concerne les
établissements publics.
- Elle est territoriale quand il s'agit des
collectivités décentralisées.
La décentralisation territoriale consiste pour l'Etat
à transférer à des organes élus, des
compétences qu'ils exercent sur leur ressort territorial. Les
collectivités territoriales sont dotées de la personnalité
morale, de l'autonomie financière et de compétences qu'elles
gèrent librement sur le ressort territorial qu'elles administrent.
Selon le professeur René DEGNI-SEGUI :
« La décentralisation est le procédé
technique qui consiste à conférer des pouvoirs de décision
à des organes locaux, autonomes, distincts de ceux de l'Etat. Ces
organes locaux, appelés autorités décentralisées,
règlent les problèmes d'intérêt local, tandis que
l'autorité centrale prend en charge ceux présentant un
intérêt national. Ainsi, les problèmes intéressant
la commune ou le département sont réglés par leurs propres
représentants respectivement le Maire ou le Président du Conseil
Général. La décentralisation appelle l'idée
d'autonomie [.,.] Cette autonomie se matérialise dans la
personnalité juridique reconnue à la collectivité
décentralisée et qui implique un transfert de pouvoir à
une personnalité publique, autre que l'Etat et inférieur à
celui-ci. De cette définition, il est clair que le Conseil
Général est la personne morale chargée de la gestion du
Département».
Nous allons au cours de notre mémoire, nous
intéresser particulièrement à ce second mode de gestion
qu'est la décentralisation.
La notion clé qui revient dans ce mode de gestion est
le transfert de compétence qui se définit comme l'aptitude d'une
autorité administrative ou judiciaire à procéder à
certains actes dans des conditions déterminées par les lois et
règlements. Le transfert veut dire ici cession, transmission ou encore
dévolution. Le transfert de compétences est donc la transmission,
la cession et la dévolution d'un pouvoir d'agir ou d'établir des
actes à caractère administratif.
Il s'agit en fait pour l'Etat, de confier à des
collectivités territoriales, dans le cadre de la mise en oeuvre de la
politique de décentralisation, le soin de détenir et de
gérer en ses lieux et place, des compétences initialement
détenues et gérées par des services publics centraux ou
déconcentrés, en vertu des attributions des Ministères
dont ces derniers relèvent.
Ce transfert de compétences aboutit à une
recentralisation des missions de l'État et des Ministères, qui
désormais gèrent les questions purement régaliennes et
réalisent les projets d'envergure nationale.
Chaque Ministère a désormais pour mission, de
réglementer, de définir les normes et procédures
transversales, de suivre et contrôler leur application, de superviser, de
coordonner, mais aussi de réaliser les projets, travaux et
équipements d'intérêt national qui structurent le
territoire et constituent les fondements de son aménagement.
Pour bien analyser le processus décentralisation en
Côte-d'Ivoire dans cette première partie de notre mémoire
il importe d'abord de comprendre son bien fondé et les enjeux de ce mode
de gouvernance pour notre pays.
Au plan politique :
- permettre aux populations directement concernées de
participer concrètement à la gestion des affaires locales et
à la prise en main de leur développement (choix des hommes et des
projets);
- permettre aux hommes politiques d'accéder à
des postes électifs infra nationaux pour exercer le pouvoir, mais aussi
pour étendre et consolider sur le territoire national, l'influence des
partis politiques dont ils sont issus.
Au plan administratif :
- rapprocher l'administration des administrés et la
rendre ainsi plus accessible, plus humaine et capable de réagir plus
promptement aux sollicitations des populations ;
- réorganiser l'administration du territoire à
travers deux administrations parallèles et complémentaires:
l'administration déconcentrée qui précède et
accompagne l'administration décentralisée.
Au plan économique :
- mettre en place les équipements d'infrastructures et
de superstructure et les maintenir en bon état de fonctionnement ;
- favoriser le développement des activités
économiques, promouvoir l'emploi et lutter contre la pauvreté.
En termes d'aménagement du territoire :
- contrebalancer l'hyper pouvoir attractif de la ville
d'Abidjan tout en consolidant sa vocation économique ;
- redistribuer l'activité économique et l'emploi
sur toute l'étendue du territoire national, en faisant des chefs-lieux
de départements et de régions des pôles de
développement économique délocalisés ;
- ralentir l'exode rural, promouvoir le développement
rural, redistribuer les flux migratoires et mieux répartir la population
nationale sur l'ensemble du territoire national ;
- renforcer et consolider l'armature territoriale nationale
par le développement du réseau urbain et des réseaux
sectoriels d'équipement, ainsi que par l'apport d'un minimum de bien
être dans toutes les parties habitées du territoire national.
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