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L'action corporative devant le juge administratif

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par L. W. Pascal Zombré
Université de Ouagadougou - Maîtrise Droit Public 2003
  

Disponible en mode multipage

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MINISTERE DES ENSEIGNEMENTS ANNEE ACADEMIQUE 2002-2003

SECONDAIRE SUPERIEUR

ET DE LA RECHERCHE SICIENTIFIQUE

?????????????????????

UNIVERSITE DE OUAGADOUGOU

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UNITE DE FORMATION ET DE

RECHERCHE EN SCIENCES JURIDIQUES

ET POLITIQUES

THEME

L'ACTION CORPORATIVE DEVANT

LE JUGE ADMINISTRATIF

AU BURKINA FASO

MEMOIRE

Présenté et soutenu publiquement par :

Monsieur ZOMBRE Lamoussa Windpingré Pascal

Pour l'obtention du diplôme de maîtrise en sciences juridiques

OPTION : DROIT PUBLIC

OCTOBRE 2003 DIRECTEUR DE MEMOIRE

Monsieur Paul KIEMDE

Docteur en droit

Maître Assistant à L'UFR/SJP

AVERTISSEMENT

L'unité de formation et de recherche en Sciences

juridiques et

politiques n'entend donner ni approbation, ni improbation

aux opinions émises dans les mémoires qui

doivent être considérées comme propre à leurs auteurs.

DEDICACE

A tous ceux qui accordent de la valeur aux choses de l'esprit...

REMERCIEMENTS

Merci au Dieu trois fois Saint, d'avoir mis sur mon chemin des Hommes de bonne volonté qui ont contribué par leurs conseils leurs encouragements et leur assistance multiforme à la réalisation de cet ouvrage.

Au nombre de ces personnes : mes parents, le corps professoral de l'Unité de Formation et Recherche en Sciences Juridiques et Politiques et plus particulièrement Monsieur Paul KIEMDE mon directeur de mémoire pour sa disponibilité, sa simplicité et sa rigueur dans le travail, mes amis(es), mes camarades de classe ainsi que toutes les personnes qui m'ont apporté un soutien quelconque.

III

ABREVIATIONS

§ : Paragraphe

ADP : Assemblée des Députés du Peuple

AJDA : Actualité Juridique de Droit Administratif

AN : Assemblée Nationale

Al. : alinéa

art. : article

Ass : Assemblée

Assoc : Association

AV-JC : Avant Jésus Christ

BF : Burkina Faso

C.Civ : Code Civil

CE : Conseil d'Etat

CPC : Code de Procédure Civile

cf.  : Confère

CJ : Chambre Judiciaire

CPC : Code de Procédure Civile

CS : Cour Suprême

CSCA : Cour Suprême Chambre Administrative

CSCV : Cour Suprême Chambre Civil

D. : Dalloz

DA : Droit Administratif

DAG : Droit Administratif Général

DP : Droit Public

Ed. : Edition

ENAM : Ecole Nationale de d'Administration et de Magistrature.

FDSP  : Faculté de Droit et de Science Politique

JCP : Juriste Classeur Périodique

JO-BF : Journal Officiel- Burkina Faso

P. : Page

PUF : Presse Universitaire de France

RDP : Revue de Droit Public et de la Science Politique

Rec : Recueil

RFDA : Revue Française de Droit Administratif

RTD com. : Revue Trimestrielle de Droit commercial

RBD  : Revue Burkinabé de Droit

RJA : Revue de Jurisprudence Administrative

RVD : Revue Voltaïque de Droit

Sect : Section

SGCS : Secrétariat Greffe de la Cour Suprême

Synd. : Syndicat

TT : Tribunal du Travail

TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée

UA : Union Africaine

V. : Voir

Sommaire

ABREVIATIONS 3

INTRODUCTION 7

TITRE I. LA MISE EN OEUVRE DE L'ACTION CORPORATIVE. 14

CHAPITRE I : Les conditions de recevabilité relatives au requérant 14

CHAPITRE I : Les conditions de recevabilité relatives au requérant 15

Section I : Une capacité conditionnée. 15

§I : Le contrat d'association 15

A - L'accord de volontés. 16

1- L'existence du consentement 16

2. La capacité de l'associé 17

3- L'intégrité du consentement. 17

B. Le contenu du contrat d'association 17

1- La cause du contrat d'association 17

2 - L'objet du contrat d'association 18

§II. Le préalable de la déclaration administrative 19

A - les associations non déclarées 20

B- les associations dissoutes 21

Section II. Un intérêt statutairement défini 22

L'exigence d'un intérêt donnant qualité à agir se situe au tout premier 22

§I. le principe de la défense des intérêts propres à l'association 23

A - la limitation de l'intérêt à l'objet des associations 23

B- le caractère réglementaire de l'acte attaqué 24

§ II : les dérogations au principe : les mesures individuelles 25

A - une atteinte collective aux intérêts des associés 26

B- Un intérêt purement individuel 27

CHAPITRE II - La représentation en justice des associations 28

Section I -L'action corporative propria autoritae 28

§1- La faculté de recourir au ministère d'avocat. 28

A - Le droit de se défendre soi-même 28

B- L'obligation de se faire représenter. 29

§II. La référence aux prescriptions statutaires 29

A- l'exercice de prérogatives statutaires 30

B- l'Obligation de justifier de sa qualité 31

Section II. L'action Corporative au nom des intérêts particuliers. 32

§1- Les conditions relatives aux délégants 32

A- L'affiliation à une association 32

B- La contestation d'une décision individuelle. 33

§2. Les conditions relatives aux délégataires 34

A- l'exigence d'un mandant ad litem 34

B- L'exception de l'action en soutien 35

TITRE II : LES PROCEDURES RELATIVES A L'EXERCICE 37

DE L'ACTION CORPORATIVE. 37

Chapitre I : La relative simplicité des conditions de forme 38

Section I : Les exigences purement formelles. 38

§ I - La rédaction de la requête 38

A- La langue. 38

B- L'identité du ou des auteurs 39

C- L'exposé des faits et des moyens. 39

§II. Le dépôt de la requête. 41

A- l'acquittement d'un droit fixe 41

B- Les autres exigences 42

Section II. La nécessité de lier le procès 43

§I-La règle de la décision préalable 43

§II : Les exceptions 44

A- La liaison du contentieux 44

B- Le cas de force majeure. 45

Chapitre II : La brièveté du temps d'action 47

Section I : Le délai de présentation des requêtes 47

§I. L'exercice du recours dans un délai de deux mois. 47

A : Le principe 48

B. Les modalités d'application du délai 49

1) La théorie de la connaissance acquise 49

2) La décision implicite de rejet 50

§II. La prorogation de délai. 50

A- La prorogation provoquée par l'exercice d'un recours administratif. 50

B- Les cas de prorogation jurisprudentielle. 51

Section II. Les effets de l'expiration du délai. 52

§I. L'irrecevabilité du recours. 52

§ II : L'extinction de l'action 53

CONCLUSION. 54

ANNEXE 57

BIBLIOGRAPHIE. 58

INTRODUCTION

De tout temps, les hommes ont éprouvé le désir de s'associer. Plus qu'un désir, cela est longtemps apparu comme une nécessité humaine. Déjà vers 973 av-JC, le roi Salomon((*)1) affirmait dans l'Ecclésiaste((*)2) 4,9 que : « deux Hommes associés sont plus heureux qu'un Homme solitaire. A deux, ils tirent un bon profit de leur travail. Si l'un d'eux tombe, l'autre le relève. » L'association dont il est question ici va au-delà des regroupements dits naturels (la famille plus ou moins élargie, le clan, la tribu, etc.). Elle est présentée comme une étape quantitative et / ou qualitative vers un bonheur pour l'homme. Elle est un groupement dit artificiel ; autrement dit plus ou moins provoqué, sinon voulu, du moins accepté et par suite d'une manière ou d'une autre volontaire. Cependant quel que soit le type de regroupement humain (naturel ou artificiel), l'origine exacte de l'association en tant que phénomène social reste difficile à préciser, voire même impossible. Ce qui demeure certain, est que de tout temps et dans toutes les civilisations, il a vraisemblablement existé l'une ou l'autre forme de groupement ou les deux formes à la fois.

De nos jours, le phénomène associatif est fortement présent dans le corps social ; il a été appréhendé par les juristes, élevé au rang de liberté publique à valeur supra législative et cette liberté est reconnue internationalement comme telle.

Le phénomène associatif est de loin l'un des plus importants dans nos sociétés contemporaines. Cette importance est relative, d'une part, au nombre impressionnant de groupements créés et, d'autre part, aux nouveaux engagements sociaux de ceux-ci.

S'agissant de la multiplication des associations, celle-ci est plus sensible au Burkina Faso depuis les années 90, avec la réouverture démocratique et la réaffirmation de la liberté d'association. Il s'agit essentiellement des associations oeuvrant dans les domaines socioéconomique et culturel. Ainsi, du 01 mars 2001 au 01 mars 2002, 637 récépissés ont été délivrés à des associations (tous les domaines d'activités confondus) par le ministère de l'administration territoriale (MAT.) Cette inflation associationnelle est accompagnée d'une diversité des engagements sociaux : la promotion de la femme et de l'enfance, la promotion de la santé et du bien- être social...

Les groupements sont devenus les principaux animateurs de la vie sociale à côté des partis politiques. Aujourd'hui on parle volontiers de la société civile pour désigner l'ensemble des groupes organisés, nombreux et divers (syndicats, corporations, mouvements, associations, congrégations...) pour la défense d'intérêts aussi nombreux que divers. Cette société civile, d'abord nationale, va ensuite s'internationaliser du fait d'un nouveau phénomène beaucoup plus impressionnant et fédérateur de plusieurs intérêts transfrontaliers : la mondialisation.

Le phénomène associatif est si important qu'il intéresse aussi la science politique contemporaine qui l'appréhende à travers l'étude des groupes d'intérêts et des processus décisionnels. Vu sous cet angle, les associations sont des groupes de pressions qui peuvent se définir comme des organisations constituées pour la défense d'intérêts et exerçant des pressions sur les pouvoirs publics afin d'obtenir d'eux des décisions conformes à leurs intérêts.

Fait social d'une importance indéniable, le phénomène associatif n'échappe pas au droit. Il sera normalisé, réglementé et organisé pour obéir à l'ensemble des règles régissant la vie en société et sanctionné par la puissance publique. Dès lors, l'association sera institutionnalisée, c'est-à-dire fondée, établie par une norme et reconnue comme telle.

Au Burkina Faso, c'est la constitution du 11 juin 1991 en son chapitre IV, relatif aux droits et devoirs sociaux et culturels, qui institue l'association en son article 21. En disposant que : «  la liberté d'association est garantie », le constituant consacre implicitement l'association en tant qu'institution organe reconnue au Burkina Faso. Le législateur organise cette institution à travers la loi portant liberté d'association((*)3) qui définie l'association en son article 1er comme : « (...) tout groupe de personnes physiques ou morales, nationales ou étrangères, à vocation permanente, à but non lucratif et ayant pour objet la réalisation d'objectifs communs, notamment dans les domaines culturel, sportif, social, spirituel, religieux, scientifique, professionnel ou socio-économique. »

La liberté d'association telle qu'elle est consacrée par la loi fondamentale au Burkina Faso a une valeur constitutionnelle indéniable. De ce fait, elle a une valeur supra législative qui oblige le législateur à la respecter.

Sur le plan international, la liberté d'association fait l'objet de reconnaissances et de protections. Plusieurs organisations internationales ont reconnu la liberté d'association. Sont de celles-ci l' ONU et l' U.A .

Deux traités visant à donner une force obligatoire à la déclaration universelle des droits de l'homme furent adoptés respectivement le 15 et le 16 décembre 1966 par l'Assemblée Générale des Nations Unies. Le premier traité, le pacte relatif aux droits civils et politiques "reconnaît le droit de chaque être humain de tenir des réunions pacifiques et de s'associer librement avec d'autres.". Le second traité, le pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels "reconnaît le droit de former des syndicats". La charte africaine quant à elle, consacre la liberté d'association à son article 10 alinéa 1er du chapitre premier relatif aux droits de l'homme et des peuples. Cet article dispose que : « Toute personne a la droit de constituer librement des associations avec d'autres, sous réserve de se conformer aux règles édictées par la loi»

Il apparaît de ces deux chartes, que le phénomène associatif touche à un droit fondamental inhérent à l'espèce humaine : la liberté. Cette liberté est vraisemblablement le moteur de l'action corporative, chère aux groupements.

L'action corporative est susceptible de plusieurs entendements. Aussi, il convient dans le cadre de cette étude, d'une part, de la définir de façon claire et précise et, d'autre part, de la différencier d'avec d'autres notions comme le droit d'association et le droit des associations.

Qu'est-ce qu'une corporation ? Au moyen âge, les corporations étaient des unions professionnelles, groupant les membres d'un même métier: maîtres, compagnons, apprentis. Elles furent supprimées en 1791 par la loi "le chapelier". Aujourd'hui, les notions de corporation et d'association sont intimement liées. C'est l'article premier de la loi n°10/92/ADP portant liberté d'association qui contient les critères qui sont spécifiques aux associations.

1°- L'association est un groupe de personnes, ces personnes peuvent être des personnes physiques ou morales de droit privé. Elle se distingue dès lors de l'établissement public en ce que ce dernier relève du droit public.

2°- L'association a une vocation permanente. C'est d'ailleurs ce qui la distingue fondamentalement de la réunion qui est un groupement momentané de personnes, formé en vue d'entendre l'exposé d'idées ou d'opinions ou en vue de se concerter pour la défense d'intérêts.

3- l'association à un but non lucratif. C'est ce qui la distingue d'avec les sociétés commerciales dont le but est de partager les bénéfices entre les associés. Le but non lucratif de l'association ne lui interdit pas de réaliser des bénéfices, pourvu qu'elle ne les distribue pas.

4°- L'association a pour objet la réalisation d'objectifs communs à ses membres. Aussi, toutes les actions posées par celle-ci, doivent-elles obéir ou plutôt contribuer à la réalisation de cet objet. Par ailleurs, il y a autant d'objets qu'il y a d'associations. Ainsi, pour des raisons historiques, le syndicat professionnel apparaît comme une association à objet particulier et de ce fait, il est soumis à un régime juridique favorable. L'article 25 de la loi n°10/92/ADP portant liberté d'association dispose : «  le terme syndicat, au sens de la présente loi, signifie toute organisation ou groupe d'organisations de travailleurs ou d'employeurs, ayant pour but de promouvoir et de défendre les intérêts moraux, matériels et professionnels de leurs membres. » La distinction avec les associations reste donc purement formelle et certaines professions n'ayant pas le droit de se syndiquer défendent leurs intérêts grâce à des associations.

En définitive, la notion de corporation est intimement liée à celle d'association, sinon, à tout le moins la première est comprise dans la seconde. En effet, la notion de corporation renvoie au concept de corps de métier. Ce dernier regroupe l'ensemble des travailleurs soumis au même statut particulier et ayant vocation à parvenir aux mêmes grades. La corporation de ce fait n'est rien d'autre qu'une association professionnelle. Par conséquent, l'action corporative ou l'action associationnelle((*)4) ou encore l'action collective est l'action posée par une association conformément à son objet. L'article 41 de la loi n°10/92/ADP portant liberté d'association dispose que : « toute association dûment constituée et régulièrement déclarée peut, sans aucune autorisation spéciale, ester en justice, acquérir, posséder et administrer des biens meubles et immeubles nécessaires à l'accomplissement de ses activités, recevoir des dons et legs ».

Dans cette disposition, un des aspects du droit des associations intéresse la présente étude, à savoir, l'action en justice. L'action en justice est définie par l'article 11 du code de procédure civile comme « (...) le droit, pour l'auteur d'une prétention d'être entendu sur le fond de celle-ci, afin que le juge la dise bien ou mal fondée. Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention. » En somme, à propos d'action corporative, il s'agit du droit d'ester en justice reconnu aux associations.

Quelle différence existe-t-il donc entre ce droit et le droit d'association ?

Le droit d'association est une liberté individuelle. Elle est un corollaire de la liberté d'association. C'est le droit reconnu à l'individu de s'associer ou de ne pas s'associer. Ce droit est consacré par la constitution du 11 juin 1991, à son chapitre IV relatif aux droits et devoirs sociaux et culturels. Ainsi, selon l'article 21 « (...) toute personne a le droit de constituer des associations et de participer librement aux activités des associations créées(...). »Cette disposition confère au droit d'association une valeur supra législative. De ce fait, le droit d'association prévaut à l'action corporative et survit à celle-ci. Autrement dit, elle est au départ et à l'arrivée de l'action corporative. Qui plus est, elle en est la condition sine qua non.

Le droit des associations quant à lui, est à distinguer du droit d'association. Il rassemble les dispositions contenues dans les lois créant les associations comme formes juridiques, principalement la loi n°10/92/ADP portant liberté d'association. Il s'agit donc d'un droit institutionnel et non d'un droit matériel, ce qui pose le principe de la neutralité juridique du cadre associatif. En effet, leurs modes de constitution et leurs droits et obligations sont prévus par la loi. Il n'y a pas de régime juridique commun ni à toutes les associations, ni à chacune d'elle. Elles sont, chacune, soumises à leur statut personnel et à leurs règlements intérieurs propres. Dès lors qu'elle entreprend de faire quelque chose, l'association est soumise au droit applicable à l'action exercée. Cependant, ce principe de neutralité du cadre associatif n'est pas total, la forme associative générant parfois des règles spécifiques ou des adaptations aux règles générales par exemple fiscales. Ces règles spécifiques constituent avec le droit institutionnel une sorte de droit matériel des associations.

En définitive, l'action corporative n'est qu'un aspect singulier du droit des associations, en ce qu'elle en constitue la plus caractérisée des expressions et cela, en dépit de l'existence de plusieurs types d'actions corporatives. En effet l'action corporative dont il est ici question est à distinguer, d'une part de la « class action »((*)5) qui est aussi une autre forme d'action de groupe chère aux américains((*)6) et d'autre part de l'action de groupe québécoise.((*)7).

Pour ester en justice, il est offert aux associations deux voies : la voie judiciaire et la voie administrative. Devant les juridictions judiciaires (tribunaux répressifs, tribunaux civils) les associations sont recevables à agir pour la défense des intérêts de leurs membres si les dommages subis ont été communs à tous. Il appartient aux juges du fond d'apprécier si l'acte en cause porte atteinte aux intérêts collectifs représentés par celles-ci. Devant les juridictions administratives, les associations peuvent demander deux choses :

- L'annulation d'un acte administratif leur faisant grief. Cette action est qualifiée de recours pour excès de pouvoir. L'association requérante conteste la légalité d'un acte administratif.

- La réparation d'un préjudice propre, imputable à l'administration. Ce préjudice peut être matériel ou moral. Cette action est dénommée recours de plein contentieux de recours de pleine juridiction.

Dans l'optique de cette étude, seule l'action devant les juridictions administratives sera prise en compte. Toutefois, il n'est pas exclut que soit fait appel à l'action devant les juridictions judiciaires pour mieux mettre en relief la première.

Envisager l'étude de l'action corporative devant le juge administratif, c'est s'interroger sur deux questions fondamentales :

L'action corporative devant le juge administratif est l'expression d'une liberté publique. En tant que telle, elle est subordonnée à la puissance publique afin de lui permettre de seconder efficacement l'Etat dans la réalisation de l'intérêt général. Cependant, on constate qu'à travers l'action publique, les associations constituent de véritables contre-pouvoirs à l'Etat, mais surtout de sérieux concurrents aux individus dans la défense de leurs intérêts. En effet, les associations ont vocation à défendre à la fois les intérêts qui leurs sont propres et ceux de leurs adhérents, pris individuellement ou collectivement. Dès lors, la nécessité de limiter l'action corporative s'impose. Il se pose alors la question relative à la mise en oeuvre de leur action devant le juge administratif (TITRE I).

Les associations, parce qu'elles défendent des intérêts catégoriels proches ou assimilables à l'intérêt général, sont tentées de croire qu'elles sont libres d'agir selon leurs caprices et en tout temps. Ce qui soulève la seconde interrogation relative aux règles de procédure de mise en oeuvre de l'action corporative devant le juge administratif ( TITRE II).

TITRE I. LA MISE EN OEUVRE DE L'ACTION CORPORATIVE.

Examiner la mise en oeuvre de l'action corporative, c'est s'interroger d'abord sur les conditions de recevabilité de cette action, relatives au requérant, dans la mesure où le droit des associations est une liberté publique dont l'exercice est conditionné par la puissance publique(Chapitre I). C'est ensuite s'interroger sur la question de leur représentation en justice dans la mesure ou celles-ci sont censées défendre des intérêts spécifiques distincts de l'intérêt général et de celui purement individuel (chapitre II ). CHAPITRE I : Les conditions de recevabilité relatives au requérant

Au sens propre du terme, le requérant est une personne pour le compte de laquelle le recours est formé, par elle même (association, syndicat...) ou par une autre personne (avocat, représentant légal ou statutaire).

S'agissant des conditions de recevabilités relative au requérant ainsi défini, il y a lieu de s'arrêter sur la capacité d'agir en justice (section I) et surtout, sur l'intérêt dont il doit, de toute façon, justifier pour avoir qualité à agir (personnellement ou par l'intermédiaire d'une autre personne) (section II).

Section I : Une capacité conditionnée.

La capacité des associations, personnes morales de droit privé, à ester en justice est soumise en droit burkinabé à deux conditions majeures. La première condition est relative à l'existence d'un contact d'association. La deuxième condition est relative au respect de l'exigence légale de la déclaration administrative.

§I : Le contrat d'association

Le caractère contractuel de l'association est affirmé par la loi n°10/92/ADP portant liberté d'association. Juridiquement, l'association se manifeste par un accord contractuel, les principes de droit commun qui régissent les contrats lui sont applicables. C'est ce qui ressort de l'article 2, selon lequel « (...) elles sont régies quant à leur validité par les principes généraux du droit applicable aux contrats et obligations (...). »

L'étude du contrat d'association suppose donc que soit abordée la question de sa formation, plus spécifiquement le principe de l'autonomie de la volonté. Cette autonomie emporte plusieurs conséquences et confère à chacun le droit de s'associer avec les personnes de son choix. Chaque association aménage à sa guise les conditions d'adhésion à l'association en fonction des objectifs poursuivis. Souverainement élaborés, les statuts sont, pour l'association, « la loi suprême »; ils ne reçoivent d'autres limitations que celles résultant des prescriptions d'ordre public (la moralité publique, la sécurité publique...)

Le contrat d'association doit obéir à la condition essentielle de la validité des conventions ; le consentement de chaque partie doit se manifester librement, de telle sorte qu'il soit purgé des vices qui pourraient l'affecter. Si le droit de contracter est libre sauf à respecter l'ordre public et les bonnes moeurs, chaque partie doit savoir sur quoi et avec qui elle contracte, ce qui conduira à l'examen de la question relative à l'accord de volontés (A). Chaque partie doit être éclairée et s'engager en connaissance de cause d'où l'examen du contenu du contrat d'association (B).

A - L'accord de volontés.

Le contrat d'association est un contrat de droit privé, soumis au principe de l'autonomie de la volonté et régi quant à sa validité par les principes généraux de droit applicables aux contrats et obligations. Selon l'article 1108 du c.civ, quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention : « le consentement de la partie qui s'oblige; sa capacité à contracter ; un objet certain qui forme la matière de l'engagement ; une cause licite dans l'obligation ». Accord de volontés, le contrat d'association doit avoir un contenu conforme au droit en vigueur (lois et règlements) comme l'indique l'article 1108 du c.civ.. L'accord de volonté suppose l'existence du consentement des parties (les associés), leur capacité à contracter et, la réalité de ce consentement, qui doit être réellement libre, d'où un ensemble de règles pour protéger les parties.

1- L'existence du consentement

Le contrat d'association se forme par le consentement des parties. Si le consentement fait défaut il n'y a pas d'association : c'est l'aspect simple et élémentaire de l'autonomie de la volonté selon lequel : « la volonté humaine est elle-même sa propre loi, se crée sa propre obligation »((*)8). Pour s'engager dans des rapports contractuels, il faut le recours de deux ou plusieurs volontés, librement consentantes, émanant soit de personnes physiques, soit de personnes morales ou à la fois des deux.

Théoriquement, le consentement doit porter de façon distincte sur chaque fraction des obligations à naître. Dans la pratique cependant, il est admis que le contrat étant un ensemble, il engage en bloc. Ainsi l'objet du contrat est en droit comme en fait celui de l'association.

2. La capacité de l'associé

Le contrat d'association est parfait, si la personne qui consent a la capacité de contracter. Pour le c.civ. « toute personne peut contracter, si elle n'en est pas déclarée incapable par la loi » (art. 1123). Cette règle s'applique au contrat d'association « de personnes physiques ou morales, nationales ou étrangères ». Les associés doivent, en donnant leur consentement, être capables d'avoir et d'exprimer leur volonté de s'obliger. En principe, toute personne est libre de prendre les actes de son choix et, par suite, de s'associer. Cependant, le droit burkinabé connaît deux catégories de personnes incapables : les mineurs et les majeurs protégés.

En matière d'association, une troisième catégorie est soumise à des restrictions. Il s'agit des militaires (corps habillés en général). Cette question de limitation imposée aux militaires à l'adhésion à une association concerne moins le contrat d'association en soi que la liberté de s'associer.

3- L'intégrité du consentement.

Selon l'art 1109 du c.civ. : « Il n'y a point de consentement valable, si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par la violence ou surpris par dol. » Si l'une des parties a subi une pression, son consentement est vicié et le contrat est annulable sur la base de l'article 1117 du c.civ.. Il existe trois vices du consentement : l'erreur, le dol et la violence. Ces règles de droit commun sont applicables en matière de contrat d'association.

B. Le contenu du contrat d'association

Le contenu du contrat d'association pose les questions relatives d'une part à la cause du contrat et d'autre part à l'objet du contrat.

1- La cause du contrat d'association

L'article 1131 du c.civ. dispose que: « l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ». Comme pour les autres contrats, le contrat d'association ne peut être valable qu'à la double condition : La cause doit exister et elle doit être licite.

La cause peut être définie comme le but que les parties poursuivent, la raison d'être de leur obligation, l'affaire pour laquelle elles s'associent((*)9). Pour s'engager dans une convention, il faut une volonté libre et cette volonté doit avoir une cause.

Les dispositions légales qui traitent de la licéité de la cause sont nombreuses : le code civil((*)10), et la loi de 1992((*)11).

La liberté d'association trouve sa limite dans l'ensemble de ces dispositions. Toute association doit notamment observer les lois civiles et pénales, l'ordre public et les bonnes moeurs sous peine de nullité. Ainsi elle ne doit pas se livrer à des activités contraires à son statut, ni à des manifestations susceptibles de troubler l'ordre public, la moralité et la paix publique ou de nature à les provoquer. Elle ne doit pas revêtir le caractère d'une milice privée ou d'une organisation subversive.

Ainsi en France, ont été déclarées nulles par exemple :

- Une association de chiropracteurs non titulaires de diplôme de docteurs en médecine (Paris, 2 décembre 1970, JPC, 1971. II. 16622 ; D., 1971. J. 989).

- Une association créée dans le dessein d'échapper à la TVA (C.E 23 octobre 1989, JCP éd. E, 1989. I. 929 ; RTI com., 1990, p.6

2 - L'objet du contrat d'association

Parmi les quatre conditions essentielles à la validité d'une convention posées par l'art. 1108 du c.civ, figure « un objet certain qui forme la matière de l'engagement. » L'objet d'une obligation est « une chose qu'une partie s'oblige à donner ou qu'une partie s'oblige à faire ou à ne pas faire » (art 1126 c.civ).

Dans un contrat d'association, l'objet consiste dans la mise en commun de connaissances ou d'activités dans un but autre que le partage des bénéfices. L'objet doit exister au moment de la conclusion du contrat et être licite. Il est soumis au principe de la liberté de l'objet statutaire mais ce principe connaît des limites.

Toute association peut se doter d'un objet de son choix pour agir dans les domaines les plus variés, sous réserve de l'ordre public et des bonnes moeurs. Elle peut même poursuivre plusieurs objets et exercer de nombreuses activités. Cependant, dans ce cas, le principe de la spécialité statutaire des personnes morales veut que les associations n'aient la capacité juridique que pour les actes qui entrent dans l'étendue de leur objet.

La liberté du choix de l'objet d'une association souffre de certaines limites :

D'abord, au sens même de l'art 1er de la loi n°10/92/ADP portant liberté d'association, l'objet des obligations consenties par les associés ne doit pas leur permettre de partager les bénéfices.

Ensuite, certaines activités sont réglementées et leur exercice, même par les associations est subordonné à la délivrance d'une autorisation ou d'un agrément. Une association dont l'objet serait une activité soumise à agrément, sans l'avoir reçu, serait illicite((*)12).

Enfin, comme dans tous les contrats, l'objet de l'association doit être licite. A été déclarée nulle comme ayant un objet illicite une association ayant pour objet de violer les lois pénales((*)13).

En définitive, les associations se forment librement. Elles doivent pour cela, se conformer aux règles et principes du droit commun relatif aux contrats civils. Cependant pour pouvoir exister légalement elles ont besoin d'être déclarées légalement, authentifiées par un acte juridique, synonyme de l'acquisition d'une personnalité juridique.

§II. Le préalable de la déclaration administrative

Les associations librement formées et valides selon les principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations ne jouissent pas automatiquement d'une existence légale .Cette existence leur est accordée par l'autorité publique compétente, sous réserve de leur part de remplir certaines conditions, puisque l'article 2 al 2 de la loi n°10/92/ADP portant liberté d'association précise que : «  toutefois, elles ne jouissent de la capacité juridique que dans les conditions prévues par la présente loi ». Ces conditions sont prévues par les articles 3, 4 et 5.

L'article 3 prévoit les formalités que les fondateurs doivent remplir pour qu'une association soit formée. Ces conditions sont au nombre de quatre : asseoir une instance constitutive (assemblée générale, congrès...), soumettre à cette instance, pour adoption, les projets de statuts portant l'objet, les buts, la durée, le siège et le règlement intérieur de la future association, procéder à la désignation des membres dirigeants de l'association et, établir un procès-verbal des travaux de l'instance constitutive avec mention obligatoire de la composition de l'organe dirigeant, l'indication de l'identité et des adresses complètes de ses membres.

L'article 4, quant à lui, pose l'exigence de la déclaration de l'association auprès des pouvoirs publics. Il fixe un délai de huit (8) jours pour que la déclaration de l'association se fasse, suivant la date de sa constitution. Selon que les associations ont une vocation nationale, régionale ou locale, c'est le Ministère chargé des libertés publiques ou l'autorité administrative régionale ou locale qui sont compétents.

L'article 5 en ce qui le concerne, fixe les pièces que doit comporter le dossier de déclaration.

Aux termes des exigences des articles 3, 4 et 5, un récépissé de déclaration d'existence de l'association est délivré par l'autorité compétente.

En définitive, l'effet le plus important de la déclaration reste la jouissance de la capacité juridique reconnue à l'association ; toute chose qui lui permet de revendiquer en justice la violation de ses droits subjectifs. Cette revendication pose problème lorsqu'il s'agit des associations non déclarées (A) et des associations dissoutes (B) dans la mesure ou elles ne sont pas (ou ne sont plus) pourvues de la capacité juridique.

A - les associations non déclarées

Les associations non déclarées sont dépourvues d'existence légale, puisque l'article 2 alinéa 2 de la loi N°10/92/ADP précise que «  toutefois, elles ne jouissent de la capacité juridique que dans les conditions prévues par la loi » . Elles n'ont dont pas la capacité d'ester en justice. Mais en France, le conseil d'Etat les autorise à intenter des recours pour excès de pouvoir contre les actes administratifs lésant les intérêts de leurs membres((*)14). Cette autorisation ressemble plus à une reconnaissance implicite de leur personnalité qu'une reconnaissance expresse. Toutefois ne sont autorisées que les associations qui se sont formées librement, qui sont régies quant à leur validité par les principes généraux de droits applicables aux contrats et obligations et qui sont en attente d'une reconnaissance légale. Les associations ne répondant pas à ces exigences minimales ne peuvent en aucun cas bénéficier de cette reconnaissance implicite (reconnue le temps d'une action en justice).

La solution donnée par le conseil d'Etat français par rapport aux associations non déclarées pourrait être reprise par le juge administratif burkinabé. En effet, entre la formation des associations et leur reconnaissance de droit par les autorités publiques compétentes, il y a un temps d'attente au cours duquel bien de problèmes peuvent se poser à celles-ci. Il est alors nécessaire de leur accorder le droit d'ester en justice contre toute décision qui leur porterait préjudice notamment celle qui empêcherait leur accession à la vie juridique.

B- les associations dissoutes

La dissolution d'une association met fin en principe à sa capacité juridique. De ce fait, celle-ci ne dispose plus de la personnalité juridique ou morale indispensable à la jouissance de cette capacité. Par conséquent, elle perd sa capacité d'agir en justice pour la défense de ses intérêts.

Cependant, les recours émanant de personnes morales n'ayant plus la personnalité juridique sont admis lorsque l'objet de ces recours porte sur la perte de cette qualité; tel est le cas des associations dissoutes par un acte administratif.

En France, le Conseil d'Etat a admis que les associations dissoutes peuvent attaquer l'acte de dissolution((*)15). Rien n'empêche cependant de penser que cette solution ne serait pas admise par le juge administratif burkinabé, dans la mesure où il s'agit dans le cas d'espèce de remise en cause d'une liberté publique fondamentale : la liberté d'association. Il s'agit aussi de permettre à l'association dissoute de se défendre en vertu du principe des droits de la défense reconnu en droit positif burkinabé.

On pourrait, au terme de l'examen de la capacité, penser qu'il suffit aux associations, pour agir en justice, d'être librement constituées au regard des principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations et de souscrire à l'obligation de la déclaration préalable. Mais force est cependant de constater que celles-ci doivent encore justifier d'un intérêt statutairement défini.

Section II. Un intérêt statutairement défini

L'exigence d'un intérêt donnant qualité à agir se situe au tout premier

rang des conditions de recevabilité. L'intérêt peut être purement moral((*)16) ou un intérêt proprement individuel((*)17)ou enfin l'intérêt peut être collectif (commun aux adhérents).

Dans la notion de groupe d'intérêts ( interest group ), chère aux politistes américains, le concept d'« intérêt » doit s'entendre au sens large. Devant le juge administratif de l'excès de pouvoir, l' « intérêt à agir » n'est pas nécessairement matériel. Il peut être purement moral((*)18).

En la réalité, la défense des intérêts moraux et la défense des intérêts matériels vont généralement ensemble car pour vivre et faire vivre ses idées, tout groupement, même sincèrement désintéressé, même purement idéologique, doit disposer de ressources matérielles. Ainsi, certaines associations défendent à la fois des intérêts matériels et des causes morales. D'autres par contre dissimulent parfois des objectifs très concrets sous des thèmes moralisateurs.

Au demeurant, le juge administratif burkinabé exige pour que les associations aient le droit d'ester en justice, que celles-ci justifient d'un intérêt statutairement défini. Cependant ce principe connaît des dérogations

§I. le principe de la défense des intérêts propres à l'association

L'importance de la recevabilité des recours exercés au nom d'un intérêt propre a été révèlée par le célèbre arrêt du Conseil d'Etat français de 1906, arrêt qui a admis la recevabilité de tels recours consacrant ainsi la recevabilité de « l'action corporative »((*)19). Plus tard en 1990, la juridiction civile française affirmera au sujet du caractère nécessairement collectif  de l'intérêt que : « le préjudice invoqué par les associations est nécessairement collectif et leur est donc propre puisqu'il est celui-là même qui a été éprouvé par l'ensemble de leurs associés »((*)20)

La jurisprudence Burkina abondant dans le même sens, avait eu dans un arrêt de la chambre civile du 14 janvier 1972 à exiger que : « le conflit doit avoir une portée générale pour être qualifié de collectif, la seule intervention d'un groupement ouvrier ne suffisant pas à attribuer ce caractère(...) »((*)21) Ainsi va -t-elle limiter l'intérêt collectif à l'objet de l'association (A) et exiger que l'acte faisant grief ait un caractère réglementaire (B).

A - la limitation de l'intérêt à l'objet des associations

L'exigence d'un intérêt donnant qualité à agir se situe au tout premier rang des conditions de recevabilité de l'action corporative. L'intérêt d'une association ou d'un syndicat à agir en justice doit être apprécié de façon restrictive. En effet, le pouvoir qui leur est reconnu d'ester en justice pour la défense de leurs intérêts ne doit pas porter préjudice aux individus. On doit les empêcher de substituer systématiquement leur action à celle des individus et de violer, en débordant le cadre de leur objet, le principe de la spécialité de la personne morale((*)22).Le principe de la spécialité statutaire de la personne morale veut que les associations n'aient la capacité juridique que pour les actes qui entrent dans l'étendue de leur objet. Il contribue de ce fait à prohiber l'action populaire((*)23) . Chaque association peut se doter d'un objet de son choix pour agir dans les domaines qu'elle s'est choisis .Ainsi elle peut poursuivre plusieurs objets et exercer de nombreuses activités.

Dans son arrêt du 30 juillet 1999, la C.S.C.A a considéré que : « la décision de suspension d'émissions radiodiffusées de grande écoute touche à l'objet de la requérante quant à la défense de la liberté de la presse((*)24) (...) ». Dès lors, elle a admis que la Ligue pour la Défense de la Liberté de la Presse avait, de ce fait, intérêt à agir. Il ressort de cette décision, la volonté de la C.S.C.A. de cantonner l'action corporative dans les limites de son objet ou de ses objets et de ne pas susciter par son truchement l'action populaire. En effet la notion d'intérêt, comme elle l'a rappelée dans un de ses considérants, est une question d'ordre public((*)25) et le juge lui-même est alors autorisé à le soulever en tout état de cause, si les parties ne s'en prévalent pas et si elles débordent les limitent fixées par l'objet statutairement défini.

B- le caractère réglementaire de l'acte attaqué

Seules peuvent faire l'objet d'un recours, les décisions susceptibles de léser le requérant dans ses intérêts, c'est-à-dire une décision de nature à faire grief. L'intérêt d'une association ou d'un syndicat à agir contre un règlement apparaît aisément dès lors que le règlement (acte de portée générale et impersonnelle édicté par les autorités exécutives compétentes) emporte des conséquences dans le domaine où le groupement à vocation à intervenir; c'est-à-dire, dès lors qu'il est en rapport avec sa spécialité. Ainsi le Conseil d'Etat français a admis le recours d'un syndicat d'avocats contre une réglementation ministérielle qui, relative à la détention des étrangers en voie d'expulsion, affecte le droit de la défense de ces étrangers((*)26). Par ailleurs, le juge administratif burkinabé admet que le caractère exécutoire d'un procès-verbal en fait une décision administrative unilatérale et que cette décision met à la charge du demandeur, des obligations lui faisant grief, justiciable des juridictions administratives((*)27). Egalement l'acte attaqué doit modifier la situation juridique du requérant en le lésant dans ses intérêts (moraux et ou matériels).

Ainsi, une association est fondée à se pourvoir devant les juridictions administratives pour demander l'annulation d'un acte administratif lui faisant grief. Ainsi le Conseil d'Etat français a trouvé que l'association dite « société des amis de l'école polytechnique » a intérêt à l'annulation d'un arrêté du ministre de la guerre, dès lors que les décisions attaquées sont de nature à porter atteinte au renom de l'Ecole polytechnique. L'association requérante a qualité pour contester la légalité par la voie du recours pour excès de pourvoir.

De même, une association peut demander réparation d'un préjudice propre imputable à l'administration. Ainsi, quand l'association obtient des dommages-intérêts, ceux-ci ne réparent pas vraiment un préjudice, ils ne vont pas aux membres du groupement qui ont pu subir un dommage : ils vont grossir le trésor de guerre de l'association en vue des luttes futures. En somme comme l'ont si bien résumé R.& J Martin « l'Action associationnelle n'est qu'auxiliaire de l'action publique, une voie détournée de l'ordre public. Elle colmate une faille de l'appareil d'Etat. »((*)28)

Le principe de la défense des intérêts propres n'est pas un principe absolu. Il admet quelques dérogations

§ II : les dérogations au principe : les mesures individuelles

Ces solutions ne sont pas d'application aisée et la C.S. C.A a adopté les critères que le Conseil d'Etat en France a posé en la matière (syndicat des patrons coiffeurs de limoge). Pour distinguer les mesures individuelles sans répercussion collective de celles qui touchent à des intérêts collectifs, la chambre administrative utilise la distinction entre les actes individuels positifs qui portent une atteinte collective aux intérêts des associés (A) et les actes individuels négatifs qui touchent un intérêt purement individuel (B).

A - une atteinte collective aux intérêts des associés

Les mesures positives (ainsi qualifiés du point de vue de leurs destinataires auxquels elles confèrent des droits ou du fait de leurs retombées défavorables pour les tiers) sont volontiers considérées comme touchant aux intérêts collectifs. C'est l'exemple d'actes de nominations ou encore, d'un avancement irrégulier etc. Un syndicat de fonctionnaires peut attaquer une mesure individuelle de nomination, d'intégration ou d'avancement qui lèse collectivement tous ceux de ces membres qui avaient vocation à en bénéficier. Le préjudice est nécessairement collectif quand il est éprouvé par l'ensemble des associés. Ainsi le juge civil de la cour d'appel de Ouagadougou estime « que les conflits collectifs sont caractérisés par deux éléments tenant l'un à l'objet, l'autre aux intérêts parties qui s'opposent ; que seul peut être considéré comme collectif, le conflit qui met en jeu un intérêt considéré comme collectif. 

II ne suffit pas que le conflit observé mette en jeu un intérêt doté d'un tel caractère, encore faut-il qu'il concerne un groupement de salariés investi ou non de la personnalité juridique. »((*)29) Plus tard le tribunal du travail de Bobo-Dioulasso déclarera que : « on reconnaîtra le caractère de conflit collectif au conflit qui oppose un employeur à un groupement de salariés ayant la personnalité morale (syndicat ), agissant en son nom personnel et tendant à régler une question d'ordre collectif »((*)30).

Il ressort de ces deux décisions que le conflit collectif met en jeu un intérêt collectif propre aux membres d'une association ; qu'il n'a pas pour objet la défense des intérêts patrimoniaux et extrapatrimoniaux de l'association, mais qu'il porte sur la défense des intérêts de ses membres; enfin qu'il doit avoir une portée générale pour être qualifié de collectif, la seule intervention par exemple, d'un salarié pour violences ou outrages à supérieur hiérarchique ne retentit que sur le seul auteur((*)31).

B- Un intérêt purement individuel

La défense d'intérêts individuels par les associations elles-mêmes se heurte au grand principe selon lequel en France comme au Burkina « nul ne plaide par procureur. » Cependant, ce principe connaît des exceptions devant les juridictions administratives.

Le juge administratif burkinabé, selon que l'acte incriminé est un acte individuel positif ou un acte individuel négatif y attache des conséquences.

En ce qui concerne les actes individuels positifs, il admet les syndicats et associations, de demander l'annulation des mesures individuelles positives qui, créatrices de droits au profit du bénéficiaire, lèsent les intérêts ou portent atteinte aux droits leurs membres((*)32). Cependant pour qu'une association puisse ainsi agir, elle doit être le syndicat ou l'association auquel le bénéficiaire lésé est dûment affilié et agir en vertu d'un mandat ad litem que lui aurait délivré le bénéficiaire.

S'agissant des actes individuels négatifs, ceux-ci ne peuvent faire l'objet d'aucun recours devant le juge administratif. Les mesures individuelles négatives sont par essence des mesures qui ne lèsent que l'intéressé, soit en lui refusant un avantage, soit en compromettant sa situation au lieu de créer un droit à son profit. Par conséquent, le syndicat ou l'association est interdit d'action, mais toutefois, il peut agir en soutien de l'action intentée par l'intéressé lui-même. L'action en soutien consiste à appuyer les prétentions du requérant.

Pour mettre en oeuvre l'action corporative de manière définitive, la question de la représentation du requérant personne morale de droit privé se pose. C'est ce qui fera l'examen du chapitre II.

CHAPITRE II - La représentation en justice des associations

S'interroger sur la question de la représentation des associations devant le juge administratif, c'est reconnaître que l'action corporative a besoin pour sa mise en oeuvre, de la justification d'une qualité. Cette qualité diverge selon que l'action corporative est exercée par le requérant en son nom propre (section I) ou que celle-ci est exercée par le requérant au nom des intérêts particuliers (Section II).

Section I -L'action corporative propria autoritae

Exercée au nom du requérant personne morale de droit privé, ce dernier a la faculté de recourir au ministère d'avocat (§1) ou lorsqu'il entend se représenter lui-même, il a l'obligation de se référer aux prescriptions statutaires (§2).

§1- La faculté de recourir au ministère d'avocat.

Cette faculté offerte aux associations désireuses d'ester en justice, disposant de la capacité juridique et justifiant d'un intérêt statutairement défini, est affirmée par un principe (A) qui connaît cependant des dérogations(B).

A - Le droit de se défendre soi-même

Ce droit découle du principe des droits de la défense tel qu'il résulte de la constitution burkinabé du 11juin 1991 art. 4 al.3 : « le droit de la défense y compris celui de choisir librement son défenseur est garanti devant toutes les juridictions » Il est consacré par le législateur burkinabé dans le livre premier du C.P.C. relatif aux dispositions communes à toutes les juridictions. Ainsi, l'article 4 al. 1er du C.P.C. dispose que : « les parties peuvent se défendre elles-mêmes sous réserve des cas dans lesquels la représentation est obligatoire ». Il s'agit essentiellement des recours pour excès de pouvoir et, plus généralement des recours en appréciation de la légalité et des appels des jugements prononcés par les tribunaux administratifs en matière d'excès de pouvoir.

Pour les personnes physiques, le droit de se défendre soi-même ne souffre d'aucune équivoque. Cependant ; s'agissant des personnes morales de droit privé (associations et syndicats ), le caractère fictif de leur personnalité semble poser problème dans la mesure où elles n'ont pas d'existence matérielle. Il semble alors que le droit de se défendre soi-même ne leur est pas applicable. Mais en réalité, l'existence d'une personne morale de droit privé se manifeste à travers son représentant légal ; toute chose qui permet de conclure que son droit de se défendre elle-même se résume à sa représentation légale.

B- L'obligation de se faire représenter.

Il ressort de l'article 4 al 1er précité, qu'il existe des cas où la représentation est obligatoire. Autrement dit, les parties ne peuvent plus elles-mêmes se défendre. Dans ce cas l'article 4 al.2 dispose que : « elles peuvent se faire représenter ou se faire assister par toute personne de leur choix suivant ce que la loi permet ou ordonne.» Cette personne de choix peut être un avocat ; c'est ce qui ressort de l'article 52 du C.P.C. relatif à la représentation en justice : « En toute matière et devant toutes les juridictions, les parties peuvent se faire représenter par un avocat. »

En France, quand le Conseil d'Etat est saisi, l'obligation est, plus précisément, celle du ministère d'un des avocats au Conseil d'Etat et à la cour de cassation, dits «avocats au conseil. » Officiers ministériels propriétaires de leur charge, ils ont, en effet, le monopole de la représentation des parties devant le Conseil d'Etat (ordonnance du 31 juillet 1945, art.41). Devant les autres juridictions administratives, appel peut être fait, indifféremment aux avocats au conseil et aux avocats inscrits aux barreaux institués près des cours et tribunaux.

Au Burkina Faso les recours en révision contre des décisions contradictoires du Conseil d'Etat (nouvellement créé ) doivent être présentés par des avocats exerçant au Burkina Faso .

§II. La référence aux prescriptions statutaires

Les personnes morales, telles que les associations et syndicats, font l'objet de dispositions législatives ou réglementaires quant à leur représentation en justice et plus particulièrement devant le juge administratif. En général les statuts prévoient l'exercice de telles prérogatives (A), mais dans tous les cas il est fait obligation au représentant de justifier de sa qualité (B)

A- l'exercice de prérogatives statutaires

Les statuts peuvent librement désigner la personne habilitée à représenter l'association en justice. Seule cette personne peut alors ester au nom du groupement. Il a été jugé, par le TGI de Paris, que le président d'une association n'était pas recevable à le faire quand les statuts avaient désigné à cette fin le comité directeur((*)33). Quant à la C.S.C.A du Burkina Faso, celle-ci s'est appuyée sur les stipulations du règlement intérieur de la Ligue pour la Défense de la Liberté de la Presse (L.D.L.P.) pour reconnaître au secrétaire général la qualité à ester en justice, au nom de la ligue, et ceci en tant que personne assurant l'intérim en cas d'empêchement du président (premier responsable)((*)34). Dès lors, il ne fait aucun doute que le juge administratif burkinabé s'attache aux prescriptions statutaires pour reconnaître aux requérants la qualité de représentant. Cependant, ces prescriptions peuvent être absentes ou peu claires.

En France, en l'absence de dispositions statutaires, il revient au conseil d'administration d'assurer en toutes circonstances le bon fonctionnement de l'association. Ainsi, si les statuts ne désignent pas la personne chargée de représenter l'association en justice, le président du conseil d'administration a suffisamment le pouvoir pour ester en justice au nom de l'association.

Dans l'hypothèse où les statuts d'une association sont muets quant à la qualité des personnes capables d'ester en justice, seule l'Assemblée Générale peut autoriser une action ; le juge administratif exigeant pour sa part une délibération spéciale . Ainsi dans l'arrêt « comité de défense du chemin de ronde de Damgan »((*)35), le Conseil d'Etat a trouvé que le président du comité requérant n'a justifié d'aucune délibération de l'Assemblée générale de l'association l'autorisant à agir devant lui et a déclaré la requête de celui-ci irrecevable.

Au Burkina Faso, en exigeant dans les formalités de constitution des associations que ces dernières établissent un procès-verbal des travaux de l'instance avec les mentions obligatoires de la composition de l'organe dirigeant, l'indication de l'identité et des adresses complètes de ses membres, le législateur a par-là démontré toute l'importance qu'il accorde aux personnes physiques membres des associations.

Aussi, le juge administratif burkinabé dans l'hypothèse où les statuts d'une association sont muets, s'attachera à un ensemble d'indices qui lui permet d'apprécier ceux qui ont qualité à représenter l'association devant lui. Parmi ces indices, le procès-verbal des travaux de l'instance constitutive (Assemblée Générale, Congrès...) est d'une grande importance.

En définitive, la position des juridictions administratives burkinabé ne diffère pas au fond de celle des juridictions françaises. Toutes deux, elles permettent d'aboutir à des solutions équivalentes. Toutefois la faculté du requérant personne physique de représenter une association personne morale de droit privé devant le juge administratif ne peut se faire sans conditions.

B- l'Obligation de justifier de sa qualité

Quand la personne qui représente en justice le requérant n'est pas un avocat, elle doit être en mesure de justifier de sa qualité à agir et cela, notamment, lorsqu'elle agit au nom d'une personne morale de droit privé. D'office, s'il le faut, le juge lui imposera de fournir les justifications nécessaires.

Au Burkina Faso cette obligation a été édictée à l'endroit des "employés" des personnes morales. Autrement dit, les dirigeants n'ont pas besoin de justifier leur qualité dans la mesure où ils sont les représentants légaux des associations. Contrairement aux dirigeants, les employés des personnes morales, pour représenter ces dernières en justice, doivent être "munis de pouvoir écrit". La jurisprudence française, quant à elle, parle plutôt de simple adhérent. Selon cette jurisprudence, celui-ci ne peut agir en justice au nom de l'association, sauf autorisation spéciale((*)36). Ainsi, la plupart des associations prévoient dans leurs statuts une ou plusieurs dispositions qui permettent au président d'être remplacé, en cas de représentation en justice, par un mandataire agissant en vertu d'une procuration spéciale et jouissant du plein exercice de ses droits civils. C'est dans cette même logique que le juge administratif burkinabé a admis que le Secrétaire Général puisse agir en justice au nom de la L.D.L.P en vertu d'une prérogative statutaire et ceci en lieu et place du président.

En dernière analyse, l'action corporative propria autoritae demeure une action soumise à une réglementation stricte dans le souci de ne point permettre à n'importe quel individu de s'en prévaloir indûment. Cependant, l'action corporative peut, à l'instar de celle exercée dans l'intérêt propre de l'association, être exercée au nom des intérêts particuliers.

Section II. L'action Corporative au nom des intérêts particuliers.

La question qui se pose ici, est celle de la représentation par l'association de ses associés, dans un procès intéressant les intérêts collectifs de ceux-ci. Il s'agit en effet d'une délégation de l'action individuelle au syndicat ou a l'association. Cependant pour qu'une telle délégation devienne possible, le délégant (§1) comme le délégataire (§2) doivent obéir à certaines conditions.

§1- Les conditions relatives aux délégants

Ces conditions sont au nombre de deux et elles sont relativement simples. Elles apparaissent même triviales. Il s'agit d'une part de l'affiliation à une association (A) et de la contestation d'une décision personnelle (B).

A- L'affiliation à une association

S'il est désormais admis par la jurisprudence administrative que l'action corporative peut être déléguée, cette délégation n'est possible que dans la mesure où le délégant est lié au délégué.

En l'espèce, l'associé doit être affilié à l'association. Ainsi la C.S.C.A. a t-elle estimé dans l'affaire L.D.L.P contre Conseil Supérieur de l'information que la requérante (L.D.L.P) n'avait pas la qualité donnant intérêt à agir pour le compte de la station radio diffusion «Horizon FM» dans la mesure où «il ne résulte nullement des pièces du dossier que cette station de radiodiffusion «Horizon FM» titulaire de droits d'émissions censurées par le conseil supérieur de l'Information est membre de la Ligue pour la Défense de la Liberté de la Presse . 

Dès lors, il ressort clairement que le juge administratif burkinabé n'admet l'action corporative au nom des intérêts particuliers, qu'à la seule condition que ces particuliers soient membres des dits groupements. C'est ce que la C.S.C.A avait par ailleurs rappelé dans l'arrêt SNEAHV contre République de Haute Volta, arrêt dans lequel la chambre considère que : «  s'il est loisible aux syndicats et associations estant propria autoritae d'attaquer, outre celles atteignant leurs activités propres ou leur patrimoine, les mesures individuelles positives qui, créatrices de droits au profit du bénéficiaire, lèsent les intérêts ou portent atteinte aux droits de leurs membres...»

Il apparaît en définitive que le juge administratif burkinabé est resté constant, de 1968 à nos jours, à l'exigence d'un lien juridique (en l'espèce le contrat d'association) entre l'associé membre de l'association (l'adhérent) et l'association, pour que cette dernière puisse prétendre défendre les intérêts du premier devant le juge administratif. Toutefois, la contestation doit porter sur une décision individuelle.

B- La contestation d'une décision individuelle.

Pour que l'association personne morale de droit privé défende son adhérent, il faut que celui-ci conteste une décision ou une mesure individuelle. Deux types de mesures individuelles sont à distinguer : les mesures individuelles positives et les mesures individuelles négatives. Suivant que l'on a à faire à l'une ou à l'autre, le juge administratif admettra ou non une action corporative.

S'agissant des mesures individuelles positives, elles sont définies comme des mesures qui, créatrices de droit au profit du bénéficiaire, lèsent les intérêts ou portent atteinte aux droits des membres des syndicats ou des associations. Ainsi le juge administratif burkinabé a confirmé une fois de plus la jurisprudence antérieure en «considérant qu'en présence d'un acte individuel, l'action associative est recevable pour être revêtue de l'intérêt à agir lorsque l'acte a un caractère positif (nomination, promotion) et lèse partie ou totalité des intérêts des adhérents de l'association; que le caractère positif de la décision étant intimement lié à la qualification d'acte individuel, une dérogation apportée à un usage réglementaire obligatoire pour créer un droit individuel demeure du domaine du règlement et l'action associative est comme telle reçue((*)37). » En tout état de cause, un adhérent agissant individuellement est recevable à demander l'annulation de mesures positives ; les syndicats ou les associations qui défendent les intérêts de leurs membres en cause le sont également.

Concernant les mesures individuelles négatives, elles sont défavorables à leur destinataire. Elles sont considérées comme insusceptibles de léser l'intérêt collectif représenté par le groupement, pour la raison qu'elles lèsent seulement l'intérêt propre du destinataire. Elles sont vues comme n'étant sources de préjudice que pour lui. En conséquence, seul a intérêt lui donnant qualité à agir le fonctionnaire, par exemple, auquel un arrêté de révocation touche : « (...) attendu que l'arrêté de révocation frappant Dah Aimé Mélinan est par essence une mesure individuelle négative, que le syndicat National des Enseignants Africain de Haute-Volta n'a pas d'intérêt pour agir directement es qualité. »

En définitive, il ressort de l'étude des conditions relatives aux délégants que, l'action corporative au nom des intérêts particuliers n'est pas octroyée aux syndicats ou associations sans au préalable que les délégants respectent certaines conditions.

§2. Les conditions relatives aux délégataires

Les délégataires (associations ou les syndicats) ne peuvent agir devant le juge administratif au nom et pour le compte des intérêts particuliers que s'ils justifient d'une autorisation préalable (A). Toutefois, dans l'impossibilité de défendre les intérêts de leurs adhérents, ceux-ci peuvent néanmoins être autorisés à les soutenir (B).

A- l'exigence d'un mandant ad litem

Un mandat est un acte par lequel une personne est chargée de représenter une autre pour l'accomplissement d'un ou de plusieurs actes juridiques. Le mandat dont il est ici question est le mandat conventionnel c'est-à-dire celui en vertu duquel un adhérent (mandant) par un contrat charge son association ou son syndicat (mandataire) de le représenter devant le juge administratif. Le mandat est dit "ad litem" s'il est donné par l'adhérent au groupement « en vue d'un procès. »

En France, le C.E, dans l'arrêt syndicat des patrons coiffeurs de Limoge (précité), considère que «s'il appartient aux syndicats professionnels de prendre en leur nom la défense des intérêts dont ils sont chargés aux termes de l'art.3 de la loi du 21 mars 1884, ils ne peuvent intervenir au nom d'intérêts particuliers sans y être autorisés par un mandat spécial ; (...). »

En clair, pour le juge administratif français, un syndicat de fonctionnaires ne peut attaquer une mesure individuelle que si celui-ci justifie d'un mandat délivré par l'individu en question.

Le juge administratif burkinabé va abonder dans le même sens que son homologue français. En 1968, dans l'affaire SNEAHV C/République de Haute-Volta précitée, il a refusé la qualité de requérant au SNEAHV au motif que celui-ci se présente comme l'unique auteur de la requête et n'établit pas agir en vertu d'un mandat ad litem que lui aurait délivré ledit Dah Aimé Mélinan. Il ressort de cette décision et cela d'une manière implicite, l'attachement du juge administratif burkinabé à la présentation d'un mandat ad litem.

Au demeurant l'absence du mandat ad litem n'est pas la fin de toute possibilité pour l'association ou le syndicat de défendre ses adhérents, ceux-ci peuvent agir pour soutenir l'action de leur militant.

B- L'exception de l'action en soutien

L'action en soutien est l'intervention accessoire par excellence. L'intervenant ne se propose rien d'autre que d'appuyer la prétention de l'une des parties. Tout en formant son intervention par «requête distincte» et, bien entendu, motivée, il ne fait que s'associer aux conclusions du requérant (intervention en demande) ou à celles de son adversaire (intervention en défense), sans rien demander d'autre de plus que ce que demande la partie à laquelle il porte appui.

Nonobstant la modestie de son objectif, l'action en soutien est d'une importance pratique pour les associations ou syndicats et cela d'un double point de vue. Premièrement, il peut arriver que l'intervention d'un groupement parvienne à mieux justifier que l'adhérent au profit duquel il intervient, la prétention de celui-ci. Deuxièmement, une intervention en demande est aussi de nature à corroborer le sérieux du recours. Il peut n'être pas indifférent à l'adhérent, pour toutes sortes de raisons, de n'être pas seul en face de son adversaire, surtout quand ce dernier est l'administration.

En matière d'excès de pouvoir, il est exigé de la part de toute association ou syndicat, un intérêt suffisant (largement entendu) pour agir. En effet, dans bien des cas, notamment où des groupements ne sont pas recevables à former un recours pour excès de pouvoir parce que la décision ne lèse pas l'intérêt collectif qu'ils ont pris en charge, ils peuvent intervenir à l'appui du recours pour excès de pouvoir exercé par l'associé. C'est ce qui ressort implicitement de l'arrêt n°68 de la C.S C.A. du 22 novembre 1968.

En matière de plein contentieux, le juge administratif français exige pour qu'une association ou un syndicat agisse en appui de la prétention de son adhérent, que ceux-ci se prévalent d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier((*)38). Il doit s'agir d'un droit distinct de celui pour la reconnaissance duquel le juge a été saisi((*)39).

Il ressort de cette première partie consacrée à la mise de l'action corporative que celle-ci ressemble d'un point de vue purement formel à celle exercée par les personnes physiques. Cependant dans le fond, elle répond à de nombreuses exigences qui s'expliquent par le souci des pouvoirs publics de protéger l'action corporative contre d'éventuels errements. Aussi est-il utile d'examiner les procédures relatives à l'exercice de l'action corporative pour corroborer ou non, nos premières conclusions.

TITRE II : LES PROCEDURES RELATIVES A L'EXERCICE

DE L'ACTION CORPORATIVE.

Aux conditions de recevabilité intéressant le requérant s'ajoutent celles qui concernent l'acte procédural lui-même, c'est à dire, le recours considéré indépendamment de la personne de son auteur. L'action corporative a besoin, pour son accomplissement, d'obéir à un ensemble de formalités qui doivent être suivies pour soumettre la prétention du requérant à un juge administratif ; les procédures suivies se déroulant devant les juridictions administratives.

Au Burkina Faso, deux lois intéressent les procédures applicables devant les juridictions administratives. Il s'agit de la loi n° 21/95/ADP du 16 mai 1995, portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs et de la loi 15-2000-AN du 23 mai 2000 portant composition, organisation, attribution, fonctionnement du Conseil d'Etat et procédure applicable devant lui.

Relativement à l'exercice de l'action corporative ainsi considéré, il convient d'indiquer d'abord, et bien entendu, les conditions de forme (chapitre I). Il faut ensuite présenter comment l'action corporative doit, en principe, être dirigée contre une décision et être exercée dans un délai déterminé (Chapitre II).

Chapitre I : La relative simplicité des conditions de forme

Il s'agit pour le requérant de connaître les conditions de forme et d'être en mesure de les respecter. Ces conditions se rapportent à des exigences purement formelles (sections I) et à l'impérieuse nécessité de lier le procès (Section II).

Section I : Les exigences purement formelles.

Ces exigences sont en rapport d'une part avec la rédaction de la requête (§I) et d'autre part en rapport avec le dépôt de la requête (§II).

§ I - La rédaction de la requête

Ces exigences sont plurielles ; mais elles peuvent se résumer essentiellement à trois éléments qui sont : la langue, l'identité du ou des auteurs et l'exposé des faits et des moyens.

A- La langue.

La recevabilité du recours est d'abord conditionnée pour sa rédaction en une langue, en vertu d'une règle générale de procédure destinée à assurer la clarté du débat contentieux.

Au Burkina Faso, il ne ressort pas des règles de procédures applicables devant les cours et tribunaux, de dispositions expresses portant sur l'exigence de rédiger les requêtes en une langue donnée. Cependant, ce mutisme des textes n'autorise pas l'utilisation de n'importe quelle langue devant les tribunaux, dans la mesure ou l'existence d'une langue officielle, en l'occurrence le français, est affirmée par la constitution : « La langue officielle est le français » (cf. Article 35 al. 1er de la constitution burkinabé du 11 juin 1991). Dès lors, il ne fait aucun doute qu'en l'absence de textes législatifs clairs et précis en la matière, le français soit la langue usitée devant le juge administratif burkinabé.

En France, le Conseil d'Etat a déclaré irrecevable la requête en annulation d'un jugement qui n'est pas rédigé en langue française, confirmant ainsi la décision attaquée. Par cet arrêt, le Conseil d'Etat français a consacré une règle générale de procédure selon laquelle les requêtes doivent être rédigées en français((*)40). La même solution pourrait être retenue par les juridictions burkinabé étant donné, l'absence d'une règle de procédure expresse prescrivant l'usage obligatoire du français dans la rédaction des requêtes.

B- L'identité du ou des auteurs

Pour être recevable, le recours doit contenir des indications propres à identifier son auteur : nom, adresse, ainsi que signature (la sienne propre ou celle de son avocat ou d'un représentant).

Au Burkina Faso, c'est l'article 12 alinéa 1er de la loi n°21/95/ADP du 16 mai 1995, portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs et l'article 20 de la loi organique 15-2000 AN du 23 mai 2000 portant composition, organisation, attributions, fonctionnement du Conseil d'Etat et procédure applicable devant lui, qui traitent ensemble de l'obligation pour les auteurs d'une requête de décliner leurs identités dans cette requête.

En ce qui concerne les Associations, personnes morales de droit privé, il s'agira pour leur représentant personne physique de procéder à la déclinaison de son identité en lieu et place de la personne morale. Le représentant doit préciser notamment l'association au nom de laquelle il introduit la requête. Elle doit être émargée par le représentant. Toute fois, la requête doit comporter l'exposé des faits et des moyens pour pouvoir être conforme aux dispositions ci-dessus visées.

C- L'exposé des faits et des moyens.

Le requérant doit faire connaître au juge ce que sont ses conclusions et ce que sont ses moyens. Les conclusions sont un acte de procédure par lequel le requérant expose ses chefs de demande, le défendeur ses moyens de défense. L'acte comporte les décisions qu'ils demandent au juge de prendre. C'est par le dépôt des conclusions que le débat est lié. Le juge a l'obligation de répondre à tous les chefs des conclusions.

Les moyens sont le soutien nécessaire de la demande et de la défense. Ce sont eux qui forment le fondement de la cause. A l'appui de leur prétention les parties peuvent faire valoir les moyens de fait ou de droit. Ce sont des raisons de fait ou de droit invoquées pour justifier les conclusions.

L'exigence relative à l'exposé des faits et des moyens est déterminée par les textes (cf. Articles 12 et 20 des lois précitées) qui sont l'expression d'une règle de procédure particulière relative d'une part aux tribunaux administratifs et au Conseil d'Etat d'autre part.

Ceci étant, l'énoncé des conclusions ne fait généralement pas de difficulté. Quant à l'exigence de la motivation, elle relève d'un régime des plus libéraux.

Dans un premier temps en effet, elle peut être réduite à un exposé résumé des faits et moyens. Le recours se présente alors comme "l'exposé sommaire", contenant une relation succincte des faits litigieux et le simple étalage (non argumenté) des moyens de droits invoqués. Cela est illustré par la décision du Conseil d'Etat français en date du 22 novembre 1972, Déboise, AJ.1973, p.136 ; RFDA 1985, p.420

Dans un second temps, la jurisprudence est peu formaliste. De toute évidence, la façon normale de procéder est d'exposer les moyens dans le texte même du recours. Mais, le juge administratif français autorise le requérant à se référer aux moyens développés par lui dans un recours antérieur à la saisine de la juridiction ; tel un recours administratif (gracieux ou hiérarchique ) et dont il produira la copie, en l'annexant à sa requête ( CE sect. 3 février 1989, Assoc. Essor écon. et Soc. du Couserans, RDP 1989, p. 1490 ).

En somme, il apparaît sans équivoque que les exigences purement formelles en rapport avec la rédaction de la requête sont très libérales et peu formalistes aussi bien devant le juge français que devant le juge burkinabé. Cependant, la jurisprudence et la doctrine constantes considèrent que les moyens d'ordre public((*)41) peuvent être soulevés à tout moment de la procédure par les parties ou le juge lui-même lorsque celles-ci ne s'en prévalent pas et que ces moyens peuvent donc être soulevés pour la première fois et oralement à l'audience.

§II. Le dépôt de la requête.

Le dépôt de la requête correspond au moment où la requête est inscrite sur le registre d'ordre qui est tenu obligatoirement par le greffier. Celui-ci délivre au requérant, un certificat constatant l'arrivée au greffe de la réclamation et des différents mémoires. Mais avant la délivrance d'une telle pièce, le requérant doit s'acquitter d'un droit fixe (A) et remplir certaines exigences complémentaires (B).

A- l'acquittement d'un droit fixe

Cette exigence est prévue par l'article 12 alinéa 2 de la loi n°21/95/ADP du 16 mai 1995, portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs et l'alinéa 2 de l'article 20 de la loi organique 15-200 An du 23 mai 2000 portant composition, organisation, attributions, fonctionnement du Conseil d'Etat et procédure applicable devant lui. Ces deux dispositions ont en commun de mettre à la charge du recourant une somme de 5.000 mille francs à titre de droit fixe. Cependant la première disposition prévoit en plus du droit fixe, une consignation d'amende de 2.000 francs, tandis que la seconde impose au recourant la consignant d'un droit proportionnel égal à un pour mille de la demande. La non consignation des différentes sommes, que ce soit devant les tribunaux administratifs ou devant le conseil d'Etat à pour conséquence de rendre le recours irrecevable. Cette irrecevabilité fait perdre tout effet au dépôt de la requête, notamment si le délai d'action n'est pas suspendu.

Devant les tribunaux administratifs les recourants qui bénéficient de l'assistance judiciaire ou de l'aide juridictionnelle sont dispensés du paiement de ces droits((*)42). L'aide juridictionnelle est cette institution destinée à aider financièrement les plaideurs dont les ressources ne dépassent pas une certaine somme. Elle leur permet de bénéficier totalement ou partiellement du recours gratuit d'un avocat, d'un avoué ou de plusieurs officiers ministériels, ainsi que de l'avance par l'Etat des frais provoqués par la mesure d'instruction.

Devant le Conseil d'Etat, sont dispensés du versement des droits proportionnels les recourants pour excès de pouvoir dans les litiges concernant la carrière des fonctionnaires((*)43) Toutefois l'acquittement d'un droit fixe ne met pas pour autant fin aux exigences formelles en rapport avec le dépôt de la requête.

B- Les autres exigences

Il s'agit essentiellement de certains documents qui doivent être annexés au recours. Le requérant est aussi tenu de joindre à son recours, sous peine d'irrecevabilité de ce dernier, la décision contre laquelle il est formé. Ainsi, dans l'affaire Association Delwendé à Ouagadougou C/Etat burkinabé, la requérante à joint à sa demande le procès verbal exécutoire n°38 dont l'annulation était demandée((*)44).

En outre, lorsqu'il s'agit d'une décision implicite, le requérant peut joindre l'accusé de réception à sa demande de décision ou toute pièce équivalente justifiant de la date du dépôt de cette demande. Dans ce sens, le Conseil d'Etat français((*)45) a admis la suffisance d'un récépissé postal, à défaut d'accusé de réception émanant de l'administration. Toutefois, en cas d'impossibilité matérielle ou juridique, comme dans le cas où l'administration refuserait de délivrer la copie d'une décision qui n'aurait pas été publiée ni notifiée, le requérant n'y sera pas tenu.

De même, le requérant (association ou syndicat agissant par l'intermédiaire d'un représentant) est tenu de produire un certain nombre de copies de son recours, pour faciliter les communications aux parties et accélérer l'instruction, sous peine d'irrecevabilité.

Enfin, quant au représentant du requérant (autre qu'un avocat) il doit produire le mandat, l'autorisation administrative ou toute autre pièce lui donnant qualité à agir au nom du requérant.

En définitive, le requérant peut produire toutes les pièces et tous les documents qu'il considère propres à appuyer ses allégations et à justifier ses conclusions.

Au terme de l'examen des exigences purement formelles, il ressort que celles-ci se justifient largement car le juge administratif doit disposer de plus d'informations possibles pour pouvoir se prononcer. La nécessité pour le requérant de lier le procès s'impose.

Section II. La nécessité de lier le procès

Les juridictions administratives ne peuvent être saisies que par la voie d'un recours formé contre une décision, c'est-à-dire contre une mesure «qui s'impose» par la volonté de son auteur((*)46). Telle est la règle, dite de «la décision préalable», actuellement consacrée en droit français par le décret du 11 janvier 1965, relatif aux délais de recours en matière administrative, (art 1er, al.1). La conséquence d'une telle règle est que, en l'absence d'une décision spontanée prise par l'administration, tout recours est irrecevable. Cependant, la jurisprudence a prévu quelques exceptions permettant d'y remédier.

§I-La règle de la décision préalable

Cette exigence est prévue par l'article 13 de la loi n°21/95/1995 précitée : « la requête doit à peine d'irrecevabilité (...) contenir, une copie de la décision attaquée (...). » Elle n'est pas non plus absente de la loi organique 15-2000 AN du 23 mai 2000 précitée qui dispose à son article 20 que : «la requête doit à peine d'irrecevabilité, (...) être accompagnée de l'extrait de la décision juridictionnelle ou de la copie de la décision administrative ou d'une pièce justifiant du dépôt de la réclamation. »

Il ressort de ces dispositions que le justiciable, personne physique ou morale, doit, pour demander l'annulation d'un acte administratif être en mesure de prouver l'existence de cet acte. Autrement dit, pas d'acte attestant une décision expresse ou implicite de l'administration, pas de recours devant le juge administratif contre cet acte. La décision expresse ou implicite constitue la décision préalable contre laquelle le requérant (association ou syndicat) peut se pourvoir devant les juridictions administratives.

L'analyse de la jurisprudence burkinabé indique avec clarté que le juge administratif applique avec rigueur la règle de la décision préalable. Ainsi, il n'a pas hésité à déclarer irrecevables les requêtes introduites en l'absence de décision préalable((*)47) au motif que cette règle est d'une application impérative. La règle de la décision préalable intéresse le contentieux de l'excès de pouvoir, en ce qu'elle exclut en principe que le recours puisse être formé contre des mesures sans caractère décisoire. Mais, l'intérêt d'une telle règle est plus manifeste en matière de recours de plein contentieux. En effet, il n'est pas concevable qu'une condamnation à dommages-intérêts soit demandée au juge directement, c'est-à-dire, autrement que par le biais d'un recours contre une décision ayant refusé ces dommages-intérêts.

La règle de la décision préalable n'est pas une règle absolue dans la mesure où le requérant peut remédier à l'absence de décision. De ce fait, elle admet quelques exceptions.

§II : Les exceptions

Les exceptions au principe de la décision préalable sont de deux sortes. Elles ont été prévues par la jurisprudence. Ce sont : la liaison du contentieux (A) et le cas de force majeure (B).

A- La liaison du contentieux

Il faut la comprendre comme étant le fait pour le juge administratif de décider, qu'en l'absence d'une décision préalable, il peut communiquer la requête contentieuse à l'administration. Si celle-ci prend position quant au fond, il lie le contentieux administratif. Autrement dit, en l'absence de décision préalable, la réponse au fond de l'administration valide ainsi le défaut de décision préalable.

La C.S.C.A. en a ainsi décidé dans l'affaire Kaboré Josué du 8 novembre 1968 : « attendu que dans son mémoire en défense, l'administration n'oppose pas la fin de non recevoir tirée de l'absence de décision préalable et se défend au fond ; que cette défense au fond lie le contentieux, le vice dont était entachée la requête se trouvant couvert. »((*)48)

De même, dans l'affaire Lankouandé Ali du 10 avril 1970, il a déclaré : «si, en règle générale, tout recours contentieux doit être, sous peine d'irrecevabilité, dirigé contre une décision administrative préalable, explicite ou implicite, la juridiction administrative peut communiquer toute requête non assortie d'une décision préalable au Ministre compétent dont la réponse, s'il prend position dans ses observations, vaut décision préalable et lie le contentieux. »

B- Le cas de force majeure.

La force majeure est l'événement imprévisible et insurmontable d'origine externe c'est à dire absolument étranger au recourant et empêchant celui-ci de produire la décision préalable.

Il constitue une atténuation de la règle de la décision préalable. Pour le juge administratif, la règle ne s'impose pas en cas de force majeure. Dans l'affaire Yé Massatié Lassina du 26 mars 1971, il a déclaré que : « attendu que loin de se soumettre à la formalité de la décision préalable, le requérant usa d'emblée de la voie contentieuse ; attendu qu'il résulte cependant des pièces produites au dossier, que les services du ministère de la santé publique n'adressèrent pas à ceux du personnel de la fonction publique soit par incurie, soit par mauvaise volonté coupable un bulletin de note et plusieurs demandes ; attendu qu'il en échet de déduire qu'un véritable cas de force majeure dispensa le requérant de la formalité de la décision préalable... déclare recevable le recours. »

Il apparaît en définitive que les conditions de forme relatives à l'exercice de l'action corporative sont à quelques différences près semblables à celles des personnes physiques devant les juridictions administratives. En outre ces conditions sont caractérisées par leur relative simplicité.

En sus des conditions de forme ci dessus examinées, l'action pour être recevable doit obéir à des conditions de délais. C'est ce qui fera l'objet de l'examen du chapitre suivant.

Chapitre II : La brièveté du temps d'action

Les actes et les formalités de la vie juridique doivent normalement être accomplis dans un certain délai. A la différence de la procédure civile, le régime du contentieux administratif subordonne très largement la recevabilité des recours à leur exercice avant l'expiration d'un délai. Il s'agit de délai de forclusion qui est un délai pour agir, encore appelé "délai de procédure". Ce délai est à distinguer du délai de prescription qui touche au fond du droit (il intéresse l'extinction d'un droit ou d'une obligation).

Evoquer la question du délai d'action devant le juge administratif, dans le cadre de cette présente étude, c'est mentionner la nécessité pour les associations ou syndicats, à l'instar des autres personnes physiques et morales de se conformer rigoureusement aux règles de procédure pour voir aboutir leur action. Ainsi, serait-il indiqué d'étudier le délai de présentation des requêtes (sections I) avant d'examiner les effets de l'expiration du délai sur le recours (section II).

Section I : Le délai de présentation des requêtes

La brièveté du délai de présentation des requêtes tient à la considération qu'il est d'intérêt général que le sort des décisions de la puissance publique soit fixé aussitôt que possible ; raison pour laquelle il est exigé, en principe, que l'exercice du recours se fasse dans un délai de deux mois (§I). Mais, cette exigence crée un risque pour la sécurité des justiciables, pour justifiée qu'elle soit. C'est pourquoi, s'il incombe aux justiciables d'être vigilants. Il est nécessaire de prévoir un régime propre à exclure, autant que possible, le risque d'équivoque et d'incertitude. Aussi sera envisagé les prorogations de délai (§II).

§I. L'exercice du recours dans un délai de deux mois.

La nécessité d'assurer la stabilité des situations de droit résultant des décisions administratives entraîne l'existence d'un délai limité pour l'introduction d'un recours devant les juridictions administratives (A). L'application de ce délai obéit à des modalités d'applications (B).

A : Le principe

L'article 17 de la loi n°21/95/ADP du 16 mai, 1995, portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs pose le principe en disposant que : « le recours aux tribunaux administratifs contre la décision d'une autorité administrative n'est recevable que dans un délai de deux (2) mois. Ce délai court à partir de la date de la notification ou de la signification de la décision attaquée. » Quant à l'article 25 de la loi 15-2000 AN du 23 mai 2000 portant composition, organisation, attributions, fonctionnement du Conseil d'Etat et procédure applicable devant lui, il dispose également que : « Le recours au Conseil d'Etat contre la décision d'une autorité administrative n'est recevable que dans un délai de deux mois ; ce délai court de la date de notification ou de signification, ou de la date de la publication de la décision attaquée. »

Il ressort de ces deux dispositions une unanimité autour du principe du délai unique de deux mois. Ce principe est valable quelque soit le recours exercé (excès de pouvoir ou plein contentieux).

L'étude du délai de deux mois montre, de toute évidence, que c'est un délai de droit commun qui s'impose pour l'exercice des recours dans tous les cas où il n'en est pas disposé autrement. Une des caractéristiques du délai de deux mois est qu'il est un délai franc, c'est-à-dire qu'il est constitué de journées entières et que ne sont pas comptés dans le délai le jour de la notification ou de la publication (dies a quo) et le jour de l'échéance (dies ad quem).

Si toutefois, le dernier jour du délai est un samedi, un dimanche ou bien (en vertu des lois et règlements) un jour férié ou chômé, le délai est prolongé jusqu'à la fin du premier jour ouvrable suivant. Le délai se trouve de plus augmenté par les délais de distance, destinés à tenir compte de l'éloignement du lieu où demeure le siège de l'association et celui où siège la juridiction à saisir.

B. Les modalités d'application du délai

En règle générale, le délai commence à courir depuis le moment ou la décision querellée est portée à la connaissance des intéressés personnes physiques ou morales. Le régime de droit commun impose que la décision ait été adéquatement portée à la connaissance des requérants potentiels par une mesure officielle d'information, se traduisant par la publication, l'affichage ou la notification de la décision. Les diverses mesures d'information ne sont pas absolument interchangeables. Elles ont ce qu'on peut appeler un mode d'emploi, dont le respect conditionne le déclenchement du délai et qui dépend de la nature de la décision comme de la qualité (destinataires ou tiers) des requérants potentiels. Ainsi l'administration ne peut pas recourir à la publication d'une décision alors qu'une notification est nécessaire.

Cependant, quelle que soit la mesure d'information utilisée, elle ne peut déclencher le délai que si et dans la mesure où l'information assurée est suffisante. Plus précisément, l'information doit être suffisante à la fois quant à l'existence et quant au contenu des décisions. Toutefois, la règle de la suffisance de l'information connaît quelques tempéraments.

1) La théorie de la connaissance acquise

Quand cette théorie est mise en oeuvre, l'existence d'une information officielle des décisions est éludée. C'est une théorie qui s'applique dans le cas où une personne ou un groupement prouve par ses actes qu'il a nécessairement eu connaissance de fait des décisions qui ont provoqué le déclenchement du délai.

Cette théorie est d'origine française. Son domaine d'application fait actuellement l'objet d'une restriction importante dans la mesure où la connaissance acquise est sans conséquence quand elle se rapporte à un règlement. C'est la conséquence de la solution nouvelle selon laquelle le délai de recours n'est déclenché à l'égard des règlements que par leur publication ou affichage. Le Conseil d'Etat français consacra implicitement cette décision dans l'arrêt CE sect. 14 mai 1993, union pour la défense des radios locales privées((*)49).

2) La décision implicite de rejet

L'autorité administrative ne peut pas empêcher ou retarder excessivement la liaison du contentieux en s'abstenant de répondre expressément aux demandes dont elle est saisie.

En cas d'abstention, la règle est que son silence, au terme de quatre mois, s'assimile à une décision rejetant (implicitement) la demande, contre laquelle le recours pourra être dirigé ( V., actuellement alinéa 2 de l'article 25 de la loi 15-2000 AN du 23 mai 2000).

Cependant la formation des décisions implicites de rejet obéit à certaines conditions. Tout d'abord, pour que de telles décisions puissent se former, il faut que l'administration ait été saisie d'une demande ayant provoqué la décision. Ensuite, il importe que la décision ait été adressée à «  l'autorité compétente  ». Enfin, l'existence de la décision implicite de rejet est subordonnée à l'expiration du délai de quatre mois (sans qu'une décision implicite soit intervenue).

§II. La prorogation de délai.

Elle peut être définie comme l'interruption conservatrice du délai. Elle ne doit pas être confondue avec la simple prolongation de délai, ni avec le report à plus tard du point de départ du délai, par le fait d'une demande (justifiée) de données supplémentaires. Ainsi un délai déclenché va se trouver interrompu. Quand l'effet de la cause d'interruption aura pris fin, il courra à nouveau, pour la totalité de sa durée légale. En outre, dans les cas de force majeure ayant empêché d'agir, les impossibilités ou difficultés d'agir propres à l'intéressé peuvent être des causes de prorogations.

Trois causes de prorogation de délai seront successivement abordés

A- La prorogation provoquée par l'exercice d'un recours administratif.

La prorogation est de droit au cas ou le groupement décide de former préalablement au recours contentieux, un recours administratif gracieux ou hiérarchique. La prorogation ne joue cependant que si le recours gracieux ou hiérarchique est introduit à une époque où le recours contentieux était encore recevable. Egalement, l'effet de la prorogation ne joue qu'une seule fois. Autrement dit, plusieurs recours administratifs ne prolongent pas de manière indéfinie le délai d'action. Ainsi, la C.S.C.A dans l'affaire Zacsongo Mamadou à décidé : « Attendu que, s'il est permis d'opter initialement entre les voies gracieuses et contentieuses pour attaquer une décision administrative sous réserve d'agir dans les deux mois de sa notification ou de sa publication, il ne saurait être permis, par contre de présenter successivement plusieurs recours gracieux similaires de termes contre une seule et même décision (...) »((*)50)

B- Les cas de prorogation jurisprudentielle.

Il s'agit d'abord du recours exercé par un groupement devant une juridiction incompétente. Dès lors qu'un recours a été formé dans le délai devant une juridiction qui s'avère incompétente, le délai de recours pour excès de pouvoir est susceptible d'être prorogé à compter de la notification du jugement d'incompétence.

Le Conseil d'Etat français, en 1928, a assimilé un tel recours à un recours administratif.((*)51) Le délai sera conservé à condition que la juridiction incompétente ait été saisie avant l'expiration du délai et que la saisine ait eu le même objet que le recours ainsi exercé.

Ensuite, la prorogation peut résulter d'un cas de force majeur. Ainsi le juge burkinabé a décide dans l'arrêt Dibazin Bassolé Damasse du 11 septembre 1969 : « Attendu que Bassolé Dibazin ne s'oppose que le 11 septembre 1969 à la décision de révocation qui lui fut régulièrement notifiée le premier décembre 1967 ; qu'il fait valoir que le 20 novembre 1967 au 11 novembre 1968, il était hospitalisé ; attendu qu'il est loisible d'admettre que durant cette période, les circonstances de fait lui interdirent l'usage de recours dans les délais normaux et qu'un véritable cas de force majeure suspendit lesdits délais en sa faveur(...) »((*)52)

Cependant que se passe t-il si le requérrant n'introduit pas un recours dans les délais prévus ou dans les délais prolongés ? Il se pose alors la question des effets de l'expiration.

Section II. Les effets de l'expiration du délai.

La plus immédiate et attendue de ces conséquences est bien entendue, l'irrecevabilité de recours ou, en d'autres termes, la forclusion du requérant.

§I. L'irrecevabilité du recours.

Quand une décision n'est pas déférée au juge en temps utile, elle devient, selon l'expression jurisprudentielle, définitive (même si l'illégalité n'est pas douteuse).

Le délai expiré, l'irrecevabilité du recours est irrémédiable. Cette règle est d'interprétation large. Ainsi, après expiration des délais, le recours devient irrecevable dans ses moyens comme dans ses conclusions. Autrement dit, le requérant ne peut plus modifier sa demande, c'est-à-dire qu'il ne peut plus modifier ses conclusions ou en déposer de nouvelles. L'irrecevabilité du recours est de même étendue aux recours exercés contre les décisions confirmatives. Toute possibilité d'obtenir la censure d'une décision illégale définitive n'est cependant pas exclue, et cela notamment quand celle-ci a un caractère réglementaire. Tout intéressé est en droit d'obtenir de l'administration l'abrogation des règlements illégaux ab initio ou par suite d'un changement des circonstances de droit ou de fait. En cas de refus, il est en droit de se pouvoir devant la juridiction administrative. L'annulation du refus imposera à l'administration de satisfaire à la demande dont elle avait été saisie((*)53). Le requérant peut aussi intenter un recours de plein contentieux aux fins d'obtenir la réparation du préjudice à lui causé par une mesure administrative illégale non attaquée à temps sur la base du caractère fautif de cette mesure((*)54).

Si possibilité est donnée au requérant personne physique ou morale, après expiration du délai de deux mois, de pouvoir dans certaines hypothèses rattraper l'action corporative, il faut cependant mentionner que ces hypothèses constituent « les dernières chances » de celui-ci. En ce moment la menace de perdre toute possibilité d'action est imminente.

§ II : L'extinction de l'action

L'instance prend normalement fin lors d'un prononcé du jugement. Cela suppose que l'action corporative à l'instar des autres ait été reçue et que la procédure contentieuse administrative ait suivi son déroulement normal jusqu'au verdict final. Seulement lorsque l'action corporative n'a pas été exercée dans les délais requis, elle est par conséquent, frappée d'irrecevabilité sans qu'aucune possibilité ne soit ouverte au requérant (corporation, association ou syndicat) de se pouvoir autrement. L'action est éteinte.

L'extinction de l'action a pour conséquence la perte pour le groupement du droit d'action devant le juge administratif pour la défense de ses propres intérêts moraux et matériels ou pour la défense des intérêts de ses membres pris collectivement ou individuellement (relativement au droit en cause).

Néanmoins l'association ou le syndicat conserve le droit d'action devant le juge administratif pour la défense de ses intérêts statutairement définis qui sont atteints par un acte administratif sans pour autant être frappés par la prescription. Encore faut-il que les justiciables se familiarisent avec ce type de recours pour s'en prévaloir à temps, sans risque majeur de le voir s'éteindre du fait de leur lenteur à agir devant le juge administratif.

CONCLUSION.

Au terme de cette réflexion sur l'action corporative au Burkina Faso, trois points nous paraissent essentiels. Il s'agit d'abord de l'action corporative et des libertés publiques, ensuite de l'action corporative et le contentieux administratif et, enfin de l'avenir de l'action corporative au Burkina Faso

L'action corporative est longtemps apparue comme une menace potentielle aux libertés publiques. Elle a longtemps été perçue notamment en France comme une ingérence de personnes privées dans les affaires publiques. Mais, l'action corporative va s'imposer à la puissance publique comme un moyen efficace de contrôle de l'action administrative et de ce fait comme un moyen de garantir les libertés publiques. Depuis, l'action corporative sera souhaitée voir même encouragée. Cependant avec le phénomène de foisonnement des groupements, associations et syndicats de tout genre, partout dans le monde, une crainte légitime est née dans les Etats : celle de voir leurs actions embrigadées ou prises en otage par les divers systèmes corporatifs, minimisant de ce fait leur rôle avant-gardiste de garants des libertés publiques. Désormais, chaque parcelle de la vie sociale est susceptible d'être transformée en un intérêt, objet de regroupement d'une catégorie socioprofessionnelle donnée en association, syndicat et autre.

L'action corporative en tant que symbole de la lutte de chaque corporation pour la défense de ses intérêts matériels ou moraux propres ou ceux de ses membres pris collectivement ou individuellement, est l'expression même de leur raison d'être. Cette raison d'être a pour leitmotiv la liberté dans ses composantes : libertés individuelles, libertés publiques et enfin droits sociaux et économiques.

Ainsi serait-on tenté de dire que chaque action corporative qui a obtenu gain de cause, fait un pas en avant vers une liberté publique de plus en plus grande, dans la mesure où cette liberté serait mieux comprise et aurait permis de ce fait aux corporations et à leurs membres d'en tirer tous les profits qu'ils sont en droit d'attendre.

Ce succès apparent de l'action corporative ne doit cependant pas cacher les interventions souvent arbitraires des associations dans le contentieux administratif individuel, pour prendre faits et causes au profit des individus en leur lieu et place, sans mandat de leur part. Cette tendance à empiéter sur les prérogatives individuelles est déplorable, dans la mesure où elle remet en cause les libertés individuelles et le droit de la défense, essentiel aux particuliers. Les associations n'ont pas le monopole de l'action en justice. Heureusement d'ailleurs ! Elle devrait en prendre conscience et tempérer leurs excès de zèle, au risque de constituer des obstacles sérieux à l'exercice des droits et libertés individuelles.

Avec l'apparition des droits de troisième génération (droit à l'information, à la paix, a un environnement sain ...), le développement des droits de l'homme et le phénomène de la mondialisation, l'action corporative va s'internationaliser, ouvrant ainsi la possibilité pour les associations et syndicats de saisir les cours et tribunaux institués dans le cadre d'institutions à vocation économique, politique ou sociale, internationale, régionale ou sous régionales. En d'autres termes, c'est la défense des libertés publiques à l'échelle planétaire.

Le contentieux administratif à travers le recours pour excès de pouvoir et le recours de plein contentieux rend à l'action corporative toute sa noblesse et cela, à un double niveau.

Premièrement, le contentieux administratif permet, à travers le contentieux de l'excès de pouvoir, de faire un procès à un acte. C'est un contentieux qui a pour objet la sauvegarde de la légalité. De même à travers le plein contentieux, le contentieux administratif permet de mettre en cause la responsabilité de la puissance publique à travers les actes que celle-ci pose, mais surtout d'obtenir la réparation de préjudices incombant à cette dernière.

Deuxièmement, l'action corporative n'est pas à elle seule, l'unique type d'action capable de provoquer un contentieux administratif. Seulement, les interférences quasi continuelles entre les intérêts corporatifs et l'intérêt général d'une part et le soutien d'une telle initiative à la fois par plusieurs adhérents (et les sympathisants éventuellement ) d'autre part, donnent à l'action corporative un éclat assez singulier qui surpasse toute autre forme d'action devant le juge administratif, à travers bien entendu, le contentieux de l'administration. Elle n'en pourrait que mieux se porter.

L'action corporative au Burkina Faso est très souvent liée à l'action des syndicats devant le juge administratif burkinabé qu'à celle des associations ou autres groupements de personnes. Cela vient du fait que les syndicats sont apparus très tôt dans le champ social et ont très vite pris conscience de la préciosité de l'action corporative comme forme d'action par excellence pour défendre leurs intérêts moraux et matériels et, ainsi garantir leur indépendance vis-à-vis de l'administration. Ainsi, l'action corporative a longtemps et majoritairement été exercée par les syndicats jusqu'à une période récente. Dès lors il y a eu des périodes de notre histoire ou elle a semblé se raréfier. Cela est du au fait que durant la période révolutionnaire la liberté d'association n'existait quasiment pas.

Aujourd'hui, l'action corporative n'est plus l'apanage des seuls syndicats ; tous les groupements se sont appropriés cette action. Il reste maintenant à souhaiter qu'il en fasse un bon usage. Un effort remarquable est entrain d'être accompli par le gouvernement burkinabé dans le sens de fournir à tous les justiciables les mêmes chances d'avoir accès aux tribunaux et de se voir rendre une justice de qualité ; toute chose qui est de nature à favoriser l'action corporative.

Avec les multiples remises en question de la justice au Burkina ces dernières années, force est de constaté que les citoyens s'intéressent encore plus à l'institution, commencent à comprendre ses mécanismes et prennent conscience de la nécessité dans une société résolument tournée vers la modernité, de la préciosité d'un tel instrument pour faire valoir leurs droits. Aussi pourrions affirmer sans hésitation que l'action corporative est promise à un bel avenir au Burkina, à condition que ses principaux animateurs fassent les leurs les questions de son efficacité.

ANNEXE

CSCA, 30 novembre 2001, syndicat autonome des magistrats du Burkina. arrêt n° 13/2001-2002. inédit

CSCA, 30 novembre 2001. Association Delwende à Ouagadougou. Arrêt n°012/2001- 2002. Inédit

CSCA, 30 juillet 1999. Ligue pour la Défense de la Liberté de la Presse (LDLP), arrêt n°26/98 - 99. Inédit

BIBLIOGRAPHIE.

I-OUVRAGES GENERAUX

Bado Laurent : Le contentieux administratif. Ouagadougou, ENAM, 1996. cours polycopié.

Chapus Réné : droit administratif général tome1. 9°éd., Montchrestien, 1995.

Chapus Réné : droit du contentieux administratif. 5 éd., Montchrestien, 1996

Carbonier J.: Droit civil, les obligations. Paris, PUF, 1985.

Mescheriakoff Alain -Serge : le droit des associations. Paris, PUF, 1996.

Roger-Gérard Schwartzenberg: sociologie politique. 5e éd., Paris, Montchrestien 1998.

II-LES ARTICLES ET NOTE JURISPRUDENCE

DOCTRINE

Martin R et J : L'action collective. JCP, 1984. I.3162

NOTE DE JURISPRUDENCE

-Commissaire du gouvernement Romieu : conclusion sur l'arrêt Syndicat des patrons coiffeurs de Limoges, RDP, 1907.p. 25

-Yarga Larba : Note sous l'arrêt Zacsongo, CS Haute Volta, RVD n°5 1984. p.55

DECISIONS

-CE 16 avril 1947, Fédération des Chevaliers de France, Franco-Russe Rousskry-dom.Rec, p.202

-CE Sect. 4 juin 1954, Ecole nationale d'Administration, Rec.338.concl. Chardeau

-CE 28 décembre 1906, syndicat des patrons coiffeurs de limoge, Rec. 977

-CE 8 février 1989, "comite de défense du chemin de Ronde de damgan" DP, 1989, p. 1486

-CE Ass. 17 juillet 1978, Synd. des Avocats de France et Essaka AJ 1978, p.28,chron. Dutheill, de Lamothe et Y.Robineau

-CE 16 octobre 1985, RTD com.1986, p. 265

-CE Ass.20 dec. 1985, SCI Champs-Elysées-la Boetie, RFDA 1986, p .282, concl., M-A-Latournerie

-CE Sect 15 juillet 1957, Ville de Royant, RDP 1958, p. 109, concl. C. Lasry

-CE Sect 22 nov. 1985, Quillevère, D., 1986, p. 71, note J.J thouroude

CE 26 juin 1989, Fédé.des Synd. Généraux de l'Education Nationale, AJ 1989, p. 725

-CE 3 déc. 1952, Dubois, D. 1953

-CE Ass 6 oct. 1992, Gerbaud, D. 1992, p. 342

-CE Ass 6 oct. 1978, Assoc. du quartier « La corvée la roche de fées », DA 1978, n°321

-CE 1° fév. 1989, Diloy, RDP 1989, p. 1488

-CE 31 oct 1986, Fédération. Nationale. des Synd. Libres des PTT, AJ 1987, p. 49

-CE 15 juillet 1964, Sieur Durant, Rec, p. 434

-CE 25 mars 1928, Reynand, Sirey 1928. 3. 81, note Monsieur Hauriou

-C.Civ. 1°, 13 fév.1979, D.1981, p. 205

-C.Civ 14 janvier 1972, OVSL c/ entreprise Jean Lefèvre, bulletin des arrêts de la CS, arrêt n°17

-C.Crim. 22 nov. 1973, D 1973, p.170

-CSCA 30 novembre 2001, Syndicat autonome des magistrats du burkinabé, arrêt n° 13/2001-2002, inédit

-CSCA 30 novembre 2001, Association Delwende à Ouagadougou, arrêt n°012/2001- 2002, inédit

-CSCA 30 juillet 1999, Ligue pour la Défense de la Liberté de la Presse LDLP, Arrêt n°26/98 - 99, inédit

-CSCA 13 déc.1995, SNEAB C/Etat burkinabé, arrêt n°014 /95, inédit

-CSCA 22 novembre 1968, SNEAHV, bulletin des arrêts de la CS, arrêt n°19

-CSCA 24 décembre 1971, Kouldiaty Lucien, bulletin des arrêts de la CS, arrêt n°36

-CSCA 20 mai 1991, militants du SINTRAGMIH c/ SOREMIB, zombré L., Sy A. in recueil de jurisprudence DT (1990-1995), Arrêt n°35. 1991, p. 21-23

-TT 14 avril 1994, zombré L., Sy A. bulletin des arrêts du tribunal de travail, jugement n°21

III-MEMOIRES

Coulibaly A.S. : La liberté d'association en Haute Volta, Mémoire de maîtrise DP, FDSP, Ouaga 1986.

Yameogo A. : Le recours pour excès de pouvoir au BF. Mémoire de maîtrise DP, FDSP, Ouaga 1986

IV-LEGISLATION

Loi n°10/92 /ADP du 15 décembre 1992 portant liberté d'association,Lois-résolutions,ADP, 1992, p198-213

Loi n°21/95/ADP du 16 mai 1995 portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux administratif, Codes et lois du BF,Tome V,p139 s

-Loi n°15-2000- AN du 23 mai 2000 portant, organisation, attribution, fonctionnement du conseil d'Etat et procédure applicable devant lui, Codes et lois du BF,Tome V,p182 s

* (1) Salomon : troisième roi des Hébreux (V.970-931 av. J.C) fils et successeur de David.

* (2) Ecclésiaste : mot grec qui désigne le président ou l'orateur.

* (3) Loi n°10/92/ADP portant liberté d'association, Recueil, Lois - Résolutions, ADP, p.198 - 213

* (4)) L'action associationnelle se présente sous deux aspects : ou bien l'association représente purement et simplement les individus qu'elle groupe et les actions individuelles sont délégués à la personne morale qui les prend en charge ; ou bien cette personne morale exerce une action propre, qui se rapproche de celle de l'Etat.

* (5) La « class action » peut être définie abruptement comme « le doit pour un membre d'un groupe de personne de poursuivre pour tous, sans le consentement de chacun »

* (6)) La « class action » est née aux Etats Unis d'Amérique. Elle est traduite par action de groupe.

(7) Lorsque plusieurs personnes ont le même intérêt dans une procédure, la procédure peut être engagée et, sauf ordre contraire de la cour, être poursuivie par ou contre l'une ou plusieurs d'entre elles en tant que représentant toutes ces personnes ou en tant que les représentant toutes à exception de l'une d'entre elle ou plus.

* (8) J. Carbonier., Droit civil, les obligations, E.4, PUF, 1985, p.45

* (9) cf art. 1 loi n°10/92/ADP portant liberté d'association. Cette loi cite les domaines faisant l'objet de contrats d'association. Ces domaines ne sont pas limitatifs.

* (10) cf art. 6, 1131, 1133 du c.civ .

* (11) cf art. 47, al. 2, loi n°10/92/ADP portant liberté d'association.

* (12) Pour les manifestations sur la voie publique, l'association a besoin d'une autorisation préalable de l'autorité compétente

* (13) V. Crim, 22 novembre 1973, D., 1974,p.170

* (14) C.E, 13 octobre 1969, synd. Défense des canaux de la Durance, AJ 1970, P. 469.

* (15) C.E, 16 avril 1947 fédération des chevaliers de France, Franco-Russe Roussky-dom. Rec, p.202

* (16) C'est-à-dire, qu'il importe peu que l'annulation demandée ne soit en rien de nature à procurer au requerrant des satisfactions d'ordre patrimonial ou <<matériel>>.

* (17) L'intérêt peut être celui d'une personne physique. Il peut aussi l'intérêt d'une personne morale privée en tant que personne ayant des intérêts propres, ces groupements sont, comme le seraient des personnes physiques, recevables à se pourvoir contre les mesures affectant leur existence, leur patrimoine ou les conditions de leur fonctionnement ou leur activité.

* (18) ces thèmes sont variés. Il peut s'agir de la défense de la « libre entreprise », de la « liberté de la presse », de la « propriété familiale »

* (19) cf CE 28 décembre 1906, synd. des patrons coiffeurs de Limoges, P.977, concl. Romieu, S 1907. 3.23, concl.

* (20) V. civ. 1ier mai 1990, Bull. civ., I, n°102

* (21) V civ.14 janvier 1972. O.V.S.L C/entreprise Jean Lefèvre, bulletin des arrêts de la CS, arrêt n°17

* (22) V. CE sect. 4 juin 1954, Ecole nationale d'administration, Rec. 338, concl. Chardeau

* (23) Action que l'individu peut exercer sans se prévaloir d'un intérêt propre.

* (24) C.A.C.S, 30 juillet 1999 LDLP/CSI précité.

* (25) La question de l'intérêt est d'ordre public parce qu'elle est une condition de recevabilité de l'action en justice

* (26) CE ,Ass. 7 juillet 1978, Synd. des avocats de France et ESSAKA, AJ 1979 p. 28 , chron . O. Dutheillet de Lamothe et Y. Robineau

* (27) cf. C.S. C.A. 02/10/1997, Association DELWENDE à Ouagadougou C/ Etat burkinabé, Arrêt n°012/2001-2002

* (28) cf R&J Martin. L'Action collective. JCP. 1984. I. 3162

* (29) Voir cour d'appel de Ouagadougou, chambre civile et commerciale, 20 mai 1991 ; SINTRAGMIH c/SOREMIB, Zombré L, Sy A bulletin des arrêts en droit du travail. Arrêt n°35

* (30) Voir tribunal du travail de Bobo-Dioulasso, 14, avril 1994 CGTB C/SAP, Zombré L, Sy A Bulletin des Arrêts en droit du travail,. ,Arrêt n°21

* (31) C.S.C.J., formation civile, 14 janvier 1972 l'O.V.S.L C/ Entreprise Jean Lefèvre, bulletin des arrêts de la C.S, arrêt n°2

* (32) C.S.C.A, 22 novembre 1968, SNEAHV C/république de Haute Volta, bulletin des arrêts de la CS, Arrêt n°19

* (33) Voir, TGI, 1juin 1979, JCP, 1981. IV.230

* (34) Voir Arrêt N°026/98-99 du 30 juillet 1999 précité

* (35) Voir, C.E., 8 février 1989, comité de défense du chemin de Ronde de Damgan, DP, 1989, p.1486.

* (36) Voir C.Civ.1re , 13 février 1979, D., 1981.J.205

* (37) C.S.C.A. 30 juillet 1999 LDLP, Arrêt n°26/98-99, précité.

* (38) V., CE. Sect. 15 juillet 1957, ville de royan, RDP 1958, p.109, conclusion C. Lasry

* (39) V., CE Ass. 20 décembre 1985, SCI champs-Elysées-la-Boétie, RFDA 1986, p.282, conclusion , M-A Latournerie.

* (40) V. CE, sect. 22 novembre 1985, Quillevère, D. 1986, p.71, Note Jean Jacques Thouroude

* (41) Un moyen est d'ordre public lorsqu'il est tiré de la compétences des juridictions administratives et de la procédure applicable devant elle.

* (42) cf 12 de la loi n°21 /95 / A.D.P portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs

* (43) cf art.20 al.4 loi 15-2000 AN du 13 mai 2000 portant composition, attributions fonctionnement du conseil d'Etat et procédure applicable devant lui.

* (44) cf. arrêt n°01/2001-2002 du 30 novembre 2001 précité.

* (45) CE, 6 novembre 1968, Abelanet ,p.541 ;3 juillet 1991, Desault ,p.541

* (46) V. R. Chapus, Droit Administratif Général, T1, 9 éd, montchretien, 1995

* (47)V.C.A.C.S, 28 avril 1972, Sawadogo André ; 8 novembre 1968 Kaboré Josué extrait de minutes SGCS.

* (48) cf. Laurent Bado, Le contentieux Administratif, Ouagadougou, E.N.A.M, 1996, p.31. cours polycopié.

* (49) V.CE Sect.14 mai 1993,union pour la défense locale des radions privées,p.155,JCP 1993,n° 22122

* (50) C.A.C.S, 13 décembre 1968, Zacsongo Mamadou, Bull. CS 1er semestre 1976, p.42

* (51) V .CE, 25 mars 1928, Reynaud, Sirey 1928.3.81 ,note Monsieur Hauriou.

* (52) L. Bado : «  contentieux administratif » ENAM 1996 p.39 cours polycopié.

* (53) V. CE, 26 juin 1989, fédération. des synd., gén. de l'éducation nationale, AJ 1989, p. 725

* (54) V. CE, 3 décembre 1952, Dubois, D. 1953.






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