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La révision constitutionnelle en droit positif congolais et français. Analyse comparative des procédures et limites à  la révision

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par Hervé KIDIA KUBATAKANA
Université de Kinshasa - Licence 2011
  

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C.les limites à la révision constitutionnelle

Le constituant originaire exclut de toute révision certaines dispositions constitutionnelles avec souvent comme objectif final de protéger les bases fondamentales du système Etatique39(*) et également pour pallier à tout abus pouvant subvenir à la suite d'une révision constitutionnelle tel que la fraude à la constitution, que DEBBASCH défini comme : « le procédé par lequel l'autorité de révision utilise ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés, c'est-à-dire dans le but d'établir un régime fondamentalement différent 40(*)»

La doctrine distingue généralement deux types de limites à la révision constitutionnelle : les limites matérielles ainsi que des limites temporelles

C1.les limites matérielles

Les limites matérielles sont celles qui sont relatives à l'objet ou aux matières ne pouvant subir une révision constitutionnelle.

Parmi ces dernières, nous pouvons mentionner l'interdiction de réviser la forme républicaine du gouvernement.et ici, il faudra citer la France qui, depuis la loi du 14 aout 1884, toutes les constitutions qui se sont succédées ont toujours eu à consacrer cette interdiction. C'est aussi le cas des constitutions italienne, portugaise et turque.

Certaines constitutions monarchiques déclarent intangible la forme monarchique de l'Etat. C'est ici le cas des constitutions koweitienne et marocaine.

Il y a également de ces constitutions qui interdisent dans le cadre des limites matérielles, la structure fédérale de l'Etat, le caractère unitaire de l'Etat, l'interdiction de réviser les fondements idéologiques de l'Etat, les dispositions relatives aux droits de l'homme, l'intégrité du territoire.

Il sied de noter que ces limites matérielles susmentionnées sont les principales que l'on rencontre dans bon nombre des constitutions. Cependant il faut signaler comme opine Kemal GOZLER, qu'il est presque impossible de faire une liste exhaustive des limites matérielles à la révision constitutionnelle.car, ces limites sont parfois formulées très largement.tel est le cas de la constitution portugaise qui prévoit 18 limites matérielles à la révision constitutionnelle41(*).

. Les limites temporelles

Les limites temporelles à la révision constitutionnelle sont celles liées au temps pendant lequel la constitution ne peut être révisée.

Ces limites apparaissent souvent de deux façons : la constitution peut interdire sa révision avant l'écoulement d'un certain délai à partir de sa mise en vigueur. Ou bien encore elle peut exclure sa révision dans certaines circonstances42(*).

Pour ce qui est de l'interdiction avant l'écoulement d'un certain délai, ici la question de la révision constitutionnelle ne peut être posée qu'après un certain temps après sa mise en vigueur. Donc, après un certain délai.

La constitution peut donc ici interdire sa révision jusqu'à une date précise, soit elle détermine un délai à partir de son entrée en vigueur.

A titre D'exemple, nous pouvons citer le cas de la constitution française de 1791.à ce sujet, Kemal GOZLER nous renseigne que cette constitution interdisait toute proposition de révision aux deux premières législatures, c'est-à-dire pendant quatre ans.de même la constitution de Paraguay de 1967 interdit sa révision totale avant l'écoulement de dix ans, et sa révision partielle avant cinq ans à partir de sa promulgation(artice 219).

Il faut signaler aussi que certaines constitutions prévoient un laps de temps après la dernière révision. C'est le cas de la constitution portugaise de 1976 qui précise en son article 284 al.1 que l'Assemblée de la République peut réviser la constitution cinq après la date de la publication de la dernière loi de révision constitutionnelle. C'est également le cas de la constitution grecque de 1975(article110.al.6)43(*).

Une autre forme de limitation du pouvoir de révision constitutionnelle dans le temps consiste à prévoir deux délibérations successives séparées par un intervalle de temps pour l'adoption des lois constitutionnelles. C'est par exemple le cas de la constitution italienne de 1947(article 138 al.1) et de la constitution française de 1946(article 90)44(*).

De choeur avec Georges BURDEAU, nous pouvons avancer que l'objet de limites de la révision constitutionnelle dans le temps est de permettre à la nouvelle constitution de se consolider45(*).

Quant à la deuxième hypothèse qui consiste à interdire la révision constitutionnelle dans certaines circonstances, nous dirons ensemble avec DEBBASCH que cette limitation a donc pour but d'éviter toute révision constitutionnelle sous la pression des événements46(*).

C'est justement partant de cette optique que des constitutions interdisent toute révision constitutionnelle notamment lorsqu'elle porte atteinte à l'intégrité du territoire, pendant la période de régence pour les constitutions monarchiques, pendant l'intérim de la présidence de la république, pendant l'état de siège, l'état d'urgence, l'état d'exception ou en temps de guerre47(*).

Les limites à la révision constitutionnelle que nous venons d'examiner ci-haut, sont des limites inscrites dans les textes constitutionnels. Mais faudra t-il encore ajouter qu'il y a certaines limites à la révision constitutionnelle qui sont extra-constitutionnelle, donc non inscrites dans la constitution.la doctrine dans sa quasi-unanimité désigne ces dernières de limites supra-constitutionnelles.

Opinant quant à ce, Serge ARNE appréhende la supra-constitutionnalité comme : « la supériorité de certaines règles ou principes qualifiés normes sur le contenu de la constitution48(*) »

De son coté, Robert BADINTER ajoute à ce sujet que : « la supra-constitutionnalité réside dans la proclamation par le constituant ou le juge constitutionnel, qu'il existe dans la hiérarchie des normes, des valeurs supérieures à l'ordre constitutionnel existant »

Les principes supra-constitutionnels que les positivistes nient toute existence parce que manquant un fondement positif ou textuel, ne sont donc pas susceptibles d'être révisés par le pouvoir de révision constitutionnelle. Ainsi, ils constituent des limites matérielles à la révision constitutionnelle.

Parmi les principes supra-constitutionnels, serge ARNE mentionne entre autre le respect de la dignité de la personne humaine, la non discrimination et la solidarité ainsi que le pluralisme49(*).Stéphane RIALS par contre se fonde sur l'article 16 de la déclaration des droit de l'homme et du peuple de 1789 pour énumérer les principes supra-constitutionnels.il mentionne donc comme principes supra-constitutionnels :l'existence d'une constitution écrite, la nation est seule titulaire du pouvoir suprême et par voie de conséquence constituante, le principe de la séparation des pouvoirs ainsi que la supériorité des droits fondamentaux sur la volonté du constituant50(*).

A la suite de Kemal GOZLER, nous pouvons dire qu'il est pratiquement impossible d'établir une liste exhaustive des limites supra-constitutionnelles. Pour la bonne et simple raison qu'elles sont des fruits des réflexions doctrinales.et donc chaque doctrinaire l'appréhende d'âpres ses cogitations.

Apres avoir examiné des limites à la révision constitutionnelles, il se pose alors la question de leur validité juridique. Est-ce que ces limites contiennent-elles une valeur juridique ?si oui, est-ce qu'elles ont aussi des sanctions ?

D.valeur juridique des limites à la révision constitutionnelle

D'entrée de jeu, devons-nous dire que cette question de la valeur juridique des limites à la révision constitutionnelle, fait l'objet d'un débat doctrinal.les uns estiment que ces limites n'ont aucune valeur juridique.et pour justifier leur position, ils avancent entre autre comme argumentaire qu'une génération ne peut lier une génération future51(*),le pouvoir constituant d'aujourd'hui ne peut lier le pouvoir constituant de l'avenir52(*),la valeur juridique de ces limites est l'illégitimité de mettre des entraves à l'exercice de la souveraineté du peuple, la constitution est une loi et, par nature, une loi est perpétuellement révisable, la possibilité pour le pouvoir de révision constitutionnelle de surmonter ces limites par les révisions successives, c'est-à-dire en abrogeant d'abord la norme consacrant la limite et en suite en révisant la norme dont la révision est interdite.

D'une voix identique avec Kemal GOZLER, nous n'acquiesçons pas la position de cette doctrine.et cela pour la simple raison que cette dernière nie toute existence d'un quelconque pouvoir de révision constitutionnelle. Pour eux, l'autorité de révisons constitutionnelle reste et demeure le constituant originaire. Or, à ce que nous sachions, le constituant originaire en réglant la question de la révision constitutionnelle, crée un pouvoir de révision constitutionnelle et qu'ainsi elles prévoient des limites à son exercice53(*).

L'autre frange de la doctrine à la quelle nous appartenons, avance par contre que ces limites à la révision constitutionnelle ont réellement une valeur juridique.et cela s'explique par le fait qu'en premier lieu les dispositions constitutionnelles qui consacrent ces limites, ont pour objet d'assurer la permanence du régime, ainsi que de protéger l'ordre de l'Etat contre un mouvement révolutionnaire qui, sans déchainement de violence, suivrait les règles prévues pour la révision de la constitution, mais bouleverserait l'ordonnancement constitutionnel fondamental54(*).et en second lieu, ces limites sont prévues par la constitution, et le pouvoir de révision constitutionnelle, étant un pouvoir organisé par la constitution, doit nécessairement les respecter.

C'est ainsi qu'opinant quant à ce, Maurice DUVERGER avance que juridiquement, les limites à la révision constitutionnelle s'imposent à l'organe de révision puisqu'il tient son pouvoir de la constitution, il doit la respecter55(*).

Mais il faudra encore signaler que même les partisans qui soutiennent la thèse de la valeur juridique des limites à la révision constitutionnelle, ont du mal à trouver une sanction en cas de transgression de celles-ci. C'est peut être ici que réside l'inefficacité et la faiblesse de ces limites !

C'est ainsi que Pierre PACTET avance à ce sujet : « en revanche, on est obligé d'admettre que si ces interdictions sont transgressées, il n y a pratiquement pas aucune sanction possible »

C'est la raison qui nous pousse, à la suite d'autres auteurs, de proposer entre autre comme sanction, un contrôle de la constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle par la cour constitutionnelle. Cette solution parait à notre point de vue un moyen par excellence contre les éventuels abus pouvant subvenir lors d'une révision constitutionnelle, et le juge constitutionnel devient donc ici comme l'avance WANDJI, un rempart incontournable56(*), un contrepouvoir nécessaire pour éviter le despotisme57(*). À Jacques CHEVALIER de renchérir : « le rôle politique de la juridiction constitutionnelle apparait en pleine lumière en période des fortes tensions »58(*).

Là nous venons d'examiner de fond en comble les hypothèses des constitutions qui prévoient elles-mêmes leurs procédures de révision. Mais lorsque la constitution est caractérisée par un mutisme au sujet de sa procédure de révision, comment alors réviser une telle constitution ? Quelle est donc la solution à adopter face à une telle situation ?

* 39 KEMAL GOZLER, le pouvoir de révision constitutionnelle, Villeneuve d'asq, Presse Universitaire du septentrion, 1997, p.8

* 40 DEBBASCH, Droit constitutionnel, Paris, Seuil, 1998, p.111

* 41 KEMAL GOZLER,op.cit.,p.10

* 42 Idem

* 43 GEORGES BURDEAU, op.cit. p.11.

* 44 KEMAL GOZLER, op.cit.,p.11

* 45 GEORGES BURDEAU, Droit constitutionnel, 21 eme édition par Francis Hamon et Michel troper, paris, LGDJ., 1988, p.81

* 46 DEBBASCH, op.cit., p.92

* 47 Lire avec intérêt KEMAL GOZLER, op.cit., p.47

* 48 SERGE ARNE « existe -t-il des normes supra-constitutionnelles ?contribution à l'étude des droits fondamentaux et de la constitutionnalité »in revue de droit public, 1993, p.474 in KEMAL GOZLER, op.cit., p.8.

* 49 SERGE ARNE, op.cit., pp.474-475

* 50 STEPHANE RIALS, « supra-constitutionnalité et systématicité du droit », archives de philosophie du droit, 1986, p.64 in KEMAL GOZLER, op.cit., p.10

* 51 LAFFERIERE,op.cit.,p.288

* 52 GEORGES VEDEL,op.cit.,p.117

* 53 KEMAL GOZLER,op.cit.,p.8

* 54 Idem, p.17

* 55 MAURICE DUVERGER, Manuel de Droit Constitutionnel et de Science Politique, paris, P.U.F., 5ieme édition, 1948, p.195

* 56 K.WANDJI, « le contrôle de la constitutionnalité au Cameroun et le modèle africain francophone de justice constitutionnelle »in revue juridique et politique, 2007, numéro 4, édition jus africa 2008, p.436

* 57 MCHEL TROPER, « séparation des pouvoirs »in ANDRIANTSIMBAZOVINA, H.GAUDIN et alii, dictionnaire des droits de l'homme, PUF., 2008, p.899-901

* 58 J.CHAVALIER, Etat de droit, paris, Montchrestien, 4ieme édition, 2003, p.134

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault