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La promesse de vente de la chose d'autrui


par Florent Kuitche Takoudoum
Université de Nice sophia antipolis - Master II droit de l'immobilier et de l'urbanisme 2007
  

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§2) Condition essentielle pour qu'il y ait obligation : le vendeur doit avoir traité en connaissance de cause

Aussi la jurisprudence n'a-t-elle pas cru pouvoir considérer comme nul le contrat dans lequel une personne déclare expressément s'engager à acquérir une chose d'autrui pour la transmettre à une autre personne99(*). Pour ne pas heurter de front l'article 1599, elle déclare que ce contrat n'est pas une vente, parce qu'il ne vise pas à opérer un transfert de la propriété ; c'est un contrat innomé, créant une obligation de faire, et qui ne tombe pas sous le coup de l'article 1599. Mais cet artifice discutable de terminologie dissimule mal une nouvelle atteinte portée au principe erroné de l'article 1599. Le caractère translatif tel qu'on l'entend ici, c'est-à-dire au sens du « immédiatement translatif », n'est pas de l'essence de la vente ; il est des ventes qui ne peuvent pas être immédiatement translatives, comme la vente de choses de genre, et auquel pourtant on n'a jamais contesté la dénomination de vente.

Pour limiter la portée de cette dérogation, la jurisprudence exige que les contractants aient exprimé clairement leur intention de mettre à la charge de l'un d'eux une obligation d'acquérir la chose. Mais cette exigence conduit à une discrimination purement formelle et difficile à justifier : comme on l'a fait remarquer à juste titre, on pourrait présumer cette intention dès lors que l'opération a été faite en connaissance de cause par un vendeur et un acheteur qui savaient que la chose appartenait à autrui, car on ne conçoit pas une vente de chose d'autrui faite en connaissance de cause avec l'intention d'en faire une vente immédiatement translative de propriété100(*).

L'obligation d'acquérir la propriété de la chose est l'une de celle qui incombe normalement au vendeur d'une chose d'autrui. Pour analyser les obligations que le contrat de vente met à la charge du vendeur, il est bon de se reporter à ce qu'il y a lieu dans les systèmes juridiques comme le système allemand, où l'on a conservé la distinction entre la vente, contrat créateur d'obligation, et l'acte réel translatif de propriété. Le vendeur s'oblige à procurer à l'acheteur d'une part la possession, le pouvoir de fait sur la chose, par la livraison, et d'autre part le droit de propriété sur la chose. L'obligation de rendre l'acheteur propriétaire- obligation de «  daré » au sens technique - peut se décomposer elle-même en deux éléments : l'obligation d'accomplir l'acte réel spécial, translatif de propriété, et d'autre part, l'obligation de réunir les conditions nécessaires pour que cet acte soit efficace. Ces deux conditions, acte de transfert et condition d'efficacité, sont parfaitement distinctes puisque l'un peut exister sans l'autre, mais ils doivent se trouver réunies pour parvenir au résultat de rendre l'acheteur propriétaire.

Lorsque l'on passe dans un système comme le nôtre et le système italien, où la vente devient à la fois acte obligatoire et acte réel, où la propriété se trouve transférée par le seul consentement, sans qu'il soit besoin de la tradition ou d'un autre acte spécial de transfert, l'obligation de livrer demeure inchangée ; mais que devient l'obligation de rendre l'acquéreur propriétaire ? Dans l'hypothèse normale, celle de la vente d'une chose déterminée, déjà existante et appartenant au vendeur, lorsque toutes les conditions du transfert de propriété se trouvent réunies, la vente ne peut créer pour le vendeur une obligation de rendre l'acquéreur propriétaire, parce qu'une telle obligation est sans objet : par le fait même du contrat, l'acheteur devient immédiatement propriétaire101(*). Mais toutes les fois que pour quelques raisons que ce soit, le transfert ne peut s'effectuer immédiatement, l'obligation de rendre l'acheteur propriétaire retrouve son objet ; le vendeur doit faire tout ce qui est nécessaire pour que le transfert de propriété à l'acheteur, qui n'est pas encore réalisé, puisse se réaliser. Il ne s'agit pas d'accomplir un acte spécial de transfert, qui n'existe pas dans notre droit ; la vente en tient la place, et nous la supposons déjà conclue. Il s'agit d'écarter l'obstacle qui s'oppose à son efficacité réelle, de remplir la condition qui fait défaut.

Il en est ainsi certainement quand une personne vend une chose de genre qu'elle n'a pas. On a toujours admis qu'une vente de chose de genre ne tombe pas sous le coup de l'article 1599. Elle est donc valable, et elle met certainement à la charge du vendeur l'obligation d'acquérir la chose qu'il a vendu ; Il en est de même dans tous les cas où la vente ne transfert pas immédiatement la propriété ; il doit en être de même lorsqu'il s'agit d'une chose déterminée appartenant à autrui. L'obstacle au transfert de propriété est le défaut de propriété chez le vendeur ; celui-ci est tenu de lever l'obstacle en acquérant la chose.

Ce n'est d'ailleurs pas là une vue purement théorique, même dans notre droit. Non seulement la jurisprudence admet la pleine validité du contrat créant nécessairement une telle obligation, mais même lorsque le contrat est rédigé comme une vente, le système de la nullité relative admis par la jurisprudence permet d'arriver à un résultat voisin. Tant que l'acheteur n'invoque pas la nullité, la vente produit ses effets comme si elle était valable ; l'acheteur pourra se prévaloir contre le vendeur, sans que celui-ci puisse exciper de la nullité de cette obligation qui lui incombe d'acquérir la chose. Ici encore, le système de la jurisprudence permet de rejoindre à peu près, les solutions que nous dictent la logique.

Une condition, toutefois, apparaît nécessaire pour que l'auteur d'un acte sur la chose d'autrui soit tenu de l'obligation de l'acquérir : il faut qu'il l'ait assumé volontairement, et pour cela, il faut qu'il ait traité sur la chose d'autrui en connaissance de cause. S'il croyait que la chose d'autrui lui appartenait, cette erreur ne fait pas obstacle à l'efficacité de l'acte au cas où il acquerrait par la suite la propriété, car alors se trouveraient réalisées les conditions en vue desquelles il a contracté. Mais elle s'oppose à ce qu'il soit tenu de l'obligation d'acquérir la chose ; il ne s'agit pas là d'une nullité pour erreur102(*) ; il s'agit seulement d'apprécier l'étendue exacte des obligations par lui assumées. Cette condition se trouve écartée en ce qui concerne la vente par les règles particulières de la garantie qui imposent la même obligation au vendeur de bonne foi.

Mais que se passerait-il si le promettant n'exécute pas cette obligation d'acquérir pour transmettre ?

* 99. Civ. ; 8 janvier 1866, d. 1866 ; 1. 99 ; Paris, 25 août 1845, D. 1845.

* 100. Gaudemet, obligation, p. 108.

* 101. On a souvent considéré dans ce cas le transfert de propriété comme l'exécution immédiate d'une obligation du vendeur (v. notamment gaudemet, obligations, p ; 103-104). Mais cette idée d'une obligation qui naîtrait et s'eteindrait au même moment est bien artificielle et difficile à admettre. Il n'y a pas lieu à obligation de transférer parce qu'il y a transfert immédiat. CF. Carriota-Ferrara, op. Cit. ; n° 115.

* 102. Cette idée de nullité pour erreur a été invoqué pour expliquer l'article 1599 : Josse rand, t. II, n° 1043 et 1045.

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