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Etude comparée de la réglementation de l'arbitrage international dans l'OHADA et en Suisse

( Télécharger le fichier original )
par CASSIUS Jean
Université de Genève - DEA Droit de l'arbitrage international 2007
  

Disponible en mode multipage

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DIPLOME D'ETUDES APPROFONDIES

2006-2007

DROIT INTERNATIONAL PRIVE

DROIT DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL

ETUDE COMPAREE DE LA REGLEMENTATION DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL DANS L'OHADA ET EN SUISSE

Présentation Directrice

M. Cassius Jean SOSSOU Mme Gabrielle KAUFMANN- KOHLER

Juré

M. Andreas BUCHER

Octobre 2007

REMERCIEMENTS

Tout d'abord, j'aimerais tout particulièrement remercier l'autorité morale que représente l'État, le canton et la ville de Genève, où j'ai trouvé l'hospitalité et les conditions nécessaires pour poursuivre le chemin que, je me suis tracé dans la perspective de mon accomplissement personnel.

Je ne saurais passer outre la faculté de droit et à travers elle, ses autorités, pour la facilitation des renseignements et informations nécessaires à l'achèvement de ce travail.

Un grand merci à Madame Gabrielle KAUFMANN- KOHLER, prof. A la faculté de droit qui a accepté ma candidature et a mis à ma disposition les outils bibliographiques de base, nécessaires à la compréhension et à l'approfondissement de mes connaissances en droit de l'arbitrage international. Je vous sais gré de votre collaboration, aide et soutien sans lesquels ce travail n'aboutirait certainement pas. Qu'il me soit permis de vous dire, Mme Gabrielle Kaufmann-kohler, toute ma gratitude.

Merci à Monsieur Andreas BUCHER pour avoir accepté d'être le juré de ce travail.

Enfin, je ne saurais passer sous silence les nombreux amis (es), qui de près ou de loin, m'ont apporté leur soutien de quelque manière que ce soit. Notamment Noël EKANMIAN RUCHTI. Que tous vous retrouviez ici l'expression de ma sincère gratitude.

Cassius Jean SOSSOU

DEDICACE

Philomène BABAGBETO ma défunte mère, Priscard SOSSOU ma jeune soeur, à titre posthume je vous dédicace toutes deux ce mémoire.

À Chancelle Hermione SOSSOU, jamais deux sans trois, dit l'adage...voilà le troisième. Qu'il te serve d'exemple pour ta réussite personnelle. Saches que, rien de grand ne s'accouche sans douleur et que le succès c'est la somme des efforts répétés. Une fois de plus, j'aimerais te demander de trouver dans ce travail, l'expression de mon effort pour arriver à te donner un bon exemple de réussite intellectuelle et sociale. Bon vent et longue vie à toi, ma fille.

Á mon père Adélaïd SOSSOU, mes frères Patrick et Abdon SOSSOU, mes soeurs Espérance et Ghislaine SOSSOU, bref à ma famille toute entière je vous dis merci pour votre soutien et daignez accepter que je vous dédicace ce mémoire. Je ne décevrai pas cet espoir que vous portez en moi.

Enfin, Isabelle ROHRBACH en sus des remerciements que je te formule, daigne accepter que je te dédicace ce travail pour tout ce que cela représente pour toi et pour moi.

Merci à tous pour votre soutien.

Cassius Jean SOSSOU

INTRODUCTION

La mise en place d'un "cercle vertueux de développement" passe par la promotion des capitaux privés. Il est évident, de ce fait, qu'aucun développement économique ne peut aujourd'hui s'amorcer durablement dans un espace géographique donné, sans la promotion de l'investissement privé. Celui-ci constituant le piédestal de tout processus de développement économique. Force est cependant de constater que, le continent africain n'a visiblement jamais intéressé les investisseurs étrangers qui, l'ont toujours considéré comme un risque avéré, eu égard à la non sécurisation par les États africains de la mise à disposition des fonds nécessaires au décollage du secteur économique. Ceci expliquant la raréfaction légendaire sur ce continent de ces fonds d'investissement. Plusieurs raisons sont souvent évoquées pour soutenir ce désintéressement des bailleurs étrangers à s'investir économiquement et financièrement en Afrique. Il est ainsi couramment évoqué, la nébulosité des opérations commerciales sur le terrain, l'instabilité politique, la corruption endémique, les déficiences relatives à l'environnement juridique peu sécurisant, les garanties judiciaires incertaines. Sur le plan de la garantie juridique et judiciaire que doit offrir les États africains aux bailleurs étrangers, il est important de noter que, les principales récriminations, formulées à l'encontre des administrations africaines, se résument en termes de manque de sécurité juridique et judiciaire dans les systèmes de défense des droits et de protection des intérêts des investisseurs. De manière pratique on relève d'un côté que, l'insécurité juridique résulterait de la sénescence des textes légaux en vigueur dans ces États qui, pour la plupart, sont "antédiluviens" et en total déphasage avec le droit économique moderne. Ceci témoignant de la difficulté des investisseurs à considérer le tissu juridique de ces États comme fiable et sécurisant. À cela, s'ajoute leur incohérence, leur défaut ou manque de vulgarisation le tout brochant. De l'autre côté, l'insécurité judiciaire se traduirait notamment par la lenteur dans les procédures souvent fastidieuses pour les investisseurs à laquelle s'ajoutent, l'imprévisibilité et la complaisance des tribunaux de l'ordre judiciaire dans leurs décisions lesquelles, présentent d'énormes difficultés dans la phase de leur mise en exécution. Dans le listing des récriminations contre les systèmes judiciaires africains en vigueur, avant la mise en place du droit unifié OHADA, on ne saurait passer outre le facteur gangréneux et non moins négligeable qui mine le bon fonctionnement et la crédibilité des administrations judiciaires africaines. Nous faisons ici allusion à la corruption récurrente du corps de la justice. La somme de tous ces facteurs, justifie sans nul doute l'appréhension des investisseurs étrangers à s'intéresser à cette partie de l'univers terrestre. Dans ces conditions, nous sommes tentés d'accréditer l'auteur africain qui fait observer à juste titre que, si "investir est déjà en soi un risque, même s'il est calculé ; s'il faut doubler ce risque premier inéluctable de celui d'un système juridique fluctuant, ondoyant et insaisissable, il n'y a pas beaucoup d'espoir à susciter l'attrait des investisseur"1(*).

Cette assertion, illustrative de la défiance des investisseurs étrangers à l'égard de l'Afrique montre à quel point, les dysfonctionnements dans les systèmes de défense des intérêts des investisseurs peuvent être un véritable handicap à l'investissement et par ricochet, au décollage économique d'un ensemble géographique donné. C'est donc dans la perspective de remédier à ces dysfonctionnements que, certains États africains ont pris les mesures nécessaires à la création de conditions favorables pour la promotion de l'investissement privé, afin d'accroître l'apport de capitaux extérieurs. Le droit uniforme et harmonisé de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, ainsi dénommé Droit OHADA est né. Ce droit uniformisé africain est né, comme l'affirment les promoteurs, de "la volonté politique dynamique et ambitieuse de renforcer le système juridique des États de la zone franc2(*) en créant un cadre juridique simple, moderne et adapté à la conduite des affaires"3(*). On peut aujourd'hui sur cette base affirmer, sans le risque de se tromper que, l'Afrique dispose dorénavant de véritables instruments juridiques modernes, nécessaires à l'éclosion d'une nouvelle dynamique de développement économique avec la mise en place de la structure communautaire OHADA avec son cortège de panoplie de textes législatifs (les Actes Uniformes) qu'elle coordonne.

L'organisation en soi, prise non pas dans sa posture institutionnelle mais dans son aspect d'organe législatif, a réglementé un certain nombre de matières relevant du domaine du droit des affaires. En effet, des dispositions de l'art. 2 du Traité de l'OHADA, on infère les domaines susceptibles d'être considérés comme faisant partie du droit des affaires harmonisé africain. Selon les dispositions de cet article, "entrent dans le domaine du droit des affaires, l'ensemble des règles relatives au droit des sociétés et au statut juridique des commerçants, au recouvrement des créances, aux sûretés et aux voies d'exécution, au régime du redressement des entreprises et de la liquidation judiciaire, au droit de l'arbitrage, au droit du travail, au droit comptable, au droit de la vente et des transports, et toute autre matière que le Conseil des ministres déciderait, à l'unanimité, d'y inclure, conformément à l'objet du présent Traité et aux dispositions de l'article 8 ci-après"4(*). Ainsi le droit de l'arbitrage, objet de notre étude, occupe une place importante dans le droit unifié OHADA. Il a fait l'objet d'un Acte Uniforme5(*), l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage. Il conviendrait de signaler que, le droit africain OHADA de l'arbitrage comprend toute une variété de textes fondamentaux sur l'arbitrage dont les principaux sont :

- le Traité OHADA du 17 octobre 1993, qui dans les dispositions du Titre IV (art 21-26) traite de l'arbitrage,

- l'Acte Uniforme sur l'Arbitrage (AU.A) et le Règlement d'Arbitrage (RA) de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) tous deux du 11 mars 1999,

- le règlement de procédure de la CCJA du 18 avril 1996.

Celui qui fera l'objet de cette étude comparée, est l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage (AU.A) qui vient en appoint au Traité dans ses dispositions sur l'arbitrage6(*). Ce texte constitue le droit commun de l'arbitrage dans l'espace OHADA.

La présente étude porte sur la comparaison de deux lois d'arbitrage en l'occurrence, l'Acte uniforme relatif au Droit de l'Arbitrage dans le système OHADA et, le chapitre 12 portant arbitrage international de la Loi Fédérale sur le Droit International Privé en droit suisse de l'arbitrage. Pourquoi un tel choix de comparaison des deux lois d'arbitrage ?

L'option faite d'étudier ces deux textes est justifiée par deux grandes motivations :

- Il y a lieu de faire remarquer qu'à ce jour, deux grandes approches ont prédominé dans la démarche de la quasi-totalité de la littérature doctrinale faite aussi bien par les éminents juristes africains mais aussi, par certains experts occidentaux de la matière depuis l'entrée en vigueur du droit OHADA de l'arbitrage. La première approche, qu'on peut qualifier de purement descriptive, s'est bornée à inventorier le patrimoine de l'arbitrage en Afrique à travers l'inventaire exhaustif des textes législatifs et réglementaires qui, ont fondé la pratique de cette justice privée, dans les différents États africains depuis lors. La seconde analytique, a abordé le droit de l'arbitrage OHADA dans sa dimension textuelle à travers l'analyse du contenu de textes récemment adoptés, par rapport aux principes et règles juridiques généralement admis par la pratique et qui, régissent ce droit afin d'en restituer l'esprit du législateur. Cette récente démarche est consubstantielle à la naissance du droit OHADA de l'arbitrage. Dans cette logique, beaucoup d'études ont jeté un regard critique sur l'opportunité de certaines des dispositions des textes adoptés mais aussi, sur le caractère dubitatif de l'applicabilité des dispositions du ce droit7(*). Toutefois, une troisième approche, qui est loin d'être la moins importante, celle comparative, qui doit être menée dans la perspective de dégager les similitudes et dissemblances, les forces et faiblesses au regard d'un ou plusieurs autres textes, a fait à ce jour l'objet de peu de réflexions et de développements doctrinaux. Pour combler cette lacune, nous avons décidé de mener cette étude comparative sommaire des deux textes légaux régissant l'arbitrage dans les deux espaces.

- Le choix d'une problématique à disserter pour notre mémoire de DEA s'est porté sur la possible comparaison des deux lois d'arbitrage parce que, à la lecture sommaire des deux textes de loi, nous avions constaté que certaines dispositions de ces textes de loi sont identiques.8(*) Nous en avons déduit que, l'AU.A au regard de sa jeunesse procède par simple "replâtrage" de certaines dispositions du droit suisse, celui-ci étant lui-même une simple codification des règles de la CNUDCI.

Aussi avions-nous fait le constat selon lequel, certaines règles de l'AU.A sont, le prolongement des dispositions législatives et donc un appoint du chapitre 12 LDIP par l'AU.A en droit OHADA. Enfin, certaines dispositions de l'AU.A en droit OHADA se sont inscrites dans une logique purement innovatrice vue comme une amélioration du droit de l'arbitrage. Sur la base de toutes ces constatations, il eut été nécessaire d'envisager une pareille étude comparée pour faire la part des choses.

Ceci étant, il est important de noter que le nouveau droit de l'arbitrage africain, le droit OHADA de l'arbitrage, est considéré comme l'un des plus récents de la série de modernisation des législations sur l'arbitrage. Modernisation préconisée par les recommandations des instances internationales en l'occurrence la CNUDCI9(*). En effet, la législation unifiée sur l'arbitrage OHADA en Afrique, (pour être plus précis, l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage) a été seulement adoptée, faut-il le rappeler, le 11 mars 1999. Cependant, la compréhension et la maîtrise de ce nouveau droit, de ses concepts clés ne pourrait se faire que par rapprochement à ce qui est admis et se fait dans d'autres systèmes, d'où le choix de la législation suisse sur l'arbitrage international. En effet, s'il est incontestable que la Suisse dispose depuis lors d'outils modernes adaptés à la nouvelle donne que requièrent les exigences du développement économique, force est de constater que, la législation suisse sur le Droit International Privé (LDIP) dans laquelle figure le chapitre 12 relatif à l'arbitrage international, (pour ce qui est du cas qui nous concerne dans cette étude) est d'une antériorité relativement moins récente. Elle date du 18 décembre 1987 et donc plus vieille que l'AU.A en droit OHADA. Cependant, il convient de rappeler que, nonobstant le caractère relativement récent de la loi fédérale sur l'arbitrage international (LDIP), la Suisse a une longue et vieille tradition dans la pratique de l'arbitrage international. Cette tradition, comme l'a constaté le Conseil Fédéral, s'inscrit dans la droite ligne de la vocation de la Suisse à être souvent choisie comme "lieu privilégié pour les arbitrages internationaux"10(*). La tradition suisse de l'arbitrage international, peut être législativement attestée par l'antériorité de sa réglementation, en l'occurrence le concordat du 27 mars 1969 qui, avant l'entrée en vigueur de la LIDP, est considéré comme le seul texte uniforme constitutif du droit de l'arbitrage interne et international.

Bref, il est évident qu'à travers cette pratique décennale de la justice privée arbitrale, la Suisse a acquis une notoriété qui constitue un avantage en termes d'expériences dans la pratique de l'arbitrage. Ce qui est un atout d'une grande importance pour quiconque veut mieux comprendre le droit et la pratique de l'arbitrage en général, qui plus est international. La Suisse, à la lumière de son droit et de sa pratique de l'arbitrage, constitue donc une référence mondiale, à laquelle les juristes africains se doivent de puiser les éléments nécessaires à la mise en place d'une pratique arbitrale judicieuse et crédible.

Pour une bonne compréhension du fondement de cette étude, il est important de se poser la question de savoir pourquoi spécifiquement une étude comparée ?

Nous avons décidé de procéder à cette étude comparée de l'AU.A en droit OHADA et du chapitre 12 de la loi fédérale sur le Droit International Privé en droit suisse dans une triple perspective. D'une part, jeter les bases d'une comparaison beaucoup plus large des deux lois et, dans une moindre mesure, de la pratique de l'arbitrage afin de mettre à la disposition des juristes, des tribunaux et des opérateurs économiques, une esquisse de réponse aux principaux outils nécessaires à rendre intelligible le contenu du nouveau droit de l'arbitrage OHADA. D'autre part, mettre en lumière les deux lois d'arbitrage à travers leur classicisme et, le cas échéant, leur originalité selon le schéma coutumier du déroulement d'un arbitrage. Enfin, et c'est certainement l'objectif ultime de notre travail, prouver que dans un arbitrage ad hoc ou institutionnel OHADA, il y a toujours place pour une internationalité de l'arbitrage en dépit de la non dualité du texte régissant l'arbitrage dans cet espace. Il serait prétentieux de notre part de vouloir procéder exhaustivement en un tour de clavier à la comparaison des deux systèmes. Ce serait trop embrasser pour un mémoire de DEA, vu la limitation qui nous est imposée pour un tel travail. Une telle entreprise serait aisément compréhensible et réalisable dans le cadre d'un travail de thèse que des voix plus autorisées, feraient assurément en son temps.

La présente étude, aussi sommaire soit elle, répond à double objectif. D'une part, promouvoir l'arbitrage OHADA, vu que la législation OHADA sur l'arbitrage est très peu connue des praticiens du droit de l'arbitrage (les tribunaux, les arbitres, les juristes) voire des parties à un litige international qui peuvent, en connaissance de cause, la choisir comme loi procédurale ou loi du litige. Ainsi, c'est les juristes africains qui s'en sortiraient grandis en notoriété et la crédibilité de la justice africaine se revaloriserait à coup sûr. La défiance des investisseurs étrangers à l'égard du système judiciaire africain se dissiperait de ce fait. Aussi, vu que toute la littérature doctrinale sur le droit de l'arbitrage international parle très peu du droit OHADA et que, la référence à ce droit est très peu faite dans les ouvrages les plus célèbres sur l'arbitrage, il est évident que la présente étude comblera ces lacunes et permettra d'apporter notre contribution, aussi modeste soit elle, à la doctrine.

D'autre part, objectif inavoué de ce travail de comparaison de textes réglementant l'arbitrage international avec inclusion à l'OHADA et à la Suisse, serait de démontrer que le droit OHADA de l'arbitrage est, un véritable instrument juridique de promotion du droit des affaires et de l'investissement au service du développement de l'Afrique. Ainsi, parviendrons-nous à prouver que le doit OHADA de l'arbitrage est un instrument juridique à vocation d'abord régional et ensuite international, nécessaire aux arbitres et aux parties à un différend né ou éventuel pour le règlement privé de ce différend ? Seule la suite du développement nous permettra de le savoir.

Notre démarche consistera à collationner les principales questions que pose l'arbitrage international aux solutions apportées par les droits positifs dans l'espace OHADA et helvétique. Il s'agit pour nous de mener une démarche comparative sur le droit de l'arbitrage international avec une inclusion de l'OHADA et de la Suisse en tant que système. Il est évident qu'à travers cette démarche, nous dégagerons les points de convergence et de divergence de ces deux législations. Cependant, il ne s'agira pas pour nous de cantonner notre réflexion aux seuls textes légaux en vigueur dans les deux espaces juridiques. Nous essayerons de prendre en considération, les sources doctrinales et jurisprudentielles disponibles pour peu que les sources jurisprudentielles en droit OHADA de l'arbitrage ne soient pas déficitaires, donc existantes et disponibles.

En effet, se référer aux sources jurisprudentielles existantes en matière d'arbitrage international est loin d'être superflu pour faire aboutir cette étude comparée, cela nous permettra d'aller au delà de l'analyse des dispositions légales et de rechercher les informations accessibles, les analyser sur la base de la pratique de l'arbitrage international dans les deux espaces (arbitrage ad hoc, arbitrage institutionnel). Telle sera la démarche ultime de notre étude. De manière plus détaillée, nous envisagerons cette étude de manière classique en plan bipartite. Dans une première partie au chapitre I, on passera en revue l'objet du droit étudié, c'est-à-dire le concept d'arbitrage et les domaines respectifs d'applicabilité des deux lois de l'arbitrage. Un accent particulier sera mis sur les fondements de la dualité et de l'unité du régime juridique de l'arbitrage dans les deux systèmes. Nous n'occulterons pas, bien évidemment, le concept de l'internationalité de l'arbitrage dans les deux de systèmes. Ensuite, la variante arbitrabilité focalisera notre attention car, nous l'analyserons sous le prisme des deux textes. Au chapitre II de la deuxième partie, nous aborderons l'étude comparée des grands principes qui régissent l'instance arbitrale, appliqués aux deux systèmes. Sans oublier la sentence arbitrale et les voies de recours ouvertes contre la sentence arbitrale conformément aux dispositions des deux réglementations sur l'arbitrage.

Bref, la systématique des lois sur l'arbitrage divergeant dans les deux espaces, cette étude sera menée en suivant le déroulement classique du processus arbitral. Ainsi, les notions d'arbitrage, d'internationalité de l'arbitrage, les fondements de l'unité et de la dualité du régime juridique de l'arbitrage, la notion d'arbitrabilité du litige, le déroulement de l'instance arbitrale à proprement parler, les caractéristiques de la sentence arbitrale de même que les voies de recours ouvertes contre les sentences dans les deux systèmes seront les points focaux de cette étude comparée.

CHAPITRE I

NOTIONS D'ARBITRAGE INTERNATIONAL ET DOMAINES D'APPLICATION DE L'ACTE UNIFORME RELATIF AU DROIT DE L'ARBITRAGE OHADA ET DU CHAPITRE 12 LDIP

Un bref aperçu historique des deux systèmes législatifs mérite d'être fait de prime abord pour démarrer cette étude.

Avant l'entrée en vigueur du nouveau droit de l'Arbitrage International en Suisse, la Loi Fédérale sur le Droit international Privé (LDIP) en son chapitre 12 portant le titre de "Arbitrage International", seul le droit cantonal sur l'arbitrage était applicable. Ainsi, le concordat suisse sur l'arbitrage des 27 mars - 27 août 1969 était le seul texte constitutif de l'arbitrage interne et international. Mais avec cette nouvelle loi (LDIP), le droit fédéral de l'arbitrage international est ainsi constitué, plaçant la Suisse dans le mouvement mondial de modernisation du droit de l'arbitrage international. Notons toutefois que, l'arbitrage institutionnel des chambres de commerce et d'industrie des différents cantons, prévoit un arbitrage international sur la base du règlement suisse d'arbitrage international. La présente étude ne prendra en compte que, le chapitre 12 de la LDIP à l'exclusion du règlement suisse d'arbitrage international et du concordat intercantonal.

En Afrique, un état des lieux de la situation législative avant la réforme OHADA présentait un tableau chaotique et disparate. On observait dans lesdits pays de la zone soit un vide juridique et institutionnel en la matière, soit une législation sur l'arbitrage embryonnaire et/ou lacunaire. L'état de la situation législative de l'arbitrage interne voire international présentait un tableau peu reluisant basé sur une décalcomanie scrupuleuse des textes français, preuve de l'héritage colonial des pays francophones qui se référençaient le plus souvent aux sources du droit français (code de commerce et code de procédure civile français). Mais avec l'OHADA les seize États-Parties au traité, tout comme la Suisse, disposent d'un nouvel arsenal juridique nécessaire à la dynamisation des échanges commerciaux, dans la perspective de favoriser et de soutenir le développement économique. Le tout nouveau droit unifié et harmonisé des affaires OHADA dont le droit de l'arbitrage fait partie intégrante est ainsi né. L'Acte Uniforme sur l'Arbitrage en droit OHADA est dorénavant le droit commun de l'arbitrage dans tous les États membres de l'espace OHADA. Il s'est largement inspiré des dispositions du nouveau code de procédure civile français (NCPC) relatives à l'arbitrage commercial interne et international mais aussi de la loi- type de la CNUDCI dont la reprise intégrale de certaines de ses dispositions est soupçonnable.

Ceci étant, si l'arbitrage est souvent assimilé à une justice privée, doit-on le considérer aujourd'hui en Afrique comme une privatisation de la justice étant entendu que cette forme de justice se soustrait de l'emprise des États ?

Certainement pas, car le caractère privé de la justice arbitrale africaine (qui sans pour autant lui faire perdre sa nature juridictionnelle) relève de sa nature contractuelle qui, confère aux parties le pouvoir de choisir leur juge et même, d'organiser le règlement de leur différend comme elles l'entendent. En dépit de ce caractère privé, il n'est pas moins évident que tout s'organise dans le cadre d'un canevas réglementaire préétabli : le cadre législatif de l'arbitrage dans lequel les parties peuvent tout concevoir. C'est ce cadre législatif pré réglementé qui fera l'objet de la présente étude comparée, sans pour autant occulter l'analyse de la pratique arbitrale dans les deux systèmes, si besoin.

L'intérêt que suscite cette étude comparée du droit de l'arbitrage OHADA et Suisse, ne peut s'appréhender qu'à travers l'analyse des concepts et des principes généraux de cette matière dans les deux espaces. Pour ce faire, il est fort indispensable de donner les précisions terminologiques, du point de vue doctrinal, des principales notions sur l'arbitrage d'une part et, les caractères que l'arbitrage peut revêtir d'autre part dans les deux espaces juridiques.

SECTION I.- L'INSTITUTION D'ARBITRAGE

La systématique des lois sur l'arbitrage divergeant d'un espace à un autre, il va de soi que la conception de la notion d'arbitrage et de loi d'arbitrage de même que, le rôle et l'importance du siège de l'arbitrage, répondent à des logiques notionnelles divergeant d'un espace à un autre. C'est cette variabilité sémantique que nous détaillerons dans cette section.

§I.- LA NOTION D'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE

Bien qu'il soit ici question de l'arbitrage international, on ne saurait entreprendre cette étude comparative sans passer en revue les définitions ou les approches de définition de la notion d'arbitrage, dans la perspective d'une bonne compréhension de l'arbitrage international.

A.- DEFINITIONS DE L'ARBITRAGE

1-. DEFINITION NOTIONNELLE DE L'ARBITRAGE

La notion d'arbitrage n'a pas de définition légale et lorsque Jarrosson11(*) le relève, nous sommes tentés de lui donner raison car, la plupart des lois sur l'arbitrage ne la définissent pas. Les droits OHADA et suisse de l'arbitrage n'échappent pas non plus à cette universalité de principe. Cette absence de définition de l'arbitrage dans ces deux textes normatifs, n'est point étonnante car comme le souligne à bon droit le Prof. P. MEYER "il n'est pas toujours judicieux pour un texte normatif de procéder à des définitions qui enfermeraient dans un cadre trop restrictif ou trop figé l'institution qu'il s'agit de réglementer. La définition et, d'une manière générale, la conceptualisation doivent être davantage l'oeuvre de la doctrine, voire de la jurisprudence "12(*). Cependant, de la définition de la notion de convention d'arbitrage que donnent les réglementations sur l'arbitrage, on peut tenter d'inférer une esquisse de définition notionnelle de l'arbitrage. En effet, il a été défini comme étant "un mode alternatif de règlement des conflits consistant pour les parties à soumettre, soit directement, soit par l'intermédiaire d'une institution spécialisée, leur différend, né ou éventuel, à des personnes appelées arbitres, à charge pour celles-ci de leur trouver une solution".13(*) Selon la formule de J. Robert et de B. Moreau, il faut entendre par arbitrage "l'institution d'une justice privée grâce à laquelle les litiges sont soustraits aux juridictions de droit commun, pour être rendus par des individus, revêtus, pour la circonstance, de la mission de les juger"14(*). Quant à Jarosson, il le définit comme "l'institution par laquelle un tiers règle (à titre privé bien évidemment) les différends qui opposent deux ou plusieurs parties en exerçant la mission juridictionnelle qui lui a été confiée par celle-ci"15(*).

Garçonnet et César-Bru, à leur tour, définissent l'arbitrage comme étant "la faculté pour les parties de soustraire le différend qui les divise au jugement des tribunaux donnés par la loi pour le soumettre à une personnalité de leur choix".16(*) Une autre définition, et non pas des moindres, est celle que nous donne Huys et Keutgen lorsqu'ils affirment que, l'arbitrage est "un mode de solution des conflits qui trouve son origine dans une convention privée et qui aboutit à une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée. Cette décision est acquise à l'intervention d'un ou plusieurs particuliers auxquels la volonté commune des parties donne pouvoir de trancher le litige"17(*). En Suisse, Jolidon le définit comme "la voie juridictionnelle privée qui repose sur la volonté des parties, exprimée dans une convention, d'investir de simples particuliers de la mission de trancher un ou des litiges en droit privé en lieu et place des juridictions étatiques"18(*). Somme toute, l'arbitrage est une juridiction privée comme le soulignent à bon droit les auteurs allemands Schwab et Walter. Il est, si nous pouvons nous autoriser de concevoir une définition de la notion, un mode de résolution des litiges nés ou à venir par un ou plusieurs particuliers à qui les parties confient à travers une convention, la mission de juger à la place des juridictions étatiques de droit commun. Leur décision ayant des effets similaires à ceux du juge étatique est revêtue de l'autorité de la chose jugée et nécessite, même en cas de reconnaissance dans un Etat tiers, un exequatur pour son exécution.

Ce tour d'horizon des différentes définitions qu'on peut donner à l'arbitrage dans la plupart des systèmes juridiques, nous amène à envisager la conception de la notion d'arbitrage international, c'est-à-dire une définition de l'arbitrage dans sa composante international ou l'arbitrage vu sous le prisme du droit international privé. Vu que notre étude porte sur la comparaison du concept d'arbitrage international dans les systèmes juridiques OHADA et helvétique, cette clarification sémantique se révèle être un préalable nécessaire pour mieux cerner comment l'arbitrage international sera appréhendé sous le prisme des deux textes de loi d'arbitrage.

2-. LE CONCEPT D'ARBITRAGE INTERNATIONAL

D'une manière classique, l'expression "international" est utilisée de façon courante pour noter la différence entre un arbitrage national qui est purement interne à un Etat et un arbitrage qui transcende les frontières nationales. Ceci étant, techniquement la définition du terme "international" en matière d'arbitrage répond ordinairement à deux grands critères.

Le premier est objectif et vise la nature du litige, de sorte qu'un arbitrage est considéré comme international s'il "met en jeu les intérêts du commerce international". C'est la conception matérielle du droit français qui répond à ce critère purement économique de l'internationalité (cf. Art.1492 NCPC).

Le second est subjectif et s'en tient :

- soit aux parties, c'est-à-dire leur nationalité, domicile ou siège social, c'est le cas du droit suisse qui s'en est tenu à la notion purement formelle de l'internationalité de l'arbitrage,

- soit au lieu de l'arbitrage dans ce cas c'est le siège du tribunal arbitral qui est pris en compte, le droit OHADA répond à ce dernier critère et enfin,

- soit aux modalités du contrat c'est-à-dire le lieu de sa conclusion ou de son exécution.

Un autre critère est utilisé de façon cumulative de sorte qu'est "international, l'arbitrage qui connaît des litiges relatifs à des intérêts du commerce international et dont l'une des parties a au moins son siège ou son domicile à l'étranger".19(*) Cette dernière définition prend en compte, à la fois la notion matérielle et formelle de l'internationalité de l'arbitrage et donc, un croisement des critères subjectifs et objectifs. Ceci étant, si l'arbitrage international doit être défini comme celui qui est soumis à une convention internationale ou au règlement d'une institution internationale d'arbitrage, l'arbitrage institutionnel OHADA est, tout comme celui mis en place par la convention de Washington20(*), un arbitrage international. Mais cette qualification n'a réellement pas une portée utilitaire pour la présente étude dans la mesure où, l'arbitrage institutionnel OHADA (qui est celui de la CCJA) est à l'instar de l'arbitrage CCI, un arbitrage organisé et administré par l'institution elle-même selon son propre règlement et procédure. Or, la présente étude n'ayant pas vocation à analyser l'arbitrage institutionnel de la CCJA en sa qualité d'institution d'arbitrage, pas plus que celui de la CCIG, il serait superflu voire inutile de prendre en considération cette définition. Nous n'envisagerons donc pas de passer en revue les règlements d'arbitrage de ces différentes institutions d'arbitrage, quoique réglementant l'arbitrage international. Rappelons pour toutes fins utiles que, les chambres de commerce et d'industrie des différents cantons suisses organisent sur la base du règlement suisse d'arbitrage international, (basé sur le modèle du règlement de la CNUDCI) des arbitrages institutionnels à l'instar de celui de la CCI de Paris et de la CCJA dans l'espace OHADA. Les parties qui s'y soumettent peuvent considérer leur arbitrage comme un arbitrage international.

Par ailleurs, nous ne reviendrons pas sur les précisions terminologiques relatives aux autres formes d'arbitrage (transnational ou mixte, anational ou délocalisé...) puisque, l'exclusivité de cette étude est réservée à l'arbitrage international. Ceci étant, nous tenterons de définir le concept d'arbitrage international à la lumière des principaux systèmes (droit OHADA et LDIP) de notre étude, selon qu'ils envisagent l'internationalité de l'arbitrage à travers l'unité ou la dualité du régime juridique de l'arbitrage.

Ainsi, afin de mieux définir la notion d'arbitrage international qui cadrera le mieux à cette étude, nous ne tiendrons compte que de l'arbitrage de droit international privé par opposition à l'arbitrage international au sens du droit international public. Autrement dit, l'arbitrage de droit privé, international par son objet, l'objet pouvant lui-même être défini, soit par l'arbitrage lui-même, soit par la relation ayant donné naissance au différend soumis à des arbitres, retiendra notre attention dans cette étude comparée.

D'entrée de jeu il faut reconnaître que, la définition de la notion d'arbitrage international en droit international privé n'est pas univoque et prête souvent à confusion. En effet, tout comme la définition de l'internationalité du contrat en droit du commerce international, celui de l'arbitrage repose sur deux critères. L'un juridique, où l'internationalité suppose le rattachement de l'arbitrage à un ordre juridique étatique parmi ceux entrant en considération et, l'autre à caractère économique, où l'internationalité se justifie par l'application de règles matérielles propres à cette institution. Contrairement au droit français21(*) qui définit l'arbitrage international en tenant compte de l'acception économique, les droits OHADA et suisse de l'arbitrage international définissent l'arbitrage international sur la base du critère juridique. Ces deux textes ne donnant aucune précision terminologique de la notion, il importe à ce niveau de préciser que, toute définition notionnelle de l'arbitrage international dans les deux systèmes ne peut se faire que par déduction, au travers de l'internationalité de l'arbitrage.

B-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET SUISSE : UNITE OU DUALITE DE REGLEMENTATION

La définition de l'internationalité de l'arbitrage dépend du champ d'application de la loi de l'arbitrage, en l'occurrence pour ce qui est du cas qui concerne cette étude, l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage en droit OHADA et le chapitre 12 LDIP en droit suisse. Alors que, le droit suisse distingue l'arbitrage interne de l'arbitrage international en les soumettant à des régimes juridiques différents, le droit OHADA n'opère pas ce distinguo. En droit OHADA, un régime juridique unique est appliqué aussi bien à l'arbitrage interne qu'à l'arbitrage international. Ce qui n'est pas le cas en droit suisse où le régime juridique applicable à l'arbitrage est dual.

Du point de vue du droit comparé, le régime juridique de l'arbitrage international a fait l'objet de deux grandes opinions. Les internationalistes22(*) qui, pour diverses raisons, soutiennent la thèse selon laquelle, les spécificités propres à l'arbitrage international requièrent que cette forme d'arbitrage soit soumise à des règles matérielles répondant aux besoins spécifiques de cette discipline. Ainsi, pour eux la dualité de la réglementation a l'avantage de mettre plus en évidence la spécificité de l'arbitrage international. Cette thèse est en l'occurrence soutenue par la France et la Suisse. Un autre groupe de pays, soutient qu'en dépit de ses particularités, l'arbitrage international est un mode privé de règlement des différends ne justifiant pas de le réglementer différemment de l'arbitrage interne.

Pour eux, l'unité de la réglementation est le meilleur choix qu'on puisse faire, dans la mesure où ce qui est bien conçu pour l'arbitrage interne le serait également pour l'arbitrage international. La présente étude, fort heureusement, s'inscrit dans la logique des deux tendances qui s'observent eu égard à l'application du régime juridique de l'arbitrage. Fort de cela, nous passerons donc en revue les deux conceptions qui s'opposent du point de vue doctrinal : celle de l'unité appliquée par le législateur OHADA et celle de la dualité dont s'est fait écho l'ordre juridique suisse. Dans cet ordre d'idée, nous essayerons d'apporter la réponse à la question relative à l'importance qui faille accorder à l'application d'un régime juridique spécifique à l'arbitrage interne différent de celui applicable à l'arbitrage international. Autrement dit, quel sens donne-t-on à un arbitrage international dans les pays qui le distinguent de l'arbitrage interne et le soumettent à des règles particulières comme la Suisse ?

Nous distinguerons dans un premier temps, les législations qui dédoublent leur régime juridique de l'arbitrage comme la Suisse et par analogie la France, pour ne citer que ces deux systèmes. Dans un second temps, le cas des pays qui cumulent le régime juridique de l'arbitrage en une seule loi ferra l'objet de notre attention. Ce serait le cas pour les pays faisant partie de l'OHADA et par extension l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Angleterre, le Canada, pour ne citer que ces systèmes. Mais avant, qu'est ce qui peut justifier le choix par le législateur suisse de la dualité et celui de l'unité par le codificateur OHADA ?

1-. LES FONDEMENTS DE L'UNITE DU REGIME JURIDIQUE : LE CAS OHADA

En affirmant que "what is good for International Arbitration is good also for Dutch arbitration", le rédacteur néerlandais signifiait tout simplement que ce qui est bien conçu pour l'arbitrage international peut également l'être pour l'arbitrage interne et réciproquement. Pour justifier l'unité du régime juridique, le codificateur néerlandais se fondait simplement sur le fait que, les solutions retenues dans le cadre de l'arbitrage interne peuvent bien évidemment être valables aux besoins de l'arbitrage du commerce international et vice versa. La question à ce niveau se pose de savoir si le codificateur OHADA s'inscrit aussi dans cette même logique. Le cas échéant, serait-il permis, en l'absence d'un texte spécifique sur l'arbitrage international, de parler d'un droit OHADA de l'arbitrage international ?

Trois analyses hypothétiques nous permettent d'induire l'effectivité de l'existence d'un arbitrage international dans l'espace OHADA.

D'une part, l'AU.A en ne définissant pas l'arbitrage international ne surprend guère puisqu'il s'agit d'un concept clef et, l'acte en tant que texte normatif n'a pas vocation à donner de définition. Ce rôle de définition voire de conceptualisation revient, de façon générale, à la doctrine et à la jurisprudence. Ceci étant, on peut estimer que cette absence de définition de l'arbitrage international dans la loi d'arbitrage OHADA est révélatrice d'une unité de régime juridique pour les deux formes d'arbitrage, justifiant de l'effectivité d'une existence d'un arbitrage international dans cet espace. En effet, a priori, il est aisé de comprendre qu'en l'absence d'une différenciation dans le texte OHADA de l'arbitrage interne et de l'arbitrage international, rien ne laisse présager de l'existence d'un droit OHADA de l'arbitrage international. Lorsqu'on sait que, dans les textes de la loi d'arbitrage OHADA aucune distinction n'est faite entre arbitrage international et arbitrage interne, on peut légitimement en déduire que le codificateur OHADA de l'arbitrage n'a pas daigné légiférer pour l'arbitrage international. 

La conséquence logique serait qu'il n'y aurait pas une place pour une internationalité de l'arbitrage dans cet espace et que tout arbitrage se déroulant sous les hospices de l'OHADA serait un arbitrage interne à l'OHADA. Mais, il serait totalement erroné de faire cette lecture de la loi d'arbitrage OHADA dans la mesure où, cette absence de distinction entre les deux formes d'arbitrage dans les textes de loi sur l'arbitrage OHADA, comme l'a fait le codificateur du Nouveau Code de Procédure Civil français, ne s'aurait s'interpréter que comme un choix législatif discrétionnaire des promoteurs en vue de donner à l'AU.A toute son efficacité. Efficacité qui pourrait être vue sous l'angle de la célérité, de la simplicité et de la modernité. Ce choix optionnel OHADA n'est pas unique, loin s'en faut. Il est à l'image du choix opéré par le Canada, l'Allemagne, les Pays-Bas etc. Loin de verser dans le débat doctrinal sur l'opportunité d'un tel choix (choix entre l'unité ou la dualité du régime juridique applicable à l'arbitrage), nous constatons que toute la doctrine sur le droit OHADA de l'arbitrage est quasi unanime sur les avantages de l'abolition de la distinction entre arbitrage interne et international. Cette abolition, d'après les rédacteurs de l'exposé des motifs de la première version de l'avant-projet de l'AU.A, se justifierait par le fait qu' "au caractère internationaliste déjà très poussé de la Loi Uniforme qui a vocation à s'appliquer dans seize Etats, tracer une nouvelle frontière entre cet `'espace OHADA'' et les autres pays du monde peut paraître inutile et dangereux"23(*). En effet, il a été soutenu que, la mise en place d'une nouvelle réglementation pour dissocier les deux formes d'arbitrage contrarierait l'esprit intégrateur du projet en soi. Quand bien même on relève que, la vocation première du projet OHADA est l'harmonisation du droit des affaires de ces seize États, il est fort aisé de constater que, la technique utilisée si l'on se réfère aux modalités d'adoption des actes uniformes et à leurs contenus, pour intégrer ces États, relève beaucoup plus de la technique d'unification que celle de l'harmonisation. Sur ce, il apparaîtrait dangereux de complexifier les textes normatifs par leur diversification, ce qui ne rendrait pas la tâche facile aux opérateurs économiques désireux d'investir dans cet espace mais aussi, aux juristes et aux instances judiciaires chargés de leur application.

Somme toute, s'il est une évidence à laquelle il faut se rallier à la lecture du texte de la loi d'arbitrage OHADA, c'est que dans cet espace aucune définition textuelle de l'arbitrage international n'est référencée. Cependant, l'arbitrage international fonctionne effectivement dans chacun des États-Parties à l'OHADA avec comme source, en plus du Traité et de l'AU.A, tout un arsenal de textes réglementaires étatiques et de conventions internationales. En résumé, cette absence de distinction, loin d'être une lacune paralysante du droit OHADA de l'arbitrage constitue, à notre avis, le premier pilier visant à justifier les fondements de l'unité du régime juridique de l'arbitrage en droit OHADA.

D'autre part, l'absence de spécification de normes relatives à d'autres formes d'arbitrage dans la loi d'arbitrage OHADA constitue un argument de poids nous permettant d'inférer les fondements de cette unité du régime juridique de l'arbitrage en doit OHADA. En effet, en dépit du constat de la non définition par l'AU.A de la notion d'arbitrage international, force est de constater que l'AU.A ne définit pas non plus de règles spécifiques applicables à d'autres formes d'arbitrage siégeant dans cet espace comme l'a fait le législateur suisse à travers la LDIP à son chapitre12, portant le titre Arbitrage International.

Bien évidemment, si des règles particulières relatives à d'autres formes d'arbitrage devant siéger dans l'espace OHADA avaient été définies par les rédacteurs OHADA, cela mettrait en cause l'approche unitaire du régime juridique de l'arbitrage OHADA. De même, si des rajouts de quelques dispositions propres à l'arbitrage international avaient été faits dans l'Acte Uniforme relatif au droit de l'arbitrage OHADA, comme l'ont fait les législateurs belge, italien et suédois, cela mettrait en évidence la volonté de clairement dissocier l'arbitrage interne de l'arbitrage international tout en maintenant l'unité du régime juridique, ce qui n'est pas le cas. Ce deuxième constat, à notre avis, constitue le pilier supplémentaire de l'unité du régime juridique de l'arbitrage en droit OHADA de l'arbitrage.

Enfin, dans les dispositions de l'art. 1er de l'AU.A, deux expressions nous permettent de mettre en évidence les fondements de l'unité du régime juridique en droit OHADA. Il s'agit des expressions "tout arbitrage" et "siège du tribunal arbitral". Avec l'expression "tout arbitrage" peut se lire, la volonté du législateur OHADA à faire du Traité et de l'AU.A consécutif, les seuls textes constitutifs du droit commun de l'arbitrage. Ainsi, lorsque l'AU.A en son art.1er dispose, qu'il a "vocation à s'appliquer à tout arbitrage lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des États-Parties" cela veut dire, qu'il ne fait pas de spécificités juridiques aux différentes sortes d'arbitrage en les soumettant à des régimes distincts. Il va s'en dire donc que, tout le système de différenciation repose sur la notion de siège de l'arbitrage. Donc, de la fixation de ce siège dépendra la nature de l'arbitrage. C'est aussi ce que semble constater le Prof. P. MEYER lorsqu'il affirmait que, tout système fondant la nationalité de l'arbitrage au moyen d'un seul critère qui n'a trait ni à la convention d'arbitrage, ni aux litiges soumis aux arbitres mais, en se référant exclusivement au siège de l'arbitrage, vise à assurer l'unité entre arbitrage interne et arbitrage international. Ainsi, et comme nous le verrons plus tard, un arbitrage sera interne à l'OHADA ou international selon que son siège est conséquemment fixé dans un Etat-partie à l'OHADA ou dans un Etat tiers. Notons toutefois que, l'unité de régime juridique n'est ici que relative car, elle ne peut être applicable qu'à la lex arbitri à l'exclusion toutefois de la lex causae et de la loi applicable à la convention d'arbitrage.

2-. LES FONDEMENTS DE LA DUALITE DU REGIME JURIDIQUE EN DROIT SUISSE

Le fondement pour une législation différenciée se base sur le raisonnement selon lequel, l'arbitrage interne se situerait à l'intérieur d'un seul ordre juridique et se caractériserait par la soustraction du litige à la connaissance des tribunaux ordinaires, avec pour conséquence le contrôle de la procédure et de la sentence par les juridictions étatiques. Par ailleurs, l'arbitrage international s'opèrerait souvent dans le cadre des relations du commerce international et /ou de la pluralité des ordres juridiques, faisant ainsi intervenir des conflits de lois et /ou de juridictions. Ainsi, il en résulterait une impossibilité d'application des dispositions légales de la législation interne sur l'arbitrage à l'arbitrage international, lesquelles dispositions, semble-t-il, seraient inadaptées aux besoins du commerce international. Cet argument justifierait, selon eux, la nécessité d'une réglementation spécifique à l'arbitrage international.

Certains y voient des différences énormes justifiant un régime différencié puisque "le profil-type de l'opération et du litige du commerce international diffère de la transaction et du différend standard de droit interne"24(*). Sur la base de cette différenciation de critères clairement établis, les internationalistes25(*) suggèrent et soutiennent l'impérieuse nécessité de dissocier la réglementation applicable à l'arbitrage interne de celle applicable à l'arbitrage international. Même si, à la suite de cette argumentation nous soutenons avec eux la pertinence du raisonnement, nous sommes désolés de faire remarquer que parmi les États ayant légiféré récemment, "une nette majorité n'a pas estimé que la spécificité de l'arbitrage international, justifiait de le réglementer différemment de l'arbitrage international"26(*). Il est important de noter que, peu de pays dont la Suisse et la France27(*) sont passés pour être les leaders de l'application d'un régime juridique spécifique à l'arbitrage international.

Pour en revenir au cas de la Suisse, la dualité de la réglementation helvétique sur l'arbitrage peut trouver son explication dans les particularités administratives de ce pays. Lesquelles particularités sont dues à la répartition constitutionnelle des compétences entre la confédération et les cantons. Jarvin trouve que, le choix pour ce pays "a été motivé par l'existence de règles locales inadaptées à un usage international qui, compte tenu de la tradition du pays en question ou de sa constitution, ont difficilement pu être modifiées". En effet, la réglementation sur l'arbitrage étant par essence une loi procédurale, elle relevait de la compétence exclusive des cantons en Suisse. Ceci étant, l'application à tous les arbitrages (quelle que soit leur nature) du concordat du 27 mars 1969, seul texte constitutif du droit de l'arbitrage interne et international à l'époque, et auquel les cantons ont adhéré, a donné lieu à des inadaptations pour ce qui est de son application à l'arbitrage international. On a alors estimé que, vu la spécificité de l'arbitrage international il est impossible de donner en une seule loi, une solution satisfaisante aux questions que soulèvent les deux sortes d'arbitrage. La confédération s'est alors reconnue compétente en matière d'arbitrage internationale et, l'a réglementé avec la LDIP du 18 Déc. 1987. Ainsi, tout comme en droit français où la qualification internationale de l'arbitrage est fondée sur un critère objectif et déterminant qui est la mise en cause des intérêts du commerce international, le droit positif suisse de l'arbitrage bénéficie d'un climat juridique différencié basé sur la reconnaissance d'un critère subjectif lié au domicile ou siège des parties. Selon que le domicile ou la résidence habituelle ou le siège des parties se trouve sur le territoire suisse, on distingue deux catégories d'arbitrage : l'arbitrage interne dont le concordat se fait actuellement l'écho 28(*) et l'arbitrage international réglementé par le chapitre 12 de la LDIP. Au surplus, il y a lieu de noter que sur ce point, la ressemblance entre les deux systèmes ne se limite qu'à la dualité de leur réglementation sur l'arbitrage.

Comme nous le verrons plus tard, les droits français et suisse de l'arbitrage international ne s'accordent pas sur les critères de définition de l'internationalité de l'arbitrage.

En résumé, cette différenciation de régime juridique applicable à l'arbitrage, a fait l'objet de dérogation aussi bien par le législateur OHADA que par le rédacteur néerlandais de la nouvelle loi sur l'arbitrage29(*) qui, ne procède pas à cette dichotomie procédurale. A notre avis, même si nous reconnaissons que l'arbitrage international a ses spécificités (relatives à l'application des règles du commerce international, si besoin) dont il faut tenir compte, il est évident d'admettre que les deux formes d'arbitrage ne sont pas des institutions aussi différentes qu'on puisse le croire, au point d'en légiférer différemment.

Mis à part ces différentes conceptions, sur les fondements du régime juridique applicable à l'arbitrage international, il importe de définir l'internationalité de l'arbitrage selon le droit positif OHADA et helvétique.

§ II-. LE CONCEPT D'INTERNATIONALITE EN DROIT OHADA ET SUISSE

Comme nous l'avions dit en effet, l'arbitrage pour être qualifié d'international doit :

- soit prendre en considération la conception économique justifiant l'application des règles matérielles propres à cette institution. Il s'agit du critère de distinction objectif que le droit français utilise pour définir l'internationalité. Entrent en ligne de compte pour cet arbitrage, ceux (critères) qui mettent en jeu les intérêts du commerce international. Une telle conception de l'internationalité de l'arbitrage souffre, à notre avis, d'une lacune que le Prof. BUCHER souligne à bon droit en invoquant le terme d'imprécision. En effet, notre avis s'accorde à celui du Prof. A. BUCHER lorsqu'il affirmait que, cette notion formelle de l'arbitrage international "a l'avantage d'englober toutes les relations comportant un élément d'extranéité mais elle présente un inconvénient non négligeable du fait de son imprécision"30(*). Les deux systèmes que nous étudions n'entrant pas dans ce schéma nous ne nous appesantirons pas là-dessus.

- soit être rattaché à un ordre juridique étatique parmi ceux entrant en considération. C'est le lieu de relever que, la nationalité, le domicile ou le siège social des parties d'une part, le lieu de l'arbitrage ou les modalités du contrat d'autre part, jouent un rôle important. Le droit OHADA de l'arbitrage et le droit suisse de l'arbitrage international semblent adhérer à ce second critère de rattachement. Cependant, tandis que les éléments nécessaires à la définition de l'arbitrage international sont univoques dans le chapitre 12 LDIP, le lecteur averti ne pourra qu'induire du champ d'application de l'AU.A cette définition de la notion, vu que l'AU.A non seulement ne définit pas l'arbitrage international mieux, aucune spécification sur cet arbitrage n'est observable dans le texte. Le choix de l'unité du régime juridique arbitral dans cet espace ne facilite pas non plus la tâche, pour une telle définition.

A-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA

En droit communautaire OHADA, le problème de la définition de la notion d'arbitrage international se pose avec délicatesse. D'un côté nous avons constaté et souligné, qu'aucune définition de la notion ne figure aussi bien dans les dispositions du Traité que dans celles de l'AU.A. De l'autre côté, aucune référence textuelle n'est faite à l'arbitrage international par les rédacteurs du code OHADA. Cette double constatation peut laisser présager, l'hypothèse d'une volonté des promoteurs à fédérer les deux formes d'arbitrage à travers l'unique codification dans la seule norme juridique : l'AU.A. Si cette hypothèse s'avère plausible, quelle définition de l'arbitrage international peut-on tirer de la loi d'arbitrage OHADA ?

C'est à travers la détermination de la notion de siège du tribunal arbitral de l'art. 1er AU.A que nous parviendrons à mieux cerner la définition de l'internationalité de l'arbitrage dans le système OHADA. En effet, cet article dispose que "le présent Acte Uniforme à vocation à s'appliquer à tout arbitrage lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des États-Parties". De cette définition, il s'ensuit deux grandes hypothèses par rapport à l'internationalité de l'arbitrage.

- Si tous les éléments constitutifs d'un arbitrage (convention d'arbitrage, litige et instance procédurale) sont localisés dans un seul espace géographique - celui de l'OHADA - il n'y a là l'ombre d'aucun doute, cet arbitrage ne peut que recevoir la qualification d'arbitrage interne (donc à l'OHADA) et soumis à l'AU.A. A contrario, si les éléments sont tous localisés dans un seul espace tiers à l'OHADA, il ne peut que s'agir d'un arbitrage étranger non soumis au droit communautaire OHADA. Notons à ce niveau qu'il n'est point important de se soucier de savoir si l'arbitrage étranger est interne ou international. Le seul fait que les éléments soient tous spatialement circonscrits dans un espace hors OHADA suffit pour qualifier cet arbitrage d'arbitrage étranger. Il va s'en dire qu'en droit OHADA, l'arbitrage interne ne s'oppose pas à celui international mais plutôt à l'arbitrage étranger du point de vue du régime juridique.

- Si les éléments sont spatialement disséminés aussi bien dans l'espace OHADA que dans un Etat tiers, il y a forcement place pour une internationalité de l'arbitrage. Ce qui n'exclut pas dans tous les cas, en dépit de sa qualification, qu'il soit soumis aussi bien à l'AU.A qu'à une autre loi étrangère choisie. Comme on peut s'en douter, lorsque l'art. 1er AU.A dispose qu'il a vocation à s'appliquer lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des Etats-parties, par déduction la logique voudrait que, l'internationalité de l'arbitrage dans ce système soit sujette à la fixation du siège du tribunal arbitral hors espace. Seule la fixation du siège de l'arbitrage à l'étranger peut permettre de déterminer le caractère international de l'arbitrage en droit OHADA. On constate donc que, l'internationalité de l'arbitrage en droit OHADA ne répond ni aux critères objectifs utilisés par le droit français qui interpelle la mise en jeu des intérêts du commerce international, ni celui de la nationalité des parties, ni celui des modalités du contrat, non plus celui du domicile ou le siège social des parties comme en droit suisse. Le seul critère auquel on peut faire référence si on s'en tient au principe du rattachement à un ordre juridique étatique, c'est celui qui a trait au lieu de l'arbitrage. Cette technique de détermination du caractère international de l'arbitrage, du point de vue juridique nous parait peu consistante.

Le Prof. P. Meyer fait le même constat que nous lorsqu'il affirmait que, l'internationalité "n'est pas inéluctable si l'on définit la nationalité de l'arbitrage au moyen d'un seul critère qui n'a trait ni à la convention d'arbitrage, ni aux litiges soumis aux arbitres mais en se référant exclusivement au siège de l'arbitrage"31(*). C'est pourtant de cette manière que procède l'AU.A dans la compréhension que l'on peut avoir des dispositions de son art.1er. Encore faudrait-il savoir, quelle acception juridique le droit OHADA donne à la notion de siège de l'arbitrage afin de mieux définir la nationalité de l'arbitrage dans ce système, vu que tout le système repose sur la notion de siège de l'arbitrage. S'agit-il de l'acception territorialiste ou volontariste de la notion de siège ? Nous le verrons dans la section relative à la notion de siège. A ce stade, il importe de faire remarquer, comme le souligne à bon droit le Prof. G. KAUFMANN-KOHLER que, le siège de l'arbitrage, "avec l'évolution de la matière tend à devenir une fiction, sans lien matériel nécessaire avec le territoire sur lequel les opérations arbitrales se déroulent"32(*).

Par analogie, on peut rapprocher cette disposition du champ d'application de l'AU.A aux dispositions de l'art. 1er al. 2 de la loi-type CNUDCI33(*) qui propose entre autres critères de rattachement, celui par le lieu de l'arbitrage. Tout laisse croire que le codificateur de l'AU.A a repris la loi-type de la CNUDCI. Mais fort curieusement, le législateur OHADA dans la reprise des dispositions de ce texte a, semble t-il, oublié de prendre en compte les autres hypothèses classiques d'internationalité de la loi-type que sont : l'établissement dans des États différents des parties à la convention d'arbitrage, le lieu d'exécution d'une partie substantielle des obligations ou de l'objet du différent et enfin la stipulation que l'objet de la convention a des liens avec plus d'un pays.

En sus à tout ce développement, il conviendrait d'ajouter que, le fait que l'acte recourt à l'expression  "tout arbitrage" laisse entrevoir la possibilité d'interprétation selon laquelle, la loi d'arbitrage OHADA ne fait aucune restriction à l'arbitrage international. Le droit OHADA de l'arbitrage, bien qu'ayant vocation à s'appliquer à un sous ensemble d'États régionalement proches, a un caractère  international et s'applique indifféremment à l'arbitrage interne ainsi qu'à l'arbitrage international. Il va s'en conclure qu'en l'absence d'un texte spécifique sur l'arbitrage international dans le droit uniforme OHADA, le Traité OHADA et l'AU.A sont les seuls textes constitutifs aussi bien de l'arbitrage interne que de l'arbitrage international.

B-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT SUISSE

C'est déjà un fait que le législateur suisse ait consacré tout un chapitre entier dans la LDIP à l'arbitrage international. C'en est un autre, s'il ne s'est pas soucier de définir la notion dans la loi d'arbitrage. Cela va de soi car, la définition et, comme nous l'avions dit ci haut, d'une manière générale la conceptualisation doivent être l'oeuvre de la doctrine, voire de la jurisprudence. Ceci étant, en droit suisse de l'arbitrage international, c'est dans les dispositions du chapitre 12 portant le titre ARBITRAGE INTERNATIONAL de la loi fédérale sur le droit international privé que, le lecteur averti peut en inférer une.

Bien que ne donnant pas une définition matérielle de la notion d'arbitrage international, l'art. 176 al. 1 tout en définissant le champ d'application de la loi nous en donne la possibilité. Il dispose que "les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout arbitrage si le siège du tribunal arbitral se trouve en Suisse et si au moins l'une des parties n'avait, au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage, ni son domicile, ni sa résidence habituelle en Suisse". Il en résulte qu'un arbitrage est international en droit positif suisse, s'il répond à une double condition cumulative. Condition que résume si bien P. LALIVE lorsqu'il affirme que, l'application du chapitre 12 dépend de deux conditions : le caractère international de l'arbitrage, provoqué par l'extranéité d'une au moins des parties et la présence du siège du tribunal arbitral en Suisse. Passons donc en revue ces deux conditions. Par rapport au siège du tribunal arbitral qui doit être en Suisse, il convient de rappeler que, la référence au siège est un critère largement répandu et appliqué en droit comparé. Si la réglementation suisse de l'arbitrage international s'en est inspirée, c'est juste pour se conformer à la tendance majoritaire du droit de l'arbitrage qui admet le rattachement territorial. Nous reviendrons sur la définition du siège, son rôle et son importance dans le développement. Par ailleurs, le domicile ou la résidence des parties à la convention d'arbitrage que P. LAIVE qualifie de l'extranéité d'une au moins des parties est une hypothèse d'internationalité classique du contrat, récupérée par le droit de l'arbitrage international et reprise dans le chapitre 12 LDIP. A ce niveau, force est de constater que pour qu'un arbitrage reçoive la qualification d'arbitrage international selon les dispositions du chapitre 12 LDIP, il faut que l'une des parties à la convention ait son domicile ou sa résidence habituelle dans un Etat tiers lors de la conclusion de ladite convention. Ainsi, l'internationalité de l'arbitrage dépend du domicile ou du lieu de résidence à l'étranger de l'une au moins des parties au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage. Il en appert, pour être plus clair que, l'élément d'extranéité, pour emprunter les termes de P. LALIVE, doit exister au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage. L'art. 176 de la LDIP prescrit donc, pour la qualification internationale de l'arbitrage, de se reporter au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage. Les modifications ultérieures n'influent pas sur la qualification primaire. Ce qui veut dire qu'on peut déterminer dès la conclusion de la clause arbitrale à quelle législation, interne ou internationale, l'arbitrage sera soumis. Dans cette optique, deux points forts marquent l'extranéité de la situation. Il s'agit du moment  de la conclusion de la convention d'arbitrage et de la résidence ou domicile à l'étranger qui, joueront un rôle important dans la détermination du caractère international de l'arbitrage en droit suisse de l'arbitrage34(*). Notons toutefois que le chapitre 12 LDIP ne définit pas les notions de domicile ou de résidence, il faut s'en remettre pour cela à l'art. 20 LDIP.

Si la condition d'extranéité, conformément aux dispositions de l'art. 176, est remplie à l'égard d'une personne physique qui n'a ni son domicile ni sa résidence en Suisse, qu'en est-il en revanche des personnes morales ? Cette question soulève indubitablement la problématique de la fixation des limites à l'arbitrabilité que nous verrons dans la suite du développement. Mais avant, focalisons notre étude sur le questionnement qui porte sur la condition d'extranéité à l'égard des personnes morales. Autrement dit, quel qualificatif donner à un arbitrage dans lequel une des parties à la convention n'a, au moment où celle-ci est conclue, ni domicile ou résidence en Suisse mais juste un siège social, un établissement ou une succursale ?

Dans le silence du chapitre 12 LDIP sur la question, référence est faite aux dispositions de l'art. 21 LDIP. En effet, il est admis en droit positif suisse que le siège des sociétés vaut domicile et, il est réputé se trouver au lieu désigné par les statuts ou dans le contrat de société. A défaut, il se trouve au lieu où la société est administrée en fait. Sur la question de l'existence d'une succursale ou d'un établissement secondaire d'une société étrangère en Suisse, la doctrine estime que cette existence n'enlève pas à l'arbitrage son caractère international au sens de l'art.176 de la LDIP. Il en résulte que, l'arbitrage entre une société suisse et une société étrangère ayant une succursale ou un établissement en Suisse est international, donc relevant du chapitre 12, alors que celui contre la filiale suisse d'une société étrangère ne l'est pas et donc relèverait du concordat35(*).

En résumé nous constatons que, même si la qualification d'arbitrage international n'est ici envisagée qu'entre personnes physiques, il n'en demeure pas moins vrai que, l'arbitrage de DIP dans le cadre du chapitre 12 est aussi envisageable entre des personnes morales en particulier les sociétés. Pour les personnes morales de droit public, la seule preuve textuelle de ce que le chapitre 12 leur est applicable relève des dispositions de l'art. 177 al. 2 qui, pose le principe de la non-renonciation à l'arbitrabilité d'un litige dans lequel un Etat et ses dépendances sont impliqués. Notons enfin que, lorsque le critère prévu à l'art. 176 LDIP n'est pas rempli tout arbitrage siégeant en Suisse est régi par le concordat intercantonal sur l'arbitrage (CIA). N'envisageant pas d'analyser le concordat nous limiterons notre étude à ce niveau.

SECTION II -. LES DOMAINES DE L'ARBITRAGE DANS LES DEUX SYSTEMES

DROIT COMPARE

Art. 1 AU.A

"Le présent Acte Uniforme à vocation à s'appliquer à tout arbitrage lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des Etats-parties".

Art. 176 LDIP

1) "Les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout arbitrage si le siège du tribunal arbitral se trouve en Suisse et si au moins l'une des parties n'avait, au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage, ni son domicile, ni sa résidence habituelle en Suisse.

2) Les dispositions du présent chapitre ne s'appliquent pas lorsque les parties ont exclu par écrit son application et qu'elles sont convenues d'appliquer exclusivement les règles de la procédure cantonale en matière d'arbitrage.

3) Les parties en cause ou l'institution d'arbitrage désignée par elles ou, à défaut, les arbitres déterminent le siège du tribunal arbitral".

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Il est fort utile de préciser ici que, la loi de l'arbitrage OHADA comprend aussi bien le Traité OHADA dans ses dispositions relatives à l'arbitrage au Titre IV que, l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage (AU.A). Ceci étant, il est important de relever que les dispositions du chapitre 12 LDIP ne s'appliquent pas à tous les arbitrages, un domaine lui est en effet bien défini, celui de l'arbitrage international. Ce qui n'est pas le cas en doit OHADA dans la mesure où le Traité et l'AU.A s'appliquent d'une part indifféremment à l'arbitrage interne et à l'arbitrage international, d'autre part, nous verrons que, l'AU.A ne fait pas de distinction entre arbitrage civil et commercial ce qui constitue une spécificité, pour le reste, innovatrice en droit de l'arbitrage. L'étude des domaines ici envisagés ne saurait se faire que par la revue des critères d'applicabilité de l'arbitrage dans les deux systèmes.

§I -. LES CRITERES D'APPLICABILITE DE L'ARBITRAGE DANS LES DEUX SYSTEMES

Il s'agit d'analyser les différents champs d'application respectifs des deux lois d'arbitrage. Pour cela nous passerons en revue les critères d'application ratione loci et ratione materiae de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP.

A-. LES CHAMPS D'APPLICATION RATIONE LOCI DE L'AU.A ET DU CHAPITRE 12 LDIP

Définir le périmètre d'application ratione loci des deux lois d'arbitrage, revient à déterminer si un arbitrage se déroulant dans leur giron est susceptible de recevoir l'application de leurs dispositions respectives. Autrement dit dans quelles conditions, l'applicabilité des dispositions de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP est-elle observable ?

Evidemment, deux techniques de rattachement permettent de définir le champ d'application ratione loci d'une loi d'arbitrage. Le plus souvent, la loi d'arbitrage est rattachée soit par le biais de la volonté des parties (rattachement volontariste ou autonomiste) soit par celui du siège de l'arbitrage (rattachement territorialiste). Le rattachement par la volonté des parties que la convention de New York consacre dans ses dispositions, n'est pas celui adopté par les droits OHADA et suisse de l'arbitrage international. Ce rattachement par la volonté des parties, il faut le dire, est fréquent dans les législations modernes sur l'arbitrage. La loi-type de la CNUDCI s'en est accommodé, lorsqu'elle évoque la possibilité pour les parties de pouvoir choisir le lieu de l'arbitrage. On le retrouve également dans la réglementation anglaise de l'arbitrage qui se réfère à la notion de "juridical seat" pour désigner le siège de l'arbitrage "in this part «the seat of the arbitration» means the juridical seat of the arbitration designated [...]". Les deux lois auxquelles nous consacrons cette étude comparée, s'inscrivent plutôt dans la tendance du droit comparé qui, soumet le rattachement de la loi d'arbitrage par le biais du siège du tribunal arbitral. Elles admettent donc le rattachement territorialiste. Cependant, on ne saurait en conclure que les réglementations OHADA et suisse de l'arbitrage international sont en total déphasage avec le droit moderne de l'arbitrage.

a-. LE FONDEMENT DU RATTACHEMENT TERRITORIALISTE AVEC INCLUSION A L'OHADA ET LA SUISSE

En droit OHADA et en droit suisse de l'arbitrage international, ce sont les dispositions respectives des articles 1er AU.A et 176 LDIP qui nous permettent d'inférer la nature du rattachement de ces réglementations sur l'arbitrage. De la lecture du contenu de leurs dispositions, il ressort que, l'AU.A en droit OHADA ainsi que le chapitre 12 LDIP ne peuvent tous deux recevoir application que, si le siège du tribunal arbitral se trouve sur le territoire déterminé par chacun d'eux. En recourant au terme siège du tribunal arbitral, les deux lois font donc de l'existence d'un siège sur leur champ géographique respectif, une des conditions déterminantes pour entraîner chacune, l'application de leurs dispositions. C'est bien évidemment, le rattachement par le biais du siège ou rattachement territorialiste qui, semble ressortir de la compréhension qu'on peut avoir de la lecture des dispositions relatives au champ d'application de ces deux lois d'arbitrage. En effet, la référence faite dans ces textes à l'expression siège du tribunal arbitral plutôt que, siège de l'arbitrage en est la preuve. Ce choix n'est pas anodin dans la mesure où, avec l'expression siège du tribunal arbitral, le choix optionnel en faveur d'un rattachement qui ferait dépendre la procédure de l'arbitrage en faveur de la loi du lieu où il se déroule est sans équivocité. Par contre, si le législateur avait fait recours à l'expression siège de l'arbitrage, il s'en interpréterait que, le rattachement de la loi d'arbitrage est celui de la volonté des parties. D'où toute l'importance de la distinction entre les deux expressions. C'est donc sur la base de ce choix, (siège du tribunal arbitral) dans les dispositions des deux règlementations sur l'arbitrage que, nous-nous autorisons à conclure que, les législateurs OHADA et suisse de l'arbitrage international, préfèrent faire dépendre la procédure à la loi du lieu de l'arbitrage plutôt que de la rattacher à la volonté des parties. En conclusion, nous constatons que conformément aux autres ordres juridiques, les droits OHADA et suisse s'inscrivent dans la mouvance large et contemporaine du rattachement au siège du tribunal arbitral. Mais, ne nous jetons pas dans une telle conclusion hâtive et hasardeuse car, des nuances doivent pouvoir être faites dans l'interprétation de ces dispositions. Nuances que nous mettrons en évidence au travers du caractère exclusif ou impératif du rattachement selon les dispositions des deux réglementations que nous avons en présence.

b-. LE CARACTERE DU RATTACHEMENT : EXCLUSIF OU IMPERATIF

La principale divergence entre le rattachement territorialiste OHADA et suisse relève de ce que le rattachement par le siège présente en droit OHADA un caractère exclusif, alors qu'en droit suisse il est impératif.

Le caractère impératif du rattachement suppose que le choix par les parties du siège emporte élection implicite de la loi de l'arbitrage de ce lieu. Appliqué au contexte suisse, le rattachement impératif signifie simplement que, pour un arbitrage siégeant en Suisse, les parties ne peuvent exclure l'application de la loi d'arbitrage du siège, qu'est le chapitre 12 LDIP. On en induit que, le fait de la fixation du siège du tribunal arbitral en Suisse emporte de droit, l'application du chapitre 12 LDIP comme loi de l'arbitrage. Même en cas d'élection d'une autre loi de l'arbitrage par les parties, tout arbitrage ayant son siège en Suisse recevra l'application des dispositions impératives de la loi d'arbitrage qu'est le chapitre 12 LDIP. Les parties ne sauraient, par quelques dispositions que ce soient, déroger aux dispositions impératives de cette loi.

L'impérativité du rattachement découle donc de l'impossibilité de se soustraire aux dispositions du droit suisse de l'arbitrage entendu comme, l'ensemble des normes régissant l'arbitrage à l'intérieur de la Suisse. Cependant, l'une des particularités de cette loi suisse de l'arbitrage international, relève du fait qu'en dépit du caractère impératif du rattachement par le siège, les parties peuvent exclure l'application du chapitre 12 LDIP pour se soumettre à d'autres dispositions internes sur l'arbitrage. Il s'agit d'une exception prévue par le droit suisse dans les dispositions de l'art. 176 al. 2 LDIP. Selon les termes de cet article, le chapitre 12 ne s'appliquera pas si "les parties ont exclu par écrit son application et qu'elles sont convenues d'appliquer exclusivement les règles de la procédure cantonale en matière d'arbitrage". La loi suisse de l'arbitrage international offre ainsi aux parties, par l'élection d'une clause d'exclusion, la possibilité d'écarter l'application du chapitre 12 en déclarant se soumettre, soit aux règles de la procédure cantonal, soit au concordat. Cette exception, bien évidemment, n'affecte guère le caractère impératif du rattachement dans la mesure où, le choix de la loi cantonale ou du concordat comme loi de procédure, n'offre aucunement aux parties la possibilité de rattacher la procédure arbitrale à une autre loi étrangère ou, d'échapper à l'application des dispositions impératives de la loi suisse de l'arbitrage international.

Quid du droit OHADA de l'arbitrage ?

Le droit OHADA de l'arbitrage, contrairement au droit suisse ne procède pas par rattachement impératif. Bien qu'admettant le rattachement par le siège de l'arbitrage, le caractère du rattachement en droit OHADA de l'arbitrage en l'occurrence dans l'AU.A, est exclusif. Nous tirons bien évidemment cette conclusion de l'usage de l'expression "a vocation à s'appliquer". En recourant à cette expression, l'esprit du texte est tout autre dans la mesure où le caractère du rattachement par le biais du siège change du tout au tout. Il n'est plus ici impératif comme en droit suisse mais exclusif dans la mesure où comme le dit le texte il "a vocation à s'appliquer". Les conséquences liées à un tel rattachement s'induisent de ce que :

- d'une part, les parties ont la latitude d'exclure l'application de l'AU.A comme loi d'arbitrage et s'en remettre à une autre loi nationale, même si l'arbitrage siège dans cet espace. Réserve faite, toutefois, des dispositions impératives contenues dans l'AU.A qui s'avèrent être incontournables et auxquelles les parties ne peuvent déroger. Mais, il est fort utile de faire remarquer que, très peu de dispositions impératives figurent dans ce texte de réglementation sur l'arbitrage OHADA.

- d'autre part, si nous demeurons fidèles à la tendance contemporaine et dominante qui veut que, le siège du tribunal arbitral désigne plutôt le lien de l'arbitrage avec un ordre juridique, le caractère exclusif du rattachement nous amènera à comprendre que, l'AU.A ne recevra pas application d'office, toutes les fois que le siège du tribunal arbitral se situerait sur le territoire d'un Etat-partie. Le caractère supplétif de l'AU.A que nous tirons de l'usage de l'expression a vocation à s'appliquer, permettra de ce fait aux parties d'écarter son application. Ainsi, si la volonté des parties est d'écarter l'AU.A, cette volonté se doit d'être respectée en dépit du siège dans un Etat-partie. Autrement dit, l'AU.A ne s'appliquera comme loi de procédure ou loi de l'arbitrage que, si les parties en décident de son application. Il s'ensuivrait par hypothèses successives que si le siège du tribunal arbitral se trouvait sur le territoire d'un Etat-partie, alors les dispositions de l'AU.A seraient applicables à défaut de volonté contraire des parties. Si a contrario, le siège se trouvait sur le territoire d'un Etat tiers, les dispositions de l'AU.A ne seraient applicables qu'à condition que les parties l'aient désigné comme loi de l'arbitrage ou loi de procédure (lex arbitri).

Bref, un constat se dégage de la lecture minutieuse des dispositions relatives au champ d'application de ces deux lois d'arbitrage. On constate une communauté de cause par les deux lois, dans la détermination de leur champ d'application respectif. Cette communauté de cause que nous évoquions c'est le recours au siège, vu comme le for géographique, pour définir le rattachement des deux lois d'arbitrage. Nous venons en effet de conclure, conformément aux dispositions de l'art. 1er AU.A, qu'il ressort que l'élément de rattachement permettant l'application des dispositions du droit communautaire OHADA pour un arbitrage quel qu'il soit, c'est le siège du tribunal arbitral. Comme l'acte lui-même le stipule, toutes les dispositions qui lui sont relatives ne peuvent s'appliquer que si le siège du tribunal arbitral se trouve, géographiquement situé, sur le territoire de l'un des États membres à l'OHADA. Idem en droit suisse de l'arbitrage international où, la référence au siège du tribunal arbitral pour définir la potée territoriale du chapitre 12 LDIP n'est guère occultée dans la formulation des dispositions de l'art. 176 de cette loi. Le chapitre 12 LDIP à l'instar des conventions internationales, recoure ainsi donc au critère de localisation territoriale pour circonscrire son champ d'application. Il dispose que "si le siège du tribunal arbitral se trouve en Suisse" les dispositions du présent chapitre s'appliqueraient. Il va s'en dire donc que, le champ d'application ratione loci de l'AU.A et du chapitre 12 se défini par rapport à la notion de siège du tribunal arbitral. Notion qu'ils ne définissent pas tous deux. Que peut-on alors entendre par siège du tribunal arbitral ? Quelle importance révèle alors le siège dans un arbitrage de DIP et comment s'opérationnalise le choix de ce siège ? Voilà les questions nécessaires, auxquelles nous répondrons, à la bonne compréhension de la problématique du siège.

c-. LE SIEGE DE L'ARBITRAGE DE DIP

Le choix du siège du tribunal arbitral pour définir le champ d'application de la loi d'arbitrage pose bien évidemment la problématique de la définition de la notion de siège. Dans les deux lois, à la lecture des dispositions relatives à la notion de siège du tribunal arbitral, l'idée qu'on peut se faire de la définition, de l'importance et du rôle qu'il joue n'est pas la même. La notion de siège n'étant bien évidemment pas définie dans le corpus des deux lois, il faut s'en remettre pour cette définition à la doctrine et à la jurisprudence.

Le siège du tribunal arbitral renvoie à l'idée de l'espace physique, c'est-à-dire un lieu spatialement situé dans lequel le tribunal se regroupe pour ses audiences et délibérations. Partant de là, le siège répond beaucoup plus à la conception territorialiste qui donne au lieu géographique de l'arbitrage toute son importance contrairement à la conception volontariste. Du point de vue doctrinal, il est important de souligner que, deux conceptions juridiquement antinomiques s'opposent quant à la définition de cette notion. La conception territorialiste et celle volontariste.

La première veut que, l'arbitrage soit rattaché à l'ordre juridique et aux juridictions de son siège entendu comme lieu des opérations d'arbitrage. Pour les volontaristes par contre, le lieu physique où se déroulent les opérations ne revêt aucune importance. Seul l'environnement juridique choisi par les parties pour leur arbitrage constitue le fondement du rattachement de l'arbitrage. Le siège dans ce cas peut être indépendant du lieu géographique où se déroulent les opérations. Cette définition de la notion de siège a fait l'objet d'une acceptation quasi unanime de la jurisprudence et de la doctrine.

A la suite de ces deux conceptions, la question se pose de savoir dans quel canevas s'inscrivent réellement les droits OHADA et suisse de l'arbitrage international dans leur définition de la notion de siège et, quelles implications juridiques cela peut-il avoir du point de vue de la pratique ?

Lorsqu'on s'en tient à la formulation des dispositions de l'art. 176 LDIP, force est de constater que le chapitre 12 s'inscrit, dans la logique de la conception territorialiste de la notion de siège pour définir son champ d'application. Nous n'en voulons pour preuve que, l'utilisation du terme siège du tribunal arbitral qui renvoie à l'idée d'un for géographique. Si nous prenons pour vraie cette interprétation, il s'en dégage que, l'autonomie des parties à cette étape de la procédure est sans importance. Ce qui contraste d'avec le principe de base de l'arbitrage qui veut que les parties soient, autonomes tout au long de la procédure et par voie de conséquence, libres dans le choix du lieu de l'arbitrage. P. LALIVE interprétant aussi cette énonciation malencontreuse des dispositions du chapitre 12 LDIP formulait la contrariété suivante "il est regrettable que la LDIP, à la suite du concordat ... utilise la formule de siège du tribunal arbitral qui éveille l'idée d'une localisation ou d'un for géographiques. L'essentiel suggère t-il demeure toutefois que la notion de siège à laquelle recourt la loi soit bien celle que l'on vient de définir". La définition de la notion de siège que cet auteur propose est, à juste titre, celle du père du concordat suisse qui, fait sienne la conception volontariste en affirmant que, le siège ne saurait être vu que comme le lien juridique entre l'arbitrage et la juridiction de l'Etat choisi, autrement dit le lien juridique qui relie les parties à l'arbitrage et l'arbitre, d'une part, à un for judiciaire et à une loi étatique sur l'arbitrage, d'autre part . C'est bien évidemment cette conception du siège, qu'une jurisprudence en droit suisse du TF a confirmée dans un arrêt du 24 mars 1997 (ATF 24 mars 1997, Bull. ASA 1997, p.316, 329-330). Aujourd'hui, toute la doctrine est unanime sur cette dernière définition du siège de l'arbitrage qui permet de mettre un accent sur le lien de l'arbitrage avec un ordre juridique. Dès lors aucune ambiguïté n'est permise dans la définition de la notion de siège, que ce soit en droit OHADA ou en droit suisse de l'arbitrage international, même si l'expression siège du tribunal arbitral peut prêter à confusion.

La question de la définition de la notion de siège en droit OHADA est plus délicate. Si l'on s'en tient aux dispositions de l'art. 1er AU.A, le droit OHADA recourt aussi à l'expression siège du tribunal arbitral. Ce qui renvoie toujours à l'idée d'un for géographique duquel dépendrait la loi de l'arbitrage et par conséquent la loi procédurale. Mais, avec l'expression a vocation à s'appliquer la donne est tout autre. On en vient à l'interprétation selon laquelle, la notion de siège en droit OHADA revêt bien plus un caractère volontariste que territorialiste. Cela va de soi dans la mesure où, l'usage de l'expression a vocation à s'appliquer ne se révèle pas banal. Cette expression, met en évidence la volonté du législateur OHADA à faire prévaloir la volonté des parties dans le choix du droit applicable à la procédure. En concevant que, la volonté des parties à l'arbitrage en droit OHADA est primordiale au principe du rattachement impératif se pose dès lors la question de savoir, si c'est le principe général de l'autonomie qui gouverne l'arbitrage qui justifie le choix par le législateur OHADA, de faire prévaloir la volonté des parties à travers l'expression a vocation à s'appliquer dans la détermination implicite de la loi de l'arbitrage. Dans l'affirmative, l'acte uniforme rejoint ainsi toutes les autres législations qui estiment, conformément aux principes généraux que, l'arbitrage est l'affaire des parties qui, du fait de l'autonomie de leur volonté, peuvent l'organiser de fond en comble.

Par-dessus tout l'AU.A, il faut le reconnaître, réconforte sa position de faire prévaloir la volonté des parties dans la détermination de la lex arbitri dans les dispositions de l'art. 14 AU.A qui vient en appoint à l'art. 1er et qui dispose que "les parties peuvent directement ou par référence à un règlement d'arbitrage régler la procédure arbitrale, elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix". Au regard de la place réservée par l'arbitrage OHADA à la volonté des parties, nous pensons que l'option dans la définition de la notion de siège serait en faveur de la conception volontariste qui, permettrait aux parties de désigner par là même, le for judiciaire d'appui en vue de donner plus de sécurité à l'exécution effective de la sentence arbitrale. Cela étant, quelle importance revêt le siège dans la pratique arbitrale conformément aux dispositions des deux lois d'arbitrage ?

B-. IMPORTANCE ET CHOIX DU SIEGE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET SUISSE

Notons, d'entrée de jeu que le rattachement par le biais du siège ne revêt pas la même importance selon que nous nous l'envisageons sous le prisme de l'une ou l'autre des lois d'arbitrage que nous avons en présence. Le siège de l'arbitrage est important à plusieurs titres.

D'une part, lorsque le siège est défini sur la base du principe de territorialité il permet de déterminer la lex arbitri entendue comme loi procédurale avec pour corollaire la compétence des tribunaux du siège comme juridiction d'appui et de recours contre la sentence. La loi applicable à la procédure, dépendra alors du lieu ou le siège du tribunal arbitral est fixé. C'est la solution retenue par le droit suisse de l'arbitrage international. Par contre, lorsque le siège est défini sur la base du principe de l'autonomie, la loi applicable à la procédure relève du choix des parties et à défaut, soit du choix de l'institution désignée soit du choix du tribunal arbitral. Dans cette hypothèse, leur choix peut porter sur une loi applicable à la procédure autre que la loi du lieu de l'arbitrage. C'est la solution qui, semble-t-il, est retenue par le droit OHADA de l'arbitrage.

D'autre part, si dans la quasi majorité des systèmes il est aisément concevable que, la sentence rendue à l'issue de l'instruction de l'affaire doit mentionner le siège de l'arbitrage, cette sentence sera réputée, alors, avoir été rendue à cet endroit. Même si les opérations d'arbitrage ne s'y sont pas déroulées totalement ou partiellement. Dans cette logique, le siège permet de donner une nationalité à la sentence et ceci, dans la perspective de l'application des dispositions de la convention de New York sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères pour les besoins de son exécution. Dans les deux systèmes objet de la présente étude, ce principe n'est pas remis en cause.

Comment s'opérationnalise alors le choix du siège du tribunal arbitral ?

a-. LE CHOIX DU SIEGE

En vertu du principe de l'autonomie qui gouverne l'arbitrage, ce sont les parties qui fixent le siège de l'arbitrage. C'est en substance ce que nous rappelle l'al. 3 de l'art. 176 LDIP "les parties en cause ou l'institution d'arbitrage désignée par elles ou, à défaut, les arbitres déterminent le siège du tribunal arbitral". Le principe est ainsi, clairement établi par le chapitre 12 LDIP qui assujettit cette désignation à aucune forme particulière. Elle peut être expresse ou tacite, directe ou indirecte voire par référence à un règlement d'arbitrage.

Si le droit suisse de l'arbitrage international, ne fait pas économie des dispositions relatives au choix du siège du tribunal arbitral et par ricochet au principe de l'autonomie qui prélude à un tel choix, le droit OHADA sur cette question est parcimonieux voire muet. Il est regrettable que là dessus, le droit OHADA de l'arbitrage en l'occurrence l'AU.A ne se soit pas prononcé. Il y a donc, à notre avis, un vide juridique qu'il faille combler. Cependant, même si en droit OHADA on ne trouve aucune disposition relative à la fixation du siège par les parties, il faut reconnaître que, ce droit adhère au principe du libéralisme qui prélude à l'arbitrage. De ce fait, il est évident qu'en droit de l'arbitrage OHADA, la fixation du siège de l'arbitrage est d'abord l'oeuvre des parties. Le défaut de fixation par les parties emporte, tout comme en droit suisse, les deux possibilités évoquées par l'art. 176 al. 3 LDIP. Ce qui revient à dire, qu'en cas de non fixation par les parties elles-mêmes du siège, le choix peut s'opérationnaliser soit tacitement soit indirectement voire par référence.

L'autre préoccupation, porte sur l'impossibilité d'identification claire sur le choix du siège dans la clause d'arbitrage. Cette hypothèse fréquente en arbitrage ne doit pas être une entorse au déroulement de la procédure. Il faut le déterminer à un moment ou un autre. La question se pose alors de savoir où tenir l'arbitrage ?

Bien sûr que l'AUA et le chapitre 12 LDIP ne nous apportent, aucunement une réponse édifiante à cette question qui, n'est pas des moindres dans un arbitrage de DIP. Il n'y a pas une réponse simple ni universelle à cette question, à défaut de précision des deux réglementations sur l'arbitrage. Il faut s'en remettre à la pratique qui, à son tour recommande de s'en remettre à la recherche d'un certain nombre de critères devant préluder au choix par le tribunal arbitral de DIP, du siège de son arbitrage. Pour choisir le siège, la pratique suggère de tenir compte des critères essentielles telles que : la nationalité des parties en litige, la résidence habituelle des parties, l'endroit où elles exercent leurs activités. Certains facteurs politiques et économiques, la possibilité de recourir facilement à certaines compétences locales et de disposer de locaux convenables pour les audiences, ne manquent pas de poids dans la fixation du siège de l'arbitrage. Les facteurs relatifs à l'environnement juridique propre au lieu d'arbitrage considéré sont aussi déterminants et à prendre en compte puisque cet environnement exerce une influence à la fois sur le déroulement de l'arbitrage et sur la possibilité de faire exécuter ultérieurement la sentence.

Notons en guise de conclusion, pour parachever cette problématique de choix du siège qu'aujourd'hui, plus que jamais, avec le développement de l'Internet, la notion de siège de l'arbitrage tend à devenir une fiction sans lien matériel nécessaire avec le territoire sur lequel se déroulent les opérations arbitrales. On assiste, de ce fait, à l'absence de localisation matérielle des opérations procédurales. Cette procédure qui tend à se généraliser est d'autant plus spéciale que le droit applicable à l'instance ne dépend plus du lieu ou du siège de l'arbitrage. Dès lors on assiste à une certaine évolution ou du moins une révolution certaine de la notion du lieu de l'arbitrage.

Quelle implication ce choix peut-il avoir dans la pratique au sein des systèmes OHADA et suisse de l'arbitrage international ?

b-. IMPLICATION DU CHOIX DE SIEGE

L'évidence que les parties peuvent choisir, le lieu de leur arbitrage et par conséquent la loi procédurale ne se pose plus comme problématique en droit de l'arbitrage international.

Cependant, il est moins évident que l'arbitrage tout entier se déroule en ce lieu choisi car, la plupart des lois et règlements d'arbitrage, confirment la liberté des parties de fixer le lieu de l'arbitrage et le pouvoir des arbitres d'en mener les opérations ailleurs. On en déduit que, les réunions et les audiences de même que la délibération peuvent avoir lieu en un endroit autre que le lieu choisi par les parties. Par là, le choix du siège n'est autre chose que l'élection du droit applicable à l'arbitrage. La seule implication que peut revêtir, le choix par les parties du lieu de l'arbitrage peut se lire dans l'identification de la sentence arbitrale pour les besoins de son exécution. En effet le choix par les parties du siège donne à la sentence la nationalité du lieu choisi par celles-ci. Un auteur fait observer sur ce sujet que "la désignation du lieu de l'arbitrage a notamment pour signification que la sentence sera réputée rendue en ce lieu. Que les audiences s'y soient effectivement déroulées ou que la sentence y ait effectivement été prononcée est sans incidence".

En conclusion, nous ne manquerons pas de souligner que, c'est la conception volontariste du siège qui est quasi unanimement admise par la doctrine et la jurisprudence des autres Etats. Même si le siège a une connotation territorialiste dans l'espace OHADA et en suisse, on ne saurait l'appréhender que comme le lien juridique entre l'arbitrage et la juridiction choisie fût elle par la volonté des parties ou à défaut par les arbitres ou l'institution d'arbitrage.

En dehors du critère de rattachement qu'est le siège du tribunal arbitral, l'AU.A en droit OHADA innove du point de vue du champ d'application ratione materiae par l'absence de distinction entre arbitrage civil et commercial.

C-. LE CHAMP D'APPLICATION RATIONE MATERIAE DE L'AU.A ET DU CHAPITRE 12 LDIP

S'il est une certitude dans l'historique du développement de l'arbitrage, c'est que le droit de l'arbitrage international s'est surtout amplifié avec l'essor des échanges commerciaux. De ce fait, la nécessité que de nouvelles règles matérielles et/ou conflictuelles soient adoptées par les législations internes pour réglementer ce domaine particulier du droit s'est faite ressentie. Le constat du prof. G. KAUFMANN-KOHLER le résume si bien, lorsqu'elle affirmait que "le commerce international franchit par définition les frontières et dépasse les ordres juridiques nationaux. Il n'est dès lors guère surprenant que ses opérateurs aient ressenti le besoin d'une justice à la mesure de leurs activités inter ou transnationales, une justice calquée sur leur mode d'opération, déconnectée des contingences nationales". Il est donc clair que le droit de l'arbitrage international à connu son essor avec le développement du commerce international. Sur cette base, la logique voudrait que l'on s'attende à ce que, les différentes législations réglementant la matière, déterminent la nature de l'arbitrage auquel elles s'appliquent. Mais, le constat qui se dégage de la lecture des différents textes régissant l'arbitrage international est que, non seulement ils ne définissent pas le concept d'arbitrage, non plus ils ne donnent aucune spécification sur la nature de l'arbitrage auquel leurs dispositions sont censées s'appliquer. Le résultat, c'est la propension quasi généralisée des législations modernes sur l'arbitrage à ne pas déterminer le champ d'application ratione materiae de la loi. Ce qui est le cas de l'AU.A en droit OHADA et du chapitre 12 LDIP en droit suisse de l'arbitrage international. Ce choix législatif comme nous le verrons dans la suite du développement est loin d'être anodin.

Ceci étant, il est une évidence à laquelle on doit se rallier, c'est que l'AU.A et le chapitre 12 LDIP ne s'appliquent qu'aux arbitrages. Par contre, il est moins évident que ces deux textes légaux nous fournissent, dans leurs dispositions, les définitions conceptuelles des notions d'arbitrage civil et commercial. Nous ne les définirons pas non plus ici. Notre souci par contre, portera sur la question de savoir à quelle sorte d'arbitrage ces deux législations s'appliquent. Autrement formulé, arbitrage civil et arbitrage commercial peuvent-ils se prévaloir indifféremment des textes susvisés comme fondement juridique ?

a-. PRINCIPE

La définition du champ d'application ratione materiae d'une loi d'arbitrage, repose sur la détermination de la portée de cette loi par rapport aux différentes catégories d'arbitrage auxquelles elle peut s'appliquer. En droit comparé, c'est la convention de Genève dite encore, convention européenne de 1961 qui, nous donne l'exemple le plus parlant d'une réglementation d'arbitrage définissant sans équivocité son champ d'application ratione materiae. Ce texte dispose qu'il "s'applique ...aux conventions d'arbitrage conclues, pour le règlement de litiges nés ou à naître d'opérations de commerce international [...]". Ce qui n'est pas le cas de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP. En effet, les deux textes que nous étudions ne faisant pas, dans leurs dispositions, des particularités juridiques applicables à tel ou tel autre catégorie d'arbitrage, la question de leur champ d'application ratione materiae manque d'intérêt à notre avis.

Si nous partons du postulat que, le champ d'application ratione materiae d'une loi d'arbitrage se détermine par rapport à la définition dans les dispositifs de cette loi, de la nature de l'arbitrage auquel elle se rapporte, logiquement, c'est de la définition de la notion de commercialité de l'arbitrage dans la loi, que devrait pouvoir s'induire, l'applicabilité de cette législation à un arbitrage commercial. Ainsi, la définition notionnelle du concept de commercialité, dans la loi d'arbitrage, laisserait conjecturer de l'application des dispositions de cette loi aux arbitrages commerciaux. Or, à ce niveau, aussi bien l'AU.A que le chapitre 12 LDIP ne nous édifient point sur la possibilité de la définir. Pourtant nous ne conclurons pas que leur applicabilité à un arbitrage commercial est sujette à caution. Le constat est invariable pour toutes les autres législations modernes sur l'arbitrage qui ne définissent pas, non plus, la notion de commercialité de l'arbitrage, pas plus qu'elles ne tiennent compte de la distinction entre arbitrage civil et commercial. Dans le système OHADA, on ne retrouve point dans l'AU.A, aucune trace de la définition de la notion d'arbitrage commercial. Pourtant, ce texte procédural est, semble-t-il, adopté pour être appliqué aux différends relatifs aux opérations commerciales voire aux différends relatifs aux actes de la vie civile arbitrables. Sur ce point, même si les dispositions de l'AU.A ne nous appuient pas dans notre constat, la doctrine OHADA fait observer que, l'absence de distinction entre arbitrage civil et commercial est une originalité innovatrice tout comme l'absence de marge entre arbitrage interne et arbitrage international du point de vue juridique. Le Prof. P. MEYER le constate si bien et nous fait remarquer que l'AU.A en droit OHADA ne limite pas son champ d'application aux seuls arbitrages commerciaux. Pour ce fait, il en déduit que "toute définition substantielle de la commercialité était absolument inutile dans cet acte. C'est pourquoi conclut-il on ne trouve donc logiquement aucune définition de l'arbitrage commercial dans le droit uniforme sur l'arbitrage". En clair, il est aisément relevable que si la loi d'arbitrage ne circonscrit pas son champ d'application à une catégorie d'arbitrage, la définition notionnelle de la commercialité de l'arbitrage s'avère inutile mais pas inopérante.

En effet, elle n'est pas inopérante dans la mesure où, si le litige soumis à la compétence du tribunal arbitral à un caractère commercial, il s'agira bien évidemment d'un arbitrage commercial. Si par contre, le litige n'a aucun rapport à la commercialité, on parlera d'arbitrage civil. D'où toute l'importante de la démarcation entre les deux formes d'arbitrage en dépit de la non-prise en compte de cette délimitation par les lois d'arbitrage. Sur ce, tout le système de la détermination de la portée en raison de la matière, repose donc sur la définition du rapport à la commercialité du litige soumis à l'arbitrage. Dans ce cas, comment peut-on alors définir la commercialité de l'arbitrage en l'absence, dans une loi d'arbitrage, d'une différenciation clairement formalisée entre arbitrage civil et commercial ?

Pour définir la commercialité d'un arbitrage nous-nous référerons soit au critère de la loi-type de la CNUDCI, soit au critère du droit français.

En droit français, est considéré comme commercial, tout arbitrage international portant sur un litige né à l'occasion d'une opération économique internationale mettant en cause les intérêts du commerce international. Cette définition notionnelle de la commercialité de l'arbitrage, (qui n'a rien à voir avec la définition de l'internationalité de l'arbitrage selon le critère de la conception économique du droit français de l'internationalité) est déterminante dans la définition de la commercialité du litige. Entrent donc en ligne de compte, pour un arbitrage commercial international, les litiges qui mettent en jeu les intérêts du commerce international et qui, se réalisent dans le cadre d'une opération économique international. Sur cette base, l'hypothèse d'une commercialité de l'arbitrage en droit OHADA et suisse reposerait sur la prise en compte des éléments matériels qui exigent l'extranéité d'un litige mettant en jeu les intérêts du commerce international.

Une autre définition de la commercialité de l'arbitrage et non pas des moindres, nous est donnée par la loi-type de la CNUDCI. La loi-type nous propose une définition du caractère commercial de l'arbitrage international dans sa note sub-paginale. Elle nous suggère, de se référer à un sens plus large afin de désigner les questions issues de toute relation à caractère commercial, contractuelle ou non contractuelle afin de mieux définir le terme commercial. Ce faisant, cette réglementation nous fournit le model d'une législation arbitrale dont le champ d'application ratione materiae est clairement défini. En disposant selon l'art. 1er al. 1 que "la présente loi s'applique à l'arbitrage commercial international [...]", toute équivocité sur le champ d'application ratione materiae de la loi-type est levée. De la compréhension des dispositions ce texte, nous en concluons que la loi-type ne peut s'appliquer qu'à un arbitrage commercial international. C'est aussi le cas, comme nous l'avions dit précédemment, de la convention de Genève sur l'arbitrage commercial international.

b-. ABSENCE DE DEMARCATION ENTRE ARBITRAGE CIVIL ET COMMERCIAL

Le problème de la portée ratione materiae de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP se pose avec moins d'évidence que cela ne parait. En effet, lorsqu'on sait que, l'AU.A et le chapitre 12 LDIP ne donnent aucune définition de la notion d'arbitrage et ne déterminent guère s'ils sont applicables à un arbitrage civil ou commercial, peut-on logiquement en inférer qu'ils n'opèrent pas de distinction entre un arbitrage civil qui serait soumis à un régime juridique particulier et un arbitrage commercial lui-même soumis à un régime tout autre ?

Par voie de conséquence, les textes que nous avons en présence auraient-ils une large portée en raison de la matière sans considération de distinction entre arbitrage civil et commercial, le cas échéant, celle-ci serait-elle inutile ?

Évidemment nous ne retrouvons dans la formulation des dispositions des deux textes de loi, aucune définition de la notion d'arbitrage commercial, pas plus qu'elles ne font aucune référence à la commercialité de l'arbitrage. Toutes deux, comme on peut le constater, font l'unanimité sur l'unité d'application du contenu respectif de leurs dispositions à toute sorte d'arbitrage. Il en résulte le fait que, leurs dispositions sont par conséquent applicables indifféremment à un arbitrage civil comme à un arbitrage commercial. Pour preuve, le droit OHADA au travers des dispositions de son art. 1er est formel là-dessus il à vocation à s'appliquer à tout arbitrage. Idoine en droit suisse où l'art. 176 al. 1er dispose que les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout arbitrage. Une telle formulation ne peut que nous conduire à envisager l'hypothèse d'une large portée ratione materiae de leurs dispositions. Si cette hypothèse s'avère plausible, nous en conclurons que, la détermination du champ d'application ratione materiae des deux textes se révèle n'avoir plus aujourd'hui une importance significative, au regard du fait que, arbitrage civil et arbitrage commercial ne s'opposent plus du point de vue du régime juridique dans les corpus des textes modernes sur l'arbitrage. Dès lors, cette absence de différenciation du point de vue juridique nous conduit à faire remarquer que, la distinction entre les deux formes d'arbitrage, dans une réglementation sur l'arbitrage, ne remplit plus aucune fonction essentielle et est d'un archaïsme révolu au regard de la pratique moderne du droit de l'arbitrage international.

Deux constats nous permettent de soutenir que, cette absence de distinction entre les deux formes d'arbitrage n'est plus à l'ordre du jour, du moins que son inutilité dans les textes de loi sur l'arbitrage se justifie.

- Dans les deux systèmes OHADA et suisse, on y trouve dans les sources juridiques de l'arbitrage, non seulement les dispositions légales et réglementaires internes relatives à l'arbitrage mais aussi, les conventions internationales à l'instar de la convention de New York du 10 juin 1958, de la convention de Genève du 21 avril 1961 sur l'arbitrage commercial international, de la loi-type de la CNUDCI du 21 juin 1985. Tous ces textes faisant référence à l'arbitrage commercial viennent en appoint aux textes ici considérés. Les seize États-Parties au Traité OHADA d'une part et la Suisse d'autre part sont tous signataires de la majorité de ces conventions internationales sur l'arbitrage sus citées. Leur adhésion, à ces instruments internationaux du commerce international, témoigne de ce que les dispositions internes réglementant l'arbitrage n'ont véritablement plus besoin de spécifications sur la commercialité de l'arbitrage avant d'être considérées comme tel.

- Une précision non moins anodine, qui porte sur l'usage de l'expression tout arbitrage dans les articles 1er AU.A et 176 LDIP, ne saurait passer inaperçue pour nous convaincre de l'inutilité de cette distinction entre arbitrage civil et commercial. À notre avis, le recours à l'expression tout arbitrage emporte l'interprétation selon laquelle, les droits OHADA de l'arbitrage et suisse de l'arbitrage international, n'ont pas porté une limite au champ d'application respectif de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP. Ce qui explique la large portée du champ d'application ratione materiae de ces deux lois d'arbitrage. Il va s'en dire que, arbitrage civil et arbitrage commercial peuvent se prévaloir indifféremment de l'application de chacune des deux lois d'arbitrage.

Par ailleurs, il est fort utile de souligner que, même si nous soutenons que la distinction n'a plus guère son importance, le caractère civil ou commercial de la relation ayant suscité le différent, garde tout son intérêt sur le plan du droit applicable au fond. Ainsi, si le litige a un caractère commercial, l'arbitre appliquera les normes particulières du droit commercial. Sur cette question, ce ne sont pas les dispositions de l'art. 15 AU.A qui nous contrediraient. En visant l'application "le cas échéant des usages du commerce international" le codificateur entend signifier que, la relation ayant suscité le litige doit pouvoir s'inscrire dans le registre du commerce international. En droit suisse, c'est l'art. 187 al. 1 LDIP qui nous convainc de ce que la distinction garde toute son importance sur le plan du droit applicable au fond. Cet article pose le principe sous une forme moins évidente "le tribunal arbitral statue selon les règles de droit ... avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits". Si la cause présente des liens plus étroits avec le commerce international, l'arbitre appliquera les normes de cette discipline, le droit commercial. Ceci pose la problématique du droit applicable au fond du litige que nous analyserons dans les sections suivantes.

En résumé, étant entendu qu'il ne nous est pas possible d'inférer des dispositions respectives des deux textes leur champ d'application ratione materiae nous pouvons en conclure que, l'AU.A en droit OHADA et le chapitre 12 LDIP s'appliquent indifféremment à l'arbitrage commercial qu'à l'arbitrage civil. Cependant, s'il est clair que le chapitre 12 LDIP n'est conçu pour être appliqué qu'à l'arbitrage international, l'évidence ne parait pas univoque pour l'AU.A qui semble-t-il est défini pour être appliqué aussi bien à l'arbitrage interne et à l'arbitrage international. L'AU.A ne fait donc aucune distinction entre les deux formes d'arbitrage, les soumettant au même régime juridique. Ce choix, loin d'être une ambiguïté juridique, est une option des promoteurs qui ne doit aucunement être vue comme un obstacle à ce que les deux formes d'arbitrage se déroulent sous les auspices du même et unique texte normatif : l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage OHADA.

§II-. PRINCIPE D'AUTONOMIE ET DE VALIDITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP

DROIT COMPARE

Art. 4 al. 1- 2 AU.A

"La convention d'arbitrage est indépendante du contrat principal.

Sa validité n'est pas affectée par la nullité de ce contrat et elle est appréciée d'après la commune volonté des parties, sans référence nécessaire à un droit étatique".

Art. 178 al. 3 LDIP

"La validité d'une convention d'arbitrage ne peut pas être contestée pour le motif que le contrat principal ne serait pas valable ou que la convention d'arbitrage concernerait un litige non encore né".

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Il convient, tout d'abord, de faire un petit rappel du principe d'autonomie dont bénéficie toute convention d'arbitrage, qui plus est, une convention d'arbitrage de DIP. La convention d'arbitrage internationale (clause compromissoire ou compromis) constitue le fondement de la compétence du tribunal arbitral qui, ne peut exercer sa mission qu'en vertu d'une convention valable. En effet, le principe du grand libéralisme qui régit l'arbitrage international veut que, la convention d'arbitrage international soit autonome par rapport au contrat principal dont la nullité ou la résolution est sans effet sur elle. Sa validité doit être appréciée séparément de celle du rapport de droit auquel elle se rapporte.

Conclusion, la clause arbitrale peut survivre à la nullité, la résolution, la résiliation ou la novation du contrat principal sans en être affectée. C'est tout le sens qu'a voulu donner le législateur OHADA aux dispositions de l'art 4 al. 1 AU.A. Toutes les législations modernes sur l'arbitrage font expressément référence à ce principe dit de la séparabilité ou separability (pour emprunter le terme anglo-saxon) de la convention d'arbitrage. Si la formulation de ce principe est expresse en droit OHADA "la convention d'arbitrage est indépendante du contrat principal" (art. 4 al. 1), elle l'est moins en droit suisse dans le chapitre 12 LDIP. On ne retrouve aucune trace de l'énonciation expresse de ce principe de séparabilité dans les dispositions du chapitre 12 LDIP. Cependant, on ne saurait en conclure que le droit suisse de l'arbitrage international n'envisage pas l'autonomie de la convention d'arbitrage de DIP. En effet, lorsque l'art. 178 en son al. 3 dispose que sa validité "ne peut pas être contestée pour le motif que le contrat principal ne serait pas valable [...]", il pose le principe de la validité de la convention d'arbitrage. Consacrant par là même, celui de l'autonomie de la clause arbitrale. Partant de ce principe, la validité de toute convention d'arbitrage international dépend de règles spécifiques différentes de celles qui s'appliquent à la validité du contrat principal. A contrario, la non-validité du contrat principal contenant la convention n'influe pas sur celle-ci. C'est un autre principe traditionnel du droit de l'arbitrage que l'on retrouve en droit comparé. Les deux textes légaux, au-delà du principe de séparabilité développé par la jurisprudence moderne, soulignent tous le fait que, les conditions de validité d'une convention de DIP ne doivent pas être tributaires de la validité du contrat principal. Notons que, le droit OHADA soumet simplement la validité de toute convention d'arbitrage au consensualisme en ne la soumettant pas nécessairement, ni à une quelconque loi étatique, ni à la loi qui la gouverne.

Évidemment, l'appréciation de la portée de ce principe ne saurait se faire qu'en relation avec celui de la compétence-compétence qui donne pouvoir à l'arbitre de statuer sur sa propre compétence. En d'autres termes, l'autonomie de la convention d'arbitrage signifie que, si le tribunal arbitral constate que le contrat principal est invalide, sa compétence lui est toujours réservée. Il peut fort de cela statuer lui-même sur la nullité du contrat principal. Parlant de la validité d'une convention d'arbitrage de DIP, il importe de noter que toute convention d'arbitrage international doit répondre à deux conditions essentielles de validité : la validité matérielle et la validité formelle que nous essayerons d'analyser dans la suite du développement et à la lumière des deux lois d'arbitrage.

A-. LA VALIDITE MATERIELLE DE LA CONVENTION

En matière d'arbitrage international, la question de la validité matérielle de la convention d'arbitrage s'apprécie au regard de sa validité objective (arbitrabilité) 36(*) et de sa validité subjective (la validité quand au fond). Eu égard à ces deux conditions sine qua non de validité matérielle, la question à laquelle nous essayerons de donner une réponse est celle de savoir, comment dans les deux systèmes cette validité matérielle de la convention s'apprécient-elles ?

1-. LA VALIDITE OBJECTIVE DE LA CONVENTION ARBITRALE DE DIP

a.- ARBITRABILITE, LE FACE A FACE DE LA LIBRE DISPOSITION DES DROITS ET DE LA PATRIMONIALITE DE LA CAUSE

DROIT COMPARE

Art. 2 al. 1 AU.A

"Toute personne physique ou morale peut recourir à l'arbitrage sur les droits dont elle a la libre disposition".

Art. 177 al. 1 LDIP

"Toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'un arbitrage".

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La compétence du tribunal arbitral, nous le savons, est tributaire de la validité de la convention d'arbitrage liant les parties au contrat. En effet, un tribunal arbitral de DIP n'est fondé à exercer sa mission que si la convention d'arbitrage qui lui donne sa compétence est elle-même valable. Pour ce faire, la validité de la convention ne peut s'apprécier qu'au regard d'un certain nombre de règles dont l'arbitrabilité du litige.

Pour qu'un litige soit arbitrable, il est important de déterminer si son objet peut être soumis à un arbitrage, c'est tout le sens de la notion de l'arbitrabilité du litige. En effet, l'arbitrabilité, si on peut se permettre d'en formuler une définition, est la possibilité de faire trancher un litige par l'arbitrage. On parle d'arbitrabilité lorsque se pose la question de savoir si le litige peut être tranché par voie d'arbitrage (juridictionnelle) ou relever de la compétence des juridictions étatiques (voie judiciaire). Ceci étant, l'appréciation du concept d'arbitrabilité varie d'un système à un autre selon qu'il s'agit de la libre disponibilité des droits en cause, comme le propose les droits OHADA et français ou, de la patrimonialité de la cause dont les droits suisse et allemand se sont fait l'écho.

D'une manière concrète, le concept d'arbitrabilité en droit OHADA, idem en droit français, repose sur la disponibilité des droits, celle-ci se référant à l'aptitude qu'à son titulaire de pouvoir en être le maître absolu, de l'aliéner ou même d'y renoncer. Ces deux notions (soulignées), il faut le dire, sont liées et on les retrouve en filigrane dans la formulation que donne l'art. 2 al. 1 de l'AU.A de la notion de l'arbitrabilité. On retrouve cette même définition de la notion de l'arbitrabilité en droit français, lorsqu'il énonce dans les dispositions de son code civil, le principe selon lequel les droits, dont les parties ont la libre disposition, sont arbitrables37(*). Il est donc clair que, le législateur OHADA a repris in extenso le contenu du texte de loi français pour définir l'arbitrabilité. Ce choix législatif en faveur de l'option française dans la définition de la notion, n'est-il pas hasardeux voire périlleux pour ce droit qui se veut avant tout harmonisateur ?

En effet, l'interprétation juridique qui peut résulter de la libre disponibilité des droits telle qu'énoncée en droit OHADA de l'arbitrage est la suivante :

Au sein d'un système juridique, il existe plusieurs degrés de disponibilité de droit. Il en appert donc que, le droit peut se révéler indisponible tant qu'il est à l'état de droit éventuel. Dans ce cas, il est impossible de recourir à l'arbitrage. Par contre, une telle possibilité s'ouvre lorsque le droit est acquis, autrement dit, lorsqu'il s'agit d'un droit disponible à l'état de droit déjà né et actuel.

Au regard de cette interprétation et d'une manière générale, sont exclus de l'arbitrage, selon les termes du droit OHADA, les litiges relatifs au droit virtuel incertain, dont la potentialité à pouvoir en être le titulaire est hypothétique. Aussi, les droits relatifs à l'état et à la capacité des personnes et, en l'occurrence ceux qui portent sur les droits hors du commerce juridique sont exclus de la possibilité d'être soumis à un arbitrage. Enfin, ceux dont l'exercice met en cause un intérêt public et ceux auxquels la loi interdit de renoncer, sont aussi exclus de la possibilité de faire l'objet d'un arbitrage. Il se trouve, cependant, qu'il est important pour l'appréciation de l'arbitrabilité qu'on tienne compte de la législation de chaque pays, or le constat s'impose sur la variabilité des droits disponibles d'un système juridique à un autre. Il en résulte le fait qu'on peut assister à une divergence dans l'appréciation du concept d'arbitrabilité même au sein du système dit unifié de l'OHADA, qui en réalité n'en est pas un.

Ceci étant, nous savons que, dans une convention d'arbitrage de DIP, l'appréciation de la problématique juridique de la libre disponibilité des droits ne peut se faire que d'après la loi régissant le droit concerné, c'est-à-dire pour être plus précis, la loi applicable au fond du litige (lex causae). Si, comme nous venons de le relever, l'application du concept de libre disposition des droits subjectifs peut varier, la probabilité d'assister à l'invalidité de la convention d'arbitrage au motif que la loi applicable au fond du litige tient des droits en question pour indisponibles et donc non arbitrables, n'est pas faible. Cet état de chose pose, bien évidemment, toute la problématique sur le questionnement de l'opportunité de la prise en compte de la notion de libre disponibilité des droits dans la loi d'arbitrage, lorsqu'il s'agit de fixer les limites de l'arbitrabilité. Alors, se pose la question de savoir s'il n'est pas préférable à la législation OHADA de recourir plutôt à une autre notion moins fuyante, celle de la patrimonialité de la cause comme en droit suisse, plutôt qu'à celle contraignante et moins certaine de la libre disponibilité des droits ?

Afin d'éviter cet écueil les législateurs suisse et allemand ont préféré à la notion fuyante de libre disponibilité une autre plus concrète, réaliste et plus large celle de la patrimonialité de la cause. Contrairement au critère de la libre disponibilité des droits tel que prévu par l'AU.A en droit OHADA, le chapitre 12 LDIP se réfère plutôt à la nature patrimoniale de la cause pour définir l'arbitrabilité du litige dans ce système. Rappelons à toutes fins utiles, que l'appréciation des critères de l'arbitrabilité en droit suisse varie selon que le régime juridique applicable à l'arbitrage relève du concordat ou du chapitre 12 LDIP. Tout comme le droit français et le droit OHADA, le concordat suisse s'appesantit sur la libre disponibilité des droits pour fixer les limites à l'arbitrabilité du litige. Mais, le chapitre 12 LDIP marque une rupture dans l'appréciation de l'arbitrabilité pour innover avec la prise en compte du caractère patrimonial du litige. Ce qui est à notre avis, un critère plus adapté au regard du recours à la loi applicable au fond qui peut rendre le droit en question indisponible complexifiant l'arbitrabilité du litige. Vu le succès qu'a connu la prise en compte de la patrimonialité de la cause dans la définition de l'arbitrabilité, nous espérons que dans sa nouvelle version, le concordat intercantonal fera sienne cette définition afin d'harmoniser la législation suisse de l'arbitrage sur la question des limites de l'arbitrabilité. La pertinence de la prise en compte de la patrimonialité de la cause, dans l'appréciation de l'arbitrabilité, a fait écho au sein de la doctrine arbitrale au point où, certains commentateurs du nouveau droit OHADA de l'arbitrage se sont montrés réservés, sur l'utilisation d'un concept aussi fuyant et relatif qu'est celui de la disponibilité des droits comme critère d'arbitrabilité dans une législation uniforme.

En effet, dans son commentaire sur l'arbitrabilité du litige P. Meyer disait à bon droit "il n'empêche qu'on peut penser qu'il eut été préférable de recourir à une notion moins fuyante qui ne souffrirait pas d'interprétations différenciées selon les droits qui pourraient être utilisés pour la concrétiser. Le critère retenu par la loi fédérale suisse, qui retient la patrimonialité de la cause pour définir l'arbitrabilité, peut paraître, à cet égard, plus adéquat spécialement dans une législation uniforme"38(*). Le texte de l'art. 177 al. 1 LDIP dispose que "toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'un arbitrage". La loi ne définit pas par contre, ce qu'il faut comprendre par patrimonialité de la cause. Dans l'entendement du TF suisse, la patrimonialité de la cause recouvre "toutes les prétentions qui ont une valeur pécuniaire pour les parties, à titre d'actif ou de passif, autrement dit les droits qui présentent pour l'une au moins de celles-ci, un intérêt pouvant être apprécié en argent"39(*). Il va s'en dire logiquement par déduction que, toutes les causes de nature extrapatrimoniale sont par essence inarbitrables. Ainsi, seront exclues de l'arbitrage en droit suisse, comme le liste si bien A.BUCHER "les droits portant sur l'état civil et ceux touchant essentiellement aux relations personnelles entre les membres d'une famille. Sont également exclus de l'arbitrage certains litiges qui, opposant l'Etat à l'individu, n'ont une valeur patrimoniale que pour ce dernier, tel le contentieux administratif de l'inscription au registre du commerce, celui relatif aux demandes des brevets d'invention, de dépôts de dessins et modèles et d'enregistrement de marques ou celui concernant les mesures prises par les autorités à l'égard de certaines conventions cartellaires"40(*). Naturellement, on ne saurait exclure l'impossibilité de soumettre à l'arbitrage, selon la loi d'arbitrage suisse, les droits dont l'exercice met en cause un intérêt public et ceux auxquels la loi interdit de renoncer.

Il importe de relever que, l'intérêt de la distinction, entre la libre disponibilité et la patrimonialité de la cause, porte sur le fait qu'avec le critère de la patrimonialité l'option est faite pour l'application d'une règle matérielle dans la définition de l'arbitrabilité. Cette règle "a l'avantage de la simplicité et de l'uniformité de la solution, car elle ne fait pas dépendre l'arbitrabilité du droit applicable au fond"41(*). Contrastant, de ce fait, le critère de libre disponibilité qui exige la démarche conflictuelle pour déterminer le droit applicable à l'arbitrabilité du litige.

Du point de vue du droit comparé, la ZPO42(*) rejoint la législation suisse, elle dispose en son § 1030 que: "toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'une convention d'arbitrage." En résumé nous pouvons conclure que, le critère de la nature patrimoniale choisi par le législateur suisse à l'art.177 al.1 prend en compte l'arbitrabilité dans son acception la plus large que celui privilégié par le droit OHADA et français de l'arbitrage international43(*).

Toutes les matières ne sont pas arbitrables, que ce soit en droit OHADA ou en droit suisse de l'arbitrage international. En effet, outre les impossibilités de recourir à l'arbitrage, dont nous avons parlées eu égard aux différents droits concernés, le respect de l'ordre public international s'impose aussi comme une autre limite à l'arbitrabilité du litige. Nous ne disserterons pas cette vaste problématique qui porte sur l'arbitrabilité et l'ordre public international. Enfin, l'existence d'une attribution impérative de compétence au profit d'une autre juridiction se révèle être aussi une limite. Ainsi, sont non arbitrables les litiges portant notamment sur le droit pénal, l'ouverture des procédures collectives ou encore la validité des brevets. Les deux systèmes n'échappent pas non plus à la reconnaissance de ce principe universel du droit de l'arbitrage.

Nous ne détaillerons pas toutes ces sections relatives aux limitations à l'arbitrabilité dans les deux systèmes par soucis de limitation de pages. Par contre, l'absence de réserve à l'arbitrabilité du fait de la participation d'une personne morale publique ne manque pas d'intérêt pour cette étude comparée. Les deux lois d'arbitrage respectent-elles la tendance généralisée de la pratique du droit de l'arbitrage international qui vise à interdire à l'Etat et aux entités dont il a le contrôle, de refuser de se soumettre pleinement à un arbitrage dont ils sont parties ?

b-. ABSENCE DE RESERVE A L'ARBITRABILITE DU LITIGE

DROIT COMPARE

Art. 2 al. 2 AU.A

"Les Etats et les autres collectivités publiques territoriales ainsi que les Établissements publics peuvent également être parties à un arbitrage, sans pouvoir invoquer leur propre droit pour contester l'arbitrabilité d'un litige, leur capacité à compromettre ou la validité de la convention d'arbitrage ".

Art. 177 al. 2 LDIP

"Si une partie à la convention d'arbitrage est un Etat, une entreprise dominée ou une organisation contrôlée par lui, cette partie ne peut invoquer son propre droit pour contester l'arbitrabilité d'un litige ou sa capacité d'être partie à un arbitrage".

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En vertu de la bonne foi auquel l'Etat qui participe au commerce international ne saurait échapper pas plus que les personnes de droit privé, la pratique de l'arbitrage international a consacré le principe selon lequel, l'Etat tout comme les autres entités morales publiques peut compromettre. Ainsi, dans la pratique et en règle générale, la plupart des législations excluent les limitations au pouvoir de compromettre de l'Etat. Il s'ensuit que, l'Etat tout comme les autres entités morales publiques, peut compromettre sans devoir se justifier pour se prémunir, de l'inarbitrabilité du litige, ou de son incapacité à compromettre, ou de l'invalidité de la convention d'arbitrage ou encore se prévaloir de son immunité de juridiction. Il s'agit ici, d'un autre principe fort du droit de l'arbitrage interne et international. Principe considéré comme faisant partie de l'ordre public transnational selon lequel, l'Etat et les personnes morales publiques, ne sauraient se prévaloir de leur propre droit pour remettre en cause un arbitrage auquel ils auraient librement consenti leur participation, au travers d'une convention d'arbitrage en bonne et due forme. Le droit OHADA et le droit suisse de l'arbitrage international, ne s'excluent pas de l'application de ce principe dans la mesure où, les dispositions des articles 177 al.2 LDIP et 2 al. 2 AU.A le formulent expressément. Mais, le contenu de la formulation du principe diverge d'un système à un autre.

Alors que l'art. 177 al.2 LDIP énumère l'Etat, une entreprise dominée ou une organisation contrôlée par lui le droit OHADA au travers de l'AU.A à son art. 2 al. 2 cite exhaustivement l'Etat et les autres collectivités publiques territoriales ainsi que les Établissements publics. La question se pose de savoir, si cette énumération, qu'elle soit exhaustive ou non, dans son application doit recevoir une interprétation stricto sensu, dans l'affirmative on assisterait à une partialité d'absence de réserve. Si par contre, l'interprétation doit être faite au sens large on parlerait d'une absence de réserve totale à l'arbitrabilité.

La solution à la question a été esquissée par une certaine doctrine. Cette énumération, en droit OHADA des personnes morales de droit public aptes à compromettre, a donné naissance à une controverse doctrinale quant à l'exhaustivité de la liste. Pour certains auteurs, la liste est exhaustive et les seules personnes morales de droit public énumérées sont celles aptes à conclure une convention d'arbitrage. Pour d'autres comme Kenfack-Douajni et Ph. Fouchard44(*), cette liste est établie à titre indicatif et, par voie de suite, cette aptitude à compromettre est, à juste titre, dans l'esprit de l'AU.A, valable pour toutes les personnes morales de droit public, sans exclusion aucune. A notre avis, que ce soit en droit OHADA ou en droit suisse de l'arbitrage international, la position doit être prise en faveur d'une interprétation largo sensu dans la mesure où, l'absence de réserve à l'arbitrabilité ayant pour fondement d'éviter que toute personne morale publique, partie à un contrat d'arbitrage, se prévale du rapport de force en sa faveur pour prétériter un arbitrage, toute interprétation au sens stricte préjudicierait l'option, en faveur de la participation sans réserve de l'Etat et de ses dépendances à l'arbitrage, qui se généralise dans les lois et règlements modernes de l'arbitrage.

Par ailleurs, telle que formulée par l'art. 177 al. 2 LDIP, la question se pose de savoir si l'Etat peut prétexter de l'invalidité de la convention d'arbitrage pour prétériter à cet arbitrage, vu que la loi suisse de l'arbitrage international n'énumère pas ce cas de figure. Il est évident que, l'appréciation des conditions de validité d'une convention d'arbitrage ne revient pas à une des parties à cet arbitrage qui plus est un Etat, quel que puisse être le rapport de force entre celles-ci. Mais plutôt, c'est au tribunal arbitral qu'il revient, en vertu du principe de la compétence-compétente, d'avoir la compétence pour ce faire. L'Etat ne saurait donc prétériter à un arbitrage auquel il participe en invoquant tout simplement une invalidité de la convention d'arbitrage.

En résumé, sur cette question relative à l'absence de réserve à l'arbitrabilité du litige, nous remarquons que le droit suisse de l'arbitrage international, au travers des dispositions de l'art. 177 al 2 de la LDIP, fixe une limite de droit matériel à l'intervention des lois étrangères excluant l'arbitrabilité. Ce qui veut dire, qu'une loi étrangère qui exclut la participation de l'Etat et de ses entités à un arbitrage de DIP n'a aucune chance de recevoir application, lorsque le chapitre 12 LDIP est choisi comme loi du contrat ou loi applicable au fond du litige. Le droit OHADA aussi, au travers des dispositions de l'al. 2 de l'art. 2 de l'AU.A, pose une règle matérielle essentielle portant sur l'arbitrabilité subjective lorsque l'Etat ou une entité publique est partie à une convention d'arbitrage.

Les dispositions de ces articles confirment "la tendance générale qui vise à interdire à l'Etat de paralyser par voie d'exception une convention d'arbitrage à laquelle il est partie, en arguant de son incapacité à compromettre, ou du caractère inarbitrable du litige"45(*) ou de l'invalidité de la convention d'arbitrage. Bref, tendance à limiter le pouvoir de compromettre de l'Etat est aujourd'hui exclue en droit de l'arbitrage international, le droit OHADA et suisse de l'arbitrage ne font pas exception à cette règle matérielle du droit de l'arbitrage.

2-. VALIDITE SUBJECTIVE OU VALIDITE QUANT AU FOND DE LA CONVENTION DE DIP EN DROIT OHADA ET SUISSE

DROIT COMPARE

Art 4 al. 1-2 AU.A

"La convention d'arbitrage est indépendante du contrat principal.

Sa validité n'est pas affectée par la nullité de ce contrat et elle est appréciée d'après la commune volonté des parties, sans référence nécessaire à un droit étatique".

Art 178 al 2 LDIP

2) "Quant au fond, elle est valable si elle répond aux conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit régissant l'objet du litige et notamment le droit applicable au contrat principal, soit encore le droit suisse".

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S'agissant des autres conditions de validité matérielle de la convention d'arbitrage, notamment la validité subjective, le droit suisse admet que la convention d'arbitrage international est valide si "elle répond aux conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit régissant l'objet du litige et notamment le droit applicable au contrat principal, soit encore le droit suisse" (Art. 178 al. 2 LDIP). Le chapitre 12 LDIP pose ainsi une règle de conflit pour déterminer les conditions de validité matérielle, subjective de la convention d'arbitrage de DIP. Ainsi, pour qu'une convention arbitrale de DIP soit valide quant au fond, il est important qu'elle réponde soit aux conditions relevant de la volonté des parties notamment du droit choisi par elles, soit aux conditions relevant du droit régissant l'objet du litige, ou soit le droit suisse. On remarque que législateur suisse a admis à travers cette disposition, la possibilité de combiner alternativement règles matérielles et règles de conflit au sujet de la validité de la convention d'arbitrage, on parle de combinaison in favorem validitatis. Ce rattachement alternatif a pour objectif de rendre à la convention d'arbitrage international sa validité si elle répond aux conditions du moins exigeant de ces trois droits. Du point de vue pratique, l'option de rattachement est toujours faite en premier lieu en faveur du droit suisse qui est sur ce point le moins exigeant. Ce n'est que si la convention n'est pas valable selon le droit suisse que le tribunal arbitral s'en remet au premier ou au deuxième rattachement sous réserve bien évidemment des exigences minimales que pose le droit suisse à la validité d'une convention de droit international privé.

Sur cette question, le droit OHADA procède autrement. Il pose dans les dispositions de l'art. 4 AU.A une véritable règle matérielle de validité subjective de la convention d'arbitrage qui n'est pas moins perceptible.

Au lieu que la validité au fond, d'une convention d'arbitrage dans ce système, réponde aux conditions que pose chacune des législations internes des États-Parties sur la validité d'une convention de DIP, le droit OHADA s'en remet pour cela à la volonté unanime des parties.

Ceci étant, lorsqu'on s'en réfère aux dispositions de l'art. 4 AU.A il ressort qu'outre l'affirmation de l'autonomie substantielle de la convention d'arbitrage par rapport au contrat principal, le droit OHADA pose le problème de la validité de la convention d'arbitrage à l'al. 2 qui, est au terme de la disposition "appréciée d'après la commune volonté des parties sans référence nécessaire à un droit étatique". Il s'agit d'une sacralisation de la volonté des parties qui ne s'entend pas comme une simple séparabilité de la convention d'arbitrage par rapport au contrat principal, mais un véritable principe matériel de validité de la convention d'arbitrage. Il conviendrait de préciser que, la méthode de rattachement retenue par le droit OHADA de l'arbitrage est celle des règles matérielles qui privilégie la volonté des parties.

L'objectif ultime de ce rattachement, consiste à rendre la convention d'arbitrage valide si elle répond au principe de base de validité du contrat : le consensualisme.

Que ce soit en doit OHADA ou en droit suisse46(*), l'utilisation de la méthode des règles matérielles47(*) pour apprécier l'existence et la validité de la convention d'arbitrage revient à affirmer que la convention d'arbitrage a une validité et une efficacité propre. Cette technique trouve son origine dans une consécration jurisprudentielle française. En effet, dans un arrêt du 26 mars 1993 la cour de cassation française a jugé qu' "en vertu d'une règle matérielle du droit international de l'arbitrage, la clause compromissoire est indépendante juridiquement du contrat principal qui la contient directement ou par référence [...] son existence et son efficacité (entendue ici validité) s'apprécient, sous réserve des règles impératives du droit français et de l'ordre public international, d'après la commune volonté des parties, sans qu'il soit nécessaire de se référer à une loi étatique".

B-. LA VALIDITE FORMELLE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE DE DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL

DROIT COMPARE

Art. 3 AU.A

"La convention d'arbitrage doit être faite par écrit, ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve, notamment par la référence faite à un document la stipulant".

Art. 178 al. 1 LDIP

"Quant à la forme, la convention d'arbitrage est valable si elle est passée par écrit, télégramme, télex, télécopieur ou tout autre moyen de communication qui permet d'en établir la preuve par un texte".

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La question de la validité quant à la forme de la convention d'arbitrage international, nécessite que soit pris en compte les principes qui gouvernent la forme de la convention d'arbitrage international dans les deux systèmes d'une part et, la question de la convention d'arbitrage par référence d'autre part.

Mais avant tout, il y a lieu de préciser que, aussi bien l'AU.A en droit OHADA que le chapitre 12 LDIP reconnaissent tous, les deux formes classiques de convention d'arbitrage : la clause compromissoire et le compromis. Aucune scissiparité juridique n'est faite, comme en droit français de l'arbitrage, sur les deux formes de convention. Les deux lois évoquent le terme de convention d'arbitrage.

1-. PRINCIPE

En matière d'arbitrage international, c'est le principe du formalisme qui gouverne la convention d'arbitrage, il se manifeste par l'extériorisation de la volonté des parties à la convention, tel que la loi l'exige afin d'assurer à l'acte toute son efficacité (entendu ici comme validité formelle). Celle-ci peut se situer au plan du fond c'est-à-dire de la validité de la convention auquel cas le formalisme est un formalisme de validité, ou au plan de la preuve et, dans ce cas, il s'agit d'un formalisme probatoire. Les deux réglementations que nous analysons dans la présente étude s'opposent sur ce plan. Tandis que le formalisme se trouve être de validité en droit suisse de l'arbitrage international, le droit OHADA de l'arbitrage se positionne pour un formalisme probatoire.

a-. LE FORMALISME PROBATOIRE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE EN DROIT OHADA

Le droit OHADA de l'arbitrage ne pose aucune exigence de forme quant à la validité de la convention d'arbitrage (formalisme de validité). Dans ce système, une large place est faite au principe général du droit des contrats, nous voulons signifier, le principe du consensualisme pour régir la validité formelle de la convention d'arbitrage. L'art. 3 de l'AU.A dispose à ce sujet que "la convention d'arbitrage doit être faite par écrit, ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve, notamment par la référence faite à un document la stipulant". Il s'en déduit que, l'AU.A ne porte que sur le formalisme probatoire. Ceci est expressément remarquable à travers la liaison qui est faite entre l'écrit ou tout autre moyen par rapport à la preuve ("permettant d'en administrer la preuve"). Le texte ici ne subordonne donc pas la validité d'une convention d'arbitrage à une forme écrite. Ainsi, dans le système d'arbitrage OHADA la convention d'arbitrage n'a pas besoin d'être matérialisée pour être valable, elle peut être écrite ou orale, expresse ou tacite, directe ou par référence. Sur cette dernière possibilité, le recours à l'expression "par la référence faite à un document la stipulant" le prouve bien. L'écrit n'étant donc pas privilégié, il n'a de valeur en droit OHADA qu'au plan de la preuve sans pour autant être exclusif dans la mesure où l'AU.A parle de tout autre moyen. Par ailleurs, l'art. 31 AU.A renforce ce caractère privilégié de l'écrit au plan de la preuve quant à l'existence de la sentence arbitrale lorsqu'il dispose que celle-ci doit être établie "par la production de l'original (de la sentence) accompagné de la convention d'arbitrage". Ceci étant, nous remarquons fort curieusement que le droit uniforme OHADA ne précise pas la nature que doit avoir l'écrit (télégramme, télex, télécopie, e-mail, échanges de conclusions...) pour servir de preuve d'existence à la convention d'arbitrage.

De la lecture des dispositions de la règle de l'art. 3 AU.A, il ressort que le droit OHADA, par rapport à la validité formelle de la convention d'arbitrage, pose une règle matérielle applicable non seulement à la convention d'arbitrage interne mais aussi international.

Il va s'en dire que, pour une convention d'arbitrage de DIP mettant en cause un système juridique tiers à l'OHADA, cette règle aura pour effet d'écarter la règle de conflit qui en principe soumet la forme d'une convention à la loi du lieu de sa conclusion. Ce qui permettra de valider en la forme une convention d'arbitrage conclue dans un pays qui exigerait un écrit soit au plan de la validité de la convention soit au plan de sa preuve. Cette faveur à la validité et à la preuve de l'AU.A, traduite par l'art. 3 de cette réglementation sur l'arbitrage, s'accommode assez bien du caractère de la règle locus régit actum dans le droit international privé conflictuel de nombreux États qui énonce la soumission de l'acte juridique, quant à la forme, à la loi du lieu ou il a été passé.

Lorsqu'on sait que, dans la théorie de la preuve il n'y a pas que l'écrit pour faire la preuve d'un acte juridique, le choix du formalisme probatoire, pour justifier la validité formelle de la convention d'arbitrage par le droit OHADA, peut paraître périlleux. La non-exigence de l'écrit pour justifier de la validité formelle de la convention d'arbitrage en droit OHADA, constitue un risque grave à notre avis. En effet, l'hypothèse d'une sentence définitive rendue sur la base d'une convention d'arbitrage, qui plus est internationale, non écrite n'a aucune chance de recevoir exécution conformément aux dispositions de la convention de New York (art. IV ch. 1 let. b) et de l'AU.A lui-même (art. 31 al. 2). Nous verrons bien plus tard que, dans les conditions de reconnaissance et d'exécution de la sentence arbitrale étrangère il est exigé de produire l'original de la convention d'arbitrage. Comment dans l'hypothèse d'une convention non écrite peut-on exiger la reconnaissance et l'exécution d'une sentence arbitrale rendue sur la base d'une convention arbitrale orale ? D'où l'absurdité de l'acceptation de la validité formelle d'une convention arbitrale non écrite. En résumé, on peut avec P. Meyer confirmer le constat selon lequel "le caractère non exclusif de l'écrit au plan de la preuve de la convention, permet de dire que le droit uniforme africain ne pose en général aucune exigence de forme pas même au niveau probatoire"48(*).

b-. LE FORMALISME DE VALIDITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE EN DROIT SUISSE

Dans les dispositions du chapitre 12 a contrario, le formalisme posé par le droit suisse de l'arbitrage international se situe au plan du fond c'est-à-dire, de la validité de la convention d'arbitrage. L'on ne retrouve pas dans les dispositions de cette loi d'arbitrage, aucune place au formalisme probatoire. Le législateur suisse ayant préféré faire prévaloir le formalisme de validité au formalisme probatoire. L'art. 178 al. 1 LDIP dispose sur ce sujet que "quant à la forme, la convention d'arbitrage est valable si elle est passée par écrit, télégramme, télex, télécopieur ou tout autre moyen de communication qui permet d'en établir la preuve par un texte". En effet, les dispositions de cet article font de l'exigence de forme une condition de validité de la convention d'arbitrage. En d'autre terme, le respect de la forme écrite de la convention d'arbitrage international, subordonne la validité de cette dernière. Ce faisant, on constate que le droit suisse de l'arbitrage international est cohérent avec la règle qui veut que la reconnaissance et l'exequatur de la sentence soit formulée par demande, sur la base de la production de l'original de la sentence et de la convention. L'option en faveur du formalisme de validité du texte suisse de l'arbitrage international.

On la retrouve aussi dans la formulation des dispositions de l'art. 7 al. 2 de la loi-type de la CNUDCI, des articles 1443 (au sujet de la clause compromissoire) et 1449 (au sujet du compromis) du NCPC pour ne citer que ces textes de loi d'arbitrage.

Pour en revenir au droit suisse de l'arbitrage international, la loi fait du non respect de cette exigence de forme, une condition de nullité de la convention. Mais, cette condition n'est pas absolue dans la mesure où, l'entrée en matière sur le fond d'une partie qui ne soulève pas le vice de forme suppose qu'elle est réputée avoir accepté la convention et de ce fait est déchue du droit de contester la compétence du tribunal arbitral sur cette base. Ainsi, pour qu'une convention d'arbitrage international soit recevable en droit suisse, il est important que celle-ci soit passée :

- soit par écrit, en la matière le droit suisse ne définit pas ce qu'il faut entendre par écrit. Il faut se référer aux dispositions de l'art. II ch. 1 et 2 de la convention de New York pour se faire une idée de la définition de la forme écrite que, peut avoir une convention d'arbitrage. Cet article dispose qu'il faut entendre par convention écrite "une clause compromissoire insérée dans un contrat ou un compromis, signés par les parties ou contenus dans un échange de lettres ou de télégrammes". Cette définition, à notre avis est loin d'être suffisante à elle seule pour justifier de manière exhaustive la forme écrite d'une convention d'arbitrage. A. BUCHER, concluant sur l'exigence de l'art. 178 al. 1 LDIP et de l'art. II ch. 1 et 2 de la convention de New York, pour corroborer notre constat, disait à bon droit que "la condition d'un écrit ne signifie pas que la convention d'arbitrage doive exister matériellement sous cette forme ; il suffit que l'engagement d'arbitrage figure sur un support permettant la reproduction écrite et attestant l'acceptation réciproque par les parties". Cette dernière définition de la forme écrite de la convention d'arbitrage, nous paraît la mieux représentative de l'acception que peut endosser la notion de l'écrit en matière de convention arbitrale.

- soit par télégramme, télex ou par télécopieur.

- soit par tout autre moyen de communication qui permet d'en établir la preuve par un texte. L'utilisation de l'expression tout autre moyen de communication dans le corpus du texte, nous fait penser au support virtuel qu'est l'informatique en l'occurrence les Nouvelles Techniques de l'Information et de la Communication (NTIC) et l'Internet qui sont aujourd'hui de plus en plus utilisées pour les besoins de la cause et qui, constituent des outils incontournables dans cette ère de globalisation.

En conclusion à cette partie nous pouvons dire que, comme en droit OHADA, l'art. 178 al. 1 pose une règle matérielle de droit international privé qui se doit d'être appliquée, nonobstant les dispositions d'une règle conflictuelle. Il va s'en dire que, pour un arbitrage de DIP dont le siège se situe en Suisse, cette règle aura pour effet d'écarter la règle de conflit qui en principe soumet la forme d'une convention à la loi du lieu de sa conclusion. Ainsi la validité formelle de la convention s'appréciera par l'arbitre au regard des dispositions de l'art. 178 al. 1 exclusivement.

2-. LA CONVENTION D'ARBITRAGE PAR REFERENCE

Lorsque les parties ne formalisent pas en détail les termes de leur convention et se contentent de s'en référer à des documents préexistants, on parle de convention par référence. La convention arbitrale par référence, est une clause compromissoire qui n'est pas contenue dans le contrat litigieux mais est insérée soit dans des conditions générales ou, soit dans un autre acte auquel le contrat ayant suscité le litige fait référence.

La question ici, est celle de la validité d'une telle convention dite par référence. En règle général, que ce soit en droit OHADA de l'arbitrage ou en droit suisse de l'arbitrage international, aucun obstacle à la validité d'une telle clause n'est admis.

La solution est idoine en droit comparé. Pour preuve, la cour de cassation française, dans un arrêt en date du 9 novembre 1993 basculant en faveur du consensualisme, énonce une règle matérielle du DIP de l'arbitrage en ces termes : "en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par référence écrite à un document qui la contient, par exemple des conditions générales ou un contrat type, est valable, à défaut de mention dans la convention principale, lorsque la partie à laquelle la clause est opposée, a eu connaissance de la teneur de ce document au moment de la conclusion du contrat, et qu'elle a, fût-ce par son silence, accepté l'incorporation du document au contrat". L'insertion d'une pareille clause, ne pose bien évidemment pas de problème conformément aux dispositions de cette jurisprudence arbitrale internationale.

En droit OHADA, il faut admettre que L'AU.A ne pose aucune exigence quant aux conditions de fond de reconnaissance de la clause par la référence qui y est faite, pas plus qu'il ne pose d'exigence quant aux conditions formelles de son acceptation. Les dispositions de l'art. 3 in fines en disent long "la référence faite à un document la stipulant".

En droit suisse le cas de la clause référencée est un peu plus délicat. La doctrine propose de distinguer selon qu'il s'agit d'un renvoi spécifique ou d'un renvoi global49(*). En cas de renvoi spécifique, la jurisprudence constante du Tribunal Fédéral admet la validité de la convention d'arbitrage nonobstant le fait que celle-ci figure dans un document séparé. Par contre, en cas de renvoi global, le Tribunal Fédéral admet que, si le renvoi global est accepté par écrit "le problème se déplace de la forme au consentement et fait dès lors intervenir le principe de la confiance50(*)". En d'autres termes, il y a lieu de considérer si en vertu du principe de la bonne foi, ce renvoi global peut être assimilé à une adhésion des parties.

CHAPITRE II

L'INSTANCE ARBITRALE, LA SENTENCE ET LES VOIES DE RECOURS SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP

Dans cette section, nous analyserons d'une part les principales questions de droit que pose la constitution du tribunal arbitral conformément aux deux lois d'arbitrage, tout en essayant de mettre en évidence les points forts de la procédure qui présentent des similitudes et dissemblances notoires. D'autre part, nous tenterons d'apprécier, à la lumière des deux lois, les conditions légales que doivent avoir une sentence arbitrale dans les systèmes OHADA et suisse de l'arbitrage. Les voies de recours susceptibles d'être admises contre ladite sentence ne seront pas du reste.

SECTION I-. LA PROCEDURE ARBITRALE

§ I-. LE TRIBUNAL ARBITRAL ET LE STATUT DES ARBITRES

Le principe fondamental dont relève toute la procédure de constitution d'un tribunal arbitral en droit de l'arbitrage international, est celui de l'autonomie des parties laquelle se réfère à leur volonté. Ainsi, toute la procédure régissant l'instance arbitrale de DIP doit se fonder sur la liberté des parties qui, dans la phase préalable de constitution de la juridiction, se traduit par la constitution conventionnelle du tribunal arbitral. C'est à défaut, que la constitution légale dite encore celle du juge d'appui trouve à s'appliquer. Mais avant tout, il conviendrait de souligner que cette autonomie des parties, les deux systèmes que nous étudions la reconnaissent expressément dans les dispositions de leur loi d'arbitrage respectives.

A-. LA CONSTITUTION DU TRIBUNAL ARBITRAL

Il existe en arbitrage de DIP tout comme en arbitrage interne, deux modes de constitution du tribunal arbitral : la constitution conventionnelle du tribunal arbitral et l'aide judiciaire à la constitution qui fait office de constitution judiciaire.

1-. LA CONSTITUTION CONVENTIONNELLE

DROIT COMPARE

Art. 5 al. 1 AU.A et Art.179 al. 1 LDIP

"Les arbitres sont nommés, révoqués ou remplacés conformément à la convention des parties".

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Par constitution conventionnelle, nous entendons mettre en évidence l'importance du rôle que joue la volonté des parties dans le montage de l'ossature du tribunal arbitral de DIP. En effet, le principe du libéralisme qui gouverne l'arbitrage en général trouve une fois de plus son champ d'application ici. Il se manifeste par la prééminence de la volonté des parties dans la constitution du tribunal arbitral. Ce n'est qu'à défaut de cette volonté ou, en cas d'insuffisance de celle-ci que, les dispositions légales relatives à la constitution trouveront à s'appliquer et ce, de manière subsidiaire. Le droit OHADA et le droit suisse de l'arbitrage international, mentionnent expressément ce principe de constitution selon la volonté des parties. En effet, les dispositions de l'art. 5 al. 1 de l'AU.A sont identiques aux dispositions de l'art. 179 al. 1 LDIP. Indistinctement, ces deux textes disposent que "les arbitres sont nommés, révoqués ou remplacés conformément à la convention des parties".

Il en résulte que, c'est de la volonté des parties (convention des parties) que tout le principe de constitution du tribunal arbitral se fonde. Cette prééminence de la volonté des parties dans la constitution du tribunal arbitral, est conforme à la philosophie de l'arbitrage qui est basée dans son entièreté sur le principe de la liberté des parties, de leur autonomie.

Sur le plan opérationnel, on identifie en arbitrage de DIP deux modalités de désignation : les parties peuvent de manière concertée soit dans la convention d'arbitrage désigner le ou les arbitres ou soit le faire dans le cadre du règlement d'arbitrage auquel elles renvoient. Elles peuvent de façon concrète, directement désigner les arbitres (par leur nom ou leur fonction on parle de choix ès qualité, cas rare et non recommandé51(*)) ou indirectement en donnant carte blanche à un organe de le faire. Les deux textes législatifs sur l'arbitrage que nous étudions ne l'occultent point dans leurs dispositions. Pour le choix des arbitres, il dépend d'un certain nombre de variables dont seules les parties elles-mêmes peuvent en déterminer la portée et l'impact du point de vue de la composition du tribunal et de l'issue du litige. Notons que, quelle que soit la modalité retenue par les parties, il peut arriver qu'il y ait des difficultés dans la désignation des arbitres en cas de litige, d'où toute l'importance du recours à l'assistance judiciaire à la constitution du tribunal arbitral que nous analyserons dans la suite du développement.

Même si les parties sont libres de choisir par elles-mêmes les arbitres, force est de constater que cette liberté n'est pas illimitée puisque, certaines législations lui apportent des mesures prohibitives. Sur ce point, les restrictions que lui apporte le droit OHADA sont édifiantes.

- Une première limite porte sur le nombre des arbitres. C'est une limitation légale assez inhabituelle en droit comparée de l'arbitrage et qui est prévue par l'art. 8 al. 1 de l'AU.A qui dispose que, "le tribunal arbitral est constitué soit d'un seul arbitre, soit de trois arbitres". En règle générale et du point de vue du droit comparé, aucune loi d'arbitrage mis à part l'AU.A en droit OHADA n'impose un nombre déterminé d'arbitres. Seulement, certains droits en exigent simplement l'imparité et le non respect de cette exigence pourrait permettre d'attaquer la sentence au motif de la constitution irrégulière du tribunal. En droit suisse de l'arbitrage international, la solution est nuancée. Le chapitre 12 LDIP sur la question est muet et ce n'est que par renvoi de l'art. 179 al. 2 LDIP ("à défaut d'accord" entre les parties) que, les dispositions de l'art. 10 al. 1 CIA "[...] les arbitres sont au nombre de trois", trouveront à s'appliquer. Toutefois, il est fort utile de préciser que la variabilité numérique du corps arbitral constituant le tribunal, dépend de la nature du litige et de l'importance de la cause à juger. Dans la pratique et en règle générale, quelle que soit l'importance que peut revêtir le litige, l'imparité est souhaitée. Elle permet, en cas de difficultés et donc d'égalité décisionnaire sur des questions d'importance, de faire prévaloir la voix du président du tribunal qui, se trouve être celui qui numériquement fait l'imparité. Cependant, la parité en droit positif suisse, a longtemps été considérée comme ne posant aucun problème puisqu'elle est vue comme faisant état de la volonté exprimée des parties, laquelle doit primer sur toute autre considération. Le cas échéant, seule la sentence rendue à l'unanimité est recevable et à défaut d'accord entre les arbitres sur la sentence à rendre, la convention deviendra caduque et le litige soumis à la juridiction étatique compétente.

- Une deuxième limite porte sur le respect du principe de l'égalité des parties dans la désignation des arbitres. Cette égalité des parties on la retrouve dans les dispositions de l'art. 9 de l'AU.A qui dispose que "les parties doivent être traitées sur un pied d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de faire valoir ses droits". L'intérêt d'une telle exigence de respect de l'égalité des parties, c'est de créer des conditions égalitaires entre les parties à la convention dans la constitution du tribunal arbitral. Il est de ce fait inconcevable qu'une convention d'arbitrage de DIP mette une partie dans une situation privilégiée par rapport à l'autre. Toutes les parties se doivent de bénéficier et de disposer des mêmes droits dans la désignation des arbitres. Ce principe, même si on ne le retrouve pas expressément consacré par le chapitre 12 LDIP, il conviendrait de souligner qu'il fait partie des principes généraux du droit de l'arbitrage international et constitue, pour ainsi dire, une des "conditions indispensables à la crédibilité de la justice arbitrale et à sa conformité aux exigences internationales -universelles ou régionales52(*)- relatives à la justice53(*)". Le non respect de ce principe peut entraîner l'annulation de la sentence ou le refus de son exequatur. Notons qu'il n'est pas moins absent du droit positif suisse de l'arbitrage car, l'art. 25 CIA ne manque pas de le mentionner en ces termes "la procédure choisie doit en tout cas respecter l'égalité entre les parties". Aussi, il est pris en compte, en droit comparé, par d'autres lois et règlements d'arbitrage international.

Lorsque l'al. 2 de l'art. 179 LDIP dispose qu'"a défaut d'une telle convention, le juge du siège du tribunal arbitral peut être saisi; il applique par analogie les dispositions du droit cantonal sur la nomination, la révocation ou le remplacement des arbitres" l'expression à défaut d'une telle convention ne signifie nullement que la convention n'existe pas. En effet, la convention non seulement existe mais aussi atteste de la volonté des parties de recourir à cet arbitrage. Cependant, il se trouve que la convention ne prévoit rien quant à la désignation des arbitres (c'est le cas des clauses blanches par exemple). Le droit OHADA au travers de l'AU.A prévoit aussi cette défaillance de la clause arbitrale dans les dispositions de l'al. 2 de l'art.5 AU.A. Celui-ci en plus du défaut de convention ajoute le paramètre de convention insuffisante. Il est ainsi libellé, "à défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si la convention est insuffisante [...]". La notion de convention insuffisante suppose un accord d'arbitrage valable mais incomplet parce que contenant des indices ne permettant pas la désignation des arbitres. Que ce soit le défaut de convention ou son insuffisance cela entraîne pour conséquence le recours à la constitution judiciaire du tribunal arbitral, du moins il requiert l'aide à la constitution judiciaire du tribunal arbitral que, tous les systèmes consacrent expressément. Mais dans quelles mesures, cette possibilité de recourir à la constitution judiciaire est elle admise en droit OHADA de l'arbitrage et en droit suisse de l'arbitrage international ? Autrement dit, quelles sont les conditions qui prévalent à l'intervention de l'autorité d'appui (juge d'appui de l'ordre judiciaire) du lieu dans lequel l'arbitrage de DIP se déroule ? Les solutions apportées par l'AU.A et le chapitre 12 LDIP, en la matière, sont-elles identiques ?

2-. LA CONSTITUTION PAR LE JUGE D'APPUI

DROIT COMPARE

Art. 5 al. 2 AU.A

"A défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si la convention est insuffisante :

a) en cas d'arbitrage par trois arbitres, chaque partie nomme un arbitre et les deux arbitres ainsi nommés choisissent le troisième arbitre ; si une partie ne nomme pas un arbitre dans un délai de trente jours à compter de la réception d'une demande à cette fin émanant de l'autre partie, ou si les deux arbitres ne s'accordent pas sur le choix du troisième arbitre dans un délai de trente jours à compter de leur désignation, la nomination est effectuée, sur la demande d'une partie, par le juge compétent dans l'Etat-partie ;

b) en cas d'arbitrage par un arbitre unique, si les parties ne peuvent s'accorder sur le choix de l'arbitre, celui-ci est nommé, sur la demande d'une partie, par le juge compétent dans l'Etat-partie".

Art. 179 al. 2- 3 LDIP

2- "À défaut d'une telle convention, le juge du siège du tribunal arbitral peut être saisi; il applique par analogie les dispositions du droit cantonal sur la nomination, la révocation ou le remplacement des arbitres.

3- Lorsqu'un juge est appelé à nommer un arbitre, il donne suite à la demande de nomination qui lui est adressée, à moins qu'un examen sommaire ne démontre qu'il n'existe entre les parties aucune convention d'arbitrage".

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Lors de la désignation directe des arbitres par les parties, peuvent surgir des difficultés d'ordre organisationnel. Ainsi, si le choix ou la désignation par les parties des arbitres ou la nomination du 3ème arbitre par les deux 1ers (dans l'hypothèse d'un trio arbitral) est problématique, l'AU.A et le chapitre 12 LDIP prévoient la possibilité de saisine, par l'une des parties, du juge étatique afin que ce dernier nomme un arbitre pour combler le vide et mettre fin à cette difficulté. Ceci étant, il est fort intéressant de noter que l'utilisation de l'expression "A défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si la convention est insuffisante" marque l'alternative qui est offerte pour éviter le blocage du processus à ce niveau, même si la mauvaise foi manifestée par l'une des parties est évidente et notoire. Cependant, les conditions de saisine du juge d'appui dans cette situation varient d'un système judiciaire à un autre en fonction des dispositions légales et réglementaires en vigueur. Les dispositions de l'AU.A en droit OHADA de l'arbitrage sur cette question, sont identiques, du point de vue du droit comparé, aux dispositions de la loi type de la CNUDCI. On peut aisément constater que, le codificateur OHADA a repris in extenso l'art. 11 § 3 a et b de la loi-type. Mais au-delà de ce constat, la lecture du contenu du texte de l'AU.A nous amène à remarquer que le droit communautaire OHADA pose deux hypothèses légales fondées sur un tribunal arbitral composé de trois arbitres et un tribunal arbitral composé d'un arbitre unique :

- Dans l'hypothèse du trio arbitral, l'AU.A en droit OHADA prévoit que, le défaut ou l'insuffisance de la convention emporte comme conséquence la désignation de l'arbitre manquant par le juge étatique au préjudice de la partie défaillante (art. 5 al.2 a). Mais l'applicabilité de cette hypothèse est assujettie au respect d'un délai légal de trente jours qui court soit à compter de la réception d'une demande à cette fin émanant de l'autre partie soit à compter de leur désignation (les deux arbitres). L'autre condition sine qua non, de l'intervention du juge étatique dans la constitution du tribunal arbitral, relève du caractère exprès de la demande qui doit émaner d'une des parties. Il en résulte le fait que, le juge ne peut s'auto saisir pour cette fin puisque, le texte de loi est fort formel là-dessus et précise que, la saisine doit être faite " sur la demande d'une partie".

- Dans l'hypothèse d'un arbitre unique, le désaccord ou défaut des parties et/ou l'insuffisance de la convention des parties sur le choix de l'arbitre, emporte comme conséquence, sur la demande d'une partie, la nomination de ce dernier par le juge compétent dans l'Etat-partie (art. 5 al. 2 b). Paradoxalement dans cette seconde hypothèse, le codificateur OHADA n'impose plus un délai au-delà duquel les parties peuvent être amenées à demander le concours du juge d'appui. Il s'agit ici, à notre avis, d'une faille juridique qui peut servir à des fins dilatoires et s'avérer paralysante pour le bon déroulement de la procédure. La tâche reviendra donc aux tribunaux chargés de l'application de cette disposition de pouvoir l'interpréter judicieusement. Aucune jurisprudence OHADA ne s'est encore prononcée sur cette question. Notons enfin que, étant entendu que le droit OHADA est un droit communautaire applicable aujourd'hui dans seize Etats africains, le juge saisi par une requête en nomination d'arbitre applique, en principe, son propre droit national pour régler les difficultés liées à la constitution du tribunal arbitral.

Contrairement au droit OHADA, le droit positif suisse ne procède pas à cette dichotomie dans les conditions de saisine du juge d'appui. En droit suisse, l'al. 2. de l'art. 179 LDIP dispose qu' "à défaut d'une telle convention, le juge du siège du tribunal arbitral peut être saisi; il applique par analogie les dispositions du droit cantonal sur la nomination [...]". On induit de ces dispositions que, le recours au juge étatique n'est formellement prévu que parce qu'il n'y a pas de convention des parties désignant les arbitres. Dans cette hypothèse, si le siège du tribunal se situe en Suisse, le juge suisse vient suppléer la volonté des parties incomplète et il applique par analogie les dispositions du droit cantonal sur la nomination c'est-à-dire les articles 10 et 12 CIA. Mais au vu des particularités de l'organisation judiciaire de chaque canton en Suisse, la question se pose de savoir quel tribunal cantonal peut s'estimer compétent pour ce faire ? Bien évidemment, la loi nous renvoi aux dispositions du droit cantonal c'est-à-dire, le CIA pour déterminer le tribunal compétent. A la lecture des dispositions de l'art. 12 CIA relative à la nomination par l'autorité judiciaire, on note que ce texte procède lui-même par renvoi à l'art. 3, pour déterminer cette autorité judiciaire compétente. Il dispose que "le tribunal supérieur de la juridiction civile ordinaire du canton où se trouve le siège de l'arbitrage est l'autorité judiciaire compétente [...] pour nommer les arbitres que les parties n'auraient pas désignés54(*)". En résumé, l'intervention du juge d'appui est nécessaire toutes les fois qu'il y a défaillance dans le mécanisme prévu par la convention des parties. Elle ne se limite pas aux seuls cas où les parties n'ont pas opté pour un arbitrage institutionnel ou n'ont pas chargé un tiers de nommer un arbitre. En effet, toute déficience dans l'engrenage de la procédure de nomination des arbitres que les parties auraient choisie, emporterait systématiquement comme conséquence, l'intervention du juge judiciaire d'appui à l'arbitrage. Toutes les législations et règlements d'arbitrage interne et international l'admettent et l'appliquent et, permettent aux parties de saisir le juge en vue de désigner les arbitres.

Cependant, vu que nous sommes en matière internationale, le recours au juge ou à l'autorité d'appui, dans le cadre de sa compétence en matière de constitution du tribunal arbitral, ne manque pas de soulever plusieurs questions d'ordre technique qu'il importe de passer en revue.

1.- La question de la compétence internationale du juge d'appui que plusieurs droits d'arbitrage reconnaissent et consacrent expressément. Le juge d'appui OHADA et suisse dispose-t-il d'une aptitude légalement reconnue pour ce faire ? C'est dans les dispositions même du chapitre 12 au travers du texte de l'art. 179 al. 2 LDIP qu'on infère cette compétence internationale du juge d'appui "[...] le juge du siège du tribunal arbitral peut être saisi". En droit OHADA ce sont les alinéas 2. a in fine et 2. b in fine de l'art. 5 de l'AU.A "[...] par le juge compétent dans l'Etat-partie" que cette aptitude du juge d'appui peut se déduire.

2.- La question de la subsidiarité du recours au juge qui permet de limiter l'intervention du juge d'appui au cas où les parties n'auraient rien prévu à ce sujet. Le recours au juge est ainsi dit subsidiaire par rapport à tout autre mécanisme de désignation choisi par les parties. Les expressions à défaut d'une telle convention ou si la convention est insuffisante que les des deux lois utilisent le prouvent bien.

3.- Le pouvoir d'examen du juge pour contrôler la validité de la convention d'arbitrage à ce stade précoce de la procédure. Le droit suisse reconnaît sur ce point que le juge d'appui a un pouvoir d'examen restreint et qu'il se doit, par voie de conséquence, de donner suite à la requête en désignation d'arbitre sauf si la convention d'arbitrage est manifestement nulle. C'est tout le sens que le législateur suisse donne au contenu de l'al. 3 de l'art.179 LDIP lorsqu'il dispose que "lorsqu'un juge est appelé à nommer un arbitre, il donne suite à la demande de nomination qui lui est adressée, à moins qu'un examen sommaire ne démontre qu'il n'existe entre les parties aucune convention d'arbitrage".

Au titre du droit comparé, il est fort intéressant de faire constater que, si le droit suisse reconnaît au juge d'appui un pouvoir d'examen restreint, le droit anglais quant à lui admet que, le juge d'appui à le pouvoir de contrôler la validité de la convention d'arbitrage avant de nommer un arbitre. Contrastant ainsi d'avec la solution retenue en droit positif suisse de l'arbitrage international. Par contre, on ne retrouve en droit OHADA aucune disposition sur la question, dans les textes de loi réglementant la matière.

Somme toute, les voies de recours contre la décision de nomination du juge d'appui prise dans ce cadre ne sont pas envisagées par la plupart des législations sauf en droit anglais. Même si les droits OHADA et suisse n'admettent pas de recourir contre la décision de nomination du juge d'appui, la pratique internationale de l'arbitrage n'admet pas que sa décision ne fasse l'objet d'un contrôle. Celui-ci s'exercera indirectement lors du recours contre la sentence arbitrale. Cette possibilité de contrôle a posteriori de la nomination du juge d'appui n'est pas exclue en droit OHADA et suisse de l'arbitrage international. Par ailleurs, l'une des particularités du chapitre 12 ne figurant pas dans les dispositions de l'AU.A en droit OHADA porte sur le fait que, lorsque les parties confient à un juge suisse la tâche de nomination des membres du tribunal arbitral, celui-ci, d'après l'art. 179 al. 3 se doit de donner "suite à la demande de nomination qui lui est adressée". Obligation est donc faite au juge suisse de nommer un arbitre sauf, s'il constate par un examen sommaire que la convention n'existe pas ou que le litige n'est pas arbitrable. Cette constatation sommaire qui peut servir de justificatif au juge d'appui pour rejeter la demande de nomination d'un arbitre en droit suisse est assimilable à la constatation prima facie du droit français. Cette question n'est pas abordée par le droit OHADA de l'arbitrage qui, pourtant en partie, est calqué sur le modèle français du droit de l'arbitrage.

Enfin pour être complet sur la problématique du juge d'appui et de sa compétence en matière d'arbitrage international, il y a lieu de dire que la décision qui porte refus de nommer le ou les arbitres du juge d'appui, peut en droit suisse être considérée comme un dénie de justice et faire l'objet d'un recours. Sur cette question aussi, le codificateur OHADA de l'AU.A est muet d'autant plus qu'on ne retrouve ni dans l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage, ni dans le Règlement d'Arbitrage de la CCJA, ni dans le Traité OHADA en soi, une disposition du genre. En sachant que le dénie de justice est en général punissable, on peut se fonder sur ce principe général dans l'espace OHADA pour recourir contre le refus de nomination d'un arbitre du juge d'appui, dans la mesure où le code de procédure civil de l'Etat duquel le juge défaillant est ressortissant l'admet.

B-. LA RECUSATION DES ARBITRES

DROIT COMPARE

Art. 7 al. 2-5 AU.A

2- "Si l'arbitre suppose en sa personne une cause de récusation, il doit en informer les parties, et ne peut accepter sa mission qu'avec leur accord unanime et écrit.

3- En cas de litige et si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent dans l'Etat-partie statue sur la récusation. Sa décision n'est susceptible d'aucun recours.

4- Toute cause de récusation doit être soulevée sans délai par la partie qui entend s'en prévaloir.

5- La récusation d'un arbitre n'est admise que pour une cause révélée après sa nomination".

Art. 180 LDIP

1- "Un arbitre peut être récusé:

a) Lorsqu'il ne répond pas aux qualifications convenues par les parties;

b) Lorsque existe une cause de récusation prévue par le règlement d'arbitrage adopté par les parties, ou

c) Lorsque les circonstances permettent de douter légitimement de son indépendance.

2- Une partie ne peut récuser un arbitre qu'elle a nommé ou qu'elle a contribué à nommer que pour une cause dont elle a eu connaissance après cette nomination. Le tribunal arbitral et l'autre partie doivent être informés sans délai de la cause de récusation.

3- En cas de litige et si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent du siège du tribunal arbitral statue définitivement".

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Elle fait partie de l'un des incidents qui peuvent affecter la composition du tribunal arbitral à l'instar de l'incapacité, du décès, de la démission, de la destitution, de la révocation d'un arbitre. Nous n'envisagerons ici que, le cas le plus récurrent celui de la récusation qui est prononcée lorsque l'indépendance et l'impartialité, principales vertus de l'arbitre, sont mises en cause. En effet, aussi bien la législation uniforme sur le droit de l'arbitrage OHADA que le droit suisse de l'arbitrage international ne prévoient, dans leurs dispositions que, cette seule forme d'incident pouvant affecter la composition du tribunal arbitral et nécessitant pour sa procédure l'intervention du juge étatique, et sur ce, à titre subsidiaire. Du point de vue du droit comparé, le chapitre 12 LDIP est plus vaste et plus énumératif que l'AU.A sur cette question. Ce qui lui confère un avantage certain du détail et de la concision sur la problématique de la récusation.

Il est fort utile de noter toutefois ici que, dans un arbitrage ad hoc la possibilité que les parties elles-mêmes, de leur propre chef, envisagent une procédure de récusation est rarissime. Par contre, nombreux sont les lois et règlements d'arbitrage qui dans un arbitrage institutionnel disposent d'une procédure interne d'examen de la récusation. L'option en faveur de cet arbitrage (institutionnel) par les parties, relègue la compétence du juge étatique d'appui, à la subsidiarité.

En conséquence, il n'est pas compétent pour connaître d'un incident relatif à la récusation d'un arbitre puisque, comme le soulignent si bien les dispositions des deux législations que nous étudions, "en cas de litige et si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent [...] statue" (art 7 al. 3 AUA et 180 al. 3 LDIP). Les deux lois d'arbitrage, objets de la présente étude, sont explicites là dessus. Priorité est donc donnée par la loi, à la convention des parties ou au règlement qu'elles ont adopté (qui de toute manière comporte le principe de la subsidiarité) en ce qui concerne tant les motifs que la procédure de récusation. S'agissant des motifs de récusation et comme nous le verrons dans la suite du développement, les exigences légales d'indépendance et/ou d'impartialité des arbitres, à l'égard de la partie ou de l'institution qui les ont désignés, sont en droit de l'arbitrage international, le principal motif de récusation à caractère impératif pris en compte par les deux lois d'arbitrage.

1-. LES MOTIFS DE RECUSATION ET LEURS CONSEQUENCES JURIDIQUES

D'une manière générale, les motifs de récusation élaborés par les différentes législations sur l'arbitrage tiennent, au lien existant d'une part entre l'arbitre et un des intervenants dans la procédure pour défaut d'impartialité et/ou d'indépendance et d'autre part, au lien existant entre l'arbitre et la cause à juger. Si en droit suisse de l'arbitrage international un arbitre peut être récusé pour cause de non-conformité aux qualifications convenues par les parties tenant entre autre aux aspects professionnels, linguistiques ou techniques ou même à la nationalité ou au domicile, c'est à bon droit qu'il est retenu que, ces exigences doivent être formulées pour être recevables "dans les limites de ce qui est raisonnablement exigible". Lorsque l'art. 180 al.1 let. a dispose qu'"un arbitre peut être récusé lorsqu'il ne répond pas aux qualifications convenues par les parties", il accorde de ce fait, une place non moins négligeable à la convention des parties dans la fixation des motifs de récusation.

Même si le texte de l'AU.A du droit OHADA de l'arbitrage ne fait pas de cette cause un motif de récusation valable, doit-on en conclure que la non-conformité aux qualifications convenues par les parties peut servir de passe-droit pour justifier la non-récusation d'un arbitre dans l'espace OHADA ? À notre avis, il n'en demeure pas moins vrai que, la convention des parties, tout comme en droit suisse, est tout aussi déterminante pour ce qui est des motifs de récusation car, l'hypothèse de l'al. 3 de l'art. 7 AU.A en dit long "[...] si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation [...]". Cela sous-entend que la convention des parties joue un rôle important aussi bien dans la fixation des motifs de récusation que, dans la procédure y afférente. Ainsi, si les parties ont posé des exigences de qualification des arbitres, le défaut de conformité aux exigences des parties doit, en droit OHADA, être analysé comme un manquement à leur loi, une violation de leur accord de base qui emporterait légitimement le droit de récusation de l'arbitre mis en cause. Si le législateur OHADA n'en a pas fait cas, cela peut se justifier par le souci d'une évidence. Celle selon laquelle, l'arbitrage étant conventionnel par nature, le moins qu'on puisse exiger c'est le respect de la volonté des parties dans leurs exigences, de leur convention. Toute volonté contraire constituerait une atteinte à la validation de leur accord.

La même observation peut être faite au sujet des motifs de récusation, prévus par le règlement d'arbitrage adopté par les parties qui, en droit suisse de l'arbitrage international, tiennent à la disposition de l'art. 180 al.1 let. b LDIP.

Cet article dispose en effet qu'"un arbitre peut être récusé [...] lorsque existe une cause de récusation prévue par le règlement d'arbitrage adopté par les parties". Ces motifs ne figurant pas non plus dans les dispositions de la loi d'arbitrage OHADA, nous pouvons également soutenir le fondement de cette omission du texte de l'AU.A par le fait que, si les parties adoptent un règlement d'arbitrage, les dispositions prévues par ce règlement, en l'occurrence celles prévues pour la récusation, se doivent d'être appliquées en vertu du respect du choix des parties, de leur volonté. Même si ces motifs de récusation ne figurent pas dans le corpus de la loi d'arbitrage OHADA notamment l'AU.A, leur évocation pour justifier la récusation d'un arbitre de DIP peut, à notre avis, se faire sur la base des principes généraux du droit de l'arbitrage international.

Le lien supposé et avéré entre les arbitres et l'un des intervenants dans la procédure de l'arbitrage peut constituer une cause de récusation en arbitrage de DIP. En effet, il n'est pas rare que le risque de prévention d'un arbitre dans la cause à juger soit soulevé par une partie qui évoque le défaut d'indépendance et/ou d'impartialité d'un ou des arbitres intervenant dans la procédure. Autrement dit, si l'existence de liens étroits entre l'arbitre et l'une des parties à la procédure est avérée, l'arbitre mis en cause n'est pas à l'abri de la procédure de récusation pour défaut d'indépendance et/ou d'impartialité. Les concepts d'indépendance et/ou d'impartialité en arbitrage international, concepts forts reconnus et appliqués constituent sans nul doute l'une des conditions légales les plus essentielles du statut des arbitres, s'appliquant à tous le corps arbitral. Il est généralement considéré que leur défaut constitue une cause de récusation et toutes les législations sur l'arbitrage de DIP l'admettent explicitement.

Du point de vue du droit comparé, certaines législations à l'instar du chapitre 12 LDIP exigent seulement l'indépendance de l'arbitre. En effet, la formulation de cette exigence n'est pas expresse dans le texte du chapitre 12 LDIP. L'art. 180 al. 1 let. c LDIP dans son énumération des conditions de récusation des arbitres, fait état du doute légitime sur son indépendance. Il dispose qu'"un arbitre peut être récusé [...] Lorsque les circonstances permettent de douter légitimement de son indépendance", mettant ainsi en exergue, l'obligation d'indépendance de l'arbitre. Par contre, d'autres, à l'instar de l'AU.A formulent la double exigence d'indépendance et d'impartialité "l'arbitre doit [...] demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties" (art. 6 al. 2 AU.A). Il en est ainsi, de la très grande majorité des lois et règlements d'arbitrage comme les règlements de la CNUDCI du 15 décembre 1976 (art 9-10), de la CCI du 1er janvier 1998 (art. 11 al. 1er), de la LCIA du 1er janvier 1998 (arts. 10.1 et 10.2). Des législations d'arbitrage allemande ZPO (§1036 ZPO), belge (art. 1690 CJB), néerlandaise (art. 1033 al. 1 WBR). Bref, relevons que, la référence juridique faite aux exigences d'indépendance et/ou d'impartialité, dans les lois d'arbitrage, est une exigence d'ordre public dont la violation peut constituer une cause d'annulation de la sentence ou le refus de sa reconnaissance et exécution selon la procédure appropriée.

Que peut-on alors entendre par absence d'indépendance ?

L'absence d'indépendance est une situation de fait qui a trait à l'absence de relations de travail, de collaboration de parenté ou d'alliance entre l'une des parties et un arbitre. Elle ne doit pas être confondue avec la condition d'impartialité qui est un état d'esprit de l'arbitre exigeant l'absence de toute circonstance d'une intervention en faveur des intérêts de l'une des parties. L'impartialité est considérée comme le corollaire de l'indépendance et se trouve être par la force des choses, plus difficile à prouver que la notion d'indépendance qui est objective et factuelle.

On comprend alors aisément, pourquoi certaines législations à l'instar de la LDIP, se satisfont à préciser l'exigence de l'indépendance de l'arbitre sans faire cas de son impartialité. Ceci étant, sans pour autant verser dans le développement doctrinal sur l'état d'indépendance et d'impartialité de l'arbitre à l'égard des parties55(*), il est important de noter que ces exigences s'imposent à tout arbitre sans distinction quant à sa fonction au sein du tribunal arbitral.

En droit suisse de l'arbitrage international, c'est dans les dispositions du chapitre 12 LDIP que l'art. 180 al. 1 let. c traite du problème. Sans faire référence à l'impartialité de l'arbitre le texte évoque le défaut d'indépendance de l'arbitre comme cause envisageable de récusation d'un arbitre. En invoquant le doute légitime sur l'indépendance de l'arbitre, le droit suisse de l'arbitrage international offre aux parties la possibilité de récusation du tribunal arbitral selon les termes prévus par la loi. Ainsi, un arbitre peut se voir appliquer la procédure de récusation s'il y a présomption de défaut d'indépendance. Autrement dit, si dans les conditions d'appréciation de son indépendance apparaissent des doutes. Par rapport à l'absence d'impartialité, le législateur suisse a considéré qu'il va de soi que dans un tribunal arbitral, les arbitres soient autant impartiaux qu'indépendants puisque le droit à un juge impartial découlant de l'art. 58 Cst., existe aussi bien en matière d'arbitrage interne que devant les juridictions étatiques, l'arbitrage international n'en étant pas du reste.

En dépit de sa non-prise en compte par le législateur suisse, il n'en demeure pas moins vrai que cette exigence peut constituer une cause de récusation dans un arbitrage de DIP en droit positif suisse. En effet, dans un arrêt du Tribunal Fédéral on note ceci : "le tribunal fédéral continue à se référer à sa jurisprudence antérieure exigeant, pour des motifs constitutionnels, un tribunal arbitral impartial"56(*). Selon cet arrêt du TF, l'impartialité est une garantie constitutionnelle qui doit viser à éviter que les circonstances extérieures à la cause influencent le jugement en faveur ou au détriment d'une partie (ATF 126 I 68,73)57(*).

Quid du droit OHADA de l'arbitrage ?

Le droit OHADA à travers l'al. 2 de l'art. 6 de l'AU.A prévoit que "l'arbitre doit [...] demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties". Cependant, dans ses dispositions il n'est point fait état du défaut d'indépendance et d'impartialité comme cause de récusation de l'arbitre. Simplement, en reconnaissant le principe de l'indépendance et de l'impartialité des arbitres, le droit OHADA oblige l'arbitre à s'auto-récuser, lui laissant la faculté de déceler lui-même les motifs raisonnables de récusation qui, doivent être soumis à la discrétion des parties à l'arbitrage. Il va à contre-pied de la solution retenue par la LDIP en ne procédant à aucune énumération des causes de récusation des arbitres, donnant ainsi aux arbitres eux-mêmes, le pouvoir d'apprécier de prime abord la faisabilité de la mission qui leur est confiée et aux parties, le pouvoir d'apprécier les conditions de récusation des arbitres. C'est tout le sens des dispositions de l'art. 7 al. 2 AU.A "si l'arbitre suppose en sa personne une cause de récusation, il doit en informer les parties [...]".

Le droit OHADA s'en remet ainsi, pour l'appréciation des motifs de récusation d'un arbitre et de la procédure afférente au pouvoir discrétionnaire des parties. Cependant, il n'en demeure pas moins vrai que les causes classiques de récusation admises dans une justice arbitrale au regard de la pratique internationale et, qui sont les motifs impératifs du droit de l'arbitrage international, basés sur le défaut d'indépendance et d'impartialité, ne sont pas recevables en droit positif communautaire OHADA. Ceci nous amène à envisager la disclosure ou l'obligation d'information qui pèse sur l'arbitre tout au long de l'instance.

2-. LA DISCLOSURE OU OBLIGATION D'INFORMATION DES ARBITRES

L'autre particularité du droit OHADA de l'arbitrage est que, les exigences d'indépendance et d'impartialité, il faut le dire, génèrent pour les arbitres dans ce système une obligation d'information qui, à défaut, peut constituer un motif de récusation. Plusieurs lois et règlements d'arbitrage consacrent ce principe du devoir de révélation appelé disclosure selon la terminologie anglo-saxonne. L'AU.A en droit OHADA, le formule expressément dans les dispositions de l'art 7 al. 2 comme suit "si l'arbitre suppose en sa personne une cause de récusation, il doit en informer les parties, et ne peut accepter sa mission qu'avec leur accord unanime et écrit". Il en appert pour tout arbitre, qui suppose un doute peser sur son indépendance et/ou son impartialité, en vertu du principe de la bonne foi, le devoir d'information à l'adresse des parties à qui, il revient d'en apprécier la légitimité afin d'accepter la mise en branle de la procédure de récusation ou la rejeter.

Du point de vue du droit et de la pratique de l'arbitrage international, l'obligation de révélation de tout élément fort susceptible de susciter la récusation d'un arbitre est, un autre principe qui est considéré comme un corollaire fondamental du régime de récusation. Même si certaines législations n'estiment pas nécessaire de faire figurer dans le corpus de texte de loi sur l'arbitrage international l'obligation de révélation, force est de constater que, la disclosure dans la pratique du droit de l'arbitrage international est, du fait même de l'existence du contrat d'arbitre, un principe clé qui ne saurait se défier de toute légitimité. La législation suisse de l'arbitrage international (LDIP) ne l'a pas prise expressément en compte. Cependant, une jurisprudence du TF a reconnu cette disclosure en ces termes : "l'arbitre a le devoir précontractuel, puis contractuel, d'informer les parties au procès des faits pouvant être tenus pour un motif de récusation, du moins lorsqu'il a des raisons de penser que ces faits ne sont pas connus des parties ou de celles d'entre elles qui pourraient s'en prévaloir" (ATF 111 la 72, 75-76).

Ceci étant, il est fort utile de préciser que, l'appréciation des éléments matériels fournis par l'arbitre à l'appui de son devoir d'information, doit pouvoir se faire selon la jurisprudence française "au regard à la fois de la notoriété de la situation critiquée et de son incidence raisonnablement prévisible sur le jugement de l'arbitre". Il va s'en dire que, cette appréciation des éléments fournis par l'arbitre, doit pouvoir se faire par les parties objectivement sur la base de son impact plausible sur l'issue du procès arbitrable. En cas de non rejet des motifs évoqués par l'arbitre, le consensus matérialisé par une preuve écrite, doit être fait par les parties sur la continuation de la mission de l'arbitre. C'est tout le sens que donne l'art.7 al. 2 in fine de l'AU.A qui prévoit que, l'arbitre "ne peut accepter sa mission qu'avec leur accord unanime et écrit".

L'exigence d'un écrit, dans ce cas, n'est pas fortuite car comme le pense à bon droit P. LEBOULANGER, elle "est sans doute une sage précaution, qui évitera des tentatives de récusation à des fins purement dilatoires, mais qui pourra, à l'inverse, être une source de blocage, si une des parties refuse de donner son accord"58(*). Somme toute, la finalité de la disclosure c'est d'une part, de permettre aux parties "d'exercer leur droit de récusation en toute connaissance de cause" (GAILLARD, p. 1243)59(*) et d'autre part, d'empêcher "toute contestation à un stade ultérieur de la procédure (REDFERN/HUNTER, n° 4-61, p. 204), si les parties n'exercent pas leur droit ou le font sans succès"60(*). Sur ce dernier point curieusement, le droit suisse de l'arbitrage international, en dépit de la non prise en compte dans le corpus du texte de la loi d'arbitrage de la disclosure, souligne le devoir d'information à l'adresse du tribunal arbitral de la cause de récusation "le tribunal arbitral et l'autre partie doivent être informés [...] de la cause de récusation" (art. 180 al. 2 in fine).

La récusation, nous le savons, est facultative et non obligatoire pour les parties. Cependant, en vertu du principe de la bonne foi, la cause de récusation doit "être soulevée sans délai par quiconque entend s'en prévaloir" (art. 7 al. 4 AU.A). Il s'en infère qu'une partie qui entend faire usage de la faculté de récusation du tribunal arbitral, que lui accorde la loi, doit invoquer le motif de récusation aussitôt qu'elle en a eu connaissance. Le droit suisse de l'arbitrage international ne fait pas l'économie de cette règle. On peut le constater dans la formulation expresse du contenu du texte de l'art. 180 al. 2 in fine du chapitre 12 LDIP qui, oblige de tenir informé sans délai le tribunal arbitral et l'autre partie de la cause de récusation. En effet, que ce soit en droit OHADA de l'arbitrage ou en droit suisse de l'arbitrage international, la recevabilité de la demande de récusation suppose qu'elle soit soulevée sans délai par la partie qui entend s'en prévaloir. À défaut, elle emporte pour celle-ci, comme conséquence "négative", la renonciation implicite à se prévaloir de la faculté de récusation et par la même occasion, renonciation au droit de demander l'annulation de la sentence au motif de l'irrégularité dans la constitution du tribunal arbitral ou de la violation de l'ordre public international. Formulé autrement, le principe veut que, la partie qui en connaissance de cause n'introduit pas sa demande de récusation dans les délais ne puisse plus ultérieurement avoir la possibilité d'attaquer la sentence, sur la base de cette irrégularité. C'est tout le sens que veut donner à la procédure de récusation les articles 7 al. 4 AU.A et 180 al. 2 LDIP.

Pour aborder dans le même sens, le respect du délai fixé pour introduire une demande de récusation est une obligation conventionnelle mise à la charge de la partie qui entend se prévaloir de la récusation. Evidemment, le défaut d'une fixation conventionnelle emporte comme conséquence, pour la partie qui entend s'en prévaloir, le devoir, en vertu du principe de la bonne foi, d'agir sans délai au risque de perdre non seulement ce droit de demander récusation mais aussi, celui de recourir ultérieurement à l'annulation de la sentence pour ce motif. En droit suisse, la doctrine et la jurisprudence en ont déduit que, même si l'art. 180 al. 2 ne fixe aucun délai "la partie qui ne réagit pas immédiatement perd son droit de faire valoir ultérieurement le motif de récusation qu'elle invoque"61(*).

Sur ce point, il est fort intéressant de noter que, les législations modernes sur l'arbitrage international ne fixent généralement aucun délai pour l'introduction d'une demande de récusation. Elles se contentent de s'en remettre simplement au principe de l'autonomie qui régit l'arbitrage et donc à la fixation conventionnelle de ce délai.

Enfin, l'étude comparée de la problématique de récusation dans les deux systèmes, ne saurait se faire sans le rapprochement de la maxime qui veut que nul ne se prévale de sa propre turpitude du principe de l'interdiction de venire contra factum proprium des articles 7 al. 4 AU.A et 180 al. 2 LDIP. En effet, dans sa réglementation de la procédure de récusation, la loi d'arbitrage suisse, en l'occurrence le chapitre 12 LDIP, prévoit en son art. 180 al. 2 qu'"une partie ne peut récuser un arbitre qu'elle a nommé ou qu'elle a contribué à nommer que pour une cause dont elle a eu connaissance après cette nomination". Elle met ainsi en exergue, l'application du principe de l'interdiction de venire contra factum proprium. Il s'en dégage que, toute cause de récusation révélée avant la nomination d'un arbitre emporterait comme conséquence la non remise en cause de son indépendance et/ou impartialité. Ce qui ne parait pas illogique dans la mesure où, la récusation avant nomination d'un arbitre par la partie qui l'a choisi, est une attitude contradictoire justifiant le fait que ne soit pas entendu celui qui donne pour excuse sa propre turpitude. Attitude non protégée par les lois d'arbitrage et par la pratique de l'arbitrage international. C'est aussi le sens que le législateur OHADA donne aux dispositions de l'art. 7 al. 4 AU.A, lorsqu'il formule que "la récusation d'un arbitre n'est admise que pour une cause révélée après sa nomination". Comment s'opérationnalise alors la récusation ?

3-. LA PROCEDURE DE RECUSATION

Du point de vue procédural, les deux systèmes que nous étudions consacrent tous le principe de l'autonomie des parties en matière de récusation. Il va s'en dire que, le juge d'appui n'est compétent pour statuer sur la récusation d'un arbitre que si les parties n'ont pas réglé par elles-mêmes ladite procédure. C'est en effet, tout le sens des dispositions de l'art. 180 al. 3 LDIP qui dispose qu' "en cas de litige et si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent du siège du tribunal arbitral statue définitivement". Autrement dit, le juge du siège de l'arbitrage n'est en matière de récusation que subsidiairement compétent. Le droit OHADA de l'arbitrage, pour ce principe, n'est pas du reste. Il le reconnaît aussi expressément lorsqu'il dispose en son art. 7 al. 3 AU.A qu' "en cas de litige, et si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent dans l'Etat-partie statue sur la récusation. Sa décision n'est susceptible d'aucun recours".

Ceci étant, il importe de faire remarquer que, tandis qu'en droit suisse de l'arbitrage international, la subsidiarité de l'intervention du juge d'appui, pour son assistance en matière de récusation, relève du juge compétent du siège du tribunal arbitral, en droit OHADA elle est du juge compétent dans l'Etat-partie. Cette différenciation sémantique est, à notre avis, fondée sur la particularité organisationnelle du point de vue structurel du système OHADA qui regroupe 16 États qualifiés d'États-Parties, ayant chacun une organisation juridique et judiciaire propre. La désignation du juge d'appui chargé de la mise en application de la procédure de récusation, sous le vocable de juge compétent dans l'Etat-partie, n'est rien d'autre que le juge du siège du tribunal arbitral dans chacun des États faisant partie du système de procédure unifiée du droit OHADA. Quant à savoir, quel est le juge compétent pour ce faire dans l'ordre interne de chaque Etat, il revient à la loi de procédure civile de chacun de ces États de le déterminer.

En droit suisse par contre, le juge compétent qui pourra être saisi de la procédure de récusation "par défaut" est celui du siège du tribunal arbitral. Pour déterminer ce juge il y a lieu de recourir aux dispositions du droit cantonal. Celui-ci par renvoie de l'art. 21 CIA (en cas de contestation, l'autorité judiciaire prévue à l'article 3 statue sur la récusation), nous conduit à découvrir que "le tribunal supérieur de la juridiction civile ordinaire du canton où se trouve le siège de l'arbitrage est l'autorité judiciaire compétente pour, [...] statuer sur les demandes de récusation des arbitres, prononcer leur révocation et pourvoir à leur remplacement" (art. 3 let. b).

Par ailleurs, deux variantes s'observent en matière de procédure de récusation dans un arbitrage de DIP. En effet, selon que les parties ont opté pour un arbitrage institutionnel la procédure suivra le canevas de l'organe institutionnel appelé à trancher les demandes de récusation. Évidemment dans ce cas, la procédure de récusation dépendra en 1er lieu du règlement d'arbitrage adopté par les parties et en 2ème lieu à titre subsidiaire de la loi de l'Etat du siège de l'arbitrage. Si par contre, elles optent pour un arbitrage ad hoc, le défaut de définition de procédure ad hoc emporte application de la procédure du juge d'appui. Dans ce cas, il faudra se référer pour la démarche à suivre au droit applicable c'est-à-dire le droit de l'Etat du siège de l'arbitrage. Dans la pratique, l'hypothèse de l'application du règlement d'une institution d'arbitrage emporte normalement soit l'introduction de la demande de récusation devant le tribunal arbitral quitte à former un appel ultérieur contre cette décision devant les tribunaux étatiques. Il en est ainsi de la loi-type CNUDCI art.13 § 2 identique au §1037 (2) du droit allemand dans la Zivilprozessordnung "... [...] faute d'un tel accord, la partie qui a l'intention de récuser un arbitre expose par écrit les motifs de la récusation au tribunal arbitral", ainsi que du droit suédois. Soit l'introduction directe de la demande de récusation devant l'institution d'arbitrage, c'est le cas du droit OHADA, suisse, français, belge, anglais et italien, cas qui nous intéresse. Ainsi, si un arbitrage institutionnel de DIP se déroule sur le territoire suisse ou sur le territoire de l'un des États-Parties à l'OHADA, la procédure de récusation consistera à introduire directement sa demande devant l'institution d'arbitrage en l'occurrence pour le canton de Genève c'est la CCIG et pour les Etats-Parties à l'OHADA c'est la CCJA.

Notons enfin que, la décision de récusation rendue par le juge d'appui, qui qu'il soit, dans tous les cas (dans les deux systèmes), est non susceptible de recours. Cette prescription légale est perceptible dans les dispositions des articles 180 al. 3 LDIP "[...] le juge compétent du siège du tribunal arbitral statue définitivement" et 7 al. 3 in fine AU.A "[...] sa décision n'est susceptible d'aucun recours". Du point de vue du droit comparé, les droits allemand et suédois proposent des solutions idoines. Ceci étant, même si en droit suisse de l'arbitrage international et en droit OHADA de l'arbitrage, la décision de récusation rendue par le juge d'appui ne saurait faire l'objet d'un recours quelconque, cela ne doit aucunement être interprété comme un rejet systématique de la possibilité de l'attaquer. Simplement, elle ne saurait faire l'objet des voies de recours ordinaires. Mais elle peut cependant, faire l'objet d'un contrôle qui pourra s'exercer indirectement lors du recours contre la sentence arbitrale ou lors de son exequatur.

§ II-. LE STATUT DE L'ARBITRE DE DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE 

Le concept de statut de l'arbitre est une récente innovation du droit de l'arbitrage par la doctrine. Il regroupe d'un côté les conditions légales que doivent remplir les personnes pressenties pour être arbitre, les droits et obligations issus du receptum arbitri (contrat d'arbitrage ou d'investiture) et de l'autre côté les charges qui pèsent sur l'exercice d'une telle fonction à savoir : la responsabilité qui pèse sur les arbitres et enfin leur immunité. Notons toutefois que, les lois d'arbitrage des différents systèmes juridiques ne prévoient, dans leur immense majorité, rien quant au statut de l'arbitre. Du moins si elles existent, certaines de ces dispositions sont très lacunaires ou à l'étape embryonnaire dans les législations.

A-. LES CONDITIONS LEGALES

Sous cette rubrique nous analyserons, d'un côté les modalités légales prescrites par les deux lois d'arbitrage pour être un arbitre et, de l'autre côté, les droits et obligations pour les arbitres issus du receptum arbitri (contrat d'arbitre ou d'investiture).

1-. LES MODALITES LEGALES

En fait de modalités légales, le droit OHADA contrairement au droit suisse, dispose dans le texte de loi que "la mission d'arbitre ne peut être confiée qu'à une personne physique. L'arbitre doit avoir le plein exercice de ses droits civils, demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties" (art. 6 AU.A). C'est en ces termes que le droit communautaire OHADA fixe les conditions légales pour être arbitre dans cet espace. Même si la législation suisse de l'arbitrage international (LDIP) ne contient aucune disposition sur les conditions requises pour être un arbitre, la doctrine quant-à elle abonde d'éléments sur la question. En général, deux conditions légales sont souvent requises pour être un arbitre : être une personne physique et avoir le plein exercice de ses droits civils. L'analyse détaillée de ces deux conditions de base nécessaires la qualité d'arbitre de DIP en droit OHADA, nous conduit à faire les constatations suivantes :

* la disposition du droit OHADA qui exige de l'arbitre d'être "une personne physique" est une reprise de l'art. 1451 al. 1er NCPC du droit français qui pose la même exigence. Si on peut en induire qu'une personne morale ne peut pas être un arbitre dans le système OHADA, il n'est cependant pas prohibé qu'elle intervienne comme centre d'organisation. C'est le cas de la CCJA (Cour Commune de Justice et d'Arbitrage) et de la CCI (Chambre de Commerce Internationale de Paris). Ceci étant, le droit positif suisse sans pour autant dénier à la personne morale son statut admet a contrario son rôle non moins négligeable comme arbitre lorsqu'elle est indexée. Selon la doctrine, le TF considère que l'indication dans la convention arbitrale d'une personne morale, peut être interprétée comme désignant implicitement l'un de ses responsables comme arbitre. Bref, de la compréhension qu'on peut avoir des dispositions de l'art. 6 AU.A en droit OHADA, on peut tirer la conclusion selon laquelle, une personne physique étrangère peut être aussi arbitre dans cet espace. Sur ce point, la pratique est généralisée en droit de l'arbitrage international et le droit suisse n'en est pas du reste.

Cette conséquence de la qualité de l'arbitre, trouve certainement son origine formelle dans les dispositions de la loi type de la CNUDCI en son art. 11 qui stipule que "nul ne peut, en raison de sa nationalité, être empêché d'exercer les fonctions d'arbitre sauf convention contraire des parties". En général, et il est important de le souligner, les restrictions liées à la qualité d'arbitre se référant à la nationalité sont interdites dans la plupart des systèmes d'arbitrage. Cependant, si certaines restrictions spécifiques peuvent être imposées soit par les parties elles-mêmes dans leur convention, pour des raisons qui sont propres à la nature de la cause à juger ou la personne de l'arbitre, d'autres conditions a contrario peuvent être imposées par le droit applicable à la qualité d'arbitre qui, peut relever soit du choix des parties ou à défaut de la loi du siège de l'arbitrage. Pour ce dernier cas, le CIA en droit suisse de l'arbitrage en son art. 7 interdit, à titre d'exemple, l'exclusion des juristes en la qualité d'arbitre "est nulle, toute disposition d'une clause compromissoire qui interdit d'avoir recours à des juristes dans un procès arbitral, comme arbitres, secrétaires ou représentants des parties".

* l'arbitre "doit avoir le plein exercice de ses droits civils". La lecture entre les lignes de cette disposition nous amène à envisager la capacité juridique de l'arbitre. Tout comme en droit des contrats, l'évidence que l'arbitre partie au contrat d'arbitrage doit remplir la condition sine qua non de capacité n'est plus à démontrer. Cependant, la principale question de droit qui se pose ici est celle de la détermination du droit applicable à la capacité de l'arbitre. Les solutions apportées pour résoudre ce problème divergent selon les systèmes. Le droit OHADA en invoquant le plein exercice des droits civils de l'arbitre laisse entrevoir sa capacité qui dans la plupart des États OHADA s'apprécie d'après la loi personnelle de l'arbitre. Mais, dans la fixation de cette loi personnelle, en interrogeant la règle de conflit gouvernant la capacité d'exercice des personnes, le système OHADA rattache celle-ci à la nationalité de la personne dont la capacité est en cause, se démarquant ainsi de la majorité des États hors OHADA. C'est le cas du droit suisse dans lequel, la loi personnelle est celle du domicile de l'arbitre. A l'intérieur du système unifié communautaire OHADA il revient de se référer à la loi nationale de la personne pressentie pour être arbitre afin de déterminer si elle répond aux exigences de capacité. En Suisse, c'est sa loi de l'Etat de résidence ou de domicile qui détermine la loi personnelle de l'arbitre et donc sa capacité.

* L'arbitre doit "demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties". Nous ne reviendrons plus sur la double exigence d'indépendance et d'impartialité que nous avons déjà développée en long et en large dans la section relative à la récusation des arbitres.

Ceci étant, eu égard au rapport de droit qui oppose les parties initiales au contrat litigieux ayant donné naissance à l'arbitrage, l'arbitre apparaît comme un tiers qui se trouve être lié aux parties par un contrat appelé contrat d'investiture en droit OHADA et contrat d'arbitrage en Suisse ou encore receptum arbitri. De l'existence et de la nature de ce contrat particulier, peuvent apparaître des contentieux mettant en cause l'arbitre personne physique ou le centre d'arbitrage et les parties au litige et/ou des tiers. Quelle que soit la dénomination retenue, aucune réglementation exhaustive de la notion n'est observable dans les différentes lois d'arbitrage. Même si en droit suisse, ni la loi sur l'arbitrage international (chap. 12 LDIP) ni le concordat et en droit OHADA, ni l'acte uniforme relatif au droit de l'arbitrage ni le Traité en soi et le Règlement d'Arbitrage de la CCJA par extension ne définissent, la nature de la relation juridique qui pourrait naître de l'acceptation de la mission de l'arbitre, force est de constater que le fondement du rapport de droit qui oppose l'arbitre et/ou le centre d'arbitrage aux parties est contractuel.

Ce rapport contractuel, ayant pour objet la mission d'arbitrer, confiée à un tiers fixe, de par sa nature synallagmatique, des droits et des obligations réciproques avec pour conséquence le fait que les obligations des arbitres constituent des droits pour les parties et vice versa. Il s'agit d'une approche qui est aujourd'hui non contestée et consacrée dans tous les ordres juridiques. Mais, quelle est concrètement la nature du receptum arbitri dans les droits OHADA et suisse de l'arbitrage ? C'est la principale question de droit à laquelle nous essayerons d'apporter une réponse à la lumière des deux textes ici en présence.

En effet, la nature de ce contrat particulier diverge selon les systèmes. Certains y voient un contrat sui generis, d'autres le considèrent comme un mandat d'intérêt commun, mieux, d'autres encore lui attribue le qualificatif de contrat de prestation de service. En Suisse, le codificateur utilise le terme de contrat d'arbitrage alors que le législateur OHADA a jeté son dévolu sur l'expression de contrat d'investiture. Cette différenciation sémantique d'apparence futile n'est pas neutre, elle permet de différencier le régime juridique auquel ce contrat particulier est soumis. En effet, en Suisse la doctrine considère que le contrat d'arbitrage est "une variété de mandat, au sens très large de cette institution"62(*). Cependant, il n'est pas un mandat pur et simple puisqu'il échappe à la règle selon laquelle le mandat peut être répudié ou révoqué en tout temps. Ce mandat "hors normes" diverge du mandat "ordinaire" par un certain nombre de dérogations au régime légal ordinaire le régissant, notamment celui qui exclu tout pouvoir du mandant de donner des instructions à son mandataire. Cela va de soi dans la mesure où, si on conçoit bien que le mandant peut donner des instructions au mandataire, dans le cadre de ce mandat spécial qu'est le receptum arbitri une telle pratique violerait le principe sacro-saint de l'indépendance et de la neutralité de l'arbitre. Le droit OHADA, en optant pour la dénomination de contrat d'investiture, s'est aligné sous la position du droit français de l'arbitrage. A cet effet, la doctrine et la jurisprudence française rejettent systématiquement la qualification de mandat et préfèrent soumettre le lien entre l'arbitre et les parties à un régime sui generis reposant sur l'objet propre de la mission de l'arbitre qui est juridictionnel. Le receptum arbitri en droit positif français, n'est pas un mandat du simple fait que l'arbitre n'est pas un représentant de celui ou ceux qui l'ont nommé. Il est alors, différent du mandat et s'oppose au mandat, du fait de l'indépendance que l'arbitre possède, et dont il doit faire preuve, à l'égard des parties. Enfin sur cette question notons que, lorsque le receptum arbitri a un caractère international, la question de la loi qui lui est applicable se pose. Pour ce faire, à défaut d'élection de droit par les parties, le droit applicable aussi bien au receptum arbitri qu'au statut de l'arbitre, c'est bien celui du siège de l'arbitrage. Dans la mesure où l'Etat du siège présente, à ne point en douter, les liens les plus étroits avec la mission qu'accomplira l'arbitre, il est normal que ce soit sa loi qui soit prise en compte dans le cadre de la détermination de la loi applicable au receptum arbitri et au statut de l'arbitre. En effet, l'Etat du siège est beaucoup plus enclin à définir dans le cadre de la loi de l'arbitrage, l'étendue de la mission de l'arbitre et ses éventuels pouvoirs légaux. Mieux, c'est incontestablement le lieu de l'exécution de la prestation caractéristique du contrat dont il est récipiendaire, celle d'arbitrer.

Nous ne passerons pas sous silence le fait que, dans un procès judiciaire il est de principe que, le juge étatique ne peut se refuser de juger sous peine de déni de justice.

Il en va cependant autrement pour ce qui est du procès arbitral. En effet, nul ne peut être contraint contre sa volonté à être un arbitre dans une affaire déterminée. Le droit de l'arbitrage en a fait un principe général auquel la pratique de l'arbitrage international a adhéré et les deux lois que nous étudions ne lui échappent guère. Ainsi, aucun arbitre ne peut contre son gré être contraint à officier dans un arbitrage. Pour cela, tout arbitre doit avoir expressément accepté sa mission, laquelle acceptation doit être portée "à la connaissance des parties par tout moyen laissant trace écrite" (art. 7 al. 1er AU.A). Même si, dans les dispositions du chapitre 12 LDIP on ne retrouve aucune prescription sur la question, le contenu du dispositif de l'art. 14 CIA en droit suisse en dit long sur ce sujet  "les arbitres doivent donner leur acceptation". Notons que, cette exigence de la matérialisation écrite de l'acceptation de la mission de l'arbitre est toute particulière au droit OHADA, le droit suisse est peu regardant sur la forme que doit prendre l'acceptation par l'arbitre de sa mission. Nous concevons qu'elle peut être écrite ou orale tacite ou expresse peu importe, la seule exigence repose sur l'acceptation par l'arbitre de sa mission.

2-. LES DROITS ET OBLIGATIONS DES ARBITRES

Le receptum arbitri fait naître entre les arbitres et les parties une relation de type contractuelle dont la concrétisation permet à l'arbitre de remplir la mission à lui confiée par les parties: vider le litige source de la discordance entre elles. Comme tout contrat synallagmatique, le contrat d'arbitrage ou d'investiture (selon la terminologie appropriée choisie par chaque système) fixe des droits et obligations pour chacune des parties. Il impose aux arbitres des devoirs qui sont la contrepartie des droits des parties et vice versa. On ne retrouve ni dans l'AU.A en droit OHADA ni dans le chapitre 12 LDIP aucune énumération des différents droits et devoirs des arbitres. C'est à la doctrine et la jurisprudence qu'on doit toutes les sources de référence.

Notons que, en ce qui concerne les obligations des arbitres elles peuvent soit résulter de la convention des parties soit de la loi ou simplement faire appel à la conscience morale de l'arbitre. Sans pouvoir rentrer dans la catégorisation systématique de ces différents devoirs, nous pouvons citer comme exigences obligatoires pour les arbitres de DIP les devoirs suivants :

* Le devoir d'être indépendants et impartiaux vis-à-vis des parties à l'arbitrage et celui de respecter l'égalité des droits des parties tout au long de l'instance arbitrale. Ces deux exigences cumulées se réfèrent au devoir d'agir équitablement que l'art. 9 al. 1er AU.A consacre "les parties doivent être traitées sur un pied d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de faire valoir ses droits". Il en est de même en droit suisse des conditions de l'art. 25  CIA qui traite du droit d'être entendu "la procédure choisie doit en tout cas respecter l'égalité entre les parties [...]". Lorsque l'art. 192 al. 2 let. b dispose que, la sentence "ne peut être attaquée que [...] lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté", il pose ainsi l'exigence du respect dans le traitement égalitaire des parties dans la phase procédurale de l'instance.

* Le devoir qui, en vertu du receptum arbitri liant les parties aux arbitres, oblige ces derniers à agir avec toute la diligence requise dans l'intérêt du succès de l'arbitrage. Il s'agit d'une obligation morale qui, généralement est renforcée par une disposition légale (délai d'arbitrage) et qui impose à l'arbitre de rendre sa décision et donc la sentence dans le délai requis, quitte à pouvoir le proroger en cas de retard bien évidemment en tenant compte de la possibilité conventionnelle ou légale de prorogation.

* Le devoir qui, en vertu du receptum arbitrii ou du règlement d'arbitrage, oblige les arbitres à poursuivre leur mission jusqu'à son terme. Il s'agit ici aussi, d'une obligation morale relevant de la conscience professionnelle des arbitres et qui a pour objectif d'empêcher une démission sans motifs valablement justifiés.

* Le devoir qui, en vertu de receptum arbitrii ou du règlement d'arbitrage, tient les arbitres au respect de la confidentialité de l'arbitrage surtout dans sa phase procédurale. La confidentialité de l'arbitrage étant l'un des avantages de cette forme de justice par rapport au procès judiciaire qui est le plus souvent public ne saurait souffrir d'une quelconque entorse.

* Le devoir du respect du délai conventionnel d'arbitrage. Notons toutefois qu'à défaut d'une fixation conventionnelle, un délai de six mois à compter du jour où le dernier arbitre a accepté sa mission est prévu par le droit OHADA de l'arbitrage (art. 12 AU.A).

* Le devoir qui s'impose aux arbitres, dans le traitement du litige au fond, de se conformer aux prescriptions conventionnelles à charge pour eux de respecter les prescriptions impératives des parties voire les prescriptions impératives de la loi de l'arbitrage.

* Le devoir qui résulte de l'obligation conventionnelle à la charge des arbitres de respecter la forme procédurale dans laquelle la sentence devra être rendue.

Par ailleurs, pour les parties leur principale obligation se ramène à la rémunération les arbitres par des honoraires et le défraiement de leurs débours. C'est une question sensible que les lois ne règlent pas en général, c'est donc la pratique qui s'en charge et elle est variable d'un système à un autre. Notons que les honoraires sont fixés selon les barèmes fournis par les institutions permanentes d'arbitrage. Ils sont à la charge des parties et leur montant dépend de l'importance du litige, de sa complexité, du temps consacré à l'affaire et de la notoriété des arbitres. Au regard de la pratique internationale, trois méthodes de rémunération existent: la rémunération ad valorem, la rémunération par per diem et la rémunération qui fixe un montant forfaitaire et global dite méthode du forfait global. Le système de rémunération retenu par la CCJA tout comme la CCI de Paris est celle dite ad valorem. Si l'on se réfère aux dispositions du règlement suisse d'arbitrage international, la section relative à la rémunération des arbitres des articles 38 à 40 nous donne la précision sur la méthode de rémunération retenue en droit suisse de l'arbitrage. L'annexe B du texte nous laisse penser que le système retenu est semble-t-il celui de la rémunération ad valorem.

B-. LA QUESTION DE LA RESPONSABILITE ET DE L'IMMUNITE DES ARBITRES  DE DIP EN DROIT POSITIF OHADA ET LA SUISSE

Toute la doctrine fait observer que la question de la responsabilité de l'arbitre appelle celle de son immunité. Évoquer en droit de l'arbitrage international la question de la responsabilité de l'arbitre, revient à l'envisager sous l'angle de son immunité. Autrement dit, la problématique juridique qui se pose ici est celle de savoir si la responsabilité des arbitres de DIP peut être engagée sur la base du contrat qui les lie aux parties, pour tous les actes commis par eux dans l'accomplissement de la mission à eux confiée par les parties ? Ou bien doit-on considérer qu'ils sont couverts par une immunité totale ou partielle se justifiant par la singularité de la mission qu'ils exercent ? Le cas échéant doit-on assimiler cette immunité à celle du juge étatique de l'ordre juridique dans lequel ils officient ? Enfin quelle solution préconisent les deux lois d'arbitrage par rapport à la problématique de la responsabilité des arbitres de DIP ?

S'agissant de la responsabilité de l'arbitre, nous l'avons dit, la nature du rapport de droit qui existe entre les arbitres et les parties est contractuelle et aucun système ne remet ce principe en cause. De ce simple fait, il est évident que les arbitres doivent, en toute logique, répondre de tous les manquements à leurs obligations contractuelles. Partant de ce postulat, il est aisément concevable que toute partie qui a été victime d'une carence de la part d'un arbitre, doit chercher à rendre ce dernier personnellement comptable des dommages qu'elle a subit de ce fait, en mettant en cause sa responsabilité contractuelle. Cette logique, pour en revenir au droit comparé, semble ne pas recevoir l'accord d'adhésion de principe de tous les juristes praticiens du droit de l'arbitrage international, ce qui explique grosso modo la dualité qui s'observe sur ce plan.

- Une première tendance calquée sur le schéma présent aux États-Unis d'Amérique, déresponsabilise les arbitres et leur accorde une large immunité. Ainsi, les arbitres et les juges étatiques bénéficieraient sur le plan de la responsabilité, du même régime juridique étant donné la nature juridictionnelle de la mission qu'ils accomplissent. Cette tendance, qui s'inscrit dans la logique de la tradition des pays de droit coutumier que sont les pays de la Common Law, veut que les arbitres bénéficient de l'immunité de juridiction. Ils sont ainsi, dans une large mesure, à l'abri des poursuites pour les décisions prises dans l'exercice de leurs fonctions. Autrement dit, leur responsabilité ne doit pas être mise en cause pour des actes directement liés à leur mission juridictionnelle. Toute action en responsabilité contre un arbitre, allant dans le sens de la mise en cause "du bien ou mal jugé" de sa décision, doit être déclarée irrecevable. Cependant cette déresponsabilisation ne saurait signifier que, nous nous retrouvons dans l'hypothèse d'une absolution totale de la responsabilité des arbitres, ils ne peuvent bénéficier d'une véritable immunité couvrant leurs actes ou leurs omissions. Leur responsabilité ne doit être engagée qu'en cas de faute lourde, de fraude ou de dol et non lorsque ce qui leur est reproché, repose directement sur le contenu de l'acte juridictionnel pour négligence ou incompétence. Un auteur fait observer sur ce sujet que "même lorsque l'on tient pour acquis qu'il existe un contrat entre les arbitres et les parties, il ne s'ensuit pas nécessairement que l'arbitre sera personnellement responsable envers les parties des dommages causés par sa négligence ou son incompétence [...]"63(*). Cependant, n'excluant pas la responsabilité contractuelle et extracontractuelle des arbitres, ils (les auteurs) estiment que cette responsabilité contractuelle doit être modérée et adaptée au principe de la responsabilité contractuelle du fait de la singularité de la mission de l'arbitre. Les arguments forces qui soutiennent cette tendance ont été largement développés par une certaine doctrine qui fait valoir des questions d'ordre personnel et pratique.64(*)

- Si cette thèse ne manque pas de pertinence, on peut cependant lui opposer l'antithèse selon laquelle, aucune logique ne permet de dégager les arbitres de leur responsabilité en cas de négligence, de légèreté ou d'incompétence.

Tandis que, d'autres professionnels, prestataires de services tout comme eux en sont exposés et en répondent en toute légitimité, rien ne justifie la déresponsabilisation des arbitres, d'où la pertinence des idées soutenues par la deuxième tendance. Pour les partisans de celle-ci, les arbitres sont des prestataires de services et ils sont donc tenus de répondre de leurs négligences et fautes comme n'importe quel professionnel, prestataire de services. Par conséquent l'évocation de leur immunité, fût-elle partielle ou totale, couvrant leur responsabilité sur la base des dommages causés par leur négligence ou incompétence ne doit pas être de mise.

Quid du droit OHADA  et du droit suisse de l'arbitrage international?

La nature contractuelle de la relation entre les arbitres et les parties n'est pas remise en cause par la doctrine suisse. Quoique dans la pratique les arbitres dans ce système jouissent d'une large immunité65(*) l'action en responsabilité contre eux n'est pas exclue pour faute lourde, fraude et dol. Aussi, les limitations aux responsabilités du juge étatique ne sont pas applicables par analogie aux arbitres. Cependant, les dispositions du chapitre 12 LDIP, en réduisant la gamme des voies de recours contre la sentence, semblent de ce fait, accroître la responsabilité des arbitres dans l'accomplissement de leur mission. En droit OHADA par contre le codificateur semble éluder la question de la responsabilité de l'arbitre et c'est sous le prisme de son immunité que la question est évacuée. Dans ce système, il faut savoir que l'arbitre rend la sentence en son nom personnel et non pas au nom du peuple de l'Etat-partie ou des États-Parties au traité OHADA. Ceci étant, l'évidence de l'accomplissement par l'arbitre d'une mission juridictionnelle n'est point contestée. Cependant, la responsabilité qu'il encourt dans l'exercice de sa mission, obéit non au régime particulier de la responsabilité des juges étatiques mais au droit commun. S'inspirant de ce fait des règles applicables à la responsabilité des mandataires (responsabilité pour faute prouvée par exemple, le non respect du délai imparti pour rendre la sentence, arbitre ayant accepté sa mission malgré une incompatibilité qu'il connaissait, responsabilité pour faute lourde, responsabilité dolosive etc.). Aussi, il conviendrait de souligner que, le droit OHADA exonère les arbitres désignés par la CCJA de toute responsabilité en leur accordant une immunité totale. Même sur ce plan, force est de constater que, ni l'AU.A ni le Traité en soi ne contiennent aucune disposition conférant aux arbitres une quelconque immunité, mais par contre, dans l'arbitrage institutionnel de la CCJA, l'art. 49 du traité confère une immunité diplomatique aux seuls arbitres nommés par la cour. Il va s'en dire qu'ils ne peuvent être attraits devant une juridiction pour faute même intentionnelle ou grave commise dans l'exercice de leurs fonctions. En règle générale, sur le plan du droit applicable, l'immunité des arbitres ne peut être affirmée que par la loi gouvernant la procédure arbitrale ou le contrat d'investiture. A bon droit, certains auteurs de l'arbitrage commercial international affirment que "cette immunité ne peut être accordée que par l'autorité publique dans un but d'intérêt général". Ils ajoutent "qu'en l'absence de convention internationale sur cette question seuls les droits nationaux peuvent conférer à l'arbitre cette immunité". Pour d'autres auteurs, "la législation applicable... peut conférer aux arbitres l'immunité du fait qu'ils exercent une fonction judiciaire ou quasi-judiciaire [...] c'est une question d'ordre public qui est de nature à varier d'un Etat à l'autre".

SECTION II-. L'INSTANCE ARBITRALE

§ I-. L'INSTANCE ARBITRALE

Lorsque le rapport de droit entre les parties au contrat s'effrite, il y a lieu de régler le litige afin de parer au plus pressant à l'altération complète de la situation. C'est l'objet ultime de l'instance arbitrale qui couvre toute la période du déroulement de la procédure arbitrale. Celle-ci, court de la constitution du tribunal arbitral à la sentence rendue. Dans un arbitrage de DIP, le principe directeur du libéralisme qui gouverne le droit de l'arbitrage trouve également sa place. On le retrouve formellement dans les dispositions des deux lois d'arbitrage que nous étudions. Mais avant, il conviendrait d'aborder la question de la litispendance telle que prévue par les deux lois d'arbitrage.

A-. LA LITISPENDANCE

DROIT COMPARE

Art. 10 al. 2 AU.A

"L'instance arbitrale est liée dès le moment où l'une des parties saisit le ou les arbitres conformément à la convention d'arbitrage, ou, à défaut d'une telle désignation, dès que l'une des parties engage la procédure de constitution du tribunal arbitral".

Art. 181 LDIP

"L'instance arbitrale est pendante dès le moment où l'une des parties saisit le ou les arbitres désignés dans la convention d'arbitrage ou, à défaut d'une telle désignation, dès que l'une des parties engage la procédure de constitution du tribunal arbitral".

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En droit privé, on parle de litispendance lorsque deux juridictions de même degré ont été concomitamment saisies du même litige alors qu'elles sont également toutes compétentes pour connaître de l'affaire. Aussi, lorsque le litige a été porté devant deux différentes juridictions, qui plus est de même degré, et qu'il y a un intérêt à ce qu'elles soient instruites et jugées ensembles, la litispendance est envisageable. Dans ce cas, il y a lieu de procéder au dessaisissement de la juridiction saisie en second lieu au profit de l'autre si l'une des parties le demande ou à défaut d'office.

En droit de l'arbitrage international, la problématique de la litispendance se pose en termes de détermination du début de l'instance liant les parties à l'arbitrage. Elle est d'une importance singulière et se pose à plusieurs égards. D'une part, la fixation du début de l'instance liant les parties à l'arbitrage permet par exemple de vérifier le respect par elles du délai lié à l'exercice d'un droit en l'occurrence, celui fixé conventionnellement ou légalement pour engager la procédure. D'autre part, la détermination du début de l'instance liant les parties permet, au surplus, de déterminer le moment où la cause est pendante devant le tribunal arbitral. Ceci, dans l'optique de l'éventualité d'une suspension de la procédure (judiciaire ou arbitrale) introduite postérieurement entre les mêmes parties sur le même objet. Enfin, elle peut avoir comme effet la fin de la prescription ou la péremption des prétentions soumises au tribunal arbitral, lorsque le droit applicable (celui du fond du litige) lui confère cet effet.

Pour en revenir au cas de l'étude comparée des deux textes législatifs objets de notre travail, il y a lieu de dire que, pour déterminer le moment où l'instance lie les parties à l'arbitrage, le droit OHADA de l'arbitrage et le droit suisse de l'arbitrage international distinguent deux conditions.

L'instance est pendante dès lors que, l'arbitre est désigné dans la convention d'arbitrage et que l'une des parties le saisit conformément à cette convention d'arbitrage. C'est ce qu'on infère logiquement des dispositions suivantes : "l'instance arbitrale est liée dès le moment où l'une des parties saisit le ou les arbitres conformément à la convention d'arbitrage [...]" (art. 10 al. 2 AU.A). Idem en droit suisse de l'arbitrage international où, le texte de l'art. 181 LDIP dispose que "l'instance arbitrale est pendante dès le moment où l'une des parties saisit le ou les arbitres désignés dans la convention d'arbitrage". Cependant, en cas de pluralité d'arbitres et selon les termes de la convention, la simple saisine de l'un d'entre eux suffit à lier l'instance. Si par contre cette première condition n'est pas remplie, les deux lois d'arbitrage prévoient que, l'engagement de la procédure de constitution du tribunal arbitral suffit à lier les parties à l'instance arbitrale. En effet, la non-désignation conventionnelle de l'arbitre ou des arbitres emportant leur saisine subséquente, en cas de litige, suffit pour que la seconde condition soit remplie. C'est tout le sens des dispositions des articles 10 al. 2 in fine AU.A et 181 in fine LDIP. La formulation est identique dans les deux textes " [...] ou, à défaut d'une telle désignation, dès que l'une des parties engage la procédure de constitution du tribunal arbitral". Dans cette hypothèse, les parties sont liées à l'instance arbitrale dès l'engagement de la procédure de constitution du tribunal arbitral par l'une des parties en vertu des dispositions subsidiaires des articles 5 al. 2 AU.A et 179 al. 2 LDIP relatives à la constitution du tribunal arbitral par le juge d'appui. Somme toute, il y a lieu de faire remarquer que les dispositions des deux textes sur la question, à la lecture de leurs contenus respectifs sur la litispendance (art. 10 al. 2 AU.A et art. 181 LDIP) sont quasi identiques. Une remarque qu'on ne saurait passer outre dans les deux systèmes porte sur le fait que, dans les deux cas, l'instance est liée uniquement dès l'engagement de la procédure en désignation des arbitres sans que l'impériosité d'une demande d'arbitrage adressée à la partie adverse soit exigée, de la partie demanderesse.

B-. LA PROCEDURE ARBITRALE SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP

Avant tout, il convient de faire un petit rappel de la distinction qui existe entre les règles applicables à l'instance arbitrale et la loi d'arbitrage. En effet, les règles applicables à l'instance arbitrale regroupent l'ensemble des normes qui régissent la marche de la procédure à suivre devant le tribunal arbitral. Pour être plus précis, ces normes ne prennent pas en compte la validité de la convention d'arbitrage non plus le rapport entre la juridiction arbitrale et la juridiction étatique c'est-à-dire, les voies de recours ouvertes devant celles-ci. Par ailleurs, la notion de loi d'arbitrage est beaucoup plus vaste et regroupe aussi bien les conditions de validité de la convention d'arbitrage, le contrôle par les tribunaux étatiques de l'activité des arbitres, l'arbitrabilité du litige, l'assistance du juge étatique, que les règles applicables à l'instance arbitrale. Ceci étant, sans pour autant nous déconnecter de l'étude comparée des deux lois d'arbitrage, il est important de relever que si les parties ont choisi l'AU.A et le chapitre 12 comme loi procédurale, le principe d'autonomie dont nous avions fait cas ne concernera que les règles applicables à l'instance arbitrale. Quelle est donc l'importance du choix par les parties elles-mêmes de la loi procédurale ?

La primauté du choix par les parties de la loi régissant la procédure arbitrale est d'une importance capitale. En effet, les parties étant au centre de l'arbitrage leur choix influencera, sans aucun doute, certaines questions d'importance capitale pour le règlement privé de leur litige notamment.

Ainsi, toutes les questions relatives à la constitution du tribunal arbitral, la compétence des arbitres, les questions relatives aux différents délais, la communication des pièces, les mesures provisoires et conservatoires, la conduite de l'arbitrage proprement dit, l'existence, la validité, le caractère définitif et l'applicabilité de la sentence, seront influencées par le choix des parties. Cette précision était d'importance pour la suite du développement.

1-. LE LIBERALISME : PRINCIPAL VECTEUR PROCEDURAL EN MATIERE D'ARBITRAGE INTERNATIONAL

DROIT COMPARE

Art. 14 AU.A

"Les parties peuvent directement ou par référence à un règlement d'arbitrage régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix".

Art. 182 LDIP

"Les parties peuvent directement ou par référence à un règlement d'arbitrage régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix".

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Le droit de l'arbitrage, faut-il le rappeler, est dominé par le principe du libéralisme qui est particulièrement affirmé pour ce qui est de la procédure à suivre par les arbitres. Mais cependant, certaines limites lui sont apportées par les législations modernes sur l'arbitrage.

En effet, s'il est un principe sur lequel on ne saurait transiger en droit de l'arbitrage en général et celui de l'arbitrage international en particulier, c'est celui de l'autonomie de la volonté des parties, de leur liberté procédurale. Ce principe est le fondement de la nature conventionnelle de l'arbitrage en tant que méthode privée de règlement des litiges. Ainsi, la détermination de la procédure à suivre dans un arbitrage international est donc gouvernée par le principe directeur de l'autonomie de la volonté des parties à titre principal et, à titre subsidiaire, la volonté des arbitres. Ce principe est non seulement pris en compte par les législations nationales sur l'arbitrage interne et international mais aussi par les règlements des institutions et organismes internationaux d'arbitrage. Au titre du droit comparé, on remarque que la loi-type l'adopte lorsqu'elle énonce en son art. 19 que "sous réserve des dispositions de la présente loi, les parties sont libres de convenir de la procédure à suivre par le tribunal arbitral". Il en est de même du NCPC du droit français qui, formule en son art. 1494 le principe en ces termes : "la convention d'arbitrage peut directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure à suivre dans l'instance arbitrale; elle peut aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure qu'elle détermine". Lorsqu'on sait que, par tradition juridique, le respect de ce principe "d'autonomie de volonté" se situe dans le prolongement du protocole de Genève de 1923 qui dispose que "la procédure de l'arbitrage, y compris la constitution du tribunal arbitral, est réglée par la volonté des parties" ; et de la convention de New York au terme de laquelle "la reconnaissance et l'exécution de la sentence seront refusées... si la procédure d'arbitrage n'a pas été conforme à la convention des parties", il est évident que l'AU.A et le chapitre 12 LDIP n'échappent guère à l'application de ce principe de base du droit de l'arbitrage.

Les deux lois d'arbitrage font l'unanimité dans leur formulation de ce principe puisque, les dispositions du droit suisse en son art. 182 LDIP et du droit OHADA en son art. 14 AU.A sont, en la matière, identiques.

Elles disposent toutes deux que "les parties peuvent directement ou par référence à un règlement d'arbitrage régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix". De la lecture et de la compréhension de cet article, il s'ensuit que les parties disposent de la possibilité de réglementer la procédure arbitrale dans deux hypothèses :

- Les parties ont l'entière liberté de définir directement la démarche procédurale. Dans ce cas, elles fixent elles-mêmes les modalités de la procédure lors de la conclusion de la convention d'arbitrage ou postérieurement, ces modalités s'imposeront aux arbitres qui les auront acceptées en même temps que leur mission.

- Les parties par référence soit à un règlement d'arbitrage ou soit par référence à une loi nationale, à une loi de procédure civile régissant la procédure devant les tribunaux étatiques ou encore à une loi d'arbitrage étrangère, choisissent la procédure que les arbitres devront suivre. Dans ce cas, c'est par renvoi de la convention que le choix des règles procédurales s'opère. Ce choix préludera la démarche procédurale à suivre par le tribunal arbitral.

Qu'elle soit directe ou indirecte la règle d'autonomie est d'application, c'est-à-dire que les parties sont totalement libres d'indiquer dans leur convention leur choix pour une loi applicable à la procédure différente de la loi régissant le fond du litige ou le contrat principal. Ce choix lorsqu'il est exprimé clairement, il se doit d'être respecté par les arbitres.

Cependant, si dans la convention on ne retrouve pas ces deux hypothèses, il revient au tribunal arbitral de déterminer les règles procédurales appropriées. C'est l'hypothèse de la détermination de la procédure arbitrale par les arbitres. L'acte uniforme en droit OHADA le précise bien en ces termes "[...] faute d'une telle convention, le tribunal arbitral peut procéder à l'arbitrage comme il le juge approprié" (art. 14 al. 2). Le droit suisse formule le même principe mais en des termes différents. L'art.182 al. 2 LDIP dispose que "[...] si les parties n'ont pas réglé la procédure, celle-ci sera, au besoin, fixée par le tribunal arbitral, soit directement, soit par référence à une loi ou à un règlement d'arbitrage". Dans cette dernière alternative, c'est la volonté du tribunal arbitral qui est ainsi mis en exergue soit directement, soit indirectement (par référence à un règlement d'arbitrage ou à une loi étatique). Ce dernier, en principe, n'est pas tenu de suivre la procédure édictée pour les tribunaux étatiques même s'il officie en qualité d'aimable compositeur.

Une remarque fortement intéressante pour cette étude comparée mérite notre attention. Dans sa formulation, les dispositions du droit OHADA sur cette question paraissent plus libérales que ne le sont celles du chapitre 12 LDIP. En effet, la formulation "comme il le juge approprié" du droit communautaire OHADA donne au tribunal arbitral la totale liberté de déterminer par défaut les règles procédurales. Ainsi, l'AU.A offre au tribunal la possibilité de pouvoir opérer son choix dans un large éventail, dans un registre plus vaste que ne lui offre le chapitre 12 LDIP. Le texte tel qu'il est formulé offre une grande flexibilité au tribunal arbitral lui permettant de s'en remettre par exemple soit à une procédure ad hoc, soit à un règlement arbitral institutionnel ou non, soit à une loi de procédure civil ou non de son choix ou soit carrément, d'élire les règles procédurales qu'il juge appropriées. C'est le cas notamment lorsque le tribunal arbitral s'en remet par exemple aux règles de l'International Bar Association quant aux preuves (IBA). Le répondant à cette hypothèse en droit suisse de l'arbitrage international peut se lire dans la formulation "au besoin" du texte de l'art. 182 al. 2. Tout peut porter à croire que, la référence à un ensemble de normes préétablies comme nous le propose le texte du chapitre 12 LDIP "par référence à une loi ou à un règlement d'arbitrage" restreint la marge de manoeuvre du tribunal.

Le tribunal arbitral dans ce cas, serait-il astreint dans son choix à l'alternative "loi / règlement d'arbitrage" ? En réalité, la liberté du tribunal n'est pas limitée à l'adoption d'un règlement de procédure préexistant ou d'une loi quelconque. Tout comme l'autonomie des parties, celle du tribunal arbitral, par défaut, est sans limite et les dispositions du chapitre 12 LDIP ne devraient recevoir une interprétation restrictive. D'une manière générale, la pratique admet que le tribunal arbitral édicte par le truchement d'une ordonnance de procédure, des règles applicables aux points focaux de la procédure arbitrale, quitte à pouvoir au fur et à mesure du déroulement de l'arbitrage, adapter de nouvelles règles de procédure aux nécessités de l'instance. C'est en substance ce que nous rappelle J-F. POUDRET et S. BESSON dans l'assertion suivante : "les arbitres n'ont pas l'obligation de définir d'emblée toutes les règles gouvernant l'instance arbitrale et peuvent édicter des normes au fur et à mesure du déroulement de la procédure en fonction des difficultés qui se présentent à eux"66(*). Une autre admission, non pas des moindre, de la pratique internationale de l'arbitrage, dans le cadre de la détermination de la loi procédurale, voudrait que, aussi bien les parties que le tribunal se référent à l'usage de la loi de référence, laquelle permet d'arrêter les directives de procédure en s'inspirant de tel règlement d'arbitrage ou de telle loi de procédure. Toutes ces possibilités sont bien évidemment admissibles dans les systèmes OHADA et suisse sur le fondement du contenu des deux lois d'arbitrage.

Pour en revenir à l'hypothèse de la détermination de la procédure arbitrale par les arbitres, il est clair que c'est le défaut de la convention qui offre cette possibilité au tribunal arbitral. En effet, si les parties n'ont rien prévu, c'est-à-dire le défaut d'une telle définition n'emporte pas systématiquement compétence du tribunal arbitral pour la détermination de la norme procédurale appropriée. Celui-ci doit rechercher dans la volonté des parties, les indices qui permettront de déterminer cette loi. Même si dans les deux lois d'arbitrage on ne retrouve pas cette hypothèse de recherche d'indices dans la volonté des parties, il est nécessaire de souligner que la pratique de l'arbitrage l'admet et la consacre.

Le problème se corse lorsqu'en dépit de la recherche d'indices dans la volonté des parties d'une part et, le défaut du tribunal arbitral d'autre part, on ne parvient pas à dégager la loi applicable à la procédure. Dans ce cas, quel droit faudra-t-il appliquer à la procédure ?

Un élément de réponse à cette question cruciale, qu'il est difficile de retrouver dans les lois d'arbitrage que nous étudions, peut être recherché dans les conventions internationales. En effet, dans l'énonciation des motifs de refus de reconnaissance et d'exécution de la convention de New York, il y est stipulé à l'art. V al. 1 b que "la reconnaissance et l'exécution de la sentence ne seront refusées [...] que si cette partie fournit à l'autorité compétente du pays où la reconnaissance et l'exécution sont demandées la preuve [...] que la constitution du tribunal arbitral ou la procédure d'arbitrage n'ait pas été conforme à la convention des parties ou, à défaut de convention, à la loi du pays où l'arbitrage a eu lieu". La Convention de New York affirme donc, une alternative dans laquelle la référence à la loi du siège n'est que supplétive. Ce n'est qu'à défaut d'indication par les parties à titre principal et, les arbitres à titre subsidiaire de la loi procédurale, qu'il faut se référer à la loi du lieu de l'arbitrage. La loi d'arbitrage du siège vient donc suppléer au défaut d'indication des parties et des arbitres et devient de ce fait la loi de l'arbitrage, contenant aussi, de ce simple fait, les dispositions applicables à l'instance arbitrale.

Nonobstant ce libéralisme, dans la détermination de la loi procédurale reconnu aux parties à titre principal et aux arbitres à titre subsidiaire, le principe de l'autonomie procédurale connaît aussi, un certain nombre de restrictions ou limites que l'on retrouve dans presque toutes les législations sur l'arbitrage. L'AU.A et le chapitre 12 LDIP n'en sont pas du reste.

2-. LES LIMITES A L'AUTONOMIE PROCEDURALE EN DROIT OHADA ET SUISSE

Le but ultime du procès arbitral étant de rendre une sentence qui à terme sera exécutoire, les principes directeurs d'un procès civil lui sont bien évidemment applicables. Ainsi, les parties à titre principal et les arbitres à titre subsidiaire, en dépit de leur liberté de choix de la norme procédurale, sont limités dans la pratique de l'arbitrage international par, le respect des droits procéduraux fondamentaux sans lesquels l'arbitrage basculerait dans l'arbitraire. Ces limites, on les retrouve aussi dans les dispositions des articles 9 AU.A et 183 al. 3 LDIP. Notons que, l'autonomie en matière procédurale trouve aussi, de toute manière, ses autres limites dans les dispositions impératives des lois d'arbitrage du siège.

En droit OHADA, les limitations à l'autonomie privée des parties et des arbitres se trouvent disséminées de manière éparse dans l'AU.A (art. 9, 10 et 14). Mais qu'importe ! La loi fait du respect des droits procéduraux fondamentaux, la condition avant-gardiste de la liberté privée des parties et des arbitres en matière procédurale. Quelles sont donc ces limitations prévues par l'AU.A.

Une première limite à l'autonomie des parties ou des arbitres dans la détermination des règles procédurales nous est donnée dans les dispositions de l'art. 9 AU.A. Tout comme la loi type de la CNUDCI en son art. 18, l'AU.A en son art. 9 dispose que "les parties doivent être traitées sur un pied d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de faire valoir ses droits". Dans la formulation de cette disposition sont mises en évidence deux règles:

- la règle de l'égalité de traitement entre les parties. En effet, l'idée que les parties soient traitées sur un pied d'égalité est au coeur de tous les systèmes judiciaires et juridictionnels, et l'arbitrage en tant que système juridictionnel de règlement des litiges, en dépit de son caractère privé, n'échappe pas à l'application de ce principe.

- la règle qui porte sur le fait que, les parties doivent pouvoir faire valoir leurs prétentions sans entrave aucune. Cette règle relève du souci d'équité dans le traitement des parties, par rapport à la formulation des questions de fait et de droit qu'elles peuvent soumettre à l'examen du tribunal arbitral.

De l'idée du Prof. P. Meyer, ces deux règles cumulées se rapprochent du principe du contradictoire visé par l'art. 26 AU.A. Nous ne contredirons pas ce rapprochement dans la mesure où, le principe du contradictoire qui suppose que les deux parties aient, de manière égale, été mises en mesure de faire valoir leurs droits, ne contrarie en rien les dispositions de l'art. 9 AU.A. Principe que l'on retrouve aussi en droit suisse de l'arbitrage international.

Une deuxième limite, porte sur le fait qu'il est interdit aux arbitres de "[...] fonder leur décision sur les moyens qu'ils auraient relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations" (art. 14 al. 6 AU.A). Se situant dans la suite logique de la continuité des applications des règles de l'art. 9 AU.A précédemment citées, cette disposition constitue aussi, une condition restrictive à la portée de l'autonomie procédurale. À ce titre, elle fait partie de l'ordre public procédural et son non-observation devra entraîner l'annulation de la sentence ou le refus de sa reconnaissance et de son exécution.

La même lecture peut être faite au sujet de la règle de l'art. 14 al. 5 AU.A qui, prescrit aux arbitres de "retenir dans leur décision les moyens, les explications ou les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement". Cette règle est une des interprétations du droit d'être entendu en procédure contradictoire.

Une dernière limite consiste dans la violation par le tribunal arbitral des dispositions de l'art. 9 AU.A. En effet, tout tribunal arbitral qui accepterait la procédure qui prévoirait l'audition d'une seule partie violerait les règles contenues dans les dispositions de l'art. 9 AU.A. Autrement dit, le tribunal arbitral ne saurait transgresser le principe du traitement égalitaire en auditionnant qu'une seule partie au préjudice de l'autre. De même les parties, fort du principe de l'égalité de traitement que la loi leur reconnaît, doivent disposer du même délai dans l'examen des pièces et mémoires pour préparer leurs moyens de fait et de droit.

Quid du chapitre 12 LDIP ?

Le chapitre 12 LDIP ne disait pas autres choses lorsqu'il affirmait à son art. 182 al. 3 LDIP que "[...] le tribunal arbitral doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit d'être entendu en procédure contradictoire". Cette disposition à elle seule, résume si bien toutes les exigences de respect des droits fondamentaux procéduraux, lorsqu'il s'agit de déterminer les limites à la liberté privée des arbitres et des parties dans une instance arbitrale en matière procédurale. En dépit du caractère laconique du texte de la loi suisse sur la question, il est fort aisé de comprendre que, la formulation "droit d'être entendu en procédure contradictoire" est une séquence de phrase qui contient deux différentes notions mais tout de même complémentaires. Il s'agit du droit d'être entendu et la procédure du contradictoire. Le droit d'être entendu est une notion très vaste qui n'a pas une portée indépendante par rapport au droit au traitement égalitaire entre les parties dont le texte fait d'ailleurs mention67(*). Quant à la procédure du contradictoire, elle constitue une garantie qui permet à chaque partie de se déterminer sur les moyens de fait et de droit de son adversaire. Elle permet aussi, d'examiner et de discuter les preuves rapportées par lui et de les réfuter par ses propres preuves. La procédure contradictoire constitue, pour ainsi dire, une règle relevant de l'ordre public procédural et donc, son non-respect devrait, sans nul doute, être un motif d'annulation de la sentence ou le refus de sa reconnaissance et de son exécution. En résumé, les deux lois d'arbitrage que nous collationnons formulent toutes, de manière fort différente, le principe de l'autonomie de la volonté des parties à titre principal et des arbitres à titre subsidiaire dans la détermination de la norme procédurale. Cependant, le respect des droits procéduraux fondamentaux seul gage du succès d'une justice équitable constitue les limites admises par l'AU.A et le chapitre12, limites sans lesquels la justice arbitrale basculerait dans l'arbitraire.

B-. LES MESURES PROVISOIRES OU CONSERVATOIRES ET LES MESURES PROBATOIRES

Il est question ici pour nous, d'analyser les mesures qui dans un arbitrage de DIP permettent la conservation des preuves voire l'objet sur lequel porte le différend. Aussi, nous passerons en revue la preuve en elle-même et son régime juridique envisagés sous l'emprise de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP.

1-. LES MESURES PROVISIONNELLES OU CONSERVATOIRES

DROIT COMPARE

Art. 13 al. 4 AU.A

"Toutefois, l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle à ce qu'à la demande d'une partie, une juridiction, en cas d'urgence reconnue et motivée ou lorsque la mesure devra s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA, ordonne des mesures provisoires ou conservatoires, dès lors que ces mesures n'impliquent pas un examen du litige au fond, pour lequel seul le Tribunal arbitral est compétent".

Art.183 LDP

1) "Sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut ordonner des mesures provisionnelles ou des mesures conservatoires à la demande d'une partie.

2) Si la partie concernée ne s'y soumet pas volontairement, le tribunal arbitral peut requérir le concours du juge compétent. Celui-ci applique son propre droit.

3) Le tribunal arbitral ou le juge peuvent subordonner les mesures provisionnelles ou les mesures conservatoires qu'ils ont été requis d'ordonner à la fourniture de sûretés appropriées".

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Aussi bien l'AU.A en droit OHADA que le chapitre 12 LDIP en droit suisse, ne donnent aucune définition des notions de mesures provisionnelles et conservatoires. Cette lacune, comme le disent si bien P. LALIVE, J-F POUDRET et C. REYMOND, peut trouver une explication dans le fait que l'évocation de ces deux mesures dans les textes et la pratique de l'arbitrage de DIP, constitue "un domaine nouveau pour la pratique arbitrale, pour lequel on ne peut aujourd'hui qu'esquisser des solutions"68(*). Pour la définition de ces mesures nous esquisserons donc des solutions.

Les mesures conservatoires préservent une situation ou les droits des parties, elles sont destinées à sauvegarder soit les preuves, soit l'objet litigieux en attendant qu'une décision sur le fond soit rendue. Les mesures provisoires quant à elles, elles peuvent soit avoir un but simplement conservatoire, soit viser à créer ou à modifier un certain état de fait, en vue d'assurer une exécution effective de la sentence, ou de limiter les effets négatifs que peut provoquer l'existence et la durée du procès arbitral. Ces dernières mesures, se caractérisent non pas par leur objet mais, par leur effet et de ce fait, elles ne lient pas l'autorité qui les a rendues a fortiori l'arbitre ou le juge appelé à statuer sur le fond69(*). Ceci étant, la double question récurrente qui se pose d'abord ici, est celle de la compétence du tribunal arbitral de DIP à pouvoir ordonner de telles mesures et, le cas échéant, la reconnaissance et l'exécution de ces mesures du tribunal conformément à la réglementation de l'arbitrage international OHADA et suisse.

a-. LA COMPETENCE DES JURIDICTIONS ARBITRALES ET/OU ETATIQUES

D'une manière générale, les mesures conservatoires et provisoires peuvent être prises par le tribunal arbitral de DIP. Au titre du droit comparé, presque toutes les réglementations modernes sur le droit de l'arbitrage international autorisent le tribunal arbitral à prendre, s'il le juge nécessaire, ces mesures en ce qui concerne l'objet du litige. Il en est ainsi de l'art. 26 du règlement CNUDCI, de l'art. 17 de la loi-type CNUDCI, du § 1041 al. 1 ZPO en droit allemand, de l'art.1696 al. 1 CJB en droit belge, et l'art. 25 al. 4 SU en droit suédois, pour ne citer que ces textes. En droit positif français, le codificateur ne prévoit aucune disposition sur la prise de telles mesures dans un arbitrage de DIP, seules les références jurisprudentielles et doctrinales et qui, d'ailleurs, ont fait l'objet de controverses,70(*) légitiment la prise par le tribunal arbitral de telles mesures. Toutefois, le code de procédure civil italien est très restrictif et formel sur l'interdiction qui est faite aux arbitres d'autoriser des saisies et d'autres mesures conservatoires (art. 818 CPCI).

Les deux lois d'arbitrage que nous étudions, n'échappent pas à la généralisation de la tendance admettant la compétence du tribunal arbitral à ordonner de telles mesures. En effet, les réglementations OHADA et suisse de l'arbitrage international reconnaissent toutes deux, une compétence au tribunal arbitral en matière de mesures provisionnelles et conservatoires. Cependant, elles procèdent différemment aussi bien dans la formulation et le contenu de telles mesures que dans les conditions d'exercice de ces pouvoirs par les tribunaux arbitraux et étatiques au besoin.

En droit suisse de l'arbitrage international, l'art. 183 LDIP, contrairement au droit concordataire, donne au tribunal arbitral de DIP l'autorisation d'ordonner des mesures provisionnelles ou conservatoires sauf stipulation contraire. La formulation d'une telle autorisation légale est claire "sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut ordonner des mesures provisionnelles ou des mesures conservatoires à la demande d'une partie". Si nous convenons de par cette disposition que, les parties peuvent exclure par convention ce droit légalement accordé au tribunal arbitral, ce dernier quant à lui ne peut exercer ce pouvoir légal que, si la demande est formulée par une des parties à l'arbitrage. Cependant, en dépit de sa compétence, le tribunal arbitral n'est pas autorisé à ordonner toutes sortes de mesures. Il en en ainsi, des mesures provisoires liées à une exécution forcée comme la saisie conservatoire, le séquestre des biens. Il a besoin pour ce faire, du concours d'une autorité qui détient l'imperium notamment le juge étatique. Dans ce cas, il sera légitimé dans sa démarche par les dispositions de l'art. 184 LDIP qui conclut que "si l'aide de l'autorité judiciaire est nécessaire dans d'autres cas, on requerra le concours du juge du siège du tribunal arbitral".

La prise de ces mesures en droit OHADA, n'est pas explicite dans la formulation du texte de l'art. 13 al. 4 AU.A. En effet, ce texte tel qu'il est formulé, laisse entrevoir l'interprétation selon laquelle, l'AU.A ne réserve que la compétence de la juridiction étatique pour l'octroi de telles mesures.

Ce qui peut paraître vraisemblable dans la mesure où, aucune trace d'une allusion à la possibilité pour un tribunal arbitral de rendre de telles mesures, n'est observable dans l'AU.A. Mais dans ce système rien, semble-t-il, ne permet de dénier au tribunal arbitral le pouvoir d'ordonner de telles mesures. Même si aucune disposition expresse de l'AU.A ne nous permet d'inférer une telle compétence du tribunal arbitral, la doctrine la lui reconnaît et y affirme d'ailleurs, une compétence concurrente avec les juridictions étatiques71(*). En effet, le contenu du texte de l'art. 13 al. 4 AU.A reconnaît aux parties le pouvoir de solliciter l'intervention du juge étatique ou juge d'appui pour prendre de telles mesures. La lecture entre les lignes de cette disposition, nous amène à conclure sur ce point que, la compétence reconnue à l'arbitre n'est pas exclusive de celle du juge. Les parties ont, en dépit de l'existence d'une convention d'arbitrage, la faculté de saisir directement le juge d'appui sans avoir l'obligation de recourir d'abord au tribunal arbitral. C'est tout le sens que donne le droit OHADA aux dispositions de l'art. 13 al. 4 de l'AU.A "l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle à ce qu'à la demande d'une partie, une juridiction [...] ordonne des mesures provisoires ou conservatoires". Ainsi, il est aisé de comprendre que l'AU.A en droit OHADA, bien qu'accordant au tribunal arbitral de telles compétences, évite à faire de sorte que la compétence du juge soit résiduelle, c'est-à-dire que son intervention ne soit requise que si la protection arbitrale se révèle insuffisante. Sa compétence pour prendre des mesures provisoires et conservatoires est alors concurrente de celle du juge et non subsidiaire. Si la tendance majoritaire admet, du point de vue de la loi et de la jurisprudence, que le tribunal arbitral peut ordonner des mesures conservatoires et provisoires, la doctrine est presque unanime à reconnaître une compétence concurrente du juge, nécessitant une "action complémentaire des juges et des arbitres en vue d'assurer l'efficacité de l'arbitrage commercial international"72(*). D'où l'impérieuse nécessité de clarifier les pouvoirs respectifs des juges et des arbitres en cette matière. L'enjeu à notre avis, d'une telle compétence concurrente serait de ne pas priver des procédures d'urgence, les parties à une convention d'arbitrage et, la doctrine le détaille si bien. Par rapport au droit suisse de l'arbitrage international, bien évidemment le chapitre 12 LDIP n'évoque pas la question de la compétence des tribunaux étatiques en matière de mesures provisionnelles et conservatoires. La doctrine suisse, quant à elle, est controversée sur la question de la compétence concurrente. En effet, une opinion minoritaire de cette doctrine considère que, la compétence du juge en la matière cesse dès lors que le tribunal arbitral est constitué. Fort heureusement, la doctrine majoritaire admet une compétence concurrente pleine aux juridictions arbitrales et étatiques73(*). En droit comparé, il y a lieu de faire remarquer que, le principe de la compétence concurrente est consacré par plusieurs dispositions légales et conventionnelles et, est "reconnu par la jurisprudence et la doctrine des différents États et rappelé dans de nombreuses sentences arbitrales"74(*). Le droit OHADA de l'arbitrage, tout comme la plupart des législations sur l'arbitrage, reconnaît donc aux juridictions étatiques et arbitrales une compétence en la matière et, du coup ne prive pas les parties, du droit de recourir aux procédures d'urgences prévues à cet égard devant les juges étatiques.

Cependant, deux conditions prévalent dans ce système à cette compétence des juridictions étatiques: l'urgence et l'examen du litige au fond.

L'urgence :

En effet, le juge étatique ne peut prendre une mesure provisoire ou conservatoire que s'il y a une urgence avérée et motivée. L'urgence en matière d'arbitrage, ne doit se justifier que lorsque le tribunal est déjà formé et saisi du fond du litige mais ne peut pas prendre les mesures qui s'imposent. À la condition d'urgence, s'adjoint celle du lieu de l'exécution de la mesure. En effet, si la mesure doit s'exécuter dans un Etat partie au Traité OHADA, le caractère urgent prend tout son sens. Autrement dit, la condition d'urgence est valable. Ce qui veut dire, qu'en dehors de la compétence du tribunal arbitral d'ordonner des mesures provisoires en droit OHADA, la loi reconnaît aux juridictions étatiques une compétence concurrente qu'à la seule condition qu'il y ait une mesure urgente avérée et motivée exécutable dans un Etat partie et non à l'extérieur de l'espace OHADA. A contrario, si la mesure devra s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA, un Etat tiers par exemple, la mesure urgente n'est plus recevable. Mais cela n'empêche pas qu'une partie demande à une juridiction, en dépit de l'existence de la convention, la prise de mesures conservatoires ou provisoires. C'est ce que semble nous confirmer P. Meyer, qui pense que "la condition relative à l'urgence est écartée lorsque la mesure provisoire ou conservatoire devra s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA".

L'examen du litige au fond :

La deuxième condition veut que ces mesures n'impliquent pas un examen du litige au fond. En effet, chaque fois que l'octroi des mesures suppose un examen au fond, le juge étatique doit se reconnaître incompétent et seul l'arbitre peut ordonner ladite mesure. Il s'agit ici, de la conséquence à l'incompétence des juridictions étatiques de statuer au fond en cas d'existence d'une convention d'arbitrage. Principe que plusieurs législations sur l'arbitrage international consacrent expressément (art. 13 al. 1 AU.A).

En résumé, le pouvoir du juge d'ordonner des mesures conservatoires et provisoires, qui ne doit pas être confondu au rôle d'assistance du juge, conjecture la possibilité pour les parties de recourir à sa compétence sans renoncer au bénéfice de la convention d'arbitrage. C'est tout le sens qu'a voulu donner le législateur OHADA à la compétence du juge en matière de mesures urgentes, nonobstant la convention d'arbitrage " toutefois, l'existence d'une convention d'arbitrage [...]".

Notons toutefois que, les mesures provisionnelles si elles sont admises, elles ne peuvent être ordonnées que dans les limites des demandes dont l'arbitre est saisi. Il en est également de même du juge sollicité dont la compétence est non seulement limitée à la demande des parties (aux mesures provisoires) mais il doit aussi veiller à ne pas prétériter à l'exclusivité accordée à l'arbitre par la loi quant à son pouvoir de statuer sur le fond du litige. D'où tout le sens de la seconde condition dont l'art. 13 al. 4 de l'AU.A fait cas en droit OHADA.

b-. LA PROBEDURE

Du point de vue procédural, les deux textes de loi ne disent rien quant à la procédure à suivre par les parties ou par les arbitres. À notre avis, la démarche prescrite par les dispositions des articles 14 AU.A en droit OHADA et 182 LDIP en droit suisse de l'arbitrage international seront applicables.

Si les lois de l'arbitrage, ici étudiées, reconnaissent au tribunal arbitral de DIP la faculté de rendre des mesures provisoires et conservatoires, la décision rendue par le tribunal dans ce cadre, ne doit pas être assimilée à une sentence au point d'en exiger un exequatur en cas d'insoumission. Cette décision est une ordonnance qui n'est pas directement exécutoire, elle ne peut pas non plus être munie d'une déclaration de force exécutoire par le juge selon la procédure appropriée. L'efficacité de telles mesures ordonnées, en vertu des dispositions des articles 183 LDIP et 13 al. 4 AU.A doit être limitée. Comme on peut le noter dans le texte du chapitre 12 LDIP, en cas de non soumission volontaire à l'ordonnance, le tribunal arbitral (et non la partie bénéficiaire de la mesure arbitrale) ne peut que requérir le concours du juge étatique. C'est tout le sens que donne le droit suisse de l'arbitrage international à l'al. 2 de l'art. 183 LDIP "si la partie concernée ne s'y soumet pas volontairement, le tribunal arbitral peut requérir le concours du juge compétent. Celui-ci applique son propre droit". Le juge compétent ici, peut ne pas être le juge du siège du tribunal arbitral mais le juge suisse compétent, ratione loci et ratione materiae, pour ordonner les mesures provisionnelles à l'égard de la partie ou du bien visé par la décision de l'arbitre. Il faut ici aussi regretter que, l'assistance du juge étatique en cas de non soumission à l'ordonnance du tribunal arbitral concernant ces mesures, n'ait pas été évoquée par le droit OHADA de l'arbitrage en l'occurrence l'AU.A. Cependant, on peut légitimement imaginer que, cette assistance peut être requise sur la base des dispositions de l'art.14 al. 7 de l'AU.A qui dispose que "si l'aide des autorités judiciaires est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge compétent dans l'Etat-partie". Ainsi, si la requête est fondée sur la demande de mesures destinées, à la production ou la conservation de certaines preuves utiles au procès arbitral ou menacées de disparition, l'assistance du juge d'appui dans ce cas, est nécessaire et légitimée sur la base des dispositions légales précitées.

2-. LA PROBLEMATIQUE DES PREUVES EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL

DROIT COMPARE

Art. 14 al. 4 et 7 AU.A

4. "Les arbitres peuvent inviter les parties à leur fournir les explications de fait, et à leur présenter, par tout moyen légalement admissible, les preuves qu'ils estiment nécessaires à la solution du litige.

7. Si l'aide des autorités judiciaires est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge compétent dans l'Etat-partie".

Art 184 LDIP

1) "Le tribunal arbitral procède lui-même à l'administration des preuves.

2) Si l'aide des autorités judiciaires de l'Etat est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral, ou les parties d'entente avec lui, peuvent requérir le concours du juge du siège du tribunal arbitral; ce juge applique son propre droit".

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Dans un arbitrage de DIP, la preuve a pour objet de couvrir tout élément d'information qu'une partie invoque à l'appui de sa prétention ou comme moyen de défense. Les lois d'arbitrage, il faut le remarquer, dans leur quasi majorité (et ce ne sont pas les deux textes légaux que nous étudions qui font exception) ne réglementent pas de façon exhaustive, la problématique de l'administration de la preuve devant le tribunal arbitral. Celle-ci soulève indubitablement, les questions relatives au choix des modes de preuves, à leur admissibilité, au pouvoir d'appréciation du juge et à la charge de la preuve.

Dans un arbitrage de DIP, c'est prioritairement l'autonomie des parties et subsidiairement celle du tribunal arbitral qui gouverne l'admissibilité des moyens de preuve et la procédure d'administration de ces preuves. Les parties sont ainsi libres d'administrer la preuve d'un acte par tous les moyens. Cette liberté des parties, trouve son fondement dans le principe d'autonomie qui gouverne l'arbitrage en général. La problématique de la preuve relevant des questions de procédure, elle ne lui échappe guère. Ceci étant, les dispositions de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP ne dénient pas au tribunal arbitral sa compétence en matière d'administration de preuves. Elles instruisent chacune, dans leurs dispositions respectives, le tribunal arbitral lui-même à prescrire la manière dont les preuves seront administrées. En effet, l'alinéa 1er de l'art. 184 LDIP est explicite dans sa formulation du principe "le tribunal arbitral procède lui-même à l'administration des preuves". Cette loi reconnaît donc au tribunal arbitral, la compétence de pouvoir statuer sur l'admissibilité, la pertinence et le fardeau des preuves fournies par les parties. Le droit OHADA ne s'exempte pas non plus de ce principe lorsqu'il affirme, dans les dispositions de l'art. 14 al. 4 que, "les arbitres peuvent inviter les parties à leur fournir [...], les preuves qu'ils estiment nécessaires à la solution du litige". De cette compétence légale reconnue aux tribunaux arbitraux d'administrer les preuves, résultent les conséquences suivantes :

- c'est devant tout le corps arbitral que les preuves doivent être rapportées,

- la délégation à un seul arbitre n'est admise qu'avec l'accord des parties,

- l'arbitre ne peut pas déléguer son pouvoir à un tiers (pouvoir d'administrer des preuves).

Le caractère laconique des dispositions des deux lois d'arbitrage, sur le droit des tribunaux arbitraux à se prononcer sur l'administration des preuves d'une part, et le défaut d'énumération des preuves susceptibles d'être admises devant les tribunaux arbitraux d'autre part, ne sont guère surprenants. Cela va de soi d'autant plus que, l'arbitrage international répondant par essence aux besoins du commerce international, c'est le principe de la liberté de preuve en matière commerciale75(*) qui y est admis. Ce manque d'énumération, laisse envisager a priori l'admission de toutes formes de preuve quelles qu'elles soient.

Sans pour autant rentrer dans les détails, sur la catégorisation et la définition des preuves usuelles dans chacun des systèmes relatifs aux lois d'arbitrage que nous étudions, nous faisons remarquer, somme toute que, les deux législations n'abordent pas les questions essentielles relatives à la nature des preuves et à la procédure adéquate.

- Par rapport à la nature des preuves susceptibles d'être admises, les preuves les plus usitées dans la pratique de l'arbitrage de DIP sont en général, la preuve par pièce, la preuve par témoins, la preuve par expertise. D'autres modes de preuve à l'instar de la comparution personnelle, de l'interrogatoire des parties, ou de l'inspection locale existent mais ne sont guère utilisées dans l'arbitrage de DIP. Leur évocation ne suscite aucun intérêt pour cette étude comparée, c'est pourquoi nous ne nous appesantirons pas sur elles. Quant à la question de savoir si les autres preuves sont admissibles dans un arbitrage de DIP OHADA et suisse, seules la jurisprudence et la doctrine, relatives à la problématique de la preuve peuvent nous y renseigner dans la mesure où, les deux lois d'arbitrages ne nous y renseignent guère. Nous ne voyons cependant pas, les raisons pour lesquelles certaines catégories de preuves peuvent être admises et d'autres pas.

- Par rapport à la procédure, il revient prioritairement aux parties de définir le cadre procédural qui permettra au tribunal arbitral de statuer sur l'admissibilité et la pertinence des preuves fournies par elles. À défaut, c'est-à-dire si les parties n'ont pas réglé la question directement ou par référence conformément aux dispositions des articles 14 al. 1er AU.A et 182 al. 1er LDIP, le tribunal arbitral est légitimé pour ce faire par les alinéas 2, des deux articles précédemment cités. Cette légitimité est renforcée par les dispositions des articles 14 al. 4 et 7 AU.A et 184 al. 1 et 2 LDIP. Pour ce faire, le tribunal arbitral de DIP n'est pas appelé à suivre les règles de procédure de la juridiction étatique du siège. Le droit de la preuve n'étant pas impératif, le tribunal arbitral en vertu du principe d'autonomie en matière d'arbitrage peut, à défaut de précision de la convention d'arbitrage, se permettre de régler la procédure comme il l'entend pour autant qu'elle relève de la loi de procédure (lex fori) et non de la loi régissant le fond (lex causae). Cela ne signifie pas pour autant que, les dispositions de la lex causae relatives au fardeau de la preuve doivent être totalement ignorées par le tribunal arbitral de DIP. En effet, comme le renchérissent si bien J-F. POUDRET et S. BESSON "le choix de l'arbitrage n'implique pas la volonté implicite des parties d'écarter les règles de preuve relevant du droit matériel, notamment celles régissant la répartition du fardeau de la preuve et ses diverses exceptions (présomptions légales)"76(*). Cette autonomie du tribunal arbitral de DIP peut même lui permettre, de recourir aux règles de l'International Bar Association (IBA) du 1er juin 1999, lesquelles jouent un rôle non moins négligeable dans la pratique de l'arbitrage international. Ces règles constituent une authentique source référentielle, fréquemment utilisée par les arbitres même si les parties ne s'y sont pas soumises. Véritable nomenclature des principes, elles ont l'avantage d'être plus détaillées et constituent de ce fait, un code de dispositions précises en matière de preuve régissant non seulement la procédure d'administration mais encore l'admissibilité d'une preuve dans un arbitrage de DIP.

Même s'il faut reconnaître que, les réglementations sur l'arbitrage international OHADA et suisse donnent compétence aux tribunaux arbitraux d'administrer les preuves, c'est-à-dire qu'ils disposent d'une autonomie en la matière, l'illusion n'est guère permise sur l'étendue de cette liberté qui a des limites.

Une première limite porte sur l'accord particulier des parties, nécessaire avant toute recherche de la loi appropriée à la procédure probatoire. En effet, si le tribunal arbitral de DIP, dans la détermination du droit applicable aux preuves, peut se permettre, fort du principe d'autonomie, de choisir selon son bon vouloir le droit qu'il juge approprié, il faut avouer qu'il ne peut le faire que sur accord particulier des parties. Ainsi, le principe d'autonomie dont il est légalement récipiendaire ne le libère pas totalement de la convention des parties et de l'accord de celles-ci en cas de défaut de convention.

Une deuxième limite porte sur la nécessité de requérir l'aide d'une autorité compétente en cas de blocage dans l'administration de la preuve. Sur ce, il conviendrait de dire que le tribunal arbitral, nonobstant sa liberté légale en matière probatoire, peut se voir dans certains cas, astreint à la coopération avec le juge d'appui. Cette hypothèse est envisagée lorsque, le tribunal arbitral se retrouve dans des situations de difficultés dans l'administration des preuves, l'obligeant à requérir le concours du juge d'appui au siège du tribunal arbitral.

En effet, l'absence d'imperium de l'arbitre ne lui facilite pas la tâche lorsqu'une des parties ou une tierce personne, détentrice d'une preuve nécessaire à l'issue du procès arbitral, se montre récalcitrante ou ne participe pas volontiers à l'administration des preuves. C'est à ce stade que, tout le mécanisme de l'assistance judiciaire en matière probatoire en droit de l'arbitrage international revêt tout son sens. Ceci nous conduit à constater à la suite de P. LALIVE que, le concours du juge, en dépit de la liberté légale du tribunal arbitral, n'est pas moins requis dans un arbitrage de DIP. Comme on peut le constater, dans leur formulation respective, l'AU.A et le chapitre 12 LDIP ne privent pas, les tribunaux arbitraux, du droit de solliciter l'assistance judiciaire en matière probatoire. Le droit communautaire OHADA dans les dispositions de son art. 14 al. 7 AU.A dispose sur cette question de requête en vue d'un soutien à l'administration de la preuve que "si l'aide des autorités judiciaires est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge compétent dans l'Etat-partie". En droit suisse de l'arbitrage international, c'est dans les dispositions de l'art. 184 al. 2 LDIP qu'on infère une telle requête d'assistance à la preuve "si l'aide des autorités judiciaires de l'Etat est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral, ou les parties d'entente avec lui, peuvent requérir le concours du juge du siège du tribunal arbitral; ce juge applique son propre droit". Relevons en dernière position que, même si le juge n'intervient qu'à titre subsidiaire, le tribunal arbitral ne sollicitera pas systématiquement son assistance en cas de défaillance d'une des parties. Evidemment, il lui reviendra d'interpréter ce défaut de collaboration dans le cadre de l'appréciation des preuves. Par ailleurs, il n'est pas superflu de noter que la collaboration du juge se révèle d'une importance singulière dans le cadre de mesures probatoires touchant des tiers ou lorsqu'il s'agit de procéder par voie de commissions rogatoire.

En guise de petite conclusion, nous pouvons dire que les limites à la liberté du tribunal arbitral à administrer les preuves sont reconnues par les systèmes OHADA et suisse qui, prévoient tous deux un mécanisme général d'assistance du juge dans le cadre de l'obtention des preuves devant le tribunal arbitral. Du point de vue du droit comparé, presque toutes les législations modernes sur l'arbitrage international le prévoient à l'exception toutefois, du droit italien et plus spécifiquement le droit français qui ne contient pas expressément de telles dispositions. Cependant, la jurisprudence française reconnaît au juge étatique une large compétence pour la sauvegarde de la preuve sur la base de la disposition de l'art. 145 NCPC qui dispose que "s'il existe des motifs légitimes de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé". On constate que le recours au juge sur la base de cette disposition n'est possible que jusqu'à la saisine du tribunal arbitral, la condition de l'urgence évoquée par le droit OHADA pour justifier la prise de mesures conservatoires ou provisoires n'est pas exigée. Bref, la coopération du juge étatique évoquée aux articles 184 l'al. 2 LDIP et 14 al. 7 AU.A accordent au tribunal une compétence générale, lui permettant de prendre toute mesure d'assistance indispensable pour l'obtention ou l'administration d'une preuve devant le tribunal arbitral. La formulation des deux dispositions est quasi identique seulement que leur lecture attentive fait apparaître des remarques à deux différences près.

La première porte sur le pouvoir des parties, à cette étape de la procédure, à requérir l'aide des autorités judiciaires.

L'expression le tribunal arbitral peut [...] sur requête requérir... du texte OHADA suppose, à notre avis, que la demande peut être formulée aussi bien par les parties (le cas n'est pas contestable et parait évident d'ailleurs) que les tiers qui ont, pour une raison ou pour une autre, un intérêt particulier à intervenir dans le procès arbitral. A la différence de la formulation du texte de l'al. 2 de l'art. 184 qui a le mérite de la précision [...] le tribunal arbitral, ou les parties d'entente avec lui, peuvent requérir..., le droit OHADA ouvre la brèche pour que sur requête d'un tiers à la demande d'une partie et à des fins dilatoires, le juge soit amené à intervenir dans la procédure probatoire.

La deuxième porte sur le droit applicable par l'autorité judiciaire saisie. Il s'agit d'une autre précision du droit suisse qui ne manque pas d'importance dans le contexte particulier du droit de l'arbitrage international. La question qui se pose ici est celle de savoir si le juge saisi d'une requête en vue de l'administration de la preuve doit appliquer son propre droit ou rattacher le droit applicable à la preuve à un autre droit ?

En précisant que le juge saisi applique son propre droit, tout équivoque est levée sur le droit applicable à la problématique de la preuve par le juge étatique qui, dispose contrairement à l'arbitre d'un for. Il se voit ainsi astreint par l'al. 2 in fine du texte de l'art. 184 LDIP à ne pas s'écarter des mesures d'instruction prévues par sa loi de procédure civile. Cette précision du droit suisse a le mérite de définir du point de vue de la norme procédurale, le droit que le juge étatique se doit d'appliquer. Ce qui n'est pas le cas dans le texte de loi d'arbitrage du droit OHADA en l'occurrence l'AU.A. Ce faisant, la loi helvétique est plus concise que ne l'est le droit OHADA. Elle se démarque du vide juridique qu'on observe dans la législation OHADA. Mais enfin, tout comme dans la procédure prévue à l'art. 14 AU.A, il est clair que le juge OHADA sollicité appliquera son propre droit dans le cadre de la procédure probatoire.

Notons pour toute fin de précisions, qu'en droit international privé le choix des modes de preuve, leur admissibilité et le pouvoir d'appréciation du juge sont rattachés à la loi de procédure (lex fori), celle-ci cède devant la lex causae en ce qui concerne la charge de la preuve et les différentes présomptions légales pouvant les renverser sur des points particuliers.

Nous avons vu que, la liberté du tribunal arbitral en matière d'administration de la preuve dans un procès arbitral de DIP est contingentée par la coopération du juge étatique, pour assistance en vue de l'obtention ou de l'administration d'une preuve devant ce tribunal arbitral. Ceci étant, cette compétence du juge étatique en matière probatoire est tout aussi doublement limitée. D'un côté, certains droits ne l'admettent que pour les arbitrages ayant leur siège dans l'Etat dont relève le juge saisi, c'est le cas du droit suisse de l'arbitrage international et du droit OHADA de l'arbitrage. De l'autre côté, le juge ne peut valablement intervenir que si la mesure sollicitée entre dans le cadre de sa compétence international. En cas de blocage, seule l'entraide judiciaire internationale selon le système de la convention de la Haye de 1970 sur l'obtention des preuves à l'étranger en matière civile ou commerciale pourra permettre de lever cet obstacle.

§ II-. LE DROIT APPLICABLE AU FOND ET LA SENTENCE ARBITRALE DE DIP

Une petite mise au point d'ordre procédural mérite d'être faite avant toute analyse.

Un tribunal arbitral de DIP dispose, dans sa démarche de traitement du litige au fond, de deux alternatives.

Soit, il s'applique à statuer en droit et dans ce cas, il tranche le fond du litige conformément aux dispositions d'une règle de droit préalablement choisie par les parties ou à défaut, définie par lui. Soit, il statue en amiable compositeur, à la seule condition qu'il en ait reçu compétence exclusive des parties. L'amiable composition est encore appelée arbitrage et équité par opposition à l'arbitrage en droit. Nous verrons dans la suite du développement que, le législateur suisse a préféré le terme d'arbitrage en équité par opposition au codificateur OHADA qui, a jeté son dévolu sur l'expression amiable composition. Qu'importe ! Les deux veulent signifier la même chose. D'ailleurs, l'expression latine ex aequo et bono veut aussi signifier la même chose mais, est moins usitée parce que peut être un peu trop rébarbative. Enfin, notons qu'à l'issu du procès arbitrale, la décision rendue par le tribunal (qui est la sentence), qu'il ait statué en droit ou en équité, doit remplir un certain nombre de critères exigés par les lois d'arbitrage. Les voies de recours ouvertes contre les sentences ne peuvent que respecter le canevas légal que représentent les lois d'arbitrage. Appliquées au cas OHADA et suisse, qu'est-ce que cela donne ? C'est tout le sens du développement à suivre.

A-. LE FOND DU LITIGE

DROIT COMPARE

Art. 15 AU.A

"Les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désignées par les parties ou à défaut choisies par eux comme les plus appropriées compte tenu le cas échéant des usages du commerce international.

Ils peuvent également statuer en amiable compositeur lorsque les parties leur ont conféré ce pouvoir".

Art. 187 LDIP

1) " Le tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon les règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits.

2) Les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral à statuer en équité".

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1-. AMIABLE COMPOSITION ET ARBITRAGE EN EQUITE : L'AUTRE FACETTE DU TRAITEMENT DU LITIGE AU FOND EN DROIT OHADA ET SUISSE

L'arbitrage en équité (selon la terminologie suisse) ou en amiable composition (pour emprunter les termes du texte de l'AU.A) est une autre manière de trancher le fond du litige, sans pour autant statuer en se référant aux règles de droit d'une structure préétablie ou à la loi d'un Etat.

Dans un arbitrage international, le tribunal saisi d'un litige peut être aussi amené à statuer ex aequo et bono c'est-à-dire en amiable compositeur ou en équité. En droit OHADA, les dispositions de l'AU.A qui confèrent au tribunal arbitral le pouvoir de statuer en amiable compositeur, relèvent de l'al. 2 de l'art. 14 selon lequel, les arbitres "peuvent [...] statuer en amiable compositeur lorsque les parties leur ont conféré ce pouvoir". La formulation en droit suisse de l'arbitrage international, de la possibilité qui est offerte au tribunal arbitral de statuer ex aequo et bono est à peu près identique. Selon l'al. 2 de l'art. 187 "les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral à statuer en équité". On note en droit comparé, une formulation quasi classique et identique dans les dispositions de la loi-type de la CNUDCI à l'art. 28 al. 3 "le tribunal arbitral statue ex aequo et bono ou en qualité d'amiable compositeur uniquement si les parties l'y ont expressément autorisé". Plusieurs conséquences juridiques peuvent être déduites de ces dispositions sur l'arbitrage en équité.

La première remarque que l'on peut dégager de la lecture de toutes ces dispositions, fait apparaître que, l'arbitrage en équité a un caractère double exceptionnel :

- d'un côté, il requiert que la convention des parties sur ce point soit explicite. En effet, le pouvoir d'amiable compositeur doit résulter d'une volonté certaine des parties. Dans le doute, il y a lieu de considérer que telle n'a pas été la volonté des parties et donc, le litige sera traité au fond en droit. Le non-respect de cette volonté des parties entraînerait de toute évidence, en cas de recours, l'annulation de la sentence au motif que le tribunal arbitral ne se serait pas conformé à la mission qui lui aurait été confiée.

- de l'autre côté, c'est les parties qui doivent, pour ce faire, donner l'autorisation expresse au tribunal arbitral, lui concédant le pouvoir de trancher le fond du litige sans avoir l'obligation de se référer à une norme quelconque. P. LALIVE le confirme si bien lorsqu'il affirme que, l'arbitrage en équité postule "une solution prise en considération du cas d'espèce sans égard à des normes générales préexistantes"77(*).

Une deuxième remarque, porte sur le fait qu'avec l'amiable composition, s'il est une seule évidence à laquelle il faut se rallier, c'est que les pouvoirs du tribunal arbitral se trouvent être élargis. Lui donnant une large amplitude dans sa manière d'appréhender le litige. Fort de cela, un tribunal arbitral de DIP pourra appliquer le correctif d'équité pour trancher de la manière la plus juste possible, le litige qui lui est soumis. Du point de vue pratique, il n'est relevable aucune contradiction lorsque les parties dans une clause, confient au tribunal arbitral de DIP la mission d'amiable composition tout en désignant une norme juridique quelconque pour régir leur relation. Cela voudra tout simplement s'interpréter comme leur volonté de voir la norme choisie, être prise en compte par le tribunal arbitral qui, dans sa décision au fond doit passer l'examen du litige par le filtre de l'équité. Dans le même registre, il est fort intéressant de noter que même dans un arbitrage de DIP, la matérialisation préalable de l'accord sur l'amiable composition préfigurant dans la convention n'est pas requise comme condition de validité de l'accord sur l'amiable composition. Nous voulons signifier par là que, l'amiable composition peut intervenir en cour de procédure et même, peut être partiel. Ce cas est récurrent lorsque, les parties imposent à l'arbitre que la partialité de l'accord d'amiable compositeur, porte sur les différends nés de l'inexécution du contrat ou encore sur les conséquences pécuniaires (évaluation des dommages intérêts) résultant de l'inexécution du contrat, alors qu'il reçoit les pouvoirs de statuer en droit pour les litiges nés de la validité du contrat. En résumé, l'accord sur l'arbitrage en équité peut bénéficier d'une flexibilité lui permettant l'application d'un régime juridique dual ou multiple. Tout dépend du bon vouloir des parties détentrices du pouvoir de réglementation de la norme applicable.

La troisième remarque avec l'amiable composition est relative à la procédure. Quoique les dispositions sur l'arbitrage en équité se trouvent être insérées dans la plupart des lois d'arbitrage, en l'occurrence celles que nous étudions, il n'y a aucun doute sur le fait que, les pouvoirs d'amiable compositeur conférés aux tribunaux arbitraux ne concernent exclusivement que le fond du litige et non la procédure arbitrale. Même si cette précision n'est pas apportée dans ces lois, la doctrine et la jurisprudence arbitrale s'autorisent à rappeler que, l'autorisation de statuer en équité ne vise que le fond du litige et non la procédure.

En conséquence, l'amiable composition ne doit pas permettre au tribunal arbitral d'écarter les règles de procédure posées, le cas échéant, par les parties dans leur convention d'arbitrage "l'arbitre décidant de statuer en équité est donc tenu de respecter les règles impératives de procédure et l'ordre public procédural".78(*) C'est le cas des règles essentielles de la procédure qui, découlent de l'application des principes d'égalité des parties et de la possibilité de faire valoir leurs droits. Les tribunaux se doivent naturellement de les respecter. Abordant dans le même sens, le tribunal arbitral n'est pas déchargé de l'obligation de motiver sa sentence lorsqu'il statue en équité ou ex aequo et bono. Ces solutions sont classiques et, on les retrouve en droit comparé et par voie de conséquence en droit OHADA et suisse de l'arbitrage international.

La quatrième remarque, porte sur les limitations au pouvoir de statuer en équité. Lorsqu'on affirme, du point de vue du fond du litige, que l'amiable composition permet de statuer en équité, on en induit le fait que le tribunal arbitral a, de ce fait, la latitude d'écarter ou d'adapter les règles de droit applicables au litige. Cette faculté d'adaptation ou d'exclusion du droit n'est cependant pas illimitée. En d'autres termes, le tribunal arbitral peut écarter ou adapter des lois supplétives, des usages du commerce, des lois impératives de protection d'une des parties. Cependant, il est exclu que cela puisse être le cas pour des lois d'ordre public. Ainsi, il ne lui est pas pour autant permis d'ignorer l'application des règles d'ordre public s'imposant à la situation d'espèce.

Toutes ces remarques, faut-il le rappeler, sont les conséquences du pouvoir de statuer en amiable composition ou en équité que, les réglementations relatives à l'arbitrage international OHADA et suisse formulent dans leurs dispositions respectives.

Par ailleurs, l'opportunité de la demande en annulation d'une sentence, en cas de recours contre l'usurpation du pouvoir de statuer en équité ou, l'exercice non autorisé de ce pouvoir par le tribunal arbitral, est controversée aussi bien en droit OHADA qu'en droit suisse de l'arbitrage international. En effet, le seul grief susceptible d'être admis contre la sentence en droit suisse c'est l'incompatibilité de la sentence à l'ordre public de l'art. 190. al. 2 let. e. Il s'en conclut que la chance de voir une telle demande prospérée est quasi nulle. Il en est de même en droit OHADA car, dans les dispositions de l'art. 26 al. 7 AU.A il est précisé que le recours en annulation n'est recevable que [...] si la sentence arbitrale n'est pas motivée. Seule l'absence de motivation contre la sentence peut justifier la recevabilité d'un recours sur la base de cette disposition.

Cependant, l'une des questions auxquelles les deux lois d'arbitrage n'apportent aucune précision, est celle de savoir si le tribunal arbitral de DIP statuant en équité est tenu par les dispositions du contrat à l'origine du différend qu'il doit trancher. En droit OHADA, l'AU.A ne donne aucune réponse à cette question, le seul bémol vient du règlement d'arbitrage qui considère que "dans tous les cas l'arbitre tiendra compte des stipulations du contrat" (art. 17 RA). Idem en droit suisse de l'arbitrage international où le texte du chapitre 12 LDIP est muet sur cette question. Pourtant, la réponse à cette question permettra de déterminer la portée de l'arbitrage en équité par rapport aux dispositions contractuelles ; autrement dit, les pouvoirs du tribunal arbitral statuant en équité sur le contrat litigieux.

Le tribunal arbitral dispose t-il d'un pouvoir modérateur au regard des stipulations contractuelles comme le suggère la doctrine française79(*) ? Sinon doit-on considérer que le tribunal arbitral statuant en équité ne dispose d'aucun pouvoir sur le contrat litigieux ? Nous n'apporterons pas une réponse à ces questions par souci de limitation de page.

2-. L'ARBITRAGE DE DROIT DU TRIBUNAL DE DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE

Par opposition de principe à l'arbitrage en équité, l'arbitrage de droit est aussi admis et est de règle dans la pratique internationale. Toutes les législations récentes et modernes sur l'arbitrage interne voire international le consacrent. Ceci étant, il y a tout d'abord lieu de faire une mise au point d'ordre procédural. L'amalgame n'est plus permis entre la loi de l'arbitrage et la loi de fond. Un arrêt de la haute juridiction britannique dans l'affaire compagnie d'armement maritime nous le confirme par ceci : "il ne fait aucun doute que si les parties à un contrat commercial se sont expressément mises d'accord sur le système de droit d'un pays comme loi appropriée au contrat et ont choisi une loi de procédure différente [...], les arbitres doivent appliquer comme loi applicable au fond du litige le système de droit sur lequel les parties se sont mises d'accord". Il va s'en dire que, la loi applicable à la procédure peut, ce qui est souvent le cas, être différente de la loi applicable au fond du litige. En d'autres termes, le droit applicable à la décision au fond (la lex causae ou lex contractus) ne doit pas être confondue avec le droit applicable à la validité de la convention pas plus, qu'au droit applicable à la procédure (la lex arbitri ou loi de l'arbitrage). Ceci étant, il est de règle dans l'arbitrage qu'il soit interne ou international que, la volonté des parties est primordiale dans le choix du droit applicable au fond du litige par le tribunal arbitral. Le recours à la volonté des arbitres n'est que subsidiaire. C'est le principe général qui prévaut en matière de détermination de la norme applicable au fond du litige. Il s'agit d'un principe quasi unanimement consacré par le droit et la pratique de l'arbitrage en général. Ce principe, est un des rares à être universellement appliqué dans le domaine de l'arbitrage pour lequel l'arbitrage de DIP ne saurait se dérober. P. LAGARDE ne disait pas autre chose lorsqu'il affirmait que "l'autonomie des parties dans le choix de la loi régissant les obligations contractuelles qui peut être aussi bien exprès, présumé ou implicite est, à vrai dire, un principe généralement accepté par les systèmes juridiques contemporains". Les droits de l'Arbitrage OHADA et suisse le formulent expressément mais fort différemment. Mais avant tout, faisons un peu de la théorie juridique. Elle nous permettra de mieux cerner le sens et la portée des dispositions des articles relatifs à l'arbitrage de droit (15 al. 1 AU.A et 187 al. 21 LDIP).

La mise en application de ce principe du point de vue pratique, suppose que l'autonomie dont les parties sont bénéficiaires leur donne la possibilité de définir le cadre juridique de référence pour le traitement de leurs obligations contractuelles. Par analogie aux dispositions de la convention de Rome sur les obligations contractuelles80(*), on constate que, l'autonomie de la volonté en matière d'arbitrage quant au droit applicable au fond est une transposition du principe d'autonomie en matière contractuelle selon lequel, autant les parties à un contrat sont libres de déterminer par elles-mêmes les règles qui régiront leurs rapports contractuels, autant elles sont libres de choisir la loi qui s'appliquera à la résolution de leur litige arbitral. Cette possibilité offerte aux parties leur permet de désigner le droit qui, en raison de sa texture, leur semble être le mieux adapté à leurs opérations. Contribuant de ce fait, d'une part à la prévention de toute difficulté et de tout litige quant au droit devant régir leur contrat, et d'autre part à leur sécurité juridique. Cette liberté de choix des parties est toutefois conditionnée par la certitude d'un accord de volonté des parties sur ce point. Cet accord ne doit pas inévitablement résulter d'une clause écrite expressément mais, peut aussi se présumer de certains indices à relever par le tribunal arbitral. Rappelons, à toute fin de clarification, que le choix du lieu d'arbitrage ne peut s'analyser en aucun cas en un choix implicite de la lex causae. Le choix effectué par les parties, devra être respecté par les arbitres sous peine de contrevenir à leur ordre de mission, même si ces derniers auraient appliqué un autre droit. Ce n'est qu'à défaut de choix par les parties, ou lorsqu'elles tiennent des positions opposées sur ce point, qu'il reviendra à l'arbitre de rechercher le droit applicable au fond du litige. En effet, lorsque le litige a un caractère international au sens du DIP et si la convention des parties n'a pas précisé la norme applicable à leurs obligations contractuelles, la tâche de la détermination de cette norme n'est pas d'une facilité pour le tribunal arbitral qui, pour trancher le litige se doit de déterminer le droit applicable. Les deux lois d'arbitrage s'accordent sur cette démarche procédurale mais chacune à sa manière et dans son style.

a-. LA VOLONTE DES PARTIES OU LE RATTACHEMENT SUBJECTIF

S'il est une similitude dans les dispositions des articles 15 AU.A et 187 LDIP, c'est l'accordance sur la liberté des parties à déterminer le droit que le tribunal arbitral devra appliquer au fond du litige. En effet, ces deux articles, conformément au principe de l'autonomie de la volonté en DIP, donnent aux parties le pouvoir de conclure une élection de droit sous forme d'une clause contractuelle qui peut être tacite ou expresse et dont la validité est indépendante du contrat principal dans lequel elle est insérée et même de la convention d'arbitrage.

Le principe de détermination de la lex causae, à titre principal par les parties et à titre subsidiaire par les arbitres, est un principe universellement accepté en droit de l'arbitrage international. Pour preuve, il est clairement énoncé à l'art. 7 de la Convention de Genève de 1961, à l'art. 42 de la Convention de Washington de 1965, à l'art 33 al. 3 du Règlement d'arbitrage de la CNDUCI ainsi qu'à l'art. 17 du Règlement d'arbitrage de la CCI: "les parties sont libres de choisir les règles de droit que le tribunal arbitral devra appliquer au fond du litige. A défaut de choix par les parties des règles de droit applicables, l'arbitre appliquera les règles de droit qu'il juge appropriées". Pour ne citer que ces textes.

Cependant, la question de la détermination de ce droit n'a tout son sens que lorsqu'il y a une situation empreinte d'éléments d'extranéité. En droit suisse, l'art. 187 al. 1 LDIP dispose que "le tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties". Si cette méthode de détermination ici ne pose aucun problème étant entendu que l'art. 176 LDIP circonscrit le champ d'application du chapitre 12 (nous sommes en matière d'arbitrage international et donc le problème de la détermination du droit applicable aux obligations contractuelles peut se poser au tribunal arbitral), il en va autrement dans le système OHADA. L'arbitrage OHADA, nous l'avions vu, est conçu dans la perspective de l'unité du régime juridique de l'arbitrage, il n'y a donc pas place pour une opposition du point de vue du régime juridique entre un arbitrage interne et un arbitrage international. Partant de ce constat, la question qui se pose est celle de savoir si la détermination par les parties du droit applicable, préconisée par les dispositions de l'art. 15 AU.A, est compatible à tous les litiges susceptibles d'être soumis à l'arbitrage OHADA quels qu'ils soient (internes ou internationaux).

En effet, en disposant que "les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désignées par les parties", il parait évident, dans ce cas, que la détermination du droit applicable n'est admise que pour seulement certains litiges internationaux. Évidemment, nous ne nous faisons aucun doute sur le fait, qu'une situation purement interne à l'OHADA (les seize pays membres de cet espace) ne susciterait guère le problème de la détermination du droit applicable à la situation litigieuse en cause. C'est aussi à juste titre, le constat qu'a fait P. MEYER lorsqu'il fait observer que pour un rapport purement interne à l'OHADA, il ne saurait y avoir "ni choix du droit applicable par les parties, ni détermination du droit applicable par quelque moyen que ce soit. Il n'y a nul besoin de règles de conflit de lois puisqu'il n'y a pas, dans une situation interne, de conflit de lois"81(*). Il est donc clair que, même dans l'hypothèse où les parties, en vertu du principe d'autonomie, dans leur contrat interne choisissent de reprendre les dispositions d'une loi étrangère (suisse par exemple) qu'elles contractualisent, cela ne saurait être interprété comme une application de la loi étrangère. Évidemment dans le contexte interne à l'OHADA, cela devrait être vu comme une simple stipulation contractuelle ne nécessitant pas, que se pose le questionnement sur la détermination du droit applicable. En conclusion, sur cette question, il est important de noter que les dispositions de l'art. 15 AU.A en droit OHADA ne peuvent concerner que des situations privées internationales et non des situations privées internes à l'OHADA. Ce qui nous conforte dans notre interprétation de la nature unique du régime juridique arbitrale de l'AU.A en droit OHADA.

Sur cette question, il est fort intéressant de noter à titre de droit comparé que, la même observation a été faite à propos des législations unifiées sur l'arbitrage du Québec et des Pays-Bas82(*).

Dans le même ordre d'idée, il est important de souligner que, le choix du droit applicable au litige dans un arbitrage de DIP n'est que relatif. En effet, mêmes évoquées dans un litige international, certaines questions contractuelles à l'instar des questions de capacité et de représentation mais aussi, non contractuelles comme la responsabilité quasi-délictuelle ou la propriété industrielle ou les questions de concurrence échappent à la volonté des parties quant au choix du droit applicable.

Ainsi, un litige même international n'offre pas dans tous les cas, aux parties la possibilité de choisir le droit applicable, le choix du droit applicable par les parties n'a de sens qu'en matière d'obligations contractuelles générées par un contrat international. C'est ce que nous appellerons la théorie de la relativité du choix de la lex causae.

Pour en revenir à notre étude comparée, les alinéas 1ers des deux articles sus cités, suggèrent la possibilité qui est offerte aux parties d'élire un droit qui se doit d'être appliqué par le tribunal arbitral. Ils disposent comme suit : "les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désignées par les parties ou à défaut choisies par eux comme les plus appropriées compte tenu le cas échéant des usages du commerce international (art. 15 AU.A), "le tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon les règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits (art. 187 LDIP). On infère de ces textes deux possibilités qui s'offrent aux parties.

a-.] Soit l'élection de droit est directe, dans ce cas leur choix portera sur l'application de n'importe quel droit matériel et non les règles de conflit de loi de l'Etat dont le droit est visé. Ce droit aura pour vocation de régir toutes les questions d'ordre contractuel à l'exclusion des questions non contractuelles83(*).

b-.] Soit l'élection est indirecte, auquel cas les parties choisiront non pas un droit matériel mais une règle de conflit de lois permettant au tribunal arbitral de déterminer ce droit matériel applicable. L'élection d'un droit indirect, peut se faire par le truchement d'un règlement d'arbitrage contenant les règles de rattachement. Ce choix indirect du règlement d'arbitrage aura bien évidemment pour conséquence une primauté sur la règle subsidiaire des articles 15 AU.A et 187 LDIP qui prévoient le rattachement objectif en l'absence d'élection de droit.

Toutefois, la portée de la liberté des parties dans la détermination du droit applicable dépend de la formulation du contenu de l'article relatif au droit applicable. L'étendue de cette liberté, nous ne pourrons la saisir qu'à la lumière des réponses que nous apporterons à certaines questions essentielles relativement aux lois d'arbitrage que nous avons en présence.

a1-. Les parties peuvent-elles choisir une loi sans lien avec leur contrat ?

Oui, en général les parties ne sont pas astreintes au choix d'une loi présentant des liens objectifs voire spatiaux avec le contrat principal. Aucun lien n'est exigé entre le droit élu par les parties et les éléments du contrat. Elles peuvent jeter leur dévolu sur une loi dite "neutre" simplement parce que le contenu de la loi choisie leur paraît adéquat. C'est la solution consacrée par la plupart de législations et règlements d'arbitrage et plus particulièrement, le droit OHADA sur l'arbitrage et le droit suisse de l'arbitrage international lorsqu'ils font référence tous deux aux "règles de droit choisies par les parties". Le seul embarras qui résulterait de cette option, lorsque les parties choisiront une loi sans lien avec le contrat, serait celui de fraude à la loi. Mais puisque la preuve de fraude à la loi est dans presque tous les cas impossible à rapporter, il est inconcevable que ce principe de la liberté des parties soit compatible avec le recours à la fraude de la loi.

a2-. Les parties peuvent-elles choisir plusieurs lois ?

Le choix par les parties de plusieurs lois ne pose en général pas de problèmes. Elles peuvent même opter pour un choix différencié de lois, chacune ayant pour objectif à ne s'appliquer qu'à une partie de leur contrat. En fait, il s'agit d'une technique connue en droit international privé des contrats sous le vocable de dépeçage du contrat qui, se trouve être aussi applicable en droit de l'arbitrage international. Ce qu'on peut retenir de cette technique est que, si le dépeçage peut porter sur un sous-ensemble de droits et obligations objectivement détachables, il n'est pas impossible en arbitrage. Par contre, s'il doit porter sur divers aspects du contrat, comme par exemple le consentement, la lésion ou la responsabilité contractuelle, il est difficile à admettre dans la pratique arbitrale, dans la mesure où il se révèlera inopportun et peut engendrer de graves incompatibilités. Même si les deux lois d'arbitrage ne font pas état de la possibilité de dépeçage du droit applicable, il est important de noter qu'il, n'est pas interdit dans les systèmes OHADA et helvétique de l'arbitrage international.

a3-. Les parties peuvent-elles porter leur choix sur un droit qui n'est l'expression d'aucun ordre juridique étatique ?

L'idée de permettre aux parties, de choisir un droit qui n'est l'expression d'aucun système juridique étatique pour régir le fond de leur litige, est de plus en plus ancrée dans la pratique de l'arbitrage international. On la retrouve aussi dans la majorité des systèmes juridiques comme ce fut le cas pour la loi type de la CNUDCI. Cette loi propose de faire référence à d'autres sources de droit mis à part les droits nationaux pour régir le fond du litige. Les termes dans lesquels la loi-type de la CNUDCI suggère, de recourir à un droit autre que celui d'un Etat, sont on ne peut plus clairs "le tribunal arbitral tranche le différend conformément aux règles de droit choisies par les parties comme étant applicables au fond du différend. Toute désignation de la loi ou du système juridique d'un Etat donné est considérée, sauf indication contraire expresse, comme désignant directement les règles juridiques de fond de cet Etat et non ses règles de conflit de lois" (art. 28 al. 1er). Quant aux lois d'arbitrage OHADA et helvétique, tout peut s'inférer du choix par chacun des deux législateurs de la terminologie appropriée utilisée pour formuler la problématique du droit applicable au fond du litige. Tous empruntent l'expression règles de droit choisies par les parties plutôt que lois choisies par les parties. Il est évident qu'il y a une différence notoire entre la loi choisie et la règle de droit choisie.

Du point de vue de la sémantique juridique, il y a lieu de faire remarquer que, si le législateur utilise le terme de loi cela s'entend comme une limitation du choix des parties en faveur des lois étatiques et des conventions internationales, réserve faite des usages auxquels ces normes peuvent renvoyer. Si par contre, le législateur utilise le terme de règle de droit, comme s'en est le cas dans les deux lois que nous étudions, c'est qu'il permet aux parties de porter aussi leur choix sur des règles anationales non étatiques en sus des lois nationales. Or, la remarque de la référence au terme de règles de droit par la plupart des législations et règlements d'arbitrage contemporains s'impose et mérite qu'on le souligne.

Les terminologies adoptées, pour désigner le recours aux sources autres que les lois nationales, visent tantôt la lex mercatoria, les principes généraux du droit en général et du droit de l'arbitrage en particulier, les usages du droit commercial, les règles anationales, ou encore le droit international public. Ces sources anationales peuvent être complémentaires ou même substitutives de règles nationales.

Nous ne rentrerons pas dans les détails sur les principes transnationaux auxquels les parties peuvent faire référence dans le choix de la norme applicable au fond du litige, mais simplement, tenterons de rappeler que les parties sont légitimées à les adopter lorsque la loi d'arbitrage utilise le terme de règles de droit.

Bref, en résumé, nous constatons que les parties en vertu de leur liberté peuvent élire directement ou indirectement un droit pour régir leurs obligations contractuelles. Les deux lois que nous étudions le consacrent expressément. Cependant, tout principe devant être nuancé, ce dernier est aussi tempéré. En effet, aussi vrai que les parties peuvent librement choisir le droit applicable, elles seront légitimées aussi longtemps qu'elles le fassent de bonne foi et sans contrevenir à l'ordre public. Ainsi, il est du devoir du tribunal arbitral de vérifier si, ce choix respecte les limites nécessaires à son application. D'où toute l'importance du respect des principes de la bonne foi et de l'ordre public que nous ne détaillerons pas ici.

Cependant, même lorsque les parties n'ont pas exprimé de choix exprès sur la question, le Tribunal arbitral avant toute recherche de la loi applicable, doit s'évertuer à déceler d'éventuels indices de volonté des parties permettant de déduire un choix implicite. Pour ce faire, il se doit d'analyser, avant toute autre recherche, les comportements des parties et essayant de déceler, dans les termes du contrat ou les circonstances de la cause, des éléments susceptibles de définir un accord tacite de celles-ci sur le droit applicable. Ce n'est que lorsqu'il est résolument impossible pour le tribunal arbitral de déduire du comportement des parties un quelconque choix implicite du droit applicable, qu'il aura à le rechercher selon les méthodes dites de rattachement.

Quid de la volonté des arbitres dans la détermination du droit applicable aux obligations contractuelles ?

b-. LA VOLONTE DES ARBITRES OU LE RATTACHEMENT OBJECTIF

La compétence subsidiaire du tribunal arbitral, vise la situation dans laquelle les parties ne sont pas parvenues à s'entendre ou, ont omis d'élire un droit comme norme applicable au fond du litige. Ce tribunal, à l'opposé du juge étatique, est dans ce cas indépendant par rapport aux droits des États et par conséquent, libre de déterminer la norme juridique applicable aux obligations contractuelles, c'est-à-dire le fond du litige. On parle de rattachement objectif. Ainsi, à défaut d'élection du droit applicable par les parties aux obligations contractuelles, la détermination relèvera du pouvoir discrétionnaire du tribunal arbitral. C'est tout le sens du terme à défaut qu'on retrouve dans la formulation des dispositions des textes de l'AU.A et du chapitre 12. Dans cet ordre d'idée, le tribunal arbitral peut décider appliquer au litige un ou plusieurs droits nationaux, il peut également se référer, tout comme les parties, à des sources de droit non étatiques comme la lex mercatoria, les usages du commerce ou les principes généraux du droit. Relevons que, ce pouvoir subsidiaire du tribunal arbitral n'est guère contesté par la jurisprudence arbitrale et fut même consacré par les deux systèmes OHADA et suisse de l'arbitrage international. Toutefois, deux différences fondamentales s'observent dans la formulation des deux textes, quoique tous consacrent le principe "sacro-saint" de la subsidiarité du rattachement.

- La première, qui constitue une des particularités enrichissantes de cette étude comparative, relève du fait que, le droit OHADA est beaucoup plus fidèle au principe d'une autonomie plus large et totale que ne l'est le droit suisse de l'arbitrage international sur la question du rattachement objectif.

Pour preuve, l'AU.A dans ses dispositions prévoit une élection de droit indirecte qui, du point de vue de sa formulation, est proche de celle prévue par l'art. 17 al. 1 RCCI. Aux termes de cette disposition, il est prévu qu'à défaut d'élection de droit par les parties, les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit choisies par eux comme étant les plus appropriées. En faisant usage du terme approprié, cette formulation loin d'être anodine, nous amène à être d'avis avec le Prof. G. KAUFMANN KOHLER lorsqu'elle affirmait, à propos de l'art. 17 al. 1 RCCI, qu'il s'agit d'un critère qui laisse à ces derniers (aux arbitres) une grande liberté de jugement, plus grande encore que celle qui résulte du principe de proximité, ancré à l'art. 187 LDIP84(*). Cet article dispose qu'à défaut, les arbitres tranchent le fond conformément aux règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits. Même si ce rattachement par le biais des liens les plus étroits du texte suisse de l'arbitrage international nous permet de reconnaître à la suite de HEINI que, l'arbitre doit avant tout tenir compte des expectatives légitimes des parties quant au droit applicable, il n'offre pas au tribunal arbitral la possibilité de choix illimité comme le suggère le droit OHADA.

- La seconde différence, non moins féconde pour cette étude, porte sur la possibilité qui est offerte au tribunal arbitral, de tenir compte le cas échéant des usages du commerce international. Le droit OHADA contrairement au droit suisse de l'arbitrage est explicite là-dessus. En disposant que, le tribunal arbitral le cas échéant, peut tenir compte des usages du commerce international, le texte du droit OHADA de l'arbitrage en l'occurrence l'AU.A renforce le dispositif libéral qui, offre au tribunal la possibilité d'application de la lex mercatoria indépendamment de la volonté des parties. Il va s'en dire que, dans la double hypothèse où le litige n'aurait pas un caractère commercial et/ou international et que le tribunal arbitral, dans le cadre de la mise en oeuvre de son pouvoir subsidiaire, aurait choisi l'application de la lex mercatoria, il faut que ce tribunal tienne compte, s'il le faut, des usages du commerce international. Dans ce cas et comme le fait remarquer à bon droit le Prof. P. MEYER "il est évident que ceci suppose que le litige suscite l'application de telles usages. En d'autres termes, la situation litigieuse doit rentrer dans l'hypothèse d'une norme juridique constituée d'un usage du commerce"85(*).

Le principe de l'autonomie des tribunaux arbitraux, dans la détermination de la norme applicable au fond du litige étant acquis par les différents systèmes d'arbitrage, et en l'occurrence par les deux lois que nous étudions, il ne reste plus qu'à déterminer de quelle manière le tribunal arbitral peut la rechercher. Autrement dit, parmi ces divers systèmes juridiques, comment le tribunal arbitral doit-il effectuer son choix? Doit-il respecter certaines méthodes de rattachement ? Dispose t-il d'une liberté totale, ou bien la loi d'arbitrage lui impose-t-elle des règles de conflit de loi qu'il se doit de respecter ?

La réponse à ces questions résout toute la problématique que pose la méthode de rattachement objective.

Deux approches s'opposent dans cette démarche, l'une dite de la proximité et l'autre dite de l'analyse globale. La première, celle de la proximité, est reconnue en DIP et on la retrouve en droit suisse de l'arbitrage international. Elle suppose dans la pratique que, le tribunal arbitral, à défaut applique, non obligatoirement, la loi qui présente les liens les plus étroits avec le contrat. La seconde, celle de l'analyse globale, est une propension qu'on retrouve chez l'arbitre qui lui permet de se baser sur une analyse globale de la situation litigieuse pour déterminer les normes qui, permettront au mieux de la résoudre. Il s'agit d'une approche que s'est fait sien le droit OHADA et qu'on retrouve aussi en droit français en l'occurrence, dans les dispositions de l'art. 1496 NCPC "l'arbitre tranche le litige conformément aux règles de droit que les parties ont choisies ; à défaut d'un tel choix, conformément à celles qu'il estime appropriées. Il tient compte dans tous les cas des usages du commerce". Le tribunal arbitral peut donc dans ce cas, opter pour la loi qu'il estime la plus appropriée, la plus opportune. Pour ce faire, l'arbitre tient compte d'un certain nombre d'indications laissées par les parties dans leur convention. Celles-ci ne doivent être interprétées, comme le suggère un auteur que "sur base d'un test objectif révélant ce qu'aurait dû être l'intention et l'attente raisonnable des parties concernant le droit applicable [...], c'est-à-dire une approche contextuelle".

L'une des questions non moins importantes, en matière d'arbitrage international et que nous poserons bien évidemment dans cette section, est celle de savoir si le défaut d'indications des parties, emporte le pouvoir du tribunal arbitral de recourir ou non à une règle de conflit de lois.

La règle de conflit, on la retrouve dans la majorité des systèmes juridiques, elle permet lorsque plusieurs possibilités existent, de définir le droit applicable à un contrat par le biais de techniques de rattachement. En général, aucune méthode de rattachement ne s'impose au tribunal arbitral de DIP.

Quid de l'OHADA et du droit suisse de l'arbitrage international ?

En dépit de la différence d'approche, les deux systèmes ne privilégient pas expressément l'utilisation de règles de conflit de lois, dans le choix par les arbitres de la norme appropriée pour trancher le fond du litige. C'est le cas lorsque, dans ses dispositions, le texte de loi impose à l'arbitre de recourir aux règles de conflit de loi comme le suggèrent la convention européenne du 21 avril 1961 en son art.VII86(*) ou l'art. 13 de l'ancien Règlement d'arbitrage de la CCI. Ce dernier texte, imposait à l'arbitre de recourir aux règles de conflit de lois: "A défaut d'indication par les parties du droit applicable, l'arbitre appliquera la loi désignée par la règle de conflit qu'il jugera appropriée en l'espèce". Il en est également de même, du règlement d'arbitrage de la CCJA en son art. 17 qui, n'est rien d'autre qu'une reprise in extenso du texte précédent.

Ceci étant, on note dans les deux lois d'arbitrage (AU.A, chapitre 12 LDIP), tout comme en droit français (NCPC), une consécration de la voie directe qui, suppose que le tribunal arbitral peut estimer ne pas avoir besoin de règles de conflit de lois pour déterminer le droit applicable au fond du litige. Dans ce cas, le tribunal arbitral détermine le droit applicable sans se référer à un système de droit international privé.

C'est en substance ce que nous propose, le texte français de l'art. 1496 NCPC qui dispose que: "l'arbitre tranche le litige conformément aux règles de droit que les parties ont choisies ; à défaut d'un tel choix, conformément à celles qu'il estime appropriées". Cette technique, on la retrouve au titre du droit comparé, dans les systèmes OHADA, suisse de l'arbitrage international, belge, néerlandais, algérien, libanais et tunisien. C'est une vision fort libérale qui, ne nécessite aucune référence à la règle de conflit de loi de sorte que le tribunal arbitral applique directement le droit qu'il estime le plus approprié au litige. Il peut même recourir à une application cumulative des règles matérielles concordantes. La formulation du texte des deux articles 15 al.1 AU.A et 187 al. 1 LDIP sur la question ne souffre d'aucune ambiguïté.

B-. LA SENTENCE ARBITRALE ET LES VOIES DE RECOURS

1-. LA SENTENCE ARBITRALE

DROIT COMPARE

Art. 19 AU.A

"La sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon les formes convenues par les parties.

A défaut d'une telle convention, la sentence est rendue à la majorité des voix lorsque le tribunal est composé de trois arbitres".

Art. 189 LDIP

1) "La sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon la forme convenues par les parties.

2) À défaut d'une telle convention, la sentence est rendue à la majorité ou, à défaut de majorité, par le président seul. Elle est écrite, motivée, datée et signée. La signature du président suffit.".

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Du point de vue du droit comparé, il conviendrait de faire la remarque selon laquelle, les dispositions de l'AU.A sur la forme et le contenu de la sentence arbitrale sont presque analogues à celles de l'art. 189 du chapitre 12 LDIP. Le droit allemand dans les dispositions de son §1054 ZPO reprend les mêmes exigences relatives à la forme et au contenu de la sentence arbitrale, lesquelles sont identiques au contenu de l'art. 31 de la loi-type de la CNUDCI. Il en est également de même, de certains règlements d'arbitrage dont entre autre le règlement de la CCI à son art. 19, du règlement CAIL à son art. 26.

Ceci étant, il parait utile de noter que le vocable sentence présuppose, d'une manière générale, que le litige est vidé de son intégralité mettant un terme à la mission du tribunal arbitral par dessaisissement total. À l'évocation du vocable sentence, l'esprit se focalise donc sur le terme de la procédure arbitrale. Si ce lapsus est en partie révélateur d'une fin, la sentence dans tous les cas, ne clôt pas définitivement le litige car, l'expression sentence dans un arbitrage international recouvre toute une variété de décisions susceptibles d'être rendues par les tribunaux arbitraux, sous forme de décisions parcellaires ou finales.

Nous convenons que, le tribunal arbitral de DIP peut, dans les deux systèmes, rendre toute une variété de sentences dont entre autre les sentences dites finales, les sentences partielles, celles dites préjudicielles ou incidentes mais encore, d'autres dites sentences sur la compétence et, les sentences d'accord-parties dites encore sentences par consentement mutuel etc. Même si aucune énumération des sentences susceptibles d'être admises n'est faite dans ces deux textes, le cas de la sentence partielle mérite une attention particulière. En effet, le chapitre 12 LDIP en son art. 188 mentionne la possibilité pour le tribunal arbitral de DIP de rendre des sentences partielles. Ce texte précise que "sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut rendre des sentences partielles".

On ne retrouve cependant pas cette formulation expresse dans le texte de la loi d'arbitrage OHADA. Doit-on pour autant en conclure que, le tribunal arbitral de DIP siégeant dans l'espace OHADA ou statuant au fond sur la base des dispositions du droit OHADA de l'arbitrage, notamment l'AU.A, n'est pas autorisé à rendre des sentences partielles ?

Le doute n'est pas permis à ce niveau lorsqu'on sait que, la sentence partielle est une décision qui porte sur une partie de l'objet du litige tel que défini par les demandes ou conclusions des parties. Il est clair, qu'une telle sentence dessaisit l'arbitre non de l'intégralité du litige mais relativement sur un point du litige portant sur la question qu'elle est appelée à solutionner. L'exemple le plus parlant, c'est celui de la sentence qui statue sur la compétence des arbitres dite sentence sur compétence. Or sur ce sujet, nous avons vu que la règle de la compétence-compétence, universellement admise par les systèmes d'arbitrage des différents Etats et qui, est consacrée par la pratique institutionnelle de l'arbitrage, s'applique aussi à l'OHADA. Non seulement l'art. 11 al. 1er donne compétence au tribunal arbitral de statuer sur sa propre compétence, mais aussi l'al. 2 lui suggère la possibilité de rendre sa décision par une sentence sur la compétence. Le texte de l'article dispose que "le tribunal arbitral peut statuer sur sa propre compétence [...] dans une sentence partielle sujette au recours en annulation". Il va s'en dire que, la possibilité pour un tribunal arbitral de rendre une sentence partielle dans le système OHADA, sur la base des dispositions de l'AU.A, n'est pas exclue, même si la formulation n'est pas expresse dans le corpus de la loi. Il ne fait donc pas de doute que, même dans le silence de cette loi, le tribunal arbitral peut rendre des sentences partielles, si les parties conventionnellement n'ont pas exclu cette possibilité. Ce qui veut dire que, le défaut de convention contraire des parties donne donc pouvoir au tribunal arbitral de le faire. La plupart du temps, il faut le souligner, ces sentences sont contestables et peuvent donc faire l'objet d'un recours devant l'autorité judiciaire compétente dans le respect du délai imparti. Ce délai peut varier selon le dispositif des lois d'arbitrage. Les deux textes ici étudiés n'apportent aucune précision sur cette question.

La problématique de la sentence arbitrale de DIP, soulève indubitablement les questions essentielles relatives à la procédure de la sentence, à sa forme et à son contenu. C'est sur ces points focaux que des divergences s'observent au niveau des deux textes de loi d'arbitrage que nous étudions.

a-. LA PROCÉDURE

Il convient de rappeler d'une part que, dans un arbitrage de DIP, le principe de l'autonomie de la volonté des parties qui est le piédestal du processus de l'arbitrage trouve ici aussi son application. En effet, il est de notoriété que le respect de la forme procédurale dans laquelle la sentence devra être rendue est une obligation conventionnelle à la charge de l'arbitre, le recours à la forme légale n'est que subsidiaire. Cela veut dire en clair que, la sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon la forme convenue par les parties. Aucune des lois d'arbitrage ici concernées, ne dénient aux parties le pouvoir de détermination de la forme procédurale dans laquelle le tribunal arbitral devra rendre sa sentence. C'est tout le sens des deux premiers alinéas des articles 19 AU.A et 188 LDIP qui, disposent tous deux invariablement que "la sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon les formes convenues par les parties".

Nous remarquons donc que, l'AU.A et le chapitre 12 LDIP ne dérogent pas à la tendance majoritaire du droit de l'arbitrage qui, subordonne la validité de toute sentence arbitrale aux conditions de fond et de forme retenues par les parties à la convention d'arbitrage, à titre prioritaire. D'autre part, tout comme en matière de détermination du droit applicable au fond, le défaut de volonté des parties emporte la compétence subsidiaire du tribunal arbitral qui, par application des dispositions légales sur la forme et la procédurale de la sentence, rend sa décision. Sur cette dernière hypothèse, les deux textes procèdent différemment. La principale question de procédure qui se pose à ce niveau, est celle du vote à l'issue du délibéré arbitral. En effet, la décision prise à l'issue du délibéré par le tribunal arbitral unique, dans la pratique, ne pose bien évidemment aucun problème particulier. L'arbitre unique dans ce cas prend, en toute légitimité, la responsabilité de rendre la sentence sans aucune autre forme particulière de procédure. Par contre, le problème devient tout autre en cas de collège arbitral.

Nous savons que, la pratique arbitrale admet la possibilité multiple de rendre les sentences arbitrales. En effet, elles peuvent selon les législations être rendues soit à l'unanimité du collège arbitral, ou soit à sa majorité et à défaut de majorité par le président seul. C'est cette dernière alternative qui est préconisée par le chapitre 12 en droit suisse de l'arbitrage international, à condition qu'il en soit habileté par la convention des parties ou par la loi applicable. Le vote à la majorité est presque unanimement reconnu et accepté en arbitrage international. Pour preuve, le droit OHADA de l'arbitrage dans les dispositions de l'AU.A et le droit suisse de l'arbitrage international à travers le chapitre 12 LDIP envisagent, qu'en cas de défaut de convention des parties, le tribunal arbitral dans sa procédure, rende la sentence à la majorité des voix "la sentence est rendue à la majorité des voix". Si le codificateur OHADA a jugé bon d'adjoindre une condition complémentaire au vote majoritaire du texte OHADA, celle du trio arbitral composant le tribunal (art. 19 al. 2 AUA), notre questionnement porte sur l'attitude que pourrait avoir un tribunal arbitral composé de plus de trois arbitres, face à l'exigence légale du vote majoritaire. À notre avis, cette précision sur la condition complémentaire du trio arbitral nous parait inutile et complique à bien des égards la tâche du tribunal au stade du vote après le délibéré. Ce qui parait curieux, c'est le manque de précisions de ce texte sur le défaut de majorité. Quel sort réserver au vote non majoritaire à l'issue du délibéré arbitral ? C'est dans le chapitre 12 LDIP que le législateur suisse a eu la bienveillance d'esprit pour donner une solution à cette question, il dispose qu' "à défaut de majorité, le président du tribunal arbitral statue seul".

b-. LA FORME DE LA SENTENCE ARBITRALE

Par rapport à la forme écrite de la sentence arbitrale, la question relève en DIP de l'arbitrage d'une importance toute singulière. Une certaine doctrine fait observer que l'art. 189 al. 2 LDIP ne prévoit la forme écrite de la sentence arbitrale qu'à défaut de convention contraire des parties87(*). On en déduit donc que, la forme écrite n'est une condition de validité de la sentence arbitrale qu'en cas de silence des parties sur la forme qu'elle doit avoir. Nous ne partageons pas cet avis car, le défaut de convention dont fait état le texte de la disposition de l'al. 2 de l'art. 189 n'est relatif, qu'à l'exigence procédurale pour rendre la sentence et non la forme de la sentence.

En tout état de cause, qu'elle soit rendue conformément à la volonté des parties ou à défaut, par le tribunal arbitral sur la base des dispositions légales, la sentence arbitrale se doit d'être écrite. Nous soutenons cette position par le simple fait que, lorsqu'on s'en réfère aux conditions de fond de reconnaissance et d'exécution de la sentence étrangère, la convention de New York exige de faire la preuve de l'existence de la sentence. Or, celle-ci ne peut être faite que si elle a été au préalable matérialisée par écrit. Ce qui implique qu'une sentence arbitrale étrangère non écrite ne pourra pas faire l'objet d'une reconnaissance et exequatur conformément aux dispositions de la convention de New York.

Si en droit suisse de l'arbitrage international, l'al. 2 de l'art. 189 est univoque sur la question de la forme écrite de la sentence "elle est écrite, motivée, datée et signée", la question est moins évidente en droit OHADA en l'occurrence dans les dispositions de l'AU.A qui, se trouve être par contre muet sur la forme que doit avoir la sentence. Cependant, cela ne doit aucunement s'interpréter comme une lacune de la loi d'arbitrage OHADA car, dans les conditions de reconnaissance et d'exécution de la sentence arbitrale, l'art. 31 AU.A dispose que "la reconnaissance et l'exequatur de la sentence arbitrale supposent que la partie qui s'en prévaut établisse l'existence de la sentence arbitrale". Or, l'établissement de l'existence d'une sentence arbitrale de DIP ne peut se faire que matériellement, ce qui laisse aisément conjecturer de la nécessaire formulation écrite de la sentence. Peu importe le support sur lequel la sentence est matérialisée, il peut s'agir en l'occurrence de support virtuel ou papier et autres etc. Cette exigence du droit de la sentence arbitrale OHADA est renforcée par les dispositions de l'al. 2 du même article lorsqu'il fait de la production de l'original (sous-entendu de la sentence) accompagné de la convention d'arbitrage ou des copies de ces documents réunissant les conditions requises pour leur authenticité, la condition sine qua non de la reconnaissance de la sentence arbitrale. Ainsi on peut affirmer, sans le risque d'être contredit que, du point de vue de la validité formelle, toute sentence arbitrale de DIP doit être faite par écrit. En dépit du défaut d'une formulation expresse de cette exigence en droit OHADA, le tribunal arbitral OHADA ne peut s'y soustraire car l'art. 31 l'y contraint implicitement. Du point de vue du droit comparé, la majorité des lois et règlements d'arbitrage international soumettent la sentence à cette exigence de forme écrite.

c-. LE CONTENU DE LA SENTENCE

La question du contenu de la sentence est plus délicate. À l'inverse du chapitre 12 LDIP, l'AU.A procède à une énumération exhaustive du contenu d'une sentence arbitrale. Sur ce point l'AU.A est plus concis et détaillé, ce qui lui confère un avantage par rapport au chapitre 12 LDIP88(*). Remarquons que, le contenu des dispositions des articles 20 à 22 de l'AU.A est une reprise systématique des dispositions du NCPC en droit français.

En dépit du défaut de prolixité du chapitre 12 LDIP, il y a lieu de reconnaître à la suite de J. F. POUDET et S. BESSON repris par le Prof. G. KAUFFMANN KOHLER que, cette lacune juridique ne saurait remettre en cause, la possibilité qui est offerte au tribunal arbitral de DIP de "consigner par écrit les éléments nécessaires à l'intelligibilité de la sentence et à son exécution (POUDRET/BESSON / n°745, p.706), et notamment, le nom des parties et des arbitres, le siège de l'arbitrage, l'objet du litige et la décision des arbitres"89(*). On en infère logiquement que, les mentions comme : le nom des parties et des arbitres, le siège de l'arbitrage, l'objet du litige et la décision des arbitres tels que le suggère le Prof. G. KAUFMANN KOHLER, ne sont pas d'une importance anodine en droit de l'arbitrage international. Même si nous adhérons à cet avis commun de ces auteurs, nous sommes tentés de dire à la suite de cette latitude qui est offerte au tribunal arbitral que, rien légalement n'oblige le tribunal arbitral de DIP, en droit suisse de l'arbitrage international, de consigner ces éléments pouvant rendre, comme ils le disent, "intelligible" la sentence arbitrale. Or, ces exigences de contenu de la sentence arbitrale telles que définies par les articles 20 et 21 AU.A sont d'une très grande importance dans la mesure où, elles jouent un rôle non moins négligeable dans un arbitrage de DIP et ce, à double titre.

Dans une première perspective, elles peuvent procéder de la facilitation à l'identification de la sentence arbitrale. Ainsi, les noms et prénoms du ou des arbitres qui l'ont rendue, la date de la sentence, le siège du tribunal arbitral, les noms, prénoms et dénomination des parties ainsi que leur domicile ou siège social, le cas échéant, les noms et prénoms des avocats ou de toute personne ayant représenté ou assisté les parties et enfin, la signature du ou des arbitres, sont pour ainsi dire, la carte d'identité de la sentence. Aucune des mentions ci-dessus énumérées n'est exigée en droit OHADA à peine de nullité. Aucune sanction non plus n'est attachée à leur omission.

Dans une deuxième perspective, certaines mentions confèrent indubitablement à la décision du tribunal arbitral son caractère juridictionnel. Ainsi alors, l'exposé des prétentions respectives des parties, l'exposé de leurs moyens ainsi que l'exposé des étapes de la procédure, la motivation et le dispositif de la sentence sont d'une portée purement juridictionnelle. Notons qu'à l'exclusion de la motivation, aucune sanction n'est attachée à l'omission de ces éléments en droit OHADA. Ceci étant, nous remarquons à la lecture du chapitre 12 LDIP que, la législation suisse de l'arbitrage international formule les exigences de la datation de la sentence, de sa forme écrite, de sa motivation et de la signature de la sentence. Ces exigences minimales nécessaires à la validité de la sentence on les retrouve en droit comparé, chacune jouant un rôle bien déterminé.

- L'exigence de datation de la sentence est d'autant plus importante qu'elle permet, de contrôler le respect du délai d'arbitrage et, détermine le moment où la sentence est revêtue de l'autorité de la chose jugée en vue de son exécution (art. 20 al. 3 AU.A / Art. 189 al. 2 LDIP).

- Par rapport à la motivation de la sentence arbitrale, il n'est pas concevable d'envisager un acte juridictionnel sans motif, qui plus est une sentence arbitrale. Évidemment, tout acte juridictionnel suppose des motifs, lesquels doivent être exprimés matériellement surtout lorsqu'il s'agit d'une sentence arbitrale.

L'AU.A en droit OHADA prescrit cette exigence à peine de nullité (art. 26 al. 7 AU.A). Il en est également ainsi, du droit positif suisse où l'al. 2 de l'art. 189 LDIP prescrit l'obligation de motivation de la sentence (art. 189 al. 2 LDIP). Mais cependant, le chapitre 12 LDIP ne fait pas, par contre, du défaut de motivation une cause de nullité de la sentence. Cette importance accordée à la motivation s'inscrit dans la tendance contemporaine du droit de l'arbitrage où, l'obligation de motivation est retenue par les législations sur l'arbitrage nationale et internationale. Même si cependant, force est de le constater, certaines législations ne posent pas cette exigence, cela ne signifie pas pour autant qu'elles entendent permettre une sentence sans motif, elles autorisent, le cas échéant, simplement les arbitres à ne pas exprimer matériellement la motivation de leur décision dans la sentence. Ainsi, la sentence doit être motivée sauf stipulation contraire des parties. Si réserve peut être faite par les parties à la motivation de la sentence, aucune des législations que nous étudions ne mentionne la possibilité qui est offerte aux parties de renoncer à toute motivation de la sentence.

- Par rapport à la signature de la sentence arbitrale, il est clair que pour rester fidèle au conformisme ambiant du droit de l'arbitrage international, les deux textes ont fait de la signature de la sentence une exigence qui, avant d'être légale est conventionnelle. Toutefois, le texte du droit communautaire OHADA se démarque par sa précision, sur le refus de signature par une minorité dans l'hypothèse d'un collège arbitral. Afin d'éviter tout blocage à ce stade de la procédure, il propose que mention soit faite de ce refus dans la sentence et celle-ci aura le même effet que, si elle avait été signée par tous les arbitres. Le dispositif du texte précise que "toutefois, si une minorité d'entre eux refuse de la signer, il doit en être fait mention et la sentence a le même effet que si elle avait été signée par tous les arbitres" (art. 21 al. 2 AU.A). Précisions que nous n'avons pas dans le texte du chapitre 12 LDIP.

Un autre aspect non moins négligeable, est celui du délai légal ou conventionnel dans lequel le tribunal arbitral doit rendre sa sentence. Le respect d'un tel délai prorogeable est impératif et s'impose au tribunal arbitral afin de lui permettre la rédaction et la signature de la sentence. L'AU.A et le chapitre 12 LDIP, contrairement à d'autres lois d'arbitrage international ne font pas état de ce délai.

En résumé, quelle soit partielle, provisoire, complète ou définitive, la sentence lorsqu'elle est rendue à un caractère définitif puisque comme le précise l'art. 190 LDIP "la sentence est définitive dès sa communication". Ce caractère définitif de la sentence, permet de l'opposer à la notion d'ordonnance de procédure (dite abusivement sentence interlocutoire) qui, ne concerne qu'une décision de procédure et, n'est pas susceptible de recours ni d'exécution par une autorité judiciaire.90(*) L'ordonnance de procédure ne tranche aucun litige mais, se prononce seulement sur le déroulement de la procédure arbitrale.

Notons que seules les sentences quelles qu'elles soient, pourvu qu'elles aient un caractère définitif, ouvrent droit aux voies de recours et, le cas échéant, à l'exequatur en vue d'une exécution forcée.

2-. LES VOIES DE RECOURS

A l'issue du procès arbitral, lorsqu'une partie succombe, elle peut recourir contre la sentence rendue par le tribunal arbitral de DIP. Le recours consistera donc, à contester la validité de la sentence rendue qui, peut prendre selon les dispositions du droit concerné, soit la forme d'un appel, soit la forme d'un recours en annulation, ou soit la forme d'une demande en renvoi de la sentence en vue d'une révision. Ainsi, les voies de recours ouvertes contre une sentence arbitrale, dépendent des dispositions de la loi d'arbitrage concernée. Sur ce point, le chapitre 12 LDIP ne nous renseigne guère sur les possibles voies de recours contre une sentence arbitrale rendue conformément aux dispositions de cette loi d'arbitrage. Si on peut facilement comprendre ce choix du législateur suisse qui, dans sa logique de réformer le droit de l'arbitrage international, a sensiblement "réduit les possibilités de recourir contre la sentence"91(*), on comprend cependant moins, le défaut d'énumération des voies de recours ouvertes, dans la législation de DIP suisse sur l'arbitrage. On ne retrouve dans le texte du chapitre 12 LDIP que, les motifs de recours de l'al. 2 de l'art. 190. Cependant semble-t-il, la seule voie de recours ordinaire admise contre une sentence arbitrale en droit suisse de l'arbitrage international, c'est le recours en annulation. Ce ne sont pas les propos du Prof. G. KAUFMANN-KOHLER qui, nous contrediront sur ce constat lorsqu'elle affirmait que "le recours contre les sentences arbitrales a un effet purement cassatoire, raison pour laquelle il est qualifié de recours en annulation. La LDIP ne prévoit pas d'autres recours"92(*). Il est donc clair que, la Loi fédéral suisse sur le Droit International Privé, notamment le chapitre 12, ne prévoit comme voie de recours contre une sentence arbitrale que, le recours en annulation. Ceci étant, à travers une jurisprudence, le TF suisse "a admis qu'une sentence arbitrale peut faire l'objet d'un recours en révision"93(*). Donnant de ce fait, aux sentences rendues en Suisse une chance supplémentaire d'être revue à l'occasion d'un recours exercé contre elles. Cette restriction des voies de recours contre la sentence arbitrale de DIP en Suisse, peut trouver sa justification dans le fait que, la principale voie de recours contre les sentences arbitrales dans les pays de droit civil, à l'instar des pays de l'OHADA et de la Suisse, est le recours en annulation. Contrairement aux pays de droit coutumier où le recours peut prendre la forme d'une opposition, d'un appel ou d'un pourvoi en cassation. En effet, le recours en annulation peut dans ce cas, s'exercer par le biais de demandes fondées sur la violation de certaines exigences inhérentes à la sentence, à la compétence, à la procédure ou à l'ordre public interne et international.

Contrairement au chapitre 12 LDIP, le droit OHADA à travers l'AU.A ouvre aux parties la possibilité de recourir contre une sentence arbitrale non seulement par le biais de recours ordinaires (recours en annulation) mais aussi, par le biais de deux recours extraordinaires que sont le recours en révision ou la tierce opposition.

En effet, le texte de l'al. 2 de l'art. 25 est, on ne peut plus, formel sur la possibilité de recourir en annulation contre une sentence arbitrale rendue sur le fondement de l'AU.A, seul texte constitutif du droit commun de l'arbitrage OHADA "elle peut faire l'objet d'un recours en annulation, qui doit être porté devant le juge compétent dans l'Etat-partie". Si l'art. 25 al. 1 AU.A est univoque sur l'impossibilité de recourir contre une sentence arbitrale par voie d'opposition, d'appel ou de cassation "la sentence arbitrale n'est pas susceptible d'opposition, d'appel, ni de pourvoi en cassation", les alinéas 4 et 5 par contre, ouvrent la possibilité d'attaquer la sentence par voies de recours extraordinaires. Ainsi, une sentence arbitrale dans ce système peut faire "l'objet d'une tierce opposition devant le tribunal arbitral [...]" (art. 25 al. 4). La possibilité de recourir contre elle, en vue de sa révision n'est pas non plus exclue "elle peut également faire l'objet d'un recours en révision devant le tribunal arbitral [...]" (art. 25 al. 5).

Par rapport à la tierce opposition, il est clair qu'elle n'est possible que si, les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées à la convention d'arbitrage et à la sentence qui en résulte, ont un intérêt légitime à recourir contre ladite sentence. Dans ce cas, le recours de tierce opposition peut être formé "devant le tribunal arbitral par toute personne physique ou morale qui n'a pas été appelée et lorsque cette sentence préjudicie à ses droits" (art. 25 al. 4 AUA).

Par rapport au recours en révision, il conviendrait de souligner que, sa mise en application nécessite que le tribunal arbitral se réunisse de nouveau. Le cas contraire le recours sera porté devant la juridiction étatique du siège du tribunal arbitral. Conformément au principe de la révision, le recours a nécessairement un effet dévolutif puisqu'il remet en cause la chose jugée par le tribunal arbitral, pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit. Ceci suppose que les parties à l'instance initiale soient appelées à l'instance en révision.

a-. LA PROCEDURE DE RECOURS

Il est de règle que, la procédure de recours doit, pour être valable, avoir un caractère contradictoire. Pour cela, le recours doit être introduit devant le juge compétent dans le respect du délai imparti, qui court en général, à partir de la signification de la sentence munie de l'exequatur. Le droit suisse présente cependant une particularité due au fédéralisme. En règle générale, le recours contre toute sentence arbitrale jugée non valable est porté devant l'autorité judiciaire compétente du lieu de l'arbitrage. A cet effet, la loi suisse précise que c'est le tribunal fédéral qui est compétent pour connaître du recours contre une sentence rendue sur la base des dispositions du chapitre 12 LDIP. En comparaison aux autres systèmes, en France c'est la cour d'appel du ressort du siège de l'arbitrage qui, est compétente pour connaître de tout recours contre une sentence arbitrale jugée non valable. En Angleterre, c'est la commercial court et, en droit OHADA c'est la juridiction compétente du siège de l'arbitrage dans l'Etat-partie.

Pour revenir au cas suisse, tout recours contre une sentence arbitrale en Suisse "n'est ouvert que devant le tribunal fédéral. La procédure est régie par les dispositions de la loi fédérale d'organisation judiciaire relatives au recours de droit public [...]"(art. 191 al. 1 LDIP). Il va s'en dire que, les sentences rendues par un tribunal arbitral dont le siège est situé sur le territoire helvétique ne peuvent faire l'objet d'un recours que, devant le tribunal fédéral et non devant la juridiction du siège.

Ce qui contraste d'avec la solution retenue en droit OHADA puisque, le texte de l'AU.A relatif à la procédure de recours prévoit que le recours "doit être porté devant le juge compétent dans l'Etat-partie" (art 25 al. 2 AU.A). Il faut noter cependant que, depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur le Tribunal Fédéral (LTF)94(*), le recours contre la sentence n'est plus régi par les dispositions de la Loi fédérale d'Organisation Judiciaire relatives au recours de droit public. Seule, aujourd'hui la LTF régissant les recours en matière civile est applicable. Cependant, les parties, fort de l'autonomie de leur volonté, peuvent librement à travers une clause d'exclusion spécifier que, tout recours contre la sentence sera déféré à une juridiction cantonale "toutefois, les parties peuvent convenir qu'en lieu et place du tribunal fédéral, ce soit le juge du siège du tribunal arbitral qui statue définitivement. Les cantons désignent à cette fin une autorité cantonale unique" (art. 191 al. 2 LDIP). On s'imagine que si la procédure est dorénavant régie par les dispositions de la nouvelle Loi sur le Tribunal Fédéral, en cas de clause d'exclusion, elle sera régie par les dispositions de la loi de la juridiction du siège de l'arbitrage c'est-à-dire le droit cantonal. Notons que, les parties à l'arbitrage peuvent aussi renoncer au droit de recourir contre la sentence sur des questions de droit ou de fait par l'insertion d'une clause d'exclusion, "si les deux parties n'ont ni domicile, ni résidence habituelle, ni établissement en suisse, elles peuvent par une déclaration expresse dans la convention d'arbitrage ou un accord écrit ultérieurement, exclure tout recours contre les sentences du tribunal arbitral" (art. 192 LDIP). Ce droit ne leur offre cependant pas, la possibilité de renoncer au droit à un procès équitable ni à celui de voir le tribunal se prononcer uniquement sur les questions qui lui ont été régulièrement soumises.

Que ce soit en doit OHADA ou en droit suisse, le recours en annulation a un effet suspensif. Il faut réserver le cas où l'exécution provisoire de la sentence a été ordonnée par le tribunal arbitral. Le juge étatique est dans ce cas, compétent pour statuer sur le contentieux de l'exécution provisoire. Par effet induit, le recours en annulation contre la sentence est également, indirectement, un recours contre la décision ayant accordée l'exequatur de la sentence.

Les effets du recours sont tels qu'en cas d'annulation de la sentence arbitrale, "il appartient à la partie la plus diligente d'engager, si elle le souhaite, une nouvelle procédure arbitrale [...]" (art 29 AU.A).

Afin de préserver la volonté initiale des parties de voir leur litige être tranché par un tribunal arbitral, la juridiction étatique ayant annulé la sentence, ne dispose pas du pouvoir d'évocation95(*).

Le rejet du recours en annulation emporte le caractère exécutoire de la sentence, à cet effet l'art. 33 de l'AU.A dispose que "le rejet du recours en annulation emporte de plein droit validité [...] de la décision ayant accordée l'exequatur".

b-. LES MOYENS DE RECOURS

Avant de souligner les moyens d'annulation de la sentence, il nous parait important de mettre un accent particulier sur le sens d'une règle procédurale importante en matière d'arbitrage "la partie qui, en connaissance de cause, s'abstient d'invoquer sans délai une irrégularité et poursuit l'arbitrage est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir" (art. 14 al. 8 AU.A). Cette règle qui ne concerne que la procédure arbitrale, n'est efficace que si elle peut être opposée dans le cadre d'un recours en annulation fondée sur une irrégularité procédurale. Elle signifie en clair que si une partie introduit un recours en annulation, fondé sur une irrégularité procédurale, alors qu'ayant connaissance de ladite irrégularité, elle ne l'a pas invoquée au cours de la procédure, cette partie devrait se faire opposer sa renonciation à se prévaloir des telles irrégularités.

Si l'on s'en réfère aux dispositions du droit communautaire de l'arbitrage OHADA, à son art. 26 AU.A et, du chapitre 12 à son art. 190 LDIP, les moyens pour la recevabilité d'un recours en annulation dans les deux systèmes sont les suivants :

- si le Tribunal arbitral a statué sans convention d'arbitrage ou sur une convention nulle ou expirée (art. 26 al. 2 AU.A),

- si le Tribunal arbitral a été irrégulièrement composé ou l'arbitre unique irrégulièrement désigné (art. 26 al. 3 AU.A). Cette même formulation, on la retrouve dans les dispositions du chapitre 12 LDIP lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé (art. 190 al. 2 let. a LDIP),

- si le Tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui a été confiée (art. 26 al. 4 AU.A),

- si le principe du contradictoire n'a pas été respecté (art. 26 al. 5 AU.A). Le même moyen, on le retrouve évoque dans le chapitre 12 LDIP lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respectée (art. 190 al. 2 let. d LDIP),

- si le Tribunal arbitral a violé une règle d'ordre public international des Etats signataires du Traité (art. 26 al. 6AU.A). Il en est de même en droit suisse de l'arbitrage international lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public (art. 190 al. 2 let. e LDIP),

- si la sentence arbitrale n'est pas motivée (art. 26 al. 7 AU.A),

- lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent (art. 190 al. 2 let. b LDIP),

- lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande (art. 190 al. 2 let. c LDIP).

CONCLUSION

Nous n'avons pas la prétention, à travers ce travail, de rédiger une oeuvre de la plus parfaite cohérence et précision. D'une part, elle n'est pas d'une exhaustivité qui lui permettrait de cerner tous les aspects d'une étude comparée du droit de l'Arbitrage International, loin s'en faut (il s'agit d'un mémoire de DEA qui peut être pris comme un avant goût à une thèse). D'autre part, elle n'a pas la prétention d'être le fruit d'une réflexion dogmatique sur les deux systèmes mais, se veut être une modeste contribution à la doctrine sur le Droit International Privé notamment l'Arbitrage dans sa composante Internationale. Cette étude comparée, pourra comporter certes des imperfections et des lacunes. Cependant, nous avons la conviction qu'elle sera d'une certaine utilité et dans une autre mesure d'une utilité certaine, pour tous ceux qui souhaitent collationner les solutions des droits nationaux aux principales questions que soulève l'arbitrage international dans les deux espaces.

ANNEXES

TEXTE LEGISLATIF REGISSANT L'ARBITRAGE OHADA

ACTE UNIFORME RELATIF AU DROIT DE L'ARBITRAGE DANS LE CADRE DU TRAITE OHADA

Le Conseil des ministres de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA),

Vu le Traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique, notamment en ses articles 2, 5 à 12 ;

Vu le rapport du Secrétaire permanent et les observations des Etats-parties ;

Vu l'avis en date du 3 décembre 1998 de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage ;

Après en avoir délibéré, adopte à l'unanimité des Etats-parties présents et votants l'acte uniforme dont la teneur suit :

CHAPITRE I
CHAMP D'APPLICATION

Article 1

Le présent Acte Uniforme à vocation à s'appliquer à tout arbitrage lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des Etats-parties.

Article 2

Toute personne physique ou morale peut recourir à l'arbitrage sur les droits dont elle a la libre disposition.

Les Etats et les autres collectivités publiques territoriales ainsi que les Etablissements publics peuvent également être parties à un arbitrage, sans pouvoir invoquer leur propre droit pour contester l'arbitrabilité d'un litige, leur capacité à compromettre ou la validité de la convention d'arbitrage.

Article 3

La convention d'arbitrage doit être faite par écrit, ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve, notamment par la référence faite à un document la stipulant.

Article 4

La convention d'arbitrage est indépendante du contrat principal.

Sa validité n'est pas affectée par la nullité de ce contrat et elle est appréciée d'après la commune volonté des parties, sans référence nécessaire à un droit étatique.

Les parties ont toujours la faculté, d'un commun accord, de recourir à une convention d'arbitrage, même lorsqu'une instance a déjà été engagée devant une autre juridiction.

CHAPITRE II
COMPOSITION DU TRIBUNAL ARBITRAL

Article 5

Les arbitres sont nommés, révoqués ou remplacés conformément à la convention des parties.

A défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si la convention est insuffisante :

a) en cas d'arbitrage par trois arbitres, chaque partie nomme un arbitre et les deux arbitres ainsi nommés choisissent le troisième arbitre ; si une partie ne nomme pas un arbitre dans un délai de trente jours à compter de la réception d'une demande à cette fin émanant de l'autre partie, ou si les deux arbitres ne s'accordent pas sur le choix du troisième arbitre dans un délai de trente jours à compter de leur désignation, la nomination est effectuée, sur la demande d'une partie, par le juge compétent dans l'Etat-partie ;

b) en cas d'arbitrage par un arbitre unique, si les parties ne peuvent s'accorder sur le choix de l'arbitre, celui-ci est nommé, sur la demande d'une partie, par le juge compétent dans l'Etat-partie.

Article 6

La mission d'arbitre ne peut être confiée qu'à une personne physique.

L'arbitre doit avoir le plein exercice de ses droits civils, demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties.

Article 7

L'arbitre qui accepte sa mission doit porter cette acceptation à la connaissance des parties par tout moyen laissant trace écrite.

Si l'arbitre suppose en sa personne une cause de récusation, il doit en informer les parties, et ne peut accepter sa mission qu'avec leur accord unanime et écrit.

En cas de litige, et si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent dans l'Etat-partie statue sur la récusation. Sa décision n'est susceptible d'aucun recours.

Toute cause de récusation doit être soulevée sans délai par la partie qui entend s'en prévaloir.

La récusation d'un arbitre n'est admise que pour une cause révélée après sa nomination.

Article 8

Le Tribunal arbitral est constitué soit d'un seul arbitre, soit de trois arbitres.

Si les parties désignent les arbitres en nombre pair, le Tribunal arbitral est complété par un arbitre choisi, soit conformément aux prévisions des parties, soit, en l'absence de telles prévisions, par les arbitres désignés, soit à défaut d'accord entre ces derniers, par le juge compétent dans l'Etat-partie.

Il en est de même en cas de récusation, d'incapacité, de décès, de démission ou de révocation d'un arbitre.

CHAPITRE III
L'INSTANCE ARBITRALE

Article 9

Les parties doivent être traitées sur un pied d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de faire valoir ses droits.

Article 10

Le fait pour les parties de s'en remettre à un organisme d'arbitrage les engage à appliquer le Règlement d'arbitrage de cet organisme, sauf pour les parties à en écarter expressément certaines dispositions.

L'instance arbitrale est liée dès le moment où l'une des parties saisit le ou les arbitres conformément à la convention d'arbitrage, ou, à défaut d'une telle désignation, dès que l'une des parties engage la procédure de constitution du Tribunal arbitral.

Article 11

Le Tribunal arbitral statue sur sa propre compétence, y compris sur toutes questions relatives à l'existence ou à la validité de la convention d'arbitrage.

L'exception d'incompétence doit être soulevée avant toute défense au fond, sauf si les faits sur lesquels elle est fondée ont été révélés ultérieurement.

Le tribunal arbitral peut statuer sur sa propre compétence dans la sentence au fond ou dans une sentence partielle sujette au recours en annulation.

Article 12

Si la convention d'arbitrage ne fixe pas de délai, la mission des arbitres ne peut excéder six mois à compter du jour où le dernier d'entre eux l'a acceptée.

Le délai légal ou conventionnel peut être prorogé, soit par accord des parties, soit à la demande de l'une d'elles ou du Tribunal arbitral, par le juge compétent dans l'Etat-partie.

Article 13

Lorsqu'un litige, dont un Tribunal arbitral est saisi en vertu d'une convention arbitrale, est porté devant une juridiction étatique, celle-ci doit, si l'une des parties en fait la demande, se déclarer incompétente.

Si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi, la juridiction étatique doit également se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle.

En tout état de cause, la juridiction étatique ne peut relever d'office son incompétence.

Toutefois, l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle à ce qu'à la demande d'une partie, une juridiction, en cas d'urgence reconnue et motivée ou lorsque la mesure devra s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA, ordonne des
mesures provisoires ou conservatoires, dès lors que ces mesures n'impliquent pas un examen du litige au fond, pour lequel seul le Tribunal arbitral est compétent.

Article 14

Les parties peuvent directement ou par référence à un règlement d'arbitrage régler la procédure arbitrale ; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix.

Faute d'une telle convention, le tribunal arbitral peut procéder à l'arbitrage comme il le juge approprié.

A l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer et de prouver les faits propres à les fonder.

Les arbitres peuvent inviter les parties à leur fournir les explications de fait, et à leur présenter, par tout moyen légalement admissible, les preuves qu'ils estiment nécessaires à la solution du litige.

Ils ne peuvent retenir dans leur décision les moyens, les explications ou les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.

Ils ne peuvent fonder leur décision sur les moyens qu'ils auraient relevés d'office, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.

Si l'aide des autorités judiciaires est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge compétent dans l'Etat-partie.

La partie qui, en connaissance de cause, s'abstient d'invoquer sans délai une irrégularité et poursuit l'arbitrage est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir.

Sauf convention contraire, les arbitres disposent également du pouvoir de trancher tout incident de vérification d'écriture ou de faux.

Article 15

Les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désignées par les parties ou à défaut choisies par eux comme les plus appropriées compte tenu le cas échéant des usages du commerce international.

Ils peuvent également statuer en amiable compositeur lorsque les parties leur ont conféré ce pouvoir.

Article 16

L'instance arbitrale prend fin par l'expiration du délai d'arbitrage, sauf prorogation convenue ou ordonnée.

Elle peut prendre fin également en cas d'acquiescement à la demande, de désistement, de transaction ou de sentence définitive.

Article 17

Le Tribunal arbitral fixe la date à laquelle l'affaire sera mise en délibéré.

Après cette date, aucune demande ne peut être formée ni aucun moyen soulevé.

Aucune observation ne peut être présentée, ni aucune pièce produite si ce n'est à la demande expresse et par écrit du Tribunal arbitral.

Article 18

Les délibérations du Tribunal arbitral sont secrètes.

CHAPITRE IV
LA SENTENCE ARBITRALE

Article 19

La sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon les formes convenues par les parties.

A défaut d'une telle convention, la sentence est rendue à la majorité des voix lorsque le tribunal est composé de trois arbitres.

Article 20

La sentence arbitrale doit contenir l'indication :

- des nom et prénoms de ou des arbitres qui l'ont rendue,

- de sa date,

- du siège du tribunal arbitral,

- des noms, prénoms et dénomination des parties, ainsi que leur domicile ou siège social,

- le cas échéant, des nom et prénoms des avocats ou de toute personne ayant représenté ou assisté les parties,

- de l'exposé des prétentions respectives des parties, de leurs moyens ainsi que des étapes de la procédure.

Elle doit être motivée.

Article 21

La sentence arbitrale est signée par le ou les arbitres.

Toutefois, si une minorité d'entre eux refuse de la signer, il doit en être fait mention et la sentence a le même effet que si elle avait été signée par tous les arbitres.

Article 22

La sentence dessaisit l'arbitre du litige.

L'arbitre a néanmoins le pouvoir d'interpréter la sentence, ou de réparer les erreurs et omissions matérielles qui l'affectent.

Lorsqu'il a omis de statuer sur un chef de demande, il peut le faire par une sentence additionnelle.

Dans l'un ou l'autre cas susvisé, la requête doit être formulée dans le délai de 30 jours à compter de la notification de la sentence. Le tribunal dispose d'un délai de 45 jours pour statuer.

Si le tribunal arbitral ne peut à nouveau être réuni, ce pouvoir appartient au juge compétent dans l'Etat-partie.

Article 23

La sentence arbitrale a, dès qu'elle est rendue, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'elle tranche.

Article 24

Les arbitres peuvent accorder l'exécution provisoire à la sentence arbitrale, si cette exécution a été sollicitée, ou la refuser, par une décision motivée.

CHAPITRE V
RECOURS CONTRE LA SENTENCE ARBITRALE

Article 25

La sentence arbitrale n'est pas susceptible d'opposition, d'appel, ni de pourvoi en cassation.

Elle peut faire l'objet d'un recours en annulation, qui doit être porté devant le juge compétent dans l'Etat-partie.

La décision du juge compétent dans l'Etat-partie n'est susceptible que de pourvoi en cassation devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage.

La sentence arbitrale peut faire l'objet d'une tierce opposition devant le tribunal arbitral par toute personne physique ou morale qui n'a pas été appelée et lorsque cette sentence préjudicie à ses droits.

Elle peut également faire l'objet d'un recours en révision devant le tribunal arbitral en raison de la découverte d'un fait de nature à exercer une influence décisive et qui, avant le prononcé de la sentence, était inconnu du tribunal arbitral et de la partie qui demande la révision.

Article 26

Le recours en annulation n'est recevable que dans les cas suivants :

- si le Tribunal arbitral a statué sans convention d'arbitrage ou sur une convention nulle ou expirée ;

- si le Tribunal arbitral a été irrégulièrement composé ou l'arbitre unique irrégulièrement désigné ;

- si le Tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui a été confiée ;

- si le principe du contradictoire n'a pas été respecté ;

- si le Tribunal arbitral a violé une règle d'ordre public international des Etats signataires du Traité.

- si la sentence arbitrale n'est pas motivée.

Article 27

Le recours en annulation est recevable dès le prononcé de la sentence ; il cesse de l'être s'il n'a pas été exercé dans le mois de la signification de la sentence munie de l'exequatur.

Article 28

Sauf si l'exécution provisoire de la sentence a été ordonnée par le Tribunal arbitral, l'exercice du recours en annulation suspend l'exécution de la sentence arbitrale jusqu'à ce que le juge compétent dans l'Etat-partie ait statué.

Ce juge est également compétent pour statuer sur le contentieux de l'exécution provisoire.

Article 29

En cas d'annulation de la sentence arbitrale, il appartient à la partie la plus diligente d'engager, si elle le souhaite, une nouvelle procédure arbitrale, conformément au présent Acte Uniforme.

CHAPITRE VI

RECONNAISSANCE ET EXECUTION DES SENTENCES ARBITRALES

Article 30

La sentence arbitrale n'est susceptible d'exécution forcée qu'en vertu d'une décision d'exequatur rendue par le juge compétent dans l'Etat-partie.

Article 31

La reconnaissance et l'exequatur de la sentence arbitrale supposent que la partie qui s'en prévaut établisse l'existence de la sentence arbitrale.

L'existence de la sentence arbitrale est établie par la production de l'original accompagné de la convention d'arbitrage ou des copies de ces documents réunissant les conditions requises pour leur authenticité.

Si ces pièces ne sont pas rédigées en langue française, la partie devra en produire une traduction certifiée par un traducteur inscrit sur la liste des experts établie par les juridictions compétentes.

La reconnaissance et l'exequatur sont refusés si la sentence est manifestement contraire à une règle d'ordre public international des Etats-parties.

Article 32

La décision qui refuse l'exequatur n'est susceptible que de pourvoi en cassation devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage.

La décision qui accorde l'exequatur n'est susceptible d'aucun recours.

Toutefois, le recours en annulation de la sentence emporte de plein droit dans les limites de la saisine du juge compétent de l'Etat-partie, recours contre la décision ayant accordé l'exequatur.

Article 33

Le rejet du recours en annulation emporte de plein droit validité de la sentence arbitrale ainsi que de la décision ayant accordé l'exequatur.

Article 34

Les sentences arbitrales rendues sur le fondement de règles différentes de celles prévues par le présent Acte Uniforme, sont reconnues dans les Etats-parties, dans les conditions prévues par les conventions internationales éventuellement applicables, et à défaut, dans les mêmes conditions que celles prévues aux dispositions du présent Acte Uniforme.

CHAPITRE VII
DISPOSITIONS FINALES

Article 35

Le présent acte uniforme tient lieu de loi relative à l'arbitrage dans les Etats-parties.

Celui-ci n'est applicable qu'aux instances arbitrales nées après son entrée en vigueur.

Article 36

Le présent Acte uniforme sera publié au Journal Officiel de l'OHADA et des Etats-Parties.

Il entrera en vigueur conformément aux dispositions de l'article 9 du traité relatif à l'Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique.

LOI FEDERALE SUR LE DROIT INTERNATIONAL PRIVE (LDIP)
CHAPITRE 12 : ARBITRAGE INTERNATIONAL

Art.176

I. Champ d'application; siège du tribunal arbitral

1) Les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout arbitrage si le siège du tribunal arbitral se trouve en Suisse et si au moins l'une des parties n'avait, au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage, ni son domicile, ni sa résidence habituelle en Suisse.

2) Les dispositions du présent chapitre ne s'appliquent pas lorsque les parties ont exclu par écrit son application et qu'elles sont convenues d'appliquer exclusivement les règles de la procédure cantonale en matière d'arbitrage.

3) Les parties en cause ou l'institution d'arbitrage désignée par elles ou, à défaut, les arbitres déterminent le siège du tribunal arbitral.

Art. 177

II. Arbitrabilité

1) Toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'un arbitrage.

2) Si une partie à la convention d'arbitrage est un Etat, une entreprise dominée ou une organisation contrôlée par lui, cette partie ne peut invoquer son propre droit pour contester l'arbitrabilité d'un litige ou sa capacité d'être partie à un arbitrage.

Art. 178

III. Convention d'arbitrage

1) Quant à la forme, la convention d'arbitrage est valable si elle est passée par écrit, télégramme, télex, télécopieur ou tout autre moyen de communication qui permet d'en établir la preuve par un texte.

2) Quant au fond, elle est valable si elle répond aux conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit régissant l'objet du litige et notamment le droit applicable au contrat principal, soit encore le droit suisse.

3) La validité d'une convention d'arbitrage ne peut pas être contestée pour le motif que le contrat principal ne serait pas valable ou que la convention d'arbitrage concernerait un litige non encore né.

Art. 179

IV. Tribunal arbitral

1-. Constitution

1) Les arbitres sont nommés, révoqués ou remplacés conformément à la convention des parties.

2) A défaut d'une telle convention, le juge du siège du tribunal arbitral peut être saisi; il applique par analogie les dispositions du droit cantonal sur la nomination, la révocation ou le remplacement des arbitres.

3) Lorsqu'un juge est appelé à nommer un arbitre, il donne suite à la demande de nomination qui lui est adressée, à moins qu'un examen sommaire ne démontre qu'il n'existe entre les parties aucune convention d'arbitrage.

Art. 180

2-. Récusation des arbitres

1) Un arbitre peut être récusé:

a* Lorsqu'il ne répond pas aux qualifications convenues par les parties;

b* Lorsque existe une cause de récusation prévue par le règlement d'arbitrage adopté par les parties, ou

c* Lorsque les circonstances permettent de douter légitimement de son indépendance.

2) Une partie ne peut récuser un arbitre qu'elle a nommé ou qu'elle a contribué à nommer que pour une cause dont elle a eu connaissance après cette nomination. Le tribunal arbitral et l'autre partie doivent être informés sans délai de la cause de récusation.

3) En cas de litige et si les parties n'ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent du siège du tribunal arbitral statue définitivement.

Art. 181

V. Litispendance

L'instance arbitrale est pendante dès le moment où l'une des parties saisit le ou les arbitres désignés dans la convention d'arbitrage ou, à défaut d'une telle désignation, dès que l'une des parties engage la procédure de constitution du tribunal arbitral.

Art. 182

VI. Procédure

1*. Principe

1) Les parties peuvent, directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix.

2) Si les parties n'ont pas réglé la procédure, celle-ci sera, au besoin, fixée par le tribunal arbitral, soit directement, soit par référence à une loi ou à un règlement d'arbitrage.

3) Quelle que soit la procédure choisie, le tribunal arbitral doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit d'être entendues en procédure contradictoire.

Art. 183

2-. Mesures provisionnelles et mesures conservatoires

1) Sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut ordonner des mesures provisionnelles ou des mesures conservatoires à la demande d'une partie.

2) Si la partie concernée ne s'y soumet pas volontairement, le tribunal arbitral peut requérir le concours du juge compétent. Celui-ci applique son propre droit.

3) Le tribunal arbitral ou le juge peuvent subordonner les mesures provisionnelles ou les mesures conservatoires qu'ils ont été requis d'ordonner à la fourniture de sûretés appropriées.

Art. 184

3-. Administration des preuves

1) Le tribunal arbitral procède lui-même à l'administration des preuves.

2) Si l'aide des autorités judiciaires de l'Etat est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral, ou les parties d'entente avec lui, peuvent requérir le concours du juge du siège du tribunal arbitral; ce juge applique son propre droit.

Art. 185

4-. Autres cas du concours du juge

Si l'aide de l'autorité judiciaire est nécessaire dans d'autres cas, on requerra le concours du juge du siège du tribunal arbitral.

Art. 186

VII. Compétence

1) Le tribunal arbitral statue sur sa propre compétence.

2) L'exception d'incompétence doit être soulevée préalablement à toute défense sur le fond.

3) En général, le tribunal arbitral statue sur sa compétence par une décision incidente.

Art. 187

VIII. Décision au fond

1-. Droit applicable

1) Le tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon les règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits.

2) Les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral à statuer en équité.

Art. 188

2-. Sentence partielle

Sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut rendre des sentences partielles.

Art. 189

3-. Sentence arbitrale

1) La sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon la forme convenues par les parties.

2) A défaut d'une telle convention, la sentence est rendue à la majorité ou, à défaut de majorité, par le président seul. Elle est écrite, motivée, datée et signée. La signature du président suffit.

Art. 190

IX. Caractère définitif. Recours

1-. Principe

1) La sentence est définitive dès sa communication.

2) Elle ne peut être attaquée que:

a* Lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé

b* Lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;

c* Lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;

d* Lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;

e* Lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.

3) En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus au 2e alinéa, lettres a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.

Art. 191

2-. Autorité de recours

1) Le recours n'est ouvert que devant le Tribunal fédéral. La procédure est régie par les dispositions de la loi d'organisation judiciaire relatives au recours de droit public.

2) Toutefois, les parties peuvent convenir qu'en lieu et place du Tribunal fédéral, ce soit le juge du siège du tribunal arbitral qui statue définitivement. Les cantons désignent à cette fin une autorité cantonale unique.

Art. 192

X. Renonciation au recours

1) Si les deux parties n'ont ni domicile, ni résidence habituelle, ni établissement en Suisse, elles peuvent, par une déclaration expresse dans la convention d'arbitrage ou un accord écrit ultérieur, exclure tout recours contre les sentences du tribunal arbitral; elles peuvent aussi n'exclure le recours que pour l'un ou l'autre des motifs énumérés à l'article 190, 2e alinéa.

2) Lorsque les parties ont exclu tout recours contre les sentences et que celles -ci doivent être exécutées en Suisse, la convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution de sentences arbitrales étrangères s'applique par analogie.

Art. 193

XI. Dépôt et certificat de force exécutoire

1) Chaque partie peut déposer, à ses frais, une expédition de la sentence auprès du tribunal suisse du siège du tribunal arbitral.

2) Le tribunal suisse certifie, sur requête d'une partie, que la sentence est exécutoire.

3) À la requête d'une partie, le tribunal arbitral certifie que la sentence a été rendue conformément aux dispositions de la présente loi; un tel certificat vaut dépôt.

Art. 194

XII. Sentences arbitrales étrangères

La reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères sont régies par la convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères.

BIBLIOGRAPHIE

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SIGLES ET ABREVIATIONS

ATF : Arrêt du Tribunal Fédéral

CAIL : Cour d'Arbitrage International de Londres

CCI : Chambre de Commerce Internationale de Paris

CCIG : Chambre de Commerce d'Industrie et des Services de Genève

CCJA : Cour Commune de Justice et d'Arbitrage

CIA : Concordat Inter cantonal sur l'Arbitrage

CJB : Code Judiciaire Belge

CIRDI : Centre International pour le Règlement des Différents relatifs aux Investissements

CNUDCI : Conférence des Nations Unies pour le Droit Commercial International

CPCI : Code de Procédure Civile Italien

IBA : International Bar Association

JP : Jurisprudence

LDIP : Loi fédérale sur le Droit International Privé

NCPC : Nouveau Code de Procédure Civile français

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

SU : Loi suédoise d'arbitrage du 4 mars 1999

TF : Tribunal Fédéral

ZPO : Zivilprozessordnung (Loi de Procédure Civile allemande du 22 décembre 1997)

TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS 1

DEDICACE 2

INTRODUCTION 3

CHAPITRE I-. NOTIONS D'ARBITRAGE INTERNATIONAL ET DOMAINES D'APPLICATION DE L'ACTE UNIFORME RELATIF AU DROIT DE L'ARBITRAGE OHADA ET DU CHAPITRE 12 LDIP 9

SECTION I.- L'INSTITUTION D'ARBITRAGE 11

§I.- LA NOTION D'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE 11

A.- DEFINITIONS DE L'ARBITRAGE 11

1-. DEFINITION NOTIONNELLE DE L'ARBITRAGE 11

2-. LE CONCEPT D'ARBITRAGE INTERNATIONAL 12

B-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET SUISSE : UNITE OU DUALITE DE REGLEMENTATION 14

1-. LES FONDEMENTS DE L'UNITE DU REGIME JURIDIQUE : LE CAS
OHADA 15

2-. LES FONDEMENTS DE LA DUALITE DU REGIME JURIDIQUE EN DROIT SUISSE 17

§ II-. LE CONCEPT D'INTERNATIONALITE EN DROIT OHADA ET SUISSE 19

A-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA 20

B-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT SUISSE 21

SECTION II -. LES DOMAINES DE L'ARBITRAGE DANS LES DEUX
SYSTEMES 23

§II-. PRINCIPE D'AUTONOMIE ET DE VALIDITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP 35

A-. LA VALIDITE MATERIELLE DE LA CONVENTION 36

1-. LA VALIDITE OBJECTIVE DE LA CONVENTION ARBITRALE DE DIP 37

A.- ARBITRABILITE, LE FACE A FACE DE LA LIBRE DISPOSITION DES
DROITS ET DE LA PATRIMONIALITE DE LA CAUSE 37

B-. ABSENCE DE RESERVE A L'ARBITRABILITE DU LITIGE 40

2-. VALIDITE SUBJECTIVE OU VALIDITE QUANT AU FOND DE LA CONVENTION DE DIP EN DROIT OHADA ET SUISSE 42

B-. LA VALIDITE FORMELLE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE DE DIP
EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE DE L'ARBITRAGE
INTERNATIONAL 43

1-. PRINCIPE 44

A-. LE FORMALISME PROBATOIRE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE
EN DROIT OHADA 44

B-. LE FORMALISME DE VALIDITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE
EN DROIT SUISSE 45

2-. LA CONVENTION D'ARBITRAGE PAR REFERENCE 46

CHAPITRE II-. L'INSTANCE ARBITRALE, LA SENTENCE ET LES VOIES DE RECOURS SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP 48

SECTION I-. LA PROCEDURE ARBITRALE 49

§ I-. LE TRIBUNAL ARBITRAL ET LE STATUT DES ARBITRES 49

A-. LA CONSTITUTION DU TRIBUNAL ARBITRAL 49

1-. LA CONSTITUTION CONVENTIONNELLE 49

2-. LA CONSTITUTION PAR LE JUGE D'APPUI 52

B-. LA RECUSATION DES ARBITRES 55

1-. LES MOTIFS DE RECUSATION ET LEURS CONSEQUENCES JURIDIQUES 56

2-. LA DISCLOSURE OU OBLIGATION D'INFORMATION DES ARBITRES 59

3-. LA PROCEDURE DE RECUSATION 61

§ II-. LE STATUT DE L'ARBITRE DE DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT
SUISSE 63

A-. LES CONDITIONS LEGALES 63

1-. LES MODALITES LEGALES 63

2-. LES DROITS ET OBLIGATIONS DES ARBITRES 66

B-. LA QUESTION DE LA RESPONSABILITE ET DE L'IMMUNITE DES ARBITRES  DE DIP EN DROIT POSITIF OHADA ET LA SUISSE 67

SECTION II-. L'INSTANCE ARBITRALE 70

§ I-. L'INSTANCE ARBITRALE 70

A-. LA LITISPENDANCE 70

B-. LA PROCEDURE ARBITRALE SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP 71

1-. LE LIBERALISME : PRINCIPAL VECTEUR PROCEDURAL EN MATIERE D'ARBITRAGE INTERNATIONAL 72

2-. LES LIMITES A L'AUTONOMIE PROCEDURALE EN DROIT OHADA ET SUISSE 75

B-. LES MESURES PROVISOIRES OU CONSERVATOIRES ET LES MESURES PROBATOIRES 77

1-. LES MESURES PROVISIONNELLES OU CONSERVATOIRES 77

2-. LA PROBLEMATIQUE DES PREUVES EN DROIT OHADA ET EN DROIT
SUISSE DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL 81

§ II-. LE DROIT APPLICABLE AU FOND ET LA SENTENCE ARBITRALE DE
DIP 85

A-. LE FOND DU LITIGE 86

1-. AMIABLE COMPOSITION ET ARBITRAGE EN EQUITE : L'AUTRE FACETTE DU TRAITEMENT DU LITIGE AU FOND EN DROIT OHADA ET SUISSE 86

2-. L'ARBITRAGE DE DROIT DU TRIBUNAL DE DIP EN DROIT OHADA ET
EN DROIT SUISSE 89

A-. LA VOLONTE DES PARTIES OU LE RATTACHEMENT SUBJECTIF 90

B-. LA VOLONTE DES ARBITRES OU LE RATTACHEMENT OBJECTIF 94

B-. LA SENTENCE ARBITRALE ET LES VOIES DE RECOURS 97

1-. LA SENTENCE ARBITRALE 97

2-. LES VOIES DE RECOURS 102

CONCLUSION 107

ANNEXES 108

TEXTE LEGISLATIF REGISSANT L'ARBITRAGE OHADA 108

LOI FEDERALE SUR LE DROIT INTERNATIONAL PRIVE (LDIP) CHAPITRE 12 : ARBITRAGE INTERNATIONAL 116

BIBLIOGRAPHIE 121

SIGLES ET ABREVIATIONS 125

TABLE DES MATIERES 126

* 1 Aregba Polo "L'OHADA : histoire, objectifs, structures" in L'OHADA et les perspectives de l'arbitrage en Afrique Bruylant 2000. P. 9

* 2 La Zone franc regroupe 14 pays d'Afrique sub-saharienne, les Comores et la France. Elle est issue de l'évolution de l'ancien empire colonial français et de la volonté commune de ces pays de maintenir un cadre institutionnel qui a contribué à la stabilité du cadre macroéconomique.

* 3 Le droit Uniforme africain des Affaires éd. Juris-classeur 2004, P. 1

* 4 Art 2 du Traité OHADA. Il conviendrait de souligner que, dans le corpus de cet article, le législateur à citer le droit du travail comme faisant partie du droit des affaires, ceci peut à tort ou à raison être considéré par les puristes comme un lapsus. Ce qui est vrai, car sur le plan de l'orthodoxie juridique on ne saurait classer le droit du travail dans la famille du droit des affaires. Cependant, sachant que le droit du travail encadre l'action et la vie des entreprises engagées dans le développement économique, le législateur a jugé bon de le citer dans la famille du droit des affaires.

* 5 «Les actes pris pour l'adoption des règles communes prévues à l'article premier du présent Traité sont qualifiés : "actes uniformes"». Art. 5 du Traité OHADA

* 6 Il est important de noter ici que, dans les dispositions du Traité OHADA la matière de l'arbitrage est réglementée au titre V dans les articles 21 à 26

* 7 Voir sur ce sujet les travaux suivants :

- L'arbitrage OHADA : réflexions critiques par Ndiaye Mayatta MBAYE Mémoire, DEA de Droit Privé sous la direction du Prof. FADLALLAH Ibrahim Université Paris X (Nanterre) année académique 2000-2001. version électronique disponible sous http://www.lexana.org/memoires/htm/200106mm.htm

- Réflexions dubitatives sur le droit de l'arbitrage Par Joseph ISSA-SAYEGH Agrégé des Facultés de droit Professeur Consultant. version électronique disponible sous www.ohada.com/doctrine.php?page=7&mod=preview&

* 8 On note dans les deux textes de loi une unité de formulation c'est le cas des articles : 5 al. 1 AU.A et 179 al. 1 LDIP, art. 10 al. 2 AU.A et art. 181 LDIP, art. 14 AU.A et art. 182 LDIP etc.

* 9 Il est intéressant de lire sur ce sujet l'apport contributif de Renaud SORIEUL Administrateur principal au secrétariat de la CNUDCI « convergences entre la CNUDCI et l'OHADA » in L'OHADA et les perspectives de l'arbitrage en Afrique, ed. Bruylant 2000. P. 43-49

* 10 Message Conseil Fédéral N° 134, p. 24

* 11 Jarrosson, p. 398 N.779.

* 12 Pierre Meyer, OHADA droit de l'arbitrage, bruylant 2002 p. 22

* 13 Communication de Monsieur Amady BA, Magistrat, Directeur du Centre de Formation Judiciaire Dakar Sénégal in droit de l'arbitrage OHADA session de formation des formateurs auxiliaires de justice (Greffiers & Huissiers de Justice) MODULE 1du 09 au 21 juillet 2001.

* 14J. Robert / B. Moreau L'arbitrage, droit intermédiaire privé, 5e éd. Dalloz, 19873, n°1

* 15 Jarrosson, idem.

* 16 Traité théorique et pratique de procédure civile et commerciale, Paris éd. La Rose, 1904, tome 8, n° 220.

* 17 HUYS/KEUTGEN, P. 21 N. 21 cités par J-F -. POUDET et S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant 2002, p. 1

* 18 JOLIDON, introduction, P. 28 N.I. 1 ; cf. P. 33-39 N.6 sur la délimitation par rapport aux institutions voisines

* 19 Art. 1181 Code des activités Économiques de la Guinée, Art. 458 bis Code de Procédure Civile de l'Algérie).

Certaines législations combinent les deux critères objectifs et subjectifs pour définir l'internationalité de l'arbitrage, il en est ainsi de l'Italie dans son nouvel art. 832 CPCI. En effet, dans sa définition de l'arbitrage international le CPCI s'est inspiré d'une part du critère subjectif : une des parties doit avoir sa résidence ou son siège effectif à l'étranger au moment de la conclusion de la clause arbitrale, et d'autre part du critère objectif inspiré de la loi-type de la CNUDCI : une partie substantielle ou significative des prestations découlant du contrat doit être exécutée à l'étranger.

La convention européenne de 1961 dite de Genève combine aussi les deux critères en déclarant à l'art. 1er ch.1 let. que la convention est applicable «aux conventions d'arbitrages conclues pour le règlement des litiges nés ou à naître d'opération du commerce international entre personnes physiques ou morales ayant, au moment de la conclusion de la convention, leur résidence habituelle ou leur siège dans des États contractants différents».

Enfin la loi-type de la CNUDCI en son art. 1er al. 3 combine aussi les deux critères et qualifie d'international, l'arbitrage qui se retrouve dans les quatre hypothèses suivantes :

- si les parties ont, lors de la conclusion de la convention, leur établissement dans des États différents (critère subjectif)

- si le siège de l'arbitrage est situé en dehors de l'Etat de domicile commun des parties (critère subjectif)

- si une partie substantielle des obligations issues du contrat doit être exécutée en dehors de l'Etat de domicile des parties (critère objectif)

- si le lieu avec lequel l'objet du litige a le lien le plus étroit est situé dans un Etat autre que celui du domicile des parties (critère objectif).

* 20 Convention de Washington du 18 mars 1965 créant le Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements (CIRDI).

* 21 L'art 1492 du NCPC définit l'arbitrage international en ces termes « est international l'arbitrage qui met en cause des intérêts du commerce international». En effet, c'est le critère économique du terme commerce qui est mis en valeur par le droit français. Sur ce, est international l'arbitrage qui est relatif à une opération comportant le transfert de biens, de services ou de monnaie à travers les frontières.

* 22 Cf. sur cette question les notes de J-F -. POUDET et S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant 2002, p. 24 -30.

* 23 Communication de Monsieur Amady BA, Magistrat Directeur du Centre de Formation Judiciaire Dakar - Sénégal- in droit de l'arbitrage OHADA session de formation des formateurs auxiliaires de justice (Greffiers & Huissiers de Justice) MODULE 1 du 09 au 21 juillet 2001.

* 24 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 36.

* 25 Cf. B. Goldman, P.Lalive, les problèmes spécifiques de l'arbitrage international, rev. arb. 1980, p.323-340, p 341-372. Ph. Fouchard, la spécificité de l'arbitrage international, rev. arb. 1981, P.467-499.

* 26 J-F POUDRET S. BOSSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant 2002, p. 24.

* 27 Spécificité reconnue par les décrets français du 12 mai 1981 et espagnole du 22 mai 1981. Outre ces deux pays, le Danemark (1973), l'Irlande (1998), la Grèce (1999) ont optés pour une réglementation spécifique de l'arbitrage international.

* 28 Le concordat est élaboré dans la double perspective de l'arbitrage interne et international et s'appliquait à l'un et à l'autre. Cependant il ne présente plus une portée pratique en matière d'arbitrage internationale au regard du chapitre 12 de la LDIP

* 29 The New Ducth Arbitration Act entré en vigueur le 1er déc. 1986 (cf. P. Sanders, Droit des Affaires Internationales, N° 6, 1987, P.539-558). Les législations allemande, anglaise, italienne, suédoise et belge pour ne citer que celles-là répondent à ce même souci d'unité.

* 30 ANDREAS BUCHER, le nouvel arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn 1988 p. 24.

* 31 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p.44.

* 32 G. KAUFMANN-KOHLER le lieu de l'arbitrage à l'aune de la mondialisation, réflexions à propos de deux formes récentes d'arbitrage, Revue de l'arbitrage 1998 N° 3.

* 33 Art. 1, §2 de la loi type de la CNUDCI «Les dispositions de la présente loi... ne s'appliquent que si le lieu de l'arbitrage est situé sur le territoire du présent Etat».

* 34 Le moment de la conclusion de la convention joue un très grand rôle d'autant plus que si les parties au moment de la conclusion de la convention ont toutes deux leur domicile ou résidence en suisse, l'arbitrage ne pourra recevoir aucunement la qualification d'arbitrage international en dépit du siège suisse du tribunal arbitral. Le moment pertinent pour la détermination du domicile au sens de l'art. 176 al. 1 est celui de la conclusion de la convention d'arbitrage. En d'autres termes, le fait qu'au moment de la survenance du litige ou de l'introduction de la procédure, une partie qui était domiciliée à l'étranger au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage, ait transféré son siège en suisse est sans incidence sur la qualification international de l'arbitrage. Dans le même ordre d'idée, le contrat contenant une clause d'arbitrage conclu entre deux sociétés domiciliées en suisse, le fait que l'une d'entre elles cède ses droits à une entité domiciliée à l'étranger ne rend pas l'arbitrage international (ATF 27 oct. 1995, Bull. ASA 1996, p. 227).

* 35 Notons que, l'art. 176 ne mentionnant pas le critère de succursale et d'établissement, tout arbitrage qui opposerait une société domiciliée en Suisse à une société étrangère ayant un établissement ou une succursale en Suisse recevrait la qualification d'arbitrage international. (ATF 118 II 508, 509). Par contre, l'arbitrage est interne entre deux sociétés domiciliées en Suisse à propos d'un litige survenu exclusivement dans le cadre des activités de leurs succursales ou établissements respectifs à l'étranger.

* 36 L'arbitrabilité est une condition de validité de la convention d'arbitrage et de la compétence des arbitres, il s'agit de la validité objective du contrat d'arbitrage dans la mesure où cette condition est indépendante de la qualité et de la volonté des parties.

* 37 Art. 2059 code civil français : Toutes les personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition.

* 38 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 101.

* 39 23 juin 1992, Fincantieri, ATF 118, II. P.356; bulletin ASA, 1993, p.58; Rev. Arb., 1993, p. 691, note F. Knoepfler

* 40 Cf. Andreas Bucher, le nouvel arbitrage international en Suisse Helbing & Lichtenhahn 1988 p. 39.

Référence doit être ici faite pour toute la théorie sur l'arbitrabilité du litige en droit suisse au même livre p. 39-42

* 41 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 69.

* 42 ZPO (Zivilprozessordnung) loi de procédure civile allemande du 22 décembre 1997.

* 43 Cf. Andreas Bucher, le nouvel arbitrage international en Suisse Helbing & Lichtenhahn 1988, n. 93 p. 39.

* 44 Cf. rapport du Colloque du 2 février 2001 à Paris sur l'arbitrage OHADA.

* 45 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 97.

* 46 Notons que, le droit suisse de l'arbitrage international pour la validité matérielle de la convention d'arbitrage procède par combinaison des règles matérielles et des règles de conflit.

* 47 Les règles de conflit de lois qui désignent la loi applicable sont qualifiées de règles formelles ou indirectes par opposition aux règles de droit contenant les dispositions applicables à la situation en cause qui sont qualifiées de règles matérielles ou substantielles ou directes.

* 48 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 107.

* 49 Le renvoi est dit spécifique lorsque le document souscrit se réfère explicitement à la convention d'arbitrage contenue dans un autre document. Par contre il est global lorsque les parties souscrivent un accord qui renvoie en termes généraux à un document contenant une clause d'arbitrage sans faire référence à cette dernière.

* 50 Arrêt du TF 4C.44/1996 du 31 octobre 1996, cons. 2, Rec. TAS-I, p. 577, 582.

* 51 On fait observer que le choix es qualitès présente le désavantage de voir le ou les arbitres désignés par les parties se comporter en arbitre-partie (ou friend arbitrator selon la terminologie anglo-saxonne), ce qui est incompatible avec la règle sacro-sainte de l'indépendance et de l'impartialité des arbitres en droit de l'arbitrage.

* 52 Art. 14 du pacte international du 16 décembre 1966 sur les droits civils et politiques et Art. 7 de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples du 28 juin 1981

* 53 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 137-138

* 54 Cf. sur cette question les réponses données à la solution par G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 117-118.

* 55 Cf. sur ce sujet G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 126-135. ANDREAS BUCHER, le nouvel arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn, Bâle et Francfort-sur-le-Main 1988 p. 62-64.

* 56 J-F. POUDRET/S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J., Schulthess 2002, P. 369

* 57 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 129.

* 58 PHILIPPE LEBOULANGER, Présentation générale des actes sur l'arbitrage in l'OHADA et les perspectives de l'arbitrage en Afrique, Bruylant, Bruxelles 2000 p. 75.

* 59 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 141.

* 60 Ibidem.

* 61 ATF du 9 février 1998, Bull. ASA 1998, p.634, 664 ; citant notamment PETER/FREYMOND, Basler Kommentar, n° 21 ad art.180, p. 1493.

* 62 P. LALIVE, J-F POUDRET, C. REYMOND, Le droit de l'arbitrage interne et international en Suisse : édition annotée et commentée du Concordat sur l'arbitrage du 27 mars 1969 et des dispositions sur l'arbitrage international de la Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé, p. 332.

* 63 Ibidem. Sur la question l'auteur en citant les facteurs qui militent en faveur de cette immunité fait observer au plan pratique, qu'il serait d'un côté très difficile de trouver des gens qualifiés disposés à agir comme arbitres s'ils s'exposent, de ce fait, à une responsabilité personnelle illimitée. De l'autre côté, il estime que la partie qui a succombé dans un arbitrage pourrait chercher à faire réexaminer l'affaire par le biais d'un procès qu'elle ferait à l'arbitre personnellement, au motif qu'il aurait commis une faute professionnelle, ce qui porterait manifestement atteinte à l'arbitrage en tant que moyen de trancher définitivement les litiges.

Au plan personnel, il fait observer que si les arbitres étaient exposés au risque de voir leur responsabilité personnelle engagée, ils refuseraient d'être désignés à moins que les parties ne les indemnisent, de sorte qu'ils obtiendraient contractuellement l'immunité recherchée, même s'ils ne peuvent y prétendre par l'effet de la loi.

* 64 Cf. sur ce sujet A. REDFERN, M. HUNTER, M. SMITH, E. ROBIN, droit et pratique de l'arbitrage commercial international L.G.D., P. 216.

* 65 P. LALIVE, The immunity of Arbitrators, Lew ed., Lloy's 1990, P. 117.

* 66 J-F. POUDRET/S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J., Schulthess 2002, p. 490.

* 67 Sur cette question cf. le développement de A. BUCHER, le nouvel arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn, Bâle et Francfort-sur-le-Main 1988 note 196 p. 71. L'auteur fait observer que, l'art. 182 al.3 signifie que le tribunal doit mettre en oeuvre, la procédure arbitrale de telle manière qu'elle permette effectivement à chacune des parties d'exercer son droit d'être entendu. Ce droit comprend notamment le droit égal de chaque partie d'alléguer tous les faits pertinents, d'exposer ses moyens, de soumettre toute preuve pertinente, de prendre connaissance des pièces du dossier, d'assister aux audiences d'administration des preuves et aux débats oraux ordonnés par le tribunal ainsi que le droit de se faire représenter ou assister par un mandataire de son choix.

* 68 P. LALIVE, J-F POUDRET, C. REYMOND, Le droit de l'arbitrage interne et international en Suisse : édition annotée et commentée du Concordat sur l'arbitrage du 27 mars 1969 et des dispositions sur l'arbitrage international de la Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé, p. 363.

* 69 Un exemple type de cette mesure porte sur l'ordonnance judiciaire qui accorde au demandeur une provision sur sa créance.

* 70 J-F. POUDRET/S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J., Schulthess 2002, note 606, p. 552. Ces auteurs estiment que la compétence implicite admise par une certaine doctrine sur le pouvoir de l'arbitre d'ordonner des mesures provisoires et conservatoires en dépit du fait que la législation française ne prévoit aucune disposition dans sa loi d'arbitrage au sujet de telles mesures est contestable. Ils soutiennent à l'appui de cette position que le pouvoir de rendre des mesures provisoires n'est pas une question de « procédure » au sens de l'art. 1494 NCPC mais de « compétence ».

* 71 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 183.

* 72 Cf. B. GOLDNAN, in : 60 ans après, regard vers l'avenir, Publication CCI n. 412, Paris 1984 p. 271-299.

* 73 J-F. POUDRET/S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J., Schulthess 2002, note 618, p. 561. On note que RUEDE/HADENFELDT, p. 252, BUCHER, p. 74 N° 208, p.76 N°213 et p. 56 N°143 font partie du groupe minoritaire. Par contre KSP-BERT, P. 1539 N°5, ad art.183; LALIVE/POUDRET/REYMOND, p. 369 N°15 ad art. 183 LDIP font partie de la tendance majoritaire.

* 74 Ibidem, note 611, p. 554.

* 75 La liberté de la preuve est un principe admis en matière commerciale selon lequel, il n'y a pas de hiérarchie entre les différents modes de preuve, les parties sont donc libres d'administrer la preuve d'un acte par tous moyens.

* 76 J-F. POUDRET/S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J., Schulthess 2002, note 618, n° 645, p.582.

* 77 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 275.

* 78 Ibidem, p. 276.

* 79 Sur cette question voir P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 191. En France on admet que le tribunal arbitral dispose d'un pouvoir modérateur vis-à-vis des stipulations contractuelles. Ce pouvoir lui permet de tempérer les droits nés du contrat sans pouvoir modifier, au moins, substantiellement les obligations contractuelles. En revanche il ne lui est pas permis de bouleverser, de réviser ou de dénaturer ledit contrat.

* 80 Conformément à l'art 3.1. de la convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles, le contrat est régit par la loi choisie des parties, aucune restriction n'est posée à la liberté des parties.

* 81 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 192.

* 82 Ph. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN Traité de l'arbitrage commercial international P. 106.

* 83 Le droit élu, pour les questions contractuelles régira par exemple la formation et la validité du contrat, les droits et obligations des parties, l'exécution du contrat et les conséquences de son inexécution...etc. Par contre, le droit élu ne régira pas les questions non contractuelles comme celles relatives à la capacité civile, au transfert de propriété, aux sûretés immobilières...etc.

* 84 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 268.

* 85 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 204.

* 86 Art VII de la convention européenne de 1961 "les parties sont libres de déterminer le droit que les arbitres devront appliquer au fond du litige. A défaut d'indication par les parties du droit applicable, les arbitres appliqueront la loi désignée par la règle de conflit que les arbitres jugeront appropriée en l'espèce. Dans les deux cas, les arbitres tiendront compte des stipulations du contrat et des usages du commerce".

* 87 J-F. POUDRET/S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J., Schulthess 2002, note 618, n° 645, note 744, p. 705.

* 88 Il convient de souligner que l'art. 33 de CIA énumère, tout comme l'AU.A en droit OHADA, un certain nombre de conditions nécessaires pour la validité quant au fond de la sentence arbitrale.

* 89 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 295.

* 90 Par exemple l'ordonnance de procédure relative à la communication de pièces ou de mémoires, l'ordonnance de procédure relative aux mesures d'instruction du litige comme la commission d'expert, etc.

* 91 A. BUCHER, le nouvel arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn, Bâle et Francfort-sur-le-Main 1988 note 335 p. 115.

* 92 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, note 696, p. 301.

* 93 Ibidem.

* 94 Loi sur le Tribunal Fédéral (LTF) du 17 juin 2005 (RS 173. 110). Cette loi est entrée en vigueur le 1er janvier 2007.

* 95 Pouvoir reconnu à la cour d'appel d'attraire à elle le fond du litige, i.e. de trancher les points non jugés en première instance pour diverses raisons.






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