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Etude comparée de la réglementation de l'arbitrage international dans l'OHADA et en Suisse

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par CASSIUS Jean
Université de Genève - DEA Droit de l'arbitrage international 2007
  

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2-. LES LIMITES A L'AUTONOMIE PROCEDURALE EN DROIT OHADA ET SUISSE

Le but ultime du procès arbitral étant de rendre une sentence qui à terme sera exécutoire, les principes directeurs d'un procès civil lui sont bien évidemment applicables. Ainsi, les parties à titre principal et les arbitres à titre subsidiaire, en dépit de leur liberté de choix de la norme procédurale, sont limités dans la pratique de l'arbitrage international par, le respect des droits procéduraux fondamentaux sans lesquels l'arbitrage basculerait dans l'arbitraire. Ces limites, on les retrouve aussi dans les dispositions des articles 9 AU.A et 183 al. 3 LDIP. Notons que, l'autonomie en matière procédurale trouve aussi, de toute manière, ses autres limites dans les dispositions impératives des lois d'arbitrage du siège.

En droit OHADA, les limitations à l'autonomie privée des parties et des arbitres se trouvent disséminées de manière éparse dans l'AU.A (art. 9, 10 et 14). Mais qu'importe ! La loi fait du respect des droits procéduraux fondamentaux, la condition avant-gardiste de la liberté privée des parties et des arbitres en matière procédurale. Quelles sont donc ces limitations prévues par l'AU.A.

Une première limite à l'autonomie des parties ou des arbitres dans la détermination des règles procédurales nous est donnée dans les dispositions de l'art. 9 AU.A. Tout comme la loi type de la CNUDCI en son art. 18, l'AU.A en son art. 9 dispose que "les parties doivent être traitées sur un pied d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de faire valoir ses droits". Dans la formulation de cette disposition sont mises en évidence deux règles:

- la règle de l'égalité de traitement entre les parties. En effet, l'idée que les parties soient traitées sur un pied d'égalité est au coeur de tous les systèmes judiciaires et juridictionnels, et l'arbitrage en tant que système juridictionnel de règlement des litiges, en dépit de son caractère privé, n'échappe pas à l'application de ce principe.

- la règle qui porte sur le fait que, les parties doivent pouvoir faire valoir leurs prétentions sans entrave aucune. Cette règle relève du souci d'équité dans le traitement des parties, par rapport à la formulation des questions de fait et de droit qu'elles peuvent soumettre à l'examen du tribunal arbitral.

De l'idée du Prof. P. Meyer, ces deux règles cumulées se rapprochent du principe du contradictoire visé par l'art. 26 AU.A. Nous ne contredirons pas ce rapprochement dans la mesure où, le principe du contradictoire qui suppose que les deux parties aient, de manière égale, été mises en mesure de faire valoir leurs droits, ne contrarie en rien les dispositions de l'art. 9 AU.A. Principe que l'on retrouve aussi en droit suisse de l'arbitrage international.

Une deuxième limite, porte sur le fait qu'il est interdit aux arbitres de "[...] fonder leur décision sur les moyens qu'ils auraient relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations" (art. 14 al. 6 AU.A). Se situant dans la suite logique de la continuité des applications des règles de l'art. 9 AU.A précédemment citées, cette disposition constitue aussi, une condition restrictive à la portée de l'autonomie procédurale. À ce titre, elle fait partie de l'ordre public procédural et son non-observation devra entraîner l'annulation de la sentence ou le refus de sa reconnaissance et de son exécution.

La même lecture peut être faite au sujet de la règle de l'art. 14 al. 5 AU.A qui, prescrit aux arbitres de "retenir dans leur décision les moyens, les explications ou les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement". Cette règle est une des interprétations du droit d'être entendu en procédure contradictoire.

Une dernière limite consiste dans la violation par le tribunal arbitral des dispositions de l'art. 9 AU.A. En effet, tout tribunal arbitral qui accepterait la procédure qui prévoirait l'audition d'une seule partie violerait les règles contenues dans les dispositions de l'art. 9 AU.A. Autrement dit, le tribunal arbitral ne saurait transgresser le principe du traitement égalitaire en auditionnant qu'une seule partie au préjudice de l'autre. De même les parties, fort du principe de l'égalité de traitement que la loi leur reconnaît, doivent disposer du même délai dans l'examen des pièces et mémoires pour préparer leurs moyens de fait et de droit.

Quid du chapitre 12 LDIP ?

Le chapitre 12 LDIP ne disait pas autres choses lorsqu'il affirmait à son art. 182 al. 3 LDIP que "[...] le tribunal arbitral doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit d'être entendu en procédure contradictoire". Cette disposition à elle seule, résume si bien toutes les exigences de respect des droits fondamentaux procéduraux, lorsqu'il s'agit de déterminer les limites à la liberté privée des arbitres et des parties dans une instance arbitrale en matière procédurale. En dépit du caractère laconique du texte de la loi suisse sur la question, il est fort aisé de comprendre que, la formulation "droit d'être entendu en procédure contradictoire" est une séquence de phrase qui contient deux différentes notions mais tout de même complémentaires. Il s'agit du droit d'être entendu et la procédure du contradictoire. Le droit d'être entendu est une notion très vaste qui n'a pas une portée indépendante par rapport au droit au traitement égalitaire entre les parties dont le texte fait d'ailleurs mention67(*). Quant à la procédure du contradictoire, elle constitue une garantie qui permet à chaque partie de se déterminer sur les moyens de fait et de droit de son adversaire. Elle permet aussi, d'examiner et de discuter les preuves rapportées par lui et de les réfuter par ses propres preuves. La procédure contradictoire constitue, pour ainsi dire, une règle relevant de l'ordre public procédural et donc, son non-respect devrait, sans nul doute, être un motif d'annulation de la sentence ou le refus de sa reconnaissance et de son exécution. En résumé, les deux lois d'arbitrage que nous collationnons formulent toutes, de manière fort différente, le principe de l'autonomie de la volonté des parties à titre principal et des arbitres à titre subsidiaire dans la détermination de la norme procédurale. Cependant, le respect des droits procéduraux fondamentaux seul gage du succès d'une justice équitable constitue les limites admises par l'AU.A et le chapitre12, limites sans lesquels la justice arbitrale basculerait dans l'arbitraire.

* 67 Sur cette question cf. le développement de A. BUCHER, le nouvel arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn, Bâle et Francfort-sur-le-Main 1988 note 196 p. 71. L'auteur fait observer que, l'art. 182 al.3 signifie que le tribunal doit mettre en oeuvre, la procédure arbitrale de telle manière qu'elle permette effectivement à chacune des parties d'exercer son droit d'être entendu. Ce droit comprend notamment le droit égal de chaque partie d'alléguer tous les faits pertinents, d'exposer ses moyens, de soumettre toute preuve pertinente, de prendre connaissance des pièces du dossier, d'assister aux audiences d'administration des preuves et aux débats oraux ordonnés par le tribunal ainsi que le droit de se faire représenter ou assister par un mandataire de son choix.

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