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La condition juridique des étrangers en zone CEMAC. Contribution au diagnostic de l'intégration personnelle en Zone CEMAC

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par Eric- Adol GATSI TAZO
Université de Dschang Cameroun - Diplôme d'études approfondies  2009
  

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Para. 2 : LA RECONNAISSANCE ET L'EXECUTION DES DECISIONS
JUDICIAIRES AU PROFIT D'UN RESSORTISSANT COMMUNAUTAIRE SUR LE
TERRITOIRE D'UN ETAT MEMBRE

Le souci du législateur de reconnaître au profit de tout ressortissant communautaire une condition comparable à celle des nationaux de tous les pays de la CEMAC dans leurs pays respectifs l'a amené à consacrer le principe de la reconnaissance et de l'exécution des décisions de justice rendues en faveur d'un ressortissant communautaire sur le territoire d'un autre Etat que celui où la décision a été rendue. Cette mesure répond à ce que les auteurs ont appelé le principe nouveau de la « libre circulation des jugements »109 qui désigne le passage libre des décisions de justice à travers les frontières. Si cette libre circulation marque davantage l'idée d'une coopération judiciaire entre Etats de la CEMAC, nul doute par ailleurs qu'elle concourt fortement à garantir aux étrangers une condition aisée au sein de la Communauté en ceci qu'elle leur permet de faire exécuter une décision de justice rendue en leur faveur dans un Etat étranger membre de la CEMAC, à travers la sécurité de leurs droits qu'elle leur apporte et la simplification des formalités. Ceci dit, il importe de se pencher successivement sur la reconnaissance (A) et l'exécution (B).

A- La reconnaissance des décisions judiciaires

Elle est déduite de l'article 14 de l'Accord précité qui dispose qu'en matière civile et commerciale, les décisions contentieuses et gracieuses rendues par les tribunaux de l'un des Etats membres ont de plein droit autorité de la chose jugée sur les territoires des autres Etats membres. Plusieurs conséquences y sont attachées :

refuser. Une fois l'assistance judiciaire octroyée, elle peut être retirée s'il y a survenance des ressources suffisantes ou découverte du caractère frauduleux de la déclaration du bénéficiaire.

109 VOYAME (J) : « Traits caractéristiques et principe de la Convention de Lugano » ; et PATOCCHI (PM) : « La reconnaissance et l'exécution des jugements étrangers selon la Convention de Lugano » in L'espace judiciaire européen. La Convention de Lugano du 16 septembre 1988, respectivement pp. 24 et 92

> d'abord, peu importe la nature et la dénomination de la décision ; qu'elle soit un arrêt, un jugement, un ordonnance, elle est reconnue sur le territoire des autres Etats membres dès lors qu'elle émane d'une juridiction ;

> ensuite, peu importe que la décision soit contentieuse ou gracieuse. C'est dire que les décisions rendues à la suite de contestation entre deux parties tout comme celles rendues par le juge en raison de son pouvoir d'imperium peuvent également être reconnues sur le territoire des autres Etats membres ;

> enfin, la reconnaissance est de plein droit, c'est-à-dire que comme le dit la convention

de Lugano,110 sans qu'il soit besoin d'introduire une procédure particulière. L'étranger

est donc exempté de toute procédure ultérieure qui le mettrait certainement dans une

position de faiblesse car différente de celle des ressortissants de l'Etat où la décision

doit être reconnue. Par cette mesure, le législateur assimile l'étranger au national.

Par rapport à l'étranger au pays où la reconnaissance est invoquée, celle-ci entraîne des effets considérables. La doctrine reconnaît qu'à cet effet, « la décision étrangère reconnue déploie en principe dans l'Etat requis les mêmes effets qu'elle a dans l'Etat d'origine ».111 C'est dire que la décision a autorité de la chose jugée sur le territoire de l'Etat requis. On peut alors accorder à cette autorité de la chose jugée un effet positif et un effet négatif.112

L'effet positif consiste en ce que la décision reconnue sur le territoire de l'Etat requis peut être prise en considération pour lui faire produire certains effets. On pourra par exemple se baser sur ces décisions dans l'Etat requis pour décider de la réhabilitation ou de l'amnistie en faveur des intéressés. En conséquence, ceux-ci peuvent « s'en prévaloir auprès de tout intéressé, personne privée, autorité administrative ou juridiction de l'Etat où la reconnaissance est invoquée »113.

L'effet négatif rattaché à l'autorité de la chose jugée d'une décision sur le territoire d'un Etat étranger est une application du principe « non bis in idem » qui interdit alors que les faits sanctionnés par une décision prise dans un Etat membre ne puissent faire l'objet de nouvelles poursuites dans tout autre Etat membre. Le ressortissant communautaire se trouve ainsi dans une situation comparable à celle dans laquelle il se trouve quand il est dans son pays d'origine. En effet, l'autorité de la chose jugée dessaisit le juge national relativement à

110 Article 26 alinéa 1 de la Convention de Lugano.

111 PATOCCHI (PM) :Op. cit., p.116.

112 NGAPA (T) : « La coopération judiciaire pénale dans la zone CEMAC », Mémoire DEA FSJP de l'Université de Dschang, année académique 2005/2006, p.83.

113 ISAAC (G) : Droit communautaire Général, 4ème édition, MASSON Droit Sciences Economiques, 1995, p.310.

l'affaire concernée. Le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice commande que l'autorité de la chose jugée dessaisisse les juges de tous les Etats membres si bien que l'intéressé ne puisse être condamné sur le territoire des autres Etats pour les mêmes faits.114

Il faut signaler tout de même que même si l'autorité de la chose jugée est « de plein droit », l'article 14 de l'Accord précité ne l'accorde que pour autant que certaines conditions aient été satisfaites :

- La décision doit émaner d'une juridiction compétente selon la législation de

l'Etat partie sur lequel elle a été rendue.115 En guise de comparaison, la convention de Lugano n'exige pas une telle condition.116 Il s'agit pour nous d'une condition superflue puisque la décision évoquée ne peut être rendue qu'en respect et en conformité des textes de procédure en vigueur dans le pays dont elle émane. En plus cette condition est pratiquement inapplicable puisque le pays dans lequel la décision est invoquée n'a ni qualité, ni pouvoir pour se pencher sur un éventuel vice de compétence soulevé devant elle contre la décision évoquée et aucun tribunal supra étatique n'est investi d'une telle compétence. Peut-être peut-on envisager, pour régler cette situation, que le tribunal qui se trouverait dans une telle situation sursoie à statuer et saisisse la juridiction normalement compétente pour connaître d'une question de compétence dans le pays où la décision a été rendue. Dans ce cas, la décision de cette juridiction conditionnerait l'issue de la procédure enclenchée devant le juge de l'Etat requis qui, à ce moment et seulement à ce moment, pourra décider d'accorder les effets de droit à la décision incriminée. Le vice de compétence deviendrait alors pour lui une question préjudicielle.

114 L'article 1305 du Code Civil demande à cet effet une triple identité liée à l'objet, la cause et les parties : « il faut que la chose jugée soit la même, que la demande soit fondée sur la même chose, que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles en la même qualité ».

115 V. pour le Cameroun, l'ordonnance N°72/4 du 26 août 1972 et ses modifications subséquentes en ce qui concerne la compétence des tribunaux de droit commun, et pour ce qui est des juridictions l'ordonnance N°72/5 de la même date portant organisation judiciaire militaire modifiée par la loi N°98/007 du 14 avril 1998 pour le tribunal militaire, la loi N°90/060 du 19 décembre 1990 pour la Cour de sûreté de l'Etat, l'ordonnance N°72/7 du 26 août 1972 modifiée par la loi N°84/1 du 14 janvier 1984 pour la Haute Cour de Justice et l'ordonnance N°72/6 de la même date portant organisation de la Cour Suprême modifiée par divers textes subséquents pour la Cour Suprême ; pour le Congo la loi N°022/92 du 20 août 1992 portant organisation du pouvoir judiciaire au Congo ; pour le Gabon la loi N°7/94 du 16 septembre 1994 portant organisation de la justice, et la loi organique N°9/94 du 16 septembre 1994 fixant organisation, compétence et fonctionnement de la Cour judiciaire, des Cour d'appel et des tribunaux de première instance du Gabon ; pour la RCA la loi N°60/183 du 23 janvier 1960 fixant l'organisation des tribunaux en RCA ; pour le Tchad, la loi N°004/PR/98 portant organisation judiciaire au Tchad et toutes leurs modifications subséquentes.

116 Article 28 alinéa 4 de la Convention de Lugano.

- La décision ne doit pas être contraire à la jurisprudence des juridictions de

l'Etat où elle est invoquée. L'objectif ici est d'éviter une contradiction dans le droit positif de l'Etat requis. Là aussi il peut y avoir difficulté d'application dans le cas où la jurisprudence n'est pas constante. Dans ce cas, il appartiendrait à l'autorité saisie, qu'elle soit judiciaire ou pas de trancher à la faveur de ses propres opinions.

- La décision doit être passée en force de chose jugée, c'est-à-dire qu'elle ne doit

plus être susceptible d'aucun recours dans l'Etat dans lequel elle a été rendue. L'objectif est d'éviter qu'un effet reconnu à une décision devienne caduc et contradictoire après une annulation éventuelle de la décision.

- Le procès à l'issue duquel la décision a été rendue doit avoir offert aux parties

les conditions d'un procès équitable, notamment en ce qui concerne les droits de la défense. Le problème qui est susceptible de se poser ici est celui de déterminer qui est compétent pour apprécier si un procès a offert toutes les garanties d'un procès équitable. Le texte semble laisser libre cours à l'autorité devant laquelle la décision est invoquée d'apprécier. Dans ce cas, on est en droit de douter qu'une telle condition soit souvent vérifiée, car elle pourrait mettre à mal les relations diplomatiques entre le pays qui a rendu la décision et le pays où celle-ci est invoquée et qui refuse de la reconnaître pour défaut de procès équitable.

- La décision ne doit pas être contraire à l'ordre public de l'Etat où la reconnaissance est invoquée. Ceci rentre dans le cadre plus large de ce qui est convenu d'être appelé la réserve d'ordre public.117

Les mêmes conditions sont requises pour l'exécution.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams