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La question de la décroissance chez les verts français

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par Damien ZAVRSNIK
Université Aix- Marseille  - Diplôme d'études politiques 2012
  

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Le récit identitaire, ciment des organisations partisanes

L'unité et partant la survie d'un parti dépendent de sa capacité à conserver une homogénéité culturelle à travers un « récit identitaire ». Ce récit prend la forme d'un système de sens dont l'importance est cruciale pour définir un « nous en politique »220(*). L'hypothèse de base est ici que les partis constituent ce que le sociologue Alessandro Pizzorno appelle des « matrices de cultures et d'identités politiques »221(*). Selon Weber les partis sont des entreprises d'intéressés qui recherchent des rétributions matérielles ou immatérielles, le but du récit identitaire est alors de forger un sentiment d'appartenance incontestable au groupe. Dans une perspective mertonienne il permet de faire passer ce groupe de l'état latent à une communauté manifeste dont les membres défendent ensemble les intérêts. Le récit identitaire relie ainsi les deux « faces » interne et externe du parti.

Il est possible de distinguer trois éléments constitutifs du récit identitaire. C'est d'abord un lieu de mémoire au sens de Pierre Nora222(*). Le parti est le dépositaire d'une histoire, son histoire, qui fait le lien avec le passé mais aussi avec l'avenir. Comme le remarquait Michel Leiris, l'histoire est au centre de la culture d'un parti puisque celle-ci « apparait d'un côté comme le produit de ses expériences [...] et que d'un autre coté elle offre à chaque génération montante une base pour le futur »223(*). Le rapport partisan à la mémoire renvoie aussi à la manière dont les partis façonnent le passé pour lui donner une clé d'explication politique. L'administration du sens se traduit par une mise en récit d'une continuité historique entre le passé et l'action politique contemporaine. Le passé est réactivé à travers des rites et des commémorations qui marquent une certaine permanence identitaire.

Le parti se présente également comme un lieu de parole. Le pouvoir du Verbe est déterminant dans la construction du système de sens du parti. Le caractère performatif du discours transforme les formations partisanes en entreprises politiques qui cherchent, par les mots, à toucher les acteurs (sympathisants, électeurs) et à changer leur représentations mentales en leur faveur. Mais si la parole politique contient une forte charge idéologique en véhiculant un ensemble d'idées et de valeurs, elle participe aussi largement à l'ingénierie identitaire par lequel le parti transforme le groupe en communauté politique soudée. A travers une série de mots marqueurs, de mots totems, « le discours partisan fabrique ses visions du monde autour d'un jeu de référents identitaires destinés à marquer les frontières du territoire symbolique de son "nous" »224(*). Bien entendu les stratégies discursives varient d'un parti à l'autre. Pour les Verts comme pour la plupart des petits partis le discours tend à s'opposer radicalement aux modèles idéologiques et intellectuels ordinaires dans lesquels se retrouvent les formations réformistes. La prégnance de l'antiproductivisme dans les discours écologistes ne peut que confirmer cette thèse.

Enfin le récit identitaire se base sur les matrices affectives des partis. Les emprunts conceptuels à la psychologie et à la psychanalyse permettent d'éclairer la dimension encore peu connue des mythes et des passions identitaires au sein des partis. Cette dimension socio-affective se comprend à l'aune des logiques conflictuelles qui sous-tendent le fait partisan. Les clivages du jeu politique s'inscrivent dans le système de sens partisan, ils créent des antagonismes qui cristallisent des sentiments de loyauté et de solidarité à l'égard d'un camp. De même sur le plan interne les déchirements, les trahisons ou les mouvements d'affection et de confiance sont autant de preuves de l'importance de « l'émotion en politique » pour reprendre le titre d'un ouvrage de Philippe Braud225(*).

Etudier les partis en tant qu'institution de sens permet de mieux comprendre les dynamiques complexes qui les traversent. Entrepreneurs idéologiques, les partis ont néanmoins besoin de se conformer à leur récit identitaire pour établir un système de sens cohérent. Cette affirmation peut être relativisée aujourd'hui pour les partis de masses au regard de leur perte d'intensité idéologique et de la dilution des instances de formations culturelles dans la multiplication des réseaux. La tendance n'est cependant pas la même pour les partis écologistes et protestataires au sens large. La proposition d'un modèle alternatif global les maintient comme institution de sens malgré des contradictions internes parfois violentes.

* 220 MARTIN, Denis-Constant, Carte d'identité. Comment dire nous en politique ?, Paris, Presses de la FNSP, 1994

* 221 PIZZORNO, Alessandro, Le radici della politica assoluta, Milan, Feltrinelli, 1993

* 222 NORA, Pierre, Les lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 1997

* 223 LEIRIS, Michel, Cinq études d'ethnologie, Paris, Denoël-Gonthier, 1969, p. 39

* 224 HASTINGS, Michel, « Partis politiques et administration du sens », op.cit., p. 30

* 225 BRAUD, Philippe, L'émotion en politique, Paris, Presses de Sciences Po, 1996

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