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La question de la décroissance chez les verts français

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par Damien ZAVRSNIK
Université Aix- Marseille  - Diplôme d'études politiques 2012
  

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Chapitre 8 : La réappropriation de la décroissance, une nécessité dans le « récit identitaire » écologiste

L'écologie politique est marquée par un attachement fort à l'antiproductivisme. Les valeurs de frugalité et d'autonomie que véhicule l'invariant politique antiproductiviste sont en effet au coeur du récit identitaire du parti écologiste. Mais son corpus idéologique éclaté ne lui donne pas une assise identitaire solide. Faute d'une pensée clairement formalisée et intégrée par ses membres, le parti Vert est constamment travaillé par ses contradictions identitaires. Il a donc mis en pratique un pluralisme intra-partisan afin de remédier à ce déficit d'unité culturel. Dans ce cadre, le « visage » interne du parti est particulièrement sensible aux idées de la décroissance. Le parti administrateur de sens se réapproprie la décroissance tout en l'euphémisant pour la rendre compatible avec l'objectif de rentabilité électorale.

L'acuité et la permanence du débat identitaire conduit le parti écologiste à inscrire la décroissance à son agenda politique. Cette influence se retrouve dans le programme écologiste à travers l'importance de l'antiproductivisme.

1. La permanence du débat identitaire

Si les invectives lancées par les objecteurs de croissance parviennent si bien à toucher leur cible verte au point de poser la décroissance en objet de débat central262(*), cela tient à l'intensité du débat identitaire au sein du parti écologiste. Avant d'étudier comment les Verts se réapproprient la décroissance, il importe de comprendre pourquoi un tel ajustement est nécessaire. En sus des convergences programmatiques manifestes que nous avons déjà relevées, le parti écologiste repose depuis l'origine sur un socle de références intellectuelles et idéologiques dont la fragilité est à l'origine d'un débat identitaire jamais clos. Un débat d'ailleurs relancé avec la transmutation du vieux (et pourtant encore jeune !) parti Vert dans le nouveau mouvement Europe Ecologie - Les Verts.

Un mouvement aux appartenances culturelles diverses

L'idéologie est une composante fondamentale de l'identité d'un parti qui se traduit ensuite sous la forme d'une doctrine, d'un programme ou d'un projet de société. Comme nous l'avons vu, elle est au coeur d'un système de représentation, de sens pour reprendre la terminologie de Hastings, qui marque la spécificité de chaque formation. Or à sa création le parti Vert n'a pour seules références que la mobilisation des mouvements sociaux et l'héritage de quelques penseurs iconoclastes. Les écologistes doivent alors inventer leur propre système de croyance. Chose peu aisée d'autant que le jeune parti s'apparente à une agrégation friable d'adhérents issus de mouvements politiques divers et variés. Il ne s'agit donc pas ici de se livrer à une nouvelle analyse de l'idéologie ou du programme écologiste mais de poser la question de savoir s'il est possible de mettre à jour une culture politique propre aux Verts.

Nous avons montré plus haut que les partis politiques devaient s'entendre comme des matrices culturelles afin de souligner les dynamiques complexes et contradictoires qui fondent l'identité partisane. Il est utile de préciser ce propos par la notion de « sous-culture politique », souvent évoquée de manière indifférenciée comme « culture politique ». Nous entendons par là les traits culturels, les attitudes et valeurs partagées par un même sous-groupe politique. L'existence d'une telle culture fait débat chez les écologistes. En effet le parti s'est formé à partir d'héritages politiques divers portant chacun une culture politique propre. Comme le remarque Daniel Boy, « les cultures politiques partisanes naissent probablement du rassemblement d'acteurs sociaux partageant une même vision du monde au sein d'organisations politiques dotées d'une certaine permanence. S'agissant de l'écologie, ces conditions premières ne semblent pas réunies »263(*). Pour cause, les militants participant à la création des Verts en 1984 proviennent pour la plupart d'autres horizons politiques. Selon les rares études réalisées sur les militants Verts, la socialisation « primaire » des adhérents écologistes indique une certaine prédisposition familiale aux valeurs de gauche sans être prépondérante pour autant. Ainsi 49 % des militants Verts disent avoir un père de gauche264(*) et 39 % ont eu un passé militant pour seulement 26 % des adhérents socialistes. Ces origines militantes se trouvent en majorité à gauche (notamment au P.S.U). Daniel Boy établit une corrélation entre le passé militant et l'auto-situation sur l'échiquier politique des adhérents puisque « ceux qui proviennent de l'extrême gauche, du P.C.F et du P.S.U, ont davantage tendance à se situer "plus à gauche" sur l'axe gauche-droite »265(*).

Ce rapide aperçu des modes de socialisation politique des Verts tend à démontrer une certaine hétérogénéité culturelle. Certes un nombre important des adhérents à la fondation du parti en 1984 ont participé aux mouvements sociaux des 1970, véritable berceau de l'écologie politique, mais cela ne paraît pas suffisant pour instituer une culture partisane. Au-delà de cette relative absence initiale de points de références partagés, est-il néanmoins possible de distinguer des segments d'identité communs ?

* 262 La décroissance s'invite régulièrement dans les débats des journées d'été du parti.

* 263 BOY, Daniel, « L'écologie, une nouvelle culture politique ? », Vingtième Siècle. Revue d'Histoire, octobre-décembre 1994, n°44

* 264 BOY, Daniel, PLATONE, François, REY, Henri, SUBILEAU, Françoise, et YSMAL, Colette, C'était la gauche plurielle, Paris, Presses de Sciences Po, 2003, p. 52

* 265 Ibid, p. 62

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault