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La protection des droits de la personnalité par le juge camerounais

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par Pythagore NONO KAMGAING
Université catholique d'Afrique Centrale - Master en droits de l'homme et action humanitaire 2009
  

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» The essential element of a right is the legal power bestowed upon the individual by the legal order to bring about, by law suit, the execution of a sanction as a reaction against the nonfulfillment of the obligation (...) Only if the legal order confers such a power are we faced by a «right» in the specific, technical sense of the word»

KELSEN. H (1967), Pure Theory of Law, Berkley, M. Knight's transl., pp. 134-135.

«Quelles que soient les douleurs de cette vie, je ne m'en plaindrai pas, s'il m'est donné de réaliser les deux plus hautes ambitions qu'un homme puisse avoir sur la terre. Ces deux ambitions, les voici : être esclave, et être serviteur. Esclave de la conscience, et serviteur des pauvres. «

VICTOR HUGO, Le droit et la loi et autres textes citoyens, Paris, Editions 10/18, Département d'Univers Poche, 2002, p.377.

INTRODUCTION GENERALE

Les droits de la personnalité sont attribués à chaque individu en vue de la défense de ses intérêts personnels primordiaux1(*), ils revêtent de ce fait une importance particulière pour l'épanouissement de la personnalité de ses titulaires2(*). Ils font partie des droits dits de la première génération : « droits civils et politiques qui apparaissent surtout, à partir du siècle des lumières, comme des droits naturels, appartenant à l'homme, inaliénables et imprescriptibles »3(*). Multisémantiques, les droits de la personnalité couvrent, dès leur origine, les biens fondamentaux que sont la vie, l'intégrité physique et la dignité humaine, noyau dur des droits de l'homme, mais aussi les biens relevant de l'intimité de la personne comme l'image, le secret, les relations familiales, l'honneur, le nom tous attributs personnels que l'homme peut opposer à l'Etat ainsi qu'aux particuliers4(*). Ces droits font l'objet au Cameroun d'une protection législative5(*) lorsqu'ils ne sont pas constitutionnellement consacrés6(*). Proclamer des droits au profit des citoyens ne suffit cependant pas à en assurer la garantie, il est nécessaire qu'on leur enjoigne la protection. Cette protection a été confiée au juge qui depuis la réforme constitutionnelle de 1996 appartient non plus à une « autorité » mais bien à un « pouvoir » judiciaire7(*). Car, « dans un Etat rationnellement organisé, la protection des droits de l'homme et la répression des conduites attentatoires aux dits droits relèvent de la compétence des juges. Ce sont eux en effet qui doivent faire contrepoids et contrôler les excès des gouvernants ; ce sont eux qui, d'une manière générale, doivent garantir les droits fondamentaux de la personne et demander des comptes à ceux qui se sont rendus coupables d'atteintes à l'intégrité, à la liberté et à la sécurité des personnes »8(*).

I- CONTEXTE DE L'ETUDE

Lorsqu'on regarde l'actualité des droits de l'homme dans le monde, si l'on se réjouit d'une avancée vers l'universalité de la protection des droits de l'homme, on ne peut que s'attrister des violations quotidiennes de cet édifice normatif patiemment construit autour de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine9(*). Au Cameroun, l'actualité sociale et judiciaire récente ne manque pas justement de révéler des cas de mépris ou de violation des droits de l'homme en général et droits de la personnalité en particulier. Ceci amène naturellement à s'interroger sur l'efficacité des mécanismes chargés d'en assurer l'effectivité, en l'occurrence ici le juge.

La publication par certains médias camerounais de la « liste des personnes soupçonnées de pratiques homosexuelles » courant 2006, fit couler de l'encre et de la salive. Certaines ONG locales et internationales de défense des droits de l'homme n'avaient pas hésité à présenter cette liste comme une atteinte à la vie privée des personnes indexées. Le chapitre consacré au Cameroun du Rapport 2008 de l'ONG britannique Amnesty International qui revient d'ailleurs sur la question est au aussi au coeur de vives tensions entre l'organisation et le gouvernement camerounais10(*). Ce dernier a réagi sur la question en brandissant lui aussi, le Rapport 2008 du Ministère de la justice sur l'Etat des droits de l'homme au Cameroun11(*). Face à cette cacophonie juridique et politique, le juge, fortement interpellé a su à chaque fois tirer son épingle du jeu en se montrant intransigeant dans la répression des atteintes aux droits de la personnalité, ainsi que l'illustre l'affaire Grégoire Owona. Ce Ministre du gouvernement camerounais dont l'affaire porte le nom, gagnait en 2006 un procès en diffamation contre des journalistes dont les articles avaient bafoué son honneur et sa réputation en le présentant comme un adepte de l'homosexualité12(*). Plus récemment, les remous sociaux et l'euphorie soulevés par « l'Opération Epervier »13(*), ne doivent pas occulter les graves manquements aux droits de la personnalité auxquels ces opérations donnent parfois lieu. Manquements qui ne devraient pas laisser le juge indifférent, parce qu'il est le garant de ces droits, piliers incontournables de l'Etat de droit auquel le Cameroun se réclame.

Sur le plan international, les questions juridiques soulevées par l'Affaire Moussa Caca au Niger devraient inviter le juge, particulièrement dans le contexte africain d'omniprésence du pouvoir politique à plus d'audace et de vigilance dans la protection des droits de la personnalité. Moussa Caca, correspondant de la Radio France International, avait été placé sur table d'écoutes, en raison des liens présumés qu'il entretenait avec la Rébellion Touareg. Ecoutes déclarées par la suite illégales par un juge de Niamey. Enfin, on a encore présent à l'esprit, le scandale qui fit irruption dans la récente campagne présidentielle aux Etats-Unis, au sujet d'une intrusion illégale dans les données personnelles contenues dans les passeports des principaux candidats à cette élection. Les suites judiciaires de cette affaire seront d'un grand intérêt pour cette étude en ce qu'ils permettront de comprendre la stratégie développée par le juge américain pour protéger les droits de la personnalité. Il convient à présent de délimiter dans un souci de précision scientifique, le champ de la présente étude.

* 1 Corine Fillipone, La contractualisation des droits de la personnalité, mémoire de DEA, Université de Montpellier, novembre 2001, p.1.

* 2 François Rigaux, « Les paradoxes de la protection de la vie privée », in Groupe d'études Société d'information et vie privée, http://www.asmp.fr (Consulté le 10 janvier 2009). 

* 3 Boumakani (B), « Démocratie, Droits de l'homme et Etat de droit », in Annales de la faculté des sciences juridiques et politiques, Université de Dschang, T1, Vol.2, 1997, p.11. Cité par Jacques Philibert Nguemegne, « Réflexion sur l'usage et le respect des droits de l'homme au Cameroun : le droit de vote depuis 1990 », in Vers une société de droit en Afrique Centrale, Colloque de Yaoundé (14-16 novembre 2000), sous la direction de Denis Maugenest et Jean-Didier Boukongou, Presses de l'UCAC, p. 151.

* 4 Christiane Hennau-Hublet, « Les droits de la personnalité au regard de la médecine et de la biologie contemporaines », in l'effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la communauté francophone, AUPEL-UREF, Colloque international, 29-30 septembre- 1er octobre 1993, Port-Louis, p. 465.

* 5 Voir par exemple l'article 305 du Code pénal sur la répression de la diffamation.

* 6 Le préambule de la Constitution camerounaise dispose : « Le domicile est inviolable. Nulle perquisition ne peut avoir lieu qu'en vertu de la loi. Le secret de toute correspondance est inviolable. Il ne peut y être porté atteinte qu'en vertu des décisions émanant de l'autorité judiciaire ».

* 7 Félix Onana Etoundi, « Le respect du droit par les juridictions camerounaises », in Vers une société de droit en Afrique Centrale, op.cit, p. 207.

* 8 Mouteke. R et Locko.I, « Protection des droits des magistrats au Congo. Pathologie d'une justice exsangue », in Droits de l'homme en Afrique centrale, sous la direction de D. Maugenest et de P.G. Pougoue, actes du colloque de Yaoundé des 9-11 novembre 1994, UCAC-Karhala, Yaoundé- Paris, 1995, p.169. Cité par Sylvain Sorel Kuaté Tameghé, « La contribution du juge à la protection des droits de l'homme en Afrique centrale », in Vers une société de droit en Afrique centrale, p. 229.

* 9 Jean Didier Boukongou, « L'interdit universel de la torture : un principe en péril en Afrique », in Protection des droits de l'homme en Afrique, Manuel des formateurs, PUCAC, 2007, p.19.

* 10 Voir le Rapport 2008 d'Amnesty International sur les violations des droits humains dans le monde, disponible sur le site http://www.amnsety.org (consulté le 13 février 2007).

* 11 A en croire le dit Rapport et preuves à l'appui, d'importantes mesures administratives, législatives, judiciaires et autres seraient prises par les autorités camerounaises pour assurer l'effectivité tant des droits civils et politiques que des droits sociaux, économiques et culturels.

* 12 Voir à cet effet le Jugement n° 2401/COR du 24 mars 2006, Affaire M.P et Grégoire Owona c/ Biloa Ayissi.

* 13 C'est le nom donné à la campagne d'assainissement des finances publiques engagée par les autorités camerounaises et qui conduit à l'arrestation de hauts fonctionnaires de l'administration publique.

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