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L'utilisation des nouvelles technologies dans le procès civil : Vers une procédure civile intégralement informatisée ?


par Sophia BINET
Université LUMIERE LYON 2 - Master Droit Processuel 2005
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE LUMIERE LYON 2

FACULTE DE DROIT ET SCIENCE POLITIQUE

MASTER 2 DROIT PROCESSUEL : CONTENTIEUX et PROCEDURES D'EXECUTION

Sophia BINET

L'utilisation des nouvelles technologies

dans le procès civil :

Vers une procédure civile intégralement informatisée ?

Sous la direction de Madame le Professeur Marie-Claire RIVIER

2004-2005

Le 17 juin 2005

principales ABREVIATIONS

Bull.civ.: Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (Chambres civiles)

C. E.: Conseil d'Etat

C.E.D.H.: Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

C.E.D.H.: Cour Européenne des droits de l'homme (jurisprudence)

Civ.: Cour de cassation, chambre civile (suivi du numéro de la chambre)

C.N.B.: Conseil National des Barreaux

C.N.I.L.: Commission Nationale de l'informatique et des libertés

Com.: Cour de cassation, chambre commerciale et financière

Com. com. élec.: Revue mensuelle de Communication et commerce électronique

D.: Recueil de jurisprudence Dalloz

Gaz. Pal.: Gazette du Palais

J.C.P.: Jurisclasseur périodique (édition générale)

J.C.P. éd. N.: Jurisclasseur périodique (édition notariale)

J.O.: Journal Officiel (Lois et décrets)

L.C.E.N.: Loi pour la Confiance dans l'économie numérique

N.C.P.C.: Nouveau Code de procédure civile

P.A.G.S.I.: Programme d'Action Gouvernementale pour l'entrée de la France dans la Société de l'Information

R.T.D. Com.: Revue trimestrielle de droit commercial et économique

T.C. : Tribunal de commerce

T.G.I.: Tribunal de Grande Instance

T.I.: Tribunal d'Instance

SOMMAIRE

PRINCIPALES ABREVIATIONS 4

SOMMAIRE 5

INTRODUCTION 6

PARTIE 1 : LE BIEN FONDÉ DE L'ESSOR DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS LA PROCÉDURE CIVILE 12

CHAPITRE 1 : DES ARGUMENTS PROPICES AU DÉVELOPPEMENT DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS LE PROCÈS CIVIL 13

SECTION 1 - LE TEMPS INFORMATIQUE AU SERVICE DU TEMPS JUDICIAIRE 13

SECTION 2 - UNE POLITIQUE LÉGISLATIVE DE SIMPLIFICATION DE LA PROCÉDURE CIVILE PAR L'OUTIL INFORMATIQUE 20

CHAPITRE 2 : L'IMPACT DES NOUVELLES TECHNOLOGIES SUR LE QUOTIDIEN DES PROFESSIONNELS DU DROIT 27

SECTION 1 - L'OUVERTURE DES JURIDICTIONS VERS L'EXTÉRIEUR PAR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHANGES DÉMATÉRIALISÉS 27

SECTION 2 - LA DÉMATÉRIALISATION DES ACTES DE PROCÉDURE 34

CHAPITRE 3 : LA SAUVEGARDE DE LA SÉCURITÉ JURIDIQUE PAR LA CERTIFICATION 43

SECTION 1 - LA CERTIFICATION, UN OUTIL DE CONFIANCE 43

SECTION 2 - LES ENJEUX DE LA DÉMATÉRIALISATION DES ÉCHANGES 53

TRANSITION 58

PARTIE 2 : LE RISQUE D'UNE DÉRIVE VERS UNE JUSTICE DÉSHUMANISÉE 64

CHAPITRE 1 : DES OBSTACLES DÉCELABLES À MAÎTRISER 64

SECTION 1 - LA PORTÉE D'UNE UTILISATION EXTENSIVE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS LA PROCÉDURE CIVILE 65

SECTION 2 - LES PROBLÈMES TECHNIQUES INHÉRENTS AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES 72

CHAPITRE 2 : LA SUBSTITUTION INTÉGRALE DU JUGE PAR L'INFORMATIQUE, UNE ÉTAPE À NE PAS FRANCHIR 80

SECTION 1 - L'APPRÉCIATION HUMAINE DE L'OPPORTUNITÉ D'UNE DÉCISION 80

SECTION 2 - LA COHABITATION DE L'HOMME ET DE LA MACHINE DANS LE DÉLIBÉRÉ, UNE PERSPECTIVE À DÉLIMITER 84

CONCLUSION 91

BIBLIOGRAPHIE 94

INDEX 97

TABLE DES MATIÈRES 98

introduction

« Les technologies de l'information et de la communication sont porteuses de promesses dans tous les domaines. Leur vertu est de mettre de la rapidité dans ce qui est lent, de la fluidité dans ce qui est lourd, de l'ouverture dans ce qui est fermé ».1(*)

Jean-Pierre RAFFARIN

La procédure civile s'est historiquement construite autour du support papier. Traditionnellement en effet, les actes de procédure tels que l'assignation, les actes du palais, les conclusions, les ordonnances sont des actes écrits au sens où ils sont délivrés sur papier. Le Nouveau Code de procédure civile, nommé ainsi en raison de la réforme du 1er janvier 1976 qui a dégagé les nouveaux principes directeurs du procès civil, recèle une pléthore d'hypothèses dans lesquelles l'utilisation de l'écrit implique en pratique un support papier. En effet, certaines dispositions exigent directement et explicitement la présence d'une signature manuscrite comme par exemple l'article 456 alinéa 1er du NCPC qui dispose que « le jugement est signé par le président et le secrétaire » ou l'article 901 du NCPC qui énonce que la déclaration d'appel est signée par l'avoué à peine de nullité. D'autres dispositions impliquent concrètement l'intervention du papier destiné à laisser une trace de l'évolution de la procédure. L'écrit est alors dans ces cas utilisé pour encadrer la procédure en formalisant les accords des parties2(*) ou bien en fixant leurs prétentions3(*). Dans le même sens, les personnes qui concourent à la procédure sont bien souvent tenues de recourir à l'écrit papier. Tel est le cas par exemple des Huissiers de justice qui doivent utiliser le papier et des enveloppes pour signification des actes4(*) ou bien des médiateurs ou conciliateurs qui informent le juge par écrit à l'issue de leurs missions5(*).

Les innovations technologiques de ces dernières années viennent bouleverser cette culture du papier comme premier support des relations entre le justiciable et les partenaires de la justice. Avec l'apparition du télégraphe, de la machine à écrire, ou plus récemment du minitel et de la télécopie, les méthodes de travail ancrées autour de la culture de la plume s'en sont nécessairement trouvées modifiées. Mais ces techniques, aujourd'hui intégrées dans le pratique judiciaire, n'ont pas soulevé autant de questions et suscité autant de débats passionnés que l'apparition des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans la sphère procédurale française. Ainsi, la procédure civile entre dans l'ère du numérique, notamment depuis l'entrée en vigueur de la loi du 13 mars 2000 et ses décrets d'application plaçant sur le même pied d'égalité le support papier et le support électronique.

Le développement des nouvelles technologies dans la justice a touché en premier lieu le domaine administratif. Il répondait à une volonté politique inscrite dans le cadre plus général de la réforme de l'Etat, exprimée pour la première fois dans un discours prononcé par le premier ministre le 25 août 1997 à Hourtin, dans lequel celui-ci énonçait sa ferme intention de simplifier, d'accélérer et de rendre plus sûre et moins coûteuse la justice par l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Un an plus tard, le Programme d'Action Gouvernementale pour l'entrée de la France dans la société de l'information (P.A.G.S.I) a vu le jour et s'en est suivi de multiples discours, décisions tendant à la modernisation du système administratif. Le vent nouveau de l'usage de ces outils modernes soufflant sur l'administration a alors gagné le domaine judiciaire. Les avantages retirés de l'utilisation de la plupart des produits proposés aux acteurs administratifs ont pu convaincre progressivement les plus réticents de l'utilité pour la justice civile de ne pas méconnaître leurs apports.

Sous l'appellation « nouvelles technologies de l'information et de la communication », il convient d'entendre l'ensemble des instruments pourvus d'une technologie moderne utilisés pour traiter, modifier et échanger de l'information, plus spécifiquement des données numérisées. La naissance de ces outils est due notamment à la convergence de l'informatique, des télécommunications et de l'audiovisuel. L'informatique est la science du traitement automatique de l'information par des ordinateurs, le terme « informatique » venant de la contraction des mots « information » et « automatique ». Il a été proposé en 1962 par Philippe Dreyfus et accepté par l'Académie française en 1966. Née avec l'apparition des premiers ordinateurs à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'informatique a tout d'abord pour mission de pallier les insuffisances humaines. Elle permet aussi de diffuser une information par le biais de réseaux, dont Internet constitue l'exemple le plus marquant. En effet, issu du réseau ARPANET qui a été conçu dans les années soixante pour le département Américain de la Défense, Internet constitue à ce jour le plus grand réseau du monde accessible aux professionnels comme aux particuliers. Il peut donc être considéré comme le seul réseau spécialisé dans l'information. En effet, son but n'est plus, comme à l'origine, de transmettre quelques lignes à partir de messageries, mais d'échanger des documents électroniques, des données informatisées, des informations dématérialisés, etc. D'autres technologies tels que les logiciels, les lieux publics virtuels, les courriers électroniques, les bases de données font parties des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Ainsi, ces instruments permettent tout à la fois d'échanger de l'information, de mettre en commun des documents, ou encore de diffuser une donnée à une personne quelque soit l'endroit où elle se trouve.

La mise à disposition des informations juridiques sur Internet ou sur cédérom recueille un sérieux succès. En effet, des entreprises privées du marché de l'édition juridique et des concessions de service public ont eu l'ambition de mettre en ligne gratuitement des renseignements juridiques qui existent sur papier sur un support informatique ce qui permet aux justiciables de disposer d'un grand nombre de données rapidement. La création d'un tel corpus documentaire numérique a été concevable par l'application d'un procédé informatique appelé «  base de données ». L'article L113-3 Code de Propriété Intellectuelle6(*) définit une base de données comme « un recueil d'oeuvres de données et d'autres éléments indépendants disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessible par des moyens électroniques ou d'une autre manière ». Néanmoins, ces nouvelles technologies concernent le marché de l'édition électronique et non le fonctionnement de la procédure civile en temps que telle. Dès lors, en dépit de leur intérêt fondamental quant à la question de l'accès aux informations juridiques pour les usagers et professionnel du droit, notre développement ne portera pas sur cet aspect.

La procédure civile connaît une utilisation progressive de nouvelles technologies de l'information et de la communication alors que les citoyens ne peuvent pourtant pas tous y accéder. Depuis une dizaine d'année en effet, la justice civile est concernée par ce mouvement d'entrée dans l'ère de la technologie. Elle est dotée d'outils tels que des chaînes informatiques dans les tribunaux auprès des magistrats et greffiers, des logiciels performants pour la gestion des dossiers dans les études d'huissiers de justice, notaires et dans les cabinets d'avocats, des courriers électroniques et boites de messagerie utilisés par ces professionnels, des sites Internet, des portails juridiques permettant des échanges dématérialisés entre tous les partenaires de la justice civile. Ces moyens techniques modernes permettent donc un échange entre les protagonistes du procès qui peuvent effectuer nombreuses démarches judiciaires par voie électronique. Notre développement portera exclusivement sur ces instruments qui permettent une communication de l'information entre les différents intervenants au procès civil. Pour davantage d'intelligibilité, il conviendra de les appeler simplement nouvelles technologies.

Face à la croissance notable du maniement des nouvelles technologies en matière administrative et pénale, l'utilisation de ces procédés dans la procédure civile reste timide. En effet, les modes de représentation, la présence de l'oral et de l'écrit, le nombre de personnes qui interviennent au procès y sont les plus diverses. L'instauration de procédés techniques dans cette sphère est donc davantage complexe; elle exige une adaptation lente et délicate afin de ne pas bouleverser l'équilibre procédural, les principes directeurs du procès et la sécurité juridique. Le développement des télé-procédures, la création de nouveaux modes de traitement et de transfert des données, la dématérialisation des informations ou encore de la signature électronique soulève donc des interrogations, des difficultés légitimes qu'il paraît opportun d'étudier à un moment où la procédure civile commence à changer de visage. En effet, la loi du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique, enjeu majeur pour la pratique judiciaire, ne semble être qu'une prémisse du passage de la sphère civile procédurale dans le monde de l'électronique. L'actualité est brûlante s'agissant de l'extension de l'usage des nouvelles technologies dans la procédure civile : le rapport « Célérité et qualité de la justice » de Monsieur Jean-Claude Magendie du 15 juin 2004 a été déposé au Garde des sceaux, ministre de la Justice, le 6 septembre 2004 ; le projet de décret d'application de la loi du 13 mars 2000 pris en Conseil d'Etat et relatif à l'adaptation des actes authentiques sur supports électroniques a été évoqué le 14 juin 2005 et sera prochainement publié ; le garde des Sceaux a présenté en Conseil des ministre le 15 juin 2005 une ordonnance prise en application de la loi pour la confiance dans l'économie numérique du 21 juin 2004, relative à l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie électronique et dans laquelle il projette de modifier certaines dispositions du Code civil ; la norme AFNOR Z 43-400 relative à l'archivage de données électroniques sera homologuée en principe dans le courant du mois de juin 2005.

La technique vient modifier la perspective dans laquelle se situe le droit. Dès lors, celui-ci ne peut plus être regardé de la même manière : les relations entre le justiciable et les partenaires de la justice, entre le citoyen et le droit, se modifient ouvrant la voie à une justice nouvelle car électronique. Néanmoins, l'avenir qu'offre l'instauration des nouvelles technologies dans la procédure civile paraît prometteur à condition de contrôler leur impulsion : la sécurité juridique doit être au coeur de la réflexion quant à la question de savoir si la procédure civile pourra un jour être totalement dématérialisée et si elle s'effectuera intégralement en ligne. Les profits suscités par l'utilisation des nouvelles technologies dans la procédure civile mèneront-ils à une société du « tout électronique » ? L'informatisation intégrale de la sphère civile procédurale peut-elle être envisagée en dépit des risques qu'elle génère quant à l'équilibre judiciaire ?

Au-delà de cette problématique générale relative aux perspectives d'avenir de l'utilisation des nouvelles technologies dans la procédure civile, de nombreuses interrogations doivent conduire notre réflexion : les atouts procurés par ces outils sont-ils en adéquation avec les principes fondamentaux du procès civil et les règles déontologiques des professions judiciaires ? De quelle manière l'usage des nouvelles technologies peut garantir la confidentialité, l'intégrité et l'authenticité d'un échange électronique ? Les mécanismes techniques de certification assurant la sécurité de transmissions numériques sont-ils fiables et méritent-ils la confiance que certains praticiens du droit leur confèrent ? Comment contourner les difficultés inhérentes à l'utilisation des nouvelles technologies afin de ne pas bouleverser l'organisation judicaire et les garanties fondamentales d'une bonne justice ?

L'étude des nouvelles technologies dans la procédure civile implique nécessairement d'aborder des questions techniques tel que le mécanisme de la certification, la cryptographie ou encore les systèmes experts. La compréhension du fonctionnement de ces outils paraît indispensable pour répondre à l'ensemble des interrogations suscitées par un tel sujet.

Utiliser les nouvelles technologies dans la procédure civile afin de palier aux difficultés de lenteur et à certaines inefficacités du système judiciaire semble être actuellement une solution profitable pour tous les protagonistes du procès civil. En effet, les modifications des méthodes de travail qu'induit un tel changement profitent aux magistrats, auxiliaires de justice et justiciables. Ils peuvent retirer de l'utilisation de ces procédés des avantages perceptibles en terme d'efficacité, de productivité et de rapidité notamment grâce au mécanisme de la certification qui garantie la sécurité juridique (Partie 1).

Néanmoins, l'éclat procuré actuellement par le maniement des nouvelles technologies dans la procédure civile ne doit pas dissimuler certaines réalités. Afin que ces outils modernes offrent aux acteurs du procès civil ainsi qu'aux usagers de la justice ses atouts, un discernement est nécessaire quant aux limites à leur apporter (Partie 2).

Partie 1 : Le bien fondé de l'essor des nouvelles technologies dans la procédure civile

Les professionnels du droit et les hommes politiques s'accordent sur l'idée que le maniement de nouvelles technologies de l'information et de la communication tel que l'informatique et Internet pourrait être une issue permettant de résoudre les difficultés de lenteur du système judiciaire français. En effet, l'usage de ces procédés technologiques semblerait répondre à des exigences définies de simplification, d'accélération et de sécurité des communications entre l'usager et les praticiens de la justice.

Au regard des bénéfices suscités par l'émergence actuelle de certains procédés techniques, la procédure civile française, bien que déjà armée de certaines technologies, tente de s'équiper davantage afin d'atteindre au mieux un objectif d'optimisation et de rationalisation du travail.

Les professionnels du droit, les hommes politiques et le législateur participent donc ensemble à promouvoir leur extension (Chapitre 1) étant donné qu'elles semblent avoir un avenir prometteur pour la procédure civile modifiant les méthodes de travail et influant sur l'évolution du droit et de la justice (Chapitre 2).

La question délicate de la sécurité juridique est également au coeur des débats politiques et juridiques. Sa sauvegarde, une valeur essentielle d'une justice équitable et contradictoire, s'opère par le biais de la méthode de certification d'après la loi du 13 mars 2000 sur la signature électronique et ses décrets d'application (Chapitre 3).

Chapitre 1 : Des arguments propices au développement des nouvelles technologies dans le procès civil

De par leur nature, les nouvelles technologies de l'information et de la communication apportent une accélération du rythme de la justice. Par conséquent, ils peuvent donc être une solution à l'exigence de bonne administration de la justice (Section 1).

L'introduction de ces nouveaux procédés dans le fonctionnement de l'institution judiciaire française s'inscrit globalement dans une démarche politique générale visant d'un côté à favoriser l'entrée de la France dans la société de l'information et de la communication et d'un autre côté, à satisfaire les espérances du justiciable avide de célérité et d'efficacité du système judiciaire. C'est au travers de ces préoccupations que le législateur introduit la technologie informatique dans le procès civil (Section 2).

SECTION 1 - Le temps informatique au service du temps judiciaire

Nombreux sont les professionnels du droit qui estiment que les nouvelles technologies peuvent apporter à la procédure civile certains avantages pour la gestion des dossiers. A l'heure où les transactions commerciales s'effectuent de plus en plus souvent par la communication électronique, faisant ainsi disparaître le support papier, il semble que les mentalités changent progressivement.

I. Une productivité assurée pour la gestion du dossier

C'est un gain de temps considérable qui peut être retiré de l'utilisation de l'informatique tant pour les individus en cause que globalement pour le traitement du dossier.

A. Les professionnels du droit en faveur d'un suivi de l'affaire instantané et rapide

Les professions juridiques, entreprises, avocats, magistrats, huissiers de justice, notaires, ont de plus en plus recours aux nouvelles technologies de l'information et des communications dans leur vie professionnelle et ils sont nombreux à témoigner de leur substantiels avantages.

En effet, d'une part, la totalité des études d'huissiers de justice est désormais informatisée. Plus de 20 fournisseurs occupent le marché bien que celui-ci soit limité à environ 2000 études. Monsieur André Voillequin, Directeur général de l'ADEC, Organisme lié par convention avec la Chambre Nationale des Huissiers de justice, ne manque pas de rappeler qu'il faut bien reconnaître que les progrès actuels des nouvelles technologies appliquées aux logiciels spécifiques procurent aux études une facilité et une qualité d'utilisation de haut niveau7(*).

Pour les huissiers de justice également, ces systèmes informatiques leur permettent de réaliser un gain de temps considérable par une gestion comptable mécanisée, une interconnexion avec l'extérieur mais surtout une véritable intendance électronique des dossiers permettant notamment une automatisation des procédures, des lettres de rappel, de l'agenda, de la facturation.

D'autre part, les notaires ont voulu se doter très tôt d'outils performants pour assurer au mieux leur mission sans cesse plus complexe et sans cesse plus administrative. Un notaire sans plume d'oie est donc encore un notaire. Le développement de ces procédés informatiques semble ne pas effrayer la profession même si la présence physique du notaire demeure indispensable8(*). Monsieur Didier Mathy estime que « l'informatique notariale doit aider le notaire à porter son art jusqu'au sublime, et non se contenter de lui permettre de continuer à gérer les urgences (...) 9(*)».

Aussi, les avocats semblent s'accorder sur l'idée que la généralisation de la communication électronique pourrait contribuer à une justice plus diligente et plus efficace. Même si l'opinion de certains d'entre eux sur les avantages de ces outils n'est pas réellement exprimée, il convient de remarquer que la plupart des cabinets d'avocats possèdent déjà des logiciels spécialisés offrant notamment des bases d'informations structurées (intervenants, cotation, clients, contacts, dossiers...), agenda de procédure affichant les urgences quotidiennes et prévoyant le planning comme les rendez-vous par collaborateur ou pour l'ensemble du cabinet, archivage, rédaction d'actes modèles actualisés par des praticiens10(*). Ces logiciels peuvent assurer la confection semi-automatique des actes, leur mise en mémoire, et une procédure de consultation et d'édition à distance instantanée. La reproduction, l'expédition en nombre aux personnes concernées (conseils, témoins, experts...) ainsi que la possibilité de connaître à tout moment l'état et le calendrier des procédures11(*) paraissent donc facilitées.

Il semble que l'utilisation des nouvelles technologies par les avocats pourrait dépasser ce simple aspect de gestion mais s'étendre aux relations entre les acteurs du procès civil. En effet, Maître Jean Villacèque, avocat au barreau des Pyrénées Orientales, ancien bâtonnier et professeur associé à l'Université de Perpignan, pense à ce propos que nous sommes au début de cette généralisation des outils électroniques et qu'une fois que les avocats seront en réseau avec les juridictions, une grande partie de la mise en état pourra se faire ainsi et beaucoup de lenteurs seront résorbées sans que les droits des parties ne soient mises en péril12(*).

De plus, les entreprises et notamment celles de recouvrement utilisent en masse les nouvelles technologies et surtout Internet. Il est un outil précieux, instantané et souvent gratuit, mettant à la disposition des Crédits managers un système d'informations quasi-exhaustif : renseignements sur la qualité, transmission des dossiers de recouvrement aux sociétés, visualisation des actions conduites par ces dernières sur les espaces clients/dédiés... La gestion du contentieux est alors facilitée pour les juristes d'entreprises bénéficiant de logiciels qui leur permettent de suivre l'historique de chaque dossier, d'avoir des alertes sur les étapes de la procédure et d'évaluer le risque financier pour chaque affaire.

Enfin les juridictions civiles dont certaines sont dotées de moyens technologiques modernes participent à la modernisation et à la simplification du procès civil.

Grâce à cette mécanisation déjà existante, les acteurs du procès peuvent espérer davantage d'économie d'effort et de temps pour le traitement d'une affaire, ce qui satisfera probablement les justiciables.

B. Des échanges facilités et rapides

L'informatique et les réseaux offrent, de par leur nature, une disponibilité permanente et immédiate de l'information ainsi qu'une instantanéité de la communication entre tous les intervenants du procès. Les nouvelles technologies semblent donc permettre une modification patente de la perception d'un dossier en libérant les praticiens, juges et greffiers de la fatalité de la lenteur du traitement matériel des procédures.

Le formalisme procédural comme les flux judiciaires ne peuvent être qu'assouplis par l'émergence des technologies de l'information et de la communication dans la procédure civile. Monsieur Pierre Chevalier, Magistrat, chef de bureau de la procédure à la direction des Affaires juridiques et du Sceau, ministère de la justice, émet à ce titre un avis encourageant sur la question. Il déclare en effet que les échanges simultanés et rapides, le suivi d'une mise en état et la constitution des éléments du dossier d'une procédure par la voie électronique devraient tout à la fois permettre une diminution des délais et des distances en épargnant des déplacements, un renforcement du contradictoire en raison de l'information immédiate de l'évolution du dossier, une plus grande transparence, une meilleure sécurité juridique dans les informations transmises, une facilitation des échanges13(*).

D'une part, il convient de souligner qu'Internet ouvre la voie à un dialogue entre les usagers. Les services de la justice par le biais des télé-procédures permettent donc aux justiciables d'effectuer la plupart de leurs démarches devant les tribunaux sans avoir à se déplacer. Les expériences d'échanges par voie électronique simultanée sont diverses et ne cessent de proliférer dans un objectif constant d'accès rapide à l'information juridique et de commodité dans les démarches14(*).

D'autre part, le développement d'Internet facilitera les échanges de données en permettant à chacun d'être présent virtuellement quasi-instantanément faisant ainsi disparaître les systèmes d'échanges corps présent synchrones (la parole) ou asynchrones (le courrier). Le système de visioconférence, qui permet un contact direct entre l'usager et le fonctionnaire, se développe actuellement à titre expérimental en procédure pénale. Toutefois, les arguments en faveur de l'émergence de ce mode opératoire et plus largement des nouvelles technologies restent les mêmes. En effet, à l'occasion d'une démonstration dans une salle du parquet des mineurs de Lyon, en présence du ministre de la justice Monsieur Dominique Perben, le procureur de la République à Lyon, Monsieur Xavier Richaud n'a pas manqué d'exprimer son contentement. Après avoir affirmé que la liaison était sécurisé, il énonce clairement que l'intérêt incontestable est le gain de temps et de productivité15(*).

La mise en contraste de ces propos fait immédiatement ressortir les avantages que pourraient procurer le développement de la technologie informatique dans le domaine de la procédure civile. A titre d'exemple, les conciliations dans le cadre d'une procédure de divorce pourraient très bien se dérouler en visioconférence. Dès lors, le juge des affaires familiales pourra fixer plus facilement une date pour statuer et les parties éviteront ainsi des lourds déplacements parfois coûteux au tribunal.

Les arguments avancés par les professionnels du droit montrent donc que le développement des nouvelles technologies semble garantir une productivité et une célérité de la procédure civile. Néanmoins, il y a lieu de savoir si leur application ne va pas à l'encontre des droits du citoyen.

II. L'assurance d'une meilleure application des principes fondamentaux

L'usage d'outils techniques informatiques modifie les méthodes de travail des praticiens du droit.

Il répond alors à des objectifs clairement définis : il s'agit tout à la fois de simplifier, d'accélérer et de rendre plus sûres et moins coûteuses les communications entre les usagers et les acteurs de la sphère civile procédurale. Ainsi, l'emploi des nouvelles technologies dans la procédure civile respecte les principes fondamentaux qui doivent s'imposer dans le fonctionnement de l'institution judiciaire, notamment ceux de l'article 13 et 6-1 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales16(*).

A. Le droit à un accès effectif à un tribunal

En se dotant de procédés techniques modernes allouant un accès aisé à la justice, la banalisation des communications par Internet comme la démultiplication des litiges sont-ils à craindre ?

Il serait tentant de réponse positivement. Néanmoins, favoriser l'accès à la justice n'entraîne pas une menace de déséquilibre de la société, au contraire. En effet, l'appel au juge facilité par des moyens technologiques ne peut que renouer avec l'un des plus anciens et des plus constructifs aspects de la civilisation occidentale : le règlement des conflits par le droit plutôt que par la violence, le recours à la protection de la loi plutôt que la seule invocation du rapport de force17(*).

Dès lors, la procédure civile équipée de nouvelles technologies répond sans aucun doute à une exigence ancienne de démocratisation de la justice. Elle est plus proche du justiciable, créant ainsi un rapport de proximité et de confiance entre l'usager de la justice et le droit puisque l'accès à l'information comme le traitement du dossier sera rapide et simplifié.

Le maniement de moyens techniques nouveaux dans la procédure civile permet donc un meilleur accès à la justice étant donné que cette dernière concourt à l'intérêt général et non à la satisfaction unique d'un besoin individuel, mais il faut rester prudent quant à la possibilité d'une surconsommation judiciaire18(*).

Par conséquent, l'exigence d'un droit d'accès effectif devant le juge posé par l'article 13 de la CEDH « Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leur fonctions officielles » et qui sous-tend tout l'article 6-1 est donc clairement respecté.

Toutefois, il convient de mettre un bémol à cette observation, sans pour autant s'y étendre puisque cela fera l'objet d'une étude approfondie postérieurement19(*). En effet, la question de l'étendue des nouvelles technologies dans la procédure civile se pose : l'introduction de ces outils ne doit pas entraîner une justice à deux vitesses, l'une des personnes à la pointe de la modernité et l'autre des usagers qui ne peuvent ou ne veulent, pour des moyens tant financiers que personnels, s'adapter à ces procédés. On peut douter dès à présent qu'une large diffusion et a fortiori une complète propagation de ces derniers engendrerait un fossé entre les justiciables et donc un non respect de l'article 6-1 de la CEDH . La maîtrise de leur rayonnement paraît en conséquence indispensable pour une bonne application de cet article.

B. Le droit à un jugement public et équitable dans un délai raisonnable

L'article 6-1 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi (...) ». Ce principe induit le respect d'une bonne organisation et d'un bon fonctionnement de la justice étatique.

Jusqu'à l'élaboration de cet article, la question du délai dans la procédure n'existait pas en temps que tel. En effet, même si aucun texte de loi français n'exigeait ce principe, il était implicitement exprimé dans les articles prévoyant des délais. Par exemple, l'article 15 du Nouveau Code de Procédure Civile prévoit que « les parties doivent se faire connaître en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elle invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ».

Depuis l'entrée en vigueur de la Convention, tout Etat doit donc respecter un délai raisonnable dans le traitement des litiges qui lui sont soumis afin de donner aux justiciables un procès « équitable » au sens large. La Cour apprécie le caractère raisonnable de l'affaire, du comportement du requérant et celui des autorités compétentes20(*) ; elle prend également en considération l'enjeu du litige pour l'intéressé : une célérité accrue s'impose lorsque l'espérance de vie du requérant est réduite par exemple21(*).

Ainsi, d'un côté, grâce au maniement des procédés techniques modernes, le bon déroulement de l'affaire dans un délai raisonnable paraît être profitable. D'une part pour les parties, elles se déchargent alors de la lourdeur et des contrariétés psychologiques engendrées par un procès trop long et coûteux, et pour les acteurs du procès, d'autre part, qui pourront traiter le litige d'une manière plus souple et profiter du gain de temps pour s'intéresser davantage au fond du conflit ou pour se consacrer à d'autres conflits.

D'un autre côté, la mise en place des nouvelles technologies dans la procédure civile évitera donc que les organes de Strasbourg sanctionnent sévèrement les procédures qui dépassent « un délai raisonnable ».

Ce principe communautaire imposé aux Etats membres sera donc davantage honoré, ce qui satisfera les parties comme les professionnels du droit et l'image de la justice française sera revalorisée. Néanmoins, la limitation de l'usage des nouvelles technologies paraît nécessaire afin que cette exigence européenne soit appliquée de manière irréprochable. En effet, on peut facilement imaginer qu'avoir recours de manière systématique aux nouvelles technologies pour saisir la justice aurait pour effet pervers que certains usagers, au lieu d'être jugé dans un délai raisonnable, ne le soit nullement, faute pour eux de ne pouvoir ou de ne vouloir pour quelques raisons que ce soit accéder à ces outils. Encore une fois, la maîtrise de l'étendue des procédés nouveaux paraît indispensable.

Les professionnels du droit ont intégré les idées d'efficacité et de célérité des moyens offerts par les nouvelles technologies pour la procédure civile en les utilisant. Ces outils semblent correspondre aux exigences de bonne organisation et de bon fonctionnement de la justice étatique et être en cohérence avec les droits du citoyen à la condition de maîtriser leur propagation de manière clairvoyante. Néanmoins, s'il est permis de manier les nouvelles technologies dans la procédure en toute sécurité, c'est grâce aux hommes politiques et au législateur qui sont l'origine de ce mouvement en leur faveur.

SECTION 2 - Une politique législative de simplification de la procédure civile par l'outil informatique

Le droit évolue et la communauté des juristes devient mondiale. Les droits internes sont quotidiennement mis à l'épreuve des autres droits et toute sorte de comparaisons sont possible entre les différentes législations existantes. Dès lors, l'Etat français n'a pu se désintéresser des pistes ouvertes par les nouvelles technologies. Il s'est donc organisé pour permettre à tous d'accéder aux données publiques et d'utiliser légalement les nouvelles technologies.

I. Un programme politique en faveur d'une société de l'information et de la communication

Une partie du travail de l'homme politique consiste à opérer des changements en employant des procédés qui soient acceptables pour le public et efficace. Ainsi, face à l'évolution des technologies de l'information, les hommes d'Etat ont progressivement mis ces outils au service de la justice par le biais d'un programme de modernisation de l'administration.

A. La lutte politique pour une justice simplifiée et moderne

Nombreuses sont les structures de la justice civile qui présentent des signes de fatigue. Les gouvernements ont dès lors tenté d'exploiter les possibilités offertes par les technologies de l'information pour répondre aux attentes et aux besoins des citoyens.

En effet, dès sa prise de fonction en juin 1997, le gouvernement dirigé par Monsieur Lionel Jospin, a pris acte du retard enregistré par la France dans ce domaine et s'est engagé dans un programme très ambitieux, constituant une priorité de son action. C'est par un discours prononcé à Hourtin (Gironde), le 25 août 1997, que le premier ministre a défini les grandes lignes de la politique qu'il entendait suivre. Il déclarait alors que «  Les bouleversements introduits par les technologies de l'information dépassent largement le seul enjeu économique : l'essor des nouveaux réseaux d'information et de communication offre des promesses sociales, culturelles et, en définitive, politiques »22(*).

L'Etat s'est alors engagé à moderniser le fonctionnement de l'administration par le biais des outils informatique. Le Programme d'action gouvernementale pour l'entrée de la France dans la société de l'information (P.A.G.S.I), publié en 1998, fixait des objectifs à atteindre et définissait la place que l'Etat entendait occuper dans ce mouvement de mobilisation nationale.

Nonobstant une grande prudence, voire une certaine timidité de la jurisprudence civile qui est réticente à l'usage de la télécopie, la pratique et les gouvernements successifs semblent en faveur d'une dématérialisation des actes de procédure.

B. Les projets politiques actuels ouverts vers une ère électronique

Dans une optique similaire de modernisation et afin de trouver un accès simplifié à la justice, le Ministère de la justice a commandé en décembre 2003 un rapport procédant à un état des lieux exhaustif des lenteurs de la justice et des pratiques professionnelles propres à y remédier. Il convenait plus précisément de détecter « tout ce qui est susceptible d'engendrer des lenteurs inutiles, voire des blocages », l'objectif étant de « promouvoir et de pérenniser des procédures et des pratiques mieux adaptées » au système procédural23(*). Ainsi, le Président du Tribunal de Grande Instance de Paris, Monsieur Jean-Claude Magendie, a remis le 6 septembre 200424(*), à Monsieur Dominique Perben, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, le rapport de son groupe de travail sur le thème « Célérité et qualité de la justice »25(*).

La quatrième partie du rapport, intitulée « L'informatique et la communication au service de la célérité et de la qualité de la justice », est exclusivement consacrée aux atouts qu'offre l'informatique au fonctionnement de la justice. Elle préconise certaines mesures visant d'une part, à développer la communication électronique et d'autre part, à conserver l'information.

Ce rapport et ses suites feront l'objet d'une large concertation avec l'ensemble des acteurs intéressés afin de déboucher sur des évolutions concrètes. Néanmoins, cette démarche politique est à pour l'heure, une illustration de l'action engagée par le Ministère de la Justice visant à moderniser par des moyens informatiques le fonctionnement du service public.

Le projet de budget 2005 établi par le Garde des Sceaux et Madame Nicole Guedj, Secrétaire d'Etat aux droits des victimes, présenté le 22 septembre 2004 à la presse juridique et judiciaire, souligne également l'importance octroyée à l'informatique pour la justice. En effet, des crédits seront directement attribués au développement des outils informatiques26(*).

Le pouvoir politique se fait donc l'écho des bénéfices que peuvent apporter ces outils modernes. Le législateur a suivi ce mouvement en créant des lois bouleversant la culture papier. Il est également à l'origine de l'essor des nouvelles technologies dans la procédure civile et d'une généralisation éventuelle du phénomène.

II. La loi au service de l'ère informatique

La technique semble avoir eu une influence sur le contenu du droit puisque plus d'une loi concernant les nouvelles technologies ont été promulguées en France. Néanmoins, il convient de s'intéresser uniquement à deux d'entre elles étant donné qu'elles ont une utilité pour la procédure civile. Il s'agit d'une part de la loi du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique, et d'autre part, de la loi du 21 juin 2004 sur la confiance dans l'économie numérique.

A. L'écrit électronique ad probationem

Le législateur français a montré la capacité du droit à prendre en compte les évolutions techniques de la société d'information en créant la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 « portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information » et relative à la signature électronique27(*). En effet, l'adoption de la loi était censée assurer la transposition de la Directive Européenne 1999/93/CE du Parlement Européen et du Conseil du 13 décembre 1999. Cependant, cette loi va plus loin que la Directive en conformant le droit de la preuve aux technologies de l'information.

D'une part, elle modifie les dispositions du Code Civil relatives à la preuve littérale en le dotant d'articles qui placent l'écrit et la signature électronique sur un terrain égal.

Dorénavant en effet, l'article 1316-1 du Code Civil dispose que « l'écrit électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont l'écrit émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité ». Il n'y a donc en principe plus de conflit de preuve entre un support papier et un support électronique (article 1316-2 du Code Civil).

L'article 1316-3 et 1316-4 du Code Civil donne de plus une définition de la force probante de l'écrit sur support électronique en admettant que cette force est soumise à certaines conditions : d'un côté, l'intégrité de l'écrit doit être garanti et d'un autre côté, l'imputabilité à son auteur doit être établie.

La signature électronique a donc la même valeur juridique que la signature manuscrite, sous réserve que le procédé soit fiable. Les conditions permettant de bénéficier de cette présomption légale de fiabilité de signature électronique sont détaillées dans le Décret n°2001-272 du 30 mars 200128(*).

D'autre part, la loi du 13 mars 2000 consacre la possibilité pour les officiers publics d'établir et de conserver les actes authentiques sur support électronique. Ce dernier point est une véritable révolution juridique29(*) qui soulève une extrême prudence dans son application. C'est pour cette raison que le nouvel et 2nd alinéa de l'article 1317 du Code Civil a été suspendu à l'adoption d'un décret en Conseil d'Etat qui n'a pas encore été pris30(*).

Le Décret du 30 mars 2001 susmentionné, pris pour l'application de l'article 1316-4 du Code Civil et relatif à la signature électronique, précise les conditions à réunir afin de bénéficier de la présomption de fiabilité d'un procédé de signature électronique. La signature électronique doit être sécurisée et garantir la confidentialité (chapitre 1er dudit décret). C'est pourquoi, il convient de créer des dispositifs de vérification de la signature électronique (chapitre 2) qui seront mis en oeuvre grâce à l'utilisation de certificats électroniques qualifiés pour assurer l'intégrité de cette signature (chapitre 3)31(*). Le décret n° 2002-535 du 18 avril 2002 relatif à l'évaluation et à la certification de la sécurité offerte par les produits et les systèmes des technologies de l'information32(*) et l'arrêté ministériel du 31 mai 2002 relatif à la reconnaissance de la qualification des prestataires de certification électronique et à l'accréditation des organismes chargés de l'évaluation33(*) sont également venus compléter la loi du 13 mars 2000 sur ce sujet.

Dès lors, cette loi semble apporter de sérieux avantages en terme de gain de temps pour la procédure civile puisqu'elle admet que puissent être dématérialisés non seulement l'acte sous seing privé, mais aussi l'acte authentique sous réserve de la publication du décret pris en Conseil d'Etat34(*). Néanmoins, des mécanismes permettant la dématérialisation des actes de procédure doivent être créés afin de sauvegarder la sécurité des échanges juridiques.

B. L'écrit électronique ad validitatem

La loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique35(*) (LCEN) constitue la première étape législative du plan RESO 2007 présenté par le Premier ministre en 2003 pour favoriser le développement de la "République numérique"36(*).

Son objectif consiste en l'adaptation de la législation française au développement de l'économie numérique, aux fins de renforcer la confiance en cette dernière et d'assurer le développement de ce secteur, tout en établissant un cadre juridique stable pour les différents acteurs de la société de l'information. Dès lors, deux concepts émergent de cette finalité : d'une part la loi vient s'adapter à la réalité des faits et au développement du commerce électronique; d'autre part, elle tend à combiner ce développement avec les intérêts des différents acteurs.

La loi du 21 juin 2004 marque une sorte d'achèvement de l'édifice légal et réglementaire37(*). En effet, un vide restait à combler avec la question de l'écrit électronique ad validitatem. C'est chose faite avec l'article 25 qui crée, notamment, un nouvel article 1108-1 dans le Code civil, article qui dispose que « lorsqu'un écrit est exigé pour la validité d'un acte juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique(...). »

Dès lors, l'égalité de l'écrit électronique et de l'écrit papier lorsqu'un écrit est exigé pour la validité d'un acte juridique est consacrée par cette loi. Cette équivalence implique en outre que, lorsque la loi exige une mention manuscrite de la main de celui qui s'oblige, cette mention peut être apposée sous forme électronique.

Par exemple, la conclusion en ligne d'un bail d'habitation qui selon l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 doit être établi par écrit, devient envisageable, étant précisé que le Gouvernement est habilité par la L.C.E.N. à adapter les textes existants par voie d'ordonnances.

Ces questions de formalisme des actes juridiques ne peuvent donc être indifférentes aux praticiens judiciaires38(*). Néanmoins, les dispositions de l'article 1108-1 du Code civil ne sont pas applicables aux actes sous seing privé relatifs au droit de la famille et des successions ou à certains actes sous seing privé relatifs à des sûretés personnelles ou réelles (article 1108-2 du Code civil).

En d'autres termes, la dématérialisation des actes de procédure comme la reconnaissance de l'acte de procédure électronique ad validitatem n'est pas l'objet de la L.C.E.N., mais elle semble en contenir des prémices.

Récemment, le garde des Sceaux, ministre de la Justice, a présenté en conseil des ministres, le 15 juin 2005, une ordonnance relative à l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie électronique39(*). Cette ordonnance, prise en application de la L.C.E.N., adapte les dispositions du Code civil relatives à la conclusion, la validité ou les effets de certains contrats à l'accomplissement de formalités afin de pouvoir réaliser ces dernières par voie électronique. Ce texte prévoit en outre de procéder sur support électronique à des envois de lettres simples et recommandées, avec ou sans avis de réception, tout en leur attribuant les mêmes effets juridiques qu'à celles adressées sur support papier.

L'adoption de ces lois et surtout celle du 13 mars 2000 est donc le témoignage de la concurrence future de l'immatériel sur le support papier et de la conviction que l'utilisation des nouvelles technologies a un sens pour la procédure civile. En effet, il semble qu'offrir un tel cadre légal à ces outils modernes dépasse la simple volonté politique de s'adapter à son temps mais montre l'intérêt de leur maniement pour le droit et la justice. Dès lors, le législateur leur permet de prospérer davantage tout en respectant la sécurité juridique.

Les arguments en faveur de l'introduction des nouvelles technologies pour la procédure civile demeurent fondés au point qu'ils ont été favorablement accueillis par les hommes politiques et le législateur qui tentent progressivement de moderniser notre système judiciaire français en prenant appui sur ces outils. Ces derniers présentent aussi l'intérêt d'être adapté aux exigences Européennes qui régissent notre institution judiciaire.

Le système judiciaire français n'est pas pour autant au commencement de l'ère informatique même si les mentalités semblent l'être globalement. En effet, les échanges et actes dématérialisés sont utilisés par un certain nombre de professionnels du droit. Concernés par leur usage, les professions juridiques et judiciaires peuvent témoigner de l'utilité de l'essor des nouvelles technologies.

Chapitre 2 : L'impact des nouvelles technologies sur le quotidien des professionnels du droit

Les innovations technologiques bouleversent la culture papier comme unique support des relations entre l'usager et les professionnels civils du droit. La volonté d'entrer dans une ère électronique facilitant les échanges et permettant un gain de productivité se concrétise par l'utilisation d'outils régissant d'une part les échanges (Section 1), et d'autre part les actes juridiques (Section 2).

L'utilisation des nouvelles technologies va dématérialiser les échanges entre les acteurs du procès civil et les actes de procédure civile. La dématérialisation a pour objet de gérer de façon totalement électronique des données ou des documents (correspondances, contrats, factures...) qui transitent dans le cadre d'échanges avec des partenaires. Elle constitue donc le remplacement des supports papiers par des fichiers informatiques, entraînant la mise en oeuvre d'un bureau sans papier.

Dès lors, les échanges et les actes de procédure paraissent inséparables puisque le fait de transmettre un acte constitue fondamentalement un échange et un échange se fait généralement par un écrit en procédure civile (acte sous-seing privé ou acte authentique). Il conviendra néanmoins d'étudier ces deux éléments successivement.

Section 1 - L'ouverture des juridictions vers l'extérieur par le développement des échanges dématérialisés

L'informatisation et le recours aux nouvelles technologies constituent un enjeu majeur pour la modernisation de la justice civile. L'exercice des métiers s'en trouve donc nécessairement modifié. Les échanges dématérialisés, c'est-à-dire réalisés par le biais d'un micro-ordinateur, en utilisation progressive, sont des instruments qui participent au décloisonnement entre les services, à l'ouverture des juridictions sur l'extérieur et non à l'isolement des professionnels du droit.

I. Les échanges électroniques entre les tribunaux civils et les justiciables face aux exemplaires juridictions administratives et pénales

A. Vers une généralisation de l'usage des nouvelles technologies dans les juridictions civiles

Entre les tribunaux et les usagers de la justice, les nouvelles technologies se généralisent doucement avec les formulaires en ligne tels la conciliation ou l'aide juridictionnelle, le courrier électronique qui est une utilisation quotidienne et répandue, mais surtout avec les visioconférences.

A l'origine, un procédé appelé « visio-greffe » a été expérimenté au cours de l'année 2000 à Limoges. Cette pratique a été développée par la cour d'appel de Limoges avec le soutien de la Chancellerie. Ce dispositif permet, grâce à un équipement informatique avec mini caméra et scanner, d'établir une liaison informatique entre les greffes des tribunaux environnants et le service unique du greffe de Limoge et d'assurer des échanges de paroles ainsi que la vision de l'image de son interlocuteur. Elle vise alors à permettre aux usagers de la justice, situés dans les communes éloignées du siège du tribunal de grande instance (TGI) d'accomplir des actes de greffe, de recevoir des informations sur l'état d'avancement de leur procédure, de retirer sous le contrôle de fonctionnaire de justice en temps réel, des documents sans avoir à se déplacer au TGI.

Dès lors, l'accomplissement d'actes de procédure s'en trouve facilité dans le cadre d'une procédure écrite sans intervention du Ministère d'avocat. Par exemple, le juge aux affaires familiales peut être saisi en ce qui concerne notamment la contribution aux charges du mariage, l'entretien des enfants majeurs, la révision de la prestation compensatoire, l'exercice de l'autorité parentale, les obligations alimentaires. Le juge de l'exécution peut également être saisi d'une demande de délai en matière d'expulsion locative, d'une demande de suspension de procédures d'exécution en matière de surendettement et certains actes de greffe tels le dépôt de dossier d'aide juridictionnel ou la réception de demandes concernant le tribunal d'Instance de Limoges

Aussi, faute de magistrats en nombre suffisant à Saint-Pierre-et-Miquelon, l'ordonnance n°98-729 du 20 août 1998 et son décret d'application n° 2001-431 du 18 mai 2001 autorisent le magistrat assurant le remplacement à présider une audience tant civile que pénale, depuis le territoire métropolitain grâce à un moyen de télédiffusion. Toutefois, ce recours est limité aux cas de « nécessité absolue », c'est-à-dire lorsque le magistrat n'aura pas la possibilité de se rendre sur place soit dans les délais prescrits par la loi, soit dans les délais exigés par la nature de l'affaire. Le texte réglementaire précise les conditions techniques de mise en oeuvre du recours à la communication audiovisuelle, en prévoyant que l'enregistrement des images ou du son doit assurer une retransmission fidèle, loyale et confidentielle à l'égard des tiers40(*).

Actuellement, peu de tribunaux civils ont adhéré à ces procédés de visioconférences. Même si elle est en voie de s'étendre, l'utilisation des nouvelles technologies dans le droit civil reste timide si l'on ose la comparer aux juridictions pénales et administratives. Il conviendra de faire remarquer néanmoins que la mise en oeuvre d'une chaîne civile à l'image de la chaîne pénale paraît difficile, et ce pour plusieurs raisons.

B. L'intense utilisation des nouvelles technologies par les juridictions pénales et administratives.

Il ne s'agit pas de réaliser ici une étude complète de l'emploi des procédés électroniques dans le procès pénal et administratif qui serait abondante voire prolixe mais simplement, en énonçant les principaux progrès réalisés en ces domaines, de constater que ces juridictions sont des exemples qui peuvent constituer dans la mesure du possible des objectifs à atteindre pour le droit civil.

1. Le maniement abondant des nouvelles technologies dans la chaîne pénale et administrative

D'une part, le constat de notre législation en matière de procédure pénale montre la réelle avancée dans le domaine. En effet, à titre d'exemples, il y a lieu de citer : la loi n°98-1498 du 17 juin 1998 concernant les infractions sexuelles et les droits des victimes prévoyant l'enregistrement par voie audiovisuelle de l'audition du mineur victime (article 706-52 du code de procédure pénale), la loi n°2000-516 du 15 juin 2000 relative à la protection de la présomption d'innocence (entrée en vigueur le 15 juin 2001) qui met en place l'enregistrement des mineurs lors de leur garde à vue, la loi n°2001-1062 du 15 novembre 2001 relatif l'usage de la visioconférence pour les auditions, interrogatoire ou confrontation en cours d'enquête ou d'instruction (article 706-71 du code de procédure pénale), ou encore la loi n°2002-1138 du 9 septembre 2002 qui dans le même article autorise le recours à la visioconférence pour la prolongation de la garde à vue ou la retenue judiciaire lors d'une enquête ou d'une instruction. En outre, 17 formulaires pour les particuliers et 7 pour les professionnels sont mis en ligne à l'initiative du Ministère de la justice, lequel prévoit notamment pour l'année 200541(*) d'informatiser la chaîne pénale dans quatre TGI pilotes, les tableaux de service pour l'administration pénitentiaire.

D'autre part, en matière administrative, le Conseil d'Etat a, le 28 décembre 2001 admi que tout citoyen pouvait recourir au courrier électronique42(*) (en l'espèce une requête contentieuse) pour saisir la juridiction administrative alors que la Cour de cassation refuse de reconnaître une quelconque valeur aux conclusions envoyées par télécopie43(*) parce que le dépôt de conclusions doit s'effectuer par remise au secrétariat-greffe et non autrement.

Aussi, dans le cadre du Plan stratégique de l'administration (PSAE), lancé par le secrétaire d'Etat, la juridiction administrative s'est récemment engagée dans la voie de la dématérialisation des échanges avec les usagers et les administrations entraînant inévitablement des économies importantes en raison du caractère écrit de la procédure. Ainsi, a été établi le 10 mars 2005 le décret n°2005-22244(*) qui autorise jusqu'au 31 décembre 2009 l'expérimentation devant les tribunaux administratifs, les cours administratives d'appel et le Conseil d'Etat des modalités d'envoi par voie électronique de requêtes, mémoires, pièces, décisions prises pour l'instruction des affaires et décisions juridictionnelles. Au plus tard au 31 décembre 2009, un rapport dressant le bilan de l'expérimentation sera établi par le vice-président du Conseil d'Etat et remis au Premier ministre.

A son tour, le Code général des Collectivités territoriales goûte aux nouvelles technologies puisqu'il a été modifié par un décret du 7 avril 200545(*) afin de prendre en compte les nouvelles dispositions relatives à la transmission, par voie électronique, des actes de la commune, du département et de la région qui sont soumis au contrôle de légalité (délibérations du Conseil municipal, décisions réglementaires et individuelles prises par le maire dans l'exercice de son pouvoir de police, les permis de construire, etc.). En effet, le nouvel article R. 2131-1 du Code général des Collectivités territoriales prévoit que la commune, lorsqu'elle choisit d'effectuer par voie de transmission électronique de tout ou partie de ces actes, recourt à un dispositif de télétransmission ayant fait l'objet d'une homologation, dont les conditions sont fixées par arrêté ministériel.

2. Les difficultés d'instaurer une chaîne civile à l'image de la chaîne pénale

D'une manière générale, il semble bien que les instances administratives et surtout pénales acceptent plus facilement les nouvelles technologies que les juridictions civiles. Ce décalage ne s'explique pas par un manque d'innovation de ces dernières ou une réticence de leur part. En effet, le passage du civil au pénal méconnaît un certain nombre de réalités irréductibles.

Tout d'abord, les procédures civiles sont sensiblement plus diverses que ne l'est la procédure pénale. Les juridictions, les compétences, les modes de représentation, la place de l'écrit et de l'oral, l'existence ou l'absence de mise en état et bien d'autres facteurs inscrivent des différences profondes dans le déroulement du procès. Si les juridictions civiles veulent installer des procédés techniques pour la gestion des dossiers, il est donc indispensable que ces derniers s'adaptent à chaque caractéristique de la chaîne civile.

De surcroît, la procédure civile est accusatoire, malgré un rôle accru accordé depuis un certain nombre d'années au juge. Les 5 premiers articles du Nouveau Code de procédure civile énoncent clairement que le procès demeure la chose des parties : seules les parties introduisent l'instance, elles ont la liberté d'y mettre fin avant qu'elle ne s'éteigne par l'effet d'un jugement ou en vertu de la loi (article 1er du NCPC), elles conduisent l'instance (article 2 du NCPC), leurs prétentions respectives déterminent l'objet du litige (article 4 du NCPC). Quant au juge, sa fonction est de veiller au bon déroulement de l'instance (article 3 du NCPC) et de se prononcé sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé (article 5 du NCPC). Ainsi, un système informatique appelé à gérer une procédure civile doit, dès l'enrôlement, être adapté aux parties et à leurs avocats et devra mettre en liaison le juge et ces derniers tout au long du procès. Il est donc beaucoup plus difficile de mettre des nouvelles technologies dans le procès civil en raison de la pluralité de personnes participant à la procédure que dans le procès pénal où l'accès au fichier semble se limiter à un seul intervenant (le procureur de la république).

Ainsi, l'instauration des nouvelles technologies dans le procès civil ne pourra se faire à l'image de la procédure pénale en raison de l'existence des caractéristiques procédurales diverses en matière civile. Néanmoins, l'avancée timide de la procédure civile comparée à la procédure pénale s'explique par la volonté de respecter ses spécificités.

II. Les échanges dématérialisés entre les tribunaux et les partenaires de la justice

La plus grande implantation de nouvelles technologies existante est celle pour les relations entre les tribunaux et les partenaires de la justice.

A. Entre les cours d'appel et les avoués

Un dispositif de communication électronique est effectif depuis 2003 entre les cours d'appels d'Aix en Provence, Besançon, Bordeaux, Pau et Versailles respectant le droit processuel et les principes dégagés par le droit Européen. Il permet de réduire les délais de transmission des actes, de supprimer les déplacements inutiles et les échanges de courriers superflus et ainsi, d'accélérer le rythme du procès civil. Ainsi, grâce à la mise en place d'un réseau Intranet avec un point d'entrée unique et sécurisé, l'avoué peut adresser au greffe les données relatives à la déclaration d'appel. Le greffier, après avoir vérifié le contenu du message, l'intègre dans la base de données des affaires civiles de la cour. Il adresse ensuite un accusé de réception à l'avoué. Ce moyen peut être utilisé pour toutes les pièces de la procédure.

B. Entre les juridictions civiles et les avocats

Tout d'abord, entre le TGI de Paris et son barreau, un système de communication électronique « E-GREFFE » ouvert depuis le 16 octobre 2003, permet aux avocats de consulter le dossier informatique des affaires qui les concernent, d'échanger électroniquement des documents et données relatives aux affaires civiles traitées par la juridiction et de se faire inscrire aux audiences de référé.

Ensuite, il convient de constater que les initiatives sont prises par les praticiens eux-mêmes. De ce point de vue, la lecture du nouveau règlement intérieur unifié du Conseil national des Barreaux (CNB) montre que la profession d'avocat a d'ores et déjà envisagé les conséquences de l'électronique sur l'exercice de son métier46(*). En effet, l'article 5 dudit règlement fait place à l'électronique dans le débat contradictoire. Après avoir rappelé que « la communication mutuelle et complète des moyens de fait, des éléments de preuve et des moyens de droit doit se faire spontanément en temps utile et par écrit pour permettre dans le respect des droits de la défense, un procès loyal et équitable », l'article 5-1 précise qu'  « un avocat correspond avec un confrère par voie électronique à l'adresse figurant sur les documents professionnels de son correspondant ». Dès lors, l'on apprend simultanément qu'entre avocats, le contradictoire doit déontologiquement être assuré par écrit, même dans les procédures orales, et que la voie électronique est assimilable à un écrit47(*). Ceci est d'autant plus confirmé que l'article 5-5 du règlement admet que « la communication de pièces peut être faite par voie électronique, par la remise de tout support de stockage de données numériques, ou l'envoi d'un courrier électronique, s'il est justifié de sa réception effective par le destinataire ».

Désormais, il reste à savoir quelle serait à propos de cette pratique, la position de la jurisprudence qui en 2002 s'est montré hostile à la notification des conclusions d'appel par télécopie48(*).

L'autonomie de la profession en ce qui concerne l'installation de nouvelles technologies est exemplaire. En effet, depuis de nombreuses années, les avocats se sont intéressés à ces procédés modernes, créant EDIAVOCAT qui avait mis en place le premier Intranet professionnel : AVOCAWEB, puis E-GREFFE. Ces expériences ont abouti à la création d'un rapport d'orientation d'un Intranet national de la profession d'avocat49(*), le 9 janvier 2004. Accueilli favorablement par l'unanimité des membres du C.N.B., ce rapport ouvre des perspectives prospères puisque le C.N.B. entend soumettre à l'avis de la profession les choix qui se présentent à la communauté des avocats pour lui permettre de fédérer les moyens de sa communication électronique. La solution proposée est alors celle de créer un « réseau privé virtuel avocat » incluant une offre de messagerie sécurisée et un Intranet dotant la communauté professionnelle de moyens techniques de connexions avec les partenaires institutionnels publics (greffes des T.G.I. et de T.C., services du cadastre, bureaux des hypothèques, centres de formalités), sans oublier la signature électronique comme acte juridique sécurisé des avocats permettant de venir s'intercaler entre l'acte sous seing privé et l'acte authentique.

Les avocats modernisent leur profession, conscients que l'informatique et l'Internet sont parties intégrantes de leur vie quotidienne et qu'ils ne peuvent qu'être impliqués à terme dans les nouvelles technologies. Le C.N.B. tente donc de promouvoir l'accès d'un maximum, sinon de la totalité des avocats aux procédés électroniques, et ce, en raison de la nécessité d'éviter en ce domaine une sorte de fracture sociale qui serait une fracture technologique.

Si ces projets aboutissent, la profession répondra aux demandes pressantes de ses partenaires qui sont d'établir des liaisons sécurisées garantissant, outre l'intégrité des messages, l'authentification de la qualité d'avocat.

Ces expérimentations ont vocation à être étendue à l'ensemble des juridictions et des barreaux. Elles ouvrent des horizons prospères permettant de répondre aux besoins de ces praticiens et satisferont certainement les attentes des justiciables.

Les nouvelles technologies dans le procès civil ont permis également la dématérialisation des actes de procédures, ce qui n'est pas une moindre avancée en la matière.

Section 2 - La dématérialisation des actes de procédure

La loi n°2000-230 du 13 mars 2000 et les décrets d'application ont fait entrer la signature électronique dans la législation française. Ils constituent un cadre commun et sont donc applicables en procédure civile. Dès lors, cette réglementation particulière permet aux acteurs du procès de réaliser différents actes, non pas sur support papier, mais sur support électronique. Ces actes de procédure sont par conséquent dits « dématérialisés ».

Il est envisageable de distinguer trois catégories de ces actes passés par voie électronique dont deux feront l'objet d'une étude approfondie. D'une part, certains actes, à priori dématérialisables sont les actes préparatoires passés entre les auxiliaires de justice et leur client mais ils se situent hors de la sphère judiciaire. D'autre part, les actes d'administration judiciaire et les actes du palais constituent des véritables actes de procédure pouvant être dématérialisés (I). Enfin, il y a lieu de s'étendre sur les actes de procédure à caractère authentique qui représentent une vaste catégorie (II).

I. Vers une dématérialisation étendue des actes d'administration judiciaire et actes du palais

A. Les actes relatifs à la mise en état d'une affaire

La mise en état est la phase de la procédure précédant l'audience de plaidoirie. Le juge de la mise en état vérifie que les avocats se sont bien communiqués leurs pièces et leurs conclusions et que l'affaire est en état d'être jugée.

Les décisions concernant la mise en état d'une affaire entrent dans la sphère judiciaire. Elles ne sont pas pour autant des décisions juridictionnelles, n'ont pas de caractère authentique et ne peuvent donner lieu à une voie de recours indépendamment de la décision sur le fond50(*).

Dans la plupart des tribunaux de grande instance, la mise en état actuelle est longue et constitue une perte de temps considérable pour l'avocat. En effet, ce dernier ne reste que quelques minutes à expliquer ses instructions au juge de la mise en état (renvoi de l'affaire, injonction de conclure pour l'adversaire, clôture) qui va sur le champ lui donner sa décision et une date ultérieure. L'avocat doit donc souvent se déplacer au tribunal alors même qu'il n'a qu'une seule affaire pendante.

Néanmoins, pour certaines affaires qui ne présentent pas de difficultés procédurales, les cabinets d'avocats préparent souvent la mise en état par téléphone ou par voie de télécopie et n'ont donc pas besoin de se déplacer au tribunal. Par exemple, il arrive que l'affaire ne puisse faire l'objet que d'un renvoi puisque la partie adverse n'a pas signifié ses écritures. Dans ce cas, l'avocat demandeur à l'instance va écrire à la suite du bulletin ses intentions comme tel « Je demande le renvoi de cette affaire faute pour l'adversaire d'avoir signifié ses conclusions en réponse (...) ». Le bulletin va ensuite être envoyé par voie de télécopie à l'avocat adverse et au tribunal trois jours au moins avant la date de l'audience afin que ces derniers soient prévenus de ses instructions. Le juge de la mise en l'état peut donc, sans la présence physique des avocats établir une date de renvoi. Cette hypothèse n'est cependant pas si fréquente puisque souvent les affaires présentent de réels obstacles de procédure qui nécessitent une communication rapide et instantanée, un dialogue rapide entre les acteurs du procès civil.

Employer les nouvelles technologies dans cette phase purement procédurale du procès civil semblerait sauvegarder le contradictoire grâce à un accès à l'information immédiate de l'évolution du dossier et la transparence et la sécurité juridique dans les communications transmises paraissent garanties.

Cette idée d'utiliser des moyens techniques modernes pour cette phase préalable à la plaidoirie a déjà été prise en compte puisque le TGI de Paris se sert, à titre expérimental, d'une mise en état par voie électronique par le biais du réseau virtuel privé, un Intranet nommé « E-GREFFE ». Ce dispositif permet donc le traitement de la procédure de la mise en état électronique pour la 4ème et la 5ème Chambre du TGI (1° et 2° section). L'accès aux données et l'échange d'informations par Internet permettent d'alléger les tâches administratives des cabinets et d'éviter des déplacements.

Le traitement de la procédure de la mise en état électronique devrait se développer au fur et à mesure à chacune des sections des Chambres Civiles du TGI de Paris. E-GREFFE s'est d'ailleurs étendu puisque la mise en état électronique au service des Juges aux Affaires Familiales est opérationnelle depuis le 1er Avril 200551(*).

Le bilan de cette expérimentation s'avère donc positif puisque son extension est en train de se réaliser. La dématérialisation des actes de la mise en l'état pourrait probablement gagner l'ensemble des juridictions civiles françaises permettant un gain de temps pour les avocats, greffiers et magistrats.

B. Les actes de palais établis entre les partenaires du procès civil

Les actes de palais constituent des significations entre professionnels dont dépend l'exercice d'un droit procédural. Il sont échangés entre les seuls avocats et avoués et cet échange est opposable aux parties bien qu'elles ne soient pas directement destinataires.

Ces actes pourraient être dématérialisés si les conditions techniques étaient satisfaites pour garantir de l'identification de leur auteur et leur authenticité. Légalement en tout cas, ce processus de dématérialisation est envisageable puisque la loi du 13 mars 2000 et Décret du 30 mars 2001 précisent les conditions à réunir pour qu'un acte puisse s'effectuer de manière fiable par voie électronique. Il faut en effet s'assurer que le message électronique émane réellement de celui auquel on l'impute et garantir l'intégrité de l'acte.

Cette technique éviterait des déplacements inutiles étant donné que les actes seraient transmis de manière instantanée assurant la confidentialité et le respect des droits de la défense.

Si le support électronique vient à remplacer le support papier, c'est qu'il offre des avantages en terme de productivité et de gestion d'une affaire. Et ce n'est pas parce que le texte n'est plus inscrit sur du papier mais sur un écran, après sa transmission également dématérialisée, qu'il perd pour autant sa qualité d'écrit.

Dès lors, tout comme l'acte sous-seing privé, l'acte authentique peut être dématérialisé.

II. L'acte authentique adapté aux nouvelles technologies

L'acte authentique est aux termes de l'article 1317 alinéa 1er du Code civil « celui qui a été reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises ». Modèle historique de la force symbolique du papier, de la plume, de l'archivage, de l'autorité, il est aujourd'hui toujours efficace, quoique concurrencé par la révolution de l'immatériel. Il n'est dès lors guère étonnant que la loi n°2000-230 du 13 mars 2000 sur la preuve électronique ait également eu à identifier l'acte authentique électronique. En effet, en adoptant cette loi, le législateur a consacré la notion d'acte authentique établi sur support électronique. L'ajout d'un alinéa 2 à l'article 1317 du Code civil a donc permis à l'acte authentique d' « être dressé sur support électronique s'il est établi et conservé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ». Le pouvoir réglementaire a donc la charge d'organiser les modalités de mise en oeuvre de la réception d'un acte établi sur support électronique.

Afin de comprendre cette législation et les multiples discussions qui en découlent, il convient d'abord de s'interroger sur ce qu'est un acte authentique.

A. Précisions sur la notion d'acte authentique

L'acte authentique, témoignage d'un officier public, se définit comme un acte instrumentaire (instrumentum), comme un écrit qui constate un acte juridique (negocium)52(*). En règle générale, il n'est qu'un instrument de preuve mais il peut également être nécessaire à la formation même d'un contrat devenant ainsi, par dérogation au principe du consensualisme, une condition de forme nécessaire à sa validité.

L'acte authentique est donc dressé par un tiers, notaire ou huissier de justice par exemple contrairement à un acte sous seing-privé qui est établi par les parties elles-mêmes. Ce tiers est un témoin officiel, une personne qui tient de l'Etat la mission de constater une convention ou une situation, de les authentifier. Lorsque l'acte authentique est établit par un notaire, c'est de sa qualité de « témoin privilégié » qu'il tire la double force qui le caractérise : sa force probante et par suite, sa force exécutoire.

S'agissant de sa force probante, l'acte authentique est « supérieur » à un acte sous-seing privé. En effet, aux termes de l'article 1319 du Code civil, « l'acte authentique fait pleine foi de la convention qu'il renferme entre les parties contractantes et leurs héritiers ou ayants cause ». Par conséquent, alors que l'acte sous-seing privé peut être combattu par un autre écrit, un acte authentique ne peut être contredit que par la procédure d'inscription de faux c'est-à-dire jusqu'au succès d'un procès parvenant à établir que l'officier public a menti ou a commis un faux53(*). Cette résistance à la preuve contraire s'explique par le fait que l'acte authentique porte le témoignage de l'officier public ou ministériel et non un témoignage ordinaire qui pourrait être détruit par tous les modes de preuve. Les actes dont les constatations sont faites au nom de l'Etat et qui détiennent donc le sceau, doivent alors être crus sur parole.

Quant à la force exécutoire qui existe essentiellement pour les actes notariés, elle s'explique par sa force probante. C'est parce que l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux de son origine, de son contenu et de sa date, qu'il a force exécutoire. En effet, l'obligation qu'il constate est tenue pour certaine, ce qui entraîne que l'exécution peut être immédiate. Inversement, l'acte sous seing privé n'offre pas cette certitude puisqu'il ne fait pas foi dès son origine, les signatures qu'il porte pouvant être déniées et la preuve contraire à son contenu pouvant être rapportée plus facilement. Pour ces derniers, il faut donc vérifier l'existence de l'obligation avant de passer à l'exécution.

Par conséquent, l'idée de dématérialiser l'acte authentique engendre des questions importantes étant donné que ce dernier a des caractéristiques précises qu'il convient de sauvegarder. Le passage de l'acte authentique traditionnel à l'acte authentique électronique doit donc se faire avec prudence, ce qui a bien été assimilé par le législateur qui a décidé de soumettre sa mise en oeuvre par un décret en Conseil d'Etat.

B. L'adaptation de l'acte authentique sur support électronique

La réflexion sur le concept d'acte authentique établi sur support électronique est dense. La majorité de la doctrine et de la pratique s'accordent sur la réflexion du Professeur Catala : « L'authenticité ne peut se passer de cette comparution physique du contractant par devant le témoin privilégié habile à recevoir l'acte. Ce point central étant tenu pour essentiel, c'est autour de lui qu'il faut inventer les adaptations possibles des formes actuelles aux technologies futures »54(*). Ainsi, beaucoup d'interrogations subsistent relatives à l'élaboration, la rédaction et la transmission d'un acte authentique électronique.

1. L'authenticité des actes électroniques par les notaires

S'agissant des actes authentiques notariés, la forme électronique ne saurait dispenser de la nécessité pour chaque partie d'exprimer son consentement devant le notaire. Si l'acte est fait à distance, il suppose le concours de deux notaires qui, chacun situé au lieu où se trouve l'une des parties, recueillent leur consentement.

Il convient donc d'écarter deux thèses. D'une part, il paraît délicat d'envisager qu'un acte authentique à distance soit réalisé par un seul et même notaire qui devra recueillir le consentement puisque l'unicité instrumentaire n'implique pas l'unicité de notaire. D'autre part, l'acte authentique à distance dans lequel le notaire recueille les consentements des parties en dialoguant avec elles ne peut pas être admis. En effet, comment vérifier la qualité du consentement du contractant invisible et que son engagement soit libre et éclairé ? L'appréciation du sérieux du consentement ne peut donc se faire qu'avec la seule présence physique d'un témoin officiel.

Dès lors, concrètement, le déroulement de la passation d'un acte authentique55(*) pourra se faire comme tel dans l'hypothèse où les parties sont éloignées l'une de l'autre. Deux notaires, l'un instrumentaire et l'autre distant, vont se connecter sur leur réseau intranet sécurisé R.E.A.L. Un logiciel approprié leur permettra de travailler ensemble, simultanément sur l'acte dont le texte s'affiche à l'identique sur leur écran d'ordinateur. L'accord une fois réalisé sur un texte, chacune des parties y apposera sa signature électronique en présence de son notaire qui recevra ainsi son consentement. Puis, chacun des notaires y apposera la sienne : d'abord, le notaire distant, puis le notaire instrumentaire dont la signature rendra l'acte authentique selon les termes de l'article 1316-4 du Code civil. Ainsi, l'acte est définitif, comme il le serait s'il avait été dressé sur support papier.

Par conséquent, cette procédure ne remet donc nullement en cause l'authenticité traditionnelle liée à la présence physique de chacune des parties devant le notaire. Néanmoins, il semble qu'une question reste en suspend : lequel des notaires peut être poursuivi pour inscription de faux ? Tout dépend de la nature du faux allégué, matériel ou intellectuel mais devant la difficulté de prouver l'altération frauduleuse de la vérité, l'ensemble des notaires ayant concouru à l'authentification de l'acte sera à l'évidence inquiété jusqu'à ce que l'instruction révèle l'auteur de l'éventuelle infraction. Ce point reste ambigu et mériterai d'être réglé soigneusement par le pouvoir réglementaire.

2. Les actes authentiques électroniques des huissiers de justice

Concernant l'utilisation de l'acte authentique électronique par les huissiers de justice, les praticiens se sont interrogés sur les conditions pratiques de l'équivalence des écrits papiers et électroniques. Réunis en groupe de travail, plusieurs huissiers de justice ont formulés des propositions à partir de l'analyse des textes de base régissant la profession56(*), du nouveau code de procédure civile et du Code général des impôts.

L'adoption d'un acte authentique électronique semble envisagé comme une hypothèse particulière. Le principe de l'écrit sur support papier ne paraît donc pas remis en cause. En effet, le projet de modification de l'article 648 du NCPC envisage d'ajouter une nouvelle mention obligatoire «  Si l'acte est rédigé sur support électronique (...), [il doit contenir] la mention qu'il a été dressé sous forme électronique ». Par ailleurs, l'exigence classique d'une signature manuscrite ne paraît pas poser de problème particulier. Les huissiers de justice semblent admettre facilement l'idée d'une signature électronique sécurisée en proposant la création d'un nouvel article 654-1 du NCPC dont l'alinéa 2 prévoirait que « l'huissier de justice utilise un procédé de signature électronique sécurisée (...) permettant un traitement de l'information conformément aux prescriptions ».

Les propositions relatives à la signification électronique sont plus intéressantes. En effet, la proposition des huissiers de modification de l'article 648 n'envisage pas une signification électronique puisqu'il semble que l'utilisation d'une messagerie électronique ne permette pas cependant de s'assurer de l'identité de la personne qui reçoit l'acte. La signification à personne par cette voie électronique paraît donc impossible de ce fait puisque ce qui donne à l'acte son authenticité, c'est justement le fait qu'il soit remis personnellement par un officier public. Sans intervention physique de l'huissier, l'acte perdrait toute sa force57(*).

Ces réflexions témoignent de l'ampleur de la tâche relative à l'élaboration du décret en Conseil d'Etat qui va permettre de mettre en oeuvre les actes authentiques électroniques. Il aurait été possible de penser qu'avec la LCEN la quasi-totalité des formalités requises à titre de validité de l'acte puisse être accomplie par voie électronique étant donné que l'article 1108-1 du Code civil autorise l'écrit électronique à titre de validité de l'acte. Néanmoins, adopter cette idée pour les actes authentiques reviendrait à leur faire perdre leurs caractéristiques fondamentales qui font leur force juridique. L'identification des parties et l'authentification des témoins officiels doivent en effet être garantis.

L'utilisation des nouvelles technologies dans la procédure civile doit donc se faire de manière sécurisée. En effet, même si elles présentent l'avantage de la rapidité et de l'efficacité, il faut se demander si elles livrent les mêmes garanties en termes de confidentialité et de respect du secret professionnel que lorsque les actes de procédures sont accomplis par des déplacements physiques des praticiens. La dématérialisation des procédures, si elle se traduit par un gain de temps pour les avocats, ne doit donc pas sacrifier la sécurité des échanges et la confidentialité des documents.

Ainsi, pour que ces dernières puissent s'appliquer dans notre système juridique, la mise en place d'une méthode de sécurisation des échanges dématérialisés de messages et de documents utilisés par les praticiens du droit comme par les usagers est indispensable. La puissance des réseaux tout en assurant une confiance dans la transmission des données semble se faire depuis peu de temps par le mécanisme de la certification électronique.

A l'heure actuelle, il a déjà été envisagé de faire appel à des organismes de certification pour la délivrance de certificats électroniques qui vont garantir l'identification et l'authentification des professions judiciaires amenées à utiliser des actes authentiques électroniques.

Les notaires ont d'ailleurs compris le débat sur la sécurité des transmissions des actes et aujourd'hui, avec leur structure nationale ADSN, Association pour le Développement du Service notarial, ils ont mis en place le réseau Intranet notarial qui compte plus de 5500 abonnés, une architecture de certification avec la mise en place de la carte « REAL Plus » qui gère les certificats électroniques leur permettant l'accès à certains fichiers, à commencer par la Conservations des hypothèques.

Maintenant que l'on connaît les facteurs favorables à l'instauration des nouvelles technologies dans la procédure civile, il faut passer à l'étude des procédures de sécurisation de l'échange de documents qui s'opère par le biais de la certification.

Chapitre 3 : La sauvegarde de la sécurité juridique par la certification

Garantir la sécurité juridique est essentiel pour permettre une bonne administration de la justice. Ainsi, si l'électronique entre dans la sphère judiciaire et permet aux acteurs du procès civil d'échanger des documents par Internet, il convient de mettre en place un système mettant en oeuvre une dématérialisation des données en toute sécurité. Les justiciables doivent être rassurés par ces nouveaux moyens procéduraux et les principes directeurs du procès civil doivent être respectés.

La certification est un mécanisme novateur permettant de répondre à ces exigences de confidentialité, d'identification et d'authentification. Créée en France en application de la Directive Européenne du 12 décembre 1999 sur la signature électronique, la certification a été adoptée et définie par les décrets d'application de la loi du 13 mars 2000. Elle offre aux acteurs du procès ainsi qu'aux justiciables une confiance dans l'échange des données dématérialisées par l'emploi de certificats électroniques délivrés par une autorité de certification utilisant des techniques cryptographiques.

Le service E-GREFFE, réseau virtuel existant au tribunal de grande instance de Paris permettant la liaison entre ce dernier et les avocats de son barreau, a été le premier à utiliser cette méthode de la certification. Les développements qui suivront s'appuieront alors en majorité sur cet exemple.

Afin de comprendre les enjeux de la certification pour les échanges dématérialisés (section 2), il convient d'abord de s'intéresser au fonctionnement technique de la certification (section 1).

Section 1 - La certification, un outil de confiance

La certification tend à respecter la confidentialité et l'authenticité des données transmises par les professions juridiques et judiciaires (I).En effet, le décret du 18 avril 2002 relatif à l'évaluation et à la certification de la sécurité offerte par les produits et les systèmes des technologies de l'information énonce dans son articler 1er que « la sécurité offerte par des produits ou des systèmes des technologies de l'information, au regard notamment de leur aptitude à assurer la disponibilité, l'intégrité ou la confidentialité de l'information traitée face aux menaces dues en particulier à la malveillance peut être certifiée(...) ». Dès lors, des certificats électroniques sont utilisés en vu de protéger les échanges dématérialisés (II).

I. Des exigences de confidentialité et d'authentification respectées

Le maniement d'Internet peut s'avérer périlleux pour les avocats et des autres professions judiciaires. En effet, leurs règles déontologiques sont incompatibles avec l'insécurité pouvant régner sur le Web (A). La loi du 13 mars 2000 et ses décrets d'application ont choisi un procédé pour garantir ces normes : la cryptographie (B).

A. Un conflit entre le besoin de sécurité juridique et les risques du Web

Le réseau Internet est un espace ouvert où chacun peut naviguer sans s'identifier. Ainsi, si les professions juridiques sont amenées à échanger par Internet des documents ou des actes de procédure contenant des informations personnelles, privées et donc couvertes par le secret professionnel, il est indispensable que cela s'effectue de manière sécurisée. L'espace de communication entre ces acteurs doit donc garantir ces aspects fondamentaux de bonne organisation de la justice.

Les transmissions de messages et documents doivent alors se défendre contre le vol d'information et s'assurer de l'intégrité des documents. Mais il faut également sécuriser les systèmes informatiques, c'est-à-dire protéger l'espace virtuel contre les vols de mots de passe, les intrusions dans les systèmes et les virus. En effet, les problèmes techniques et juridiques rencontrés avant la mise en oeuvre du service E-GREFFE58(*) représentent des difficultés générales dont il convient de faire face pour que les acteurs du procès civil puissent avoir confiance en l'utilisation des nouvelles technologies.

D'abord, les transmissions doivent être fiables. Il y a lieu de respecter des exigences d'identité du message envoyé au message reçu et la confidentialité des échanges de documents et correspondances doit être assurée. Le service oeuvrant à la dématérialisation des procédures doit donc assurer la certification des messages et documents, en garantir l'intégrité et le respect du secret professionnel. Par exemple, lorsqu'un avocat envoie une demande de référé aux services du greffe du TGI de son ressort, il ne faut pas qu'un tiers puisse lire la communication et puisse en modifier le contenu. En effet, cette modification pourrait être préjudiciable aussi bien pour le tribunal que pour l'avocat et le client dans le cas où le message n'aurait pas été régulièrement reçu au tribunal.

De la même manière, lors de la communication avec les services d'un tribunal par courriel, il serait malvenu qu'un tiers puisse avoir accès à celui-ci et en altère le contenu.

Ensuite, cette architecture de certification doit faire face à des problèmes d'identification et d'authentification des utilisateurs. Ces derniers doivent être reconnus avec certitude et les partenaires destinataires doivent bien être ceux qu'ils prétendent être. L'enjeu est important puisqu'il a pour objet la non répudiation des messages : l'utilisateur ne doit pas pouvoir nier qu'il a envoyé une communication ou en avoir reçue une. Dès lors, l'identification et l'authentification lors de la connexion sur le réseau doivent être certaines.

En outre, la vie privée des clients doit être respectée. Dans certains cas en effet, les communications effectuées pourront contenir des informations personnelles sur des clients telles que leur nom, adresse, situation patrimoniale... Le fait qu'un tiers puisse avoir accès à ces éléments serait contraire au respect de la vie privée des clients.

Par conséquent, afin de faire face à ces diverses difficultés, le législateur a prévu de faire appel à une technique de sécurisation des échanges de données sur Internet : la cryptographie.

B. La cryptographie, le fondement de la sécurité des échanges dématérialisés

La cryptographie est la discipline incluant les principes, les moyens et les méthodes de transformation des données, dans le but de masquer leur contenu, empêcher leur modification ou leur utilisation illégale, ainsi que les opérations inverses, pour rendre le document à nouveau intelligible59(*). Un moyen de cryptologie est défini comme tout matériel ou logiciel conçu ou modifié pour transformer des données, qu'il s'agisse d'informations ou de signaux, à l'aide de conventions secrètes ou pour réaliser l'opération inverse avec ou sans convention secrète. Ces moyens de cryptologie ont principalement pour objet de garantir la sécurité du stockage ou de la transmission de données, en permettant d'assurer leur confidentialité, leur authentification ou le contrôle de leur intégrité60(*).

La cryptographie repose sur l'utilisation de « clés » servant à chiffrer les parties les plus sensibles de la communication dématérialisée. Les documents signés sur support cryptographique sont opposables au tiers en vertu de la loi du 13 mars 2000 et de ses décrets d'application.

En pratique, une donnée transmise est scellée par le calcul d'une empreinte électronique afin d'empêcher toute modification non autorisée. Cette empreinte est la représentation réduite et de taille fixe du message ou du document dématérialisé. Elle est construite par l'application d'un calcul sur le contenu du message de sorte que toute modification donne lieu à une empreinte différente. Ainsi, la comparaison entre l'empreinte calculée et l'empreinte recalculée à la réception du message ou du document permet de détecter les éventuelles modifications et falsifications.

Deux types de cryptographie sont généralement utilisés: la cryptographie à clé secrète ou clé symétrique d'une part et la cryptographie à clé publique et privée ou clé asymétrique d'autre part, qui est la méthode la plus utilisée pour transmettre et échanger des données dématérialisées de façon sécurisée.

Dans le premier cas, les utilisateurs partagent une même clé qui servira à l'émetteur pour crypter le message et au récepteur de le décrypter. Le problème de cette méthode est qu'il faut trouver le moyen de transmettre de manière sécurisée la clé à son correspondant. Parce que faute de trouver une solution satisfaisante à cette difficulté, ce procédé n'est pas utilisé.

Dans le second cas, chacun des interlocuteurs détient sa propre clé : chacune des parties engagées dans une transaction est muni de ces deux clés. La clé privée est totalement secrète et ne doit en aucun cas être communiquée ; elle est conservée dans une zone inviolable du disque dur de l'ordinateur ou bien sur une « clé USB » une « carte à puce ». Quant à la clé publique, celle-ci est accessible à tous et est transmise à tous les intervenants sans restriction.

La connaissance d'une des deux clés ne permet pas de déterminer l'autre. Un message crypté avec une clé publique ne peut être découvert qu'avec la clé privée correspondante et inversement une communication cryptée avec une clé privée ne peut être lue qu'avec la clé publique.

Ces clés ne peuvent donc être dissociées. Une autorité est chargée de leur distribution, de leur conservation et de leur remplacement. Il s'agit du gestionnaire des clés61(*) qui est un tiers de confiance.

Dès lors, cette technique garantit le respect de la confidentialité des échanges de documents et des correspondances tout en assurant l'identification et l'authentification des utilisateurs. En définitive, ces clés font office de signature électronique et donnent la certitude de l'identité de l'émetteur puisque la clé privée sert à crypter le message et la clé publique à le décrypter.

Les insécurités du web sont atténuées et les exigences inhérentes à la déontologie des professions juridiques et judiciaires ainsi que le respect de la vie privée de l'individu paraissent sauvegardés.

La cryptographie est donc bien le fondement de la sécurisation des échanges. Elle s'opère par l'utilisation de certificats électroniques permettant d'échanger des documents authentifiés et certifiés sur Internet.

II. Le certificat électronique, l'outil de la dématérialisation des échanges

Le certificat numérique est une véritable carte d'identité électronique qui permet aux utilisateurs de s'identifier sur Internet ou sur un réseau privé afin de pouvoir transmettre des données et assurant la confidentialité des échanges.

Le décret du 30 avril 2001 pris pour l'application de l'article 1316-4 du code civil et relatif à la signature électronique définit le certificat électronique comme un document sous forme électronique attestant du lien entre les données de vérification de signature électronique et un signataire. Il a donc pour fonction de sauvegarder l'intégrité d'une signature électronique.

Le certificat électronique doit, pour être intègre, être délivré par une société qui détient une autorité afin qu'elle puisse contrôler ce système. Actuellement, CertEUROPE met en place des autorités de certification en France sur le marché de la dématérialisation. Il convient donc d'abord de se pencher davantage sur le fonctionnement et l'intérêt du mécanisme du certificat numérique (A) afin d'étudier ensuite le rôle de l'autorité de certification (B).

A. Une identification électronique garantie

La certification repose sur l'émission de certificats électroniques permettant une navigation sécurisée sur le web puisqu'ils garantissent l'authentification de l'utilisateur. Les concepteurs d'E-GREFFE ont d'ailleurs fait appel à ce système d'échange. Il s'agit là d'un exemple qui a vocation a montrer les intérêts d'un tel outil.

1. Un support sécurisé de la dématérialisation des échanges

Afin qu'une transmission numérique soit sécurisée, le dispositif de certification doit garantir, par des moyens techniques et des procédures appropriées, que les données de création de ne peuvent être établies plus d'une fois et que leur confidentialité est assurée. Aussi, les données ne peuvent être trouvées par déduction et elles doivent protégées contre toute falsification. Les documents dématérialisés doivent donc être protégées de manière satisfaisante par le signataire contre toute utilisation par des tiers. Dès lors, les textes envisagent l'utilisation de certificats électroniques délivrés par une autorité de certification pour que toutes ces exigences soient respectées.

Par le certificat électronique, l'utilisateur d'un réseau permettant d'effectuer des échanges dématérialisés va attester de son identité. Le certificat garanti que tous les adhérents du service sont bien des membres. Il joue donc le rôle de pièce d'identité électronique ou de passeport électronique permettant ainsi d'identifier l'émetteur du message et d'en garantir l'intégrité comme la confidentialité.

Le certificat numérique est composé d'informations personnelles sur le porteur, le tout signé par une autorité de certification. Il est attaché à l'attribution d'une clé qui est un document attestant de la propriété et de la durée de validité de celle-ci.

Le certificat électronique d'authentification utilisée prévus dans les décrets un certificat dit « qualifié », c'est-à-dire que l'utilisateur se sert de la cryptographie asymétrique, par clé privée et publique. Il répond à des règles strictes imposées par le décret du 30 avril 2001. En effet, il doit contenir plusieurs éléments tels que la version, le numéro de série, le nom du porteur, sa clé publique, les dates de validité, le nom de l'émetteur, l'identification de la politique de certification et la signature de l'émetteur.

Cet outil permettant une sécurisation des échanges de documents, assurée par l'utilisation de certificat électronique, a été choisi pour régir les relations dématérialisées entre le Tribunal de Grande Instance de Paris et les avocats de son barreau. 

2. Le fonctionnement du certificat électronique à travers l'exemple d'E-GREFFE

L'accès au service d'E-GREFFE, réseau d'échanges dématérialisés entre le TGI de Paris et les avocats, s'effectue par le biais d'un certificat électronique qui atteste de l'identité et de la qualité de l'avocat utilisateur. Le certificat garantit que tous les adhérents au service sont des membres du Barreau de Paris. L'identité de l'utilisateur, l'intégrité du message et la confidentialité sont assurés grâce à ce procédé.

Les avocats retirent leur certificat auprès de l'Ordre. Ce dernier est crypté par la clé privée de l'entité qui attribue les clés et il est remis pour une durée de 3 ans. En cas de perte, le certificat est révoqué, c'est-à-dire que l'accès est bloqué et l'avocat ne peut plus accéder au réseau sauf s'il se représente au Barreau pour obtenir une nouvelle clé.

La clé est donc le support matériel de la certification qui sert à authentifier l'avocat utilisateur. Il s'agit d'une clé USB ayant beaucoup de mémoire afin d'assurer une sécurité des échanges élevée. Néanmoins, une clé ne peut fonctionner sans un code d'activation. Concrètement, pour se connecter sur le site de l'Ordre, l'avocat va entrer son code et présenter son certificat. Ainsi, la session s'ouvre entre le greffe et le poste de l'avocat.

La navigation sur le service semble alors sécurisée puisqu'un support matériel sert à identifier et à authentifier l'utilisateur. Le mécanisme du certificat électronique paraît être une avancée technologique importante permettant de procéder à des échanges de documents dématérialisés tout en respectant la sécurité juridique.

Reste que l'utilisation actuelle de ce certificat devra pour s'étendre faire ses preuves à l'égard des professionnels du droit encore méfiants quant à l'utilisation de nouvelles technologies pour l'accomplissement des actes juridiques. La présomption de fiabilité du procédé, soumise à des conditions qui seront fixées par décret en Conseil d'Etat, est posée en faveur des personnes qui auront recours soit aux services d'un tiers ayant fait l'objet d'une accréditation volontaire (une autorité de certification), soit à des produits correspondants à des normes mentionnées dans une liste publiée au Journal Officiel de la Communauté Européenne. Néanmoins, l'intervention d'un tiers contrôlant le certificat électronique et ayant une autorité d'enregistrement semble nécessaire pour la sécurité et la confiance des échanges électronique.

B. L'autorité de certification indispensable à la sécurisation des échanges

Afin que les échanges dématérialisés puissent se réaliser de manière sécurisée et que la preuve de ces échanges soit sauvegardée, un tiers indépendant dénommé autorité de certification doit contrôler le tout. En France, déjà quelques autorités de certification sont présentes sur le marché judiciaire.

1. L'intervention d'un tiers certificateur neutre et indépendant

La preuve est un élément déterminant de la reconnaissance d'un droit. En effet, la préconstitution d'une preuve permet d'établir le contenu d'un droit, de prévenir et de régler les contestations ultérieures. Or, les règles de droit français relatives à la preuve et à sa conservation dépendent de nombreux textes et principes généraux au sein desquels l'informatique doit trouver sa place. Les professions réglementées et les professionnels du droit (huissiers de justice, avocats, notaires, greffiers...) sont déjà des spécialistes de la certification reconnus pour leur expérience, leur intégrité, leur indépendance, leur discrétion et leur objectivité. Ainsi, une autorité de certification doit leur permettre de continuer à assumer pleinement leur rôle de caution morale « supérieure ».

L'autorité de certification est donc un élément clé de la confiance dans la dématérialisation des actes et échanges. Elle est un tiers indépendant qui possède un rôle très important dans le système probatoire puisqu'il est chargé de contrôler l'accomplissement des échanges électroniques et d'en conserver la trace. Ce tiers est donc un témoin qui améliore la qualité de la preuve. Il s'insère parfaitement dans la logique d'assurer la sécurisation des transmissions de messages sur les réseaux sans ingérence dans le contenu des échanges, et de fournir des preuves irréfutables qui puissent être acceptées par les parties en cas de litige62(*). C'est ainsi que cette autorité de certification peut notamment proposer différents services de sécurité et de contrôle comme par exemple une non répudiation par l'émetteur et le destinataire des données transmises ou bien un horodatage complet.

Seule l'intervention d'un tiers indépendant permet de renforcer l'efficacité de la preuve. Concrètement, à défaut de relever d'une activité réglementée et d'avoir un statut légal (tel le notaire ou l'huissier de justice), il doit s'agir d'un organisme prestataire dont la neutralité et l'indépendance sont indiscutables.

Le décret du 18 avril 2002 et l'arrêté du 31 mai 2002 organisent le régime de ces autorités de certification. L'obtention d'une autorisation permettant de créer une telle autorité est soumise à un système d'accréditation volontaire. Ce sont le Comité français d'accréditation (COFRAC), association déclarée le 4 mai 1994, ainsi que les organismes d'accréditation signataires de l'accord européen multilatéral pris dans le cadre de la coordination européenne des organismes d'accréditation, qui sont chargés d'accréditer les organismes qui procéderont à l'évaluation des prestataires de services de certification électronique en vue de reconnaître leur qualification (article 1er dudit arrêté). Ces prestataires de services de certification63(*) ou autorités de certification sont des entités ou des personnes physiques ou morales qui délivrent les certificats électroniques et fournissent d'autres services liés aux signatures électroniques. Mais pour être habilitées à émettre des certificats, ces autorités ont l'obligation de remplir les conditions minimales de sécurités étudiées (cryptographie, utilisation de clés publiques et privées, etc.).

Il pèse sur le prestataire des obligations techniques ainsi que des obligations d'information et de conseil. En effet, la protection des données emporte obligation pour les Etats qu'ils s'assurent que les autorités de certifications et les organismes responsables de l'accréditation respectent les exigences figurant dans la Directive du 24 octobre 1995 sur le traitement des données à caractère personnel. Par conséquent, tous les organismes en France doivent déclarer à la C.N.I.L. les données nominatives de leurs abonnées. En cas de préjudice, l'autorité est responsable de l'exactitude des informations qu'elle inscrit dans les certificats au moment de leur date de délivrance, du lien entre le signataire et une clé, et si elle omet d'enregistrer ou de publier la révocation d'un certificat sur ses lignes accessibles en ligne. Il est également prévu une simple présomption de responsabilité qui peut donc être écartée en cas d'absence de faute prouvée. Néanmoins, on peut penser que la preuve négative ne sera pas facile à établir étant donné que l'autorité de certification bénéficiera d'une accréditation. Aussi, l'autorité devra se protéger en insérant des clauses élusives ou limitatives de responsabilités prévoyant les limites de l'utilisation du certificat, ce de façon à éviter tout risque de confusion. Il est donc possible qu'à l'avenir nos juridictions viennent à se prononcer sur un tel contentieux.

2. Les exemples prometteurs d'autorités de certification

Certeurope est une entreprise française qui conçoit et met en oeuvre des autorités de certification qui exécutent ce mécanisme auprès d'entreprises comme de professionnels du droit tels que le GIE Infogreffe, l'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, l'Ordre des avocats à la Cour d'Appel de Paris ou encore à la Chambre Nationale des Huissiers de Justice.

Il convient de se pencher sur l'exemple d'Infogreffe afin de comprendre les intérêts d'une dématérialisation des échanges pour les professions judiciaires. Infogreffe est une autorité de certification qui distribue sont propre certificat électronique d'authentification et de signature nommé « certigreffe ». Ce certificat électronique va permettre, dès que les textes juridiques le permettront, d'effectuer directement en ligne diverses formalités telles que des injonctions de payer, inscriptions de crédit-bail, immatriculations de sociétés, modifications. Ces formalités sont à destination des Greffes des Tribunaux de Commerce répartis sur l'ensemble du territoire français. Chacun vont enregistrer et accuser réception de ces dernières de manières dématérialisées, sous le contrôle de l'autorité de certification.

Pour Monsieur Jacques Doucède64(*), il s'agit d'un projet d'envergure et éminemment moderne. Il déclare que l'autorité de certification d'Infogreffe permet à la profession de greffier du Tribunal de Commerce de poursuivre son évolution technique de façon décisive et que les greffiers vont dès lors améliorer plus encore la qualité de leurs services à l'égard des entreprises.

Ainsi, cet exemple paraît prometteur. On peut concevoir le gain de temps que peut procurer une telle installation technique pour les professions juridiques. Néanmoins, sans respect de la sécurité juridique, aucun acte dématérialisé ne peut être envisagé. En effet, l'intérêt n'est pas d'avancer dans l'ère numérique au mépris des garanties fondamentales d'une bonne justice mais bien de mettre en place un système de dématérialisation des communications prenant en compte les obligations de sécurité, de confidentialité et de preuve avec d'autant plus d'intérêt que ces obligations sont des éléments essentiels du fonctionnement et de l'acceptation juridique. La sécurisation des échanges dématérialisés est donc une exigence indispensable à la viabilité d'un service virtuel permettant un dialogue entre le justiciable et les professionnels du droit ou entre ces derniers entre eux. Mais dès l'instant où cette exigence sera satisfaite d'une part par la publication du décret du Conseil d'Etat relatif aux actes dématérialisés et d'autre part, par l'utilisation de la certification, contrôlée par un tiers indépendant, cela pourra ouvrir la voie à l'extension des transmissions par Internet et peut être même au développement d'une justice en ligne.

Le contexte paraît actuellement favorable à la dématérialisation de documents comme le montre la naissance de plusieurs organismes de certification auprès des juridictions civiles ou commerciales tels que E-Greffe au tribunal de Grande Instance de Paris ou Infogreffe utilisé prochainement dans tous les tribunaux de commerce dès que ledit décret en Conseil d'Etat pris pour application de la loi du 13 mars 2000 sera publié. Il est donc possible qu'en raison des garanties procédurales qu'elle offre aux utilisateurs, la certification soit un outil qui aura vocation à s'étendre dans le domaine de la procédure civile. Elle referme donc des enjeux importants pour notre système procédural.

Section 2 - Les enjeux de la dématérialisation des échanges

La certification, technique sécurisée permettant l'échange de données dématérialisées, est utilisée comme signature électronique comme le décrit les décrets d'applications de la loi du 13 mars 2000. La signature électronique ne présente pas de spécificité par rapport à un modèle de signature qui ne le serait pas dans la mesure où un seul texte, l'article 1316-4 du Code civil régit la signature de façon générale65(*). La fiabilité du procédé de signature électronique étant présumée, il est nécessaire que ces techniques de vérification existent, telles que précisées par le décret n°2001-272 du 30 mars 2001 qui transpose la directive n°1999/93/CE du 13 décembre 1999. En effet, le décret met en place des «  dispositifs sécurisés de création de signature électronique » (Article 3 et 4) qui supposent eux-mêmes une fiabilité et une confidentialité particulière, des « dispositifs de vérification de signature électronique » (Article 5), des « certificats électroniques qualifiés et des prestataires de service de certification électronique » (Article 6 et suivant).

D'un point de vue pragmatique, la certification présente alors l'intérêt d'adapter le droit de la preuve aux écrits papiers étant donné que l'écrit électronique est admissible comme preuve au même titre que l'écrit papier s'il garanti l'intégrité de son contenu et l'imputabilité de son auteur(I). Il semble dès lors que la création de ce mécanisme de certification permettant l'utilisation de nouvelles technologies dans la procédure n'a pas ignoré le grand principe du droit de la preuve selon lequel nul ne peut se constituer soi-même sa preuve.

Néanmoins, l'adoption de normes ou la création d'outils techniques oeuvrant pour le maniement de nouvelles technologies semblent aller dans une simple logique d'adaptation du droit et de la justice à l'ère du temps. Ainsi, l'exigence de respect de la sécurité juridique n'est-elle pas la motivation principale ? Il convient donc de se demander si la sauvegarde de la sécurité est une telle exigence qu'elle passe au-delà de l'adoption d'un écrit électronique.

I. La portée de l'admission d'une preuve électronique.

En adoptant la loi du 13 mars 2000, le législateur a eu pour ambition d'adapter les règles actuelles du droit de la preuve, s'agissant des actes sous seing-privé notamment, mais également des actes authentiques, aux exigences de la société de l'information, en cours de généralisation. Ainsi, en énonçant que cet écrit a la même valeur probatoire que l'écrit papier, la loi du 13 mars 2000, il aurait pu, à cet égard, ajouter une nouvelle catégorie d'acte, l'acte électronique, que l'on s'accorde à appeler l'écrit électronique ou la preuve électronique. En admettant que la preuve informatique soit sur le même pied d'égalité que le support papier, le législateur a créé une nouvelle organisation probatoire (A) réglant en même temps les conflits de preuve (B).

A. La force probante de l'écrit électronique par la certification

Tous les actes ne valent pas preuves en eux-mêmes En effet, dans un premier temps, avant 1980, la jurisprudence avait refusé de conférer aux photocopies la valeur de preuve aux motifs que seul l'original d'un écrit ou une copie au sens légal du terme peuvent être produits 66(*). Ces obstacles à l'admission des photocopies comme copies et comme commencement de preuve par écrit peuvent s'expliquer par la piètre confiance que l'on peut accorder à ce mode de reproduction, eut égard au risque de montage qu'il permet. Cependant, dans certaines conditions, la jurisprudence a admit qu'une photocopie puisse servir de commencement de preuve par écrit, dès lors que sa conformité avec l'original n'est pas contestée67(*). Dans un second temps, les télécopies ne sont jamais qu'une forme de photocopie, mais celui qui la reçoit n'a, en principe, jamais eu l'original entre les mains, à la différence d'une photocopie. Dès lors, cela permet d'admettre plus aisément la production d'une télécopie par le récepteur, comme commencement de preuve par écrit, mais non par l'émetteur.

Or, la loi du 13 mars 2000 a eu pour principal objectif de transformer les preuves informatiques en preuves de premier rang en admettant que l'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier. La certification, mécanisme légal de dématérialisation des actes a donc un intérêt pour les utilisateurs.

En effet, les garanties du papier sont connues : intégrité, durabilité, possibilité d'apposer une signature sur le même support matériel que le texte de l'engagement, et la certification semble offrir ces exigences.

D'une part, par l'attribution des clés, le fichier dématérialisé ne peut être accessible à un seul partenaire indépendamment de l'autre et n'est qu'à l'aide des deux clés combinées que le document pourra être vérifié ou contesté. Ainsi, le fichier est placé dans un coffre fort virtuel qui ne peut être ouvert qu'avec ces clés.

D'autre part, grâce à la cryptographie, l'acte dématérialisé est insusceptible d'altération autre que destructive.

Enfin, le recours à la tierce certification semble diminuer encore un peu plus les risques d'une fausse attribution et de fraudes. En effet, ce tiers est seul en mesure de disposer des mémoires de masse incorporant l'instrumentum crypté.

Ainsi, en dehors de ce système, il subsisterait toujours une suspicion que la preuve, détenue matériellement par un seul partenaire, ne respecte pas totalement le principe selon lequel on ne peut se préconstituer sa preuve soi-même.

De manière pragmatique, la certification règle les craintes légitimes d'authentification de l'auteur et d'intégrité du contenu en proposant une dématérialisation des actes de procédure sécurisée et légale. L'enjeu paraît donc fondamental puisqu'il semble être un outil conforme au droit de la preuve : les actes dématérialisés ont force probante dès lors que d'un côté l'intégrité de l'écrit est garanti, et que, d'un autre côté, l'imputabilité à son auteur est établie. Néanmoins, le décret en Conseil d'Etat devra définir les bases de cette fiabilité.

Reste le point capital, celui des conflits de preuves.

B. La gestion des conflits de preuve

L'objectif du conflit entre les procédés traditionnels de preuve est en effet d'assurer la primauté de l'écrit. Cependant, dès lors que deux types d'écrits sont reconnus comme ayant une valeur probante identique, il reste à régler la coexistence entre ces deux moyens de preuve. En premier lieu, aucune forme d'écrit ne l'emporte sur l'autre68(*). En second lieu, le conflit ne paraît guère aisé à résoudre par avance, de sorte qu'il vaut mieux s'en tenir à l'écrit le plus vraisemblable, ce que l'article 1316-2 du Code civile prévoit de la façon suivante «  lorsque la loi n'a pas fixé d'autres principes, et à défaut de convention valable entre les parties, le juge règle les conflits de preuve littérale en déterminant par tous moyens le titre le plus vraisemblable, quel qu'en soit le support ». Les parties peuvent donc régler par avance cette question, par convention, pour faire privilégier l'un ou l'autre, par exemple pour privilégier la signature électronique sur la signature manuscrite ou plus ordinairement, pour préférer dans les relations d'affaires, le contenu de courriers électroniques sur les écrits papiers, ou inversement.

L'intérêt majeur de l'assimilation de la preuve informatique à la preuve papier est donc de faire entrer la preuve informatique dans le système probatoire traditionnel sans lui attribuer une place particulière, plus ou moins forte que les autres modes de preuve, en sorte que l'informatique permette de passer les actes les plus simples. Rien n'aurait été plus néfaste à l'unité des règles de la preuve que de dresser l'un contre l'autre deux systèmes probatoires, l'un réputé antique et l'autre moderne. Ce principe d'assimilation entraîne deux corollaires : il faut d'un côté que la preuve informatique donne au moins les mêmes garanties que le papier et que, d'un autre côté, les règles actuelles afférentes à la preuve papier puissent s'appliquer dans leurs moindres prescriptions à la preuve informatique. Et c'est chose faite avec la méthode de la certification qui semble réunir toutes les conditions nécessaires fournissant les mêmes garanties que le papier.

II. L'exigence de sécurité juridique au-delà de l'existence d'un écrit

La Cour de cassation s'était faite l'écho de la loi du 13 mars 2000 avant son entrée en vigueur puisqu'en effet, la chambre commerciale plaçait sur un pied d'égalité un écrit et sa télécopie en affirmant que « l'écrit (...) peut être établi et conservé sur tout support, y compris par télécopie, dès lors que son intégrité et l'imputabilité de son contenu à l'autre désigné ont été vérifiées, ou ne sont pas contestées »69(*). Cette décision s'inscrit donc dans le mouvement qui a permis de remettre en question la suprématie de l'écrit traditionnel. Les professeurs CATALA et GAUTIER observaient alors que ce qui compte ce n'est pas le support physique, ni le mode de communication des volontés70(*), c'est la certitude que l'écrit émane bien de celui auquel il pourrait être opposé, en d'autres termes, que ni son origine ni son contenu n'ont été falsifiés.

Dès lors, l'important réside-t-il dans l'écrit, qu'il soit papier ou électronique ? Il est possible d'en douter. Il semble ainsi que peu importe le support, l'indispensable est que la sécurité règne sur la preuve de la volonté de s'engager sur un contenu indiscutable. Hier, l'écrit et sa signature manuscrite étaient analysés, aujourd'hui l'écrit immatériel et sa signature codée le sont, mais toujours avec les mêmes exigences.

Transition

L'époque moderne amène à changer les habitudes de travail, à se tourner davantage vers les nouvelles technologies qui peuvent, comme nous venons de le voir, apporter un gain de temps et de productivité dans le traitement des litiges civils. À l'heure actuelle, il semble que les mentalités changent : les professionnels du droit utilisent ces techniques électroniques pour la gestion de leur dossier, le gouvernement comme le législateur oeuvrent ensemble pour l'essor des nouvelles technologies.

Il est incontestable que certains éléments techniques sont intrinsèquement liés à la profusion de la technologie informatique dans la procédure civile. En effet, l'informatique implique nécessairement de se doter d'un ordinateur. Mais s'équiper d'un accès à Internet ainsi que de logiciels spécifiques pour certaines professions juridiques paraît tout autant indispensable actuellement. Aussi, afin que la communication entre les acteurs du droit s'effectue de manière confidentielle, des réseaux cryptés doivent être créés permettant la mise en relation des utilisateurs tant pour leur information personnelle que pour l'exercice quotidien de la justice. Enfin, pour garantir la sécurité de l'ensemble, une signature électronique assurant à la fois l'identification de l'utilisateur, l'intégrité du document et la non répudiation de la personne identifiée doit être mise en place. Ces nouvelles technologies ne doivent pas en effet mettre en péril l'ensemble des garanties fondamentales qui forment un équilibre procédural fondamental car sécurisé. L'adhésion complète à ces procédés ne doit pas passer à côté de la sécurité juridique, du respect du contradictoire, du secret professionnel... Mais il semble que la confidentialité indispensable et non assurée par un réseau classique est déjà obtenue par les moyens de la cryptographie.

Néanmoins, l'utilisation des nouvelles technologies dans la procédure civile reste timide face d'une part, au droit administratif et au droit pénal qui ne cessent d'utiliser ces outils dans leur domaine, et d'autre part, aux modes alternatifs à la justice étatique. En effet, il existe également un important mouvement international en faveur de la pratique des résolutions des conflits par voies de l'internet pour les modes alternatifs de règlement des conflits (M.A.R.C.), règlements alternatifs des différents (R.A.D.) ou alternative dispute resolution (A.D.R.).

Cette pratique désigne tous les modes de règlements des litiges qui ont pour trait commun d'être administrés en ligne et de réunir les colitigants par voie électronique. Elle n'est cependant pas dénommée de la même manière par toute la doctrine. En effet, certains la nomment « mode électronique de règlement des litiges » (M.E.R.L.) 71(*), expression naturalisée venant de « ODR » pour Online Dispute Resolution72(*). D'autres auteurs préfèrent la définir comme une nouvelle justice alternative à la justice étatique ou à la justice alternative traditionnelle, dite « cyberjustice »73(*). Cette justice électronique concerne tous les conflits, liés ou non à l'Internet, du moment que la résolution s'opère par le biais de ce réseau. Il s'agit donc d'une justice administrée par l'Internet avec un espace ou un mode de résolution des conflits prévu à cet effet.

Cette réalité n'est pas nouvelle. Très tôt, des projets expérimentaux ont vu le jour, tel le CyberTribunal canadien, l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (O.M.P.I.) qui pratique le règlement en ligne des conflits relatifs aux noms de domaines, par application des règles de l'I.C.A.N.N. ( Internet Corporation for Assigned Names and Numbers). L'American Arbitration Association a également instauré les Supplementary Procedures for Online Arbitration. De même, le Centre de médiation et d'arbitrage de Paris74(*) a mis en place un service de médiation en ligne, tandis que la Chambre de commerce international envisage le développement de l'arbitrage en ligne sur la base du projet Netcase. L'Union Européenne teste également cette cyberjustice expérimentale à travers le projet E.C.O.D.I.R. (Electronic Consumer Dispute Resolution), plate-forme de résolution par Internet des litiges de consommation.

Cette justice alternative utilisant des procédés électroniques englobe en France la médiation électronique ou la négociation automatisée et le contentieux de l'arbitrage. L'arbitrage, en effet, peut être effectué en ligne puisqu'en l'état actuel du droit, la clause compromissoire ou le compromis peuvent être conclus par voie électronique. La refonte de l'article 2061 du Code civil par la loi sur les nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001 a libéré la clause compromissoire pour autoriser son usage entre tous les professionnels. Dans ces conditions, cette clause comme tout le reste de la convention d'arbitrage, même si elle en est autonome juridiquement, a vocation à être dématérialisée puisque l'article 1316-1 du Code civil, issu de la loi du 13 mars 2000 définit bien l'écrit indépendamment de son support autorisant de ce fait d'avoir recours à ce procédé. A l'issue de la procédure arbitrale en ligne, la sentence est alors rendue et notifiée aux parties par voie électronique. Certes, la sentence est soumise à l'exigence d'un écrit et d'une signature dans la plupart des législations, à l'exception du droit suisse et du droit français de l'arbitrage international75(*). Mais l'écrit électronique, assorti d'une signature électronique fiable et conforme à la loi de la procédure arbitrale, permet de remplir cette exigence qu'elle soit formulée ad validitatem ou ad probationem.

Tout comme l'arbitrage, le contrat de transaction76(*) peut être effectué par voie électronique. Même si «  ce contrat doit être rédigé par écrit » comme l'impose l'article 2044 du Code civil, la jurisprudence décide que cet écrit est exigé ad probationem et non ad validitatem. Les contrats de transaction conclus par voie électronique étaient donc valables dès l'entrée en vigueur de la loi du 13 mars 2000, sans attendre l'adoption de la Loi pour la confiance dans l'économie numérique. Ainsi, lorsque les parties tombent d'accord au cours d'une instance arbitrale, ils ont la possibilité de demander à l'arbitre d'enregistrer leur transaction dans une « sentence d'accords-parties » électronique.

En théorie, il est donc possible de présenter au juge un contrat de transaction par voie électronique ou une sentence électronique, sans qu'il remette en cause leur validité. Il semble donc que l'emploi de ces techniques informatiques peut faciliter la conservation, la gestion et l'utilisation des documents soumis aux arbitres par les parties. Les nouvelles technologies abaissent ensuite le coût de l'instance arbitrale, de la médiation ou de la négociation puisque les parties font l'économie des déplacements et des audiences, spécialement en matière internationale. Ces méthodes favorisent un règlement rapide du litige sachant que les communications électroniques sont instantanées et les transmissions sécurisées (par cryptage ou autres procédés). Mais on peut estimer que c'est le recours à ces modes alternatifs à la justice étatique, plus que la dématérialisation de la procédure, qui offre une célérité et une réponse adaptée à ces conflits.

Tout est-il dématérialisé ? Tout doit-il être dématérialisé ? En théorie, il semble que tous les actes peuvent être dématérialisés tels que la production des pièces, le paiement contractuel (transferts de fonds, factures), les correspondances et mises en demeure. Néanmoins, dans certains cas, il est envisageable que l'échange de documents devra se faire physiquement, le support papier restant dès lors une réponse efficace à l'exigence de sécurité juridique. En effet, il faut déterminer selon quelles modalités le juge apposera la formule exécutoire recherchée par la partie qui entend se prévaloir d'un titre électronique (accord transactionnel, sentence arbitrale...). S'agissant du contrat de transaction, s'il a « entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort »77(*), il ne vaut pas pour autant titre exécutoire. C'est le juge qui lui confère force exécutoire. L'article 1441-1 du Nouveau Code de procédure civile autorise ainsi le juge à apposer la formule exécutoire sur le contrat de transaction à la demande de l'une des parties. En pratique, cette apposition s'entend par l'impression d'un tampon sur le support papier du contrat, que l'intéressé pourra ensuite transmettre à l'huissier de justice. La formulation de cet article paraît assez compréhensible pour désigner également la présentation du contrat par voie électronique sur l'écran de l'ordinateur du juge et l'apposition d'un sceau numérique. Néanmoins, il faut observer que le contrat de transaction ainsi revêtu de la formule exécutoire est un acte authentique et que pour déterminer les modalités concrètes d'apposition de cette formule exécutoire électronique, il convient d'attendre le décret d'application de l'article 1317 du Code civil instituant l'acte authentique dressé sur support électronique. A priori, cela suppose qu'il devra exister un réseau de communication sécurisé entre les parties, le juge et les officiers ministériels. Mais le nouvel article 1108-2 du Code civil intégré par la loi pour la confiance dans l'économie numérique semble faire obstacle au titre exécutoire électronique. En effet, l'écrit électronique ne vaudrait pas ad validitatem pour «  les actes soumis à l'autorisation ou homologation de l'autorité judiciaire ». Cette exception légale semble viser l'apposition du titre exécutoire sur le contrat de transaction. La jurisprudence devra donc se prononcer sur ce point. De plus, en ce qui concerne la signification à personne ou à domicile, la dématérialisation de l'acte n'est pas envisagée par les huissiers de justice qui entendent encore utiliser un support papier.

La difficulté est du même ordre en ce qui concerne le dépôt des sentences arbitrales et leur exequatur. En effet, le dépôt de la sentence au greffe est parfois demandé par une partie pour donner une date définitive à la sentence afin d'exercer une pression sur la partie adverse. Comment dès lors, procéder au dépôt de cette sentence électronique au greffe d'une juridiction ? Un système de registre électronique est donc nécessaire, qui permettrait l'archivage des sentences et la signature électronique du juge et du déposant78(*). L'article 1499 du Nouveau code de procédure civile impose à la partie qui sollicite l'exequatur de produire au juge l'original ou une copie authentique de la sentence arbitrale et l'original ou la copie authentique de la convention d'arbitrage. Et après avoir procédé à un examen de cette sentence, le juge appose la formule exécutoire. Ainsi, l'apposition d'un sceau électronique sur cette sentence est également suspendue à la réglementation de l'acte authentique électronique et à la mise en place d'une structure sécurisée de communication.

Les obstacles d'ordres pratiques sont donc importants. Dans l'attente du décret d'application sur les actes authentiques électroniques, l'exequatur par téléchargement n'est pas réalisable. Le support papier reste donc la technique qui prévaut en la matière. D'autres difficultés se présentent lorsqu'on envisage la résolution de conflits par ces modes alternatifs. En effet, il apparaît que l'arbitrage en ligne comme les autres modes alternatifs de règlements des différents semble surtout mis en oeuvre pour les petits et moyens litiges dans lesquels les faits sont simples, les documents courts, les mémoires ramassés. Concrètement, les arbitres et l'adversaire ne peuvent pas se contenter de lire les pièces et écritures sur leur écran et les imprimer79(*). Les dossiers compliqués en effet, comportent des milliers de pièces, centaines de pages de mémoires. Il semble que les arbitres seront submergés et que plutôt que de passer leur temps à ouvrir les fichiers attachés et lancer leurs imprimantes surchargées, il sera beaucoup plus facile d'en revenir aux échanges physiques. Cet aspect n'est pas négligeable. L'internet ne doit pas devenir une source de lenteur alors qu'il est au contraire utilisé pour aller plus vite.

Ces interrogations liées à l'utilisation des nouvelles technologies dans les modes alternatifs de règlement des litiges sont vraisemblablement les mêmes que celles que l'on peut se poser à l'entrée de ces procédés techniques dans la procédure civile. Certaines mises en garde doivent être formulées. Il semble donc que l'ambition de voir l'ère de l'informatique s'introduire dans la procédure civile nécessite au préalable un discernement sur les limites à ne pas franchir afin de ne pas bouleverser l'organisation judicaire et les garanties fondamentales d'une bonne justice. Les nouvelles technologies dans la procédure civile ne doivent donc pas prêcher par excès.

Dès lors, il paraît prudent de considérer les obstacles pratiques dans le but de maîtriser l'utilisation des nouvelles technologies dans le procès civil.

Partie 2 : Le risque d'une dérive vers une justice déshumanisée

Les révolutions des techniques et des mentalités qu'entraînent les nouveaux procédés technologiques inspirent des craintes justifiées, même chez les plus optimistes et les plus promoteurs. C'est certainement en ayant à l'esprit que l'on peut à tout moment s'égarer, que l'on doit avancer prudemment, en profitant des avantages et des améliorations des techniques. En la personne du Sénateur Franck Serusclat, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a réalisé un rapport sur les conséquences des nouvelles technologies pour la vie des hommes, rapport fort éclairant sur ces questions, poursuivi par un colloque au Sénat en 1995. Joël de Rosnay y a notamment exprimé l'idée selon laquelle il fallait s'extraire de cette vision manichéenne de l'outil informatique.

Il est vrai que de nombreux dangers existent, il est aussi vrai que les intérêts sont très grands. Néanmoins, il convient de dépasser cet antagonisme et anticiper ces évolutions en évitant autant que possible les risques décelables (Chapitre 1). Ces risques sont connus et certains d'entre eux concernent directement le rôle du juge. Les nouvelles technologies dans la procédure civile gagnent le délibéré ; la « décision artificielle » déshumanisée est-elle donc à craindre (Chapitre 2) ?

Chapitre 1 : Des obstacles décelables à maîtriser

Si l'avènement des nouvelles technologies prospère jusqu'à une complète dématérialisation des échanges et actes de procédure, ne va-t-il pas mettre en péril les relations humaines présentes dans le procès civil qui sont un équilibre fondamental respectant les principes directeurs du procès et les attentes de l'usager de la justice? La déshumanisation de la justice est-elle un risque qu'il est possible d'éviter ?

Il convient donc de déceler les risques que peuvent engendrer l'utilisation des nouvelles technologies dans le procès civil pour mieux les anticiper. Afin que ces outils modernes offrent aux praticiens du droit ainsi qu'aux justiciables ses prérogatives, un discernement est nécessaire quant aux limites à leur apporter. Certaines d'entre elles sont des difficultés d'ordre technique intrinsèquement liées à la nature des nouvelles technologies (section 2) qui paraissent difficilement contournables sauf avec du temps et de la compréhension. Les autres, attachées à une utilisation trop expansive des nouvelles technologies dans le procès civil sont davantage maîtrisables car c'est en restreignant leur essor dans certains domaines qu'il est possible de les combattre (section 1).

Section 1 - La portée d'une utilisation extensive des nouvelles technologies dans la procédure civile

L'introduction des nouvelles technologies dans le domaine judiciaire soulève des inquiétudes, des interrogations et des difficultés juridiques auxquelles il convient de faire face pour que leur utilisation s'effectue de manière efficace. Notre avancée vers une société intégralement informatisée amène à nous questionner sur les risques majeurs qu'elle est susceptible de créer. En effet, les relations humaines entre les protagonistes du procès méritent d'être sauvegardées (II), sinon, l'égalité entre les justiciables ainsi qu'entre les professionnels du droit sera gravement menacée (I).

I. Dangers et inquiétudes liés à la société du « tout électronique »

Faut-il aller plus loin et admettre que le dialogue entre les partenaires de la justice et les usagers se fasse uniquement par voie électronique ? L'usage de plus en plus fréquent des télé-procédures, des mises en état électronique, des formulaires en ligne, des courriels, les textes récents ouvrant de plus en plus les possibilités de communication par Internet nous y invitent. Toutefois, force est de constater que le droit positif et les moyens techniques actuels ne permettent pas encore de regarder comme indiscutable toute la procédure civile par voie électronique, et cela est plus que préférable. Le risque d'une dérive vers une justice inéquitable est patent (A) et la surconsommation judiciaire menace de s'installer (B) si les nouvelles technologies s'imposent à tous les stades de la procédure civile.

A. Vers la perte de l'égalité entre les justiciables et entre les professionnels du droit

Pour accéder au réseau Internet, l'utilisateur doit posséder un ordinateur, une ligne téléphonique (ou, dans le cas des grandes entreprises qui nécessitent une connexion permanente, une ligne spécialisée), un modem ou une carte réseau, un kit de connexion à l'Internet consistant en un accès à un réseau local relié à Internet ou un abonnement auprès d'un fournisseur d'accès Internet. Par ailleurs, pour « surfer » sur Internet, l'utilisateur doit également disposer d'un logiciel de navigation l'aidant à parcourir les sites du réseau, et éventuellement d'un logiciel de messagerie électronique lui permettant d'envoyer ou de recevoir du courrier électronique. Même si la population française se dote progressivement de tels outils, il reste néanmoins une grande partie qui n'en dispose pas, ce pour des raisons personnelles de préférence ou financières.

Il semble donc que par la mise en place d'un accès à la justice intégralement dématérialisé, le risque le plus important est d'assister à un creusement accru du fossé déjà existant entre deux mondes : ceux qui ont des connaissances en informatique et qui disposent d'une connexion à Internet, et les autres. Cette question touche aussi bien les citoyens et les professions juridiques.

1. Les usagers de la justice inégaux devant l'accès la justice

La séparation entre les personnes connectée et celles non connectées n'est même pas seulement géographique. En effet, à l'intérieur même des pays industrialisés, existent des impossibilités techniques et financières pour acquérir les moyens d'accès à l'informatique. De surcroît, nombreux sont les individus qui ne veulent s'adapter à l'ère moderne en s'équipant d'outils informatiques, qui ne s'y intéressent guère, non pour des raisons budgétaires mais pour des convictions personnelles légitimes. Actuellement, 46,3 % de la population française, soit quelques 24 millions d'individus, disposent d'une connexion à Internet80(*). Même si le nombre de personnes connectées a connu une croissance de 94 % en 2004, la moitié de la population ne dispose pas d'un moyen d'accès au Web et donc à tous les outils mis à la disposition du justiciable sur les sites internet des tribunaux : formulaires en ligne, conciliation électronique, dépôt de requête, etc.

Dès lors, alors que l'on assiste déjà à une mise à l'écart du citoyen non connecté, que risque d'entraîner une propagation des nouvelles technologies à l'ensemble de la procédure civile? La question de l'étendue de ces dernières quant aux conséquences qu'elle pourra avoir pour le droit d'accès à la justice de l'usager doit donc être au coeur des débats.

Il est déjà possible de penser que la société du « tout électronique » risquerait fort de violer l'article 6-1 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen qui dispose que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial (...) ». En effet, le justiciable non connecté sera privé d'effectuer ses démarches : sa cause ne sera donc nullement entendue faute pour lui de posséder les outils informatiques nécessaires pour saisir la justice. Aussi, les avantages procurés par les nouvelles technologies en terme de célérité de la justice donneront lieu à un effet pervers puisqu'au lieu d'être jugé dans un délai raisonnable, l'usager ne le sera aucunement.

L'illégalité entre les justiciables en cas de dématérialisation totale de la procédure civile sera manifeste, ce qui n'est nullement envisageable. Il convient donc fortement de limiter l'essor des nouvelles technologies, faire que la justice ne soit pas uniquement réservée aux citoyens informatisés : l'accès à la justice par des outils numériques doit rester un choix et ne doit pas devenir une nécessité.

Ainsi, la maîtrise de l'étendue des procédés nouveaux à l'égard des justiciables paraît donc indispensable. Cela veut-il dire que l'informatisation intégrale de la procédure entre les professionnels du droit est possible ? Cette question à l'égard des professions juridiques rencontre les mêmes difficultés que celles observées pour les usagers.

2. Le probable déclin des professions juridiques non informatisées

Les partenaires de la justice peuvent se heurter à des obstacles financiers (petites structures dans les campagnes par exemple) ou bien faire le choix de privilégier l'aspect humain plutôt que d'envisager d'avoir des relations avec l'extérieur par le biais de l'informatique. Ainsi, si demain les échanges et actes se feront uniquement par voie électronique, cela contraindra inévitablement toutes les professions juridiques à s'équiper d'outils informatiques et on assistera à une mise à l'écart voire à une ruine des juristes non informatisés, ruine engendrée par un phénomène de société mal maîtrisé. Il convient donc là encore que la réalisation d'échanges et d'actes par voie électronique reste un choix et ne devienne pas une obligation contraignante.

Ce problème majeur de l'atteinte possible à l'égalité entre les justiciables et entre les professionnels du droit en cas d'informatisation intégrale de la procédure civile gouverne l'ensemble de la problématique de notre sujet. Il paraît donc nécessaire de contrôler l'extension des nouvelles technologies afin que celles ci ne rompent pas l'équilibre de la justice.

B. La crainte d'une surconsommation judiciaire

Dématérialiser toutes les phases de la procédure civile ne va-t-il pas faciliter l'accès à la justice, banaliser les communications par Internet au point d'entraîner un engorgement de la juridiction civile ? En effet, le risque d'un accès trop facile aux procédures est de transformer le justiciable en consommateur de justice et la justice en une marchandise. Or, le jugement n'est ni un produit, ni la juridiction un producteur. Recourir à la justice ne saurait donc être assimilé à l'accès à une grande surface81(*).

Ainsi, la généralisation des nouvelles technologies, le principe d'un recours électronique rapide, gratuit et simple fait surgir un nouveau problème de saturation de la juridiction civile. En se rapprochant virtuellement du juge et de la justice, le justiciable internaute pourrait les saisir systématiquement créant une impossibilité pour les professionnels du droit de répondre aux attentes, un épuisement des capacités humaines voire même la mort d'un recours solennel à la justice civile. La dématérialisation complète des actes de procédure tend vers des risques de dénaturation des relations humaines et de la justice elle-même.

Par conséquent, il convient de maîtriser l'utilisation de ces procédés, faire que leur essor ne transforme pas la justice en un marché mais permette un meilleur accès à la justice et donc de déterminer quel recours, quelle procédure pourra être faite par voie électronique.

II. Un risque de dépersonnalisation dans le traitement du dossier

Au-delà de la problématique du risque d'inégalité entre les usagers de la justice et entre les professions juridiques inhérent à l'installation globale des nouvelles technologies dans la procédure, se pose d'autres difficultés : à quel stade est-il envisageable d'avoir recours à ces outils sans que soient altérés la sécurité juridique (A et C) et la qualité des débats (B)?

A. La dématérialisation exclue en matière gracieuse et contentieuse?

Imaginons qu'un justiciable désire faire une injonction de payer à l'encontre de son débiteur. Il fera parvenir par voie électronique une requête mais commettra une erreur quant à la compétence du tribunal. Celui-ci ne comprendra pas que cette juridiction ne le dirige pas vers le tribunal compétent et sans doute, ne continuera pas son initiative. Dans cette hypothèse, il semblerait que la justice ne réponde pas aux attentes de cet usager. Dès lors, quelle solution convient-il d'apporter ? Faut-il envisager un transfert automatique de la requête qui implique une redéfinition de ceux qui traitent la requête car ce n'est plus le requérant qui a la charge de choisir la juridiction mais cette dernière qui, conduite à poser le problème de la compétence, analyse la situation, décide et tire les conséquences en transférant la requête ? Ou bien, faut-il en rester au mécanisme classique en considérant que le constat de l'incompétence résulte en principe d'une décision de justice qui doit être expliquée et doit pouvoir être contestée ?

Il convient donc de déterminer dans quel cas il est justifié de maintenir un circuit judiciaire classique et dans quel cas un traitement automatisé pour le justiciable est préférable.

Dans l'exemple choisi, il paraît possible d'envisager la saisine par voie électronique en raison de la nature du litige : il s'agit d'une procédure gracieuse où les droits de la défense ne sont pas les mêmes que dans une procédure contentieuse.

B. L'altération de la qualité des débats

En plus de la perte des relations humaines et de l'inégalité que pourrait engendrer une justice intégralement informatisée, il semble que dématérialiser l'ensemble d'une procédure contentieuse pourrait mettre en péril la qualité des débats. En effet, s'agissant des litiges de la compétence du Tribunal de Grande Instance, la procédure étant écrite, les parties ont l'obligation de se constituer avocat conformément à l'article 751 du Nouveau Code de procédure civile.

A supposer pour les besoins de notre réflexion qu'un jour l'ensemble de la population française sera informatisée et maîtrisera ces outils, la communication intégrale par voie électronique entre le justiciable et son avocat ne risquera-t-elle pas d'amoindrir la qualité de la défense? La relation entre un client et son avocat est fondée sur la confiance qui nécessite un dialogue étendu. Le danger serait donc que le pouvoir de représentation et de conseil de ce professionnel du droit soient négligés, voire disparaissent.

Aussi, est-il réfléchi d'envisager que la défense se fasse par le biais de seules conclusions électroniques ? Le propre de l'avocat étant de plaider, même dans une procédure écrite, l'absence de plaidoirie au profit de la dématérialisation entraînera certainement donc un déclin du rôle de l'avocat orateur, ou de la profession d'avocat simplement, ce qui est utopique pour le droit et la justice.

Néanmoins, la transmission de conclusions par voie électronique au tribunal et aux contradicteurs n'est pas en elle-même périlleuse si les garanties procédurales sont respectées82(*) et à condition que la phase des plaidoiries soit sauvegardée. La coexistence de ces deux éléments semble donc possible car l'échange d'écritures dématérialisées et la sauvegarde de la phase orale du procès n'altèrent en rien les relations humaines qui s'avèrent essentielles.

C. La signification électronique, un excès de l'utilisation des nouvelles technologies

La dématérialisation des actes de procédure, envisagée par les professionnels du droit et bientôt permise pour les actes authentiques dès que le décret pris en Conseil d'Etat sera publié, a suscité des interrogations quant à la signification. En effet, le groupe de travail organisé pour l'élaboration dudit Décret relatif à l'acte authentique électronique, a insisté sur les limites des échanges électroniques dans l'activité première des huissiers de justice qu'est la signification. Leur proposition de modification de l'article 648 in fine du Nouveau Code de procédure civile est ainsi formulée «  (...) si la signification peut être réalisée par voie de communication électronique, [il doit contenir] l'adresse de messagerie électronique à laquelle la copie a été envoyée ». Il semble ainsi que l'utilisation d'une telle messagerie ne permette pas cependant de s'assurer de l'identité de la personne qui reçoit l'acte et par conséquent de satisfaire aux exigences de l'article 654 du Nouveau Code de procédure civile posant le principe d'une signification à personne. C'est sans doute pour cette raison que les propositions de signification électronique paraissent rester exceptionnelles (« si la signification peut être réalisée par voie de communication électronique»). Le rôle de l'huissier lors de la remise de l'acte à la personne est essentiel et le groupe de travail n'a pas envisagé de modifier le principe83(*).

La signification à personne reste donc le principe et la signification électronique ne serait possible que dans les cas où il n'y a pas de personne réelle, c'est-à-dire dans le cas de la personne morale. Ainsi, le nouvel article 654-1 proposé concerne que l'hypothèse de l'équivalence de la signification électronique et de la signification « personne morale » : «  la signification à une personne morale est réputée faite à personne lorsqu'elle est réalisée par voie de communication électronique à l'adresse de messagerie électronique affectée à cette personne morale à la réception de l'acte (...) ».

Par conséquent, le caractère pédagogique de la remise impose de sauvegarder la présence physique de l'huissier de justice et de la part accordée à l'oralité. Il semble dès lors que les facilités offertes par l'électronique posent bien plus de question de procédure qu'elles n'en facilitent l'exécution. Mais ce qui ressort avant tout de ce constat, c'est que la dématérialisation complète des actes de procédure civile n'est pas réellement judicieuse : l'acte officiel transmis sur support électronique ne semble pas apporter les garanties suffisantes de sauvegarde de la sécurité juridique. Les nouvelles technologies n'offrant par en l'état actuel une assurance dans la remise de l'acte officiel, il convient donc que ce document soit remis de manière certaine à son destinataire, c'est-à-dire en utilisant la procédure classique de la remise de l'acte (signification à personne, à personne présente, à voisins, à gardien, à mairie).

Cette position du groupe de travail témoigne de l'ampleur de la tâche relative à l'élaboration du décret en Conseil d'Etat qui permettra de mettre en oeuvre les actes authentiques électroniques.

Il est donc possible de redouter que les nouvelles technologies mettent en péril le principe du dialogue entre l'usager et les partenaires de la justice. En effet, tout comme pour le recours aux M.A.R.C. ou à l'A.D.R. où le dialogue est inhérent au processus de conciliation ou de médiation, la procédure civile française nécessite des entretiens entre les parties et leur avocat, entre le juge et les parties. Et, on ne saurait soutenir que par nature, la procédure civile compromette le respect du principe du dialogue : l'écrit n'exclut pas l'oralité ni juridiquement ni pratiquement. Par conséquent, il convient de limiter l'essor de ces procédés dans la procédure civile puisqu'une complète dématérialisation des actes pourrait altérer la sécurité juridique et entraîner une rupture d'égalité entre les citoyens et entre les partenaires de la justice.

D'autres limites se posent à l'entrée des nouvelles technologies dans la procédure mais celles-ci sont cette fois liées au fonctionnement même de ces procédés.

Section 2 - Les problèmes techniques inhérents aux nouvelles technologies

Le maniement des nouvelles technologies ne sert à rien sans la formation, sans savoir les utiliser en amont. Il est même possible d'aller plus loin en affirmant que cette utilisation n'est d'aucune utilité si on ne dispose pas d'outils efficaces, ainsi que de formations appropriées pour y accéder. L'intérêt de présenter les limites de leur fonction est de montrer que la complexité ne doit pas forcément donner naissance à des craintes. Au contraire, c'est en prenant conscience des obstacles fonctionnels de ces outils qu'il est possible de les contourner.

Certains de ces problèmes sont intrinsèquement liés au fonctionnement des outils informatiques (I) entraînant des questions relatives à la continuité des actes juridiques et la traçabilité, questions qui forment une réalité critique (II).

I. Les limites propres à l'utilisation de l'informatique

Le développement portera d'abord sur les problèmes liés aux courriels et aux réseaux informatiques (A) et ensuite sur ceux des systèmes informatiques (B).

A. La vulnérabilité des courriels et réseaux informatiques

1. Le message électronique, un commencement de preuve par écrit

Pour s'assurer de la validité d'un recours déposé par un justiciable par voie électronique ou d'un acte dématérialisé envoyé par un professionnel du droit, l'expéditeur doit posséder la preuve de l'enregistrement de cette transmission, de l'arrivée de cet acte au destinataire.

Un message expédié peut-il constituer une preuve suffisante ? La réponse ne peut être que négative. En effet, nul n'ignore qu'un message électronique peut aisément être contrefait et que les réseaux informatiques peuvent être singulièrement perturbés par de mauvais plaisant ou de véritables délinquants. Le simple courrier électronique peut être facilement modifié ou altéré et l'identité de son expéditeur usurpée. Il serait donc difficile qu'il emporte la conviction du juge si l'autre partie en conteste le contenu.

Ce type de message ne pourrait donc être assimilé qu'à un commencement de preuve par écrit en raison de sa fragilité face aux risques de modification de son contenu. Par conséquent, seul un écrit papier provenant du destinataire saisi ou d'un tiers certificateur permet de s'assurer de la validité d'une transmission.

2. Les formulaires en ligne, un objectif de sauvegarde de la sécurité juridique

Dans l'hypothèse d'un recours par voie d'Internet, il convient de trouver une solution qui permette d'assurer la sécurité juridique du dépôt par courrier électronique de cet acte. Des start-up84(*) ont eu l'occasion de se spécialiser dans l'institution d'une possibilité de recourir à un courrier électronique avec accusé de réception. Le principe est le suivant : l'internaute envoie à une société un courriel au travers d'un formulaire disponible sur le site Internet de la société. Cette dernière est ensuite chargée de transmettre ledit message au destinataire qui ne reçoit pas directement le contenu envoyé mais un email l'invitant à consulter une page du site Internet de la société sur laquelle figure le courrier. Il ne s'agit donc pas d'un réel accusé de réception mais plutôt d'une preuve apportée par un tiers selon laquelle la personne est venue consulter le message envoyé.

Même si cette solution semble diminuer les risques préalablement énumérés, elle n'en demeure pas moins incomplète. En effet, il suffit que le destinataire ne puisse pas ou ne veule pas se connecter à de tels sites pour rendre le procédé totalement inefficace. Par conséquent, cette technique n'est pas intégralement fiable et ne permet pas au justiciable de s'assurer que son courrier électronique a bien été reçu par le greffe dans les temps.

Néanmoins, le système créé par les sites Internet des juridictions qui mettent à la disposition des usagers des formulaires en ligne tend vers la sécurité juridique. En effet, au lieu de faire transiter le recours par un simple courrier électronique, le mécanisme se fonde sur l'utilisation dudit formulaire de dépôt accessible après la saisie d'un mot de passe permettant ainsi une identification du requérant. Dès lors, avec cette interface, l'utilisateur dispose d'une preuve du dépôt de la requête, preuve qui bien qu'elle ne soit pas encore irréfragable a une certaine force probante : le formulaire en ligne permet de dater l'opération. Ce système semble assurer une fiabilité à l'envoi d'une requête à une juridiction. Cependant, il convient de contrôler la réception du courrier par les utilisateurs puisque, si le document n'est pas traité de la bonne manière, cela risque d'entraîner la fin de l'action.

L'utilisation du courrier électronique comme échange d'information ou comme outil de saisine du tribunal pose donc des difficultés quant à l'insécurité qu'elle génère. L'encadrement du courriel est donc nécessaire pour mieux apprécier les avantages qu'il est possible de procurer en terme de gain de temps et de productivité. Il convient de faire face également aux incompatibilités des logiciels utilisés par les professionnels du droit et des systèmes matériels permettant l'accès à l'informatique

B. L'inadaptation entre logiciels et systèmes informatiques

Le monde de l'informatique est très concurrentiel, aussi bien sur le plan des matériels que des logiciels. Sur le premier plan, au niveau de la micro-informatique, la technologie a fait des progrès. En effet, les difficultés existantes par exemple entre le monde Macintosh et le monde PC tendant à disparaître peu à peu, puisque les nouveaux modèles d'ordinateur sortent actuellement sous la double compatibilité.

Cependant, le problème reste entier pour longtemps avec les machines acquises avant ces améliorations. De plus, les obstacles techniques liés aux connexions entre les systèmes plus puissants sont encore plus grands puisque cela suscite des incompatibilités entre tous les outils.

Sur le plan des logiciels, leur traitement génère des complications étant donné qu'ils peuvent être inadapté au système d'exploitation de l'ordinateur de l'utilisateur. A ceci s'ajoute le fait que la multiplication des créateurs rend les différents logiciels de plus en plus incompatibles entre eux.

Il n'est cependant pas envisageable d'imposer un seul logiciel pour toutes les professions juridiques puisque le marché de la concurrence est un droit qu'il ne convient pas de transgresser. Ces difficultés nous montrent une fois de plus que les nouvelles technologies se heurtent à des obstacles techniques que les professionnels devront résoudre afin que leur utilisation soit efficace : l'informatique ne doit pas devenir une source de lenteur alors qu'il est au contraire utilisé pour aller plus vite.

Malgré les incomparables exploits techniques des concepteurs de logiciels et de matériels de stockage informatique, dans bien des cas, le support papier et les techniques de micro filmage restent malgré leur volume, des moyens d'archivage sûrs. A ce titre, il faut considérer l'informatique comme un moyen utile de gestion des flux mais savoir qu'elle n'a pas encore fait ses preuves dans la conservation des stocks.

II. L'antinomisme entre statisme de l'archivage et dynamisme de la dématérialisation

L'écrit papier possède de célèbres vertus puisqu'il permet d'un même coup d'enregistrer l'information, de l'administrer, de la transmettre, de l'archiver et de la prouver. Ces qualités semblent difficilement reproductibles à l'égard de l'écrit électronique surtout en ce qui concerne l'archivage dans la mesure où d'un côté, l'accès et la consultation en ligne des documents nécessitent un certain dynamisme et que, d'un autre côté, l'archivage et l'administration de la preuve requièrent une immuabilité.

Néanmoins, le législateur a fait évoluer le droit de la preuve puisqu'il intègre la notion d'écrit sous forme électronique depuis la loi du 13 mars 2000, la loi pour la confiance dans l'économie numérique du 21 juin 2004 ayant ensuite établi le cadre juridique des transactions passées par voie électronique. Outre l'intérêt pour chacun d'être en mesure de prouver la sincérité de ses actes, les règles légales applicables dans un monde où les personnes sont de plus en plus connectées ne peuvent être méconnues. L'usage des procédés dématérialisés ne fait donc qu'accroître la nécessité de la traçabilité, de la preuve et du devoir de vérité. Dès lors, comment archiver de manière fiable, éventuellement à très long terme les données établies, transformées ou reçues sous forme électronique ? La problématique de l'archivage des écrits électronique est au coeur des débats (A) et plusieurs solutions sont envisagées (B).

A. Les difficultés de conservation des actes dématérialisés

Un document électronique est lié aux logiciels et matériels capables de l'interpréter et de le rendre intelligible. Il en découle que la préservation d'un acte établi par voie électronique n'est pas simple en raison de l'obsolescence rapide de ces outils rendant la capacité de relecture aléatoire. Par conséquent, l'archivage doit rendre cette information indépendante des procédés informatiques d'origine, de façon à garantir la préservation de l'information pendant les durées de conservation requises. Aussi, il est possible d'imaginer des procédures de contrôle permettant de vérifier l'adéquation de la lecture d'un acte avant et après la reprise des données du nouveau système85(*).

Dans certains domaines cependant, il semble que le maintien sous la forme numérique des données peut s'avérer inadéquat. En effet, si un acte n'est voué qu'à rester dans d'état où il a été fait, son archivage n'aura pas de véritable intérêt.

Viennent s'imbriquer à l'ensemble de cette problématique les questions relatives aux conditions dans lesquelles sont conservées les données électroniques qui concernent des informations nominatives ou sensibles. En effet, l'absence d'archivage de telle donnée pendant un temps excessif ou incontrôlé est susceptible de présenter un réel danger pour la vie privée et la sérénité des personnes. En d'autres termes, une accessibilité universelle à l'ensemble des données du monde peut poser des problèmes considérables de droit de la propriété intellectuelle.

Dans le silence de la loi, la doctrine s'accorde à reconnaître qu'il s'agit du problème majeur du droit de l'écrit électronique86(*). La solution retenue devra certifier des procédures suffisamment sécurisées pour assurer la délivrance et la circulation des actes dématérialisés et notamment des actes notariés dont le caractère authentique ne pourra pas être remis en cause.

Par conséquent, un large besoin de clarification de ces réalités liées à l'administration de la preuve, au respect indispensable des dispositions légales relatives à la protection de la vie privée et des libertés individuelles est nécessaire. L'archivage des actes dématérialisés doit engendrer une réflexion de la compétence des professionnels du droit, des Archives de France pour les notaires voire même de la politique. Plusieurs techniques à la conservation de l'acte électronique établi sur support électronique sont avancées.

B. Les solutions proposées

Certaines réponses sont apportées à la question de la conservation des actes dématérialisés de manière générale et des actes authentiques électroniques.

1. La norme AFNOR, une proposition pour l'archivage des données électroniques

L'avant projet de norme87(*) PR NF Z43-400 « Archivage de données électroniques - COM/COLD »88(*) a fait l'objet d'une enquête probatoire menée auprès des professionnels du droit, proposant certaines solutions à la problématique de la conservation des actes dématérialisés. En effet, la dite norme s'applique aux données scripturales ou graphique en deux dimensions, établies, transformées ou reçues sous forme électronique. Elle se fonde sur les supports et les techniques de la micrographie informatique en noir et blanc à traitement chimique liquide. Ce procédé est choisi parce qu'il ne peut aboutir à un autre que l'irréversibilité de l'enregistrement et pour les qualités des microformes.

La présente norme comporte six annexes informatives, consacrées respectivement aux aspects juridiques de l'archivage des données électroniques, à la chronologie des réformes du droit de la preuve, aux implications de la loi Informatique et libertés...

L'association initiatrice de ce projet annoncera prochainement l'homologation de la nouvelle norme d'archivage électronique89(*). Ces règles peuvent être une solution à la problématique étudiée mais seul l'avenir prouvera leur réussite. Aussi, si ladite association vient à disparaître, quelles règles appliquer pour assurer la conservation des documents archivés ? La norme n'assure donc pas forcément une sécurité absolue, l'intérêt d'un texte de loi se fait donc ressentir.

2. La mise en oeuvre d'une politique d'archivage pour le notariat

L'alinéa 2 de l'article 1317 rappelle l'obligation de conservation des actes authentiques établis sur support électronique, renvoyant au décret en Conseil d'Etat pour les modalités d'application. A ce titre, tenues de conserver les actes des notaires au-delà de cent ans, les Archives de France ont entamé une réflexion90(*) sur l'archivage des documents électroniques. Il est essentiel de prévoir le versement des documents pour en garantir une bonne conservation.

Il a d'abord été proposé de faire systématiquement une édition papier91(*). Mais bien que louable, cette suggestion ne règle pas les problèmes de totale dématérialisation des actes. En effet, d'une part, il paraît difficilement concevable, à moyen terme, d'archiver des actes établis sur support électronique à l'aide d'une édition papier. D'autre part, l'édition papier d'une signature électronique ne semble pas apporter la même force probante qu'une signature manuscrite. Par conséquent, ne pas raisonner en « tout électronique » est problématique.

Les propositions ultérieures sont relatives à la création d'une structure adéquate à la conservation des actes dématérialisés. Néanmoins, réfléchir à une structure d'archivage suppose préalablement d'avoir tranché le débat de savoir s'il faut laisser la liberté au notaire d'organiser seul l'archivage des actes authentiques établis sur support électronique ou si cet archivage doit être confié à un tiers. Cette question, plusieurs fois débattue, a abouti à une décision raisonnable de confier cette mission à une institution centrale dont le rôle serait de mettre au point un minutier central. Mais la création d'un tel procédé est une idée fondamentalement novatrice, rompant avec les méthodes actuelles, qui risque d'apporter les mécontentements de certains notaires pouvant y voir une privation de leur liberté92(*). Il est néanmoins possible de prévoir que l'accès aux données sera réservé au seul notaire qui aura alimenté le fichier.

Les coûts afférents à ces techniques d'archivage règleront en partie les débats. Le décret en Conseil d'Etat relatif à l'application des actes authentiques dématérialisés prochainement publié apportera déjà une autre partie des solutions. Cependant, il semble qu'une politique générale d'archivage sécurisé que la loi ne manquera pas d'imposer est nécessaire pour que la conservation des actes dématérialisés puisse s'effectuer avec respect de la sécurité juridique.

Envisager l'usage des nouvelles technologies dans la procédure civile suscitent alors diverses problématiques, de portées plus ou moins importantes, mais qui amènent toutes à l'idée qu'il convient de délimiter leur application afin que la sécurité juridique, la qualité de la défense d'un citoyen et surtout l'équilibre existant entre les protagonistes du procès puissent être sauvegardés. Un maniement tempéré est donc souhaitable. Quant à l'étape finale de la procédure civile que constitue le jugement, se heurte-t-elle aux mêmes obstacles ?

CHAPITRE 2 : La substitution intégrale du juge par l'informatique, une étape à ne pas franchir

La mise en place de nouvelles technologies tel que les logiciels de travail partagés peut faciliter le délibéré. Techniquement en effet, il paraît aisé de mettre en ligne des éléments figurant dans les dossiers : pièces produites, arguments des parties et conclusions des avocats. Ainsi, tout ce qui est dans le débat constitue un environnement partagé. Mais cette simplification de la procédure par l'utilisation de procédés informatiques peut-elle aller jusqu'à substituer le juge par l'informatique ? Certes, le jugement n'est que le point d'orgue de la procédure, mais il peut paraître artificiel de le dissocier.

Dès lors, comment analyser l'immixtion des nouvelles technologies dans le travail du magistrat du siège ? La technique permet-elle simplement au juge de le seconder ou peut-elle le remplacer ?

En considérant dans un premier temps que l'utilisation impropre des procédés techniques risque fortement de bouleverser le rôle du magistrat dans sa fonction de meneur de débat et de preneur de décision (section 1), il convient d'exposer l'idée selon laquelle les nouvelles technologies peuvent l'assister favorablement (section 2).

SECTION 1 - L'appréciation humaine de l'opportunité d'une décision

Les nouvelles technologies peuvent-elles remplacer le juge en tant qu'être humain ? Les débats oraux menant à la décision tout comme le jugement lui-même peuvent-ils être échangés par une automatisation de la procédure ?

L'utilisation de la technique ne semble pas pouvoir substituer le cheminement de pensée conduisant à la décision (I) comme la réalisation d'un jugement équitable (II).

I. La nécessaire sauvegarde des relations humaines entre le juge et le justiciable

Le procès civil demeure au fond, la chose de parties malgré le rôle accru de nos jours reconnu au juge. L'initiative appartenant aux parties, la procédure civile reste accusatoire. Les articles 1 à 5 du Nouveau Code de procédure civile ne laissent aucun doute sur cette idée. Seules les parties introduisent l'instance et ont la liberté d'y mettre fin avant qu'elle ne s'éteigne par l'effet d'un jugement ou en vertu de la loi. De plus, ce sont leurs prétentions respectives qui déterminent l'objet du litige. Le juge, quant à lui, a pour fonction de veiller au bon déroulement de l'instance et de se prononcer sur tout ce qui est demandé.

Dès lors, même si un système informatique peut gérer une partie de la procédure civile et faciliter la discussion collective dès l'enrôlement de l'affaire, le citoyen attend dans certaines situations que le juge l'écoute vraiment, c'est-à-dire sans intermédiaire humain ou technique. En effet, au-delà de la question relative à la perte d'égalité entre les justiciables qu'une procédure intégralement automatisée pourrait engendrer, l'usager a sans doute besoin d'être rassuré par des paroles, une écoute, une présence physique. Souvent néophyte en droit, perdu dans le système judiciaire, il risquerait d'être totalement noyé si une telle procédure venait à être créée. Le citoyen attend donc que le juge lui accorde le temps nécessaire à la compréhension des faits qui lui sont soumis parce qu'à côté de celle de décider, l'une des missions les plus importantes du juge est bien de permettre aux parties d'entendre leur parole, la voix de leur contradicteur et d'en admettre la légitimité afin de rechercher ensemble des solutions qui ne peuvent être mises en oeuvre que si elles ont été acceptées dans une moindre mesure.

Ce travail d'audition, de maniement du débat et de décision parait donc difficile s'il est réalisé dans un cadre qui ne met pas en présence les différents acteurs. L'écoute n'est pas tout à fait la même à l'égard de ceux qui sont présent à l'audience et ceux qui sont loin ou dont les propos ont été enregistrés ou retranscrits. La qualité du débat risquerait donc d'être altérée par la mise en place d'un système intégralement automatisé, sans intervention de l'homme. De plus, les parties doivent garder encore la possibilité d'entendre leur avocat plaider, les questions ou remarques du juge. Une procédure civile entièrement technique entraînerait une déshumanisation de la justice qui n'est pas souhaitable car la croyance d'une bonne administration de notre système judiciaire, fondé par les hommes et encré dans nos esprits ne pourra plus être défendue : le gain de temps procuré par les nouvelles technologies mettra en péril le principe du dialogue.

Aussi et surtout, il serait illusoire de penser que tous les usagers de la justice pourront un jour être informatisés. Dès lors, on ne peut imaginer que la justice prive les justiciables de l'accès à leur droit à être jugé. Le débat peut donc dans une certaine mesure être informatisé mais l'intégralité de l'instruction d'un dossier ne peut se faire avec cette technique puisque d'une altération de la qualité du débat, nous passerons à une absence totale de débat.

Il convient donc de distinguer là encore, ce qui gagne à être véhiculé par des moyens techniques et ce qui reste dans les relations directes entre les individus. A cet égard, il semblerait possible de permettre et de développer des échanges par voie électronique entre les professionnels du droit (avocats, huissiers de justices, notaires, greffiers, magistrats) afin que la gestion du dossier soit facilitée, mais il serait déraisonnable d'effacer le dialogue entre le juge et le justiciable pour les raisons susmentionnées. Néanmoins, les problèmes demeurent les mêmes pour les professions judiciaires : toutes ne sont pas intégralement informatisées et il n'est pas imaginable de les contraindre à le faire. Ainsi, l'instauration d'un « tout informatique » entraînerait des dysfonctionnements importants dans le système judiciaire puisque même les techniciens du droit ne pourraient assurer leurs devoirs. Il convient donc de doser de manière judicieuse l'utilisation des nouvelles technologies afin que les débats ne soient pas dénaturés, voire qu'ils ne disparaissent pas.

II. Le jugement, le propre de l'homme ?

Si le progrès technique et de la communication vient à modifier à terme les relations entre le tribunal et le citoyen ou les auxiliaires de la justice de sorte que le contradictoire y gagne en termes de transparence et de ponctualité, l'informatique parviendra-t-elle à s'infiltrer au coeur de la fonction judiciaire, au point de substituer l'homme par des automates93(*) ?

Est-il acceptable que les fonctions du juge étatique, à savoir le jurisdictio et l'imperium, soient suppléées par une machine ? Afin de répondre judicieusement à ces questions (B), il paraît nécessaire dans un premier temps de positionner le problème (A).

A. Position de problème

L'interrogation essentielle repose sur le fait de savoir si la technique peut offrir les mêmes compétences et garanties que le travail d'un être humain, en l'occurrence un magistrat. En d'autres termes, il convient de savoir si les nouvelles technologies peuvent apporter une réflexion, une sagesse, une appréciation de l'opportunité d'une décision similaires à celles fournies par un juge avant qu'elles viennent à gagner l'ensemble de la procédure civile.

Le jugement est défini comme l'action de juger, plus précisément d'examiner une affaire en vue de lui donner une solution, en général après une instruction et des débats94(*). Ainsi, l'examen approfondi du litige est nécessaire pour statuer de manière juste et équitable, il ne saurait y avoir jugement sans ce travail préalable. Reste à savoir si la technique peut procéder à un tel travail intellectuel pour parvenir à un résultat identique ou qui se rapproche de celui donné par l'homme. Il est possible de douter que cela soit acceptable.

B. L'irremplaçable réflexion humaine

Tout d'abord, sans entrer dans des considérations philosophiques qui ne sont pas l'objet de notre réflexion, l'intelligence artificielle n'a pas la mémoire de l'expérience d'un homme, la maturité et la sagesse de l'âge d'un magistrat expérimenté.

De plus à l'origine, l'exploitation des données d'un ordinateur sont dû à l'homme, à un ingénieur qualifié qui a su intégrer un savoir dans la machine. La technique n'est donc pas autonome. L'intelligence humaine par la technique paraît difficilement remplaçable intégralement, sachant d'autant plus que le droit et le raisonnement juridique présentent des particularités : les nouvelles technologies risqueraient de déformer, de dénaturer, de simplifier le processus juridique de la résolution des problèmes.

Aussi, on peut imaginer que la confiance que certains usagers peuvent accorder à une machine est limitée. Dès lors, comment ces derniers pourront intégrer l'idée que la décision d'un litige dont ils sont une partie, ait été élaborée par une machine et non par un homme? Si la technique vient à remplacer le magistrat, la confiance que le justiciable a en la justice risquerait de se dégrader.

Par conséquent, les procédés techniques peuvent certainement apporter des concours précieux mais ne sauraient assumer le véritable acte de juger. En effet, même si les moyens de s'informer, de communiquer, de préparer les décisions sont multiples et variés, toujours plus efficaces et rapides, la majeure partie des décisions doivent être abandonnées à la sagesse des magistrats.

La réflexion humaine, la maturation d'un problème, le travail de compréhension, la construction d'une argumentation, la nécessaire prise en compte du doute, tout ce qui fait la spécificité de l'élaboration d'une décision prend du temps. Après avoir entendu les parties et leur avocat, il reste un travail de concentration nécessaire à l'élaboration d'un jugement afin qu'il soit juste et équitable. Même si les nouvelles technologies gagnent en terme de temps et de productivité, la valeur d'un jugement rendu par une machine peut être mise en doute.

La procédure civile est-elle donc sur le point de rejoindre les hypothèses de processus on line entièrement automatisés où la déshumanisation du règlement des conflits est manifeste ? Concrètement dans ce type de procédure prévue pour les contrats de transaction, chacune des parties au conflit formule, successivement une offre chiffrée en vu d'un règlement transactionnel. La proximité desdites offres, dont les parties n'ont pas une connaissance réciproque, conduit l'ordinateur à en déterminer la moyenne, fixant ainsi le montant de la transaction extrajudiciaire. Ici, il semble que l'absence d'intervention humaine et l'automaticité du procédé compromettent l'espoir d'aboutir à une transaction exactement convenue entre les parties. Ce n'est pas l'oeuvre d'une justice concevable de statuer sans échanges des parties. Il paraît donc délicat d'envisager la procédure civile de la même manière.

Néanmoins, l'application des nouvelles technologies à l'oeuvre de la justice mène à la rencontre d'un juge assisté par ordinateur.

SECTION 2 - La cohabitation de l'homme et de la machine dans le délibéré, une perspective à délimiter

Des systèmes fondés sur une intelligence artificielle dans le domaine du droit sont nés à la fin des années 1980. Ces outils dénommés « systèmes experts » ou « systèmes à base de connaissance », sont un des plus beaux fleurons de l'intelligence artificielle bien qu'ils présentent certaines failles (I). Destinés à aider l'homme, ils ne servent cependant pas à le remplacer mais bien à l'assister intelligemment (II) ce qui semble correspondre aux exigences de sécurité juridique.

I. Une intelligence artificielle au service de l'élaboration d'une décision : les systèmes experts

Le concept « Artificial Intelligence » a été utilisé pour la première fois à Darthmounth College aux Etats-Unis en août 1956, lors d'une conférence réunissant un ensemble de scientifiques de haut niveau qui proposaient de réaliser des programmes d'ordinateurs doués d'intelligence. Il est délicat à définir puisque de nombreuses confusions et interprétations erronées demeurent. En effet, sachant qu'il est au départ difficile d'expliquer la notion d'intelligence, l'intelligence artificielle ne peut pas être aisé à décrire. Néanmoins, le Professeur Martine Quenillet l'a défini comme un regroupement de concepts, méthodes et procédures élaborées par les hommes pour simuler les activités liées à la pensée et au raisonnement humain95(*). Le but est alors de fournir des résultats qui pourraient être ceux de l'intelligence humaine mais il ne s'agit pas de simuler l'ensemble de pensée ou de la raison humaine.

C'est en se fondant sur cette technique que les systèmes experts ont été créés puisque ceux-ci ont pour fonction d'assister l'homme pour résoudre les problèmes dans lesquels l'aide d'un expert s'avère particulièrement utile voire indispensable. A quoi servent concrètement ces outils ? Est-il possible de réellement les appliquer avec profit au domaine juridique ? L'étude approfondie de leur histoire et fonctionnement est un préalable nécessaire (A) afin de savoir quels sont leur avantages et inconvénients (B).

A. L'utilisation des systèmes experts appliqués au droit

1. Historique

L'année 1970 marque le début de l'application des systèmes experts au droit. En effet, à cette époque aux Etats-Unis, l'informaticien BUCHANAN et le juriste HEADRICK (Université de Stanford), publièrent les premiers résultas d'une recherche détaillée sur l'utilisation de ces outils. Peu de temps après, Thorne McCARTY, aujourd'hui considéré comme le père de ce domaine d'activité, réalisa le système « Taxman » qui a pour objet d'analyser les conséquences fiscales d'une transaction commerciale et qui encore de nos jours un des systèmes les plus connus.

Depuis les années 1985, la combinaison de l'informatique traditionnelle du traitement des données et de l'informatique de type intelligence artificielle s'est beaucoup développée et à l'heure actuelle, il est possible de concevoir sept différents systèmes experts : diagnostic, de planification, guides, de contrôle, de modélisation de documents, d'aide à la recherche documentaire, d'aire à l'analyse des textes juridiques et ceux à vocation d'enseignement. Il ne convient pas de les étudier successivement puisqu'ils ne concernent pas tous la problématique de notre développement. Néanmoins, il est intéressant de se pencher sur l'analyse du système expert de diagnostic qui est un processus automatisé de résolution d'une difficulté juridique.

2. L'intérêt de leur fonctionnement : des outils pour reformuler le droit

Les systèmes experts accompagnent le processus de décision du juge de manière à mémoriser son raisonnement dans un domaine particulier.

En effet, dans les systèmes de diagnostic, l'ordinateur propose une solution spécifique au problème qui lui est soumis96(*). Les décisions sont commandées par une combinaison de facteurs dont elles résultent de façon mécanique. Ce système repose sur l'enchaînement « Si...alors... ». Par exemple, imaginons que ledit système doit aider le magistrat sur un litige concernant une demande de condamnation au paiement d'une somme d'argent. Il fera son cheminement vers la décision, fondé d'une part sur les textes applicables dans le domaine concerné (non règlement des loyers et loi de 1989 sur la bail d'habitation, non règlement des échéances d'un contrat de vente, dommages et intérêts fondés au titre de la responsabilité civile, etc.) et la jurisprudence, et d'autre part, tenant compte des règles de procédures (compétence du juge, pièces produites à prendre en compte ou non selon que le principe du contradictoire a été respecté, etc.). Tout comme le juge vérifie si les conditions prévues par la loi sont réunies, le système s'interroge sur chacune d'elles et la réponse affirmative à chaque interrogation permet la poursuite du raisonnement. : si telle condition est remplie, alors telle règle s'applique.

Le magistrat participe à la création de ce qui sera son outil d'aide à l'élaboration de la décision et contrôle le processus. La sécurité juridique dans sa sphère d'activité ne peut qu'être renforcée par un tel exercice d'autant plus que l'outil peut l'aider à vérifier ses connaissances lors du traitement des dossiers. Dès lors, un tel système décharge le juge d'un certain nombre de dossier, étant à l'évidence adapté aux règles juridiques existantes qui résultent de la loi, de la jurisprudence de la Cour de cassation, de la Cour d'appel de son ressort, voire de la chambre où le juge exerce sa propre pratique.

Néanmoins, diverses difficultés se heurtent à l'utilisation systématique des systèmes experts. Il semble alors que les performances de l'informatique ne puissent pas égaler celles des spécialistes du droit.

B. La réalisation d'un système expert : les limites de la faisabilité

Dans de nombreux cas, le système expert n'est d'aucune aide pour le magistrat qui devra apprécier seul la situation de faits.

En effet, tout d'abord, lorsque la situation présentée au juge n'a pas été prévue par la loi, qu'elle n'a fait l'objet d'aucune décision de jurisprudence, ou encore si des éléments de faits nouveaux sont apportés au débat, le système expert ne fournit plus de réponse et n'est dès lors plus compétent. Le juge reprend donc le dossier seul et fait son office de juge97(*). Son pouvoir créateur paraît donc ne pas pouvoir être remplacé par la machine.

Ensuite, il faut savoir que même si les systèmes experts peuvent permettre un meilleur rendement et une réduction du coût des services, ils sont eux-mêmes onéreux, voire de manière considérable98(*). En effet, afin de les faire fonctionner, des informaticiens qualifiés sont indispensables et il faut payer les experts humains, ce qui prend des proportions importantes. Ainsi, les bénéfices qui résultent de leur utilisation devront excéder ces coûts afin qu'ils puissent être mis en place. Néanmoins, il paraît difficile de quantifier le profit engendré par cette technologie car elle est pour partie de nature intangible99(*).

Aussi, il est fréquent que certains litiges mêlent plusieurs difficultés, dont certaines relèvent largement de l'appréciation humaine. Le juge tient compte d'une série de critères, en leur accordant une importance variable selon les demandes, les dossiers, sa propre connaissance et chacun de ces éléments peuvent influer sur l'appréciation des autres. Dans ces cas où le raisonnement humain a une place indispensable, la machine n'est donc d'aucun secours100(*).

Enfin, le système expert peut engendrer des problèmes humains et d'organisation. En effet, la source du savoir et de l'expertise est l'expert humain lui-même. Or, il est permis de penser qu'il n'est pas toujours facile de convaincre un expert de consacrer de longues périodes de son temps pour la réalisation du système, d'autant plus s'il n'a pas l'assurance que ce dernier pourra fonctionner de manière efficace dans le cadre d'une organisation spécifique. Certains utilisateurs peuvent avoir le sentiment qu'on leur ôte des compétences, ou encore ils peuvent se sentir moins à l'aise devant des systèmes informatiques que devant des êtres humains. Dès lors, le professionnel du droit qui ne désire pas faire une utilisation de la technologie informatique constitue une limite première à l'instauration des systèmes experts dans le domaine du droit.

Par conséquent, les systèmes experts ne sont pas infaillibles et leur maniement par le juge ne peut pas être systématique. Néanmoins, ils constituent une technologie moderne et appréciable qui peut très bien être utilisée pour des litiges déterminés. L'important est là aussi de distinguer les domaines qui nécessitent l'intervention de l'homme et ceux qui peuvent être relayés par une machine.

II. Les perspectives envisageables face aux obstacles techniques et juridiques

Le recours aux systèmes experts peut être envisagé dans un cas complexe si la solution est intégralement commandée par des paramètres objectifs et certains. Mais il semble bien que peu de situations juridiques présentent l'ensemble des caractéristiques favorables à l'élaboration d'un système expert. Ainsi, il convient de séparer là encore les domaines où l'introduction des nouvelles technologies dans la phase du jugement est envisageable et les cas où elle ne l'est pas.

A. L'absence de conflits de compétence en cas de décisions d'opportunité

Comme il a été expliqué antérieurement, le juge doit dans différentes situations apprécier les éléments de faits qui lui sont soumis. Par exemple, nombreuses sont les décisions où les parties s'en remettent à la sagesse du tribunal, ce qui est le cas en matière contentieuse parfois mais surtout en matière gracieuse (autorisation du juge des tutelles101(*) , homologation d'un changement de régime matrimonial102(*), etc.). Dans ces cas, le juge a une liberté de décision et va privilégier la solution qui lui paraît la plus protectrice de l'intérêt le plus légitime. Les données de droit ou de fait dont il dispose inspirent sa décision mais ne la commandent pas. Le juge préserve donc tout son libre arbitre, son pouvoir souverain d'appréciation. Il ne va pas dire le droit « juridictio », mais va le créer « imperium » afin de déterminer une situation individuelle.

Ces décisions d'opportunité103(*) ne peuvent pas être élaborées par un système expert étant donné que la base de règle contenue dans le processus ne peut apporter aucune réponse qui n'a pas été calculée. Ces situations ne sont donc susceptibles d'aucune aide informatique à la décision ? La réponse doit être nuancée. En effet, il est possible qu'une machine puisse aider le magistrat en lui donnant des pistes de réflexions à la lumière des antécédents judiciaires mis en mémoire et en lui indiquant la solution qui paraît être la plus judicieuse compte tenu des résultats obtenus dans le passé. Cependant, l'outil informatique ne pourra pas se substituer au juge et élaborer lui-même un jugement en toute autonomie puisque le processus n'est guère prévu à cet effet.

En d'autres termes, le système expert pourra pour les décisions impératives dicter une solution nécessaire et pour les décisions d'opportunité établir une probabilité que le magistrat sera libre ou non de suivre.

Les décisions qui ne requièrent pas une appréciation souveraine du juge peuvent donc être prises par des machines telle que les évaluations des indemnités et émoluments de toute nature réclamés par le demandeur. Une collecte abondante de jugements pourrait permettre de calculer la moyenne des sommes allouées pour les préjudices les plus courants. Néanmoins, il convient de mettre un bémol sur cette idée. En effet, le risque de prendre des données statistiques comme fondement de la décision est que ce mode de réparation forfaitaire devienne insensible à toute subjectivité. Il ne paraît pas prudent que le progrès mette en péril toute appréciation humaine du litige, même pour ce qui est d'un calcul simple d'une indemnisation d'un préjudice.

B. Un outil d'aide plutôt qu'une inspiration intégrale

Il semble que l'ordinateur sache tout faire sauf inventer. Il peut retenir et tout déduire mais non pas rendre un jugement en équité. La machine est donc bien mieux située à côté de l'homme qu'à sa place.

Le système expert a un avenir certain dans l'assistance qu'il pourra apporter au magistrat à tous les stades de la procédure. Ainsi, le rôle respectif de l'homme et de la machine est bien à distinguer: il n'appartient pas à l'ordinateur de juger mais simplement de libérer le juge d'un certain nombre de charges, lui permettant ainsi de mieux se consacrer à l'unique mission dont il a l'exclusivité.

Il paraît alors possible de dire que lorsque l'outil informatique décide, il n'y a pas de vrai jugement. Nous rejoignons ainsi la conclusion de Madame Danielle Boursier qui soutient l'idée qu' « il est nécessaire, en dernière instance de légitimer toute décision par une autorité humaine et de veiller à préserver la fonction de responsabilité dans toute action impliquant un jugement. Le déterminisme des machines (machine de droit, machine bureaucratique, machine technologique) doit être interrompu par l'indétermination des choix humains, même si la liberté humaine n'est que le fruit de notre ignorance, et l'indétermination de l'interprétation seulement l'effet de la multiplicité des déterminations auxquelles l'homme est soumis »104(*).

Conclusion

L'introduction d'un instrument nouveau dans un domaine jusque là réservé à l'esprit humain engendre souvent un rejet quasi général. Puis, passée la méfiance initiale, il est possible d'observer une phase d'engouement non moins excessive pour arriver à une approche raisonnable.

Introduire les nouvelles technologies dans le procès civil n'est pas un projet aisé. Le bouleversement des mentalités ancrées autour de la culture papier, des comportements et méthodes de travail des praticiens du droit est loin d'être un mythe. Néanmoins, l'usage de ces outils n'entraîne pas un véritable désordre dans la pratique judiciaire puisqu'il est gouverné par des Directives Européennes, lois et décrets d'application garantissant la sécurité juridique ainsi que la bonne application des règles déontologiques de chaque profession judiciaire et protégeant les données personnelles des utilisateurs. A ce titre, il suffit de se pencher simplement sur l'actualité judiciaire pour comprendre combien ces instruments sont encadrés par des normes: de nombreux textes et programmes ayant pour objectif premier de sauvegarder la sécurité du système civil procédural sont en voie d'être appliqués, notamment le décret du Conseil d'Etat pris en application de la loi du 13 mars 2000 relatif à la signature électronique, à l'établissement et à la conservation des actes authentiques électroniques. Les nouvelles technologies ont dès lors pu convaincre les plus réservés quant aux atouts qu'elles comportent pour la procédure civile. La célérité de la justice comme la productivité dans la gestion des dossiers semblent assurées par ces outils. Les profits que peuvent retirer les professionnels du droit comme les justiciables du développement de ces instruments dans la sphère civile procédurale ne peuvent être méprisés. A cet égard, la méthode de la certification atteste d'un avenir prometteur. Reposant sur le mécanisme de la cryptographie et contrôlé par un tiers indépendant, l'échange de données dématérialisées s'effectue de manière sécurisée répondant ainsi aux exigences de confidentialité et d'authenticité. En raison des garanties procédurales qu'il offre aux utilisateurs, ce mécanisme renferme sans doute de sérieux enjeux pour l'utilisation future des nouvelles technologies dans la procédure civile.

Cependant, le parcours vers une procédure totalement dématérialisée est semé d'embûches et il faut être conscient des problèmes de faisabilités et de sécurité juridique. Ce sont d'abord des obstacles techniques qui doivent être dépassés afin que la communication électronique s'opère en toute quiétude. A ce titre, l'archivage des données électroniques et la durée de la conservation des documents numérisés présentent des difficultés dont il convient de remédier : les actes, qu'ils soient authentiques ou sous-seing privé, doivent pouvoir être conservés conformément aux exigences légales. Mais à cet égard, la technologie avançant à une vitesse fulgurante, il est possible que ces risques soient maîtrisés à l'avenir, à supposer que d'autres ne viennent pas s'ajouter à ceux connus. Ensuite, et surtout, le danger majeur de l'instauration d'une procédure civile intégralement informatisée concerne l'équité judiciaire. En effet, la question de l'étendue des nouvelles technologies quant aux conséquences qu'elle pourra avoir pour le droit d'accès à la justice de l'usager doit être au coeur des débats. Si le système judiciaire parvient à la société du « tout électronique », un certain nombre de problèmes sont à envisager : le clivage entre les individus disposant d'outils informatiques et les autres, la perte de l'égalité entre les citoyens devant la justice, le déclin des professionnels du droit non informatisés, et le non respect des principes fondamentaux. Enfin, à cette menace s'ajoutent les risques de parvenir, d'une part, à une surconsommation judiciaire, puisque la simplification excessive de l'engagement d'une action civile pourra entraîner un engorgement des tribunaux, d'autre part, à une dépersonnalisation dans le traitement des dossiers, étant donné que les relations humaines pourront disparaître au profit d'une unique communication par voie électronique, et enfin, à une perte de l'appréciation souveraine du magistrat pour les décisions d'opportunité, dans le cas où la machine viendrait à remplacer le juge.

Le « tout électronique » dans la procédure civile, comme dans les autres secteurs judiciaires et juridiques, constitue donc une utopie même s'il peut correspondre à une ardente ambition des personnes intéressées. Ce constat est préférable au vu des risques que l'intégrale informatisation de la sphère procédurale pourrait comporter. Loin d'être un échec, il est le reflet d'une prudence honorable s'expliquant par le souci de ne pas aboutir à une discrimination dans le traitement judiciaire. Dès lors, il convient de rester à une utilisation modérée des nouvelles technologies en ne proposant des échanges dématérialisés qu'à ceux qui disposent de ces nouveaux outils, et ce, afin d'éviter de créer un « fossé numérique ».

A l'avenir, la justice pourra très bien fonctionner selon un mode alternatif, comme c'est le cas à moindre mesure actuellement: d'un côté, la présence physique, de l'autre côté, l'immatériel. Loin d'être substituée à l'homme, la machine restera un outil d'aide et de simplification des démarches procédurales.

L'objectif primordial est de trouver un équilibre dans l'usage des instruments électroniques afin que la sécurité juridique soit sauvegardée. Même si la pression tacite exercée par la société actuellement nous conditionne tous, dans la vie privée comme dans la vie publique, à nous équiper de nouvelles technologies, il faut que l'utilisation de celles-ci reste un choix pour le justiciable ainsi que pour les professionnels du droit, et non une nécessité. Ces derniers doivent conserver le droit de pouvoir se servir ou non d'instruments ou de préférer le support papier au support électronique.

Cette conception « citoyenne » de l'utilisation des nouvelles technologies est une préoccupation que tous les acteurs du procès civil doivent partager. Dès lors, si la perception de l'usage de ces outils modernes est envisagée de manière équilibrée, celui-ci pourra promettre un avenir satisfaisant.

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Articles de journaux

MATHY (D.), Logiciels pour notaires, La Tribune de l'Informatique Juridique 2004, n°6, p.28.

LANDRIN S., À Lyon, la justice expérimente les confrontations à distance grâce à des caméras, Le Monde, 8 février 2005.

Index

A

Acte authentique électronique · 37, 39, 40, 41, 42, 62, 70, 71, 76, 77

Arbitrage électronique · 59

Archivage · 14, 37, 62, 74, 75, 76, 77, 78

Avocats · 13, 14, 15, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 41, 43, 44, 48, 49, 50, 51, 80, 82, 83

C

Certificat électronique · 47, 48, 49, 51, 52

Certification · 24, 42, 43, 44, 45, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56

Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales · 18, 19

Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales» · 17, 19

Courrier électronique · 28, 30, 33, 72, 73

Cryptographie · 44, 45, 46, 47, 48, 55, 58

H

Huissiers de justice · 13, 14, 40, 50, 61, 70

I

Intelligence artificielle · 83, 84, 85

Internet · 15, 16, 18, 34, 36, 43, 44, 45, 47, 52, 58, 59, 73

L

Logiciel · 14, 15, 40, 45, 58, 74, 75, 80

M

Mise en état électronique · 36

N

Notaires · 13, 14, 39, 40, 42, 50, 76, 78, 82

P

Programme d'action gouvernementale pour l'entrée de la France dans la société de l'information · 21

S

Signature électronique · 23, 24, 25, 33, 34, 40, 41, 43, 46, 47, 53, 56, 58, 60, 62, 78

Signification électronique · 41, 70, 71

Système expert · 84, 85, 86, 87, 88

T

Télécopie · 21, 30, 33, 35, 54, 56

V

Visio-greffe · 28

Visioconférence · 16, 17, 28, 29, 30

Table des matières

PRINCIPALES ABREVIATIONS 4

SOMMAIRE 5

INTRODUCTION 6

PARTIE 1 : LE BIEN FONDÉ DE L'ESSOR DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS LA PROCÉDURE CIVILE 12

CHAPITRE 1 : DES ARGUMENTS PROPICES AU DÉVELOPPEMENT DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS LE PROCÈS CIVIL 13

SECTION 1 - LE TEMPS INFORMATIQUE AU SERVICE DU TEMPS JUDICIAIRE 13

I. Une productivité assurée pour la gestion du dossier 13

A. Les professionnels du droit en faveur d'un suivi de l'affaire instantané et rapide 13

B. Des échanges facilités et rapides 15

II. L'assurance d'une meilleure application des principes fondamentaux 17

A. Le droit à un accès effectif à un tribunal 18

B. Le droit à un jugement public et équitable dans un délai raisonnable 19

SECTION 2 - UNE POLITIQUE LÉGISLATIVE DE SIMPLIFICATION DE LA PROCÉDURE CIVILE PAR L'OUTIL INFORMATIQUE 20

I. Un programme politique en faveur d'une société de l'information et de la communication 20

A. La lutte politique pour une justice simplifiée et moderne 21

B. Les projets politiques actuels ouverts vers une ère électronique 21

II. La loi au service de l'ère informatique 22

A. L'écrit électronique ad probationem 23

B. L'écrit électronique ad validitatem 24

CHAPITRE 2 : L'IMPACT DES NOUVELLES TECHNOLOGIES SUR LE QUOTIDIEN DES PROFESSIONNELS DU DROIT 27

SECTION 1 - L'OUVERTURE DES JURIDICTIONS VERS L'EXTÉRIEUR PAR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHANGES DÉMATÉRIALISÉS 27

I. Les échanges électroniques entre les tribunaux civils et les justiciables face aux exemplaires juridictions administratives et pénales 28

A. Vers une généralisation de l'usage des nouvelles technologies dans les juridictions civiles 28

B. L'intense utilisation des nouvelles technologies par les juridictions pénales et administratives. 29

1. Le maniement abondant des nouvelles technologies dans la chaîne pénale et administrative 29

2. Les difficultés d'instaurer une chaîne civile à l'image de la chaîne pénale 31

II. Les échanges dématérialisés entre les tribunaux et les partenaires de la justice 32

A. Entre les cours d'appel et les avoués 32

B. Entre les juridictions civiles et les avocats 32

SECTION 2 - LA DÉMATÉRIALISATION DES ACTES DE PROCÉDURE 34

I. Vers une dématérialisation étendue des actes d'administration judiciaire et actes du palais 34

A. Les actes relatifs à la mise en état d'une affaire 34

B. Les actes de palais établis entre les partenaires du procès civil 36

II. L'acte authentique adapté aux nouvelles technologies 37

A. Précisions sur la notion d'acte authentique 38

B. L'adaptation de l'acte authentique sur support électronique 39

1. L'authenticité des actes électroniques par les notaires 39

2. Les actes authentiques électroniques des huissiers de justice 40

CHAPITRE 3 : LA SAUVEGARDE DE LA SÉCURITÉ JURIDIQUE PAR LA CERTIFICATION 43

SECTION 1 - LA CERTIFICATION, UN OUTIL DE CONFIANCE 43

I. Des exigences de confidentialité et d'authentification respectées 44

A. Un conflit entre le besoin de sécurité juridique et les risques du Web 44

B. La cryptographie, le fondement de la sécurité des échanges dématérialisés 45

II. Le certificat électronique, l'outil de la dématérialisation des échanges 47

A. Une identification électronique garantie 47

1. Un support sécurisé de la dématérialisation des échanges 47

2. Le fonctionnement du certificat électronique à travers l'exemple d'E-GREFFE 48

B. L'autorité de certification indispensable à la sécurisation des échanges 49

1. L'intervention d'un tiers certificateur neutre et indépendant 49

2. Les exemples prometteurs d'autorités de certification 51

SECTION 2 - LES ENJEUX DE LA DÉMATÉRIALISATION DES ÉCHANGES 53

I. La portée de l'admission d'une preuve électronique. 53

A. La force probante de l'écrit électronique par la certification 54

B. La gestion des conflits de preuve 55

II. L'exigence de sécurité juridique au-delà de l'existence d'un écrit 56

TRANSITION 58

PARTIE 2 : LE RISQUE D'UNE DÉRIVE VERS UNE JUSTICE DÉSHUMANISÉE 64

CHAPITRE 1 : DES OBSTACLES DÉCELABLES À MAÎTRISER 64

SECTION 1 - LA PORTÉE D'UNE UTILISATION EXTENSIVE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS LA PROCÉDURE CIVILE 65

I. Dangers et inquiétudes liés à la société du « tout électronique » 65

A. Vers la perte de l'égalité entre les justiciables et entre les professionnels du droit 65

1. Les usagers de la justice inégaux devant l'accès la justice 66

2. Le probable déclin des professions juridiques non informatisées 67

B. La crainte d'une surconsommation judiciaire 67

II. Un risque de dépersonnalisation dans le traitement du dossier 68

A. La dématérialisation exclue en matière gracieuse et contentieuse? 69

B. L'altération de la qualité des débats 69

C. La signification électronique, un excès de l'utilisation des nouvelles technologies 70

SECTION 2 - LES PROBLÈMES TECHNIQUES INHÉRENTS AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES 72

I. Les limites propres à l'utilisation de l'informatique 72

A. La vulnérabilité des courriels et réseaux informatiques 72

1. Le message électronique, un commencement de preuve par écrit 72

2. Les formulaires en ligne, un objectif de sauvegarde de la sécurité juridique 73

B. L'inadaptation entre logiciels et systèmes informatiques 74

II. L'antinomisme entre statisme de l'archivage et dynamisme de la dématérialisation 74

A. Les difficultés de conservation des actes dématérialisés 75

B. Les solutions proposées 77

1. La norme AFNOR, une proposition pour l'archivage des données électroniques 77

2. La mise en oeuvre d'une politique d'archivage pour le notariat 78

CHAPITRE 2 : LA SUBSTITUTION INTÉGRALE DU JUGE PAR L'INFORMATIQUE, UNE ÉTAPE À NE PAS FRANCHIR 80

SECTION 1 - L'APPRÉCIATION HUMAINE DE L'OPPORTUNITÉ D'UNE DÉCISION 80

I. La nécessaire sauvegarde des relations humaines entre le juge et le justiciable 80

II. Le jugement, le propre de l'homme ? 82

A. Position de problème 82

B. L'irremplaçable réflexion humaine 83

SECTION 2 - LA COHABITATION DE L'HOMME ET DE LA MACHINE DANS LE DÉLIBÉRÉ, UNE PERSPECTIVE À DÉLIMITER 84

I. Une intelligence artificielle au service de l'élaboration d'une décision : les systèmes experts 84

A. L'utilisation des systèmes experts appliqués au droit 85

1. Historique 85

2. L'intérêt de leur fonctionnement : des outils pour reformuler le droit 85

B. La réalisation d'un système expert : les limites de la faisabilité 86

II. Les perspectives envisageables face aux obstacles techniques et juridiques 88

A. L'absence de conflits de compétence en cas de décisions d'opportunité 88

B. Un outil d'aide plutôt qu'une inspiration intégrale 90

CONCLUSION 91

BIBLIOGRAPHIE 94

INDEX 97

TABLE DES MATIÈRES 98

* 1 Discours du Premier Ministre du 12 novembre 2002 devant l'assemblée Générale de l'electronic business group, in P. HERRISON et B. SIDO, Rapport 345, 2002-2003, Commission des affaires économiques, www.senat.fr

* 2 Articles 238, 1443 et 1449 du Nouveau Code de procédure civile

* 3 Articles 727, 871, 879 et 946 du Nouveau Code de procédure civile

* 4 Articles 653 et suivant du Nouveau Code de procédure civile

* 5 Articles 131-11 et 832-7 du Nouveau Code de procédure civile

* 6 Directive Européenne du 11 mars 1996 transposée en droit français par la loi du 1er juillet 1998

* 7  Les systèmes informatiques des Huissiers de Justice, Chronique du Centre Serveur, La Tribune de l'Informatique Juridique 2004, n°6, p.24.

* 8 Infra p. 38-39

* 9 D. MATHY, Notaire à SAGY (Saône et Loire), Logiciels pour notaires, Chronique, La Tribune de l'Informatique Juridique 2004, n°6, p.28.

* 10 A titre d'exemple, Logiciel BuroClic, Editeur de logiciels Le Panorama, 456, chemin de CARIMAI, 06250 MOUGINS, www.buro-clic.com

* 11 P. CATALA, Procédure et jugement, Chapitre 10 dans Le droit à l'épreuve du numérique, Jux ex Machina, Paris, Ed. Puf. 1998.

* 12 J. VILLACEQUE, Interview Rapport « célérité et qualité de la justice » : le point de vue de l'avocat, D. 2004, n°37, p. 2660.

* 13 P. CHEVALIER, Expérience de téléprocédures dans les juridictions françaises, Droit & Patrimoine n°103, Avril 2002 p.69

* 14 Infra p. 26 et suiv.

* 15 S. LANDRIN, À Lyon, la justice expérimente les confrontations à distance grâce à des caméras, Le Monde, 8 février 2005.

* 16 Convention Européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ratifiée en France le 3 mai 1974 D. n°74-360

* 17 F. MALLOL, Le Conseil d'Etat admet la recevabilité d'une requête contentieuse présentée par courrier électronique, D. 2002, JP p. 2008.

* 18 Infra p. 67

* 19 Infra p. 64 et suiv.

* 20 Voir par exemples CEDH, 17 janvier 2002, Laine: Rev. Huiss. 2002, 153, obs. Marguénaud (une procédure collective de dix années) - CEDH, 7 janvier 2003, C. D. c/ France: Rev. Huiss. 2003, 229, obs. Fricéro (importants délais d'inactivité judiciaire).

* 21 Voir par exemple CEDH, 26 août 1994, Karakaya c/ France D. 1995. SC.103

* 22 http://www.archives.premier-ministre.gouv.fr/jospin_version1/DISCOURS/250897.HTM

* 23 Interview de Jean-Claude Magendie, D. 2004 n°32, p. 2309.

* 24 Ministère de la Justice, communiqué de presse, 6 septembre 2004 ; Procédures, Octobre 2004, p.4 ; JCP 15 Septembre 2004, n°38, p. 1570 ; http://www.justice.gouv.fr/presse/com060904.htm

* 25 Mission Magendie, Célérité et qualité de la justice, La gestion du temps dans le procès, Rapport au Garde des Sceaux le 15 juin 2004 ; http://www.justice.gouv.fr/publicat/rapport-magendie.pdf

* 26 Rubrique Projets, Justice, JCP 28 Septembre 2004, n° 40, p. 1677.

* 27 L. n°2000-230 du 13 mars 2000, JO 14 mars 2000

* 28 Décret no 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l'application de l'article 1316-4 du code civil et relatif à la signature électronique, J.O. n°77 du 31 mars 2001, p. 5070.

* 29 Eric A. CAPRIOLI, La loi française sur la preuve et la signature électronique dans la perspective européenne, JCP 3 mai 2000, n°18, p. 787.

* 30 Selon Maître André VOILLEQUIN, Directeur Général de l'ADEC, le projet de décret a été évoqué en Conseil d'Etat le 14 juin 2005 et sera bientôt définitif.

* 31 Supra p. 42 et suiv.

* 32 J.O. n° 92 du 19 avril 2002 page 6944, texte n° 1.

* 33 J.O. n° 132 du 8 juin 2002 page 10223, texte n° 16.

* 34 V. note 30

* 35 L. n°2004-575 du 21 juin 2004, J.O. 22 juin 2004, p. 11168, texte n° 2.

* 36 Ass. Nat., Communiqué du Conseil des ministres du 15 janvier 2003, Projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique, Dossier législatif, www.assemblee-nationale.fr

* 37 T. PIETTE-COUDOL, L'écrit électronique et la signature électronique depuis la LCEN, Com.com.élec., sept. 2004, p.40.

* 38 H. CROZE, Faut-il faire confiance à la loi sur la confiance dans l'économie numérique ? , Procédures août/septembre 2004, p.3.

* 39 Rapport du garde des sceaux, ministre de la justice, au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2005-674 du 16 juin 2005 relative à l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie électronique, J.O n° 140 du 17 juin 2005 p. 10341, texte n° 25

* 40 Un arrêté conjoint du garde des Sceaux, du ministre de l'Intérieur et du ministre de la Défense définit les caractéristiques techniques de la rediffusion, afin de se conformer aux conditions d'une telle transmission et d'empêcher toute conservation des images du procès, conformément aux dispositions de l'article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 modifiée sur la liberté de la presse.

* 41 Présentation du projet de budget 2005 pour la justice, voire supra.

* 42 CE, 28 décembre 2001, D. 2002, JP p. 2008

* 43 C.Cass. 2ème Civ. 13 juin 2002, Juris-Data n° 2002-014751 ; Bull.civ. 2002, II, n° 127, JCP G 2002, IV, n° 2324

* 44 D. n°2005-222 du 10 mars 2005, JO n° 59 du 11 mars 2005 p. 4212, texte n°35

* 45 D. n° 2005-324 du 7 avril 2005, JO n° 82 du 8 avril 2005, p. 6340.

* 46 Loi n° 2004-130 du 11 février 2004

* 47 H. CROZE, Le Conseil national des barreaux et l'avocat électronique, Etudes, Procédures, Juil. 2004, p.11.

* 48 V. Cass. 2ème Civ. 13 juin 2002

* 49 Rapport sur la messagerie et l'accès Internet sécurisé pour les avocats adopté par l'Assemblée générale du CNB le 20 mars 2004, www.cnb.avocat.fr/PDF/2004-06-19_liger.pdf

* 50 Article 776 du Nouveau Code de procédure civile

* 51 http://www.avocatparis.org/new/avocats_services/01_400_e_services.asp

* 52 M. GRIMALDI et B. REYNIS, L'acte authentique électronique, Petites affiches, 6 novembre 2003, n° 222, p. 3.

* 53 Article 303 et suivant du Nouveau Code de procédure civile. Il faut préciser néanmoins que cette procédure peut être contournée en recourant à l'article 145 du même code.

* 54 P. CATALA, Le formalisme et les nouvelles technologies, Défrénois 2000, art. 37210, spéc. n° 20, p. 908.

* 55 Rép. Min. n° 41766 à M. Estrost JOAN, Q 27 juillet 2004, p. 5857.

* 56 Ord. n° 45-2592 du 2 novembre 1945, décret n° 56-222 du 29 février 1956 ; Décret n° 50-97 du 20 janvier 1950

* 57 Infra p. 69-70

* 58 C. BOISSEL, E-greffe : de la dématérialisation des actes de procédure vers le développement d'une justice en ligne, Mémoire sous la direction de Monsieur le Professeur Warusfel, 2003-2004.

* 59 http://www.tout-savoir.net/lexique.php?rub=definition&code=1917

* 60 Article 29 de la Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, J.O n° 143 du 22 juin 2004, p. 11168.

* 61 Infra p. 49

* 62 Y. BREBAN et I. POTTIER, Avocats, Cabinet Alain BENSOUSSAN, Paris, Sécurité, authentification et dématérialisation de la preuve dans les transactions électroniques (1ère partie), La problématique juridique des échanges électroniques face à la preuve, Doctrine, Gaz. Pal. 4 avril 1996.

* 63 Selon l'article 1-11 du décret du 30 avril 2001, un prestataire de service de certification est toute personne qui délivre des certificats électroniques ou fournit d'autres services en matière de signatures électroniques »

* 64 J. DOUCEDE, Président d'Infogreffe, Propos recueillis dans Le guide de la dématérialisation d'Infogreffe, www.infogreffe.fr

* 65 Supra p. 21 et suiv.

* 66 Cass. Com. 20 déc. 1976, n°75-12.19, Bull.civ.IV, n°330

* 67 Cass. 1ère Civ., 14 février 1995, n°92-17.61, D. 1995, jur., p. 340, note S. PIEDELIEVRE

* 68 Contrairement à l'avant projet de loi qui faisait prévaloir l'écrit traditionnel

* 69 Cass. Com. 2 déc. 1997, n°95-14.251, Bull. civ. IV, n° 321, D. 1998, jur., p. 192, note MARTIN D.R., RTD com., 1998, p.187, obs. CABRILLAC M.

* 70 P. CATALA et P.-Y.GAUTIER, L'audace technologique à la Cour de cassation : vers la libéralisation de la preuve contractuelle, JCP éd. G 1998, actualités, p. 905.

* 71 O. CACHARD, Les modes électroniques de règlements des litiges (M.E.R.L.), Com. Com. Elec., Décembre 2003, p. 22.

* 72 C'est une expression en vogue aux Etats-Unis mais qui s'implante également en Europe. Ce sigle est né engendré par les opérateurs du marché de cette justice.

* 73 G. CHABOT, La cyberjustice : réalité ou fiction ?, D. 2003, Chron. p. 2322.

* 74 Centre de Médiation et d'Arbitrage des Techniques avancées, 57 Av. de Villiers, 75017 PARIS.

* 75 P. FOUCHARD, E. GAILLARD et B. GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996, §1389.

* 76 L'article 2044 du Code civil définit le contrat de transaction comme «  un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ».

* 77 Article 2052 du Code civil

* 78 O. CACHARD, Les modes électroniques de règlements des litiges (M.E.R.L.), Op. Cit. note 71

* 79 P.-Y. GAUTIER, Arbitrage et Internet, Droit et Patrimoine n°105, juin 2002, p.88.

* 80 Sondage effectué par Médiamétrie, Com.com. Élec. Mai 2005, p.4.

* 81 F. MALLOL, Le Conseil d'Etat admet la recevabilité d'une requête contentieuse présentée par courrier électronique, D. 2002, JP, p. 2008, op. cit. note 17.

* 82 Supra p. 35

* 83 G. DEHORO, L'écrit dans les procédures judiciaires, Gaz. Pal. 6-8 mars 2005, p.2

* 84 Voir par exemple le service de LettreRecommandee.com qui annonce un service ayant une valeur légale identique à cette d'un envoi papier, http://www.lettrerecommandee.com

* 85 D. FROGER, Les contraintes du formalisme de l'archivage de l'acte notarié établi sur support dématérialisé, JCP N, 12 mars 2004, n°11, p. 464.

* 86 V. X. LINANT DE BELLEFONDS, Notaires et huissiers face à l'acte authentique électronique, JCP N 2003, n°10, p. 1196

* 87 "La normalisation a pour objet de fournir des documents de référence comportant des solutions à des problèmes techniques et commerciaux concernant les produits, biens et services qui se posent de façon répétée dans des relations entre partenaires économiques, scientifiques, techniques et sociaux", Extrait du Décret n°84-74 du 26 janvier 1984.

* 88 Preuve et Micrographie, Association à but non lucratif, 4, allée Verte, 75011 PARIS, micrographie@megapreuve.org

* 89 L'homologation devait être officiellement annoncée lors du Salon Information numérique, Veille et gestion de l'Information du1 et 2 juin prochain à Paris. Mais il semble qu'elle a été repoussée à une date ultérieure.

* 90 Un groupe de réflexion s'est réuni sous la présidence de Martine DE BOISDEFFRE, Directrice des Archives de France ; C. DHERENT, Les archives électroniques, La documentation française, Paris 2002.

* 91 Proposition faite lors de la 53ème session de l'Assemblée de liaison des notaires (2-4 décembre 2002). L'assemblée dans une troisième proposition, souhaite « dans un souci de sécurité de la conservation des actes, lors de la réception d'un acte authentique électronique, les notaires procèdent systématiquement à une copie sur support papier qu'ils certifieront conforme et conserveront avec leurs minutes établies sur support papier », JCP N 2003, n°3, p. 1036.

* 92 D. FROGER, Les contraintes du formalisme de l'archivage de l'acte notarié établi sur support dématérialisé, JCP N, 12 mars 2004, n°11, p. 464, op. cit. note 85.

* 93 P. CATALA, Procédure et jugement, Chapitre 10 dans Le droit à l'épreuve du numérique, Jux ex Machina, Ed. Puf, op. cit. note 11.

* 94 G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, Quadrige, Ed. PUF, 2001.

* 95 M. QUENILLET, Droit et intelligence artificielle : mythes, limites et réalités, Petites Affiches n°11, p. 11

* 96 Voire par exemple le système d'aide à la détermination de la nationalité française développé dans sa version prototype au laboratoire d'informatique juridique de Montpellier (I.R.E.T.I.J), système qui face à une série de problèmes techniques et financiers ne fut jamais installé dans le réseau des greffes ; M. QUENILLET, Le système-expert nationalité, in Système experts et droit, CRID, Namur, Ed. Story Scientia, 1988.

* 97 Article 4 du Code civil «Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice».

* 98 En 1988, la société Cap Sogeti a chiffré à 1.800.000 Francs (soit 274.408,23 €) la réalisation d'un système expert en droit de la nationalité française limitée aux problèmes posés par les ressortissants de Madagascar.

* 99 M. QUENILLET, Droit et intelligence artificielle: mythes, limites et réalités, Petites Affiches n°11, p. 11, op. cit. note 95.

* 100 Supra p.82

* 101 Article 396 du Code civil et article 1216 du Nouveau Code de procédure civile

* 102 Article 1397 du Code civil et article 1301 du Nouveau Code de procédure civile

* 103 V. P. CATALA, Procédure et jugement, Chapitre 10 dans Le droit à l'épreuve du numérique, Jux ex Machina, Ed. Puf 1998

* 104 D. BOURCIER, La décision artificielle, PUF, 1995, p. 232.






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