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Les chambres régionales des comptes


par Jean-Philippe SOL
ENS Cachan - DEA Action Publique et Sociétés Contemporaines 2001
  

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[5) Le modèle français du contre-rôle

Les sénateurs ne peuvent que proposer car ils n'ont aucun moyen de pression sur les chambres régionales des comptes. Ils ne peuvent en aucune façon modifier le cadre réglementaire de leurs actions.

Ainsi que le souligne Bernard Levallois, Conseiller Référendaire à la Cour des comptes et Président de la chambre régionale des comptes d'Alsace, les récentes décisions prises par le Conseil d'Etat ne laisse d'autre choix aux pouvoirs publics que de renforcer la fiabilité juridique du contrôle de légalité97(*), notamment afin de protéger les petites communes contre des possibilités d'insécurité juridiques, qui est l'une des grandes sources d'insatisfaction territoriale.

Ce motif d'insécurité juridique et le nombre important de communes en France (plus de 36 000) avait même conduit le Président du Syndicat des juridictions financières, M. Pierre Rocca, à proposer une réactivation d'agences départementales98(*) afin d'assister les petites communes. A contrario, M. Rocca n'est pas très favorable au développement de pôle de compétences communs avec les services préfectoraux, notamment en raison de l'implication des préfets dans les projets communs avec les collectivités territoriales et parcequ'il craint de ce fait un amoindrissement des moyens alloués aux chambres régionales.

C'est aussi une façon de répondre à l'une des propositions du rapport Amoudry-Oudin qui préconisait éventuellement une assistance technique de magistrats financiers qui aurait été rattaché, au sein de pôles de compétences comprenant également d'autres magistrats territoriaux, au Préfet. Cette proposition, il est vrai, émanait d'un premier rapport, suggéré par le Conseil d'Etat en 1993.

Le rapport Houssin (« Sur la simplification de l'Etat dans ses relations avec les collectivités locales ») préconisait également un renforcement des capacités juridiques des services déconcentrés de l'Etat.

Le système français est en effet marqué par une forte indépendance de son système de contrôle externe. « Dans de nombreux pays, le contrôle externe des régions est organisé et financé par les régions elles-mêmes. Les responsables des institutions chargés du contrôle, les Présidents [des chambres allemandes] et des sindicaturas espagnoles ou les vérificateurs généraux des provinces du Canada, sont tous nommés par les collectivités qu'ils contrôlent.

S'agissant des communes, que ce soit en Angleterre et au pays de Galle ou en Hollande, elles ont souvent le choix du contrôleur, comme une entreprise à le choix de son commissaire aux comptes.

En Angleterre et au pays de Galle, le District audit, qui est une institution publique, est en concurrence pour le contrôle des communes avec les grands cabinets privés d'Audit »99(*).

Dans un pays marqué par le centralisme et l'absence d'expériences politico-administratives marqués par le polycentrisme, les tentatives de réformes proposées s'inscrivent dans une logique d'indépendance juridictionnelle. Les membres de la Cour des comptes proposent donc des solutions en accord avec leurs fonctions et leur position au sein du système d'action.

Alain Sérieyx, Président de la chambre régionale de Provence-alpes-côte-d'azur, conseiller référendaire à la Cour des comptes, en 1996, rappelait que la fonction était nouvelle et que la formule adoptée par le législateur, «particulièrement floue, permet toutes les interprétations, extensives ou restrictives »100(*) .

Or, la présence d'apories législatives ou institutionnelles, voulues ou non par le législateur ou le décideur politique, ne peut que conforter le rôle fondamental des instances ou institutions en présence, dans la mesure ou l'absence de clivages est de nature à révéler la logique potentielle des institutions.

Sans intervention de celui qui peut modifier les tables de la loi, ces dernières ont naturellement tendance à s'épanouir dans leur propre mode de fonctionnement.

Les relations contrastées entre les chambres et les élus sont donc « une question d'une perpétuelle actualité ». Le modèle français est celui « du contre-rôle101(*) (contra-rotulus, à côté de ; « rotulus », rôle, registre : lire, et exploiter, des informations, à côté des collectivités examinées) qui est exercé par les chambres, participe de l'équilibre de la décentralisation.

Il est confié à une juridiction indépendante, composée de magistrat statuant collégialement, placée en dehors des influences, qu'il s'agisse de celles des représentants et services de l'Etat, ou de celles des organismes locaux vérifiés ».

Et surtout, l'auteur de réitérer la vocation de cette institution, qui est celle de contrôler les comptes en affirmant la plus stricte neutralité dans la conduite des affaires dont elle a la charge, tout en jouant le rôle qui est le sien dans l'éclairage de certains choix publics. La mission du magistrat financier reste donc emprunt de cet ethos de haut fonctionnaire, dont la vocation sert la collectivité nationale et les collectivités locales.

Ce socle idéologique reste à rapporter, peut-être, à la particularité de la construction de l'idéologie Service Public, devenu un enjeu et une ressource légitime, au fil du développement des institutions étatiques et de l'intervention de l'Etat. Ce qui fait, qu'aujourd'hui, les institutions, acteurs ou instances de contrôle puisent dans cette idéologie afin de justifier leurs interventions.

Aussi, surdéterminées par les logiques de corps et par l'histoire d'une institution prestigieuse, les solutions proposées ne peuvent être qu'un aménagement des dispositions existantes, telles qu'elles peuvent être conçues et réalisées au sein d'un espace institutionnel animé par des hauts fonctionnaires conscients de leurs responsabilité et de leurs compétences.

Gilles Cazenave ne propose pas de solutions particulières si ce n'est une plus grande attention apportée à l'échange, au dialogue et à la publicité.

Pierre Fabre102(*), Président de Section à la chambre régionale de Provence-Alpes-Côtes d'Azur, aurait une solution plus iconoclaste qui consisterait à fusionner les tribunaux administratifs avec les CRC. La solution aurait l'avantage, d'après l'auteur, de simplifier les structures administratives françaises, de faciliter d'éventuels recours contentieux, d'éviter des conflits de compétence et de créer un corps unique de magistrats, interchangeables dans les deux spécialités, administratives ou financières.

Bernard Levallois103(*) préconise deux suggestions plus en rapport avec l'existant « La première serait de faire rentrer au Conseil supérieur des chambres régionales des comptes des représentants qualifiés des collectivités territoriales » afin qu'ils puissent participer à d'éventuelles propositions de réorganisation des chambres. « La deuxième serait de créer, auprès de ce Conseil supérieur, par exemple, un comité chargé de définir les normes de contrôle à exercer par les chambres régionales des comptes ».

Laquelle question est traitée par la Commission des méthodes, à la Cour des comptes, qui n'a aucun pouvoir normatif et qui n'est qu'une simple instance de coordination.

« Même s'il n'est pas toujours facile de dire où s'arrête le contrôle financier et où commence le contrôle d'opportunité, nous devons absolument nous pencher sur le risque de glissement vers le contrôle d'opportunité, insiste Daniel Hoeffel, sénateur du Bas-Rhin. Les élus locaux, en contrepartie de la transparence de leur gestion, sont en droit d'attendre le respect de leur fonction ».

Aussi, faute d'une base légale suscitant un consensus notable, pour Philippe Limouzin-Lamothe, « les magistrats financiers s'assurent du respect du cadre légal et réglementaire et vérifient que les obligations de transparence sont satisfaites. Les critères d'appréciation économiques viennent en second, et en second seulement »104(*).

Pour Roland Ries, à l'époque Maire de Strasbourg, « il faut s'acheminer vers l'élaboration de références communes, connues et acceptées de tous. Une fois les modalités pratiques du contrôle bien définies en amont, le débat sur l'opportunité perdra de son acuité ».

* 97 « Collectivités locales et chambres régionales des comptes : pour un partenariat », Gazette des Communes n°1532 du 10/01/2001, p.10.

* 98 « Les chambres régionales des comptes ne peuvent être conseillers et contrôleurs », La Gazette des communes n°1475 du 02/11/1998., p. 31.

* 99 Bernard Levallois, Président de la chambre régionale des comptes d'Alsace, , conseiller référendaire à la Cour des comptes, « Collectivités locales et chambres régionales des comptes : pour un partenariat », La Gazette des Communes n°1532 du 10/01/2000, p.10

* 100 « Régulateurs ou gendarmes de la décentralisation », Droit et Décentralisation, Pouvoirs Locaux n°30, p.58-60.

* 101 Gilles Cazenave, Président de la chambre régionale des comptes de Haute-Loire, conseiller référendaire à la Cour des comptes, « Comment évoluent les relations entre les chambres régionales et les élus locaux », Droit et Décentralisation, Pouvoirs Locaux, n°30, p.46-54.

* 102 La Gazette des communes, « Manifeste en faveur de la fusion des CRC et des TA »,

* 103 La Gazette des Communes, « Collectivités locales et chambres régionales des comptes : pour un partenariat », n°1532 du 10/01/2001, p.10.

* 104 Extraits de la Gazette des Communes, n°1482 du 21/12/1998.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo